5954 results
Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 30/12/2011, 325994, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 12 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par Mme Bernia A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 26 janvier 2009 par lequel la cour régionale des pensions de Nîmes a confirmé le jugement du 10 janvier 2006 du tribunal départemental des pensions du Gard refusant de lui reconnaître un droit à pension de réversion ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) d'enjoindre au ministre de la défense de réexaminer sa situation en vue d'obtenir une pension de réversion, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 81-734 du 3 août 1981 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Frédéric Desportes, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Tiffreau, Corlay, Marlange, avocat de Mme A, - les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Tiffreau, Corlay, Marlange, avocat de Mme A ; Considérant que Mme A, ressortissante algérienne, a épousé en 1969 M. B, ancien soldat de l'armée française, également de nationalité algérienne et titulaire d'une pension militaire d'invalidité ; qu'à la suite du décès de son mari survenu le 5 juin 2003, elle a sollicité le 9 septembre suivant une pension de réversion que le ministre de la défense lui a refusée par une décision du 4 décembre 2003 ; que, pour rejeter son recours par un jugement du 10 janvier 2006, le tribunal départemental des pensions du Gard a relevé que le mariage avait été célébré postérieurement au 3 juillet 1962, date à laquelle, en application des dispositions de l'article 68 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 combinées avec celles de l'article 26 de la loi n° 81-734 du 3 août 1981, il convenait d'apprécier la situation de famille pour statuer sur le droit à pension de réversion du conjoint survivant d'un ressortissant algérien titulaire d'une pension militaire d'invalidité ; que, par l'arrêt du 26 janvier 2009 contre lequel Mme A se pourvoit en cassation, la cour régionale des pensions de Nîmes s'est fondée sur le même motif pour rejeter l'appel de l'intéressée ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi ; Considérant que, par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article 26 de la loi n° 81-734 du 3 août 1981 de finances rectificative pour 1981, de l'article 68 de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII, et de l'article 100 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007, à l'exception du paragraphe V ; que le Conseil constitutionnel a précisé qu'afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité, l'abrogation de ces dispositions prendrait effet à compter du 1er janvier 2011 et qu'afin de préserver l'effet utile de sa décision dans les instances en cours dont l'issue dépendait de l'application des dispositions censurées, il appartiendrait, d'une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'au 1er janvier 2011 et, d'autre part, au législateur de prévoir une application dans ces instances des dispositions qu'il édicterait ; Considérant qu'à la suite de cette décision l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a fixé des règles nouvelles pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France et abrogé plusieurs dispositions législatives, notamment celles de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 ; qu'aux termes de son paragraphe VI, l'article 211 est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances ; Considérant que, comme il a été dit, le Conseil constitutionnel a jugé qu'il appartenait au législateur de prévoir une application aux instances en cours à la date de sa décision des dispositions qu'il adopterait en vue de remédier à l'inconstitutionnalité constatée ; que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 ne se borne pas à déterminer les règles de calcul des pensions servies aux personnes qu'il mentionne, mais abroge aussi des dispositions qui définissent, notamment, les conditions dans lesquelles est ouvert le droit à une pension de réversion ; qu'ainsi, alors même qu'il mentionne seulement la révision des pensions , le paragraphe VI de l'article 211 précité doit être regardé comme s'appliquant aussi aux demandes de pension de réversion ; Considérant que, pour statuer, par l'arrêt attaqué, sur le droit de Mme A à percevoir une pension de réversion, la cour régionale des pensions de Nîmes s'est fondée sur les dispositions déclarées inconstitutionnelles de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002 combinées avec celles de l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 1981 ; qu'afin de préserver l'effet utile de la décision du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel dans l'instance ouverte par la demande de Mme A, il incombe au juge de cassation, après avoir sursis à statuer comme l'y invitait la décision du Conseil constitutionnel, d'annuler l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; Considérant qu'en application du VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, dont la portée a été précisée ci-dessus, il y a lieu d'écarter les dispositions de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002 et de l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 1981 pour statuer sur le droit à pension de réversion de Mme A à compter de la date de réception de sa demande par l'administration, soit à compter du 9 septembre 2003 ; que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 n'ayant substitué aucune disposition nouvelle à celles qui doivent ainsi être écartées pour définir les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion est ouvert à la veuve d'un ayant droit algérien, il y a lieu de faire application des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre relatives aux pensions des ayants cause applicables à la date du décès de l'ayant droit ; Considérant qu'aux termes de l'article 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : Ont droit à pension : ... 2° Les veuves des militaires et marins dont la mort a été causée par des maladies contractées ou aggravées par suite de fatigues, dangers ou accidents survenus par le fait ou à l'occasion du service, ainsi que les veuves de militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 85 % ou en possession de droits à cette pension ; 3° Les veuves des militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension ; Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B était titulaire d'une pension définitive au titre d'une invalidité de 80 % ; que si la requérante, qui n'apporte aucun élément de nature à établir que son mari serait décédé des suites de la maladie au titre de laquelle il avait obtenu cette pension, ne peut se prévaloir du 2° de l'article L. 43 précité, elle justifie d'un droit à une pension de réversion en application du 3° ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation du jugement du 10 janvier 2006 du tribunal départemental des pensions du Gard et de la décision du ministre de la défense du 6 février 2004 rejetant sa demande de pension de réversion ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'enjoindre au ministre qu'il soit procédé à la liquidation de la pension à laquelle elle a droit à compter du 9 septembre 2003 ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ; Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Tiffreau-Corlay, Marlange, avocat de Mme A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à payer à la SCP Tiffreau-Corlay Marlange ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Nîmes en date du 26 janvier 2009 et le jugement du tribunal départemental des pensions du Gard en date du 10 janvier 2006 sont annulés. Article 2 : La décision du ministre de la défense en date du 6 février 2004 est annulée. Article 3 : Mme A est renvoyée devant le ministre de la défense pour qu'il soit procédé à la liquidation de la pension à laquelle elle a droit à compter du 9 septembre 2003. Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande présentée devant le tribunal départemental des pensions du Gard et du pourvoi de Mme A est rejeté. Article 5 : L'Etat versera à la SCP Tiffreau-Corlay, Marlange, avocat de Mme A, la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette SCP renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Bernia A et au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre (formation à 3), 30/12/2011, 11BX00082, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 11 janvier 2011, présentée par Mme Arlette , demeurant ... ; Mme demande à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0800456-0800457 de la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin, en date du 22 octobre 2010, qui a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Guadeloupe du 11 mars 2008 en tant qu'elle refuse de faire droit à sa demande de désignation de deux experts en endocrinologie et en cardiopathie en vue de la réévaluation du taux d'invalidité retenu par la commission de réforme lors de sa mise à la retraite pour invalidité ; 2°) d'annuler la décision préfectorale contestée ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ..................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novembre 2011 : - le rapport de M. A. de Malafosse, président de chambre ; - les observations de Mme Arlette ; - et les conclusions de Mme M-P. Dupuy, rapporteur public ; La parole ayant à nouveau été donnée à Mme ; Considérant que Mme , adjoint administratif qui était en fonctions à la sous-préfecture de Saint-Martin, a été placée en congé de maladie à partir de décembre 2002, puis en congé de longue maladie, et enfin en congé de longue durée ; que, par lettre du 22 octobre 2007, elle a fait valoir ses droits à la retraite pour invalidité, ses droits à congé étant épuisés à la date du 23 décembre 2007 ; que, se fondant sur un certificat établi par un médecin de l'hôpital de Créteil daté du 26 juin 2007, la commission de réforme, dans sa séance du 20 septembre 2007 l'a reconnue dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'un syndrome anxio-dépressif sévère avec retentissement organique et a mentionné un taux d'invalidité de 60% ; qu'en vertu d'un arrêté du préfet de la Guadeloupe du 24 octobre 2007, Mme a été admise à la retraite pour invalidité non imputable au service ; que, toutefois, la procédure a été reprise, Mme devant être examinée par un médecin agréé par l'administration ; que Mme a été examinée le 10 décembre 2007 par un médecin psychiatre agréé qui a conclu à l'inaptitude à toutes fonctions en retenant un taux d'invalidité de 25% ; que la commission de réforme a été à nouveau saisie de son cas et a émis, le 24 janvier 2008, l'avis selon lequel elle était dans l'incapacité de continuer ses fonctions en précisant que le taux d'incapacité devait être porté à 30% compte tenu de l'intensité du trouble et du retentissement fonctionnel ; que, par un arrêté du 7 février 2008 qui a abrogé celui du 24 octobre 2007, le préfet l'a admise à la retraite pour invalidité non imputable au service, à compter du 24 décembre 2007 ; que, par une lettre du 7 février 2008 adressée au préfet de la Guadeloupe, Mme a fait valoir qu'elle souffrait de trois pathologies différentes, à savoir un état anxio-dépressif, une pathologie de type endocrinologique et une pathologie cardiaque, et demandait qu'une contre-expertise soit réalisée par trois experts spécialistes de ces maladies ; que, par une lettre du 11 mars 2008, le préfet lui a répondu que la commission de réforme n'avait fait état que d'une seule pathologie, à savoir syndrome anxio-dépressif avec retentissement organique et l'invitait à se rapprocher d'un des psychiatres agréés de son département de résidence en précisant que cette contre-expertise serait à sa charge et que les conclusions devaient en être transmises au président de la commission de réforme ; que Mme a déféré pour annulation cette décision au tribunal administratif en l'analysant comme un refus de désignation de deux experts en cardiologie et endocrinologie et a demandé que cette annulation soit assortie d'une injonction faite au préfet de désigner ces deux experts ; que, par l'ordonnance attaquée, la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin a, sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté cette demande comme manifestement irrecevable au motif que la décision attaquée ne faisait pas grief à la requérante dès lors que le taux d'invalidité, s'agissant d'une invalidité non imputable au service telle que prévue à l'art L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite, était sans incidence sur le montant des droits à pension de l'intéressée ; que Mme fait appel de cette ordonnance ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services, sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension ; qu'aux termes de l'article L. 30 du même code : Lorsque le fonctionnaire est atteint d'une invalidité d'un taux au moins égal à 60 %, le montant de la pension prévue aux articles L. 28 et L. 29 ne peut être inférieur à 50 % des émoluments de base (...) ; Considérant que Mme , qui a été mise à la retraite au titre des dispositions précitées de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite et qui ne revendique ni l'imputabilité au service de l'invalidité dont elle est atteinte ni le bénéfice des dispositions précitées de l'article L. 30 du même code, fait valoir que le taux d'invalidité retenu par la commission de réforme a une incidence sur sa possibilité de percevoir un complément de retraite auprès de sa mutuelle ; qu'elle a fourni une attestation de sa mutuelle datée du 19 octobre 2011 faisant ressortir que la garantie invalidité prévue par le contrat dont elle bénéficie est liée à la reconnaissance par l'autorité publique compétente d'un taux d'invalidité au moins égal à 50% ; que, dans ces conditions, Mme établit en appel que le taux d'invalidité évalué par la commission de réforme a une incidence sur les droits qu'elle peut revendiquer auprès de sa mutuelle, de sorte qu'elle a intérêt à demander l'annulation de la décision préfectorale litigieuse du 11 mars 2008 qui la prive de la possibilité d'obtenir une éventuelle réévaluation de son taux d'invalidité par la commission de réforme ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés quant à la régularité de l'ordonnance attaquée, celle-ci doit être annulée ; Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme devant le tribunal administratif de Saint-Martin ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux produits, que Mme souffrait, à la date de la décision contestée, non seulement de troubles dépressifs, mais aussi de diabète et de troubles cardiaques ; que le médecin psychiatre agréé qui a examiné Mme le 10 décembre 2007 s'est, dans son rapport, déclaré incompétent pour apprécier les différents problèmes somatiques de l'intéressée ; qu'ainsi, la commission de réforme n'a pas disposé, lorsqu'elle s'est prononcée le 24 janvier 2008 sur le taux d'invalidité de Mme , d'une évaluation par deux médecins spécialistes agréés ou, à tout le moins, par un médecin généraliste agréé, des troubles somatiques dont souffrait l'intéressée à cette date ; que, dans ces conditions, et quand bien même la commission de réforme a porté ce taux à 30%, le préfet n'a pu légalement refuser l'évaluation, par au moins un médecin agréé compétent, de la part d'invalidité liée aux troubles somatiques dont Mme souffrait à la date à laquelle elle a été mise à la retraite pour invalidité ; que, dans cette mesure, la décision du 11 mars 2008 doit être annulée ; Considérant que l'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Guadeloupe prenne les mesures propres à permettre l'évaluation, par au moins un médecin agréé compétent, des troubles somatiques dont souffrait Mme à la date à laquelle elle a été mise à la retraite pour invalidité, et ce, en vue de permettre à la commission de réforme d'émettre un nouvel avis sur le taux d'invalidité de l'intéressée à cette même date ; Sur les conclusions présentées par Mme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il y a lieu, compte tenu de ce que Mme n'a pas eu recours à un avocat, de fixer à 200 euros la somme qui doit lui être allouée par l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; DECIDE : Article 1er : L'ordonnance n° 0800456-0800457 de la présidente du tribunal administratif de Saint-Martin, en date du 22 octobre 2010 est annulée. Article 2 : La décision du préfet de la Guadeloupe en date du 11 mars 2008 est annulée en tant qu'elle rejette la demande de Mme tendant à l'évaluation par au moins un médecin agréé compétent des troubles physiologiques dont souffrait celle-ci à la date de sa mise à la retraite pour invalidité. Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Guadeloupe de prendre, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, les mesures propres à permettre l'évaluation, par au moins un médecin agréé compétent, des troubles somatiques dont souffrait Mme à la date à compter de laquelle elle a été mise à la retraite pour invalidité, soit le 1er janvier 2008, et ce, en vue de permettre à la commission de réforme d'émettre un nouvel avis sur le taux d'invalidité de l'intéressée à cette même date. Article 4 : L'Etat versera la somme de 200 euros à Mme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. '' '' '' '' 4 No 11BX00082
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 17/01/2012, 10PA00465, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2010, présentée pour Mme Jacqueline , demeurant ...), par la SCI Le Bret-Desaché ; Mme demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 0711278/7-3 du 20 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 24 352,80 euros en réparation du préjudice qu'elle soutient avoir subi en raison de la faute commise par l'Etat du fait de l'atteinte portée au principe d'égalité des citoyens devant les charges et avantages publics ; 2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le premier ministre a rejeté sa demande du 11 mai 2007 tendant à obtenir la rente instituée par le décret du 27 juillet 2004 depuis l'année 2000 ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 24 352,80 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable en date du 11 mai 2007 et de leur capitalisation, ainsi qu'une somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ..................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution et notamment son préambule ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ensemble son premier protocole additionnel ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 janvier 2012 : - le rapport de M. Piot, rapporteur, - et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ; Considérant que Mme fait appel du jugement du 20 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 24 352,80 euros en réparation du préjudice subi à raison de la faute que celui-ci aurait commise en ne lui accordant pas, dès l'année 2000, le bénéfice de l'indemnité en capital instaurée par le décret du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale et, en outre, une somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral ; Considérant que le décret susvisé du 13 juillet 2000 a institué une mesure de réparation prenant la forme d'une indemnité en capital ou d'une rente viagère, en faveur de toute personne dont la mère ou le père a été déporté à partir de la France dans le cadre des persécutions antisémites durant l'Occupation et a trouvé la mort en déportation, lorsque cette personne était mineure de vingt et un ans au moment où la déportation est intervenue ; que le décret susvisé du 27 juillet 2004 a, quant à lui, institué une mesure de réparation similaire en faveur des personnes mineures au moment des faits, dont la mère ou le père a été déporté à partir du territoire national, durant l'Occupation pour les motifs et dans les conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et a trouvé la mort en déportation, ainsi qu'en faveur des personnes, mineures de vingt et un ans au moment des faits, dont le père ou la mère a, durant l'Occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du même code ; Considérant que, par une décision du 7 décembre 2004, le premier ministre a accordé à Mme , sur le fondement des dispositions du décret du 27 juillet 2004, une aide sous forme d'indemnité en capital prenant effet au plus tard à la fin du prochain trimestre civil ; que la requérante demande réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait qu'elle n'a pu bénéficier de l'aide qu'à compter de cette date, alors que les bénéficiaires du décret du 13 juillet 2000 ont, quant à eux, obtenu réparation dès l'entrée en vigueur de ce décret, ce qui constitue à ses yeux une différence de traitement injustifiée ; Considérant que ni le principe d'égalité, ni les dispositions de la Constitution, ni les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, ne s'opposent à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier ; Considérant que les personnes tombant sous le coup des mesures antisémites ont fait l'objet, pendant l'Occupation de la France, d'une politique d'extermination qui s'étendait à l'ensemble d'entre elles quel que soit leur âge ou leur sexe et impliquait une déportation systématique ; qu'ainsi, eu égard à l'objet de la mesure qu'il avait décidée, le gouvernement a pu, sans méconnaître le principe constitutionnel d'égalité ni la prohibition des discriminations fondées sur la race, regarder les mineurs dont le père ou la mère a été déporté dans le cadre des persécutions antisémites pendant l'Occupation comme placés dans une situation différente de celle des orphelins des victimes des autres déportations criminelles pratiquées à raison de leur actes de résistance ou de leur activité politique pendant la même période ; que la différence de traitement pratiquée au bénéfice des premiers n'est pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier et des situations particulières dans lesquelles ils se sont trouvés, et n'affecte d'ailleurs que l'application dans le temps du bénéfice de la réparation, une réparation financière analogue ayant été accordée à l'ensemble des bénéficiaires ; que, par suite, l'Etat n'a pas commis de faute en refusant de verser à Mme une indemnité en capital à compter de l'année 2000, dès lors que l'intéressée ne bénéficiait que de la réparation instituée par le décret du 27 juillet 2004 et que l'article 5 de ce décret ne prévoit le versement de l'indemnité en capital qu'à compter du trimestre suivant celui au cours duquel la décision accordant la mesure de réparation a été prise ; qu'il ne peut, dès lors, être accordé à Mme aucune indemnité de ce chef ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a refusé de faire droit à sa demande d'indemnisation supplémentaire ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le paiement à Mme de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; D E C I D E : Article 1er : La requête susvisée de Mme est rejetée. '' '' '' '' 2 N° 10PA00465
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30/12/2011, 10PA00986, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 février et 12 novembre 2010, présentés pour M. Bachir A, demeurant ..., par Me Touloudi ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0712016/12-1 en date du 19 janvier 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision 12 juin 2003 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a rejeté sa demande tendant à obtenir la reconnaissance de la qualité de combattant et, d'autre part, de la décision du secrétaire d'Etat aux anciens combattants du 15 octobre 2003 rejetant son recours hiérarchique ; 2°) d'annuler les décisions des 12 juin et 15 octobre 2003 susmentionnées ; 3°) d'enjoindre au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui reconnaître la qualité de combattant et de lui délivrer une carte de combattant dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à son avocat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; .................................................................................................................. Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2011 : - le rapport de M. Boissy, rapporteur, - et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ; Considérant que M. A, de nationalité algérienne, a présenté le 25 février 2003 une demande tendant à la reconnaissance de la qualité de combattant qui lui a été refusée par le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, par une décision du 12 juin 2003 ; que, le 16 septembre 2003, il a exercé un recours hiérarchique auprès du secrétaire d'Etat aux anciens combattants que ce dernier a rejeté le 15 octobre 2003 ; que, par la présente requête, M. A fait appel de l'ordonnance du 19 janvier 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 12 juin et 15 octobre 2003 susmentionnées ; Sur les conclusions aux fins d'annulation : Considérant, en premier lieu, que, par une décision en date du 19 août 2002, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Paris le 31 août 2002, le préfet de Paris, préfet de la région d'Ile de France, a donné délégation à M. D, secrétaire général de la préfecture, et signataire de la décision du 12 juin 2003, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, documents et décisions à l'exception de la présentation au Conseil de Paris du rapport annuel des chefs de services de l'Etat dans le département et des ordres de réquisition du comptables public ; que la circonstance que l'ampliation de cette décision ait été signée par Mme C reste, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision contestée ; que, par un décret du 29 juillet 2002, publié au journal officiel de la République française du 31 juillet 2002, le ministre de la défense a donné une délégation à M. B, signataire de la décision du 15 octobre 2003, à l'effet de signer, au nom du secrétaire d'Etat aux anciens combattants, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, en cas d'absence ou d'empêchement du directeur des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale ; que M. A n'établit ni même n'allègue que le directeur n'aurait ni absent ni empêché ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence des auteurs des décisions contestées manque en fait ; Considérant, en second lieu, qu'en vertu des articles L. 253, L. 253 bis, R. 223 et R. 224 D du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, ont notamment vocation à obtenir la qualité de combattant les militaires des armées françaises qui, entre le 31 octobre 1954 et le 2 juillet 1962, ont accompli en Algérie des services d'une durée d'au moins quatre mois, qui ont servi en unité combattante pendant 90 jours, qui ont pris part à neuf actions de feu ou de combat collectives, ou à cinq actions de feu ou de combat individuelles, ou qui, sans condition de durée, ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en unité combattante ou qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre ; Considérant que si M. A soutient qu'il a accompli plus de quatre mois de services en Algérie, il ressort toutefois des pièces du dossier, et en particulier de l'extrait des services établie par les services du ministère de la défense le 23 octobre 2002 ainsi que du livret militaire de l'intéressé, produits par M. A lui-même, que ce dernier a seulement servi en qualité d'appelé entre les 1er janvier 1958 et 4 avril 1958, a été réformé par la commission de réforme le 18 mars 1958 et n'a été présent en Algérie, au cours de cette période, que du 8 au 18 février 1958 et le 4 avril 1958 ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que M. A aurait servi dans une unité combattante ; que la circonstance qu'il aurait contracté une maladie lors de l'instruction militaire qu'il a reçue, reste dès lors, par elle-même, sans incidence sur son droit à obtenir la qualité de combattant ; que, dans ces conditions, il n'établit pas qu'il remplirait effectivement l'une des conditions susanalysées lui ouvrant droit à la reconnaissance de la qualité de combattant ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la défense à la demande de M. A, que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; Sur les conclusions aux fins d'injonction : Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A, n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction, susvisées, présentées par M. A doivent être rejetées ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : Considérant que tant les dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 que celles de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à l'avocat de M. A une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A est rejetée. '' '' '' '' 3 N° 10PA00986
Cours administrative d'appel
Paris
Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 30/12/2011, 331188
Vu le pourvoi, enregistré le 27 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 0600565 du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé, à la demande de M. Jean-Claude A, la décision du 13 mars 2006 du ministre de la défense rejetant la demande de révision de la pension de retraite dont bénéficie l'intéressé et tendant à ce que lui soit accordée une cinquième année au titre de la bonification d'un cinquième prévue au i) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 ; Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Michel Thenault, Conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, maréchal des logis chef de la gendarmerie nationale, a bénéficié, à compter du 28 décembre 2004 d'une prolongation d'activité d'un an au-delà de la limite d'âge de cinquante cinq ans en application des dispositions de l'article 4 de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002 ; que l'intéressé a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à l'âge de cinquante six ans, avec une bonification de quatre ans au titre des dispositions combinées de cet article 4 et du i) de l'article L.12 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, par une décision du 13 mars 2006, le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS a rejeté la réclamation de l'intéressé tendant à ce que sa pension soit révisée en prenant en compte cinq années de bonification sur le fondement des dispositions du i) de l'article L.12 dans leur rédaction issue de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites ; que le ministre se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 juin 2009 par lequel le tribunal administratif de Limoges, à la demande de M. A, a annulé sa décision du 13 mars 2006 et lui a enjoint de procéder à une nouvelle liquidation et à une revalorisation de la pension de l'intéressé en portant de quatre à cinq le nombre d'annuités à retenir au titre de cette bonification ; Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 29 août 2002 précitée : " Nonobstant les dispositions de la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires relatives aux limites d'âge des militaires de la gendarmerie, les sous-officiers de gendarmerie du grade de gendarme à adjudant-chef inclus et les officiers de gendarmerie du grade de capitaine atteignant la limite d'âge de leur grade, peuvent, sur leur demande et sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en position d'activité pour une année supplémentaire./Nonobstant les dispositions des articles L. 10 et L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, cette prolongation d'activité est prise en compte dans la liquidation du droit à pension. Toutefois, la bonification obtenue au titre du i) de l'article L. 12 du même code est réduite à due concurrence de la durée des services accomplis au-delà de la limite d'âge. " ; que les dispositions du i) de l'article L.12 précité, dans leur rédaction antérieure à l'article 48 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites prévoyaient que: " Une bonification du cinquième du temps de service accompli est accordée dans la limite de cinq annuités à tous les militaires à la condition qu'ils aient accompli au moins quinze ans de services militaires effectifs ou qu'ils aient été rayés des cadres pour invalidité ; le maximum de bonifications est donné aux militaires qui quittent le service à cinquante-cinq ans ; la bonification est diminuée d'une annuité pour chaque année supplémentaire de service jusqu'à l'âge de cinquante-huit ans. " ; que les dispositions de l'article 48 précité ont substitué notamment à l'âge de cinquante-cinq ans mentionné au i) de l'article L.12 celui de cinquante-sept ans ; Considérant que les dispositions du i) de l'article L. 12 déterminent les conditions dans lesquelles la bonification dite " du cinquième " attribuée à l'ensemble des militaires est diminuée d'une annuité pour chaque année de service accomplie au-delà d'un âge qu'elles fixent ; que les dispositions de l'article 4 précité de la loi du 29 août 2002 ont permis à certains officiers et sous-officiers de gendarmerie de bénéficier d'une prolongation d'activité d'une durée d'un an au-delà de l'âge de cinquante cinq ans, prise en compte pour la liquidation de la pension ; qu'elles ont renvoyé par ailleurs, pour ce qui concerne les règles de bonification d'ancienneté, aux règles générales prévues par le i) de l'article L.12, en prévoyant que cette prolongation donnait lieu à une réduction corrélative de la durée de bonification mentionnée dans ce dernier article ; qu'il en résulte qu'en portant, par l'article 48 précité de la loi du 21 août 2003, de cinquante cinq à cinquante sept ans l'âge mentionné au i) de l'article L.12 à partir duquel la bonification d'ancienneté des militaires diminue, le législateur a nécessairement entendu appliquer ces nouvelles dispositions aux officiers et sous-officiers de gendarmerie mentionnés à l'article 4 de la loi du 29 août 2002, permettant ainsi aux intéressés, sous réserve qu'ils remplissent les autres conditions requises, de conserver la bonification maximale de cinq annuités dès lors qu'ils quittent le service avant d'atteindre l'âge de cinquante-sept ans ; que par suite, si le tribunal administratif de Limoges a commis une erreur de droit en estimant que les dispositions de la dernière phrase du second alinéa de l'article 4 précité de la loi du 29 août 2002 devaient être regardées comme ayant été implicitement mais nécessairement abrogées par la loi du 21 août 2003, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en refusant de faire bénéficier M. A des nouvelles dispositions issues de cette loi, qui étaient applicables aux officiers et sous officiers de la gendarmerie mentionnés à l'article 4 de la loi du 29 août 2002 par l'effet du renvoi opéré par le second alinéa de cet article aux règles générales de bonification d'ancienneté fixées au i) de l'article L. 12, le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS a commis une erreur de droit ; Considérant que par ce motif, qui répond à un moyen invoqué devant les juges du fond dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait et qui doit être substitué au motif erroné en droit retenu par le jugement attaqué, dont il justifie le dispositif ; le pourvoi doit être rejeté ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Jean-Claude A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 30/12/2011, 332915
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 octobre 2009 et 21 janvier 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Didier A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 08NC00836 du 6 août 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 0600549 du 9 avril 2008 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 136 174 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2005, en réparation des préjudices subis dans la gestion de sa carrière et lors de sa mise à la retraite ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions de première instance ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Julien Cléach, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A, - les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A ; Sur la fin de non-recevoir opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés : Considérant que l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Nancy a été notifié à M. A le 27 août 2009 ; que, par suite, le pourvoi formé par l'intéressé contre cet arrêt, enregistré le 21 octobre 2009 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, a été présenté dans le délai de recours contentieux ; que le garde des sceaux, ministre de la justice n'est dès lors pas fondé à soutenir que ce pourvoi serait tardif ; Sur le pourvoi : Considérant qu'aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées (...) en service (...) peut être radié des cadres par anticipation " ; que selon l'article L. 28 du même code, seuls les fonctionnaires radiés des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 peuvent percevoir une rente viagère d'invalidité ; qu'en vertu de l'article R. 4 de ce code : " L'acte de radiation des cadres spécifie les circonstances susceptibles d'ouvrir droit à pension et vise les dispositions légales invoquées à l'appui de cette décision. / Les énonciations de cet acte ne peuvent préjuger ni la reconnaissance effective du droit, ni les modalités de liquidation de la pension, ces dernières n'étant déterminées que par l'arrêté de concession " ; qu'enfin, selon le premier alinéa de l'article R. 65, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le ministre dont relevait le fonctionnaire ou le militaire lors de sa radiation des cadres ou de son décès en activité est chargé de constituer le dossier nécessaire au règlement des droits à pension ; il propose les bases de liquidation de la pension et, le cas échéant de la rente viagère d'invalidité. Après contrôle de cette proposition, le ministre du budget effectue les opérations de liquidation et, par arrêté, concède la pension et la rente viagère d'invalidité " ; Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la circonstance qu'un fonctionnaire fasse l'objet d'un acte de radiation des cadres, pris par le ministre dont il relève, pour invalidité ne résultant pas de l'exercice de ses fonctions fait obstacle à ce que le ministre chargé du budget puisse procéder, en l'absence de proposition en ce sens, à la liquidation de la pension sur la base des éléments qu'il appartient, le cas échéant, au ministre sous l'autorité duquel l'agent est placé de lui soumettre et, ainsi, puisse lui verser une rente viagère d'invalidité ; qu'il suit de là qu'en jugeant, par adoption des motifs du jugement attaqué, que l'acte admettant M. A à la retraite pour invalidité non imputable au service était sans effet sur l'attribution éventuelle d'une rente viagère d'invalidité et que, par suite, la perte pécuniaire résultant pour lui de la privation de cette rente était dépourvue de lien de causalité avec les éventuelles illégalités de cet acte, alors qu'en écartant l'imputation de l'invalidité au service, cet acte faisait obstacle à ce que la liquidation de la pension fût assortie de l'attribution d'une telle rente, la cour administrative d'appel de Nancy a commis une erreur de droit ; Considérant, en outre, que si le juge d'appel peut statuer par adoption des motifs des premiers juges sans entacher sa décision d'une insuffisance de motivation, c'est à la condition que, compte tenu de l'argumentation de l'appelant, la réponse du tribunal à ces mêmes moyens puisse elle-même être regardée comme suffisante, sans appeler de nouvelles précisions en appel ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A ne s'est pas borné à reprendre ses moyens de première instance mais a soulevé devant la cour une argumentation plus circonstanciée, notamment quant au lien de causalité entre les préjudices dont il demandait réparation et les fautes imputées à l'administration ; que, par suite, en se bornant à écarter l'appel par adoption des motifs retenus par les premiers juges, la cour administrative d'appel de Nancy a insuffisamment motivé son arrêt ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ces conclusions ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 6 août 2009 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Nancy. Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A est rejeté. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A et au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 30/12/2011, 343300
Vu le pourvoi, enregistré le 15 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/04604 du 8 juillet 2010 par lequel la cour régionale des pensions d'Amiens a, en premier lieu, infirmé le jugement rendu le 20 octobre 2009 par lequel le tribunal départemental des pensions de l'Aisne a rejeté la demande présentée par M. Jean-Luc A contre la décision du 14 avril 2008 par laquelle le service des pensions du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique a certifié que l'allocation n° 9 prévue à l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre devait lui être versée du 6 septembre 2001 au 27 juillet 2006, et qu'à compter du 28 juillet 2006, aucun paiement ne pouvait être effectué au titre de cette allocation et, en second lieu, ordonné que le versement de cette allocation reprenne à compter de cette dernière date ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le décret n° 61-443 du 2 mai 1961 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Guillaume Prévost, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boulloche, avocat de M. A ; Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est alloué une allocation spéciale aux pensionnés qui se trouvent dans l'impossibilité médicalement constatée d'exercer une activité professionnelle quand cette impossibilité a sa cause déterminante dans une ou plusieurs infirmités incurables indemnisées au titre du présent code, si le reclassement social du pensionné est impossible et si celui-ci ne dispose pas par ailleurs, sous la forme d'une hospitalisation ou tout autrement, de ressources suffisantes. / Le reclassement social est réputé possible quand l'invalidité de l'intéressé ne met pas obstacle à sa rééducation professionnelle, éventuellement précédée de sa réadaptation fonctionnelle. / Cette allocation a pour effet de porter le montant global des ressources de ces pensionnés à des taux dont le plus élevé ne pourra excéder celui de la pension à l'indice 1500. / Un décret, pris dans la forme du décret en Conseil d'Etat, fixera les conditions d'application du présent article. " ; qu'en vertu de l'article 1er du décret du 2 mai 1961, pris pour l'application de ces dispositions, l'allocation spéciale qu'elles prévoient porte le numéro 9 ; qu'aux termes de l'article 5 de ce décret : " Les ressources sont considérées comme suffisantes : / a) soit lorsque le montant annuel des ressources personnelles de l'invalide, non compris la pension d'invalidité servie au titre du code, excède le montant correspondant à l'indice de pension 900 ; / b) soit lorsque l'invalide bénéficie d'un avantage de vieillesse faisant appel à une contribution des travailleurs et pouvant être considéré comme étant le prolongement d'un traitement ou d'un salaire. " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, si un pensionné vient à disposer de ressources personnelles, non compris la pension d'invalidité servie au titre du code, suffisantes, il ne peut plus prétendre au versement de cette allocation spéciale ; Considérant que si, par arrêt devenu définitif en date du 27 juillet 2006, la cour régionale des pensions d'Amiens avait jugé que M. A répondait à la date du 6 septembre 2001 aux conditions d'obtention de l'allocation spéciale prévue à l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et que l'administration devait verser à l'intéressé cette allocation à compter de cette dernière date, le service des pensions du ministère de l'économie des finances et de l'industrie était fondé à décider qu'aucun paiement ne pouvait être effectué à ce titre à partir du 28 juillet 2006 dès lors qu'il constatait que le pensionné ne satisfaisait plus à cette date à la condition de ressources prévue par ces dispositions ; que, dès lors, en jugeant par l'arrêt attaqué que l'administration ne pouvait, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 27 juillet 2006, décider de suspendre le versement de cette allocation à compter du 28 juillet 2006, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 8 juillet 2010 par lequel la cour a ordonné que le versement de cette allocation reprenne à partir du 28 juillet 2006 ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'appel présenté par M. A à la cour régionale des pensions de Douai ; Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 8 juillet 2010 de la cour régionale des pensions d'Amiens est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Douai. Article 3 : Les conclusions présentées par M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Jean-Luc A.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 23/12/2011, 304897, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 18 avril 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du 22 février 2007 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers faisant droit à la demande de Mme Fatma A, veuve C B en annulant la décision du 20 décembre 2005 du ministre de la défense rejetant la demande de l'intéressée tendant au bénéfice d'une pension militaire de réversion de chef de son époux décédé le 6 mai 2001 et en renvoyant l'affaire au ministre de la défense afin qu'il soit procédé au versement de la pension militaire de réversion de Mme A ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de Mme A, veuve C B ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la Constitution et, notamment, ses articles 61-1 et 62 ; Vu la loi du 20 septembre 1948 ; Vu la loi n° 81-734 du 3 août 1981 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu la décision n° 2010-108 QPC du 25 mars 2011 du Conseil constitutionnel ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Anne Berriat, chargée des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de Mme A, - les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de Mme A ;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le maréchal des logis chef C B, rayé des contrôles de l'activité dans l'armée française le 25 octobre 1956, était détenteur d'une pension de retraite proportionnelle du code des pensions civiles et militaires de retraite issu de la loi du 20 septembre 1948 ; qu'à la suite du décès de M. C B le 6 mai 2001, sa veuve, Mme Fatma A a demandé à bénéficier d'une pension militaire de réversion du chef de son époux ; que, par une décision du 20 décembre 2005, la ministre de la défense a rejeté cette demande de pension militaire d'ayant cause ; que Mme A a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Poitiers ; que ce dernier, par un jugement en date du 22 février 2007, a annulé la décision de refus de la ministre de la défense du 20 septembre 2005 et renvoyé l'affaire au ministre de la défense afin qu'il soit procédé au versement de la pension militaire de réversion de Mme A ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE,DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre ce jugement ; Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation. ; qu'aux termes du deuxième alinéa de son article 62 : Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ; qu'enfin, aux termes du troisième alinéa du même article : Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. ; Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 62 de la Constitution qu'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution sur le fondement de l'article 61-1 n'est pas annulée rétroactivement mais abrogée pour l'avenir à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; que, par sa décision n° 2010-108 QPC du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions précitées, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause, soit de décider que le législateur aura à prévoir une application aux instances en cours des dispositions qu'il aura prises pour remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il appartient au juge, saisi d'un litige relatif aux effets produits par la disposition déclarée inconstitutionnelle, de les remettre en cause en écartant, pour la solution de ce litige, le cas échéant d'office, cette disposition, dans les conditions et limites fixées par le Conseil constitutionnel ou le législateur ; Considérant que, par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les dispositions de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII ; qu'il a jugé que : afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, l'abrogation des dispositions précitées prendra effet à compter du 1er janvier 2011 ; afin de préserver l'effet utile de la présente décision à la solution des instances actuellement en cours, il appartient, d'une part, aux juridictions de surseoir à statuer jusqu'au 1er janvier 2011 dans les instances dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles et, d'autre part, au législateur de prévoir une application des nouvelles dispositions à ces instances en cours à la date de la présente décision ; Considérant que, à la suite de cette décision, l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a défini de nouvelles dispositions pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France et abrogé plusieurs dispositions législatives, notamment celles de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 ; que, par ailleurs, son paragraphe VI prévoit que le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances ; qu'enfin, aux termes du XI du même article : Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2011 ; Considérant que, comme il a été dit, le Conseil constitutionnel a jugé qu'il appartenait au législateur de prévoir une application aux instances en cours à la date de sa décision des dispositions qu'il adopterait en vue de remédier à l'inconstitutionnalité constatée ; que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 ne se borne pas à déterminer les règles de calcul des pensions servies aux personnes qu'il mentionne, mais abroge aussi des dispositions qui définissent, notamment, les conditions dans lesquelles est ouvert le droit à une pension de réversion ; qu'ainsi, alors même qu'il mentionne seulement la révision des pensions , le paragraphe VI de l'article 211 précité doit être regardé comme s'appliquant aussi aux demandes de pension de réversion ; Considérant que, pour statuer sur la demande de pension de réversion présentée par Mme A par le jugement attaqué du 22 février 2007, le tribunal administratif de Poitiers s'est exclusivement fondé sur les dispositions de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002, sur celles de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 de finances rectificative pour 1981 et sur celles de l'article L. 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'afin de préserver l'effet utile de la décision précitée du Conseil constitutionnel à la solution de l'instance ouverte par la demande de Mme A, en permettant au juge du fond de remettre en cause, dans les conditions et limites définies par le paragraphe VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les effets produits par les dispositions mentionnées ci-dessus, il incombe au juge de cassation, après avoir sursis à statuer comme l'y invitait la décision du Conseil constitutionnel, d'annuler, sans qu'il soit besoin pour lui d'examiner les moyens du pourvoi dont il est saisi, le jugement attaqué ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ; Considérant en premier lieu que Mme A est représentée devant le Conseil d'Etat par la SCP Le Bret-Desaché, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, à l'adresse de laquelle elle est réputée avoir élu domicile ; Considérant en second lieu qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 et celles de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002, qui définissaient, à la date de la décision attaquée, les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion était ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, ont été abrogées à compter du 1er janvier 2011, les premières par l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les secondes par la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; qu'en application du VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, dont la portée a été précisée ci-dessus, il y a lieu d'écarter ces dispositions législatives pour statuer sur le droit à pension de réversion de Mme A à compter de la date de réception de sa demande par l'administration, à savoir le 20 avril 2005 ; Considérant, d'une part, que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 n'ayant substitué aucune disposition nouvelle à celles qui doivent ainsi être écartées pour définir les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion est ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, il y a lieu de faire application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite relatives aux pensions des ayants cause applicables à la date du décès de l'ayant droit ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction en vigueur le 6 mai 2001 : Sont applicables aux ayants cause des militaires dont les droits se trouvent régis par le présent code les dispositions du chapitre Ier du présent titre, à l'exception de celles visées au premier alinéa, a et b, de l'article L. 39, qui sont remplacées par les dispositions suivantes : / Le droit à pension de veuve est subordonné à la condition : / a) Que depuis la date du mariage jusqu'à celle de la cessation de l'activité du mari, celui-ci ait accompli deux années au moins de services valables pour la retraite, sauf si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage antérieur à ladite cessation, lorsque le mari a obtenu ou pouvait obtenir la pension prévue à l'article L. 6 (1°) (...) ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite, rendu applicable aux ayants causes des militaires par l 'article L. 47 du même code : Nonobstant les conditions d'antériorité prévues ci-dessus, le droit à pension de veuve est reconnu : / 1° Si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage ; 2° Ou si le mariage, antérieur ou postérieur à la cessation d'activité, a duré au moins quatre années. ; qu'il résulte de l'instruction que Mme A remplit les conditions ainsi prévues par le code des pensions civiles et militaires de retraite pour l'obtention d'une pension de veuve ; que sa demande de versement d'une pension de réversion du chef de son mari décédé a été reçue par l'administration le 20 avril 2005 ; qu'elle est donc fondée à demander à bénéficier d'une telle pension à compter de cette date ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 22 février 2007 du tribunal administratif de Poitiers est annulé. Article 2 : La décision du ministre de la défense du 20 décembre 2005 est annulée. Article 3 : L'Etat versera à Mme A une pension de réversion du chef de son époux à compter du 20 avril 2005 dans les conditions fixées par la présente décision. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT, à Mme Fatma A et au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 23/12/2011, 327112, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 15 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mme Zahia B née A, demeurant ... ; Mme B demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 0702714-1 du 18 décembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 7 juin 2007 du ministre de la défense rejetant sa demande tendant au bénéfice d'une pension de réversion ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision attaquée et d'enjoindre au ministre de la défense de lui verser la pension de réversion à compter du 12 mars 1997 ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 de finances pour 1960 ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 et notamment son article 211 ; Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Odent, Poulet, avocat de Mme B, - les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Odent, Poulet, avocat de Mme B ;Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B, née A, a demandé par courrier notifié à l'administration le 30 janvier 2006 à bénéficier de la pension de réversion de veuve à la suite du décès de son mari le 12 mars 1997, le brigadier-chef Chihaiti, ressortissant marocain ancien militaire de l'armée française, titulaire d'une pension militaire de retraite après sa radiation des cadres intervenue le 16 juillet 1953 ; que le bénéfice de cette pension lui a été refusé par la décision en date du 7 juin 2007 du ministre de la défense au motif que les conditions d'antériorité posées par les termes de l'article L. 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite issu de la loi du 20 septembre 1948, applicables alors à son cas, n'étaient pas satisfaites; que le tribunal administratif de Poitiers, saisi par Mme B, a, par jugement du 18 décembre 2008, rejeté sa demande d'annulation de cette décision ; que Mme B se pourvoit à l'encontre de ce jugement ; Considérant que par sa décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010, le Conseil Constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les dispositions de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 de finances rectificative pour 2002, à l'exception de celles de son paragraphe VII ; que, à la suite de cette décision, l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 a défini de nouvelles dispositions pour le calcul des pensions militaires d'invalidité, des pensions civiles et militaires de retraite et des retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France, et abrogé plusieurs dispositions législatives, notamment celles de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 portant loi de finances pour 1960 ; que, par ailleurs, son paragraphe VI prévoit que le présent article est applicable aux instances en cours à la date du 28 mai 2010, la révision des pensions prenant effet à compter de la date de réception par l'administration de la demande qui est à l'origine de ces instances ; qu'enfin, aux termes du XI du même article : Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2011 ; Considérant, ainsi qu'il a été dit, que le Conseil constitutionnel a jugé qu'il appartenait au législateur de prévoir une application aux instances en cours à la date de sa décision des dispositions qu'il adopterait en vue de remédier à l'inconstitutionnalité constatée ; que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 ne se borne pas à déterminer les règles de calcul des pensions servies aux personnes qu'il mentionne, mais abroge aussi des dispositions qui définissent, notamment, les conditions dans lesquelles est ouvert le droit à une pension de réversion ; qu'ainsi, alors même qu'il mentionne seulement la révision des pensions , le paragraphe VI de l'article 211 précité doit être regardé comme s'appliquant aussi aux demandes de pension de réversion ; Considérant que, pour statuer sur la demande de pension de réversion présentée par Mme B par le jugement attaqué du 18 décembre 2008, le tribunal administratif de Poitiers s'est exclusivement fondé sur les dispositions de l'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2002 ; qu'afin de préserver l'effet utile de la décision du Conseil constitutionnel à la solution de l'instance ouverte par la demande de Mme B, en permettant au juge du fond de remettre en cause, dans les conditions et limites définies par le paragraphe VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les effets produits par les dispositions mentionnées ci-dessus, il incombe au juge de cassation, après avoir sursis à statuer comme l'y invitait la décision du Conseil constitutionnel, d'annuler, sans qu'il soit besoin pour lui d'examiner les moyens du pourvoi dont il est saisi, le jugement attaqué en tant qu'il a statué sur la pension de réversion de Mme B ; Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ; En ce qui concerne le droit à pension de réversion de Mme B pour la période postérieure au 30 janvier 2006 : Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 et celles de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002, qui définissaient, à la date de la décision attaquée, les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion était ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, ont été abrogées à compter du 1er janvier 2011, les premières par l'article 211 de la loi de finances pour 2011, les secondes par la décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 ; qu'en application du VI de l'article 211 de la loi de finances pour 2011, dont la portée a été précisée ci-dessus, il y a lieu d'écarter ces dispositions législatives pour statuer sur le droit à pension de réversion de Mme B à compter de la date de réception de sa demande par l'administration, soit à compter du 30 janvier 2006 ; Considérant, d'une part, que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 n'ayant substitué aucune disposition nouvelle à celles qui doivent ainsi être écartées pour définir les conditions dans lesquelles un droit à pension de réversion est ouvert à la veuve d'un ayant droit étranger, il y a lieu de faire application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite relatives aux pensions des ayants cause applicables à la date du décès de l'ayant droit ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction en vigueur le 12 mars 1997 : Le droit à pension de veuve est subordonné à la condition : / a) Si le mari a obtenu ou pouvait obtenir une pension accordée dans le cas prévu à l'article L. 4 (1°), que depuis la date du mariage jusqu'à celle de la cessation de l'activité du mari, celui-ci ait accompli deux années au moins de services valables pour la retraite, sauf si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage antérieur à ladite cessation ; (...) / Nonobstant les conditions d'antériorité prévues ci-dessus, le droit à pension de veuve est reconnu : 1° Si un ou plusieurs enfants sont issus du mariage ; (...). ; Considérant que deux enfants au moins sont issus du mariage transcrit à l'état civil le 16 juillet 1953 entre Mlle Zahia A et M. Mohammed Chihaiti ; que, par suite, le ministre de la défense n'est pas fondé à soutenir, pour refuser le bénéfice de la pension de réversion à Mme B, qu'eu égard à la date de son mariage avec M. Mohammed Chihaiti, cette dernière ne peut prétendre au bénéfice d'une pension de réversion ; qu'ainsi, Mme B remplit les conditions prévues par le code des pensions civiles et militaires de retraite pour l'obtention d'une pension de veuve ; que sa demande de versement d'une pension de réversion du chef de son mari décédé a été reçue par l'administration le 30 janvier 2006 ; que Mme B, dont les conclusions présentées par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation sont recevables, est donc fondée à demander à bénéficier d'une telle pension à compter de cette date ; Considérant, d'autre part, que l'article 211 de la loi de finances pour 2011 prévoit de nouvelles règles pour le calcul du montant des pensions des personnes qu'il mentionne ; que ces règles sont applicables pour le calcul de la pension de Mme B ; que les arrérages de cette pension doivent porter intérêt au taux légal à compter de la demande de Mme B, le 30 janvier 2006 ; En ce qui concerne le droit à pension de réversion pour la période antérieure au 30 janvier 2006 : Considérant qu'aux termes du I de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 : A compter du 1er janvier 1961, les pensions, rentes ou allocations viagères imputées sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics dont sont titulaires les nationaux des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté, ou ayant été placés sous le protectorat ou la tutelle de la France, seront remplacées, pendant la durée normale de leur jouissance personnelle, par des indemnités annuelles en francs, calculées sur la base des tarifs en vigueur pour lesdites allocations ou pensions, à la date de leur transformation ; qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 : I. - Les prestations servies en application des articles (...) 71 de la loi de finances pour 1960 (...) sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants./ (...) / VI. - Les prestations servies en application des textes visés au I peuvent faire l'objet, à compter du 1er janvier 2002 et sur demande, d'une réversion. L'application du droit des pensions aux intéressés et la situation de famille sont appréciées à la date d'effet des dispositions visées au I pour chaque Etat concerné ; Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le droit à la réversion d'une pension militaire de retraite versée à un ressortissant marocain en application du I de l'article 71 de la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 s'apprécie au regard de la réglementation en vigueur le 1er janvier 1961, et non au regard de la réglementation applicable à la date du décès de l'ayant droit ; qu'à la date du 1er janvier 1961, l'article L. 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite excluait du droit à pension de réversion les veuves dont le mariage avait été célébré moins de 2 ans avant la cessation d'activité du conjoint titulaire de la pension, sans tenir compte de ce que des enfants seraient issus du mariage ; que Mme B, dont le mariage a été transcrit à l'état-civil le 16 juillet 1953, soit moins de 2 ans avant la radiation des cadres de l'armée française de son mari intervenue le 28 mai 1955, n'établit pas que son mariage doit être regardé comme ayant effectivement été conclu en août 1952 ; que, par suite, elle ne remplit pas la condition d'antériorité exigée par l'article L. 64 applicable en 1961 ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de ses conclusions, elle n'a pas droit, pour la période antérieure à sa demande en date du 30 janvier 2006, à une pension de réversion de veuve ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 18 décembre 2008 est annulé. Article 2 : La décision du ministre de la défense du 7 juin 2007 est annulée. Article 3 : L'Etat versera à Mme B une pension de réversion du chef de son époux à compter du 30 janvier 2006 dans les conditions fixées par la présente décision, les arrérages de sa pension portant intérêts au taux légal à compter de cette même date. Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme B devant le tribunal administratif de Poitiers est rejeté. Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Zahia B née A, au ministre de la défense et des anciens combattants et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 23/12/2011, 335570, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 janvier et 22 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt n° 09/00771 du 3 décembre 2009 par lequel la cour régionale des pensions de Pau, infirmant le jugement du 12 février 2009 du tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques, a accordé à M. Christian A la revalorisation de sa pension militaire d'invalidité, calculée initialement au grade d'adjudant-chef de l'armée de terre, en fonction de l'indice afférent au grade équivalent de maître principal de la marine nationale ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; Vu le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956 ; Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A, Considérant qu'aux termes de l'article L. 24 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : Les pensions militaires prévues par le présent code sont liquidées et concédées, sous réserve de la confirmation ou modification prévues à l'alinéa ci-après, par le ministre des anciens combattants et des victimes de guerre ou par les fonctionnaires qu'il délègue à cet effet (...). / Les concessions ainsi établies sont confirmées ou modifiées par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre et du ministre de l'économie et des finances. La concession ne devient définitive qu'après intervention dudit arrêté. / (...) / Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux militaires et marins de carrière (...), pour lesquels la pension est liquidée (...) par le ministre d'Etat chargé de la défense nationale (...), la constatation de leurs droits incombant au ministre des anciens combattants et victimes de la guerre. Ces pensions sont concédées par arrêté signé du ministre de l'économie et des finances. ; que, d'une part, en vertu de l'article 5 du décret du 20 février 1959 relatif aux juridictions des pensions, dans sa rédaction alors en vigueur, l'intéressé dispose d'un délai de six mois pour contester, devant le tribunal départemental des pensions, les décisions prises en vertu du premier ou du dernier alinéa de l'article L. 24 précité ainsi que la décision prise en vertu du deuxième alinéa du même article, sauf si celle-ci a simplement confirmé la décision primitive prise en vertu du premier alinéa ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 78 du même code : Les pensions définitives ou temporaires attribuées au titre du présent code peuvent être révisées dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'une erreur matérielle de liquidation a été commise. / 2° Lorsque les énonciations des actes ou des pièces sur le vu desquels l'arrêté de concession a été rendu sont reconnues inexactes soit en ce qui concerne le grade, le décès ou le genre de mort, soit en ce qui concerne l'état des services, soit en ce qui concerne l'état civil ou la situation de famille, soit en ce qui concerne le droit au bénéfice d'un statut légal générateur de droits. / Dans tous les cas, la révision a lieu sans condition de délai (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet ; Considérant que le décalage défavorable entre l'indice de la pension servie à un ancien sous-officier de l'armée de terre, de l'armée de l'air ou de la gendarmerie et l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, lequel ne résulte ni d'une erreur matérielle dans la liquidation de la pension, ni d'une inexactitude entachant les informations relatives à la personne du pensionné, notamment quant au grade qu'il détenait ou au statut générateur de droit auquel il pouvait légalement prétendre, ne figure pas au nombre des cas permettant la révision, sans condition de délai, d'une pension militaire d'invalidité sur le fondement de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; qu'ainsi, la demande présentée par le titulaire d'une pension militaire d'invalidité, concédée à titre temporaire ou définitif sur la base du grade que l'intéressé détenait dans l'armée de terre, l'armée de l'air ou la gendarmerie, tendant à la revalorisation de cette pension en fonction de l'indice afférent au grade équivalent dans la marine nationale, doit être formée dans le délai de six mois fixé par l'article 5 du décret du 20 février 1959 ; que, passé ce délai de six mois ouvert au pensionné pour contester l'arrêté lui concédant sa pension, l'intéressé ne peut demander sa révision que pour l'un des motifs limitativement énumérés aux 1° et 2° de cet article L. 78 ; qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle oppose au pensionné la tardiveté de son recours, de justifier devant le juge de la date à laquelle elle a notifié la décision contestée et du respect des formes prescrites pour cette notification par les dispositions législatives et règlementaires en vigueur ; Considérant que, dès lors qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les dispositions de l'article L. 78 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ne font pas obstacle à ce que les pensionnés puissent faire valoir utilement leurs droits devant la juridiction des pensions, pour quelque motif que ce soit, dans le délai de recours prévu par l'article 5 du décret du 20 février 1959, dont la durée de six mois, dérogatoire au droit commun, n'apparaît pas manifestement insuffisante à cet effet, l'ensemble des dispositions dont s'agit ne peuvent être regardées comme contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier protocole additionnel à cette convention garantissant le droit à un recours effectif devant une juridiction ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a demandé le 28 juillet 2006 au MINISTRE DE LA DEFENSE de recalculer la pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée à titre définitif par arrêté du 4 janvier 1999 en fonction de l'indice, plus favorable, afférent au grade équivalent dans la marine nationale ; que, par lettre du 11 août 2006, le ministre lui a répondu que l'administration recherchait les moyens de donner une suite à sa demande et qu'il en serait tenu informé dès que possible ; qu'en l'absence d'autre réponse, M. A a présenté un recours contre ce qu'il a estimé être un rejet implicite de sa demande, devant le tribunal départemental des pensions des Pyrénées-Atlantiques qui, par jugement du 12 février 2009, a rejeté son recours comme irrecevable ; que, sur appel de l'intéressé, la cour régionale des pensions de Pau a écarté les fins de non-recevoir opposées par le commissaire du gouvernement, tirées de l'absence de liaison du contentieux et de la forclusion de la demande de M. A, et a accordé la revalorisation sollicitée par l'intéressé avec effet au 1er janvier 2003 ; Considérant que la lettre d'attente adressée par l'administration à M. A le 11 août 2006 n'a pas été de nature à interrompre ou suspendre le délai au terme duquel, en vertu de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000, est née une décision implicite de rejet de sa demande de revalorisation formée le 28 juillet 2006, laquelle devait être regardée comme constituant un recours gracieux contre l'arrêté du 4 janvier 1999 portant concession de sa pension militaire d'invalidité ; que, par suite, en jugeant que M. A était recevable à contester cette décision tacite, de nature à lier le contentieux devant le tribunal départemental des pensions, la cour régionale des pensions de Pau n'a pas commis d'erreur de droit ; Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis et exempte de dénaturation, que l'administration ne justifiait pas que la notification de l'arrêté du 4 janvier 1999 comportât la mention des voies et délais de recours, la cour régionale des pensions en a légalement déduit qu'en l'absence de déclenchement du délai de recours contentieux, M. A restait recevable à demander la réformation de la décision lui ayant concédé sa pension, aux fins d'alignement de son indice sur celui appliqué, à grade équivalent, aux pensionnés de la marine nationale ; qu'un tel motif justifiant légalement la décision de la cour en ce qu'elle écarte la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande de M. A, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement contester le motif surabondant, tenant à ce que la discrimination invoquée par M. A étant de nature à lui causer un préjudice permanent et continu, aucun délai de forclusion ne pouvait, en tout état de cause, être opposé à sa demande de revalorisation ; Considérant que le moyen, tiré de ce que le principe d'égalité ne ferait pas obstacle à l'application d'indices de pension différents, d'une part, aux sous-officiers de l'armée de terre, de l'armée de l'air et de la gendarmerie, d'autre part, aux sous-officiers de la marine, n'a pas été invoqué devant la cour régionale des pensions de Pau ; qu'un tel moyen, qui en tout état de cause n'est pas fondé, n'est pas né de l'arrêt attaqué et n'est pas d'ordre public ; que, par suite, le MINISTRE DE LA DEFENSE ne peut utilement le soulever au soutien de son pourvoi contre l'arrêt attaqué ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE doit être rejeté ; D E C I D E : ---------------- Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté. Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à M. Christian A.
Conseil d'Etat