Cour Administrative d'Appel de Nantes, 3ème Chambre, 21/10/2016, 15NT00357, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler la décision du 16 décembre 2011 du maire de la commune de Saint-Brieuc fixant le montant de son indemnité de licenciement, la décision du 13 février 2012 de la même autorité lui refusant le versement d'une allocation de chômage, l'attestation ASSEDIC délivrée le 5 janvier 2012, enfin le refus implicite opposé à son recours gracieux dirigé contre ces décisions ; elle a demandé en outre que la commune de Saint-Brieuc soit condamnée à lui verser la somme de 7 085 euros au titre de l'indemnité de licenciement, la somme de 844,69 euros au titre des dispositions de l'article 41 du décret n°91-298 du 20 mars 1991, une somme de 7 180 euros au titre d'une allocation journalière pour la période du 10 décembre 2011 au 31 décembre 2012 puis le montant de cette allocation après cette date, et d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Brieuc de lui verser l'indemnité de licenciement qu'elle demande, son traitement et l'indemnité journalière de "privation d'emploi " qui lui sont dus.
Par un jugement n° 1205267 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du maire de la commune de Saint-Brieuc du 13 février 2012 refusant à Mme B...le versement d'une allocation de chômage, a enjoint à cette autorité de procéder à la liquidation et au versement de la somme due à l'intéressée au titre de cette allocation et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 février 2015 la commune de Saint-Brieuc, représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2014 en tant qu'il a annulé la décision de son maire du 13 février 2012 et lui a enjoint de verser une allocation journalière de chômage à Mme B...cumulable avec sa pension d'invalidité de 2ème catégorie ;
2°) de rejeter en totalité la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de Mme B...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a estimé que la période de référence calcul (PRC) pour la détermination des droits à l'allocation d'aide au retour à l'emploi devait prendre en compte les 12 mois civils précédant la date de licenciement de Mme B...alors qu'elle était, au cours de cette période, en position de congé de maladie ordinaire ; il a ainsi fait une inexacte application des articles 13 à 18 du règlement annexé à la convention du 6 mai 2011 relative à l'indemnisation du chômage, qui excluent de cette période de référence les jours qui n'ont pas été effectivement travaillés ;
- Mme B...ayant été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 10 décembre 2010, le dernier jour de travail payé à l'intéressée entrant dans l'assiette des contributions, au sens de l'article 13 du règlement annexé à la convention du 6 mai 2011, doit être fixé au 30 novembre 2010 ; la période de référence à prendre en compte pour le calcul de l'allocation d'assurance chômage due court du 1er décembre 2009 au 30 novembre 2010 ;
- pour pouvoir cumuler l'allocation d'assurance chômage avec une pension d'invalidité de 2ème catégorie, l'agent doit avoir perçu cette pension durant la PRC retenue pour le calcul du montant de l'allocation journalière d'aide au retour à l'emploi ; en l'espèce, Mme B...a été admise en 2ème catégorie d'invalidité à compter du 1er juin 2011 ; ne percevant pas sa pension durant la période de référence du 1er décembre 2009 au 30 novembre 2010, elle n'a donc pas droit au cumul de l'allocation d'assurance chômage avec la pension d'invalidité de 2ème catégorie ;
- le montant journalier de la pension d'invalidité de 2ème catégorie perçu par Mme B... s'élève à 25,18 euros, soit un montant supérieur de 6,26 euros à l'allocation d'assurance chômage qu'elle serait susceptible de percevoir ; dans ces conditions, la commune de Saint-Brieuc n'était pas tenue de verser à Mme B...les allocations d'assurance chômage en litige.
La requête a été transmise le 23 février 2015 à Mme B...qui n'a pas produit de mémoire.
Une mise en demeure a été adressée le 22 octobre 2015 à MmeB....
Par une ordonnance du 19 avril 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 3 mai 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi modifiée n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires de la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 91-298 du 20 mars 1991 modifié ;
- l'arrêté du 15 juin 2011 portant agrément de la convention du 6 mai 2011 relative à l'indemnisation du chômage et son règlement général annexé ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lemoine,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.
1. Considérant que MmeB..., agent d'entretien titulaire à temps non complet, employée par la commune de Saint-Brieuc depuis le 1er mai 1991, a perçu une pension d'invalidité de 1ère catégorie à compter du 13 septembre 2010 et a été placée le 10 décembre 2010 en position de congé de maladie ordinaire qui a été prolongée jusqu'au 9 décembre 2011 sans que Mme B...reprenne le travail ; qu'elle a été admise en 2ème catégorie d'invalidité à compter du 1er juin 2011, puis licenciée pour inaptitude physique le 9 décembre 2011 après que le comité médical départemental eut émis un avis favorable à la reconnaissance de son inaptitude totale et définitive à l'exercice de ses fonctions ; que, par un courrier du 16 décembre 2011, le maire de la commune de Saint-Brieuc a notifié à Mme B...le montant définitif de l'indemnité de licenciement qui lui était due ; que, par un second courrier du 13 février 2012, cette même autorité a informé Mme B...de ce qu'elle ne pouvait bénéficier d'une allocation d'aide au retour à l'emploi de la commune au motif qu'elle percevait une pension d'invalidité de 2ème catégorie d'un montant supérieur à celui des allocations auxquelles elle serait susceptible de prétendre ; que Mme B...a alors saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant, notamment, à l'annulation de ces décisions des 16 décembre 2011 et 13 février 2012 de la commune de Saint-Brieuc et au versement des sommes qu'elle estimait lui être dues ; que, par un jugement du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 13 février 2012 refusant à Mme B...le versement de l'allocation chômage, a enjoint à cette commune de lui verser cette aide et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de l'intéressée ; que la commune de Saint-Brieuc relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé sa décision du 13 février 2012 et lui a enjoint de verser l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) à Mme B...;
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 5421-1 du code du travail alors applicable : " En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L. 1237-11 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre. " ; qu'aux termes de l'article L. 5424-1 du même code : " Ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 : 1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l'État et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5424-2 de ce code : " Les employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l'allocation d'assurance. Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, lui confier cette gestion. " ; qu'à la suite de l'accord prévu par l'article L. 5422-20 de ce même code conclu entre les partenaires sociaux, la convention d'assurance chômage du 6 mai 2011, son règlement annexé et les textes associés ont été agréés par arrêtés ministériels du 15 juin 2011, publiés au Journal officiel du 16 juin 2011 et rendus applicables aux agents publics involontairement privés d'emploi, y compris pour inaptitude physique ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires de la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. " ; que le Règlement général annexé à la convention du 6 mai 2011, en vigueur à la date à laquelle la décision contestée relative à la situation de Mme B...a été prise, prévoit : " Article 13. - § 1er - Le salaire de référence pris en considération pour fixer le montant de la partie proportionnelle de l'allocation journalière est établi, sous réserve de l'article 14, à partir des rémunérations des 12 mois civils précédant le dernier jour de travail payé à l'intéressé, entrant dans l'assiette des contributions, dès lors qu'elles n'ont pas déjà servi pour un précédent calcul. (...) Article 14 § 3 - Le revenu de remplacement est calculé sur la base de la rémunération habituelle du salarié. Ainsi, si dans la période de référence sont comprises des périodes de maladie, de maternité ou, d'une manière plus générale, des périodes de suspension du contrat de travail n'ayant pas donné lieu à une rémunération normale, ces rémunérations ne sont pas prises en compte dans le salaire de référence. / Les majorations de rémunérations, intervenues pendant la période de référence servant au calcul du revenu de remplacement, sont prises en compte dans les conditions et limites prévues par un accord d'application. (...) Article 18 § 2 - Le montant de l'allocation servie aux allocataires bénéficiant d'une pension d'invalidité de 2e ou de 3e catégorie, au sens de l'article L. 341-4 du code la sécurité sociale ou au sens de toute autre disposition prévue par les régimes spéciaux ou autonomes de sécurité sociale, ou d'une pension d'invalidité acquise à l'étranger, est cumulable avec la pension d'invalidité de 2e ou 3e catégorie dans les conditions prévues par l'article R. 341-15 du code de la sécurité sociale, dès lors que les revenus issus de l'activité professionnelle prise en compte pour l'ouverture des droits ont été cumulés avec la pension. / A défaut, l'allocation servie aux allocataires bénéficiant d'une telle pension est égale à la différence entre le montant de l'allocation d'assurance chômage et celui de la pension d'invalidité. " ; qu'il résulte de ces dispositions que pour la détermination du salaire journalier de référence, la période de référence de calcul à prendre en compte pour le calcul de l'allocation d'aide au retour à l'emploi comporte les rémunérations des 12 mois civils précédant le dernier jour de travail payé à l'intéressé correspondant à la rémunération habituelle du salarié ; que si l'article 14 § 3 du règlement exclut les rémunérations versées lors des périodes de maladie n'ayant pas donné lieu à une rémunération normale de l'agent, cette disposition ne saurait avoir pour effet d'exclure les périodes de congé de maladie ordinaire au cours desquelles le traitement de l'agent a été intégralement maintenu ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 10 décembre 2010 et qu'elle a perçu l'intégralité de son traitement et des rémunérations accessoires servant de base aux différentes contributions sociales, à l'exclusion des contributions chômage dès lors que son employeur n'avait pas choisi de confier l'indemnisation chômage de ses agents à Pôle emploi, jusqu'au 10 mars 2011 ; qu'elle a ainsi perçu sa rémunération habituelle jusqu'à cette date, quand bien même elle n'aurait pas effectivement travaillé entre le 10 décembre 2010 et le 10 mars 2011 ; qu'en revanche, Mme B...n'ayant pas repris le travail après le 10 mars 2011 et jusqu'à la date de son licenciement intervenu le 9 décembre 2011 et le traitement qu'elle a perçu au cours de cette période ayant été réduit de moitié, celui-ci ne peut être regardé comme constituant la rémunération normale et habituelle de l'agent pour le calcul du montant du salaire journalier de référence ; que, dans ces conditions, la période de référence de calcul à retenir en vertu de l'article 13 du règlement général annexé à la convention du 6 mai 2011 couvre en l'espèce la période comprise entre le 1er mars 2010 et le 28 février 2011 ; que, la pension d'invalidité de 2ème catégorie ayant été accordée et versée à Mme B...à compter du 1er juin 2011, soit postérieurement à la période de référence de calcul ainsi déterminée, cette pension d'invalidité ne pouvait, ainsi que l'a décidé la commune de Saint-Brieuc le 13 février 2012, être cumulée avec les revenus d'activité au sens de l'article 18 § 2 du règlement général annexé à la convention Unedic ; qu'il est constant que le montant de la pension d'invalidité de 2ème catégorie versée à MmeB..., fixé au taux journalier de 25,18 euros, était supérieur à celui de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à laquelle l'intéressée pouvait prétendre, compte tenu des revenus pris en compte dans les conditions qui viennent d'être rappelées ; que, par suite, c'est à juste titre que la commune de Saint-Brieuc a refusé d'indemniser Mme B...de sa perte d'emploi ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Brieuc est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 13 février 2012 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Brieuc présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1205267 du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2014 est annulé en tant qu'il a annulé la décision du maire de Saint-Brieuc du 13 février 2012 et enjoint à cette commune de réexaminer les droits de Mme B...à l'allocation d'aide au retour à l'emploi.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par Mme B...devant le tribunal administratif de Rennes et tendant à l'annulation de la décision du maire de la commune de Saint-Brieuc du 13 février 2012 et au versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter de la date de son licenciement sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Saint-Brieuc tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Brieuc et à Mme D...B....
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2015 à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Gauthier, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 21 octobre 2015.
Le rapporteur,
F. Lemoine
Le président,
I. Perrot
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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