Cour Administrative d'Appel de Paris, 6ème Chambre, 27/05/2008, 06PA04079, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision27 mai 2008
Num06PA04079
JuridictionParis
Formation6ème Chambre
PresidentM. PIOT
RapporteurM. André-Guy BERNARDIN
CommissaireM. COIFFET
AvocatsMATHIEU

Vu I°), la requête enregistrée le 15 décembre 2006 sous le n° 06PA04079, présentée par le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM, dont le siège est BP 20744, avenue de la Résistance à Lannion Cedex (22307), représenté par son directeur général délégué en exercice ; le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM demande à la cour la réformation des articles 1 et 2 du jugement n° 04-02691 / 04-24188, en date du 19 octobre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, condamné le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM à verser à Mlle Françoise X, en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité fautive dont est entaché le titre de pension du 12 août 2002, une indemnité égale, pour la période du 1er août 2002 au 27 janvier 2004, à la différence entre une rente d'invalidité calculée au taux de 34, 6 %, et une rente d'invalidité calculée au taux de 19 %, dans la limite de 161 176, 61 euros, en la renvoyant devant le service des pensions, pour la liquidation de cette somme, et, d'autre part, décidé que cette indemnité portera intérêts à compter du 27 janvier 2004, et au fur et à mesure des échéances successives de ladite pension ; ..................................................................................................................... Vu II)°, la lettre enregistrée le 21 février 2007 sous le n° 07PA01992, présentée pour Mlle Françoise , demeurant ..., par Me Mathieu ; Mlle demande à la cour d'enjoindre au Service des pensions de La Poste et de France Telecom, sous astreinte de 150 euros par jour, de procéder, dans un délai qu'il lui plaira de déterminer, à l'exécution des articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris, n° 04-02691 / 04-24188, en date du 19 octobre 2006, en justifiant des diligences accomplies en ce sens, et de condamner le Service des pensions à lui verser une somme de 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ..................................................................................................................... Vu les autres pièces des dossiers ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales, et notamment ses titres I et II issus respectivement des lois n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires et n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2008 : - le rapport de M. Bernardin, rapporteur, - les observations de Me Cros, représentant la Scp Granrut Avocats, pour le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM, - et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ; Considérant que, par décision n° 1251 en date du 5 juin 2002, le président du conseil d'administration de La Poste a admis, sur sa demande présentée le 17 avril 2000, Mlle , titulaire du grade d'agent professionnel qualifié de 2ème niveau, à faire valoir ses droits à la retraite, avec prise d'effet au 1er août 2002 ; que par arrêté n° B02 141841 H en date du 12 août 2002, une pension civile d'invalidité, assortie d'une rente viagère d'invalidité au taux de 19 %, a été accordée à l'intéressée par le service des pensions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, pour une jouissance au 1er août 2002 ; que par une première demande enregistrée le 27 janvier 2004, Mlle a sollicité du Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du 5 juin 2002 par laquelle La Poste l'avait admise à la retraite, ainsi que la condamnation de cet établissement à lui verser une somme de 161 176, 61 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation en réparation du préjudice subi du fait de sa mise à la retraite ; que, par une seconde demande enregistrée le 20 novembre 2004, Mlle a saisi le Tribunal administratif de Paris aux fins de condamnation de La Poste à l'indemniser de l'entier préjudice subi du fait de son accident de service survenu le 19 avril 1999 ; Considérant que si, après avoir prononcé la jonction desdites demandes, le Tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions à fins d'annulation de la décision du 5 juin 2002, cette juridiction a, toutefois, par les articles 1 et 2 de son jugement en date du 19 octobre 2006, condamné pour avoir commis, lors de la fixation du taux d'invalidité, une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité, le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM à verser à Mlle une somme égale, pour la période du 1er août 2002 au 27 janvier 2004, à la différence entre une rente d'invalidité au taux de 34, 6 %, et une rente d'invalidité au taux de 19 %, dans la limite de 161 176, 61 euros en réparation du préjudice subi par elle du fait de l'illégalité du titre de pension du 12 août 2002, en la renvoyant devant le service des pensions, pour la liquidation de cette somme assortie des intérêts moratoires, à compter du 27 janvier 2004, et au fur et à mesure des échéances successives de ladite pension ; Considérant que par une requête enregistrée sous le n° 06PA04079, le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM demande la réformation des articles 1er et 2 du jugement en date du 19 octobre 2006 ; que, Mlle a saisi la cour d'une demande enregistrée sous le n° 07PA01992, tendant à ce qu'il soit fait injonction, sous astreinte, audit service des pensions d'exécuter lesdits articles ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes, qui sont relatives au même jugement, pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ; Sur les conclusions aux fins d'annulation des articles 1 et 2 du jugement du 19 octobre 2006, présentées par le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité : Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 33 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des Télécommunications : « La Poste et France Télécom constituent entre eux, un ou plusieurs groupements d'intérêts publics dotés de la personnalité morale et financière pour assurer la gestion de services communs » ; que, par arrêté du 28 janvier 1991 le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace, a approuvé la convention constitutive d'un groupement d'intérêt public dénommé « SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM », chargé notamment de l'application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite pour le personnel fonctionnaire des corps de La Poste et de France Télécom, ainsi que des dispositions prévues par le statut général des fonctionnaires en ce qui concerne les allocations temporaires d'invalidité ; Considérant, d'autre part, qu'aux termes l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : « Le fonctionnaire qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service (...) peut être radié des cadres par anticipation, soit sur sa demande, soit d'office (...) » ; que l'article L. 28 dudit code prévoit que le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services ; qu'aux termes de l'article L. 31 du même code : « la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service , le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciées par une commission de réforme selon les modalités qui sont fixées par un règlement d'administration publique. » ; que l'article R. 65 du code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit que le ministre dont relevait le fonctionnaire ou le militaire lors de sa radiation des cadres ou de son décès en activité est chargé de constituer le dossier nécessaire au règlement des droits à pension, qu' il propose les bases de liquidation de la pension et, le cas échéant, la rente viagère d'invalidité, qu'après contrôle de cette proposition, le ministre du budget effectue les opérations de liquidation et, par arrêté, concède la pension et la rente viagère d'invalidité ; Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que lorsqu'un agent de La Poste ayant conservé la qualité de fonctionnaire est admis à faire valoir ses droits à la retraite à la suite d'un accident de service, la pension et la rente viagère lui sont concédées par le ministre chargé du budget sur la base d'une proposition faite par le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM qui est chargé notamment, sous sa responsabilité, de recueillir les avis du médecin du service médical, du comité médical et de la commission de réforme de La Poste ; que, dans ces conditions, Mlle ne saurait être admise à rechercher la responsabilité du SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM à raison d'une erreur éventuelle entachant le taux de 19 % retenu pour la rente d'invalidité qui lui a été attribuée suivant le titre de pension établi le 12 août 2002 par le Service des pensions du ministère chargé du budget, correspond au taux arrondi de 18, 24 % retenu par la commission de réforme de La Poste de Paris Ile-de-France dans sa séance du 15 mai 2002 ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1 et 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris l'a condamné à indemniser Mlle du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité dont serait entaché le titre de pension du 12 août 2002 ; Sur les conclusions aux fins d'exécution des articles 1 et 2 du jugement du 19 octobre 2006 : Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : « En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. / Le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut renvoyer la demande d'exécution au Conseil d'Etat. » ; et qu'aux termes de l'article R. 921-6 du même code : « Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement décidé en vertu du dernier alinéa de l'article précédent et, en tout état de cause, à l'expiration d'un délai de six mois à compter de sa saisine, le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. Cette ordonnance n'est pas susceptible de recours. L'affaire est instruite et jugée d'urgence. Lorsqu'elle prononce une astreinte, la formation de jugement en fixe la date d'effet. » ; Considérant que, par une ordonnance en date du 13 juin 2007, le Président de la cour de céans a prescrit l'ouverture d'une procédure juridictionnelle afin qu'il soit statué sur la demande en date du 21 février 2007 de Mlle tendant à obtenir une aide à l'exécution des articles 1 et 2 du jugement en date du 19 octobre 2006 du Tribunal administratif de Paris que la cour annule à la demande du SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM par le présent arrêt ; Considérant que par l'article 1 de son jugement du 19 octobre 2006, le Tribunal administratif de Paris a condamné le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM à verser à Mlle en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité dont est entaché le titre de pension du 12 août 2002, une indemnité égale, pour la période du 1er août 2002 au 27 janvier 2004, à la différence entre une rente d'invalidité au taux de 34, 6 % et une rente d'invalidité au taux de 19 %, dans la limite de 161 176, 61 euros, l'intéressée étant renvoyée devant le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM pour la liquidation de cette indemnité ; que le tribunal a précisé, par l'article 2 du même jugement que les sommes correspondant à la différence entre le montant de la pension concédée à Mlle et le montant de la pension auquel elle est en droit de prétendre porteront intérêts à compter du 27 janvier 2004, et au fur et à mesure des échéances successives de ladite pension ; Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être jugé, c'est à tort que, par les articles 1 et 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a condamné le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM à indemniser Mlle du préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'illégalité dont serait entaché le titre de pension du 12 août 2002, et a en conséquence fait droit à la demande à fin d'indemnisation présentée par l'intéressée devant le Tribunal administratif de Paris ; que, par suite, les conclusions présentées par l'intéressée à fin d'exécution des articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris, en date du 19 octobre 2006, sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ; Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.» ; Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions précitées, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mlle doivent dès lors être rejetées ; Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mlle la somme demandée par le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; D E C I D E : Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement susvisé en date du 19 octobre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Paris a condamné le SERVICE des PENSIONS de LA POSTE ET DE FRANCE TELECOM à verser à Mlle , en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'illégalité fautive dont serait entaché le titre de pension du 12 août 2002, une indemnité, portant intérêts à compter du 27 janvier 2004, et au fur et à mesure des échéances successives de ladite pension, sont annulés. Article 2 : La demande présentée par Mlle devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 07PA01992 présentée par Mlle tendant à l'exécution des articles 1 et 2 du jugement susmentionné. Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes du SERVICE des PENSIONS de LA POSTE et de FRANCE TELECOM et de Mlle est rejeté. 6 N° 06PA04079, 07PA01992