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CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 08/04/2025, 23TL01194, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler, à titre principal, la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 10 décembre 2019 par laquelle la ministre des armées a refusé de lui accorder le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux, de surseoir à statuer sur la liquidation de ses droits à pension militaire d'invalidité et d'ordonner avant dire-droit une expertise médicale confiée à un médecin oto-rhino-laryngologiste à des fins d'évaluation de son taux d'invalidité en lien avec ses acouphènes et d'enjoindre, à titre subsidiaire, à l'administration de procéder au versement d'une pension militaire d'invalidité à son profit pour ses deux infirmités à un taux global de 45% et, en tout état de cause, de mettre les entiers dépens de l'instance à la charge de la sous-direction des pensions du ministère des armées et de mettre à la charge de la sous-direction des pensions du ministère des armées la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°2003889 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité avait rejeté la demande de M. A... tendant à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité, a enjoint au ministre des armées d'accorder une pension militaire d'invalidité à M. A... au taux de 45% à compter du 19 juillet 2018 pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par un recours et un mémoire, enregistrés le 23 mai 2023 et le 9 octobre 2024, le ministre des armées demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement rendu le 30 mars 2023 ; 2°) de réformer ce jugement en ce qu'il a accordé un taux d'invalidité de 30% pour l'infirmité " hypoacousie bilatérale " et un taux d'invalidité de 10% pour l'infirmité " acouphènes bilatéraux permanents " portant ainsi le taux d'invalidité global à 45% ; 3°) de dire et juger que l'infirmité " hypoacousie bilatérale " et l'infirmité " acouphènes bilatéraux permanents " ne sont pas imputables au service. Il soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'insuffisance de motivation notamment sur le moyen de défense tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise la commission de recours de l'invalidité en appliquant au litige l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction résultant de la loi n°2018-607 du 13 juillet 2018 ; - il est entaché d'une erreur dans l'application des dispositions sur la présomption d'imputabilité, qui, contrairement à ce qui a été retenu au point 4, relève des dispositions de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et non de l'article L. 121-1 du même code ; - il est entaché d'une erreur de droit dans la mesure où le 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction résultant de la loi n°2018-607 du 13 juillet 2018, n'était pas applicable au litige ; - il est entaché d'une erreur d'appréciation ; - le lien avec le service pour l'infirmité " hypoacousie bilatérale " n'est pas établi, dans la cadre d'un régime de preuve, sans présomption, M. A... se bornant à faire état, sans autre précision, d'une exposition au bruit lésionnel depuis 1987 ; - c'est à tort que le tribunal a retenu, s'agissant de l'infirmité " hypoacousie bilatérale ", que l'exclusion de l'aggravation de la maladie professionnelle, en l'occurrence celle du tableau n°42, ne pouvait concerner qu'une pathologie préalablement retenue ; - c'est à tort que le tribunal a retenu l'infirmité " acouphènes bilatéraux permanents ", constatée le 1er avril 2019, et donc postérieurement à sa demande de pension, présentée le 18 juillet 2018 ; au surplus, aucune preuve de l'imputabilité au service de cette infirmité n'est rapportée ; au surplus, la condition relative au délai de prise en charge d'une année figurant dans le tableau n°42 n'est pas remplie ; - il est demandé à la cour de substituer le motif tiré du défaut d'imputabilité au service de chacune des deux infirmités à celui, retenu à tort par ses services puis par la commission de recours de l'invalidité. Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2024, M. B... A..., représenté par Me Anav-Arlaud, de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Bénédicte Anav-Arlaud, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué, dans l'hypothèse d'une annulation du jugement, à la confirmation d'une pension militaire d'invalidité à un taux de 45% et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens, ainsi qu'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif est parfaitement fondé ; - d'autres moyens d'annulation peuvent, à titre subsidiaire, être accueillis, à savoir l'incompétence du signataire de la décision de la commission de recours de l'invalidité, l'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, ainsi que l'erreur de droit et l'erreur de fait commises dans l'appréciation du bruit lésionnel ; - dans l'hypothèse d'une annulation du jugement contesté, il y aura lieu de retenir que le ministre doit lui accorder une pension militaire d'invalidité au taux de 45% ; - dans l'hypothèse d'une annulation du jugement contesté, il y aura lieu d'ordonner une expertise afin de déterminer le taux d'invalidité lié à ses acouphènes, infirmité qui a été sous-évaluée. Par une ordonnance du 11 octobre 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 12 novembre 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... s'est engagé dans l'armée de l'air, le 6 janvier 1986, y a exercé des fonctions de mécanicien aéronautique et a obtenu, en dernier lieu, le grade d'adjudant-chef, avant d'être radié des contrôles, le 1er décembre 2020. Par une demande, enregistrée le 19 juillet 2018, l'intéressé a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux. Par une décision du 10 décembre 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. L'intéressé a alors formé, le 28 mai 2020, le recours administratif préalable obligatoire, que la commission de recours de l'invalidité a, par une décision du 16 octobre 2020, également rejeté. Par un jugement, rendu le 30 mars 2023, le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité avait rejeté la demande de pension de M. A... et a, d'autre part, enjoint au ministre des armées d'accorder une pension militaire d'invalidité à M. A... au taux de 45% à compter du 19 juillet 2018 pour les infirmités d'hypoacousie bilatérale et d'acouphènes permanents bilatéraux dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le ministre des armées relève appel de ce jugement. Sur l'office du juge : 2. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige. Sur la régularité du jugement : 3. Le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé la décision de la commission de recours d'invalidité au motif qu'en opposant l'aggravation d'une surdité professionnelle dans le cadre de l'instruction d'une première demande de pension militaire d'invalidité présentée par un militaire, cette autorité administrative avait entaché la décision contestée d'une erreur de droit et s'est, d'autre part, prononcé sur le droit à pension de M. A.... 4. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. " 5. Si le ministre des armées soutient que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé en l'absence de réponse, par les premiers juges, au moyen de défense tiré de l'erreur de droit qui aurait été également commise par la commission de recours de l'invalidité en déclarant applicable au litige la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, issu de l'article 54 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense, les premiers juges, qui, ainsi qu'il a été dit au point 3, ont annulé la décision de la commission en retenant une autre erreur de droit et, avant de se statuer sur le droit à pension, dans le respect de l'office du juge des pensions militaires d'invalidité, rappelé au point 2, ont retenu l'application de ces dispositions en indiquant que M. A... en remplissait toutes les conditions, et ont ainsi suffisamment motivé leur décision. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour défaut de motivation doit être écarté. 6. D'autre part, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le ministre des armées ne peut donc utilement soutenir que le tribunal administratif de Nîmes aurait commis une erreur de droit ou une erreur d'appréciation en appliquant au litige la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Sur le bien-fondé du jugement : 7. Le ministre des armées, dans son recours, ne conteste pas le motif d'illégalité retenu par le tribunal administratif de Nîmes et tiré de ce que la commission de recours de l'invalidité, en excluant l'aggravation de la surdité professionnelle dans le cadre d'une première demande de pension, a entaché sa décision d'une erreur de droit. Toutefois, en soutenant que l'imputabilité au service de la maladie professionnelle invoquée n'est pas établie, il sollicite, d'une part, une substitution de motif et soutient, d'autre part, que la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre n'était pas entrée en vigueur et n'était donc pas applicable. En ce qui concerne l'applicabilité de la présomption d'imputabilité d'une maladie professionnelle à la demande de M. A... : 8. S'il appartient au juge administratif, saisi d'un litige en matière de pensions, de rechercher si des dispositions législatives ou réglementaires intervenues postérieurement au fait générateur à la date duquel les droits à pension de l'intéressé doivent être normalement appréciés sont susceptibles d'affecter ces droits, c'est à la condition que le législateur ait entendu leur donner une telle portée. 9. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code, issu du II de l'article 54 de la loi du loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense : " Est présumée imputable au service : (...) 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ; ". Selon l'article L. 121-2-3 de ce code : " La recherche d'imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d'incorporation. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée ". 10. Eu égard à l'objet des dispositions du 3° de l'article L. 121-2 code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, qui est de faire bénéficier les militaires des mêmes droits que ceux dont disposent les agents publics en application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires et en l'absence de dispositions prévoyant une application différée, contrairement à celles prévues au 1° de l'article L. 121-2, qui a trait aux pensions militaires d'invalidité en matière de blessures, le législateur a eu pour volonté, ainsi, au demeurant, que les travaux préparatoires de la loi le confirment, que la présomption d'imputabilité au service des maladies contractées dans ou à l'occasion du service qu'elles prévoient soit d'application immédiate. En conséquence et conformément au principe rappelé au point 8, il y a lieu d'appliquer au présent litige le 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa version issue de la loi du 13 juillet 2018 précitée. 11. Si les conditions sont réunies pour que l'intéressé puisse bénéficier du régime de présomption légale d'imputabilité, cette présomption ne peut être écartée que lorsque l'administration apporte une preuve contraire établissant qu'une cause étrangère au service est à l'origine de façon directe et certaine de l'infirmité invoquée ou de son aggravation. Une telle preuve contraire ne saurait également résulter d'une simple hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. En ce qui concerne l'imputabilité au service des infirmités : S'agissant l'infirmité " hypoacousie bilatérale " : 12. D'une part, si le fait générateur du droit à pension de M. A... a eu lieu, le 25 février 2002, date à laquelle sa surdité neurosensorielle a été diagnostiquée, il résulte de ce qui a été dit au point précédent, qu'il peut bénéficier de la présomption d'imputabilité prévue par le 3° de l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et qui renvoient au code de la sécurité sociale. 13. D'autre part, selon l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. ". Aux termes du tableau n°42 annexé au livre IV du code de la sécurité sociale : " Désignation des maladies : Déficit audiométrique bilatéral par lésion cochléaire irréversible. Ce déficit est évalué par une audiométrie effectuée de trois semaines à un an après cessation de l'exposition aux bruits lésionnels, en cabine insonorisée avec un audiomètre calibré. (...). Aucune aggravation de cette surdité professionnelle ne peut être prise en compte, sauf en cas de nouvelle exposition au bruit lésionnel ". 14. Il résulte de l'instruction que M. A..., qui disposait d'une audition normale avant son engagement dans l'armée de l'air, justifie avoir exercé, et ce, y compris après 2012, les fonctions de mécanicien aux équipements de sécurité sur Mirage 4 et Mirage 2000 de 1987 à 2001, puis celles de mécanicien cellule piste sur Mirage 2000 de 2001 à 2013 impliquant la mise en route de réacteurs, puis de responsable de maintenance vecteur et moteur pour la période de 2014 à 2015, et de chef de ligne avec des fonctions de mécanicien de cellule hydraulique, et donc avoir effectué des travaux mentionnés dans le tableau n°42 des maladies professionnelles précité et notamment les travaux liés à la mise au point, aux essais et à la propulsion des moteurs thermiques ou encore ceux qui ont lieu à proximité des aéronefs. En conséquence, au regard d'une exposition sonore prolongée, compte tenu des travaux exercés, l'imputabilité au service de l'hypoacousie dont souffre M. A... est établie, contrairement à ce que soutient le ministre, qui ne peut utilement soutenir, pour renverser la présomption ainsi instituée, que l'exposition au brut lésionnel n'aurait été qu'exceptionnelle à compter de 2014. S'agissant de l'infirmité " acouphènes permanents bilatéraux " : 15. Compte tenu de ce qui a été dit au point 10, M. A... peut également bénéficier de la présomption prévue à l'article L. 121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour les acouphènes permanents, visés également par sa demande de pension, le 19 juillet 2018, qui mentionnait, de façon très large, ses déficiences auditives, et diagnostiquées dans le rapport de l'expertise médicale, ordonnée par la sous-direction des pensions et dont les conclusions ont été remises le 1er avril 2019. En outre, ce même rapport relève la présence d'acouphènes permanents quotidiens sans retenir explicitement une forme bilatérale mais en indiquant que cette déficience est en lien avec l'infirmité auditive principale et doit donner lieu à une majoration du taux d'invalidité de 10%. Il suit de là que l'imputabilité au service doit également être retenue sans que le ministre des armées puisse utilement invoquer la condition tenant au délai d'un an de prise en charge en lien avec une durée d'exposition minimale d'un an, la circonstance que les acouphènes n'ayant été diagnostiqués que dans le rapport remis le 1er avril 2019 n'y faisant pas obstacle dès lors que le lien avec la surdité neurosensorielle, constatée le 25 février 2002, est établi. 16. Il résulte de tout ce qui précède qu'il ne peut être fait droit à la substitution de motif sollicitée en défense tirée de l'absence d'imputabilité au service des infirmités dont est atteint M. A.... En ce qui concerne le taux d'invalidité global : 17. Aux termes de l'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension est concédée : (...) 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le taux global d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : a) 30 % en cas d'infirmité unique ; b) 40 % en cas d'infirmités multiples. ". Aux termes de l'article L. 125-8 de ce code : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 125-9, dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne une invalidité de 100 %, le taux d'invalidité est calculé ainsi qu'il suit : (...) 4° Quand l'infirmité principale entraîne une invalidité d'au moins 20 %, le taux d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires est majoré de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. ". 18. D'une part, il est constant, ainsi qu'il a été dit au point 7, que l'aggravation de la surdité professionnelle à partir de 2012 a été exclue à tort. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 14, M. A... a continué d'être soumis au bruit lésionnel pour la période postérieure à 2012, contrairement à ce qu'a retenu le médecin-expert chargé des pensions militaires d'invalidité, dans son avis émis du 22 mai 2019. 19. D'autre part, il résulte de l'instruction et notamment du rapport remis le 1er avril 2019 que les taux d'invalidité relatifs à chacune des deux infirmités de M. A... ont été respectivement évalués à 30% et 10%. Ainsi, après application du seuil de droit commun de 40% en cas d'infirmités multiples et des modalités de calcul du taux d'invalidité globale de M. A..., telles que fixées aux articles L. 125-3 et L. 125-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, les droits à pension militaire d'invalidité de M. A..., qui n'est pas fondé à soutenir que ses acouphènes, qui ont donné lieu à deux expertises médicales retenant un taux d'invalidité identique, auraient été sous-évalués, doivent être fixés au taux global de 45%. 20. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise relative au taux d'invalidité retenu en ce qui concerne l'infirmité liée aux acouphènes permanents sollicitée, à titre subsidiaire, par l'appelant que le ministre des armées n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 16 octobre 2020 par laquelle la commission de recours de l'invalidité avait rejeté la demande de M. A... tendant à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité et a fixé son taux d'invalidité au taux global de 45%. Sur les frais liés au litige : 21. D'une part, en l'absence, dans la présente instance, de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, M. A... n'est pas fondé, en tout état de cause, à en solliciter le remboursement. 22. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : Le recours du ministre des armées est rejeté. Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. B... A.... Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure, Mme Bentolila, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025. La rapporteure, D. Teuly-Desportes La présidente, A. Geslan-DemaretLa greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°23TL01194 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 08/04/2025, 23TL01476, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2021 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre, d'enjoindre au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre à compter du 1e septembre 2017, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2106669 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 21 juin 2023, M. A... B..., représenté par Me Cacciapaglia, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 14 avril 2023 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2021 par lequel le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre ; 3°) d'enjoindre au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre, avec effet rétroactif au 1er septembre 2017, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sur le fondement de l'article L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal a commis une erreur d'appréciation et une erreur de droit en ne prenant pas en considération tous les éléments rapportés par lui quant à l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre et en rejetant sa requête ; - l'arrêté du préfet de la zone de défense et de sécurité Sud du 22 octobre 2021 n'est pas motivé en fait ; - il méconnaît l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, le décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires et l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, compte tenu notamment de la situation de harcèlement moral qu'il a subie ; - il est entaché d'erreur de droit dès lors que le bénéfice du congé provisoire de congé d'invalidité temporaire imputable au service ne lui a pas été accordé ; - l'avis de la commission de réforme n'est pas motivé ; - l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il écarte l'imputabilité au service alors que tous les médecins qui l'ont examiné ont indiqué que la pathologie dont il souffrait alors était exclusivement imputable au service ; - il est entaché d'erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé lié par l'avis de la commission de réforme interdépartementale rendu le 16 septembre 2021 et, n'usant pas de son pouvoir discrétionnaire, a commis une incompétence négative. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er novembre 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - les moyens tirés de l'erreur d'appréciation et de l'erreur de droit qu'auraient commises les premiers juges sont inopérants ; - la méconnaissance des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne peut être utilement invoquée dès lors que, la maladie de M. B... ayant été diagnostiquée avant le 24 février 2019, date d'entrée en vigueur des dispositions relatives au congé d'invalidité temporaire imputable au service, la demande de reconnaissance d'imputabilité au service, présentée avant cette date, était exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues avant l'entrée en vigueur des dispositions relatives au nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service ; - les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 30 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 29 mai 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n°84-11 du 11 janvier 1984 ; - le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Akel, substituant Me Cacciapaglia, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B..., gardien de la paix au sein de la direction départementale de la sécurité publique des Pyrénées-Orientales, a été placé en congé maladie ordinaire à compter du 1er septembre 2017. Il a présenté, le 7 décembre 2018, une demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Par une décision du 18 février 2020, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a rejeté cette demande. Par un jugement n° 1901771, 2001600 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud de réexaminer la demande de M. B.... Après avoir recueilli l'avis, défavorable, de la commission de réforme daté du 16 septembre 2021, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud a rejeté cette demande par arrêté du 22 octobre 2021. Par jugement 14 avril 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. B... relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. Il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Dès lors, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges, qui se rapportent au bien-fondé du jugement et non à sa régularité, ne peuvent être utilement invoqués. Sur le bien-fondé du jugement : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". Aux termes de ceux de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Il résulte de ces dispositions que le refus de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie est au nombre des décisions qui doivent être motivées. 4. La décision attaquée, après avoir visé les dispositions législatives et règlementaires applicables et l'avis défavorable de la commission de réforme interdépartementale du 16 septembre 2021, se fonde sur l'absence d'élément permettant d'établir un lien direct et certain entre l'activité professionnelle et la pathologie dont souffre M. B.... Elle satisfait ainsi à l'exigence de motivation en fait prescrite par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, alors en vigueur : "(...) La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages rapports et constatations propres à éclairer son avis. (...) L'avis formulé en application du premier alinéa de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être accompagné de ses motifs. / Le secrétariat de la commission de réforme informe le fonctionnaire : - de la date à laquelle la commission de réforme examinera son dossier ; - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de se faire entendre par la commission de réforme, de même que de faire entendre le médecin et la personne de son choix. / L'avis de la commission de réforme est communiqué au fonctionnaire sur sa demande. (...) ". 6. M. B... ne peut utilement soutenir que l'avis de la commission de réforme émis à l'issue de sa séance du 16 septembre 2021, sur l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre, n'est pas suffisamment motivé, dès lors qu'il résulte des dispositions précitées que la motivation de l'avis de la commission de réforme n'est exigée que dans le cas où elle se prononce en matière de pension d'invalidité imputable au service. 7. En troisième lieu, s'il vise l'avis défavorable de la commission de réforme, il ne résulte pas des termes de l'arrêté que le préfet se serait estimé lié par les termes de cet avis et n'aurait pas usé de son pouvoir discrétionnaire. Le moyen tiré de l'incompétence négative du préfet doit être écarté. 8. En quatrième lieu, les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique d'Etat, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 24 février 2019, du décret du 21 février 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique de l'Etat, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 9. Par ailleurs, aux termes de l'article 22 du décret du 21 février 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique d'Etat : " Le fonctionnaire en congé à la suite d'un accident ou d'une maladie imputable au service continue de bénéficier de ce congé jusqu'à son terme. Toute prolongation de ce congé postérieure à l'entrée en vigueur du présent décret est accordée dans les conditions prévues au chapitre Ier. Les conditions de forme et de délais prévues aux articles 47-2 à 47-7 du décret du 14 mars 1986 précité ne sont pas applicables aux fonctionnaires ayant déposé une déclaration d'accident ou de maladie professionnelle avant l'entrée en vigueur du présent décret. / Les délais mentionnés à l'article 47-3 du même décret courent à compter du premier jour du deuxième mois suivant la publication du présent décret lorsqu'un accident ou une maladie n'a pas fait l'objet d'une déclaration avant cette date. ". 10. Il résulte de ces dispositions que les conditions de forme et de délai prévues par les articles 47-1 à 47-20 du décret du 14 mars 1986 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique d'Etat, dans sa rédaction issue du décret du 21 février 2019, sont uniquement applicables, d'une part, aux demandes de prolongation d'un congé pour accident de service ou pour maladie imputable au service pour une période débutant après le 24 février 2019 et, d'autre part, aux demandes initiales de congé pour invalidité temporaire imputable au service motivées par un accident ou une maladie dont la déclaration a été déposée après cette date. 11. Dès lors que sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service a été présentée antérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions du décret du 21 février 2019, M. B... ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Il ne peut davantage, et en tout état de cause, utilement soutenir qu'il aurait dû être placé en congé d'invalidité temporaire imputable au service à l'issue du délai maximal d'instruction de sa demande de cinq mois, en application des dispositions de l'article 47-5 du décret du 14 mai 1986, issues du décret du 21 février 2019. 12. En dernier lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) / Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service (...) Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 13. D'une part, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 14. D'autre part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. 15. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été arrêté pour maladie à compter du 1er septembre 2017 en raison d'un symptôme anxio-dépressif réactionnel. Était alors engagée à son encontre une procédure disciplinaire concernant des faits d'abandon de poste le 31 janvier 2017 à l'occasion d'une session en cour d'assises, de désobéissance délibérée à une instruction donnée en s'absentant de son service le 3 février 2017 pour participer à une séance de sport, et en raison d'une publication sur la page d'un réseau social, le 21 février 2017, alors qu'il se trouvait en congé maladie, du programme prévisionnel relatif au déplacement du ministre de l'intérieur dans les Pyrénées-Orientales, accompagnée de commentaires ironiques. Si M. B... fait état d'échanges dont ressort une consigne donnée à un officier de modifier la date d'un rapport le concernant, de ce qu'un rapport a été rédigé à la suite de l'incident du 31 janvier 2017 par un supérieur, en vue, selon M. B..., de lui nuire, de ce qu'il a été fait mention, dans le cadre de l'enquête administrative, de son mandat syndical, et du dépôt d'une main courante et d'une constitution de partie civile, de tels faits ne sont pas suffisants pour faire présumer une situation de harcèlement moral. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient M. B..., les rapports médicaux qu'il produit, qui décrivent le ressenti de ce dernier par rapport à sa situation professionnelle, à la procédure disciplinaire engagée à son encontre, ainsi que son investissement idéalisé par rapport à sa profession, vécue comme une vocation, ne concluent pas à l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre. Bien que M. B... n'ait pas présenté d'antécédent psychique, il n'est pas établi que sa maladie soit en lien direct avec l'exercice de ses fonctions ou avec ses conditions de travail. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, ni n'a entaché son erreur d'appréciation quant à la situation de harcèlement moral qu'il invoque. 16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Sur les conclusions à fin d'injonction : 17. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation de M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction de la requête doivent être rejetées. Sur les frais exposés à l'occasion du litige : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée pour information au préfet de la zone de défense et de sécurité Sud. Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Teuly-Desportes, présidente assesseure, Mme Dumez-Fauchille, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025. La rapporteure, V. Dumez-Fauchille La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 23TL01476
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 03/04/2025, 23BX01964, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite née le 7 février 2021 par laquelle l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) lui a d'abord refusé l'octroi du bénéfice de l'aide aux enfants d'anciens harkis, ainsi que la décision du 17 mai 2021 en tant que l'Office a limité à 12 000 euros le montant qui lui est attribué au titre de cette aide. Par un jugement n° 2103902, 2206635 du 16 mai 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 13 juillet 2023, 25 octobre et 22 novembre 2024, M. A..., représenté par Me Rouget, demande à la cour : 1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire au titre de la première instance enregistrée sous le n° 2206635 ; 2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 mai 2023 ; 3°) d'annuler la décision du 17 mai 2021 par laquelle l'ONACVG a limité à 12 000 euros le montant qui lui est attribué au titre de l'aide aux enfants d'anciens harkis ; 4°) d'enjoindre à l'ONACVG de prendre une nouvelle décision à son bénéfice lui accordant une aide ne pouvant être inférieure à la somme de 1 000 000 d'euros au regard de la spécificité de sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui fournir un certificat de résidence correspondant à sa durée réelle de résidence au camp de Bias ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal a refusé de lui octroyer le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire pour l'instance n°2206635 ; - il remplit les conditions édictées par le décret du 28 décembre 2018 instituant un dispositif d'aide à destination des enfants d'anciens harkis, et il a également été recruté par la 3ème compagnie et a servi au sein de cette unité ; il a été présent dans les camps plus de 90 jours, puisque l'administration admet qu'il y est resté 5 296 jours ; en réalité, si le camp a fermé officiellement le 31 décembre 1976, il y demeure toujours ; - le décret ne prévoyant pas de plafond au montant de l'aide, ce montant de l'aide a été fixé sans base légale ; - il soulève, par voie d'exception l'illégalité de l'instruction n°2020-01/ARM/ONACGV, qui fixe notamment un plafond de 10 000 euros par personne ; le décret de 2018 n'autorise pas l'ONACVG à fixer un plafond de l'aide, mais se borne à lui indiquer qu'il convient d'utiliser le budget alloué ; l'imprécision de l'instruction conduit à une rupture du principe d'égalité qui doit être appliqué aux bénéficiaires, en ce que leur situation fondamentalement différente, se traduit par une indemnisation quasiment identique ; cette instruction conduit à allouer l'aide à des personnes qui n'entrent pas dans le champ ou à allouer des sommes plus importantes que celle qui lui a été attribuée ; - le montant de l'aide octroyée est manifestement insuffisant ; dans la mesure où l'ONACVG ne justifie pas de l'épuisement de ses crédits, rien ne justifie que sa situation ait fait l'objet d'un traitement dans la limite de ce barème, alors qu'il justifie d'une situation particulière dont la réalité n'a pas été examinée ; quand bien même l'Office n'aurait pas une obligation de consommer l'entièreté des crédits qui lui sont alloués, la sous-consommation des crédits prive ceux qui en ont le plus besoin du bénéfice d'une aide ; - il a subi des conditions de vie indigne dans le camp, victime de racisme post-colonialisme et de pratiques discriminatoires ; il a été victime d'un traitement injustifié dans l'application des lois et mesures sociales destinées aux anciens harkis et rapatriés ; l'ONACVG doit prendre en compte les souffrances subies. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2024, l'ONACVG conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Par une décision n° 2023/008357 du 14 septembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par un courrier du 6 mars 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'admission provisoire de M. A... à l'aide juridictionnelle dans l'affaire enregistrée en première instance sous le n° 2206635, dès lors que la décision par laquelle le tribunal administratif a prononcé un non-lieu à statuer sur cette demande n'est pas susceptible de recours. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2022-229 du 23 février 2022 ; - le décret n°2018-1320 du 28 décembre 2018 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo, - les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public, - et les observations de Me Rouget, représentant M. B... A.... Une note en délibéré présentée par M. A... a été enregistrée le 14 mars 2025. Considérant ce qui suit : 1. Le 6 octobre 2020, M. B... A..., né le 19 avril 1954 à Tifrit Nait Oumalek (Algérie), a demandé à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG), en qualité d'enfant d'ancien harki ayant personnellement séjourné dans un camp à la suite du rapatriement en France de sa famille, à bénéficier du dispositif d'aide mis en place par le décret du 28 décembre 2018 à destination des enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés. Par une décision du 17 mai 2021, procédant au retrait d'une précédente décision implicite de rejet, la directrice générale de l'ONACVG a attribué une aide financière de 12 000 euros à M. A.... Celui-ci a alors saisi le tribunal administratif de Bordeaux de demandes tendant à l'annulation, d'abord de la décision implicite de rejet de sa demande, puis de la décision expresse du 17 mai 2021 en tant qu'elle ne fait que partiellement droit à sa demande en ne lui accordant qu'une somme de 12 000 euros. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 16 mai 2023 par lequel le tribunal a rejeté lesdites demandes. Sur le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire au titre de la première instance : 2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 62 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles : " (...). La décision statuant sur la demande d'admission provisoire n'est pas susceptible de recours ". 3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que la décision par laquelle tribunal a statué sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M. A... n'est pas susceptible de recours. Par suite, ses conclusions d'appel dirigées contre le non-lieu à statuer prononcé par les premiers juges sur sa demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle dans l'affaire enregistrée au greffe du tribunal sous le n° 2206635 ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables. Sur le bien-fondé du jugement : 4. Aux termes de l'article 1er du décret du 28 décembre 2018 instituant un dispositif d'aide à destination des enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Les enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés, qui ont séjourné pendant au moins quatre-vingt-dix jours dans un camp ou un hameau de forestage à la suite du rapatriement de leur famille sur le territoire national, et qui résident en France de manière stable et effective, peuvent demander, jusqu'au 31 décembre 2022, une aide de solidarité lorsque leurs ressources ne leur permettent pas de s'acquitter de dépenses ayant un caractère essentiel dans les domaines de la santé, du logement ou de la formation et de l'insertion professionnelle. / La liste des camps ou hameaux de forestage mentionnés au premier alinéa figure en annexe au présent décret. / Nul ne peut bénéficier de plus d'une aide au titre de chacun des trois domaines mentionnés au premier alinéa. Le montant de chaque aide, qui fait l'objet d'un seul versement, ne peut être révisé. ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " La décision d'attribution de l'aide est prise, dans la limite des crédits prévus à ce titre au budget de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, par le directeur général de l'Office, après instruction du service départemental ou territorial compétent. / Pour attribuer l'aide et en déterminer le montant, le directeur général de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre prend en compte, d'une part, la durée de séjour du demandeur dans le camp ou le hameau de forestage et les conditions de scolarisation qu'il y a connues, d'autre part, l'ensemble des éléments de sa situation personnelle en ce qui concerne la composition de son foyer, le niveau de ses revenus et de ses charges, ainsi que la nature et le montant des dépenses mentionnées au premier alinéa de l'article 1er demeurant à sa charge après prise en compte, le cas échéant, des dispositifs de droit commun existants susceptibles de les couvrir. ". 5. Par une instruction n°2020-01/ARM/ONACVG du 19 mai 2020 relative au dispositif d'aide de solidarité à destination des enfants d'ex-membres des formations supplétives et assimilées ayant servi l'armée française pendant la guerre d'Algérie, l'ONACVG a défini les modalités de traitement des demandes au titre du dispositif institué par le décret du 28 décembre 2018. L'instruction précise d'une part, que ce dispositif est destiné à apporter une aide de solidarité à ses destinataires afin de prendre en charge des dépenses ayant un caractère essentiel, dans les domaines du logement, de la santé, de la formation et de l'insertion professionnelle et d'autre part, que les services doivent apprécier la situation et le besoin des demandeurs en prenant en compte trois critères liés au temps cumulé des séjours dans les camps, les conditions de scolarisation dérogatoires de droit commun, et la situation personnelle du demandeur. Son annexe, intitulée " Fiche d'aide à la décision ", fixe la méthode de modulation de ces critères en fonction d'éléments d'information et indique que, pour assurer une homogénéité dans le traitement des demandes, les montants d'aide peuvent varier, selon que le demandeur relève d'une priorité 1, 2, 3 ou 4, dans des limites indicatives fixées entre 500 euros et 10 000 euros. 6. Alors que l'article 3 du décret du 28 décembre 2018 précité prévoit que la décision d'attribution de l'aide est prise dans la limite des crédits prévus à ce titre au budget de l'ONACVG, et après appréciation de la situation du demandeur, l'instruction du 19 mai 2020 en cause n'a fait qu'encadrer l'action de l'administration, afin d'en assurer la cohérence dans la limite des crédits disponibles, en précisant, par la voie de lignes directrices, et sans édicter de condition nouvelle, ni à l'inverse étendre le champ d'application du dispositif, les critères applicables permettant de mettre en œuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation. Contrairement à ce que M. A... soutient, les modalités de traitement des demandes telles que précisément définies dans l'instruction du 19 mai 2020, qui conduisent à l'attribution d'une aide, comprise, en principe, entre 500 euros et 10 000 euros, en fonction du degré de priorité, de 1 à 4, du demandeur, résultant du nombre de points obtenus à chaque critère, garantissent le respect du principe d'égalité entre les bénéficiaires. D'ailleurs, l'appréciation particulière de la situation de M. A... a conduit l'ONACVG, au regard des éléments d'information en sa possession, à lui attribuer, au-delà du plafond indicatif de 10 000 euros, une aide de 12 000 euros. Par suite, et quand bien même les modalités de traitement des demandes définies par l'instruction du 19 mai 2020 ne conduiraient pas, dans les faits, à un épuisement des crédits prévus à ce titre, M. A... n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'exception, que l'instruction serait entachée d'illégalité. 7. Il ressort des pièces du dossier que, pour déterminer le montant de l'aide attribuée à M. A..., la directrice générale de l'ONACVG a tenu compte des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, et notamment la circonstance qu'il a passé 5 296 jours dans les camps d'accueil de Bourg Lastic, la Rye le Vigeant et Bias entre le 1er octobre 1962 et le 31 décembre 1976, date de fermeture administrative du camp de Bias et qu'il est propriétaire d'une maison depuis 2011. Elle a également tenu compte des conditions de scolarisation dérogatoire des structures dans lesquelles il a vécu entre 1962 et 1975, ainsi que du niveau de ses ressources, évalué entre 0 et 300 euros par mois. Si M. A... produit des devis de rénovation de sa maison, datés du 11 janvier 2023, ils sont postérieurs à la date de la décision attaquée, à laquelle s'apprécie sa légalité. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces versées au dossier que M. A... présenterait, au niveau de son environnement social et de sa santé, une situation d'isolement géographique, familial ou social, ni qu'il aurait toujours ses enfants à charge ou même qu'il serait en situation de handicap ou de dépendance. Par suite, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que la directrice générale de l'ONACVG a évalué à la somme de 12 000 euros le montant de l'aide de solidarité mentionnée à l'article 1er du décret du 28 décembre 2018 attribuée à M. A.... 8. Si M. A... soutient qu'il a subi des préjudices en lien avec l'indignité des conditions d'accueil et de vie dans les lieux où les harkis ont été hébergés en France, entre 1962 et 1975, cette circonstance qui serait, le cas échéant, de nature à engager la responsabilité de l'Etat dans le cadre du régime particulier d'indemnisation prévue par la loi du 23 février 2022 visée ci-dessus, est sans incidence sur la légalité de l'aide versée dans le cadre du dispositif instauré par le décret du 28 décembre 2018. 9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction sous astreinte et celles liées aux frais de l'instance doivent être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Délibéré après l'audience du 13 mars 2025 à laquelle siégeaient : Mme Evelyne Balzamo, présidente, Mme Béatrice Molina-Andreo, présidente-assesseure, Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025. La rapporteure, Béatrice Molina-Andréo La présidente, Evelyne Balzamo La greffière, Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 23BX01964
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 25/03/2025, 24MA00240, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 11 mai 2022 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours dirigé, d'une part, contre la décision du 22 novembre 2021 de la ministre des armées lui concédant une pension militaire d'invalidité à titre temporaire, pour la période du 15 octobre 2019 au 14 octobre 2022, au taux global de 10 % pour l'infirmité " séquelles d'entorses de la cheville droite, traitement chirurgical et algodystrophie secondaire : raideur légère en flexion plantaire avec un secteur fonctionnel conservé, boiterie, cicatrice post-chirurgicale hypoesthésiante ", et, d'autre part, contre la décision du 1er décembre 2021 de la ministre des armées rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelles d'entorse de la cheville gauche avec chondropathie tibiale médiale : douleurs externes avec amplitudes articulaires normales, léger tiroir de l'articulation astragalienne ". M. B... A... a également demandé au tribunal d'enjoindre au ministre des armées de fixer le taux d'invalidité de son infirmité " séquelles d'entorses de la cheville droite (...) " au taux de 25% et celui de son infirmité " séquelles d'entorse de la cheville gauche (...) " au taux de 20%, et d'ouvrir ses droits à pension à compter du 15 octobre 2019 pour la première infirmité et à compter du 11 janvier 2021 pour la seconde infirmité, ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise avant-dire droit. Par un jugement n° 2204617 du 14 décembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté l'ensemble des demandes de M. A.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 3 février 2024, M. A..., représenté par Me Stark, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2204617 du 14 décembre 2023 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) de juger, d'une part, que les séquelles d'entorse de la cheville droite doivent être pensionnées au taux d'invalidité de 20 %, et, d'autre part, que les séquelles d'entorse de la cheville gauche doivent être pensionnées au taux d'invalidité de 10 % ; 3°) de condamner l'administration à établir un nouveau titre de pension et une nouvelle fiche descriptive correspondant à ses infirmités avec effet au jour de l'enregistrement de ses demandes de pensions ; 4°) à titre subsidiaire, de désigner un médecin expert qui aura pour mission de fixer les taux d'invalidité des infirmités en se plaçant aux dates d'enregistrement des demandes ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 950 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit dès lors que le tribunal ne s'est pas placé à la date d'enregistrement des demandes de pension pour apprécier le taux d'invalidité de ses infirmités, ce dont il a résulté une sous-évaluation de celui-ci ; - en ce qui concerne la cheville droite, le seul certificat médical du 30 septembre 2019 importe puisqu'il a été établi juste avant l'enregistrement de la demande, et il résulte de celui-ci une importante gêne fonctionnelle justifiant un taux d'invalidité de 20 % ; - en ce qui concerne la cheville gauche, les documents essentiels à prendre en compte sont le compte-rendu d'examen radiographique et échographie du 16 juin 2020 et le compte-rendu d'arthroscanner du 6 octobre 2020, dont il résulte une gêne fonctionnelle justifiant un taux d'invalidité de 10 %. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2024, le ministre des armées et des anciens combattants conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés. Un courrier du 23 octobre 2024 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 2 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., engagé le 28 mai 2013 dans la légion étrangère, a été radié des contrôles le 2 février 2023. Le 15 octobre 2019, il a présenté une première demande de pension militaire d'invalidité pour une infirmité à la cheville droite. Le 11 janvier 2021, il a présenté une seconde demande de pension pour une infirmité à la cheville gauche. Par un arrêté ministériel du 22 novembre 2021, une pension militaire d'invalidité temporaire lui a été concédée, pour la période du 15 octobre 2019 au 14 octobre 2022, au taux global de 10% pour l'infirmité " séquelles d'entorses de la cheville droite, traitement chirurgical et algodystrophie secondaire : raideur légère en flexion plantaire avec un secteur fonctionnel conservé, boiterie, cicatrice post-chirurgicale hypoesthésiante ". Et par une décision du 1er décembre 2021, la ministre a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelles d'entorse de la cheville gauche avec chondropathie tibiale médiale : douleurs externes avec amplitudes articulaires normales, léger tiroir de l'articulation astragalienne ", au motif que le taux d'invalidité de cette infirmité est inférieur au minimum indemnisable de 10%. Saisie d'un recours de M. A... contre ces décisions, la commission de recours de l'invalidité, par décision du 11 mai 2022, a, d'une part, modifié le libellé de l'infirmité relative à la cheville droite, et, d'autre part, maintenu les taux d'invalidité fixés par l'administration au titre des deux infirmités. Par un jugement du 14 décembre 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que le taux de l'infirmité de la cheville droite soit porté à 25 % et celui de l'infirmité de la cheville gauche à 10 %. 2. En premier lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une erreur de droit. 3. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 121-4 du même code : " (...) Aucune pension n'est concédée en deçà d'un taux d'invalidité de 10 %. ". Selon l'article L. 121-5 de ce code : " La pension est concédée : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...) ". Enfin, l'article L. 151-6 dudit code dispose que : " La décision comportant attribution de pension est motivée. Elle fait ressortir les faits et documents ou les raisons d'ordre médical établissant que l'infirmité provient de l'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 (...). / Elle est accompagnée en outre, d'une évaluation de l'invalidité qui doit être motivée par des raisons médicales et comporter le diagnostic de l'infirmité et sa description complète, faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte à l'état général qui justifie le pourcentage attribué. ". 4. Par ailleurs, en application de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, le degré d'infirmité est déterminé au jour du dépôt de la demande de l'intéressé, sans qu'il soit possible de tenir compte d'éléments d'aggravation postérieurs à cette date. L'administration doit dès lors se placer à la date de la demande de pension pour évaluer le degré d'invalidité entraîné par l'infirmité invoquée et cette évaluation doit, en application des termes mêmes de l'article L. 151-6 du même code, tenir compte de la gêne fonctionnelle engendrée dans le temps par ces infirmités. 5. En ce qui concerne, d'abord, l'infirmité n° 1, désormais libellée, à la suite de la décision de la commission de recours de l'invalidité, " séquelles d'entorses de la cheville droite, traitement chirurgical et algodystrophie secondaire : raideur légère en flexion plantaire avec un secteur fonctionnel conservé, boiterie, instabilité notable, déficit proprioceptif, léger déficit musculaire, gêne fonctionnelle à la marche, hypoesthésie de la cicatrice chirurgicale ", il résulte de l'instruction que l'expert mandaté par l'administration a estimé, dans ses rapports remis les 5 août et 8 septembre 2021, que le taux d'invalidité devait être fixé à 25 % en raison d'une flexion plantaire limitée à - 10°et d'une flexion dorsale limitée à - 5°par rapport aux amplitudes normales. L'expert a également relevé une raideur au niveau de l'articulation tibio-talienne, la sous-astragalienne étant normale ainsi que la sous-talienne, une cicatrice chirurgicale avec hypoesthésie au niveau de la cicatrice, et sur le plan fonctionnel, l'absence de pratiques d'activités sportives. Toutefois, alors que, pour confirmer le taux de l'invalidité fixé à seulement 10 % par l'administration, la commission de recours de l'invalidité, suivant en cela l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité du 14 septembre 2021, a relevé que le déficit articulaire ainsi objectivé était minime avec un secteur fonctionnel utile conservé à la marche, et que l'avis précité du 14 septembre 2021 mentionne plus précisément une limitation de la flexion dorsale non significative et une limitation minime de la flexion plantaire, le certificat médical établi le 30 septembre 2019 par le chirurgien orthopédique et arthroscopique consulté par M. A..., seul document établi avant le dépôt de la demande de pension le 15 octobre 2019, qui objective certes une instabilité de l'articulation avec indication opératoire, ne permet pour autant nullement d'établir, en l'absence de toute description quant à la gêne fonctionnelle induite par la pathologie, qu'à la date de cette demande, le taux d'invalidité de la cheville droite était supérieur à 10 %. Au demeurant, à supposer même que les raideurs de l'articulation constatées par le médecin mandaté par l'administration au cours de l'instruction de la demande de pension aient existé dès le 15 octobre 2019, le guide-barème des invalidités produit par le ministre indique, en ce qui concerne le pied, qu'un taux d'invalidité situé entre 10 % et 30 % doit être appliqué, s'agissant de raideurs articulaires, en cas d'angle de mobilité défavorable (pied talus ou équin), situation qui n'est décrite par aucun des documents et certificats médicaux produits dans l'instance. Dans ces conditions, l'appelant n'est pas fondé à demander l'application d'un taux de 25 % en ce qui concerne l'infirmité n° 1 portant sur sa cheville droite. 6. En ce qui concerne, ensuite, l'infirmité n° 2 libellée " séquelles d'entorse de la cheville gauche avec chondropathie tibiale médiale : douleurs externes avec amplitudes articulaires normales, léger tiroir de l'articulation astragalienne ", l'expert mandaté par l'administration a estimé que le taux d'invalidité devait être fixé à 20 % sur un état antérieur de 5 %, résultant d'un traumatisme survenu en service le 26 août 2014 et responsable de laxité et d'instabilité de la cheville, d'une chondropathie tibiale médiale ouverte ulcérative de stade IV objectivée par un arthroscanner du 6 octobre 2020, ainsi que d'un steppage et d'un déficit de l'extenseur du gros orteil. Toutefois, selon ce même médecin, les appuis unipodaux à gauche sont bien tenus, la marche sur les pointes se réalise normalement sans limitation des amplitudes articulaires de la cheville, et les muscles sont cotés à 4 sur une échelle allant de 0 à 5 au niveau de la jambe et de la cheville gauche. De plus, si l'arthroscanner précité évoque des séquelles d'entorse du ligament collatéral avec dilacération partielle d'un des trois faisceaux du ligament latéral externe de façon partielle, il ne mentionne aucune rupture ligamentaire. Dans son avis du 14 septembre 2021, le médecin en charge des pensions militaires d'invalidité a estimé qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, et alors que, tant le steppage que le déficit du releveur du gros orteil relèvent d'une infirmité distincte et n'ont donc pas à être pris en compte dans l'évaluation, les seules douleurs ressenties par l'agent ne peuvent davantage être prises en compte sans être accompagnées d'un retentissement fonctionnel. Or, alors que les amplitudes articulaires sont normales, le seul compte-rendu d'arthroscopie précité, dépourvu de toute analyse sur les gênes et retentissements fonctionnels des suites de l'entorse survenue le 26 août 2014, ne saurait suffire à établir, contrairement à ce que soutient l'appelant, que le taux d'invalidité de l'infirmité au titre de laquelle il a sollicité une pension était, à la date de sa demande, supérieur à 10 %. 7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes. Par suite, l'ensemble de ses conclusions doit être rejeté, en ce compris celles formulées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 25 mars 2025. N° 24MA00240 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 03/04/2025, 22BX00843, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal des pensions militaires de Bordeaux, qui a transmis sa requête au tribunal administratif de Bordeaux, d'organiser une expertise avant dire droit, d'annuler la décision du 17 décembre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité, et d'enjoindre à l'administration de lui concéder une pension au taux de 60 % pour l'infirmité de syndrome pyramidal dont il souffre avec perte de sensibilité du membre supérieur droit. Par un jugement n° 1905573 du 4 janvier 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par un arrêt avant-dire droit du 4 avril 2024, la cour a ordonné une expertise. Le rapport d'expertise a été enregistré le 9 septembre 2024. Par un mémoire enregistré le 8 novembre 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - contrairement à ce qu'indique l'expert, les premiers signes de la maladie sont apparus au niveau du membre inférieur droit avant l'accident survenu le 30 septembre 2013, comme le montre le courrier d'un médecin de l'hôpital Kaia de Kaboul du 28 novembre 2013 indiquant que depuis début septembre 2013, M. C... présentait un début de boiterie douloureuse, une trépidation épileptoïde de la cheville droite ayant alors été mise en évidence ; - il ne ressort pas du rapport circonstancié que les douleurs survenues le 30 septembre 2013 seraient consécutives à un " véritable traumatisme " ; en l'absence de choc particulier, un geste ou une manœuvre sportive ne sauraient être considérés comme un traumatisme ; - en indiquant que la survenue de symptômes n'était pas certaine en l'absence de traumatisme et que des symptômes survenus sans traumatisme auraient pu être bénins, l'expert émet des hypothèses et non des certitudes ; - la circonstance que l'accident de service a pu précipiter, révéler ou favoriser l'évolution de l'affection imputable au service ne peut être retenue au titre de la preuve ; le taux de 60 % retenu par l'expert est étranger au service. M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 juin 2022. Par ordonnance du 8 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 9 janvier 2025. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique, - et les observations de Monsieur C.... Considérant ce qui suit : 1. M. C..., engagé dans l'armée de terre le 1er mai 1995 et affecté depuis 1997 au 13ème régiment de dragons parachutistes, a présenté brutalement des cervicalgies et des paresthésies du membre supérieur droit le 30 septembre 2013, lors d'une séance de sport programmée, alors qu'il se trouvait en mission en Afghanistan. Un syndrome pyramidal a été diagnostiqué fin octobre 2013 à l'hôpital français Kaïa de Kaboul. A son retour en France, M. C... a été pris en charge à l'hôpital d'instruction des armées Robert Picqué, où une IRM a permis de diagnostiquer une myélopathie cervicarthrosique sur un canal cervical étroit constitutionnel, avec un hypersignal intramédullaire en C5-C6. Une décompression médullaire par laminoplastie C3-C7 avec ostéosynthèse a été réalisée le 12 mars 2014, ce qui a permis une régression des signes neurologiques, mais M. C... a conservé comme séquelles un syndrome pyramidal caractérisé notamment par des tremblements des membres inférieurs et une perte de sensibilité de la main droite. Le 15 janvier 2015, il a sollicité à ce titre une pension militaire d'invalidité, et la ministre des armées a rejeté sa demande par une décision du 17 décembre 2018. M. C... a relevé appel du jugement du 4 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. Par un arrêt avant dire droit du 4 avril 2024, la cour a reconnu l'existence d'un accident de service et ordonné une expertise médicale. L'expert a déposé son rapport le 9 septembre 2024. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande : " Ouvrent droit à pension : / (...) / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / (...). " Aux termes de l'article L 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) " Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. / Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage. " Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine consécutive à un fait précis de service. 3. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport circonstancié du 31 janvier 2014, que le 30 septembre 2013, M. C... a ressenti brutalement des douleurs cervicales et des fourmillements du membre supérieur droit lors d'un match de volley-ball organisé dans le cadre du service, et qu'une faiblesse des membres est survenue au décours immédiat de cet épisode. L'expert missionné par la cour confirme les conclusions de l'expert désigné par l'administration, selon lesquelles le traumatisme cervical survenu lors du match de volley-ball a déclenché une myélopathie cervicarthrosique préexistante, jusqu'alors asymptomatique. Si le rapport circonstancié ne précise pas que les symptômes sont survenus à la réception d'un saut (smash), l'existence de ce choc cervical traumatique, mentionné dans des lettres de l'hôpital d'instruction des armées Robert Picqué du 9 décembre 2013 et du centre médical des armées de Bordeaux du 26 novembre 2024, n'est pas sérieusement contestée. Le courrier d'un médecin de l'hôpital français de Kaboul du 28 novembre 2013 adressant M. C... à un confrère pour l'exploration d'un syndrome tétrapyramidal apparu depuis deux mois, c'est-à-dire depuis l'accident de service du 30 septembre 2013, faisait certes état d'une trépidation épileptoïde de la cheville droite constatée lors d'une consultation de septembre 2013 antérieure à l'accident pour une boiterie douloureuse du genou droit en lien avec un traumatisme rotulien ancien. Toutefois, cette trépidation n'était pas comparable aux symptômes, constatés postérieurement à l'accident, de franc syndrome pyramidal, caractérisé d'une part par une trépidation épileptoïde inépuisable bilatérale des membres inférieurs prédominant à droite avec des réflexes ostéotendineux vifs diffusés, polycinétiques et un signe de Babinski gauche, et d'autre part, par une atteinte des membres supérieurs avec une hypoesthésie du bord cubital de la main droite et un signe de Hoffman bilatéral. Selon l'expert missionné par la cour, la myélopathie cervicarthrosique asymptomatique préexistante constituait un facteur de risque de développement ultérieur de symptômes radiculaires et médullaires, et probablement un facteur de fragilité en cas de traumatisme cervical, mais la survenue de symptômes en l'absence de traumatisme n'était absolument pas certaine, dès lors que certaines myélopathies radiologiquement visibles restent parfaitement asymptomatiques. L'expert relève en outre que d'éventuels symptômes auraient pu être bénins, ce qui était le cas de la trépidation de la cheville droite constatée avant l'accident, en l'absence de tout élément faisant état d'une gêne pour l'intéressé ou d'une inquiétude du médecin qui l'a examiné avant l'accident. L'expert en conclut que malgré l'état antérieur asymptomatique de M. C..., les troubles neurologiques dont il souffre désormais sont totalement imputables à l'accident survenu le 30 septembre 2013. Ainsi, dès lors que la filiation entre cet accident de service et l'aggravation de la myélopathie cervicarthrosique préexistante est établie, le ministre des armées ne saurait reprocher à l'expert de s'être fondé sur des hypothèses et non sur des certitudes pour retenir une imputabilité totale des séquelles à cet accident. En outre, le taux d'invalidité de 60 % retenu par les deux expertises n'est pas contesté. Par suite, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a refusé d'annuler la décision de la ministre des armées du 17 décembre 2018, et il y a lieu d'enjoindre au ministre des armées de lui concéder, à compter du 15 janvier 2015, un droit à pension au taux de 60 % au titre de l'infirmité " séquelles de blessure aux cervicales - syndrome pyramidal - troubles sensitifs du cubital de la main droite ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. 4. Les frais de l'expertise ordonnée par la cour, liquidés et taxés à la somme de 1 800 euros par une ordonnance du président de la cour du 24 septembre 2024, doivent être mis à la charge de l'Etat. 5. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Moumni. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1905573 du 4 janvier 2022 et la décision de la ministre des armées du 17 décembre 2018 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de concéder à M. C..., à compter du 15 janvier 2015, un droit à pension au taux de 60 % au titre de l'infirmité " séquelles de blessure aux cervicales - syndrome pyramidal - troubles sensitifs du cubital de la main droite ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Les frais de l'expertise ordonnée par la cour, liquidés et taxés à la somme de 1 800 euros par une ordonnance du président de la cour du 24 septembre 2024, sont mis à la charge de l'Etat. Article 4 : L'Etat versera à Me Moumni une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au ministre des armées et à Me Moumni. Une copie en sera adressée pour information au docteur A..., expert. Délibéré après l'audience du 11 mars 2025 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Sabrina Ladoire, présidente-assesseure, M. Antoine Rives, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025. La rapporteure, Sabrina B... La présidente, Catherine GiraultLe greffier, Fabrice Benoit La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22BX00843
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de VERSAILLES, 2ème chambre, 28/03/2025, 23VE02648, Inédit au recueil Lebon
Vu les autres pièces du dossier. La clôture de l'instruction a été fixée au 9 octobre 2024. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Mornet, - et les conclusions de M. Frémont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 8 juin 1939, s'est engagé dans l'armée de l'air française, au sein de laquelle il était pilote d'avion. Il a été victime, le 12 octobre 1964, alors qu'il devait effectuer une mission de reconnaissance côtière " hors guerre ", de l'écrasement au sol de son avion au décollage, sur la piste de l'aéroport de Tulear, à Madagascar. Extrait de l'avion en feu, il a été évacué le 18 octobre 1964 vers l'hôpital de Percy, à Clamart. Il a notamment subi de graves brûlures thermiques oculaires, dont il a conservé des séquelles, avec une baisse de l'acuité visuelle. Il a été radié des cadres au 31 juillet 1980, et une pension militaire d'invalidité lui a été attribuée, au taux global de 95 %, pour six infirmités dont celle relative à ces séquelles. 2. M. B... a été opéré, le 17 mai 2018, pour une cataracte à l'œil gauche, et les suites ont été marquées par l'apparition d'un œdème maculaire. Il est également atteint de cataracte à l'œil droit. Estimant que les blessures liées au service, subies en 1964, ont ainsi connu une aggravation, il a sollicité la révision de sa pension le 6 janvier 2020. Un expert ophtalmologue a rendu son rapport sur cette demande le 25 juillet 2020, et le ministre des armées lui a concédé, par un arrêté du 23 novembre 2020, une pension militaire d'invalidité au taux global de 95 %, à compter du 6 janvier 2020, maintenant la situation antérieure. L'intéressé a contesté cette décision devant la commission des recours de l'invalidité, en application des dispositions de l'article L. 711-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par une décision du 22 septembre 2021, la commission a rejeté son recours. M. B... demande à la cour d'annuler le jugement du 6 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision, qui s'est substituée à celle du ministre, et à ce qu'une mesure d'expertise soit ordonnée. 3. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service. ". Aux termes de l'article L. 121-2 de ce code : " Est présumée imputable au service : / 1° Toute blessure constatée par suite d'un accident, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 151-2 dudit code : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. / Il en est de même de la date d'entrée en jouissance de la pension révisée pour aggravation ou pour prise en compte d'une infirmité nouvelle. (...) ". Et aux termes de l'article L. 154-1 du même code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". 4. Il résulte des dispositions précitées que le droit à pension est destiné à réparer toutes les conséquences des faits de service dommageables telles qu'elles se révèlent par suite de l'évolution physiologique, pour autant qu'aucune cause étrangère, telle qu'une affection distincte de l'affection pensionnée, ne vienne, pour sa part, aggraver l'état de l'intéressé. Ainsi, l'aggravation de l'infirmité initiale, si elle est seulement due au vieillissement, peut justifier une révision du taux de pension. En revanche, si le vieillissement cause une nouvelle infirmité, distincte de l'infirmité pensionnée, qui contribue à l'aggravation de celle-ci, lesdites dispositions font obstacle à cette révision, l'aggravation devant alors être regardée comme étant due à une cause étrangère à l'infirmité pensionnée. Dès lors, au cas où une première infirmité reconnue imputable au service a concouru, avec une affection ou un fait étranger au service, à provoquer, après le service, une infirmité nouvelle, celle-ci n'ouvre droit à pension que s'il est établi que l'infirmité antécédente a été la cause directe et déterminante de l'infirmité nouvelle. 5. M. B... soutient que l'apparition des cataractes bilatérales dont il est atteint a été causée par l'état fragilisé de ses yeux depuis l'accident dont il a été victime en 1964, dont les séquelles ont donné lieu à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise médicale réalisée par un médecin ophtalmologue le 25 juillet 2020, que la part non imputable au service des opacifications cornéennes est de 67 %, ce constat ayant été confirmé par l'avis rendu par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité le 2 octobre 2020. Alors qu'il résulte au demeurant des données de l'Assurance maladie, reprise en défense par le ministre des armées et non contestée par le requérant, que la cataracte est une maladie touchant plus de 20 % de la population après 65 ans et plus de 60 % des personnes après 85 ans, M. B... présente ainsi une pathologie liée à l'âge, évoluant pour son propre compte, distincte de l'affection pensionnée, celle-ci ne l'ayant pas causée de manière directe et déterminante. La circonstance que le médecin chargé de l'expertise du 25 juillet 2020 aurait relevé, à tort selon lui, qu'il s'était " présenté à l'expertise sans l'aide d'une tierce personne avec une stratégie d'environnement analytique de l'espace visuel ", est sans incidence à cet égard. M. B..., qui joint à sa requête des articles généraux de langue anglaise, ne produit aucun autre document, notamment médical, qui serait de nature à remettre en cause l'appréciation portée par la commission des recours de l'invalidité, ou à rendre utile la réalisation d'une nouvelle mesure d'expertise. 6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande, et que l'ensemble des conclusions de sa requête d'appel, y compris celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent par suite être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 13 mars 2025, à laquelle siégeaient : - M. Even, premier vice-président, président de chambre, - Mme Mornet, présidente assesseure, - M. Cozic, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2025. La rapporteure, G. MornetLe président, B. Even La greffière, S. de Sousa La République mande et ordonne au ministre des armées, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 23VE02648
Cours administrative d'appel
Versailles
Conseil d'État, 9ème chambre, 02/04/2025, 493180, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2020 par lequel le ministre de l'économie, des finances et de la relance lui a concédé une pension de retraite en tant qu'il révèle le refus de lui verser une rente viagère pour invalidité imputable au service prévue à l'article 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, d'enjoindre à l'Etat de lui octroyer, à la date de sa mise à la retraite, une pension augmentée de la rente viagère d'invalidité et de le condamner à lui verser les intérêts moratoires correspondant au retard à lui verser la différence entre la pension ainsi majorée et celle initialement octroyée. Par une ordonnance du 6 mai 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Dijon a transmis sa demande au tribunal administratif d'Orléans. Par un jugement n° 2101789 du 6 février 2024, ce tribunal a rejeté cette demande. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 avril et 8 juillet 2024 et le 3 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur, - les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., technicienne de 2ème classe au sein de l'administration pénitentiaire, a été victime le 1er mars 2011 d'un accident reconnu imputable au service. Placée en congé de longue maladie à compter du 23 janvier 2012 puis en congé de longue durée à compter du 31 août 2013, elle a présenté le 20 juin 2019 une demande de mise à la retraite pour invalidité, sur laquelle, au vu de l'expertise réalisée le 17 juillet 2019 par laquelle le médecin expert l'a déclarée inapte de manière totale et définitive à ses fonctions et à toutes fonctions et a fixé son taux d'invalidité à 40 %, la commission de réforme réunie le 20 janvier 2020 a émis un avis favorable. En exécution d'un arrêté du 5 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a émis un titre de pension concédant et liquidant sa pension de retraite sur le fondement de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite, pour invalidité non imputable au service. Mme B... se pourvoit en cassation contre le jugement du 6 février 2024 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de pension du 5 octobre 2020 en tant qu'il révèle le refus de lui octroyer une rente viagère pour invalidité imputable au service. 2. Aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps (...) peut être radié des cadres par anticipation (...) sur sa demande (...). / L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l'article L. 24 du présent code (...) ". Aux termes de l'article L. 28 du même code : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies à l'article L. 30 ter, avec la pension rémunérant les services. / (...) / Le montant de la rente d'invalidité est fixé à la fraction du traitement ou de la solde de base définis à l'article L. 15 égale au pourcentage d'invalidité (...) ". Aux termes de l'article L. 29 du même code : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ". Aux termes de l'article R. 38 du même code : " Le bénéfice de la rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 est attribuable si la radiation des cadres ou le décès en activité surviennent avant la limite d'âge et sont imputables à des blessures ou maladies résultant par origine ou aggravation d'un fait précis et déterminé de service ou de l'une des autres circonstances énumérées à l'article L. 27 ". 3. Il résulte de ces dispositions que le droit pour un fonctionnaire de bénéficier de la rente viagère d'invalidité prévue par l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite est subordonné à la condition que les blessures ou maladies contractées ou aggravées en service aient été de nature à entraîner, à elles seules ou non, la mise à la retraite de l'intéressé. 4. Il ressort des termes du jugement attaqué qu'alors qu'il était saisi du moyen tiré de ce que l'invalidité ayant justifié la mise à la retraite de la requérante était imputable au moins partiellement au service et qu'en outre le ministre chargé des pensions avait indiqué avoir demandé au ministère employeur de la requérante de chiffrer le taux d'invalidité propre aux séquelles de l'accident survenu en service, seul susceptible de donner lieu à une rente viagère d'invalidité, le tribunal administratif, après avoir relevé les contradictions existant entre les expertises médicales rendues successivement au sujet de la requérante, en a déduit qu'il n'était pas établi que le refus d'une rente viagère d'invalidité fût entaché d'une erreur d'appréciation. En statuant ainsi, sans rechercher, au besoin en faisant usage de ses pouvoirs d'instruction, si l'invalidité en cause était au moins partiellement imputable au service, le tribunal a commis une erreur de droit. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que Mme B... est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à payer à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 6 février 2024 du tribunal administratif d'Orléans est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif d'Orléans. Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Copie en sera adressée au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré à l'issue de la séance du 6 mars 2025 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur. Rendu le 2 avril 2025. La présidente : Signé : Mme Anne Egerszegi Le rapporteur : Signé : M. Benoît Chatard Le secrétaire : Signé : M. Brian Bouquet La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :ECLI:FR:CECHS:2025:493180.20250402
Conseil d'Etat
CAA de NANCY, 3ème chambre, 06/03/2025, 18NC03255, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Sur la requête du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, enregistrée sous le n° 18NC03255 et tendant à la réformation du jugement n° 1502686 du 28 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nancy a condamné l'Etat à verser à Mme B... G... une somme de 285 754,78 euros, ainsi qu'une rente viagère annuelle d'un montant de 2 964 euros, la cour, par un arrêt du 18 avril 2024, a ordonné avant dire droit une expertise médicale. Le rapport d'expertise a été enregistré au greffe de la cour le 1er octobre 2024. Par une ordonnance de la présidente de la cour du 15 octobre 2024, les frais et honoraires de l'expertise ont été liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros TTC. Par deux mémoires complémentaires, enregistrés les 19 novembre et 18 décembre 2024, la ministre de l'éducation nationale conclut à la réformation du jugement n° 1502686 du tribunal administratif de Nancy du 28 septembre 2018, au rejet, dans cette mesure, de la demande de première instance de Mme G... et, enfin, à ce que la cour sursoit à statuer dans l'attente de l'issue de l'action en responsabilité engagée par Mme G... devant le tribunal judiciaire de Nancy contre les parents de l'enfant à l'origine de l'accident de service du 19 juin 2007, ainsi que contre leur assureur. Elle soutient que : - conformément aux conclusions du dernier rapport d'expertise, Mme G... ne peut prétendre à une indemnisation pour ses dépenses de santé futures, dès lors que les traitements et biologiques nécessités par sa pathologie sont pris en charge à 100 % par la sécurité sociale au titre de son affection de longue durée ; - Mme G... ayant introduit une action en responsabilité devant le tribunal judiciaire contre les parents de l'élève, responsable de l'accident de service du 19 juin 2007 dont elle a été victime, et contre leur assureur, il lui appartient de justifier de l'issue de son action et du montant de l'indemnité qu'elle a pu, le cas échéant, obtenir ; - les prétentions indemnitaires de Mme G..., à supposer qu'elles puissent être augmentées en cause d'appel, sont manifestement excessives et doivent être ramenées à de plus justes proportions ; - il lui appartient de justifier, dans le cadre de la présente instance, de l'issue de l'action en responsabilité qu'elle a engagée devant le juge judiciaire et du montant de l'indemnité qu'elle a pu ou qu'elle peut obtenir au titre de cette action. Par un mémoire complémentaire, enregistré le 25 novembre 2024, Mme B... G..., représentée par Me Debuisson, conclut, par la voie de l'appel incident : 1°) à la réformation du jugement de première instance en tant qu'il s'est borné à condamner l'Etat à lui verser une somme totale de 285 754,78 euros et une rente viagère annuelle d'un montant de 2 964 euros ; 2°) à la condamnation de l'Etat à lui verser, en réparation des préjudices subis du fait de l'accident de service du 19 juin 2007, les sommes suivantes, assorties des intérêts au taux légal à compter de la demande préalable d'indemnisation du 26 juin 2015 et de leur capitalisation, à savoir : - 6 092,15 euros au titre des dépenses de santé actuelles, - 2 354 068,60 euros ou, subsidiairement, 960 857,60 euros au titre de l'aide humaine temporaire, - 110 168,08 euros au titre des frais divers, - 198 550,59 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels, - 205 119,72 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, - 55 000 euros au titre des souffrances endurées, - 10 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, - 136 002,72 euros au titre de l'assistance par tierce personne pour la période allant du 22 avril 2022 au 21 avril 2025, - 2 152 967,58 euros au titre de l'assistance par tierce personne permanente ou, à défaut, une rente viagère de 45 324,72 euros par an, assortie d'une provision de 90 649,44 euros et revalorisée conformément aux dispositions des articles L. 434-17 et L. 161-25 du code de la sécurité sociale et du coût du travail, ainsi que 281 660,76 euros supplémentaires dans l'hypothèse d'une grossesse ou d'une adoption, - 26 705,15 euros au titre des dépenses de santé exposées après consolidation et 1 580 199,87 euros au titre des dépenses de santé futures, - 82 833,01 euros au titre des préjudices permanents exceptionnels, - 4 199,20 euros au titre des frais de logement adapté, - 168 132,30 euros au titre des frais de véhicule adapté, - 5 115 505,01 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle, - 576 394 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, - 10 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, - 683 928 euros au titre du préjudice d'agrément, - 70 000 euros au titre du préjudice sexuel, - 100 000 euros au titre du préjudice d'établissement, - 100 000 euros au titre du préjudice d'anxiété, - 1 250 000 euros au titre du préjudice extrapatrimonial évolutif ; 3°) à la confirmation du jugement de première instance en ce qu'il a mis à la charge de l'Etat, d'une part, les frais de l'expertise ordonnée en première instance, liquidés et taxés à la somme de 1 800 euros par l'ordonnance n° 1502686 de la présidente du tribunal administratif de Nancy du 22 mai 2018, d'autre part, le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 4°) à la mise à la charge de l'Etat, d'une part, des frais des deux expertises ordonnées en appel, liquidés et taxés respectivement aux sommes de 2 460 et de 1 500 euros, d'autre part, de la somme de 7 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le lien de causalité et d'imputabilité entre son accident de service du 19 juin 2007 et son insuffisance hypophysaire est établi ; - ses conclusions à fin d'indemnisation, présentées dans le cadre de son appel incident au titre de l'assistance par tierce personne avant et après consolidation, au titre de la demande de remboursement des frais de déplacement après consolidation, au titre des frais de chauffage, au titre du déficit fonctionnel temporaire et permanent et au titre des frais de son médecin conseil lors des opérations d'expertise, sont recevables ; - le dernier rapport d'expertise confirme que la date de consolidation de son état de santé doit être fixée au 21 avril 2022, soit le lendemain de l'intervention chirurgicale destinée à traiter son syndrome du canal carpien droit imputable à son endocrinopathie ; - elle est fondée à réclamer, s'agissant de ses préjudices patrimoniaux temporaires, la somme de 6 092,15 euros au titre des dépenses de santé actuelles, les sommes de 2 354 068,60 euros ou, subsidiairement, de 960 857,60 euros au titre de l'assistance par tierce personne avant consolidation, la somme de 110 168,08 euros au titre des frais divers et la somme de 198 550,59 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels ; - elle est également fondée à réclamer, s'agissant des préjudices extrapatrimoniaux temporaires, la somme de 205 119,72 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, la somme de 55 000 euros au titre des souffrances endurées et la somme de 10 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; - elle est encore fondée à réclamer, s'agissant des préjudices patrimoniaux permanents, la somme de 136 002,72 euros au titre de l'assistance par tierce personne pour la période comprise entre le 22 avril 2022 et le 21 avril 2025, la somme de 2 152 967,58 euros ou, à défaut, une rente viagère annuelle de 45 324,72 euros, ainsi que la somme supplémentaire de 281 660,76 euros en cas de naissance d'un enfant, au titre de l'assistance par tierce personne pour la période postérieure au 21 avril 2025, la somme de 26 705,15 euros au titre des dépenses de santé après consolidation déjà exposées, la somme de 1 580 199,87 euros au titre des dépenses de santé futures, la somme de 82 833,01 euros au titre des préjudices permanents exceptionnels, la somme de 4 199,20 euros au titre des frais de logement adapté, la somme de 168 132,30 euros au titre des frais de véhicule adapté et la somme de 5 115 505,01 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs et de l'incidence professionnelle ; - elle est fondée, enfin, à réclamer, s'agissant des préjudices extrapatrimoniaux permanents, la somme de 576 394 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, la somme de 683 928 euros au titre du préjudice d'agrément, la somme de 10 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, la somme de 100 000 euros au titre du préjudice d'établissement ; la somme de 70 000 euros au titre du préjudice sexuel ; la somme de 100 000 euros au titre du préjudice d'anxiété ; la somme de 1 250 000 euros au titre du préjudice extrapatrimonial évolutif. Deux mémoires présentés pour Mme G... ont été enregistrés les 18 décembre 2024 et 6 janvier 2025 et n'ont pas été communiqués. A la demande de la cour, le département de l'Hérault a produit des pièces qui ont été enregistrées le 23 janvier 2025 et communiquées le même jour. Postérieurement à la clôture d'instruction du 6 janvier 2025, un mémoire, présenté pour Mme G..., par Me Debuisson, a été reçu le 29 janvier 2025. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'éducation ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Meisse, - et les conclusions de M. Marchal, rapporteur public. Considérant ce qui suit : Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires de Mme G... : 1. D'une part, lorsque l'étendue réelle des conséquences dommageables d'un même fait n'est connue que postérieurement au jugement de première instance, la partie requérante ou défenderesse est recevable à augmenter en appel le montant de ses prétentions par rapport au montant de l'indemnité demandée devant les premiers juges. 2. Il résulte de l'instruction que le rapport de l'expertise judiciaire ordonnée par le tribunal administratif de Nancy, établi le 30 mars 2018, avait expressément exclu l'hypothèse d'une insuffisance hypophysaire et retenu uniquement, en lien avec l'accident de service du 19 juin 2017, un traumatisme crânien. Si l'existence d'un lien de causalité entre l'accident de service et l'insuffisance hypophysaire post traumatique, dont souffre Mme G..., a été admis successivement par le jugement contesté du tribunal administratif de Nancy du 28 septembre 2018, puis par l'arrêt avant dire droit de la cour administrative d'appel de Nancy du 17 novembre 2020, il résulte de l'instruction que la nature et l'étendue des conséquences dommageables de cette pathologie n'ont pu être déterminées avec précision qu'à compter du mois de février 2022, date à laquelle a été définitivement arrêté, dans son principe, le traitement substitutif le plus complet destiné à compenser les déficits hormonaux de la victime. Dans ces conditions, le dommage de l'intéressée doit être regardé comme ayant été révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement de première instance. Par suite, il y a lieu d'écarter la fin de non-recevoir du ministre de l'éducation et de la jeunesse, tirée de ce que les conclusions indemnitaires incidentes de Mme G..., présentées à hauteur d'appel, ne sont pas recevables en tant qu'elles excèdent la somme de 1 461 975,97 euros, dont le versement était demandé en première instance. 3. D'autre part, la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou le soient pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges. Il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué. 4. Le dommage de Mme G... s'étant révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement de première instance, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'éducation et de la jeunesse tirée de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de l'intéressée, en tant qu'elles tendent à la réparation de certains chefs de préjudice non invoqués en première instance, doit également être écartée dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur. 5. Enfin, contrairement aux allégations de la ministre de l'éducation nationale, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de l'action en responsabilité engagée par Mme G... devant le tribunal judiciaire de Nancy contre les parents de l'enfant à l'origine de l'accident de service du 19 juin 2007, ainsi que contre leur assureur. Les conclusions présentées en ce sens ne peuvent qu'être rejetées. Sur la date de consolidation de l'état de santé de Mme G... : 6. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que l'état de santé de Mme G... doit être regardé comme consolidé à la date du 21 avril 2022. La fixation par l'experte d'une telle date, qui intervient au lendemain de l'intervention chirurgicale destinée à soigner un syndrome du canal carpien imputable à son endocrinopathie, coïncide avec la mise en place du traitement substitutif le plus complet permettant de stopper l'évolution de la pathologie, qui, sous réserve d'adaptations de doses toujours nécessaires, n'a plus besoin d'être modifié dans son principe. 7. En l'absence de contestation sur ce point de la part des parties, il y a donc lieu de retenir le 21 avril 2022 comme date de consolidation de l'état de santé de Mme G.... Sur les préjudices de Mme G... : En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux de Mme G... : S'agissant de la perte de gains professionnels et de l'incidence professionnelle : 8. D'une part, aux termes du deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, alors en vigueur : " Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; ". Et aux termes de l'article 65 de la même loi, alors en vigueur : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité. / Les conditions d'attribution ainsi que les modalités de concession, de liquidation, de paiement et de révision de l'allocation temporaire d'invalidité sont fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine également les maladies d'origine professionnelle. ". 9. D'autre part, aux termes de l'article 27 de code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé (...). ". Et aux termes du premier alinéa de l'article L. 28 du même code : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable (...) avec la pension rémunérant les services. ". 10. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle, ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 11. Il ne résulte pas de l'instruction que l'accident de service du 19 juin 2007 serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. Par suite, l'allocation temporaire d'invalidité, puis la rente viagère d'invalidité instituées par les dispositions précitées ayant pour objet de réparer forfaitairement les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par cet accident, les conclusions indemnitaires présentées par Mme G... au titre de ces chefs de préjudice doivent être rejetées. S'agissant des dépenses de santé : 12. Il résulte de l'instruction, spécialement du rapport d'expertise du 1er octobre 2024, que, depuis le 6 avril 2018, Mme G... bénéficie de la reconnaissance du statut d'affection de longue durée et que la plupart des prestations médicales en lien avec sa pathologie, dont les traitements substitutifs aux déficits hormonaux et les bilans biologiques nécessaires à l'adaptation des doses, sont pris en charge à 100 %. Selon ce même rapport, si l'intéressée a besoin d'un accompagnement psychologique, compte tenu de l'existence d'une anxiété post-traumatique causée par un retard de diagnostic de près de dix ans, la prise en charge des thérapies actives ou de soutien qui lui dispensées, telles que l'acupuncture, l'ostéopathie, les cures thermales, la kinésithérapie ou encore le recours à des compléments alimentaires, à des probiotiques et à de la phytothérapie, dont l'efficacité n'a fait l'objet d'aucune validation scientifique, n'est pas justifiée. En revanche, la nécessité pour Mme G... de recourir à des pansements pour protéger les sites d'implantation des injections hormonales n'est pas contestée par l'experte. De même, il résulte du rapport d'expertise du 27 mai 2022, établi à la demande de l'intéressée, que celle-ci souffre d'incontinence urinaire en lien avec l'accident de service du 19 juin 2007 nécessitant l'usage d'alèses et de protège-matelas et qu'elle présente, en outre, une sécheresse oculaire engendrée par ses déficits hormonaux. 13. D'une part, s'agissant des dépenses de santé exposées entre l'accident de service du 19 juin 2007 et la date de consolidation du 21 avril 2022 et non prises en charge dans le cadre du régime de l'affection longue durée, la victime sollicite le versement d'une somme globale de 6 092,15 euros. Compte tenu de ce qui a été dit au point 11 du présent arrêt, Mme G... est seulement fondée à solliciter le versement d'une somme de 1 962,01 euros pour l'achat des alèses et des protège-matelas, dont il convient toutefois de déduire l'aide de 1 655,85 euros perçue à cet effet au titre de la prestation de compensation du handicap, soit un reste à charge effectif de 306,16 euros, de 149,90 euros pour l'achat de la glacière électrique destinée à la conservation de ses traitements médicamenteux, et de 285,96 euros au titre des frais demeurés à sa charge, depuis respectivement juin 2018 et décembre 2021, lors de l'achat des pansements et des produits destinés au traitement de sa sécheresse oculaire. Elle est également fondée à solliciter le versement d'une somme de 424,19 euros, dont 47 euros de dépassement d'honoraires, 367 euros de frais d'hospitalisation et 10,19 euros de frais pharmaceutique, au titre des frais demeurés à sa charge lors de l'intervention chirurgicale du 20 avril 2022 destinée à soigner un syndrome du canal carpien causé par son endocrinopathie. Enfin, elle est encore fondée à solliciter le versement d'une somme totale de 1 484,93 euros au titre du remboursement des participations forfaitaires et des franchises médicales prévues respectivement aux II et III de l'article L. 160-13 du code de la sécurité sociale. 14. Il résulte de ce qui précède qu'il sera fait une exacte appréciation des dépenses de santé exposées par Mme G... au cours de la période comprise entre le 19 juin 2007 et le 21 avril 2022, en lui allouant une somme totale de 2 651,14 euros. 15. D'autre part, s'agissant des dépenses de santé exposées entre le 22 avril 2022 et le 6 mars 20215, date de mise à disposition du présent arrêt, il n'est pas établi que les dépenses exposées par Mme G... pour l'acquisition d'une ceinture lombaire, pour des consultations ostéopathiques de juin 2023 à novembre 2024, pour une électromyographie de la face et pour une cure thermale présentent un lien direct et certain avec l'accident de service du 19 juin 2007. De même, l'intéressée, qui est suivie en Espagne pour une procréation médicalement assistée, ne peut prétendre à être indemnisée des dépenses générées par une prise en charge médicale interdite en France pour une femme de son âge. En revanche, Mme G... est fondée à solliciter une indemnisation pour des dépassements d'honoraires de 35 euros lors des consultations médicales des 19 mai 2022 et 1er septembre 2023 relatives au suivi de son opération du canal carpien et à un avis endocrinologique sur son hyperthyroïdie médicamenteuse, ainsi que pour des frais d'achat d'alèses en 2022, 2023 et 2024 de 2 300,17 euros. Par suite et alors que l'intéressée a, au cours de la période considérée, perçu une aide de 2 100 euros au titre de la prestation de compensation du handicap, destinée à compenser certaines charges spécifiques en lien avec sa pathologie, il sera fait une exacte appréciation de son préjudice en lui allouant la somme totale de 235,17 euros. 16. Enfin, s'agissant des dépenses de santé futures, le rapport d'expertise du 1er octobre 2024 estime que, compte tenu de la prise en charge intégrale des traitements substitutifs et des bilans biologiques au titre de l'affection longue durée, un tel poste de préjudice s'avère sans objet. 17. Il en résulte, en particulier, que Mme G... ne peut prétendre à une indemnisation au titre du coût annuel de son traitement médicamenteux actuel et au titre du coût annuel du dispositif de suivi glycémique. De même, la nécessité pour l'intéressée de bénéficier, eu égard à sa pathologie, d'une téléalarme, d'une glacière à contrôle de température sur roulette d'une valeur de 739,20 euros, de séjours en cure thermale, ainsi que de séances d'ostéopathie, d'acupuncture et de kinésithérapie, n'est pas démontrée. 18. En revanche, Mme G... est fondée à solliciter une indemnisation au titre du coût des protections contre son incontinence urinaire (soit 1 916,40 euros par an), au titre du coût des pansements et des produits liés au traitement de sa sécheresse oculaire (soit respectivement 60,12 et 145,56 euros par an), au titre du remboursement des franchises médicales et des participations forfaitaires (soit 100 euros par an), au titre des frais de renouvellement tous les sept ans de sa glacière électrique (soit 21,41 euros par an) et au titre du coût d'acquisition et de renouvellement tous les trois ans d'un coussin destiné à soulager les douleurs cervicales résultant du traumatisme crânien subi le 19 juin 2007 (soit 57,95 euros par an). En outre, il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que la pathologie de l'intéressée requiert, eu égard notamment au traumatisme généré par un retard de diagnostic de près de dix ans, un suivi psychologique. A raison de douze séances par an, le coût annuel d'un tel suivi, dont il n'est pas établi, ni même allégué, qu'il serait pris en charge dans le cadre du régime de l'affection longue durée, peut être évalué à 1 200 euros. 19. Dans ces conditions, il y a lieu d'allouer à Mme G... une rente viagère annuelle de 3 501,44 euros. Cette rente sera revalorisée tous les ans par application des coefficients prévus aux articles L. 434-17 et L. 161-25 du code de la sécurité sociale. Elle pourra également être modifiée, sous le contrôle du juge de l'exécution, en cas de non-renouvellement de la prise en charge au titre de l'affection longue durée, de manière à couvrir le coût total du traitement substitutif hormonal et des bilans biologiques. Enfin, il conviendra, le cas échéant, de déduire du montant de cette rente les aides versées à l'intéressée pour compenser les charges spécifiques liées à son handicap, tel que le coût des protections contre son incontinence urinaire. 20. Il résulte de tout ce qui précède que l'Etat doit être condamné à verser à Mme G..., au titre de ses dépenses de santé, la somme totale de 2 886,31 euros, ainsi qu'une rente viagère annuelle de 3 501,44 euros. S'agissant de l'assistance par tierce personne : 21. Lorsque le juge administratif indemnise la victime d'un dommage corporel du préjudice résultant pour elle de la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne dans les actes de la vie quotidienne, il détermine d'abord l'étendue de ces besoins d'aide et les dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, par référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmentés des cotisations sociales dues par l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime, dès lors que, bien évidemment, cette assistance est effective. 22. Il résulte du rapport d'expertise du 1e octobre 2024 que l'état de santé de Mme G... nécessite une aide non spécialisée à raison de 4 heures par jour jusqu'à la date de consolidation et de 3 heures 30 pour la période postérieure à celle-ci. 23. D'une part, exclusion faite des jours d'hospitalisation, sur la base d'une durée annuelle de 412 jours pour inclure les congés et compte tenu du salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire brut augmenté des charges sociales, soit, s'agissant d'une aide non spécialisée, de 14 euros de l'heure, les besoins d'assistance par tierce personne de Mme G..., pour la période allant du 19 juin 2007 au 21 avril 2022, se montent à 335 018,08 euros. Il résulte de l'instruction que le département de l'Hérault a, entre le 1er avril 2014 et le 21 avril 2022, versé à la victime, au titre de la prestation de compensation du handicap, une aide pour l'emploi d'une tierce personne d'un montant total de 34 995,94 euros. Dans ces conditions, pour la période allant du 19 juin 2007 au 21 avril 2022, il y a lieu d'allouer à l'intéressée la somme totale de 300 022,14 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne. 24. D'autre part, sur la base d'une durée annuelle de 412 jours et d'un tarif horaire de 16 euros pour une aide non spécialisée, les besoins d'assistance par tierce personne de Mme G..., pour la période comprise entre 22 avril 2022 et le 6 mars 2025, s'élèvent à 66 371,50 euros. Le montant de l'aide pour l'emploi d'une tierce personne, perçu par l'intéressée au cours de cette période au titre de la prestation de compensation du handicap, étant de 9 309,45 euros, une somme totale de 57 062,06 euros doit lui être accordée en réparation des frais d'assistance par tierce personne exposés entre la date de consolidation et celle de la mise à disposition du présent arrêt. 25. Enfin, pour la période postérieure au 6 mars 2025, il y a lieu d'allouer à Mme G..., sur la base d'une durée annuelle de 412 jours et d'un tarif horaire de 17 euros, une rente viagère annuelle de 24 514 euros. Cette rente sera revalorisée tous les ans par application des coefficients prévus aux articles L. 434-17 et L. 161-25 du code de la sécurité sociale. Il conviendra, le cas échéant, de déduire du montant de cette rente les sommes perçues au titre de la prestation de compensation du handicap, de la majoration pour tierce personne ou de toute autre prestation ayant le même objet. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir son versement d'une provision. 26. Par ailleurs, si Mme G... sollicite encore le versement d'une somme supplémentaire de 281 660,76 euros afin de prendre en compte le besoin accru d'assistance par tierce personne dans l'hypothèse d'une grossesse ou d'une adoption, son préjudice demeure, en l'état de l'instruction, purement hypothétique. Par suite, elle ne peut prétendre à une indemnisation à ce titre. 27. Il résulte de tout ce qui précède que l'Etat doit être condamné à verser à Mme G..., au titre des frais d'assistance par tierce personne, la somme totale de 357 084,20 euros, ainsi qu'une rente viagère annuelle de 24 514 euros. S'agissant des frais de logement adapté : 28. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que la pathologie de Mme G... nécessite l'installation d'une barre de maintien dans l'escalier et d'une chaise de douche. Si l'experte relève que la victime fait encore de petits malaises glycémiques, elle estime qu'il n'y pas lieu de prévoir d'autres aménagements. 29. Si l'intéressée ne peut prétendre à une indemnisation des frais de mise en place et de fonctionnement d'une téléalarme, dont l'utilité n'est pas démontrée, elle justifie, en revanche, avoir fait l'acquisition d'un siège de bain pivotant pour un montant de 119 euros. Elle produit également deux devis datés du 28 avril 2015 d'un montant respectif de 863,50 euros et de 3 216,70 euros en vue de la réalisation de deux rampes d'escalier à droite et à gauche. Il résulte de l'instruction que le département de l'Hérault a, le 31 octobre 2016, versé à l'intéressée, au titre de la prestation de son handicap, une aide pour l'aménagement de son logement d'un montant de 640 euros. Dans ces conditions, il sera fait une exacte appréciation du préjudice subi par l'intéressée à ce titre en portant la somme de 3 335,70 euros, allouée par les premiers juges, à 3 559,20 euros. S'agissant des frais de véhicule adapté : 30. Il ne résulte pas de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du 1er octobre 2024, que l'état de santé de Mme G... nécessite une adaptation de son véhicule. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires au titre de ce chef de préjudice. S'agissant des frais de chauffage : 31. Il résulte notamment du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que Mme G... a, du fait de son insuffisance hypophysaire et des déficits hormonaux qui en résultent, présenté une grande frilosité. Dans ces conditions, pour la période comprise entre le 19 juin 2007 et le 21 avril 2022, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à l'intéressée une somme de 10 000 euros. En revanche, compte tenu de la mise en place, à compter de février 2022, d'un traitement substitutif censé compenser ces déficits hormonaux, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande d'indemnisation de l'intéressée pour la période postérieure à la date de consolidation. S'agissant des frais divers : 32. En premier lieu, il sera fait une exacte appréciation des frais d'honoraires de médecins-conseils, exposés par Mme G... pour se faire assister à l'occasion d'opérations d'expertise en lien direct avec son accident de service du 19 juin 2007, en les fixant à la somme totale de 9 294 euros. 33. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que Mme G... a déboursé la somme de 18,61 euros pour avoir accès à son dossier médical auprès du centre hospitalier régional universitaire de Nancy. En revanche, elle n'établit pas que les 46,30 euros de frais d'affranchissement et les 11,90 euros de frais d'achat d'une clé " USB ", dont elle sollicite le remboursement, seraient en lien avec son accident de service du 19 juin 2007. 34. En troisième lieu, il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que Mme G... a exposé, en lien avec son accident de service, des frais de déplacement jusqu'au 6 avril 2018, date de sa prise en charge au titre de l'affection longue durée. Il n'est pas établi que, postérieurement à cette date, de tels frais seraient demeurés à la charge de l'intéressée. De même, les frais de déplacement, supportés par Mme G... pour se rendre aux différentes opérations d'expertise, constituent des dépens et, comme tels, relèvent de l'application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Au vu des éléments versés au débat contradictoire, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en allouant à l'intéressée la somme de 25 000 euros. En ce qui concerne les préjudices personnels de Mme G... : S'agissant du déficit fonctionnel temporaire : 35. Il résulte de l'instruction que, entre le 19 juin 2007 et le 21 avril 2022, Mme G... a subi un déficit fonctionnel temporaire de 100 % pendant cent vingt jours au total, incluant ses prises en charge en milieu hospitalier les 19 juin 2007, 7 août 2007, du 18 au 21 février 2009, du 24 au 30 janvier 2010, du 28 mars au 3 avril 2010, le 2 juillet 2010, du 13 au 17 septembre 2010, du 19 au 22 novembre 2010, le 23 février 2011, du 18 juillet au 29 septembre 2011, les 7 et 8 septembre 2012, les 4 et 5 février 2013, et les 30 septembre 2017, 3 septembre 2021 et 20 avril 2022, ainsi qu'un déficit fonctionnel temporaire partiel de 75 % pour le reste de la période. 36. Sur la base d'un déficit fonctionnel temporaire total de 20 euros par jour, le montant de l'indemnisation allouée à Mme G... pour ce chef de préjudice, évalué à 11 800 euros par les premiers juges, doit ainsi être porté à 81 900 euros. S'agissant des souffrances endurées : 37. Il résulte de l'instruction que les souffrances endurées par Mme G... au cours de la période allant du 19 juin 2007 au 21 avril 2022 ont été évaluées à 4/7 dans le rapport d'expertise du 1er octobre 2024, compte tenu notamment d'un retard de diagnostic de dix ans. Il est constant, en particulier, que la mise en place tardive d'un traitement substitutif complet de ses dérèglements hormonaux a nécessité une intervention chirurgicale le 20 avril 2022 afin de soigner un syndrome du canal carpien imputable à son endocrinopathie. De même, Mme G... fait valoir que, du fait de son traumatisme crânien, elle a souffert de douleurs au niveau des cervicales et des lombaires, qui ont nécessité la prise d'antalgiques et d'anti-inflammatoires. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice, en portant la somme de 4 000 euros, allouée en première instance, à 10 000 euros. S'agissant du préjudice esthétique : 38. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que l'experte a estimé à 1,5/7 le préjudice esthétique temporaire et à 0,5/7 le préjudice esthétique permanent en raison principalement d'une prise de poids et d'une perte importante de cheveux liées au traitement, ainsi que de difficultés à cheminer en public et à assurer de façon autonome les soins d'hygiène. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ces chefs de préjudice en allouant à Mme G... les sommes respectives de 2 000 euros et de 1 000 euros. S'agissant du déficit fonctionnel permanent : 39. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que le déficit fonctionnel permanent de Mme G... s'élève à un taux de 73 %. L'intéressée, qui est née le 23 octobre 1976, avait donc 45 ans au 21 avril 2022, date de consolidation de son état de santé. Dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en portant la somme de 60 000 euros, allouée par les premiers juges, à 250 000 euros. S'agissant du préjudice d'agrément : 40. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que, compte tenu de sa pathologie, Mme G... ne peut plus se livrer aux activités sportives (équitation, natation, tennis et randonnée), culturelles (pratique du piano) et de loisirs (travaux de bricolage et de jardinage) qu'elle pratiquait auparavant. Si la victime n'est pas fondée à solliciter, au titre du préjudice d'agrément, l'indemnisation des dépenses occasionnées par l'achat de fruits et de légumes " bio " et par l'emploi de deux salariés pour assurer l'entretien de son jardin, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en portant la somme de 2 500 euros, allouée par les premiers juges, à 5 000 euros. S'agissant du préjudice sexuel : 41. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que Mme G... a subi un préjudice sexuel du fait des changements survenus dans la perception de l'image de son corps, de sa fatigabilité et de ses troubles de l'humeur. Dans un document préparatoire à expertise du 4 avril 2021, le praticien hospitalier de centre hospitalier régional universitaire de Montpellier, qui a diagnostiqué, le 14 septembre 2017, l'insuffisance hypophysaire de l'intéressée, souligne que cette pathologie entraîne une perte de la libido (anaphrodisie), même en l'absence de déficit des hormones sexuelles. Dans ces conditions, et compte tenu de l'âge de la victime au moment de la survenue de l'accident de service du 19 juin 2007, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en portant la somme de 2 000 euros, allouée par les premiers juges, à 8 000 euros. S'agissant du préjudice d'établissement : 42. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que, si l'intéressée est prise en charge en Espagne pour une procréation médicale assistée, ses chances de donner naissance à un enfant s'avèrent faibles. Dans ces conditions, alors que l'intéressée fait valoir, sans être contredite, que sa pathologie et son parcours médical ont un retentissement défavorable sur sa capacité à avoir une vie de couple et à fonder une famille, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en l'évaluant à la somme de 15 000 euros. S'agissant du préjudice d'anxiété : 43. Il résulte du rapport d'expertise du 1er octobre 2024 que, depuis le 21 avril 2022, le traitement substitutif aux dérèglements hormonaux de Mme G..., qui, sous réserve d'adaptations des doses, n'a plus à être modifié dans son principe, a été mis en place et permet de stabiliser la pathologie. Il en résulte que les craintes exprimées par l'intéressée quant aux incertitudes liées à l'évolution de son insuffisance hypophysaire ne sont pas démontrées. Par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande d'indemnisation au titre du préjudice d'anxiété. S'agissant du préjudice extrapatrimonial évolutif : 44. Eu égard à la mise en place d'un traitement substitutif adapté à sa pathologie, il ne résulte pas de l'instruction que l'insuffisance hypophysaire, dont souffre Mme G..., est de nature à mettre en jeu le pronostic vital ou de conduire à des séquelles graves. Il n'est pas davantage établi que la prise d'hormones de croissance serait susceptible d'exposer l'intéressée, de façon directe et immédiate, à un risque d'accident vasculaire cérébral hémorragique. Par suite, Mme G... n'est pas fondée à solliciter une indemnisation pour ce chef de préjudice. 45. Il résulte de tout ce qui précède que la somme de 285 754,78 euros, allouée à Mme G... par les premiers juges, est portée à 780 742,32 euros. Il y a lieu également de condamner l'Etat à verser à l'intéressée, au titre des dépenses de santé et des frais d'assistance par tierce personne exposés postérieurement au 6 mars 2025, une rente viagère annuelle d'un montant respectif de 3 501,44 euros et de 24 514 euros dans les conditions précisées aux points 19 et 25 du présent arrêt. Sur les intérêts et leur capitalisation : 46. Les sommes ainsi allouées à Mme G... seront augmentées des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'Etat de sa demande préalable d'indemnisation du 26 juin 2015. Et les intérêts échus au 22 mai 2022, date de première demande en ce sens formulée par l'intéressée dans ses écritures, seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts. Sur les dépens : 47. D'une part, les frais des deux expertises ordonnées en appel, liquidés et taxés respectivement aux sommes de 2 460 et de 1 500 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat. 48. D'autre part, Mme G... justifie, par les éléments qu'elle verse aux débats, avoir supporté des frais de déplacement, s'élevant en tout à 829,96 euros, pour se rendre aux opérations d'expertise ordonnées respectivement par le jugement avant dire droit du tribunal administratif de Nancy du 4 mai 2017 et par l'arrêt avant dire droit de la cour du 17 novembre 2020. Par suite, il y a lieu de mettre cette somme à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Sur les frais non compris dans les dépens : 49. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". 50. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme G... d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La somme de 285 754,78 euros, allouée à Mme G... par les premiers juges, est portée à 780 742,32 euros. Article 2 : L'Etat versera à Mme G..., au titre des dépenses de santé et des frais d'assistance par tierce personne exposés postérieurement au 6 mars 2025, une rente viagère annuelle d'un montant respectif de 3 501,44 euros et de 24 514 euros dans les conditions précisées aux points 19 et 25 du présent arrêt. Article 3 : Les sommes allouées à Mme G... seront augmentées des intérêts au taux légal à compter du 26 juin 2015. Les intérêts échus à la date du 22 mai 2022 seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts. Article 4 : Le jugement n° 1502686 du tribunal administratif de Nancy du 28 septembre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la ministre de l'éducation nationale est rejeté. Article 6 : Les frais des deux expertises ordonnées en appel, liquidés et taxés respectivement aux sommes de 2 460 et de 1 500 euros, sont mis à la charge définitive de l'Etat. Article 7 : L'Etat versera à Mme G... les sommes de 829,96 euros et de 3 000 euros en application respectivement des dispositions des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative. Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, à Mme B... G..., à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault et aux experts, Mme C... H..., M. E... A... et M. F... D.... Copie en sera adressée au département de l'Hérault et au tribunal judiciaire de Nancy. Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient : - Mme Bauer, présidente, - M. Meisse, premier conseiller, - M. Berthou, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mars 2025. Le rapporteur, Signé : E. MEISSE La présidente, Signé : S. BAUER Le greffier, Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Le greffier : F. LORRAIN N° 18NC03255 2
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 05/03/2025, 23DA00109, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une requête enregistrée sous le n° 2002528, M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 par lesquels le maire de la commune de Pont-de-Metz, d'une part, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des évènements survenus le 23 mai 2018 et le 18 juillet 2018 et, d'autre part, l'a placé en disponibilité d'office à l'expiration de ses droits à congés de maladie. Il a également demandé au tribunal d'enjoindre à la commune de Pont-de-Metz de le rétablir dans ses droits statutaires dans un délai d'un mois à compter du jugement, sous astreinte. Par une requête enregistrée sous le n° 2003511, M. B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Pont-de-Metz l'a placé en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021, d'annuler l'arrêté n° 2020-184 du 20 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Pont-de-Metz a suspendu le versement de sa nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er octobre 2020 et, enfin, d'annuler l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Pont-de-Metz a suspendu le versement de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise à compter du 1er octobre 2020. Il a également demandé au tribunal d'enjoindre à la commune de Pont-de-Metz de le rétablir dans ses droits statutaires dans un délai d'un mois à compter du jugement. Par un jugement n° 2002528 et 2003511 du 28 novembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés des 17 juillet 2020 et 7 octobre 2020 en tant qu'ils ne reconnaissent pas l'imputabilité au service de l'accident survenu le 23 mai 2018, a enjoint au maire de Pont-de-Metz de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident et de placer M. B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service pour la période allant du 23 mai 2018 au 7 juin 2018, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. B.... Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2023 et 27 août 2023, M. B..., représenté par Me Enard-Bazire, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 28 novembre 2022 en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses conclusions ; 2°) d'annuler les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 par lesquels le maire de la commune de Pont-de-Metz a refusé de reconnaître l'accident du 18 juillet 2018 déclaré par M. B... comme imputable au service et l'a placé en disponibilité d'office à l'expiration de ses droits à congés de maladie ; 3°) d'annuler les trois arrêtés du 20 octobre 2020 par lesquels le maire de la commune a respectivement placé l'intéressé en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021, suspendu le versement de sa nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er octobre 2020 et suspendu le versement de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise, également à compter du 1er octobre 2020 ; 4°) d'enjoindre, sous astreinte, à la commune de le rétablir dans ses droits statutaires dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 5°) de mettre à la charge de la commune la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - il n'était pas justifié de l'habilitation à agir du maire de la commune en première instance ; - cette délibération n'a été produite que dans l'instance n° 200351 ; or la jonction des affaires par le tribunal n'a pas eu pour effet de régulariser l'absence d'habilitation du maire dans la seconde instance enregistrée sous le n° 2002528 ; - le jugement, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service du syndrome anxiodépressif constaté le 19 juillet 2018, est entaché d'une erreur de fait, d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit ; le tribunal a dénaturé les pièces du dossier ; - les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 sont illégaux dès lors que l'accident dont il a été victime le 18 juillet est bien imputable au service ; il a développé une dépression réactionnelle en raison de l'attitude de sa hiérarchie ; le lien entre son affection et les faits de harcèlement moral qu'il a subis est établi par plusieurs avis médicaux et témoignages ; - dès lors qu'il aurait dû bénéficier d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 19 juillet 2018, l'arrêté n° 2020-183 le plaçant en congé de longue durée est illégal ; - pour les mêmes motifs, l'arrêté n° 2020-184 supprimant le versement de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er octobre 2020 est illégal ; - cet arrêté méconnaît le principe de non rétroactivité des actes administratifs ; - dès lors qu'il aurait dû bénéficier d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 19 juillet 2018, l'arrêté n° 2020-185 suspendant le versement de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise à compter du 1er octobre 2020 est illégal ; - cet arrêté est illégal par voie de conséquence de l'illégalité des arrêtés des 17 juillet 2020 et 20 octobre 2020 ; - cet arrêté méconnaît également le principe de non rétroactivité des actes administratifs. Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er juillet 2023, 13 septembre 2023 et 22 novembre 2023, la commune de Pont-de-Metz, représentée par Me Mathieu, demande à la cour : 1°) de rejeter la requête de M. B... ; 2°) de confirmer le jugement en toutes ses dispositions ; 3°) de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 93-863 du 18 juin 1993 ; - le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - les conclusions de M. Frédéric Malfoy, rapporteur public, - et les observations de Me Brault pour M. B... et de Me Mathieu pour la commune de Pont-de-Metz. Une note en délibéré, présentée pour la commune de Pont-de-Metz par Me Mathieu, a été enregistrée le 11 février 2025. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjoint technique territorial, exerce les fonctions d'agent technique de maintenance polyvalent au sein de la commune de Pont-de-Metz depuis 2014. Il a été placé, le 23 mai 2018, en congé de maladie jusqu'au 6 juin 2018 inclus, à la suite de l'apparition d'une douleur lombaire importante lors de la réalisation de travaux de taille d'une haie. Le 19 juillet suivant, il a de nouveau été placé en congé de maladie au motif invoqué d'un autre incident survenu la veille durant son service. Il a demandé la prise en charge de ces deux incidents au titre de la législation des accidents de service. Lors de sa séance du 23 septembre 2019, la commission de réforme a, d'une part, émis un avis défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident déclaré le 23 mai 2018 et, d'autre part, sursis à statuer sur l'imputabilité au service de l'accident du 18 juillet 2018 dans l'attente de la réalisation d'une expertise complémentaire. La commission de réforme, qui a de nouveau examiné sa demande le 10 février 2020, a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 23 mai 2018. Puis, par un nouvel avis du 8 juin 2020, la commission de réforme a rapporté son avis du 10 février 2020 et a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du " 19 juillet 2018 " à l'origine d'un syndrome anxiodépressif. Le maire de la commune de Pont-de-Metz, par des arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020, a refusé de reconnaître les accidents déclarés par M. B... comme imputables au service. Par ailleurs, par trois arrêtés datés du 20 octobre 2020, le maire de la commune a respectivement placé l'intéressé en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021, suspendu le versement de sa nouvelle bonification indiciaire et de son indemnité de fonctions, sujétions et expertise, à compter du 1er octobre 2020. 2. Par une requête enregistrée sous le n° 2002528, M. B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020. En parallèle, par une requête enregistrée sous le n° 2003511, il a demandé l'annulation des trois arrêtés du 20 octobre 2020. Par un jugement du 28 novembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens, après avoir joint les deux requêtes, a annulé les arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 en tant qu'ils ne reconnaissaient pas l'imputabilité au service de l'accident survenu le 23 mai 2018, a enjoint au maire de Pont-de-Metz de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident et de placer M. B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service pour la période allant du 23 mai 2018 au 7 juin 2018, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement et, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de M. B.... Il relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses conclusions. Sur la recevabilité des écritures de première instance de la commune de Pont-de-Metz : 3. Aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. / (...) Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. / La preuve de la réception des actes par le représentant de l'Etat dans le département ou son délégué dans l'arrondissement peut être apportée par tout moyen ". Aux termes de l'article L. 2131-2 du même code : " Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 les actes suivants : / 1° Les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 (...) ". 4. M. B... soutient qu'il n'était pas justifié de l'habilitation à agir du maire de la commune de Pont-de-Metz en première instance en l'absence de preuve de la transmission de la délibération du conseil municipal autorisant le maire de cette commune à la représenter dans les instances faisant l'objet des présents litiges au représentant de l'Etat dans le département. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 10 juin 2020, publiée le 15 juin 2020, le conseil municipal de Pont-de-Metz a, sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, délégué au maire le pouvoir d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, tant en demande qu'en défense et devant toutes les juridictions. Selon le cachet figurant sur le bordereau de transmission du 15 juin 2020, cet arrêté de délégation a été reçu le 8 juillet suivant par la préfecture de la Somme. Si M. B... fait également valoir que le maire ne démontre pas avoir informé le conseil municipal de l'existence d'une procédure contentieuse comme le prévoit cette même délibération, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 14 mars 2022, régulièrement transmise en préfecture le 16 mars suivant, le conseil municipal, après avoir été informé par le maire des actions contentieuses engagées par M. B..., a autorisé le maire à ester en justice au nom de la commune dans les instances enregistrées par le tribunal administratif d'Amiens sous les n° 2003511 et 2002528. La fin de non-recevoir opposée par M. B... ne saurait dès lors être retenue. 5. Par ailleurs, alors que ces deux requêtes jointes par le tribunal présentent un lien suffisant au regard de l'objet du litige et des questions soulevées, la circonstance que la délibération précitée du 10 juin 2020 n'a été produite devant le tribunal que dans l'instance n° 200351 alors que la fin de non-recevoir tirée de l'absence de justification d'une habilitation à agir en justice au nom de la commune était également opposée dans l'instance n° 2002528 est sans incidence dès lors que cette pièce a bien été communiquée à M. B.... 6. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'habilitation à agir du maire de la commune. Sur la régularité du jugement : 7. Hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de fait, d'appréciation et de droit ou de la dénaturation des faits du dossier qui entacheraient le jugement attaqué du tribunal administratif pour en demander l'annulation pour irrégularité. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne l'illégalité des arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 en tant qu'ils refusent l'imputabilité au service de l'accident du 18 juillet 2018 : 8. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / (...) ". Aux termes de l'article 21 bis I et II de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...) II. Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service ". 9. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. Doit être regardé comme un accident un évènement précisément déterminé et daté, caractérisé par sa violence et sa soudaineté, à l'origine de lésions ou d'affections physiques ou psychologiques qui ne trouvent pas leur origine dans des phénomènes à action lente ou répétée auxquels on ne saurait assigner une origine et une date certaines. 10. M. B... soutient qu'il a été victime, le 18 juillet 2018, d'une surveillance excessive de la part de l'adjoint aux travaux qui l'aurait ensuite agressé alors qu'il exerçait des missions d'entretien sur le domaine public. L'intéressé, à qui son médecin traitant a délivré le lendemain un arrêt de travail pour " rechute des douleurs lombaires sur efforts imposés par sa hiérarchie malgré recommandations médecin du travail + burn out sur harcèlement " causés par cet événement, a été invité, par des courriers du maire des 22 aout et 22 octobre 2018, à détailler les faits à l'origine de l'accident. En réponse, M. B... a indiqué, dans un écrit non daté, que cet adjoint lui avait demandé d'arroser les fleurs dans le village et, qu'après l'avoir surveillé depuis son véhicule, ce dernier était venu l'agresser sans raison en lui indiquant qu'il ne se trouvait pas au bon endroit. M. B... aurait ensuite, selon ses propres déclarations, perdu ses moyens et se serait égaré dans le village. 11. Afin de démontrer l'imputabilité au service de cet accident, M. B... se prévaut, outre les avis de la commission de réforme, de nombreux éléments médicaux démontrant l'absence de prédisposition ou d'antécédent psychiatrique et l'existence d'une situation de travail dégradée au sein du service technique de la commune de Pont-de-Metz. Il produit à ce titre, en plus des divers certificats médicaux établis par son médecin traitant dans le cadre de ses arrêts travail successifs faisant état d'un " burn out " et d'une dépression majeure réactionnelle, plusieurs expertises médicales réalisées par des médecins spécialistes attestant de l'existence d'un état dépressif pour lequel il a d'ailleurs été hospitalisé en octobre et novembre 2019. Il ressort ainsi de l'expertise réalisée le 7 janvier 2020 par un professeur du pôle pathologie professionnelle et médecine du travail du centre hospitalier universitaire de Reims à la demande de la commission de réforme que M. B... " n'a pas d'antécédent psychiatrique avant son embauche (...). Il existe des témoignages concordants au nombre de trois confirmant un relationnel difficile entre l'agent et sa hiérarchie, permettant d'expliquer le syndrome anxiodépressif pour lequel il est suivi (...). De ce fait, il peut être considéré que les arrêts de travail à compter du 19/07/18 sont justifiés et à prendre en compte au titre du syndrome anxiodépressif en relation avec l'accident de travail déclaré le 19/07/2018 ". M. B... ajoute que ces conclusions ont été préalablement confirmées par l'expertise diligentée par l'assurance de la commune et réalisée par un médecin psychiatre le 20 juin 2019 selon laquelle les frais liés à sa pathologie psychiatrique sont à prendre en charge au titre de l'accident de service. M. B... se prévaut enfin de plusieurs attestations, signalements ou témoignages faisant état des tensions importantes au sein des services de la commune à l'origine de risques psychosociaux et d'accusations d'agissements constitutifs de harcèlement moral visant des élus et l'encadrement. 12. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions dans lesquelles s'est déroulé cet événement, tel qu'il est relaté par M. B... dans ses écritures non datées et par l'adjoint aux travaux dans un rapport du 18 juillet 2018, permettraient de considérer que ce dernier aurait eu un comportement ou tenu des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique à l'origine de l'affection anxiodépressive dont il est atteint. En effet, hormis les déclarations de l'intéressé, ni les témoignages produits par l'appelant, ni les différentes expertises médicales dont il se prévaut, ne permettent de corroborer l'existence de l'agression dont le requérant dit avoir été victime ou la portée des propos échangés à cette occasion. A cet égard, il ressort de l'expertise initiale réalisée par un médecin rhumatologue le 21 janvier 2019 afin de se prononcer sur l'imputabilité au service de son accident du 23 mai 2018 ainsi que la date de consolidation et le taux d'incapacité permanente de cet accident que M. B... a déclaré, après avoir relevé que son employeur ne respectait pas les préconisations de la médecine du travail en dépit de sa reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, avoir refusé d'utiliser une décolleuse de revêtement de sol et que " son employeur l'a " puni " en lui donnant une autre tâche et que " cela lui a provoqué un traumatisme psychique et qu'il errait dans le village ". En outre, ni l'expertise du 20 juin 2019 citée au point précédent, faisant état du développement progressif d'un syndrome anxiodépressif en raison de l'absence de prise en considération par sa hiérarchie des recommandations médicales et de relations conflictuelles avec un élu, contexte dans lequel l'intéressé a d'ailleurs déposé plainte auprès des services de la gendarmerie nationale le 17 juillet 2018, ni l'expertise du 7 janvier 2020 attestant de l'existence de difficultés relationnelles entre M. B... et sa hiérarchie au regard de trois témoignages concordants, ne permettent de préciser les circonstances et la consistance des faits dont le requérant dit avoir été victime le 18 juillet 2018. De même, le courrier établi le 7 novembre 2018 par son médecin psychiatre, s'il fait mention d'un état dépressif réactionnel causé par une situation conflictuelle avec sa hiérarchie depuis son recrutement, ne fait pas mention de cet accident. 13. Enfin, si M. B... fait également état d'agissements répétés qu'il estime être constitutifs d'une situation de harcèlement moral corroborée par des plaintes, des signalements et des témoignages d'autres collègues, d'un syndicat ou de certains membres de l'équipe municipale, une telle argumentation, qui pourrait être présentée à l'appui d'une demande de reconnaissance de maladie professionnelle, est inopérante au soutien de son moyen tiré de l'erreur d'appréciation dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que sa demande tendait exclusivement à la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident survenu le 18 juillet 2018, et non de celle d'une maladie professionnelle. 14. Dans ces conditions, les faits qui se sont produits le 18 juillet 2018 ne peuvent être regardés comme caractérisant un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quel qu'en ait été le ressenti par l'agent. Par suite, nonobstant les conclusions des expertises médicales et l'avis favorable à l'imputabilité rendu par la commission de réforme, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le maire de Pont-de-Metz a méconnu les dispositions citées au point 8 en refusant de reconnaître l'existence d'un accident de service survenu le 18 juillet 2018 et, par suite, de regarder comme imputable au service le syndrome anxiodépressif pour lequel il a ensuite été placé en congé de maladie. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020 plaçant M. B... en congé de longue durée à plein traitement du 19 juillet 2018 au 18 juillet 2021 : 15. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précitée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée ne peut être attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. Cette période est réputée être une période du congé de longue durée accordé pour la même affection. Tout congé attribué par la suite pour cette affection est un congé de longue durée (...) ". 16. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'a pas été victime d'un accident de service le 18 juillet 2018. Par ailleurs, ainsi que l'a relevé le tribunal, il n'établit pas que les troubles lombalgiques subis à compter de cette date seraient en lien avec l'accident de service du 23 mai 2018, alors qu'il présente par ailleurs une lombalgie chronique depuis 2015. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le maire l'a placé à tort en congé de longue durée à compter du 19 juillet 2018. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2020-184 du 20 octobre 2020 suspendant le versement de la nouvelle bonification indiciaire de M. B... à compter du 1er octobre 2020 : 17. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret n° 93-863 du 18 juin 1993 relatif aux conditions de mise en œuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique territoriale : " La nouvelle bonification indiciaire est attachée à certains emplois comportant l'exercice d'une responsabilité ou d'une technicité particulière. Elle cesse d'être versée lorsque l'agent n'exerce plus les fonctions y ouvrant droit " et aux termes de l'article 2 de ce même décret : " Le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire est maintenu aux fonctionnaires dans les mêmes proportions que le traitement pendant la durée des congés mentionnés aux 1°, 2° et 5° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée susvisée ainsi qu'au 3° de ce même article tant que l'agent n'est pas remplacé dans ses fonctions ". 18. Le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire instituée par ces dispositions ne constitue pas un avantage statutaire et n'est lié ni au cadre d'emplois, ni au grade, mais dépend seulement de l'exercice effectif des fonctions qui y ouvrent droit. Le congé de longue durée, prévu par les dispositions du 4° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, bien que correspondant à l'une des positions d'activité du fonctionnaire, n'implique l'exercice effectif d'aucune fonction. 19. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B..., qui a bénéficié d'un congé de maladie du 19 juillet 2019 au 30 septembre 2020, a été placé, par un arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020, en congé de longue durée non imputable au service à compter du 19 juillet 2018 et jusqu'au 18 juillet 2021. Dès lors, le maire de la commune de Pont-de-Metz pouvait légalement suspendre le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire. 20. En second lieu, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. Une décision administrative accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage. En revanche, n'ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement. 21. M. B... soutient que l'arrêté n° 2020-184 du 20 octobre 2020 méconnaît le principe de non rétroactivité des actes administratifs dès lors qu'il prend effet à une date antérieure à son édiction, soit à compter du 1er octobre 2020. Il ressort des pièces du dossier qu'à raison de ses fonctions, lui a été attribuée, à compter du 1er juillet 2015, une nouvelle bonification indiciaire de 10 points par un arrêté du 29 juin 2015. Or, s'agissant d'une décision créatrice de droit, la commune ne pouvait y mettre fin que pour l'avenir. A cet égard, la circonstance que M. B... a été placé dans une situation conservatoire dans l'attente de l'avis de la commission de réforme est sans incidence. Par suite, en conférant une portée rétroactive à sa décision, le maire de la commune de Pont-de-Metz a entaché sa décision d'illégalité. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 suspendant le versement de l'indemnité de fonctions, sujétions et expertise (IFSE) de M. B... à compter du 1er octobre 2020 : 22. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré de ce que l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 doit être annulé en raison de l'illégalité des arrêtés des 17 juillet et 7 octobre 2020 en tant qu'ils refusent l'imputabilité au service de l'accident du 18 juillet 2018 ne peut qu'être écarté. 23. En deuxième lieu, aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. Ces régimes indemnitaires peuvent tenir compte des conditions d'exercice des fonctions et de l'engagement professionnel des agents. Lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, l'organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d'administration des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) ". 24. Il ressort des pièces du dossier que l'IFSE a été instituée par la commune de Pont-de-Metz à compter du 1er janvier 2018 par une délibération du conseil municipal du 16 novembre 2017. Il ressort des termes de l'article 2 de cette délibération relative à la mise en œuvre de l'IFSE et plus particulièrement de son paragraphe relatif à la modulation de l'IFSE du fait des absences que " En cas de congé de longue maladie et de longue durée le versement du régime indemnitaire est suspendu ". Or, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B..., qui a bénéficié d'un congé de maladie du 19 juillet 2019 au 30 septembre 2020, a été placé, par un arrêté n° 2020-183 du 20 octobre 2020, en congé de longue durée à compter du 19 juillet 2018. Dès lors, c'est à bon droit que le maire de la commune de Pont-de-Metz a suspendu le versement de l'IFSE. 25. En troisième et dernier lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 20 et 21, M. B... est fondé à soutenir qu'en conférant une portée rétroactive à l'arrêté n° 2020-185 du 20 octobre 2020 suspendant le versement de son IFSE à compter du 1er octobre 2020, le maire de la commune de Pont-de-Metz a entaché sa décision d'une rétroactivité illégale. 26. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés n° 2020-184 et n° 2020-185 du 20 octobre 2020, en tant qu'ils ont suspendu rétroactivement le versement de sa nouvelle bonification indiciaire et de son IFSE à compter du 1er octobre 2020. Le jugement attaqué doit, dès lors, être annulé dans cette mesure. Sur les conclusions à fin d'injonction : 27. L'annulation, par le présent arrêt, des arrêtés n° 2020-184 et n° 2020-185 du 20 octobre 2020 en tant qu'ils suspendent rétroactivement le versement de la nouvelle bonification indiciaire et de l'IFSE alloués à M. B... implique qu'il soit fait injonction à la commune de Pont-de-Metz de lui verser les sommes dues à ce titre pour la période du 1er octobre 2020 au 20 octobre 2020 dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les conclusions relatives aux frais d'instance : 28. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement nos 2002528, 2003511 du 28 novembre 2022 du tribunal administratif d'Amiens est annulé seulement en tant qu'il n'a pas fait droit à la demande de M. B... tendant à l'annulation des arrêtés du 20 octobre 2020 en ce qu'ils ont suspendu rétroactivement le versement de sa nouvelle bonification indiciaire et son indemnité de fonctions, sujétions et expertise, à compter du 1er octobre 2020. Article 2 : Les arrêtés du 20 octobre 2020 du maire de la commune de Pont-de-Metz portant suspension du versement de la nouvelle bonification indiciaire et de l'indemnité de fonctions, sujétions et expertise de M. B... sont annulés en tant seulement qu'ils fixent leur entrée en vigueur au 1er octobre 2020. Article 3 : Il est enjoint à la commune de Pont-de-Metz de verser à M. B... un rappel des sommes dues au titre de la nouvelle bonification indiciaire et de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, pour la période du 1er octobre 2020 au 20 octobre 2020 dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Pont-de-Metz. Délibéré après l'audience publique du 11 février 2025 à laquelle siégeaient : - Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, - Mme Dominique Bureau, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2025. Le président-assesseur, Signé : J.-M. Guérin-Lebacq La présidente de chambre, Présidente-rapporteure, Signé : M.-P. ViardLa greffière, Signé : C. Marécalle La République mande et ordonne au préfet de la Somme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour la greffière en chef, Par délégation, La greffière, C. Marécalle 1 2 N° 23DA00109 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 04/03/2025, 23BX00552, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 12 novembre 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ussac a rejeté le recours gracieux qu'elle a formé contre la décision du 15 juillet 2020 portant rejet de sa demande tendant à ce que son trouble anxio-dépressif réactionnel soit reconnu comme une maladie professionnelle et de la renvoyer devant la commission de réforme pour le réexamen de sa demande de reconnaissance " au titre d'une mesure d'expertise médicale ". Par un jugement n° 2001767 du 28 décembre 2022, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté ainsi que la décision du 12 novembre 2020 portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté et a enjoint au maire de la commune d'Ussac de prendre une décision reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de Mme B... et de reconstituer sa carrière, ainsi que ses droits à rémunération, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 27 février 2023, 3 octobre 2023, 19 janvier 2024 et 10 juin 2024 la commune d'Ussac, représentée par Me Caetano, demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 décembre 2022 et de mettre à la charge de Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient dans le dernier état de ses écritures que : - le jugement est irrégulier en ce qu'il s'est basé sur des documents non communiqués dont le tribunal n'avait connaissance que par le biais de mentions figurant dans l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 novembre 2019 ; le principe du contradictoire rappelé à l'article L. 5 du code de justice administrative a donc été méconnu ; - le jugement est irrégulier par insuffisance de motivation en ce que pour écarter le moyen lié à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux, il s'est contenté d'indiquer que cette autorité de la chose jugée " ne faisait pas obstacle " à la demande de Mme B..., sans en expliciter les raisons ; - contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, c'est à juste titre qu'elle a refusé de reconnaître que le trouble anxiodépressif réactionnel présenté par Mme B..., constituait une maladie professionnelle dès lors que d'une part, la demande de l'intéressée a été présentée à l'expiration du délai de prescription prévu par l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987, d'autre part, l'autorité de la chose jugée attachée à la précédente décision de la juridiction administrative admettant l'existence d'une maladie ordinaire de la requérante fait obstacle à la reconnaissance d'une maladie professionnelle, et enfin Mme B... n'établit pas que sa maladie est imputable au service ; - si elle admet que l'article 57 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ne prévoit explicitement aucune prescription applicable au dépôt de la demande de maladie professionnelle, compte tenu de la législation en vigueur au jour où les droits de Mme B... ont été réputés acquis, toutefois, elle est fondée à invoquer la prescription de deux ans, prévue par l'article 37.3 du décret du 30 juillet 1987, puisque la demande ayant justifié la présente procédure est intervenue postérieurement au décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - elle est fondée à opposer la prescription quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ou le délai de prescription de droit commun prévu par l'article 2224 du code civil ; si effectivement l'article 57 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984, ne prévoit aucune prescription applicable au dépôt de la demande de maladie professionnelle, il n'en demeure pas moins que l'action ne pouvait être imprescriptible ; alors que la première procédure mise en œuvre tendait à voir reconnaître un accident de service, la nouvelle demande vise à faire reconnaitre une maladie professionnelle et n'a donc pas le même objet ; le délai de deux ans relatif à la déclaration de maladie professionnelle n'a ainsi été interrompu ni par la procédure devant le tribunal administratif de Limoges ni par celle devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ; au demeurant, si la juridiction considérait que les deux procédures avaient le même objet, l'autorité de la chose jugée attachée à la décision de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 4 novembre 2019 empêcherait une nouvelle demande tendant à la reconnaissance d'une maladie professionnelle ; - la preuve de la caractérisation de la maladie professionnelle n'est pas rapportée ; le comportement de Mme B... caractérise un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service. Par des mémoires en défense enregistrés les 1er septembre 2023 et 15 décembre 2023, Mme B..., représentée par la SCP d'avocat Lyon-Caen et Thiriez, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune d'Ussac une somme de 4 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire manque en fait ; - le moyen tiré du défaut de motivation du jugement manque en fait ; - le motif d'annulation retenu par le tribunal est fondé ; - la situation de Madame B... était gérée par les dispositions de l'article 57 de la loi n° 54-53 du 26 janvier 1984 lesquelles n'enferment pas les déclarations de maladie professionnelle dans un délai et non par les dispositions de l'article 37-3 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 créées par le décret n°2019-301 du 10 avril 2019 enfermant la déclaration de maladie professionnelle dans un délai de deux ans ; - la collectivité ne peut opposer en l'absence de créance, la loi du 31 décembre 1968 ; - aucune règle de droit public n'a pour effet d'enfermer les déclarations de maladie professionnelle dans un délai et les dispositions de l'article 2224 du code civil ne sont pas applicables ; en tout état de cause, contrairement à ce que tente de faire croire la commune d'Ussac, elle n'est pas restée passive après l'altercation litigieuse puisqu'elle l'a saisie d'une demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'altercation du 3 décembre 2014 et du syndrome anxio-dépressif réactionnel consécutif, qui a donné lieu à une décision de refus du maire du 20 février 2015 ; - le jugement n'est pas intervenu en méconnaissance des dispositions des articles 6 et 132 du code de procédure civile ; le contentieux administratif est régi par les dispositions du code de justice administrative et non par les dispositions du code de procédure civile ; en tout état de cause, s'il fallait considérer que la commune requérante a entendu se placer sur le terrain de la méconnaissance du principe du contradictoire, le moyen n'en est pas moins voué à l'échec dès lors qu'il n'est pas soutenu que la commune n'aurait pas eu connaissance de ces rapports dans le cadre des autres procédures contentieuses qui l'ont opposé à Madame B... ; - les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ne sauraient davantage régir la procédure administrative ; à supposer que la commune soit regardée comme ayant entendu se prévaloir de l'article L. 9 du code de justice administrative, aucune insuffisance de motivation ne peut être retenue ; - des éléments médicaux concordants établissent l'imputabilité au service de la maladie de Madame B... ; les attestations produites pour les besoins de la cause ne suffisent pas à établir l'existence d'un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Ellie, rapporteur public, - les observations de Me Orliaguet représentant la commune d'Ussac et de Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Adjointe administrative principale de 1ère classe à la commune d'Ussac, Mme B... s'est vu prescrire, le 3 décembre 2014, à la suite d'une altercation avec le maire de cette commune, un arrêt de travail pour " déprime, surmenage et problèmes relationnels au travail ". Cet arrêt de travail a été prolongé à plusieurs reprises par la suite, sans discontinuité. Décidant de ne pas suivre l'avis favorable émis par la commission de réforme, le maire de la commune d'Ussac, par un arrêté du 20 février 2015, a refusé de reconnaître l'altercation du 3 décembre 2014 comme un accident de service et l'imputabilité au service des congés pour raisons de santé qui ont suivi. Par un jugement n° 1500163 du 23 juin 2017, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté du 20 février 2015 et a enjoint à la commune d'Ussac de reconnaître que Mme B... a été victime d'un accident de service. Par un arrêt n° 17BX02837 du 4 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement au motif que " si la pathologie de Mme B... apparaît en lien avec le service, elle ne peut être regardée comme la conséquence brutale d'un choc soudain survenu le 3 décembre 2014 [de sorte] (...) que cet évènement ne peut être qualifié d'accident de service ". A la suite de cet arrêt, par un courrier du 15 janvier 2020, Mme B... a demandé à ce que sa maladie soit reconnue comme maladie professionnelle. A la demande de la commune d'Ussac, qui par un courrier du 19 février 2020 l'a invitée à compléter sa demande, elle a déposé, le 5 mars 2020, une " déclaration de maladie professionnelle " qu'elle a datée du 3 décembre 2014. Par une décision du 15 juillet 2020, le maire de la commune d'Ussac lui a indiqué qu'il ne pouvait faire droit à sa demande au motif que la déclaration de maladie professionnelle avait été adressée au-delà du délai de deux ans prévu au II de l'article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 tel que modifié par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019. Par un courrier du 31 juillet 2020, Mme B... a formé un recours gracieux contre cette décision. Ce recours gracieux a été rejeté par une décision du 12 novembre 2020. La commune d'Ussac relève appel du jugement du 28 décembre 2022, par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision du 15 juillet 2020 et la décision du 12 novembre 2020. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ". 3. Pour estimer que Mme B... était fondée à soutenir que la décision du 15 juillet 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ussac a refusé de reconnaître l'origine professionnelle de sa maladie et la décision du 12 novembre 2020 portant rejet de son recours gracieux sont entachées d'erreur d'appréciation, le tribunal a relevé au point 12 du jugement qu'il " ressort des pièces du dossier, notamment des pièces médicales produites et de celles citées dans les motifs de l'arrêt du 4 novembre 2019 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, que le trouble anxio-dépressif réactionnel présenté par Mme B..., qui a justifié des arrêts de travail sans discontinuité à compter du 3 décembre 2014 à la suite d'une altercation du même jour avec le maire de la commune d'Ussac, est directement lié à l'environnement délétère dans lequel elle a exercé ses fonctions, en particulier au conflit relationnel qui l'a opposée au maire de cette commune ". Ce faisant, le tribunal a fondé, pour partie, son appréciation sur les mentions figurant dans l'arrêt précité de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 novembre 2019. Cet arrêt avait été porté à la connaissance de la commune d'Ussac le 3 décembre 2020 à l'appui de la communication de la requête de Mme B..., par le greffe du tribunal. Il suit de là qu'alors même que les rapports d'expertise de deux médecins mentionnés au point 5 de l'arrêt du 4 novembre 2019 ne faisaient pas partie des pièces du dossier soumises à l'appréciation du tribunal, celui-ci n'a pas méconnu le principe du contradictoire. 4. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 5. En relevant au point 8 du jugement que l'autorité de chose jugée s'attachant à l'arrêt du 4 novembre 2019 de la cour administrative d'appel de Bordeaux ne faisait pas obstacle à ce que Mme B... demande que son trouble anxio-dépressif réactionnel constaté pour la première fois le 3 décembre 2014 soit reconnu comme une maladie professionnelle et à ce qu'elle sollicite l'annulation des décisions litigieuses, le tribunal a suffisamment motivé la réponse qu'il a apportée au moyen en défense soulevé par la commune d'Ussac. Sur les conclusions aux fins d'annulation : En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale : 6. Aux termes de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Selon l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". 7. En demandant que sa pathologie soit reconnue comme une maladie professionnelle, Mme B... ne peut être regardée comme ayant sollicité le paiement d'une créance régie par les dispositions de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, de sorte que la commune d'Ussac ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions pour lui refuser le bénéfice de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa version applicable au litige. Par suite, la commune d'Ussac n'est pas fondée à opposer l'exception de prescription quadriennale. En ce qui concerne le bien fondé du motif d'annulation : 8. Aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ". 9. Aux termes des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, issues de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " I.-Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...) / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. (...) / IV.-Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". 10. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 2224 du code civil " Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ". 11. D'autre part, créés par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019, et entrés en vigueur le 13 avril 2019, les articles 37-2 et 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 prévoient que : " Pour obtenir un congé pour invalidité temporaire imputable au service, le fonctionnaire, ou son ayant-droit, adresse par tout moyen à l'autorité territoriale une déclaration (...) de maladie professionnelle accompagnée des pièces nécessaires pour établir ses droits ", que " [cette déclaration] est adressée à l'autorité territoriale dans le délai de deux ans suivant la date de la première constatation médicale de la maladie ou, le cas échéant, de la date à laquelle le fonctionnaire est informé par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle. (...) " et que lorsque ce délai de deux ans n'est pas respecté, " la demande de l'agent est rejetée ". 12. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique. Il résulte également des dispositions transitoires figurant à l'article 15 de ce décret que les conditions de forme et de délai prévues aux articles 37-2 à 37-7 du décret du 30 juillet 1987 précité, sont uniquement applicables, d'une part, aux demandes de prolongation d'un congé pour accident de service, ou pour maladie imputable au service, pour une période débutant après le 16 avril 2019 et, d'autre part, aux demandes initiales de congé pour invalidité temporaire imputable au service motivées par un accident ou une maladie dont la déclaration a été déposée après cette date. Les délais mentionnés à l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987 courent à compter du premier jour du deuxième mois suivant la publication de ce décret lorsqu'un accident ou une maladie n'a pas fait l'objet d'une déclaration avant cette date. 13. De première part, dans la mesure où les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de Mme B..., dont le trouble anxio-dépressif réactionnel a été médicalement constaté pour la première fois le 3 décembre 2014, soit avant le 13 avril 2019, était initialement exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues par les dispositions précitées de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et non celles énoncées par l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et les articles 37-1 et suivants du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 créés par le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019. La demande présentée devant le tribunal administratif de Limoges le 23 janvier 2015 tendant, pour les faits en cause, à l'annulation de l'arrêté du 20 février 2015 par lequel le maire de la commune d'Ussac a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des troubles qu'elle rencontre depuis le 3 décembre 2014, a interrompu le délai de prescription jusqu'à la date à laquelle l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 novembre 2019 a été notifié à Mme B.... 14. De second part, le délai de deux ans prévu au II de l'article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 est, contrairement à ce que soutient la commune d'Ussac, devenu applicable à la situation de Mme B... à partir du 1er juin 2019, premier jour du deuxième mois suivant la publication du décret du 10 avril 2019 dès lors qu'à cette date, la situation de Mme B... n'était pas déjà cristallisée par l'effet de la prescription. Par suite, si c'est à tort que le tribunal a jugé que le délai de deux ans prévu au II de l'article 37-3 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 n'était pas applicable à la situation de Mme B..., le maire de la commune d'Ussac n'en a pas moins commis une erreur de droit et d'appréciation en estimant que sa demande, présentée le 5 mars 2020, était tardive au motif que la déclaration de maladie professionnelle aurait été déposée au-delà de ce délai de deux ans. 15. En deuxième lieu, l'arrêt du 4 novembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 février 2015 du maire de la commune d'Ussac ayant refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 3 décembre 2014 n'a pas le même objet que la demande en litige tendant à l'annulation de la décision du 15 juillet 2020 portant rejet de la demande tendant à ce que le trouble anxio-dépressif réactionnel de Mme B... soit reconnu comme une maladie professionnelle. Il suit de là que la commune d'Ussac n'est pas fondée à soutenir que les prétentions de Mme B... méconnaissent la chose jugée le 4 novembre 2019. 16. En troisième lieu, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 17. Il ressort des énonciations de l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 4 novembre 2019, qui n'a certes pas l'autorité da chose jugée mais dont la teneur peut être prise en compte alors d'ailleurs que les constatations de fait y figurant ne sont pas sérieusement contestées, qu'une expertise médicale du 15 décembre 2014 a conduit à la rédaction d'un rapport établi le 17 décembre 2014 selon lequel Mme B... éprouvait des difficultés relationnelles avec sa hiérarchie depuis quelques années, qu'un rapport d'expertise rédigé le 18 novembre 2015 par un psychiatre des hôpitaux, à la demande du comité médical chargé d'émettre un avis sur la prolongation du congé de maladie ordinaire, relève la description faite par Mme B... d'une " dégradation de sa situation professionnelle depuis une dizaine d'années avec des frictions (...) apparues suite à des déconvenances personnelles " et de "tensions professionnelles avec son responsable hiérarchique direct (...) le maire de la commune d'Ussac " et qu'un certificat médical établi le 15 décembre 2014 par un médecin du travail relève que Mme B... avait à plusieurs reprises exprimé une situation de " mal être au travail ". Dans ces conditions, le trouble anxio-dépressif réactionnel présenté par Mme B..., qui a justifié des arrêts de travail sans discontinuité à compter du 3 décembre 2014 à la suite d'une altercation du même jour avec le maire de la commune d'Ussac, est directement lié à l'environnement délétère, corroboré par deux attestations d'anciens collègues de Mme B... rédigées en 2014, dans lequel elle a exercé ses fonctions. En se bornant à se prévaloir d'un certificat médical délivré le 3 février 2015 par le médecin traitant de Mme B... selon lequel elle n'a jamais bénéficié de traitement psychiatrique ni présenté de signes de dépression malgré ses difficultés familiales et personnelles, d'attestations de tiers selon lesquelles Mme B... critiquait sa hiérarchie dans un registre parfois insolent, discourtois ou irrespectueux et d'un prétendu ressentiment de l'intéressée à son absence de promotion au grade de rédacteur, la collectivité n'établit ni l'existence d'une circonstance particulière antérieure et étrangère aux conditions de travail ni un fait personnel pouvant justifier l'existence de la maladie. Le trouble anxio-dépressif réactionnel en cause constitue donc une maladie professionnelle. Il s'ensuit que c'est à juste titre que le tribunal a estimé que Mme B... était fondée à soutenir que la décision du 15 juillet 2020 par laquelle le maire de la commune d'Ussac a refusé de reconnaître l'origine professionnelle de sa maladie et la décision du 12 novembre 2020 portant rejet de son recours gracieux sont entachées d'erreur d'appréciation. 18. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ussac n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé la décision du 15 juillet 2020 et la décision du 12 novembre 2020. Sur les frais liés au litige : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'a pas dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme que demande la commune d'Ussac au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune d'Ussac une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance que Mme B... a exposés. D E C I D E : Article 1er : La requête de la commune d'Ussac est rejetée. Article 2 : La commune d'Ussac versera à Mme B... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Ussac et à Mme B.... Délibéré après l'audience du 11 février 2025 à laquelle siégeaient : Mme Fabienne Zuccarello, présidente de chambre, M. Nicolas Normand, président-assesseur, Mme Carine Farault, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mars 2025. Le rapporteur, Nicolas A... Le présidente, Fabienne ZuccarelloLa greffière, Virginie Santana La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 23BX00552
Cours administrative d'appel
Bordeaux