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Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 01/02/2012, 347353, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 9 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 10/00001 du 21 janvier 2011 par lequel la cour régionale des pensions d'Angers a confirmé le jugement du 10 décembre 2009 du tribunal départemental des pensions de la Sarthe accordant à M. Gustave A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant de la gendarmerie, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Hervé Guichon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A, Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après l'intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du deuxième alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que, passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; Considérant, par ailleurs, que les dispositions de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre s'appliquent aux pensionnés comme à l'administration ; que si elles prémunissent cette dernière contre des contestations tardives pour des motifs autres que les erreurs et omissions matérielles évoquées ci-dessus, elles garantissent réciproquement aux titulaires de pensions d'invalidité que leurs droits ne pourront être remis en cause par l'administration, sans condition de délai, pour des erreurs de droit ; qu'en tout état de cause, elles ne font pas obstacle à ce que les pensionnés puissent faire valoir utilement leurs droits devant la juridiction des pensions, pour quelque motif que ce soit, dans le délai de recours prévu par l'article 5 du décret du 20 février 1959, dont la durée de six mois, dérogatoire au droit commun, n'apparaît pas manifestement insuffisante à cet effet ; que, par suite, ces dispositions ne sont pas contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier protocole additionnel à cette convention garantissant le droit à un recours effectif devant une juridiction ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en écartant comme inopérante la fin de non-recevoir opposée par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, alors qu'eu égard au motif invoqué au soutien de cette demande, il lui incombait d'examiner si l'intéressé était recevable, compte tenu de la date et des conditions de la notification de l'arrêté lui ayant concédé sa pension, à solliciter la remise en cause de cette dernière, la cour régionale des pensions d'Angers a commis une erreur de droit ; Considérant toutefois qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : La notification des décisions prises en vertu de l'article L. 24, premier alinéa, du présent code, doit mentionner que le délai de recours contentieux court à partir de cette notification et que les décisions confirmatives à intervenir n'ouvrent pas de nouveau délai de recours ; qu'ainsi, le délai de recours contentieux de six mois prévu à l'article 5 du décret du 20 février 1959 court du jour où la décision prise en application du premier alinéa de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre a été notifiée au pensionné dans les formes prévues à l'article L. 25 du même code ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose à l'intéressé la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision contestée et du respect des formes prescrites pour cette notification par les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ; Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'intercalaire descriptif des infirmités ayant donné lieu à l'attribution de la pension d'invalidité de M. A, ou tout autre document tenant lieu de décision primitive de concession de cette pension, ait été notifié à l'intéressé selon les formes prescrites par l'article L. 25 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que, dès lors qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'administration ait justifié devant les juges du fond de la notification de l'arrêté du 25 mars 1975 par lequel elle a concédé cette pension à titre définitif et de la date prétendue du 26 avril 1975 à laquelle cette notification serait intervenue, ni la notification de la décision primitive de concession, ni à défaut la notification de la décision confirmative, n'a pu faire courir le délai du recours contentieux ; que, par suite, ce délai n'était pas expiré lorsque M. A a saisi le tribunal départemental des pensions de la Sarthe, le 4 novembre 2008, d'un recours tendant, d'une part, à contester le refus implicite opposé à sa demande de revalorisation de sa pension, d'autre part, à obtenir la réformation de l'arrêté lui ayant concédé cette pension à titre définitif ; que ce motif, qui répond à une fin de non-recevoir invoquée devant les juges du fond et dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif erroné en droit retenu par l'arrêt attaqué, dont il justifie le dispositif sur ce point ; Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée ; que ces modalités de mise en oeuvre du principe d'égalité sont applicables à l'édiction de normes régissant la situation des militaires qui, en raison de leur contenu, ne sont pas limitées à un même corps d'appartenance ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : La République française, reconnaissante envers les anciens combattants et victimes de la guerre qui ont assuré le salut de la patrie, s'incline devant eux et devant leurs familles. Elle proclame et détermine, conformément aux dispositions du présent code, le droit à réparation due : / 1° Aux militaires des armées de terre, de mer et de l'air, aux membres des forces françaises de l'intérieur, aux membres de la Résistance, aux déportés et internés politiques et aux réfractaires affectés d'infirmités résultant de la guerre (...) ; que les dispositions du code prévoient l'octroi d'une pension militaire d'invalidité aux militaires, quel que soit leur corps d'appartenance, aux fins d'assurer une réparation des conséquences d'une infirmité résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents dont ils ont été victimes à l'occasion du service ou de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; que le décret du 5 septembre 1956 relatif à la détermination des indices des pensions et accessoires de pensions alloués aux invalides au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre a fixé les indices de la pension d'invalidité afférents aux grades des sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie à un niveau inférieur aux indices attachés aux grades équivalents dans la marine nationale ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS n'invoque pas de considérations d'intérêt général de nature à justifier que le montant de la pension militaire d'invalidité concédée diffère, à grades équivalents, selon les corps d'appartenance des bénéficiaires des pensions ; que, par suite, en estimant que le décret du 5 septembre 1956 était contraire, sur ce point, aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour régionale des pensions d'Angers n'a pas commis d'erreur de droit ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Delaporte-Briard-Trichet, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier la somme de 2 000 euros à verser à cette société ; D E C I D E : --------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à la SCP Delaporte-Briard-Trichet, avocat de M. A, la somme de 2 000 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Gustave A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 01/02/2012, 334105, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 25 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/00001 du 28 septembre 2009 par lequel la cour régionale des pensions de Douai a confirmé le jugement du 13 novembre 2008 du tribunal départemental des pensions du Nord en tant qu'il a accordé à M. Jacques A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant de l'armée de terre, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 62-873 du 31 juillet 1962 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le décret n° 65-29 du 11 janvier 1965 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Hervé Guichon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. A, Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en écartant la fin de non-recevoir opposée par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A tendant à la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, sans examiner si l'intéressé était encore recevable, eu égard à la date et aux conditions de la notification de l'arrêté lui ayant concédé cette pension, à en solliciter la remise en cause pour le motif tiré de l'illégalité de la différence de traitement pratiquée entre les sous-officiers de la marine nationale et ceux des autres armées, la cour régionale des pensions de Douai a commis une erreur de droit ; Considérant toutefois qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 1er du décret du 11 janvier 1965, issu du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 : Les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au pensionné la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision invoquée et, si celle-ci est postérieure à la date d'entrée en vigueur du décret du 28 novembre 1983 précité, du respect des formes prescrites pour cette notification par l'article 1er du décret du 11 janvier 1965, tel que modifié par ce décret ; Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté du 7 février 2000 concédant à M. A sa pension militaire d'invalidité lui ait été notifié avec l'indication des voies et délais de recours ; qu'ainsi, la notification de cette décision n'a pu faire courir le délai du recours contentieux ; que, par suite, ce délai n'était pas expiré le 4 décembre 2007, date à laquelle M. A a saisi le tribunal départemental des pensions du Nord de son recours tendant, d'une part, à contester le refus implicite opposé à sa demande de revalorisation de sa pension, d'autre part, à obtenir la réformation de l'arrêté du 7 février 2000 lui ayant concédé cette pension ; que ce motif, dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif erroné en droit retenu par l'arrêt attaqué, dont il justifie le dispositif sur ce point ; Considérant, en second lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée ; que ces modalités de mise en oeuvre du principe d'égalité sont applicables à l'édiction de normes régissant la situation des militaires qui, en raison de leur contenu, ne sont pas limitées à un même corps d'appartenance ; Considérant que le décret du 5 septembre 1956 relatif à la détermination des indices des pensions et accessoires de pensions alloués aux invalides au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable au litige, fixait les indices de pension d'invalidité afférents aux grades des sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie à un niveau inférieur aux indices attachés aux grades équivalents dans la marine nationale ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'invoque pas de considérations d'intérêt général de nature à justifier que le montant de la pension militaire d'invalidité concédée diffère, à grades équivalents, selon les corps d'appartenance des bénéficiaires des pensions ; qu'il ne peut, à cet égard, utilement se prévaloir de la circonstance que la loi du 31 juillet 1962 de finances rectificative pour 1962 a prévu que les militaires radiés des cadres de l'armée active postérieurement au 2 août 1962 perçoivent une pension militaire d'invalidité calculée au taux de leur grade ; que, par suite, en estimant que le décret du 5 septembre 1956 était contraire, sur ce point, au principe d'égalité, la cour régionale des pensions de Douai n'a pas commis d'erreur de droit ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Le Bret-Desaché, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier la somme de 2 500 euros à verser à cette société ; D E C I D E : ---------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. A, une somme de 2 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Jacques A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 30/01/2012, 341937, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 27 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/02348 du 3 juin 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Pau a confirmé le jugement du 14 mai 2009 du tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques accordant à M. Pierre A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant-chef de l'armée de l'air, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent de maître principal de la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; Sur le pourvoi principal du MINISTRE DE LA DEFENSE : Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au pensionné la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision contestée et du respect des formes prescrites pour cette notification par les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a demandé le 29 septembre 2007 au MINISTRE DE LA DEFENSE de recalculer la pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée à titre définitif par arrêté du 5 décembre 1995 en fonction de l'indice, plus favorable, afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; que, par lettre 28 novembre 2007, le ministre lui a répondu que l'administration recherchait les moyens de donner une suite à sa demande ; qu'en l'absence d'autre réponse, M. A a présenté un recours contre ce qu'il a estimé être un rejet implicite de sa demande, devant le tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques qui, par jugement du 14 mai 2009, a fait droit à cette dernière ; que, sur appel formé au nom de l'Etat, la cour régionale des pensions de Pau a écarté la fin de non-recevoir opposée par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A, et a accordé la revalorisation sollicitée par l'intéressé avec effet à compter du 29 septembre 2007 ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, que l'administration ne justifiait pas que la notification de l'arrêté du 5 décembre 1995 comportât la mention des voies et délais de recours, la cour régionale des pensions en a légalement déduit qu'en l'absence de déclenchement du délai de recours contentieux, M. A restait recevable à demander la réformation de la décision lui ayant concédé sa pension, aux fins d'alignement de son indice sur celui appliqué, à grade équivalent, aux pensionnés de la marine nationale ; qu'un tel motif justifiant légalement la décision de la cour en ce qu'elle écarte la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande de M. A, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement contester le motif surabondant, tenant à ce que la discrimination invoquée par M. A étant de nature à lui causer un préjudice permanent et continu, aucun délai de forclusion ne pouvait, en tout état de cause, être opposé à sa demande de revalorisation ; Considérant que le moyen, tiré de ce que le principe d'égalité ne ferait pas obstacle à l'application d'indices de pension différents, d'une part, aux sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie, d'autre part, aux sous-officiers de la marine, n'a pas été invoqué devant la cour régionale des pensions de Pau ; qu'un tel moyen n'est pas né de l'arrêt attaqué et n'est pas d'ordre public ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement le soulever au soutien de son pourvoi contre l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE doit être rejeté ; Sur le pourvoi incident de M. A : Considérant qu'aux termes de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la troisième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages, afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux trois années antérieures. ; Considérant qu'après avoir énoncé à bon droit qu'en application de ces dispositions, M. A peut prétendre aux arrérages de sa pension revalorisée afférents à l'année au cours de laquelle sa demande a été présentée ainsi qu'aux trois années antérieures, la cour régionale des pensions de Pau a confirmé la décision des premiers juges ayant fixé la prise d'effet de cette revalorisation indiciaire au 29 septembre 2007, date de la demande préalable adressée par l'intéressé à l'administration ; qu'en statuant de la sorte, la cour a entaché sa décision d'une erreur de droit ; que, dès lors, son arrêt doit être annulé en tant qu'il confirme la disposition du jugement attaqué fixant la prise d'effet de la revalorisation de la pension de M. A au 29 septembre 2007 ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, M. A peut prétendre, en application des dispositions rappelées ci-dessus de l'article L. 108 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, aux arrérages de sa pension revalorisée afférents à l'année au cours de laquelle il a présenté sa demande de revalorisation ainsi qu'aux trois années antérieures, c'est-à-dire à compter du 1er janvier 2004 ; que, par suite, le jugement du tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques doit être réformé dans cette mesure ; Sur les conclusions de M. A présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; D E C I D E : ---------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Pau du 3 juin 2010 est annulé en tant qu'il fixe au 29 septembre 2007 la date de prise d'effet de la revalorisation de la pension militaire d'invalidité servie à M. A. Article 3 : La date d'effet de la revalorisation de la pension militaire d'invalidité servie à M. A est fixée au 1er janvier 2004. Article 4 : Le jugement du tribunal départemental des Pyrénées-Atlantiques du 14 mai 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision. Article 5 : L'Etat versera à M. A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Pierre A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 30/01/2012, 338442, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 avril et 6 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 08/03850 du 4 février 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Pau, infirmant le jugement du 22 septembre 2008 du tribunal départemental des pensions des Landes, a accordé à M. Claude A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant-chef de l'armée de l'air, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent de maître principal de la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de Me Spinosi, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à Me Spinosi, avocat de M. A, Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au pensionné la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision contestée et du respect des formes prescrites pour cette notification par les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a demandé le 21 décembre 2005 au MINISTRE DE LA DEFENSE de recalculer la pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée à titre définitif par arrêté du 9 juillet 1985 en fonction de l'indice, plus favorable, afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; que, par lettre du 17 janvier 2006, le ministre lui a répondu que l'administration recherchait les moyens de donner une suite à sa demande et qu'il en serait tenu informé dès que possible ; qu'en l'absence d'autre réponse, M. A a présenté un recours contre ce qu'il a estimé être un rejet implicite de sa demande, devant le tribunal départemental des pensions des Landes qui, par jugement du 22 septembre 2008, a rejeté son recours comme irrecevable ; que, sur appel de l'intéressé, la cour régionale des pensions de Pau a écarté la fin de non-recevoir opposée par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A, et a accordé la revalorisation sollicitée par l'intéressé avec effet au 1er janvier 2002 ; Considérant que la lettre d'attente adressée par l'administration à M. A le 17 janvier 2006 n'a pas été de nature à interrompre ou suspendre le délai au terme duquel, en vertu de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000, est née une décision implicite de rejet de sa demande de revalorisation formée le 21 décembre 2005, laquelle devait être regardée comme constituant un recours gracieux contre l'arrêté du 9 juillet 1985 portant concession de sa pension militaire d'invalidité ; que, par suite, en estimant que M. A était recevable à contester cette décision tacite, de nature à lier le contentieux devant le tribunal départemental des pensions, la cour régionale des pensions de Pau n'a pas commis d'erreur de droit ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, que l'administration ne justifiait pas que la notification de l'arrêté du 9 juillet 1985 comportât la mention des voies et délais de recours, la cour régionale des pensions en a légalement déduit qu'en l'absence de déclenchement du délai de recours contentieux, M. A restait recevable à demander la réformation de la décision lui ayant concédé sa pension, aux fins d'alignement de son indice sur celui appliqué, à grade équivalent, aux pensionnés de la marine nationale ; qu'un tel motif justifiant légalement la décision de la cour en ce qu'elle écarte la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande de M. A, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement contester le motif surabondant, tenant à ce que la discrimination invoquée par M. A étant de nature à lui causer un préjudice permanent et continu, aucun délai de forclusion ne pouvait, en tout état de cause, être opposé à sa demande de revalorisation ; Considérant que le moyen, tiré de ce que le principe d'égalité ne ferait pas obstacle à l'application d'indices de pension différents, d'une part, aux sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie, d'autre part, aux sous-officiers de la marine, n'a pas été invoqué devant la cour régionale des pensions de Pau ; qu'un tel moyen, qui en tout état de cause n'est pas fondé, n'est pas né de l'arrêt attaqué et n'est pas d'ordre public ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement le soulever au soutien de son pourvoi contre l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE doit être rejeté ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Spinosi, avocat de A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cet avocat ; D E C I D E : ---------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à Me Spinosi, avocat de M. A, une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Claude A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 30/01/2012, 344494, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 23 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/03257 du 7 octobre 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Pau a confirmé le jugement du 13 août 2009 du tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques accordant à M. Serge A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant-chef de l'armée de terre, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A, Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au pensionné la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision contestée et du respect des formes prescrites pour cette notification par les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a demandé le 26 août 2006 au MINISTRE DE LA DEFENSE de recalculer la pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée à titre définitif par arrêté du 16 mars 1993 en fonction de l'indice, plus favorable, afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; que, par lettre du 21 septembre 2006, le ministre lui a répondu que l'administration recherchait les moyens de donner une suite à sa demande et qu'il en serait tenu informé dès que possible ; qu'en l'absence d'autre réponse, M. A a présenté un recours contre ce qu'il a estimé être un rejet implicite de sa demande, devant le tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques qui, par jugement du 13 août 2009, a fait droit à cette dernière ; que, sur appel formé au nom de l'Etat, la cour régionale des pensions de Pau a écarté la fin de non-recevoir opposée par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A, et a accordé la revalorisation sollicitée par l'intéressé avec effet au 1er janvier 2003 ; Considérant que la lettre d'attente adressée par l'administration à M. A le 21 septembre 2006 n'a pas été de nature à interrompre ou suspendre le délai au terme duquel, en vertu de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000, est née une décision implicite de rejet de sa demande de revalorisation formée le 26 août 2006, laquelle devait être regardée comme constituant un recours gracieux contre l'arrêté du 16 mars 1993 portant concession de sa pension militaire d'invalidité ; que, par suite, en estimant que M. A était recevable à contester cette décision tacite, de nature à lier le contentieux devant le tribunal départemental des pensions, la cour régionale des pensions de Pau n'a pas commis d'erreur de droit ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, que l'administration ne justifiait pas que la notification de l'arrêté du 16 mars 1993 comportât la mention des voies et délais de recours, la cour régionale des pensions en a légalement déduit qu'en l'absence de déclenchement du délai de recours contentieux, M. A restait recevable à demander la réformation de la décision lui ayant concédé sa pension, aux fins d'alignement de son indice sur celui appliqué, à grade équivalent, aux pensionnés de la marine nationale ; qu'un tel motif justifiant légalement la décision de la cour en ce qu'elle écarte la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande de M. A, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement contester, comme entaché d'une insuffisance de motivation et d'une erreur de droit, le motif surabondant, tenant à ce que la discrimination invoquée par M. A étant de nature à lui causer un préjudice permanent et continu, aucun délai de forclusion ne pouvait, en tout état de cause, être opposé à sa demande de revalorisation ; Considérant que le moyen, tiré de ce que le principe d'égalité ne ferait pas obstacle à l'application d'indices de pension différents, d'une part, aux sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie, d'autre part, aux sous-officiers de la marine, n'a pas été invoqué devant la cour régionale des pensions de Pau ; qu'un tel moyen, qui en tout état de cause n'est pas fondé, n'est pas né de l'arrêt attaqué et n'est pas d'ordre public ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement le soulever au soutien de son pourvoi contre l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS doit être rejeté ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à cette société ; D E C I D E : ---------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à la SCP Waquet-Farge-Hazan, avocat de M. A, la somme de 2 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Serge A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 01/02/2012, 344495, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 23 novembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/00004 du 21 septembre 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Bordeaux, infirmant le jugement du 26 juin 2009 du tribunal départemental des pensions de la Gironde, a accordé à M. Robert A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant de l'armée de terre, sur la base de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Hervé Guichon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Tiffreau, Corlay, Marlange, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Tiffreau, Corlay, Marlange, avocat de M. A, Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées (...) par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; qu'enfin, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 25 du même code : La notification des décisions prises en vertu de l'article L. 24, premier alinéa, du présent code, doit mentionner que le délai de recours contentieux court à partir de cette notification et que les décisions confirmatives à intervenir n'ouvrent pas de nouveau délai de recours ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester la décision lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander la révision de cette dernière que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; que ce délai de six mois court du jour où la décision prise en application du premier alinéa de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre a été notifiée au pensionné dans les formes prévues, notamment, à l'article L. 25 du même code ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au demandeur de pension la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision invoquée et du respect des formes prescrites par les textes en vigueur pour cette notification ; Considérant que, pour écarter la fin de non-recevoir opposée devant elle par le commissaire du gouvernement, tirée de la forclusion de la demande de M. A tendant à ce que sa pension militaire d'invalidité soit recalculée sur la base de l'indice, plus favorable, assigné aux pensions servies aux personnels de la marine nationale de grade équivalent, la cour régionale des pensions de Bordeaux, après avoir relevé que les exemplaires des notifications des différents arrêtés de concession de pension versés au dossier ne comportaient pas la première des mentions exigées par le dernier alinéa de l'article L. 25, en a conclu que ces notifications, du fait de leur irrégularité, n'avaient pu faire courir le délai de recours contentieux et que, par suite, l'action de M. A n'était pas forclose ; qu'eu égard à ce motif, le moyen du pourvoi tiré de ce que la cour régionale des pensions aurait entaché son arrêt d'une erreur de droit en ne relevant pas que la demande de M. A n'entrait dans aucun des cas, limitativement prévus par l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, est inopérant ; Considérant, en second lieu, que le représentant de l'Etat s'est abstenu de soutenir devant les juges du fond que le principe général d'égalité devant la loi ne fait pas obstacle à l'application d'indices de pension différents, d'une part, aux sous-officiers des armées de terre et de l'air et de la gendarmerie, d'autre part, aux sous-officiers de la marine nationale ; qu'un tel moyen n'est pas né de l'arrêt attaqué et n'est pas d'ordre public ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ne peut utilement l'invoquer pour contester le bien-fondé de l'arrêt qu'il attaque ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Tiffreau-Corlay, Marlange, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cette société ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est rejeté. Article 2 : L'Etat versera à la SCP Tiffreau-Corlay, Marlange, avocat de M. A, la somme de 3 000 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Robert A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 01/02/2012, 340978, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 28 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 8 du 19 avril 2010 de la cour régionale des pensions de Bastia en tant qu'il a infirmé le jugement du 6 septembre 2006 du tribunal départemental des pensions de la Corse du Sud reconnaissant à M. Toussaint A un droit à pension au taux de 40 % pour l'infirmité dénommée séquelles de blessures à l'abdomen et qu'il a reconnu à l'intéressé un droit à pension au taux de 65 % pour cette infirmité désormais dénommée séton de l'abdomen, cicatrice de laparatomie sus et sous-ombilicale, douloureuse et adhérente, éventration avec écoulement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions présentées, à ce titre, par M. A devant la cour régionale des pensions de Bastia ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Yves Doutriaux, Conseiller d'Etat, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public, Considérant que les décisions de concession définitive de pensions ne peuvent, en l'absence de toute disposition législative contraire, être remises en cause hors les cas prévus aux articles L. 29, L. 30 et L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Considérant que l'article L. 29 de ce code prévoit que le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée et que la pension est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur, l'aggravation ne pouvant être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée ; que cette disposition, qui exige une aggravation réelle des blessures ou maladies susceptible d'être retenue au regard des exigences de l'article L. 29, ne permet pas de remettre en cause, en l'absence d'aggravation effective, les bases de la liquidation initiale ni en ce qui concerne le caractère des infirmités pensionnées ni en ce qui concerne l'application qui a été faite des barèmes lors de cette liquidation ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A s'est vu concéder, par arrêté 5 octobre 1998, une pension militaire d'invalidité à titre définitif au taux de 100 %, assortie du bénéfice de l'article L. 36, pour neuf infirmités dont une infirmité qualifiée de séton de l'abdomen, cicatrice de laparatomie sus et sous-ombilicale douloureuse adhérente, éventration et écoulement sanguinolent , évaluée au taux de 40 % par application du barème prévu à l'article L. 9 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que l'intéressé a contesté devant le tribunal départemental des pensions de la Corse du Sud l'arrêté du 18 décembre 2000 qui a, sur ce point, rejeté sa demande de révision pour aggravation et a maintenu le taux de 40 % ; que le tribunal départemental des pensions, après expertise, n'a pas remis en cause ce taux et a rejeté la demande de M. A ; que la cour régionale des pensions militaires de Bastia, pour porter, par l'arrêt attaqué, à 65 % le taux de l'infirmité considérée, n'a pas retenu l'aggravation effective de l'infirmité, mais s'est bornée à faire application du barème de 1887 plus favorable sur ce point que celui qui avait été initialement appliqué ; Considérant qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune aggravation effective de l'infirmité n'était reconnue dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, la cour régionale des pensions a commis une erreur de droit ; que le MINISTRE DE LA DEFENSE est, par suite, fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a reconnu à M. A un droit à pension au taux de 65 % pour l'infirmité dénommée séton de l'abdomen, cicatrice de laparatomie sus et sous ombilicale, douloureuse et adhérente, éventration avec écoulement ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert commis par le tribunal départemental des pensions, que l'infirmité en cause a été opérée en 2001 et n'a pas connu d'aggravation ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, en l'absence d'aggravation effective, les bases de liquidation de la pension concédée à M. A à titre définitif ne peuvent être remises en cause pour ce qui concerne l'application des barèmes qui a été faite lors de cette liquidation ; que M. A n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal départemental des pensions a rejeté sa demande concernant l'infirmité qualifiée de séton de l'abdomen, cicatrice de laparatomie sus et sous-ombilicale, douloureuse, adhérente, éventration et écoulement sanguinolent ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 19 avril 2010 de la cour régionale des pensions de Bastia est annulé en tant qu'il a reconnu à M. A un droit à pension au taux de 65 % pour l'infirmité dénommée séton de l'abdomen, cicatrice de laparatomie sus et sous ombilicale, douloureuse et adhérente, éventration avec écoulement . Article 2 : L'appel formé dans cette mesure par M. A devant la cour régionale des pensions de Bastia est rejeté. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Toussaint A et au MINISTRE DE LA DEFENSE.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 01/02/2012, 345164, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2010 et 25 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Francis A, demeurant au ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 2740/10 du 4 novembre 2010 de la cour régionale des pensions militaires de Nancy en tant qu'il a fixé au 20 novembre 2008 la date à compter de laquelle sa pension militaire d'invalidité doit être revalorisée et infirmé, sur ce point, le jugement du tribunal départemental des pensions des Vosges du 25 janvier 2010 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de confirmer, sur ce point, le jugement rendu par le tribunal départemental des pensions militaires des Vosges du 25 janvier 2010 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Carbonnier, son avocat, d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Isabelle de Silva, Conseiller d'Etat, - les observations de Me Carbonnier, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public, La parole ayant à nouveau été donnée à Me Carbonnier, avocat de M. A ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. / L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande ; qu'il résulte de ces dispositions que le pensionné est fondé à demander la revalorisation de sa pension et des arrérages y afférents à compter de la date de sa demande initiale ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, sergent dans l'armée de terre, a sollicité la revalorisation de la pension militaire d'invalidité qui lui a été concédée par arrêté du 27 mai 2002, par lettre du 16 avril 2007, réitérée le 18 août 2007 ; qu'il s'ensuit qu'en fixant au 20 novembre 2008, date de la saisine du tribunal départemental des pensions militaires des Vosges, la date de revalorisation de cette pension, la cour régionale des pensions de Nancy a entaché sa décision d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; que M. A est fondé, en conséquence, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il a fixé au 20 novembre 2008 et non au 16 avril 2007, la date à compter de laquelle sa pension militaire d'invalidité doit être revalorisée ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant, comme il a été dit ci-dessus, que la revalorisation d'une pension d'invalidité prend effet à compter de la date de la demande initiale ; qu'ainsi, le ministre de la défense et des anciens combattants n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal départemental des pensions des Vosges a fixé au 16 avril 2007 la date à compter de laquelle la pension militaire d'invalidité de M. A doit être revalorisée ; Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Carbonnier, avocat de M. A, de la somme de 3 000 euros, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 4 novembre 2010 de la cour régionale des pensions de Nancy est annulé en tant qu'il a fixé au 20 novembre 2008 la date à compter de laquelle la pension militaire d'invalidité de M. A doit être revalorisée. Article 2 : Le recours présenté par le ministre de la défense et des anciens combattants devant la cour régionale des pensions militaires de Nancy est rejeté en tant qu'il porte sur la date de revalorisation de la pension de M. A. Article 3 : L'Etat versera à Me Carbonnier, avocat de M. A la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Francis A et au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 01/02/2012, 341837, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juillet 2010 et 21 janvier 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kada B, demeurant ...; M. B demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 08/00083 du 9 mars 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Montpellier a confirmé le jugement n° 03/00007 du 22 juillet 2008 du tribunal départemental des pensions de l'Hérault ayant rejeté sa demande de pension à titre de victime civile ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler ce jugement et la décision du 6 juin 2002 rejetant sa demande de pension ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Peignot et Garreau, son avocat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 63-778 du 31 juillet 1963 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Yves Doutriaux, Conseiller d'Etat, - les observations de la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de M. B, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public, La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Peignot, Garreau, Bauer-Violas, avocat de M. B ; Considérant que si les dispositions de l'article L. 107 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ont pour effet de suspendre le droit à l'obtention ou à la jouissance des pensions militaires du fait des circonstances qui font perdre la qualité de Français, durant la privation de cette qualité , ces dispositions ne font pas, par elles-mêmes, obstacle à l'attribution d'une pension à une personne ayant perdu la nationalité française en raison de l'accession à l'indépendance d'un territoire antérieurement français ; que, par suite, la cour régionale des pensions de Montpellier a commis une erreur de droit en se fondant sur les dispositions de l'article L. 107 de ce code pour confirmer le rejet de la demande de pension présentée par M. B ; que ce dernier est, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'en vertu de l'article 13 de la loi du 13 juillet 1963, les personnes de nationalité française ayant subi en Algérie depuis le 31 octobre 1954 et jusqu'au 29 septembre 1962 des dommages physiques du fait d'attentat ou de tout autre acte de violence en relation avec les événements survenus sur ce territoire ont droit à pension ; Considérant, toutefois, que M. B n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait été victime, avant le 29 septembre 1962, d'un attentat ou d'un acte de violence de la nature de ceux visés par l'article 13 de la loi du 13 juillet 1963 ; qu'il n'est, dès lors, en tout état de cause, pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal départemental des pensions de l'Hérault a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 6 juin 2002 rejetant sa demande de pension présentée à titre de victime civile ; Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme demandée par l'avocat de M. B sur le fondement de cet article et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 9 mars 2010 de la cour régionale des pensions de Montpellier est annulé. Article 2 : L'appel formé par M. B devant la cour régionale des pensions de Montpellier et le surplus des conclusions de son pourvoi sont rejetés. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Kada B et au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 23/01/2012, 340662, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 17 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/02816 du 13 avril 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Bordeaux a, à la demande de Mme Yamna A, veuve B, d'une part, réformé le jugement n° 05/00128 du 6 juin 2008 par lequel le tribunal départemental des pensions de la Gironde a rejeté sa demande tendant à la réformation de la décision du 23 mai 2005 du ministre de la défense rejetant sa demande de réversion de la pension militaire d'invalidité de son époux décédé le 1er janvier 1999, d'autre part, annulé la décision du 23 mai 2005 du ministre de la défense refusant à Mme A le bénéfice d'une pension de veuve et lui a accordé cette pension à compter de la date de sa demande ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Catherine Chadelat, Conseiller d'Etat, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B, ressortissant marocain ayant servi dans l'armée française du 5 mars 1944 au 1er février 1949, a été admis par arrêté du 15 mars 1959 au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité, transformée en indemnité personnelle et viagère en application des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 de finances pour 1960 ; qu'il a épousé en 1982 Mme Yamna A, ressortissante marocaine ; que M. B est décédé le 1er janvier 1999 ; que, par une demande adressée à l'administration le 11 août 2004, Mme A a sollicité le bénéfice d'une pension de réversion du chef de son époux décédé ; que, par une décision du 23 mai 2005, le ministre de la défense a rejeté sa demande au motif que son mariage était postérieur à la date à laquelle est appréciée la situation familiale ouvrant droit à réversion, soit le 1er janvier 1961, date d'entrée en vigueur de l'article 71 de la loi de finances pour 1960 ; que, par un jugement du 6 juin 2008, le tribunal départemental des pensions de la Gironde a confirmé la décision du ministre ; que, par l'arrêt attaqué, la cour régionale des pensions de Bordeaux a infirmé le jugement du tribunal et accordé à Mme A le bénéfice d'une pension de veuve à compter de la date de sa demande ; Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation ; qu'aux termes du deuxième alinéa de son article 62 : Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ; qu'enfin, aux termes du troisième alinéa du même article : Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ; Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 62 de la Constitution qu'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution sur le fondement de l'article 61-1 n'est pas annulée rétroactivement mais abrogée pour l'avenir à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; que, par sa décision n° 2010-108 QPC en date du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions précitées, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur ; Considérant que, par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII ; qu'il a jugé que : afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, l'abrogation des dispositions précitées prendra effet à compter du 1er janvier 2011 ; afin de préserver l'effet utile de la présente décision à la solution des instances actuellement en cours, il appartient, d'une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'au 1er janvier 2011 dans les instances dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles et, d'autre part, au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de la présente décision ; Considérant que, à la suite de cette décision, l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a défini de nouvelles dispositions pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France et abrogé plusieurs dispositions législatives, notamment celles de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 ; que, par ailleurs, son paragraphe VI prévoit que le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances ; qu'enfin, aux termes du XI du même article : Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2011 ; Considérant que, comme il a été dit, le Conseil constitutionnel a jugé qu'il appartenait au législateur de prévoir une application aux instances en cours à la date de sa décision des dispositions qu'il adopterait en vue de remédier à l'inconstitutionnalité constatée ; que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 ne se borne pas à déterminer les règles de calcul des pensions servies aux personnes qu'il mentionne, mais abroge aussi des dispositions qui définissent, notamment, les conditions dans lesquelles est ouvert le droit à une pension de réversion ; qu'ainsi, alors même qu'il mentionne seulement la révision des pensions , le paragraphe VI de l'article 211 précité doit être regardé comme s'appliquant aussi aux demandes de pension de réversion ; Considérant que, à la date de l'arrêt attaqué, les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et celles de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 définissaient les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion était ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger ; qu'afin de préserver l'effet utile de la décision précitée du Conseil constitutionnel à la solution de l'instance ouverte par la demande de Mme A, en permettant au juge du fond de remettre en cause, dans les conditions et limites définies par le paragraphe VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les effets produits par les dispositions mentionnées ci-dessus, il incombe au juge de cassation, après avoir sursis à statuer comme l'y invitait la décision du Conseil constitutionnel, d'annuler, sans qu'il soit besoin pour lui d'examiner les moyens du pourvoi dont il est saisi, l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur le droit à pension de réversion de Mme A : Sur la période postérieure au 11 août 2004 : Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et celles de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002, qui définissaient, à la date du jugement attaqué, les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion était ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, ont été abrogées à compter du 1er janvier 2011, les premières par l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les secondes par la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; qu'en application du VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, dont la portée a été précisée ci-dessus, il y a lieu d'écarter ces dispositions législatives pour statuer sur le droit à pension de réversion de Mme A à compter de la date de réception de sa demande par l'administration, soit à compter du 11 août 2004 ; Considérant, d'une part, que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 n'ayant substitué aucune disposition nouvelle à celles qui doivent ainsi être écartées pour définir les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion est ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, il y a lieu de faire application des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre relatives aux pensions des ayants cause applicables à la date du décès de l'ayant droit ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction en vigueur le 1er janvier 1999 : Ont droit à pension : / (...) 3° Les veuves des militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 85 % ou en possession de droits à cette pension. / Dans les trois cas, il y a droit à pension si le mariage est antérieur soit à l'origine, soit à l'aggravation de la blessure ou de la maladie, à moins qu'il ne soit établi qu'au moment du mariage l'état du mari pouvait laisser prévoir une issue fatale à brève échéance. / La condition d'antériorité du mariage ne sera pas exigée de la veuve lorsqu'elle aura eu un ou plusieurs enfants légitimes ou légitimés ou naturels reconnus dans les conditions prévues à l'article L. 64, ainsi que de la veuve sans enfant qui pourrait prouver qu'elle a eu une vie commune de trois ans avec le mutilé, quelle que soit la date du mariage (...) ; qu'il résulte de l'instruction que Mme A, qui a eu trois enfants avec M. B, remplit les conditions ainsi prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre pour l'obtention d'une pension de veuve ; que sa demande de versement d'une pension de réversion du chef de son mari décédé a été reçue par l'administration le 11 août 2004 ; qu'elle est donc fondée à demander à bénéficier d'une telle pension à compter de cette date ; Considérant, d'autre part, que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 prévoit de nouvelles règles pour le calcul du montant des pensions des personnes qu'il mentionne ; que ces règles sont applicables pour le calcul de la pension de Mme A ; Sur la période antérieure au 11 août 2004 : Considérant que, dans l'exercice du contrôle de conformité des lois à la Constitution qui lui incombe selon la procédure définie à l'article 61-1 de la Constitution, le Conseil constitutionnel a le pouvoir d'abroger les dispositions législatives contraires à la Constitution ; que les juridictions administratives et judiciaires, à qui incombe le contrôle de la compatibilité des lois avec le droit de l'Union européenne ou les engagements internationaux de la France, peuvent déclarer que des dispositions législatives incompatibles avec le droit de l'Union ou ces engagements sont inapplicables au litige qu'elles ont à trancher ; qu'il appartient, par suite, au juge du litige, s'il n'a pas fait droit à l'ensemble des conclusions du requérant en tirant les conséquences de la déclaration d'inconstitutionnalité d'une disposition législative prononcée par le Conseil constitutionnel, d'examiner, dans l'hypothèse où un moyen en ce sens est soulevé devant lui, s'il doit, pour statuer sur les conclusions qu'il n'a pas déjà accueillies, écarter la disposition législative en cause du fait de son incompatibilité avec une stipulation conventionnelle ou, le cas échéant, une règle du droit de l'Union européenne dont la méconnaissance n'aurait pas été préalablement sanctionnée ; Considérant qu'à cette fin, lorsqu'est en litige une décision refusant au requérant l'attribution d'un droit auquel il prétend et qu'est invoquée l'incompatibilité de la disposition sur le fondement de laquelle le refus lui a été opposé avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, il incombe au juge, en premier lieu, d'examiner si le requérant peut être regardé comme se prévalant d'un bien au sens des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel et, en second lieu, quand tel est le cas, si la disposition législative critiquée doit être écartée comme portant atteinte à ce bien de façon discriminatoire et, par suite, comme étant incompatible avec les stipulations de l'article 14 de la convention ; En ce qui concerne le droit à pension de réversion : Considérant qu'aux termes du I de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 : A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté, ou ayant été placés sous le protectorat ou la tutelle de la France, seront remplacées, pendant la durée normale de leur jouissance personnelle, par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites allocations ou pensions, à la date de leur transformation ; qu'aux termes du I de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 : Les prestations servies en application des articles (...) 71 de la loi de finances pour 1960 (...) sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants ; qu'aux termes du VI du même article : Les prestations servies en application des textes visés au I peuvent faire l'objet, à compter du 1er janvier 2002 et sur demande, d'une réversion. L'application du droit des pensions aux intéressés et la situation de famille sont appréciées à la date d'effet des dispositions visées au I pour chaque Etat concerné ; Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le droit à la réversion d'une pension militaire d'invalidité versée à un ressortissant marocain en application du I de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 s'apprécie au regard de la situation de famille de l'ayant droit à la date du 1er janvier 1961, et non à la date de son décès ; qu'il résulte de l'instruction que M. B a cessé son activité dans l'armée française le 1er février 1949 et que son mariage avec Mme A a eu lieu en 1982 ; que, ce mariage étant postérieur à la date d'effet des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959, Mme A, sa veuve, ne remplit pas les conditions prévues par le VI de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 pour bénéficier d'une pension militaire de réversion ; Considérant, toutefois, que Mme A soutient que les dispositions du VI de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 sont incompatibles avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, en ce qu'elles instaurent une discrimination fondée sur la nationalité en appliquant aux veuves de militaires étrangers une condition d'antériorité du mariage par rapport à la date d'effet de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959, quand les veuves de militaires français se voient appliquer les dispositions de l'article L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, lesquelles imposent une condition d'antériorité du mariage par rapport au fait générateur de l'invalidité pensionnée, mais n'exigent pas cette condition dans le cas où les conjoints ont eu un ou plusieurs enfants ou bien lorsque le conjoint survivant peut établir avoir eu une vie commune de trois ans avec le conjoint pensionné, quelle que soit la date du mariage ; Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ; qu'aux termes de l'article 14 de cette convention : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; Considérant, d'une part, que le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre prévoit que la pension servie à un ayant droit est, en principe, réversible, notamment au profit de sa veuve ; que, ainsi qu'il a été dit, Mme A est, depuis le 1er janvier 1999, veuve d'un militaire titulaire d'une pension concédée en application de ce code ; que, par suite, si la loi applicable exclut pour elle, sur le seul fondement d'un critère relatif à la nationalité du titulaire de la pension, le bénéfice d'une pension de réversion, Mme A, qui remplit la condition d'être veuve d'un titulaire d'une pension, peut se prévaloir d'un droit patrimonial, qui doit être regardé comme un bien au sens des stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et peut demander au juge d'écarter l'application des dispositions du VI de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 en invoquant leur incompatibilité avec les stipulations de l'article 14 de la convention ; Considérant, d'autre part, qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 de la convention, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; que la différence de situation existant entre des ayants cause d'anciens militaires de la France, selon que ceux-ci ont la nationalité française ou sont ressortissants d'Etats devenus indépendants, ne justifie pas, eu égard à l'objet des pensions de réversion, une différence de traitement ; que cette différence de traitement ne peut être regardée comme reposant sur un critère en rapport avec l'objectif de la loi du 30 décembre 2002 ; que les dispositions du VI de l'article 68 de cette loi étant, de ce fait, incompatibles avec les stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le ministre de la défense devait examiner les droits à pension de Mme A au regard du droit commun applicable aux veuves de titulaires d'une pension militaire d'invalidité, soit l'article L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'en vertu de ces dispositions, ainsi qu'il a été dit, Mme A remplissait les conditions prévues pour l'obtention d'une pension de veuve ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, en l'absence de moyen soulevé par le ministre chargé du budget opposant à l'intéressée la prescription prévue par l'article L. 74 du code des pensions civiles et militaires de retraite, Mme A a droit, pour l'ensemble de la période comprise entre le 1er janvier 1999, date du décès de son mari, et le 11 juin 2004, à une pension de réversion ; En ce qui concerne le taux de la pension de réversion : Considérant qu'aux termes du IV de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 : Sous les réserves mentionnées au deuxième alinéa du présent IV (....), les dispositions des II et III sont applicables à compter du 1er janvier 1999. / Ce dispositif spécifique s'applique sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des contentieux contestant le caractère discriminatoire des textes visés au I, présentés devant les tribunaux avant le 1er novembre 2002 ; Considérant qu'il résulte des dispositions du second alinéa du IV précité que, pour la période comprise entre le 1er janvier 1999 et le 11 août 2004, Mme A, qui n'a engagé aucun contentieux contestant le caractère discriminatoire des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 avant la date d'entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2002, le 5 novembre 2003, ne peut prétendre, conformément aux dispositions du premier alinéa du même IV, qu'à une pension calculée en application des dispositions des I et II de l'article 68 ; Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal départemental des pensions de la Gironde a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre du 23 mai 2005 lui refusant l'attribution d'une pension de veuve à compter du 1er janvier 1999 dans des conditions conformes aux motifs énoncés ci-dessus ; Sur les conclusions à fin d'injonction : Considérant que le contentieux des pensions est un contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient, dès lors, au juge saisi de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés, sauf à renvoyer à l'administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige qu'il lui appartient de fixer ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre aux ministres chargés de la défense et du budget de procéder, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, à la liquidation de la pension de veuve à laquelle Mme A a droit ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 13 avril 2010 de la cour régionale des pensions de Bordeaux et le jugement du 6 juin 2008 du tribunal départemental des pensions de la Gironde sont annulés. Article 2 : La décision du MINISTRE DE LA DEFENSE du 23 mai 2005 est annulée. Article 3 : L'Etat versera à Mme A une pension de réversion du chef de son époux à compter du 1er janvier 1999 dans les conditions fixées par la présente décision. Article 4 : Il est enjoint aux ministres chargés de la défense et du budget de procéder, dans le délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, à la liquidation de la pension de veuve à laquelle Mme A a droit. Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à Mme Yamna A.
Conseil d'Etat