Cour Administrative d'Appel de Versailles, 5ème chambre, 22/10/2009, 08VE01539, Inédit au recueil Lebon
Date de décision | 22 octobre 2009 |
Num | 08VE01539 |
Juridiction | Versailles |
Formation | 5ème chambre |
President | M. MOUSSARON |
Rapporteur | Mme Christine COURAULT |
Commissaire | M. DAVESNE |
Avocats | MAUGENDRE |
Vu la requête, enregistrée le 26 mai 2008 en télécopie et le 27 mai 2008 en original au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme A, demeurant ..., par Me Maugendre ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0404259 du 25 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bondy à lui verser une indemnité de 20 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'accident de service dont elle a été victime le 19 mai 2003 ;
2°) d'ordonner avant dire droit une expertise afin de déterminer le pretium doloris, les préjudices non corporels, ainsi que les troubles subis dans ses conditions d'existence ;
3°) de condamner la commune de Bondy à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de provision ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bondy, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros, à verser à Me Maugendre, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
Mme A soutient qu'elle a été victime d'un accident de service le 19 mai 2003 en étant écrasée par la chute d'un tiroir métallique contenant plusieurs dizaines de kilos de documents ; qu'elle a subi des douleurs extrêmes au niveau du dos et qu'elle souffre depuis de douleurs dorsales ; que, travaillant toujours dans le même service, elle ressent des angoisses permanentes ; qu'elle éprouve beaucoup de difficultés pour accomplir certains gestes de la vie quotidienne et à s'occuper de ses enfants ; que la responsabilité de la commune est engagée sur le terrain de la faute car l'accident a été provoqué par un chargement non-conforme et qu'elle peut donc prétendre à une réparation intégrale de son préjudice ; qu'à ce titre elle demande la prise en charge par la commune des frais médicaux susceptibles d'être engendrés par les douleurs dorsales dont elle souffre ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 2009 :
- le rapport de Mme Courault, premier conseiller,
- les conclusions de M. Davesne, rapporteur public,
- et les observations de Me Soetemont, substituant Me Vieilleville, pour la commune de Bondy ainsi que les observations de Me Barthelot de Bellefonds, pour la Société française d'automatisme ;
Considérant que Mme A, agent administratif de la commune de Bondy, affectée au service de l'état civil de la commune, a été blessée le 19 mai 2003, alors qu'elle était dans l'exercice de ses fonctions, par la chute d'une hauteur de deux mètres soixante-dix d'un plateau métallique d'un classeur rotatif mécanisé d'un poids de soixante-quinze kilos, lui-même chargé, selon la commune, de quarante kilos de documents ; que cet accident a été reconnu imputable au service ; que Mme A, qui a recherché la responsabilité de la commune de Bondy tant sur le terrain de la responsabilité sans faute que sur celui de la responsabilité pour faute, aux fins d'obtenir réparation de l'ensemble des conséquences dommageables de cet accident, relève appel du jugement en date du 25 mars 2008 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;
Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée : Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...). ; que ces dispositions ainsi que celles instituant pour les fonctionnaires territoriaux victimes d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle une rente d'invalidité et une allocation temporaire d'invalidité déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions ; que ces dispositions ne font toutefois obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien appartenait à celle-ci ;
Considérant, en premier lieu, que Mme A demande réparation du préjudice, non réparé par l'application des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, résultant des frais médicaux engagés depuis le 25 novembre 2004, date à laquelle la commune de Bondy a cessé de prendre en charge ses frais de kinésithérapie, et par ceux qu'elle est susceptible d'engager ; que, toutefois, la requérante n'apporte aucun élément justifiant des frais médicaux en lien avec l'accident qu'elle aurait supportés depuis cette date et ne peut prétendre à être indemnisée des frais qu'elle pourrait être amenée à exposer à l'avenir dès lors que ceux-ci présentent un caractère purement éventuel ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction, en particulier de témoignages circonstanciés des collègues de travail de Mme A et d'une attestation de sa kinésithérapeute, que l'accident survenu le 19 mai 2003 dans les circonstances susindiquées, qui a entraîné des soins médicaux pris en charge par la commune jusqu'au 25 novembre 2004, a provoqué pour la requérante des souffrances physiques, notamment dorsales ; que la requérante fait également valoir le retentissement psychologique de l'accident ; que l'état du dossier ne permet cependant pas à la Cour d'évaluer la nature et l'étendue des préjudices à caractère personnel subis par la requérante ; qu'il y a dès lors lieu, avant dire droit, d'ordonner une expertise aux fins définies ci-après ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande d'allocation provisionnelle de la requérante à hauteur de la somme de 2 500 euros ;
DECIDE
Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de Mme A tendant à l'indemnisation de ses préjudices à caractère personnel résultant de l'accident de service dont elle a été victime le 19 mai 2003, procédé par un médecin désigné par le président de la Cour à une expertise. L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la Cour dans le délai de trois mois suivant la prestation de serment.
Article 2 : L'expert aura pour mission de décrire et d'évaluer les souffrances subies par Mme A du fait de cet accident et les éventuelles répercussions sur ses conditions d'existence.
Article 3 : L'expert, pour l'accomplissement de sa mission, se fera communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de Mme A et notamment tous documents relatifs aux examens, soins et interventions pratiqués sur l'intéressée à la suite de l'accident.
Article 4 : Les opérations d'expertise auront lieu contradictoirement entre Mme A, la commune de Bondy et la Société française d'automatisme.
Article 5 : La commune de Bondy versera à Mme A la somme de 2 500 euros à titre d'allocation provisionnelle.
Article 6 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
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N° 08VE01539 2