CAA de PARIS, 4ème chambre, 31/03/2023, 22PA02712, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision31 mars 2023
Num22PA02712
JuridictionParis
Formation4ème chambre
PresidentMme BRIANÇON
RapporteurMme Marguerite SAINT-MACARY
CommissaireMme JAYER
AvocatsS.E.L.A.F.A. CABINET CASSEL

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés des 11 juillet, 9 août et 3 octobre 2019 par lesquels le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis l'a placée en congé de maladie ordinaire, à plein traitement du 25 au 27 mai 2019 puis à demi-traitement du 28 mai au 27 septembre 2019 ainsi que la décision implicite de refus de reconnaissance d'imputabilité au service de son accident.

Par un jugement n° 1911048-1911058-1913352-1913400-1911035 du 13 mai 2022 le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 juin 2022, Mme C..., représentée par la SELAFA Cassel, demande à la Cour :


1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler les arrêtés des 11 juillet, 9 août et 3 octobre 2019 du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis ainsi que sa décision implicite de refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie et l'arrêté du 27 janvier 2020 par lequel il a rejeté de manière expresse sa demande ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis de la placer en congé pour invalidité imputable au service sur la période considérée ou à défaut de réexaminer son dossier, le tout sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- les décisions implicites et expresses refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie sont insuffisamment motivées ;
- son accident est manifestement imputable au service.


Par un mémoire en défense enregistré le 2 décembre 2022, le département de la Seine-Saint-Denis, représenté par la SELAS Seban et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 3 750 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.



Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique.


Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., rédactrice principale de première classe au sein du service des affaires européennes de la direction Europe et International du département de la Seine-Saint-Denis, a déclaré un accident survenu le 19 juillet 2018 après la lecture d'un courriel de son supérieur hiérarchique et à la suite duquel elle a été arrêtée. Par des arrêtés des 11 juillet, 9 août et 3 octobre 2019, le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis l'a placée en congé de maladie ordinaire à plein traitement du 25 au 27 mai 2019 puis à demi-traitement du 28 mai au 27 septembre 2019 et, par un arrêté du 27 janvier 2020, il a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident. Mme C... relève appel du jugement n° 1911048-1911058-1913352-1913400-1911035 du 13 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.
A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ".


3. D'une part, l'arrêté du 27 janvier 2020 par lequel le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de Mme C... s'est substitué à la décision implicite de rejet de sa demande. Dès lors, la requérante ne peut utilement soutenir que cette dernière décision serait insuffisamment motivée.


4. D'autre part, l'arrêté du 27 janvier 2020 vise les textes applicables ainsi, notamment, que l'avis de la commission de réforme et indique : " considérant que les faits déclarés ne sont pas consécutifs d'un accident de service ", avant de décider que l'accident de Mme C... n'est pas imputable au service. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que Mme C... a été mise en possession de l'avis de la commission de réforme, qui a conclu que les faits déclarés ne sont pas constitutifs d'un accident de service. Ainsi a-t-elle été, en l'espèce, mise à même de comprendre que l'administration s'est appropriée l'avis de la commission de réforme et d'en connaître le sens. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit être écarté.


5. En second lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-53 du 10 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Constitue un accident de service, pour l'application de cet article, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.


6. Il ressort des pièces du dossier que par un courriel du 18 juillet 2018, le chef de service de Mme C... lui a indiqué être interpellé par une incohérence entre son temps de présence au bureau et son temps de travail affiché sur Chronos, lui précisant qu'elle avait badgé la veille à 12 heures 30 et à 12 heures 48 mais avait été vue à la cantine à 13 heures 00 et était revenue dans son bureau à 14 heures 05, et l'a convoquée à un entretien avec la directrice pour un rappel des règles. Ni les termes du courriel, ni les faits qui y sont mentionnés et dont la matérialité n'est au demeurant pas contestée, ni, enfin, la convocation à un entretien n'excèdent l'exercice de son pouvoir hiérarchique par le chef de service de Mme C.... La commission de réforme a d'ailleurs, à l'unanimité, estimé que la réception du courriel en cause ne constituait pas un accident de service. Si la requérante fait également état d'un contexte de travail dégradé, celui-ci, à le supposer même établi, n'est pas de nature à conférer le caractère d'accident à la réception du courriel que son chef de service lui a adressé le 18 juillet 2018. Les faits à l'origine de ce courriel sont en outre dépourvus de lien avec le contexte de travail dégradé allégué par la requérante. Dans ces conditions, le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident déclaré par Mme C....


7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être également rejetées.
Sur les frais du litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Saint-Denis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande sur ce fondement. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le département de la Seine-Saint-Denis et non compris dans les dépens.



D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera une somme de 1 000 euros au département de la Seine-Saint-Denis en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au département de la Seine-Saint-Denis.



Délibéré après l'audience du 17 mars 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Briançon, présidente,
Mme d'Argenlieu, première conseillère,
Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2023.




La rapporteure,




M. B...

La présidente,




C. BRIANÇON
La greffière,




O. BADOUX-GRARE


La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2
N° 22PA02712