Cour Administrative d'Appel de Nantes, 3ème Chambre, 29/10/2009, 09NT00035, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision29 octobre 2009
Num09NT00035
JuridictionNantes
Formation3ème Chambre
PresidentM. LOOTEN
RapporteurM. Jean-Frédéric MILLET
CommissaireM. GEFFRAY
AvocatsLE BRET-DESACHE

Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2009, présentée pour Mme Maryvonne X, épouse Y, demeurant ..., par Me Lebret-Desaché, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Mme Maryvonne X, épouse Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-1524 du 7 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 24 352,80 euros outre intérêts, en réparation des préjudices qu'elle a subis ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Premier Ministre a rejeté sa demande du 11 mai 2007 tendant à obtenir la rente instituée par le décret du 27 juillet 2004 à compter de l'année 2000 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 24 352,80 euros majorée des intérêts capitalisés, et une somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros qu'elle a exposée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ;

Vu le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2009 :

- le rapport de M. Millet, président ;

- et les conclusions de M. Geffray, rapporteur public ;





Considérant qu'il ressort de la minute du jugement attaqué que celui-ci analyse les conclusions et moyens des parties ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement serait intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative manque en fait ;

Considérant, d'une part, que le décret susvisé du 13 juillet 2000 a institué une mesure de réparation prenant la forme d'une indemnité en capital ou d'une rente viagère, en faveur de toute personne dont la mère ou le père a été déporté à partir de la France dans le cadre des persécutions antisémites durant l'Occupation et a trouvé la mort en déportation, si elle était mineure de vingt et un ans au moment où la déportation est intervenue ;

Considérant, d'autre part, que le décret susvisé du 27 juillet 2004 a institué une mesure de réparation similaire en faveur des personnes, mineures aux moments des faits, dont la mère ou le père a été déporté, à partir du territoire national, durant l'Occupation pour les motifs et dans les conditions mentionnées aux articles L. 272 et L. 286 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et a trouvé la mort en déportation, ainsi qu'en faveur des personnes, mineures de vingt et un ans au moment des faits, dont le père ou la mère a, durant l'Occupation, été exécuté dans les circonstances définies aux articles L. 274 et L. 290 du même code ;

Considérant que Mme X, épouse Y, a obtenu par décision du Premier Ministre, le bénéfice, à compter du 1er octobre 2004, de la rente viagère instituée par les dispositions susmentionnées du décret du 27 juillet 2004 ; qu'elle soutient que l'Etat a méconnu le principe d'égalité devant les charges et avantages publics et a pris une mesure discriminatoire, au sens des stipulations de l'article 14 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ne lui accordant pas le bénéfice de cette indemnisation à une date d'effet identique à celle retenue pour les bénéficiaires de la mesure de réparation instituée par le décret précité du 13 juillet 2000 ; qu'elle demande à la Cour, d'annuler outre le jugement attaqué, la décision implicite par laquelle le Premier Ministre a rejeté sa réclamation préalable, de condamner l'Etat à lui verser, en réparation de son préjudice, la somme de 24 352,80 euros, majorée des intérêts capitalisés, correspondant au montant de la rente qu'elle aurait ainsi dû percevoir durant les années 2000 à 2004, ainsi qu'une somme de 2 500 euros en réparation de son préjudice moral ;

Considérant que les personnes tombant sous le coup des mesures antisémites ont fait l'objet, durant l'Occupation, d'une politique d'extermination systématique qui s'étendait même aux enfants et qu'ainsi les mineurs dont le père ou la mère a été déporté dans le cadre de ces persécutions peuvent être regardés comme placés dans une situation différente de celle des orphelins des victimes des autres déportations criminelles pratiquées pendant la même période ; qu'il en résulte que le gouvernement a pu, sans méconnaître le principe d'égalité devant les charges publiques ni la prohibition des mesures discriminatoires, instituer des mesures de réparation pour ces deux catégories de personnes par des décrets distincts prenant effet à des dates différentes ; que la requérante n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que l'Etat a engagé sa responsabilité à son égard en ne lui accordant une mesure de réparation sous forme de rente mensuelle qu'à compter du 1er octobre 2004 dans les conditions prévues par l'article 5 du décret du 27 juillet 2004 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X, épouse Y, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté les conclusions de sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle invoque ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme X, épouse Y demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme X, épouse Y est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Maryvonne X, épouse Y et au Premier Ministre.
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