CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 13/06/2023, 22MA00430, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision13 juin 2023
Num22MA00430
JuridictionMarseille
Formation4ème chambre
PresidentM. MARCOVICI
RapporteurM. Stéphen MARTIN
CommissaireM. ANGENIOL
AvocatsPAOLANTONACCI;PAOLANTONACCI;PAOLANTONACCI

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 8 avril 2019 par laquelle la ministre des armées lui a attribué une pension militaire d'invalidité, en tant qu'elle fixe le taux d'invalidité à seulement 10 %, d'enjoindre à la ministre de fixer le taux de son invalidité à 20 % et d'ouvrir ses nouveaux droits à pension à compter du 15 mars 2017, et, d'autre part, d'annuler la décision du 31 août 2020 par laquelle la ministre des armées, dans le cadre de l'instruction de sa demande de renouvellement de cette pension, a fixé le taux d'invalidité à seulement 15 %, ainsi que la décision du 23 mars 2021 par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 31 août 2020, et d'enjoindre à la ministre des armées de fixer le taux de son invalidité à 30 % et d'ouvrir ses nouveaux droits à pension à compter du 15 mars 2020.

Par deux jugements distincts n° 1911511 et n° 2103075 du 21 décembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les demandes de M. B....

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 22MA00430 les 3 février 2022, 16 février 2023 et 23 mars 2023, M. B..., représenté par Me Paolantonacci, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1911511 du 21 décembre 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) à titre principal, de dire et juger qu'il a droit à une pension au taux de 20 % au titre des blessures reçues en service les 2 novembre 2012 et 21 août 2015 ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale avant dire-droit ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens, le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- le tribunal a violé les dispositions des articles L. 121-1, L. 125-1, L. 125-3 et L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et a insuffisamment motivé sa décision ;
- rien ne justifiait que soit écartée une partie du taux d'invalidité au titre d'une antériorité qui n'entraînait aucune invalidité et n'avait aucune incidence fonctionnelle ; en estimant que rien n'a été opposé à l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, le jugement est entaché d'une motivation erronée qui confine à la dénaturation des éléments du dossier ;
- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle est fondée sur l'avis émis par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, lequel n'est prévu que par une circulaire du 12 février 2010 mais pas par une disposition du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; l'avis du médecin en charge des pensions militaires d'invalidité, non contradictoire, a eu une influence sur le sens de la décision dès lors qu'il a conduit le ministre à saisir la commission consultative médicale ;
- postérieurement à l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité du 8 janvier 2019, l'administration ne lui a pas communiqué de constat provisoire, et ce, en méconnaissance de l'article R. 151-12 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; il a de ce fait été privé d'une voie de recours devant la commission de réforme prévue par l'article R. 151-12-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; si le ministre produit un projet de constat provisoire, établi le 24 janvier 2019, l'instruction du dossier n'était pas encore terminée à cette date et il n'y a pas eu de constat provisoire rectificatif ;
- toute évaluation d'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et faire ressortir la gêne fonctionnelle le justifiant en application de l'article L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la prise en compte par l'administration d'une invalidité antérieure aux accidents de service pour limiter à 10 % le taux d'invalidité imputable repose sur des avis du médecin en charge des pensions militaires d'invalidité et de la commission consultative médicale qui ne contiennent aucune démonstration médicale ; la simple mention d'une lombalgie antérieure aux accidents ne saurait justifier cette décision ;
- s'il a existé une erreur du service de santé des armées sur son aptitude postérieurement à l'accident du 2 novembre 2012, cette erreur constitue en elle-même un fait de service au sens de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- compte tenu de la contradiction évidente entre les avis médicaux, le tribunal ne pouvait se prononcer sans l'instauration d'une mesure d'expertise.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 février, 21 mars et 30 mars 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.



Un courrier du 6 mars 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de
l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 7 avril 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Par lettre du 24 mai 2023, les parties ont été informées de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité, dans ses différentes branches, du moyen relatif au vice de procédure entachant la décision du 8 avril 2019, ainsi que du moyen tiré du défaut de motivation de cette même décision.

Par un mémoire enregistré le 26 mai 2023, le ministre des armées a fait connaître ses observations en réponse au moyen d'ordre public.

Par un mémoire enregistré le 27 mai 2023, M. B... a fait connaître ses observations en réponse au moyen d'ordre public.


II - Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 22MA00431 les 3 février 2022 et 16 février 2023, M. B..., représenté par Me Paolantonacci, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2103075 du 21 décembre 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) à titre principal, de dire et juger qu'il a droit à une pension au taux de 30 % au titre des blessures reçues en service les 2 novembre 2012 et 21 août 2015 à compter du 15 mars 2020 ;

3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale avant dire-droit ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, outre les dépens, le versement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- cette procédure présente à juger les mêmes questions que celles posées par l'instance n° 22MA00430 ;
- ainsi, le tribunal a violé les dispositions des articles L. 121-1, L. 125-1, L. 125-3, L. 151-6, et R. 151-1 à R. 151-18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- rien ne justifiait que soit écartée une partie du taux d'invalidité au titre d'une antériorité qui n'entraînait aucune invalidité et n'avait aucune incidence fonctionnelle ; en estimant que rien n'a été opposé à l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, le jugement est entaché d'une motivation erronée qui confine à la dénaturation des éléments du dossier ;


- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle est fondée sur l'avis émis par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité, lequel n'est prévu que par une circulaire du 12 février 2010 mais pas par une disposition du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; l'avis du médecin en charge des pensions militaires d'invalidité, non contradictoire, a eu une influence sur le sens de la décision dès lors qu'il a conduit le ministre à saisir la commission consultative médicale ; l'autorité décisionnelle, qui n'a pourtant pas compétence liée, suit systématiquement cet avis ;
- quant à l'avis de la commission consultative médicale, il ne fait que reprendre la position antérieure du 8 février 2019, oubliant au passage que le taux n'est plus de 20 % mais de 30 % ;
- la prise en compte par l'administration d'une invalidité antérieure aux accidents de service repose sur des avis du médecin en charge des pensions militaires d'invalidité et la commission consultative médicale qui ne contiennent aucune démonstration médicale ; la simple mention d'une lombalgie antérieure aux accidents ne saurait justifier cette décision ;
- s'il a existé une erreur du service de santé des armées sur son aptitude postérieurement à l'accident du 2 novembre 2012, cette erreur constitue en elle-même un fait de service au sens de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- compte tenu de la contradiction évidente entre les avis médicaux, le tribunal ne pouvait se prononcer sans l'instauration d'une mesure d'expertise.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 février et 21 mars 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :
- M. B... n'est pas recevable à solliciter l'annulation de l'arrêté de concession du
31 août 2020 ;
- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Un courrier du 6 mars 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 7 avril 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la circulaire n° 230125/DEF/DGA/DRH-MD/SPGRH/FM4 du 12 février 2010 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Une note en délibéré présentée par le ministre des armées, a été enregistrée dans l'instance n° 20MA00430 le 2 juin 2023.


Considérant ce qui suit :

1. M. B..., engagé dans la Légion Etrangère le 16 décembre 2011 et radié des contrôles le 10 février 2020, s'est vu concéder, par décision du 8 avril 2019, une pension militaire d'invalidité au taux de 10 % pour une durée de trois années à compter du 15 mars 2017, au titre de l'infirmité " Séquelles de traumatisme lombaire avec lombalgies L5-S1 chroniques invalidantes ". Dans l'instance enregistrée sous le n° 22MA00430, M. B... relève appel du jugement n° 1911511 du 21 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cette décision en tant que la ministre a fixé son taux d'invalidité à seulement 10 %.

2. Le 3 octobre 2019, M. B... a sollicité le renouvellement de cette pension. Par une décision du 8 septembre 2020, la ministre des armées a octroyé à l'intéressé une pension militaire d'invalidité à titre définitif, et a fixé le taux global d'invalidité à 15 %. M. B... a exercé un recours administratif préalable obligatoire contre cette décision, en tant qu'elle lui refuse un taux d'invalidité à 30 %, devant la commission de recours de l'invalidité, laquelle a rejeté son recours par une décision du 23 mars 2021. Dans l'instance enregistrée sous le n° 22MA00431, M. B... relève appel du jugement n° 2103075 du 21 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 23 mars 2021 de la commission de recours de l'invalidité.

3. Les recours susvisés nos 22MA00430 et 22MA00431 concernent la situation d'un même militaire et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu par suite d'y statuer par un même arrêt.

Sur la régularité des jugements attaqués :

4. Si M. B... soutient que les jugements attaqués sont entachés d'une insuffisance de motivation en ce qui concerne la justification de la prise en compte d'un état antérieur pour limiter le taux d'invalidité de 10 % retenu par la décision du 8 avril 2019, puis de 15 % par la décision du 23 mars 2021, il doit toutefois être regardé, compte tenu de l'argumentation qu'il développe, comme ayant entendu contester l'appréciation qui a été faite par les premiers juges sur cette question et non la régularité du jugement.

5. Par ailleurs, si M. B... soutient que le tribunal administratif a commis des " dénaturations des pièces du dossier ", ce moyen, qui relève de la cassation, ne saurait être accueilli en appel.

Sur le bien-fondé des jugements attaqués :

En ce qui concerne la régularité des décisions attaquées :

6. Lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige. Toutefois, le requérant n'est pas recevable à invoquer pour la première fois en appel des moyens contestant la régularité de cette décision, sauf s'il s'agit de moyens d'ordre public.




7. En premier lieu, M. B..., qui n'a pas soulevé devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, puis devant le tribunal administratif de Marseille, des moyens contestant la régularité de la décision du 8 avril 2019, n'est pas recevable à soutenir, pour la première fois en appel, que cette décision serait entachée de vices de procédure et d'un défaut de motivation. Par suite, de tels moyens, irrecevables, ne peuvent qu'être écartés.


8. En second lieu, aux termes de l'article R. 153-3 du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de guerre : " Le service désigné par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre instruit la demande. Il recueille l'avis de la commission consultative médicale dans les cas prévus par arrêté des ministres chargé des anciens combattants et victimes de guerre et du budget et lorsque l'un ou l'autre des services mentionnés au présent article l'estime utile. / Le dossier est ensuite transmis au service désigné par le ministre chargé du budget pour liquider et concéder les pensions du présent code, qui procède à l'attribution de la pension et à l'envoi du titre de pension, ou indique au service instructeur, s'il y a lieu, les raisons pour lesquelles il rejette, en tout ou partie, l'attribution de la pension. ". La circulaire n° 230125/DEF/DGA/DRH-MD/SPGRH/FM4 relative à la constitution, à l'instruction et à la liquidation des dossiers de pension d'invalidité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre du 12 février 2010, publiée au Bulletin Officiel des Armées (BOC N° 14 du 9 avril 2010, texte 2) dispose que : " 1.2.2.1 Après achèvement de l'instruction médicale du dossier dans les conditions du point 1.2.1. de la présente circulaire, le médecin chargé des PMI du CEM/CR procède à l'examen des droits à pension de l'intéressé et consigne son avis au moyen de l'imprimé figurant en annexe VI. Le médecin chargé des PMI du CEM/CR peut formuler un avis sur l'imputabilité au service de l'infirmité qui ne préjuge pas du résultat de l'étude juridique à effectuer par les services administratifs de la SDP et fait connaître s'il estime opportun que la commission consultative médicale soit saisie, dans les cas où cette saisine ne revêt pas un caractère obligatoire. (...) 1.2.3 Sur le fondement de l'avis du médecin chargé des PMI du CEM/CR sur les aspects médico-légaux du dossier, notamment sur l'imputabilité au service de l'infirmité, et des éléments recueillis au cours de l'instruction administrative, la SDP établit un projet de constat provisoire des droits à pension comportant le cas échéant mention du droit ou de l'absence de droit aux allocations aux grands mutilés, à l'hospitalisation ou à la majoration pour tierce personne. Ce projet devra être conforme, quant au diagnostic et au taux d'invalidité, à l'avis du médecin précité. Si la SDP souhaite une expertise complémentaire, elle transmet le projet de constat provisoire pour recueillir l'avis de la commission consultative médicale (CCM) et l'indiquera sur le constat provisoire des droits à pension ".


9. D'une part, si M. B... persiste à soutenir, dans les mêmes termes qu'en première instance, que la décision du 23 mars 2021, par laquelle la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire dirigé contre la décision du 31 août 2020 en tant que la ministre des armées a fixé à 15 % le taux global d'invalidité pour lui octroyer une pension militaire d'invalidité à titre définitif, est entachée d'un vice de procédure résultant de ce que l'intervention du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité n'est pas prévue par les dispositions réglementaires, que ce médecin ne l'a pas examiné avant de rendre son avis, non soumis au contradictoire ni communiqué, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 4 et 5 de leur jugement.




10. D'autre part, il ne résulte nullement de l'instruction que tant la ministre que la commission de recours de l'invalidité se seraient estimées en situation de compétence liée, de sorte que le moyen tiré de ce que l'administration suit systématiquement l'avis du médecin en charge des pensions militaires d'invalidité doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des décisions en litige s'agissant du taux d'invalidité retenu par l'administration :

11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". L'article L. 121-2-3 dudit code précise que : " La recherche d'imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d'incorporation. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. ". L'article L. 125-3 de ce même code renvoie à un décret le soin de fixer " les règles et barèmes pour la classification des infirmités d'après leur gravité ". L'article L. 125-5 de ce code dispose que : " Lorsqu'il s'agit d'amputations ou d'exérèses d'organe, les pourcentages d'invalidité figurant aux barèmes mentionnés à l'article L. 125-3 sont impératifs. Dans les autres cas, ils ne sont qu'indicatifs. ". Enfin, selon l'article L. 151-6 dudit code : " La décision comportant attribution de pension est motivée. Elle fait ressortir les faits et documents ou les raisons d'ordre médical établissant que l'infirmité provient de l'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 (...). / Elle est accompagnée en outre, d'une évaluation de l'invalidité qui doit être motivée par des raisons médicales et comporter le diagnostic de l'infirmité et sa description complète, faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte à l'état général qui justifie le pourcentage attribué. ".

12. Il résulte de l'instruction que M. B... a été victime de deux accidents de service, le 2 novembre 2012 et le 21 août 2015, à l'occasion desquels il a été blessé au dos. Si les suites du premier accident ont été favorables, la radiographie du rachis lombaire réalisée le
6 novembre 2012 a toutefois objectivé l'existence d'une anomalie transitionnelle de la jonction lombo-sacrée avec apophysomégalie gauche de L5 ainsi qu'une néo-articulation transverso-sacrée gauche avec pincement discal au niveau L5-S1 sans lésion osseuse d'origine traumatique. L'existence de cette pathologie antérieure au premier accident est confirmée par l'imagerie médicale du rachis lombaire réalisée le 15 septembre 2015, à la suite du second accident de service, qui a révélé plusieurs anomalies au niveau du disque L5-S1. Si M. B..., qui ne conteste pas l'existence de cet état antérieur, soutient néanmoins qu'il ne pouvait être pris en compte pour fixer le taux d'invalidité appliqué au titre de la pension temporaire qui lui a été octroyée par décision du 8 avril 2019, il résulte toutefois de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise médicale du 14 novembre 2018, que les gênes fonctionnelles dont souffre l'intéressé résultent notamment de lombalgies chroniques et que celui-ci avait déjà été victime de tels symptômes avant l'accident initial du 2 novembre 2012, ainsi que cela ressort de l'extrait du livret médical produit dans l'instance. S'il est certes exact que l'expert n'a pas pris en compte l'antériorité de ces anomalies pour fixer à 20 % le taux d'invalidité, motif pris de ce qu'elles n'auraient pas un caractère péjoratif suffisant, il résulte néanmoins de son rapport que c'est précisément au niveau du disque L5-S1 que M. B... a dû subir une cure chirurgicale de hernie discale le 16 décembre 2016 ainsi qu'une arthrodèse le 24 novembre 2017. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient l'appelant, compte tenu de l'ensemble des éléments médicaux relatifs à cette infirmité et à la gêne fonctionnelle en résultant, l'administration était fondée, s'appuyant en cela tant sur l'avis du médecin chargé des pensions du 8 janvier 2019 que sur celui de la commission consultative médicale du 8 février 2019, à prendre en compte cet état antérieur pour déterminer le taux d'invalidité à appliquer, la circonstance que l'intéressé avait été déclaré apte à la suite des tests dits " C... " (A...) le 4 avril 2014 n'étant pas de nature, à cet égard, à établir que les gênes fonctionnelles dont il demeure atteint seraient entièrement imputables aux accidents de services subis en 2012 et 2015. Enfin, alors que, par la décision en litige, la ministre a décidé de suivre l'avis de la commission consultative médicale, selon lequel la part imputable au service de l'invalidité est de 10 %, M. B... ne produit aucune pièce médicale de nature à remettre en cause l'avis de la commission sur ce point. Par suite, c'est à bon droit que, par sa décision du 8 avril 2019, la ministre des armées lui a accordé une pension d'invalidité au taux de 10 % pour la période du 15 mars 2017 au 14 mars 2020.

13. En second lieu, aux termes de l'article R. 121-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " A l'issue du délai de trois ans, pour la ou les infirmités résultant uniquement de blessures, la situation du pensionné doit être définitivement fixée : / 1° Soit par la conversion de la pension temporaire en pension définitive à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif (...) ".

14. Pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 12, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la pathologie révélée par les examens d'imagerie médicale réalisés après les accidents de service subis en 2012 et 2015 ne pouvait être prise en compte par la commission de recours de l'invalidité lorsqu'elle a rejeté son recours administratif préalable obligatoire par décision du 23 mars 2021, et ainsi confirmé la décision par laquelle la ministre des armées a fixé le taux d'invalidité pris en compte au titre de la pension définitive qui lui a été octroyée pour l'infirmité " Séquelles de traumatisme lombaire avec lombalgies L5-S1 chroniques invalidantes ". L'appelant ne produit par ailleurs pas davantage d'éléments médicaux de nature à remettre en cause ce taux, fixé à 15 % sur une invalidité totale de 30 %, compte tenu de cet état antérieur, sur le fondement tant de l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité émis le 9 juillet 2020 que de celui rendu le 17 décembre 2020 par la commission consultative médicale. Par suite, c'est à bon droit que, par sa décision du 23 mars 2021, la commission de recours de l'invalidité a rejeté son recours administratif préalable obligatoire et confirmé la décision de la ministre des armées lui octroyant une pension définitive au taux de 15 %.

15. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale ni de se prononcer sur la fin de non-recevoir, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses demandes d'annulation de la décision du 8 avril 2019 de la ministre des armées et de la décision du 23 mars 2021 de la commission de recours de l'invalidité. Ses requêtes d'appel doivent donc être rejetées, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.





D É C I D E :




Article 1er : Les requêtes de M. B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 30 mai 2023, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juin 2023.
N° 22MA00430, 22MA00431 2