CAA de PARIS, 4ème chambre, 19/11/2018, 16PA03897, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision19 novembre 2018
Num16PA03897
JuridictionParis
Formation4ème chambre
PresidentM. EVEN
RapporteurMme Perrine HAMON
CommissaireMme ORIOL
AvocatsPINTO

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 août 2013 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre a refusé de lui reconnaître la qualité de combattant.

Par une ordonnance n° 1604619 du 16 novembre 2016, le vice-président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 décembre 2016 et le 8 octobre 2017, M. C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du Tribunal administratif de Paris n° 1604619 du
23 décembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision de la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre du 19 août 2013 ;

3°) d'enjoindre à l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre de lui délivrer la carte du combattant, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi
n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :
- l'ordonnance a été prise en méconnaissance du droit au recours effectif garanti par l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, le premier juge ne lui ayant pas demandé de produire les justificatifs permettant d'apprécier le bien-fondé de sa demande ;
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- il remplit les conditions pour être qualifié de combattant.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 novembre 2017, l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
- à titre principal, la demande de première instance était tardive ;
- à titre subsidiaire, le moyen tiré de l'illégalité externe de la décision attaquée est nouveau en appel et, par suite, irrecevable ;
- les autres moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 28 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre,
- le code de procédure civile,
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1. M. C...fait appel de l'ordonnance du 16 novembre 2016 par laquelle le
vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 août 2013 par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre lui a refusé l'attribution de la carte du combattant.


Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif, (...) le vice-président du tribunal administratif de Paris (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.(...) ". M. C...ne conteste pas que la demande qu'il a présentée au Tribunal administratif de Paris, laquelle se bornait à invoquer, sans plus de précisions, quatre années de services dans l'armée française entre 1940 et 1944, n'était assortie d'aucune pièce justificative, et donc n'était manifestement pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

3. Si M. C...invoque l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne relatif au droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, selon lequel " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter ", il n'a nullement été privé d'exercer un recours effectif devant le juge compétent par le seul fait que ce recours a été rejeté à raison de son irrecevabilité.

Sur la légalité de la décision attaquée :

4. Aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 ". L'article R. 223 de ce code dispose que : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " et son article R. 224 que " Sont considérés comme combattants : / (...) C- Pour les opérations effectuées après le 2 septembre 1939 : / (...) I.- Militaires / Les militaires des armées de terre, de mer et de l'air : / 1º) Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, aux unités énumérées aux listes établies par le ministre de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer ; pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre des opérations comprises entre le 2 août 1914 et le 2 septembre 1939 se cumulent entre eux et avec ceux effectués au titre des opérations postérieures au 2 septembre 1939. D'autre part, sont accordées des bonifications afférentes soit à des opérations de combat limitativement désignées ou effectuées dans des conditions exceptionnellement dangereuses, soit à des situations personnelles, résultant du contrat d'engagement ou d'une action d'éclat homologuée par citation collective au titre d'une unité ou d'une fraction d'unité constituée. Ces bonifications ne devront pas excéder le coefficient six pour celles afférentes aux combats, ou la durée de dix jours pour celles afférentes aux situations personnelles. Leurs modalités d'application sont fixées par arrêtés des ministres intéressés ; 2º) Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient aux unités énumérées aux listes susvisées, mais sans condition de durée de séjour dans ces unités ; 3º) Qui ont reçu une blessure de guerre, quelle que soit l'unité à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ; 3º bis) Qui ont pris part pendant la campagne de 1940 à des opérations ayant permis de contenir ou de repousser l'ennemi, caractérisées autant par l'intensité des combats que par l'importance des forces engagées, sous réserve que les intéressés aient servi, à ce titre, quelle qu'en soit la durée, dans une unité combattante. Les lieux et les dates de ces opérations sont déterminés par arrêté du ministre chargé de la défense ; 4º) Qui ont été, soit détenus comme prisonniers de guerre pendant six mois en territoire occupé par l'ennemi, soit immatriculés dans un camp en territoire ennemi, sous réserve d'avoir appartenu, au moment de leur capture, sans condition de durée de séjour, à une unité combattante pendant la période où celle-ci avait cette qualité ; 5º) Qui ont été, soit détenus comme prisonniers de guerre pendant six mois en territoire occupé par l'ennemi, soit immatriculés dans un camp en territoire ennemi où ils ont été détenus pendant quatre-vingt-dix jours au moins, sous réserve d'avoir appartenu antérieurement à leur capture, ou postérieurement à leur détention, sans condition de durée de séjour, à une unité combattante, pendant la période où celle-ci avait cette qualité. Les durées de détention prévues aux alinéas 4º et 5º sont réduites, en ce qui concerne les combattants d'Indochine, par un arrêté conjoint du ministre des anciens combattants et victimes de guerre, du ministre d'Etat chargé de la défense nationale et du ministre chargé de la France d'outre-mer, dont les dispositions font l'objet de l'article A. 121 bis ; 6º) Qui, faits prisonniers, ont obtenu la médaille des évadés, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 30 octobre 1946 ; 7º) Qui, faits prisonniers, peuvent se prévaloir des dispositions du chapitre Ier du titre II relatives aux membres de la Résistance ayant servi dans les pays d'outre-mer ou ayant résisté dans les camps de prisonniers ou en territoires étrangers occupés par l'ennemi, ou ont fait l'objet de la part de l'ennemi, pour actes qualifiés de résistance, de mesures de représailles et notamment de conditions exceptionnelles de détention ; 8º) Qui, Alsaciens et Mosellans, sans avoir servi dans l'armée française, satisfont aux conditions qui sont déterminées par arrêté interministériel dont les dispositions font l'objet des articles A. 123-2 à A. 123-5 (...) ".

5. En premier lieu, il ressort de la décision attaquée du 19 août 2013 que la directrice de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre a cité les textes fondant sa décision, ainsi que les circonstances de fait qui ont conduit à son édiction. Le moyen tiré de son insuffisante motivation doit donc être écarté comme manquant en fait.

6. En second lieu, si M. C...soutient qu'il a droit à la carte du combattant sur le fondement des dispositions de l'article R. 224 précité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dès lors qu'il a servi dans une unité combattante des forces armées françaises pendant plus de trois mois avant la fin de la seconde guerre mondiale, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'attestation des services militaires de l'intéressé, que
M. C...a servi en qualité d'appelé dans l'armée française du 10 octobre 1944 au 10 mars 1946. Le requérant n'établit pas par cette pièce, ni même ne soutient avoir servi dans l'une des unités figurant sur les listes établies par le ministre de la défense nationale et, s'il y a lieu, par le ministre chargé de la France d'outre-mer au sens des dispositions précitées. D'autre part,
M. C...ne soutient ni même n'allègue qu'il se trouvait dans l'un des autres cas mentionnés à l'article R. 224 pouvant ouvrir droit à la carte du combattant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.


DECIDE :



Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la ministre des armées. Copie en sera adressée à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 novembre 2018.

Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
I. BEDRLa République mande et ordonne à la ministre des armées, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA03897