Conseil d'État, 4ème chambre, 01/04/2019, 425629, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision01 avril 2019
Num425629
Juridiction
Formation4ème chambre
RapporteurMme Françoise Tomé
CommissaireM. Frédéric Dieu
AvocatsSCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 décembre 2015 par laquelle la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a refusé de faire droit à sa demande de validation pour la retraite des services accomplis d'octobre 1975 à juin 1978 en qualité d'étudiant hospitalier. Par un jugement n° 1601847 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif a annulé cette décision.

Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation demande au Conseil d'Etat qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 6 novembre 2018 du tribunal administratif de Nantes.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de M. A...;



Considérant ce qui suit :

1. Aux termes, d'une part, de l'article R. 821-5 du code de justice administrative : " La formation de jugement peut, à la demande de l'auteur du pourvoi, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution d'une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort si cette décision risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens invoqués paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de la décision juridictionnelle rendue en dernier ressort, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond (...)".

2. Aux termes, d'autre part, de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Sous réserve du b de l'article L. 43, la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : /A tout moment en cas d'erreur matérielle ; /Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit. /La restitution des sommes payées indûment au titre de la pension ou de la rente viagère d'invalidité supprimée ou révisée est exigible lorsque l'intéressé était de mauvaise foi. Cette restitution est, en tant que de besoin, poursuivie par l'agent judiciaire de l'Etat (...) ". Si ces dispositions limitent les cas dans lesquels l'administration peut remettre en cause une décision liquidant une pension civile ou militaire de retraite, elles sont en revanche sans incidence sur la révision d'une telle décision lorsque celle-ci intervient en exécution d'une décision contentieuse.

3. Dès lors, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation n'est pas fondée à soutenir que les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite font obstacle à ce que l'administration puisse, une fois intervenue la décision du Conseil d'Etat sur le pourvoi en cassation qu'elle a introduit contre le jugement dont elle demande le sursis à exécution, revenir le cas échéant, pour l'exécution de l'arrêt du Conseil d'Etat, sur la durée de services qu'elle doit reconnaître à M. A...en exécution de ce même jugement.

4. La première condition posée par l'article R. 821-5 du code de justice n'étant pas remplie, il y a lieu, sans qu'il soit besoin d'examiner si l'autre condition posée par ce même article est remplie, de rejeter la requête.

5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la ministre de l'ensemble supérieur, de la recherche et de l'innovation est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et à M. B...A....

ECLI:FR:CECHS:2019:425629.20190401