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Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 10/06/2011, 312571, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 28 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 0202908/5-2 du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris ayant, d'une part, annulé la décision implicite de refus du Premier ministre opposée à la demande de M. Bilal A tendant à ce que le montant de sa retraite de combattant soit fixé à un taux identique à celui des ressortissants français et à la revalorisation de sa pension militaire de retraite, d'autre part, enjoint au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de procéder à la revalorisation de la pension de M. A à compter du 2 janvier 1975 et au versement des arrérages de cette pension pour cette période ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de première instance de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Frédéric Aladjidi, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A ;Considérant que M. A, de nationalité sénégalaise, a été rayé des contrôles et admis au bénéfice d'une pension militaire de retraite au taux proportionnel en vigueur pour tous les agents, en application du code des pensions civiles et militaires de retraite issu de la loi du 20 septembre 1948 ; que cette pension a été cristallisée le 2 janvier 1975 ; que, par un courrier reçu le 18 juillet 2000 par le Premier ministre, le requérant a sollicité la révision du calcul de sa pension militaire de retraite à compter du 2 janvier 1975, sur la base du taux de droit commun ; qu'une décision implicite de refus est née du silence gardé par l'administration sur cette demande ; que M. A a alors saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de refus et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de revaloriser sa pension à compter du 2 janvier 1975 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation contre le jugement du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris qui a fait droit aux conclusions de M. A ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite que Le ministre des finances et, s'il s'agit d'un litige relatif à l'existence ou à l'étendue d'un droit à pension ou à rente viagère d'invalidité, le ministre dont relevait le fonctionnaire ou le militaire doivent être appelés à produire à la juridiction administrative leurs observations sur les pourvois formés contre les décisions prises en application du présent code. ; que le tribunal administratif de Paris, en n'appelant pas à l'instance le ministre du budget, en charge du paiement des pensions militaires, a ainsi méconnu les dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que le ministre est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ; Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement n° 0202908/5-2 du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à M. Bilal A. Copie en sera adressée pour information au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 10/06/2011, 312650, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 29 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 0201424/5-2 du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris ayant, d'une part, annulé la décision implicite de refus du Premier ministre opposée à la demande de M. Mady A tendant à la révision de sa pension militaire de retraite, d'autre part, enjoint au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de procéder à la revalorisation de la pension de M. A à compter du 2 janvier 1975 et au versement des arrérages de cette pension pour cette période ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de première instance de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Frédéric Aladjidi, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. Mady ;Considérant que M. A, de nationalité malienne, a été rayé des contrôles et admis au bénéfice d'une pension militaire de retraite au taux proportionnel en vigueur pour tous les agents, en application du code des pensions civiles et militaires de retraite issu de la loi du 20 septembre 1948 ; que cette pension a été cristallisée le 2 janvier 1975 ; que, par un courrier reçu le 20 décembre 2000 par le Premier ministre, le requérant a sollicité la révision du calcul de sa pension militaire de retraite à compter du 2 janvier 1975, sur la base du taux de droit commun ; qu'une décision implicite de refus est née du silence gardé par l'administration sur cette demande ; que M. A a alors saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de refus et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de revaloriser sa pension à compter du 2 janvier 1975 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation contre le jugement du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris qui a fait droit aux conclusions de M. A ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite que Le ministre des finances et, s'il s'agit d'un litige relatif à l'existence ou à l'étendue d'un droit à pension ou à rente viagère d'invalidité, le ministre dont relevait le fonctionnaire ou le militaire doivent être appelés à produire à la juridiction administrative leurs observations sur les pourvois formés contre les décisions prises en application du présent code. ; que le tribunal administratif de Paris, en n'appelant pas à l'instance le ministre du budget, en charge du paiement des pensions militaires, a ainsi méconnu les dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que le ministre est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ; Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement n° 0201424/5-2 du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à M. Mady A. Copie en sera adressée pour information au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 10/06/2011, 312567, Inédit au recueil Lebon
Vu le pourvoi, enregistré le 29 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement n° 0201279/5-2 du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris ayant, d'une part, annulé la décision implicite de refus du Premier ministre opposée à la demande de M. Mallé A tendant à la revalorisation de sa pension de retraite, d'autre part, enjoint au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique de procéder à la revalorisation de la pension de M. A à compter du 2 janvier 1975 et au versement des arrérages de cette pension pour cette période ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de première instance de M. A ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Frédéric Aladjidi, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A, - les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ; La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A ;Considérant que M. A, de nationalité malienne, a été rayé des cadres et admis au bénéfice d'une pension militaire de retraite au taux proportionnel en vigueur pour tous les agents, en application du code des pensions civiles et militaires de retraite issu de la loi du 20 septembre 1948 ; que cette pension a été cristallisée le 2 janvier 1975 ; que par un courrier reçu le 10 juillet 2000 par le Premier ministre, M. A a sollicité la révision du calcul de sa pension militaire de retraite à compter du 2 janvier 1975, sur la base du taux de droit commun ; qu'une décision implicite de refus est née du silence gardé par l'administration sur cette demande ; que M. A a alors saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de refus et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de revaloriser sa pension à compter du 2 janvier 1975 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation contre le jugement du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris qui a fait droit aux conclusions de M. A ; Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite que Le ministre des finances et, s'il s'agit d'un litige relatif à l'existence ou à l'étendue d'un droit à pension ou à rente viagère d'invalidité, le ministre dont relevait le fonctionnaire ou le militaire doivent être appelés à produire à la juridiction administrative leurs observations sur les pourvois formés contre les décisions prises en application du présent code. ; que le tribunal administratif de Paris, en n'appelant pas à l'instance le ministre du budget, en charge du paiement des pensions militaires, a ainsi méconnu les dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que le ministre est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ; Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. A ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement n° 0201279/5-2 du 6 décembre 2007 du tribunal administratif de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris. Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à M. Mallé A. Copie en sera adressée pour information au ministre de la défense et des anciens combattants.
Conseil d'Etat
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA01795, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2010, présentée pour Mme Angèle Micheline épouse , demeurant ..., Mme Hélène épouse , demeurant ..., M. Julien Ouriel David C, en sa qualité d'ayant droit de sa grand-mère Mme Annette E épouse F, demeurant ... et représenté par sa mère Mme Nadine G épouse F et Mlle Natacha Anaëlle C, en sa qualité d'ayant droit de sa grand-mère Mme Annette E épouse F, demeurant ..., par Me Archambault ; Mme épouse et autres demandent à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0704615/7-2 en date du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à leur verser la somme de 200 000 euros (à répartir selon les règles de dévolution successorale) en réparation du préjudice subi par leur père et arrière-grand-père, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à verser les sommes de 50 000 euros à Mme épouse et à Mme épouse ainsi que les sommes de 25 000 euros à M. C et à Mlle C au titre du préjudice qu'ils ont subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser la somme de 200 000 euros (à répartir selon les règles de dévolution successorale, soit des sommes de 66 666 euros pour Mme épouse et pour Mme épouse et des sommes de 33 333 euros pour M. C et pour Mlle C) en réparation du préjudice subi par leur père et arrière-grand-père, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation ; 4°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à verser les sommes de 50 000 euros à Mme épouse et à Mme épouse et les sommes de 25 000 euros à M. C et à Mlle C au titre du préjudice qu'ils ont subi ; 5°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser les requérants de la violation des engagements ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat et la SNCF, solidairement, la somme totale de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre ; Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que, par courriers recommandés en date du 31 août 2006 renouvelés le 29 novembre 2006, Mme épouse et autres ont saisi la SNCF et le préfet de Paris d'une demande préalable d'indemnisation, d'une part, des préjudices subis du fait des conditions inhumaines dans lesquelles M. Chil E, leur père et arrière-grand-père, a été transporté vers un camp d'internement puis déporté à Auschwitz, d'autre part, en leur nom propre ou en leur qualité d'ayants-droit de leur grand-mère, des préjudices dont ils ont eux-mêmes été directement victimes à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation de M. Chil E ; que ces courriers sont restés sans réponse de la part de la SNCF et des services de l'Etat ; que Mme épouse et autres relèvent appel de l'ordonnance du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme globale de 200 000 euros en réparation du préjudice subi par leur père et arrière-grand-père, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à verser les sommes de 50 000 euros chacune à Mme épouse et à Mme épouse et les sommes de 25 000 euros chacun à M. C et à Mlle C au titre du préjudice qu'ils ont subi ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, Mme épouse et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que leurs conclusions à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que les requérants ont estimé à 200 000 euros le préjudice subi par leur père et arrière-grand-père du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, et à 50 000 euros le préjudice individuel que chacune des filles de la victime a subi ; que Mme épouse et autres font valoir que si les filles de la victime ont bénéficié, à l'exception de tout autre dispositif d'indemnisation, des dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites pour un montant de 27 440, 82 euros, cette mesure n'a pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par leur père et arrière-grand-père et par les requérants ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont Mme épouse et autres demandent réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par les requérants et leur père et arrière-grand-père ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants-droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du Tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés à Mme épouse et autres et à leur père et arrière-grand-père par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que Mme épouse et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme épouse et autres est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA01795
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA01800, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2010, présentée pour Mme Evelyne A, demeurant ... et M. Alain A, demeurant ... en leur qualité d'ayants droit de Mme Héné C, par Me Archambault ; les consorts A demandent à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0707532/7-2 en date du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme Héné C née D tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui verser la somme de 800 000 euros en réparation du préjudice subi par sa grand-mère, ses parents et son frère, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à lui verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice qu'elle a subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser, en leur qualité d'ayants droit, la somme globale de 800 000 euros au titre de préjudice subi par la grand-mère, les parents et le frère de leur mère, Mme Héné C, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation ; 4°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser une somme globale de 50 000 euros au titre du préjudice subi par Mme Héné C ; 5°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser les requérants de la violation des engagements ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat et la SNCF, solidairement, la somme totale de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; .................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre ; Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7 juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que, par courriers recommandés en date du 28 août 2006 et 6 février 2007, Mme Héné C a saisi la présidente de la SNCF et le préfet de Paris d'une demande préalable d'indemnisation, d'une part, des préjudices subis du fait des conditions inhumaines dans lesquelles sa grand-mère, ses parents et son frère ont été transportés vers un camp d'internement puis déportés à Auschwitz, d'autre part, des préjudices dont elle a elle-même été directement victime à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation de sa famille ; que ces courriers sont restés sans réponse de la part de la SNCF et des services de l'Etat ; que les consorts A, en leur qualité d'ayants droit de Mme Héné C leur mère, décédée le 27 août 2009, relèvent appel de l'ordonnance du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande Mme Héné C tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à lui verser la somme de 800 000 euros en réparation du préjudice subi par sa grand-mère, ses parents et son frère, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à lui verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice qu'elle a personnellement subi ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, les consorts A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que les conclusions de Mme Héné C à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que Mme Héné C a estimé à 800 000 euros le préjudice subi par sa grand-mère, ses parents et son frère, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation, et à 50 000 euros le préjudice individuel qu'elle a elle-même subi ; que les consorts A font valoir que si Mme Héné C a bénéficié, à l'exception de tout autre dispositif d'indemnisation, des dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites pour un montant de 27 440, 82 euros, cette mesure n'a pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par sa famille et par elle-même ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont les consorts A demandent réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par Mme Héné C et par sa famille ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du Tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés à Mme Héné C et à sa famille par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que les consorts A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme Héné C ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête des consorts A est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA01800
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA01797, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2010, présentée pour Mme Elka divorcée , demeurant ... et Mme Rose Liliane épouse , demeurant ..., par Me Archambault ; Mme divorcée et Mme épouse demandent à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0707487/7-2 en date du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à verser à Mme divorcée la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice subi par sa mère, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à verser la somme de 100 000 euros à Mme divorcée et la somme de 30 000 euros à Mme épouse au titre du préjudice qu'elles ont subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à verser à Mme divorcée la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice subi par sa mère, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation ; 4°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à verser la somme de 100 000 euros à Mme divorcée et la somme de 30 000 euros à Mme épouse au titre du préjudice qu'elles ont subi ; 5°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser les requérants de la violation des engagements ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat et la SNCF, solidairement, la somme totale de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre ; Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7 juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que, par courriers recommandés en date du 30 août 2006 renouvelés le 14 décembre 2006, Mme divorcée et Mme épouse ont saisi la SNCF et le préfet de Paris d'une demande préalable d'indemnisation, d'une part, des préjudices subis du fait des conditions inhumaines dans lesquelles plusieurs membres de leur famille ont été transportés vers un camp d'internement puis déportés à Auschwitz, d'autre part, des préjudices dont elles ont elles-mêmes été directement victimes à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation de leurs parents ; que ces courriers sont restés sans réponse de la part de la SNCF et des services de l'Etat ; que les requérantes relèvent appel de l'ordonnance du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à verser à Mme divorcée la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice subi par sa mère, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à verser la somme de 100 000 euros à Mme divorcée et la somme de 30 000 euros à Mme épouse au titre du préjudice qu'elles ont subi ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que leurs conclusions à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que les requérantes ont estimé à 100 000 euros le préjudice subi par leur mère et grand-mère du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, et fixé à 100 000 euros pour Mme divorcée et à 30 000 euros pour Mme épouse le préjudice individuel qu'elles ont elles-mêmes subi ; qu'elles font valoir qu'elles n'ont pas bénéficié du dispositif d'indemnisation prévu par les dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et que les indemnisations forfaitaires évoquées par le Tribunal administratif de Paris n'ont pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par leur mère et grand-mère et par elles-mêmes ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont les requérantes demandent réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par les requérantes et leur parente ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants-droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du Tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés à Mme divorcée et Mme épouse et à leur parente par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme divorcée et Mme épouse est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA01797
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA01794, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2010, présentée pour Mme Sura C épouse , demeurant ..., Mme Chana C épouse SCHWARTZ, demeurant ... et M. Jacques C, demeurant ..., par Me Archambault ; les consorts C demandent à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0700290/7-2 en date du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à leur verser la somme de 90 000 euros (soit 30 000 euros chacun) en réparation du préjudice subi par leur père, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme de 15 000 euros chacun au titre du préjudice qu'ils ont subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser la somme de 90 000 euros (soit 30 000 euros chacun) en réparation du préjudice subi par leur père, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation ; 4°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser la somme de 15 000 euros chacun au titre du préjudice qu'ils ont subi ; 5°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser les requérants de la violation des engagements ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat et la SNCF, solidairement, la somme totale de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour Européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre ; Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7 juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que, par courriers recommandés en date du 7 novembre 2006, les consorts C ont saisi la SNCF et le préfet de Paris d'une demande préalable d'indemnisation, d'une part, des préjudices subis du fait des conditions inhumaines dans lesquelles leur père a été transporté vers un camp d'internement puis déporté à Auschwitz, d'autre part, des préjudices dont ils ont eux-mêmes été directement victimes à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation de leur père ; que ces demandes ont été rejetées expressément par la SNCF et implicitement par les services de l'Etat ; que Mme C épouse et autres relèvent appel de l'ordonnance du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme globale de 90 000 euros en réparation du préjudice subi par leur père, du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme de 15 000 euros chacun au titre du préjudice qu'ils ont subi ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, les consorts C ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que leurs conclusions à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que les requérants ont estimé à 90 000 euros le préjudice subi par leur père du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation, et à 15 000 euros le préjudice individuel que chacun d'eux a subi ; que les consorts C font valoir que s'ils ont bénéficié, à l'exception de tout autre dispositif d'indemnisation, des dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites pour un montant de 27 440, 82 euros, cette mesure n'a pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par leur père et par eux-mêmes ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont les consorts C demandent réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par les requérants et par leur père ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants-droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du Tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la Cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés aux consorts C et à leur père par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que les consorts C ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête des consorts C est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA01794
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA01796, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2010, présentée pour Mme Anna épouse , demeurant ... et Mme Denise épouse , demeurant ..., par Me Archambault ; Mme épouse et Mme épouse demandent à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0701866/7-2 en date du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à leur verser la somme de 400 000 euros (soit 200 000 euros chacune) en réparation du préjudice subi par leurs père et mère, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme de 50 000 euros chacune au titre du préjudice qu'elles ont subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser la somme de 400 000 euros (soit 200 000 euros chacune) en réparation du préjudice subi par leurs père et mère, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation ; 4°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à leur verser une somme globale de 50 000 euros chacune au titre du préjudice qu'elles ont subi ; 5°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser les requérants de la violation des engagements ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat et la SNCF, solidairement, la somme totale de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre ; Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7 juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que, par courriers recommandés en date du 6 novembre 2006, Mme épouse et Mme épouse ont saisi la SNCF et le préfet de Paris d'une demande préalable d'indemnisation, d'une part, des préjudices subis du fait des conditions inhumaines dans lesquelles leurs père et mère ont été transportés vers un camp d'internement puis déportés à Auschwitz, d'autre part, des préjudices dont elles ont elles-mêmes été directement victimes à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation de leurs parents ; que ces courriers sont restés sans réponse de la part de la SNCF et des services de l'Etat ; que les consorts relèvent appel de l'ordonnance du 12 février 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme globale de 400 000 euros (soit 200 000 euros chacune) en réparation du préjudice subi par leurs parents, du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation, d'autre part, à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à leur verser la somme de 50 000 euros chacune au titre du préjudice qu'elles ont personnellement subi ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, les consorts ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que leurs conclusions à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que les consorts ont estimé à 400 000 euros le préjudice subi par leurs père et mère du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation, et à 50 000 euros chacune le préjudice individuel qu'elles ont elles-mêmes subi ; que les consorts font valoir que si elles ont bénéficié, à l'exception de tout autre dispositif d'indemnisation, des dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites pour un montant de 27 440, 82 euros, cette mesure n'a pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par leur famille et par elles-mêmes ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont les consorts demandent réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par les requérantes et leurs parents ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants-droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du Tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés à Mme épouse et Mme épouse et à leurs parents par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que les consorts ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête des consorts est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA01796
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA02665, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2010, présentée pour M. Victor A, demeurant ..., par Me Amalric-Zermati ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0702637/7-2 en date du 29 mars 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation du préjudice subi par ses mère, grand-mère, soeurs et cousines du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation ainsi que du préjudice qu'il a lui-même subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à lui verser la somme de 200 000 euros au titre du préjudice qu'il a subi ; 4°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser le requérant de la violation des engagements ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SNCF, solidairement, la somme de 15 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; .................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre : Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24 juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7 juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que, par courriers recommandés en date du 9 février 2007, M. A a saisi la SNCF et le préfet de Paris d'une demande préalable d'indemnisation du préjudice subi par sa mère, sa grand-mère, ses deux soeurs et ses deux cousines du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation ainsi que du préjudice dont il a lui-même été directement victime à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation des membres de sa famille ; que ces courriers sont restés sans réponse de la part de la SNCF et des services de l'Etat ; que M. A relève appel de l'ordonnance du 29 mars 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation du préjudice subi par les membres de sa famille et par lui-même ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que leurs conclusions à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que M. A a estimé à 200 000 euros les préjudices subis tant par les membres de sa famille du fait de leur arrestation, de leur internement et de leur déportation que par lui-même ; qu'il fait valoir qu'il n'a pas bénéficié du dispositif d'indemnisation prévu par les dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et que les indemnisations forfaitaires évoquées par le tribunal administratif de Paris n'ont pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par sa famille et par lui-même ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont M. A demande réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par les requérants et par leurs parents ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du Tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés à M. A et à sa famille par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA02665
Cours administrative d'appel
Paris
Cour administrative d'appel de Paris, 3 ème chambre , 26/05/2011, 10PA02664, Inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2010, présentée pour M. Georges A, demeurant ..., par Me Amalric-Zermati ; M. A demande à la Cour : 1°) d'annuler l'ordonnance n° 0705379/7-2 en date du 29 mars 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de l'Etat et de la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi par son père du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation ainsi que du préjudice qu'il a lui-même subi ; 2°) de se déclarer compétente à l'égard de la SNCF ; 3°) de condamner solidairement l'Etat et la SNCF à lui verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice qu'il a subi ; 4°) à titre subsidiaire, de constater la violation par l'Etat des engagements pris au nom de l'Etat par le Président de la République le 16 juillet 1995, de constater le caractère fautif de cette violation, de constater la responsabilité de l'Etat et l'obliger à indemniser le requérant de la violation des engagements ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat et la SNCF, solidairement, la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; .................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu l'avis rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Vu la décision de la cour européenne des droits de l'homme (cinquième section) du 24 novembre 2009, n° 49637 et suivants, rendue dans les affaires J.H. et autres contre la France ; Vu la Constitution, notamment son Préambule ; Vu le statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et le protocole signé à Berlin le 6 octobre 1945 ; Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble son premier protocole additionnel ; Vu l'accord du 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne au sujet de l'indemnisation des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécution national-socialistes ; Vu l'accord du 18 janvier 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique relatif à l'indemnisation de certaines spoliations intervenues pendant la seconde guerre mondiale (ensemble trois annexes et un échange de notes), ainsi que les accords sous forme d'échanges de lettres en date des 7 et 10 août 2001, 30 et 31 mai 2002, 2 février 2005 et 21 février 2006 qui l'ont interprété ou modifié ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi ou sous son contrôle, ensemble les ordonnances du 14 novembre 1944, 21 avril 1945 et 9 juin 1945 prises pour son application ; Vu l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental ; Vu l'ordonnance du 16 octobre 1944 relative à la restitution par l'administration des domaines de certains biens mis sous séquestre ; Vu l'ordonnance du 20 avril 1945 relative à la tutelle des enfants de déportés ; Vu l'ordonnance n° 45-948 du 11 mai 1945 modifiée par l'ordonnance n° 45-2413 du 18 octobre 1945, réglant la situation des prisonniers de guerre, déportés politiques et travailleurs non volontaires rapatriés, ensemble ses décrets d'application n° 45-1105 du 30 mai 1945, n° 45-1447 du 29 juin 1945 et n° 46-1242 du 27 mai 1946 ; Vu la loi n° 46-1117 du 20 mai 1946 portant remise en vigueur, modification et extension de la loi du 24juin 1919 sur les réparations à accorder aux victimes civiles de guerre, ensemble son décret d'application n° 47-1249 du 7 juillet 1947 ; Vu la loi n° 48-978 du 16 juin 1948 portant aménagements fiscaux, notamment son article 44 ; Vu la loi n° 48-1404 du 9 septembre 1948 définissant le statut et les droits des déportés et internés politiques, ensemble son décret d'application n° 50-325 du 1er mars 1950 ; Vu la loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; Vu la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, notamment son article 106 ; Vu la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 portant loi de finances pour 2000, notamment son article 112 ; Vu le décret n° 61-971 du 29 août 1961 portant répartition de l'indemnité prévue en application de l'accord conclu le 15 juillet 1960 entre la République française et la République fédérale d'Allemagne, en faveur des ressortissants français ayant été l'objet de mesures de persécutions national-socialistes ; Vu le décret n° 99-778 du 10 septembre 1999 instituant une Commission pour l'indemnisation des victimes des spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation ; Vu le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites ; Vu le décret du 26 décembre 2000 portant reconnaissance d'une fondation comme établissement d'utilité publique ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 : - le rapport de Mme Folscheid, rapporteur, - les conclusions de M. Jarrige, rapporteur public, - et les observations de Me Poitvin, pour la SNCF ; Considérant que M. A relève appel de l'ordonnance du 29 mars 2010 par laquelle le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté par demande tendant à la condamnation solidaire de l'Etat et de la SNCF à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice subi par son père du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation ainsi que du préjudice qu'il a lui-même subi à raison des séquelles psychologiques provoquées par l'arrestation puis la déportation de son père ; Sur les conclusions dirigées contre la SNCF : Considérant que le juge administratif n'est compétent pour connaître de conclusions tendant à mettre en jeu la responsabilité quasi-délictuelle d'une personne morale de droit privé que si le dommage se rattache à l'exercice par cette dernière de prérogatives qui lui ont été conférées pour l'exécution de la mission de service public dont elle a été investie ou dans les cas où cette personne a agi à la place de l'Etat ; Considérant que, eu égard aux conditions dans lesquelles ont été effectués entre 1940 et 1944 les transports des personnes victimes de persécutions antisémites depuis les gares proches des centres de détention administrative jusqu'aux gares desservant les camps de transit puis, à partir de ceux-ci et jusqu'aux frontières françaises, vers les camps de concentration, la SNCF ne peut être regardée comme ayant disposé d'autonomie dans l'organisation de ces transports et comme ayant eu recours, pour effectuer ceux-ci, à des prérogatives de puissance publique dont l'exercice serait à l'origine des dommages considérés ; que la SNCF ne peut davantage être regardée comme ayant reçu mandat de l'Etat pour exécuter aux lieu et place de celui-ci la déportation des victimes ; qu'enfin, les agissements par lesquels l'Etat a contribué à la mise en oeuvre de la déportation ne peuvent être assimilés à des opérations de police administrative, auxquelles la SNCF aurait participé ; qu'il résulte de ce qui précède que la responsabilité de la SNCF dans les transports ferroviaires ayant précédé ou permis la déportation ne peut être recherchée devant le juge administratif ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a jugé que ses conclusions à fin de condamnation de la SNCF doivent être rejetées, comme ayant été portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ; Sur les conclusions dirigées contre l'Etat : En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat et la compétence de la juridiction administrative pour en connaître : Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental a expressément constaté la nullité de tous les actes de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français qui établissent ou appliquent une discrimination quelconque fondée sur la qualité de juif ; que ces dispositions n'ont pu avoir pour effet de créer un régime d'irresponsabilité de la puissance publique à raison des faits ou agissements commis par les autorités et services de l'Etat dans l'application de ces actes ; que, tout au contraire, en sanctionnant l'illégalité manifeste de ces actes qui, en méconnaissance des droits fondamentaux de la personne humaine tels qu'ils sont consacrés par le droit public français, ont établi ou appliqué une telle discrimination, les dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 ont nécessairement admis que les agissements d'une exceptionnelle gravité auxquels ces actes ont donné lieu avaient le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il en résulte que cette responsabilité est engagée en raison des dommages causés par les agissements qui, ne résultant pas d'une contrainte directe de l'occupant, ont permis ou facilité la déportation, à partir de la France, de personnes victimes de persécutions antisémites ; qu'il en va notamment ainsi des arrestations, internements et convoiement à destination des camps de transit qui ont été la première étape de la déportation de ces personnes vers des camps de concentration dans lesquels la plupart d'entre elles ont été exterminées ; que le juge administratif est compétent pour connaître des actions en réparation engagées contre l'Etat à raison de ces agissements ; En ce qui concerne le préjudice : Considérant que le préjudice né des fautes ainsi commises par l'Etat français est incommensurable ; qu'il est fait de la somme des préjudices individuels d'une extrême gravité, physiques, moraux et matériels, subis par les déportés et par leurs proches ; qu'il comprend encore une dimension générale et universelle, dès lors que, par les actes et agissements qui ont contribué à la déportation de 76 000 juifs de France, dont 11 000 enfants, l'Etat a violé, alors même qu'il lui appartenait d'en être le garant, les valeurs et principes, notamment de dignité de la personne humaine, consacrés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et par la tradition républicaine ; En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice : Considérant que M. A a estimé à 50 000 euros les préjudices subis tant par son père du fait de son arrestation, de son internement et de sa déportation que par lui-même ; qu'il fait valoir qu'il n'a pas bénéficié du dispositif d'indemnisation prévu par les dispositions du décret du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et que les indemnisations forfaitaires évoquées par le Tribunal administratif de Paris n'ont pas permis la réparation intégrale du préjudice subi par son père et par lui-même ; Considérant, d'une part, que, si la mise en cause de la responsabilité de l'Etat a été rendue possible par la reconnaissance solennelle de celle-ci par le Président de la République, le 16 juillet 1995, au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation, puis par les décisions de justice prises en ce sens, plus de cinquante ans après les faits, par les juridictions françaises, cette reconnaissance n'a pas altéré la nature et l'étendue des préjudices dont M. A demande réparation ; Considérant, d'autre part, que, eu égard au caractère en tous points exceptionnel des préjudices nés des actes et agissements antisémites de l'Etat pendant l'occupation, il est impossible de rétablir, de quelque manière que ce soit, l'équilibre détruit par le dommage et de parvenir à la réparation intégrale des préjudices subis par les requérants et par leurs parents ; Considérant, cependant, que, pour compenser les préjudices individuels matériels et moraux subis par les victimes de la déportation et par leurs ayants droit, l'Etat a pris une série de mesures, telles que des pensions, des indemnités, des aides ou des mesures de réparation ; que bien qu'elles aient procédé d'une démarche très graduelle et reposé sur des bases largement forfaitaires, ces mesures sont comparables tant par leur nature que dans leur montant, à celles adoptées par les autres Etats européens dont les autorités ont commis de semblables agissements ; que, par ailleurs, la réparation des souffrances exceptionnelles endurées par les personnes victimes des persécutions antisémites ne pouvait se borner à des mesures d'ordre financier, la dimension incommensurable du préjudice abolissant le principe de la réparation par équivalence, dissipant l'idée qu'un tel préjudice puisse être annihilé ou simplement éteint par la voie purement indemnitaire ; qu'une telle oeuvre de réparation appelait la reconnaissance solennelle du préjudice collectivement subi par ces personnes, du rôle joué par l'Etat dans leur déportation ainsi que du souvenir que doivent à jamais laisser, dans la mémoire de la nation, leurs souffrances et celles de leurs familles ; que cette reconnaissance a été accomplie par un ensemble d'actes et d'initiatives des autorités publiques françaises et successivement, par l'adoption par le Parlement de la loi du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, tels qu'ils avaient été définis par la charte du tribunal international de Nuremberg, par la reconnaissance solennelle par le Président de la République, le 16 juillet 1995, lors de la cérémonie commémorant la grande rafle du Vélodrome d'hiver des 16 et 17 juillet 1942, de la responsabilité de l'Etat au titre des préjudices exceptionnels causés par la déportation des personnes que la législation de l'autorité de fait se disant gouvernement de l'Etat français avait considérées comme juives, par la reconnaissance d'utilité publique le 26 décembre 2000 de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, actes rejoints par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 16 février 2009 ; Considérant que, prises dans leur ensemble, ces dispositions doivent être regardées comme ayant permis, autant qu'il est possible, la réparation, dans le respect des droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par l'article 1 de son premier protocole additionnel, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la cour européenne des droits de l'homme dans sa décision susvisée du 24 novembre 2009, des préjudices de toute nature causés à M. A et à son père par les actions de l'Etat qui ont concouru à la déportation ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'imprescriptibilité, que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président de la 7ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A est rejetée. '' '' '' '' 5 N° 10PA03855 2 N° 10PA02664
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