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Conseil d'État, 2ème chambre, 24/07/2019, 419265, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A...B...a demandé au tribunal des pensions de Nîmes d'annuler la décision du 21 janvier 2013 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité et de lui reconnaître droit à pension pour infirmité de chondropathie fémoro-tibiale du genou droit. Par un jugement n° 13/000154 du 8 avril 2016, le tribunal des pensions lui a accordé une pension au taux global de 15 %. Par un arrêt n° 16/00002 du 22 janvier 2018, la cour régionale des pensions de Nîmes a, sur appel de la ministre des armées, annulé ce jugement et rejeté la demande de M. B.... Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juillet et 23 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de renvoyer l'affaire devant une cour régionale des pensions ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros à verser à Me Carbonnier, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat, -les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public, La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Carbonnier, avocat de M. B...; Considérant ce qui suit : 1. Au nombre des règles générales de procédure que les juridictions des pensions sont tenues de respecter figure celle selon laquelle leurs décisions doivent mentionner les textes dont elles font application. 2. Pour juger que la preuve de l'imputabilité au service des infirmités dont se plaint M. B...n'était pas rapportée, la cour régionale des pensions de Nîmes s'est nécessairement fondée sur les dispositions, alors en vigueur, de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, aux termes desquelles : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) " et sur celles de l'article L. 3 du même code, aux termes desquelles : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : [...] 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée ". L'arrêt attaqué ne faisant mention de ces textes ni dans ses visas ni dans ses motifs, M. B...est fondé à soutenir qu'il est entaché d'irrégularité. Par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du pourvoi, M. B...est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 4. Il résulte des dispositions des articles L. 2 et L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans leur rédaction applicable au litige, que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 5. Pour rattacher au service l'infection dont il souffre, M. B...fait valoir qu'il a été victime le 7 janvier 1995 d'un accident dans le cadre d'un parcours du combattant, ayant donné lieu à une intervention chirurgicale le 9 février 1995 à l'hôpital militaire de Châlons-en-Champagne. Toutefois, si son livret médical fait mention, à la date du 8 février 1995, de son hospitalisation, ni ce document, ni aucun document médical avancé par M. B...ne renseigne sur l'épisode factuel ayant conduit à cette opération. En outre, si le rapport d'expertise médicale du 14 décembre 2015 conclut que l'infirmité dont se plaint M. B...est partiellement imputable à l'accident du 7 janvier 1995 et à l'acte chirurgical réalisé le 9 février 1995, il résulte des termes mêmes dudit rapport que celui-ci se borne à transcrire les déclarations de l'intéressé s'agissant des circonstances de l'accident dont il se dit avoir été victime. Enfin, la circonstance que l'intéressé ait été opéré dans un établissement hospitalier militaire n'est pas de la nature à démontrer que la blessure est intervenue suite à un accident de service. Dans ces conditions, la preuve de l'imputabilité de l'affection pour laquelle a été formée la demande de pension à un fait précis ou à des circonstances particulières de service, comme l'exige l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, n'est pas rapportée. 6. Il résulte de ce qui précède que la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Nîmes a accordé à M. B... une pension au taux global de 15 % pour " chondropathie fémoro-tibiale du genou droit ". 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 22 janvier 2018 de la cour régionale des pensions de Nîmes et le jugement du 8 avril 2016 du tribunal des pensions de Nîmes sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal des pensions de Nîmes est rejetée. Article 3 : Les conclusions présentées par M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2019:419265.20190724
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, , 23/09/2019, 19BX00589, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... D... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, une mesure d'expertise médicale sur les préjudices subis du fait de son infirmité afin d'appuyer sa demande de pension d'orphelin majeur infirme. Par une ordonnance n° 1802359 du 10 janvier 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 20 février 2019 et régularisée le 2 juillet 2019, Mme D..., représentée par Me B..., demande au juge des référés de la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du 10 janvier 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers ; 2°) de désigner un expert afin de déterminer son taux d'invalidité et sa capacité à gagner sa vie, et permettre d'apprécier si elle remplit les conditions pour bénéficier d'une pension d'orphelin majeur infirme ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'elle est invalide à 90%, ne peut se déplacer seule ni faire usage de la parole, et que contrairement à ce qu'a retenu la décision du 31 juillet 2015 lui refusant le bénéfice d'une pension d'orphelin majeur infirme, elle n'est pas en capacité de travailler. Par une décision du 9 mai 2019, modifiée le 14 mai 2019, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme D... l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier. Vu : -le code des pensions civiles et militaires de retraite ; -le code de justice administrative. Le président de la cour a désigné Mme E... C..., présidente de la deuxième chambre, en application du livre V du code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Mme D... s'est vu refuser l'obtention d'une pension d'orphelin majeur infirme à la suite du décès en 2005 de son père, ancien combattant, par une décision du 31 juillet 2015, prise sur le fondement d'un avis de la commission consultative médicale en date du 18 mai 2015 concluant que si elle est atteinte d'une infirmité incurable apparue avant l'âge de 18 ans, celle-ci ne la met pas dans l'impossibilité de gagner sa vie dans un emploi adapté à son handicap. Cette décision a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 21 septembre 2017, et le pourvoi contre ce jugement a été rejeté par le Conseil d'Etat pour défaut d'avocat le 5 décembre 2018. 2. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction (...) ". L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. 3. Pour rejeter la demande d'expertise, le premier juge a relevé que " la requérante se borne à indiquer qu'elle est atteinte d'un handicap moteur, ce qui n'a jamais été contesté. Dans ces conditions, elle n'accompagne cette demande d'expertise d'aucun élément médical ou factuel de nature à établir le caractère utile de l'expertise demandée ". Si Mme D... présente en appel un certificat médical établi au Maroc, où elle réside, à l'en-tête d'un centre hospitalier provincial Ouezzane, ce document ne comporte pas le nom du médecin qui l'aurait rédigé ni la date de son édiction, et n'est assorti d'aucune autre pièce de nature à expliciter le taux d'infirmité de 90 % qu'il évalue sans décrire son état. Dans ces conditions, et alors que les affirmations de l'intéressée selon lesquelles elle ne peut ni parler ni se déplacer seule ne sont pas corroborées, cette pièce ne suffit pas à démontrer l'utilité d'une mesure d'expertise dans les circonstances de l'espèce. 4. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent en tout état de cause être rejetées. ORDONNE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... D... et au ministre des armées. Fait à Bordeaux, le 23 septembre 2019. Le juge des référés, Catherine C... La République mande et ordonne à la ministre des armées, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. N° 19BX00589 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 27/06/2019, 17VE00706, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise : - d'annuler la décision du recteur de l'académie de Versailles en date du 18 janvier 2014 rejetant sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices découlant de sa maladie imputable au service ; - d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'éducation nationale sur sa demande ayant le même objet ; - de condamner l'État à lui verser la somme de 820 000 euros en réparation de ses préjudices, avec intérêts de droit à compter de sa demande préalable ; - de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1401183-1402767 du 11 janvier 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'État à verser à M. B...la somme de 5 000 euros tous intérêts confondus, a mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 28 février 2017, M. A...B..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, avocats, demande à la Cour : 1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a condamné l'État à lui verser la somme de 5 000 euros seulement en réparation de ses préjudices ; 2° d'annuler la décision du recteur de l'académie de Versailles en date du 18 janvier 2014 et la décision implicite de rejet du ministre de l'éducation nationale et de condamner l'État à lui verser la somme de 820 000 euros en réparation de ses préjudices, avec intérêts de droit à compter de sa demande préalable ; 3° de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que l'administration n'avait commis aucune faute en le désavouant comme elle l'a fait le 11 février 2005 ; le courrier de l'inspectrice d'académie du Val-d'Oise en date du 11 février 2005 est la cause de sa dépression et de sa mise à la retraite pour invalidité ; - si les premiers juges ont par ailleurs considéré que l'administration avait commis une faute en refusant en 2008 de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie, c'est à tort qu'ils ont estimé qu'il n'existait aucun lien entre cette faute et la pathologie qui a conduit à son placement en position de retraite pour invalidité ; - le jugement est entaché d'une contradiction de motifs entre le considérant 7 qui reconnaît l'existence de cette faute mais ne retient aucun lien de causalité et le considérant 11 qui indique qu'au regard des difficultés qu'il a rencontrées pour voir reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie, il a subi un préjudice moral ; - en raison de son départ à la retraite pour invalidité, il a perdu une chance certaine de pouvoir exercer son activité professionnelle jusqu'à la limite d'âge, intervenant en 2020, soit 2 200 euros de pertes de revenus mensuelles, et également d'obtenir des avancements d'échelon ; il a ainsi subi un préjudice financier qui doit être évalué à la somme de 410 000 euros ; - il suit un traitement médicamenteux depuis 2005, qui correspond à une dépense annuelle de 100 euros, ainsi que des séances de psychothérapie, selon un forfait annuel de 50 euros par an ; ce préjudice sera, par suite, justement évalué à la somme de 1 200 euros ; - il a subi un préjudice moral important aggravé par le refus de l'administration de reconnaître le caractère imputable au service de sa pathologie ; ce préjudice doit être évalué à la somme de 410 000 euros. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Ablard, - et les conclusions de Mme Bonfils, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M.B..., né en 1958, a été nommé directeur de l'école Louis Pasteur à Deuil-la-Barre en septembre 1994. Au cours de l'année scolaire 2004-2005, un conflit l'a opposé à certains enseignants de cet établissement au sujet du non-respect par ces derniers des horaires et du projet d'école. S'estimant désavoué par sa hiérarchie dans ce conflit dont il l'avait informée, M. B... a subi une dépression nerveuse pour laquelle il a été placé en congé maladie le 25 mars 2005, puis en congé de longue durée le 25 mars 2006. Radié des cadres pour invalidité le 5 janvier 2006, il a été admis à faire valoir ses droits à une pension de retraite à compter du 25 juin 2006. Au cours de l'année 2007, M. B...a demandé que sa pathologie soit reconnue comme imputable au service. L'inspectrice d'académie du Val d'Oise a rejeté cette demande par une décision du 30 juin 2008 qui a été annulée par la Cour par un arrêt du 18 avril 2013 jugeant que la pathologie de M. B...était imputable au service à hauteur de 50%. Le 6 décembre 2013, M. B...a adressé une demande indemnitaire préalable en réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis auprès du recteur de l'académie de Versailles qui a rejeté sa demande par une décision du 18 janvier 2014. Il a également formé une demande indemnitaire préalable auprès du ministre de l'éducation nationale qui a été implicitement rejetée. M. B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler ces décisions et de condamner l'État à lui verser la somme de 820 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. Il relève appel du jugement du 11 janvier 2017, en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif a condamné l'État à lui verser la seule somme de 5 000 euros. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Si M. B...soutient que le tribunal administratif a entaché son jugement d'une contradiction de motifs, ce moyen, qui concerne le bien-fondé du jugement, n'est pas de nature à mettre en cause sa régularité. Ce moyen doit, dès lors, être écarté. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : "Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité. Les conditions d'attribution ainsi que les modalités de concession, de liquidation, de paiement et de révision de l'allocation temporaire d'invalidité sont fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine également les maladies d'origine professionnelle. ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 portant règlement d'administration publique pour l'application des dispositions de l'article 23 bis de l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires : " L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant : a) Soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux rémunérable au moins égal à 10 % ; b) Soit de l'une des maladies d'origine professionnelle énumérées dans les tableaux mentionnés à l'article L. 461-2 du code de la sécurité sociale ; c) Soit d'une maladie reconnue d'origine professionnelle dans les conditions prévues par les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale (...) ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " Le taux d'invalidité rémunérable est déterminé compte tenu du barème indicatif prévu à l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. (...) ". Aux termes de l'article 4 du même décret : " L'entrée en jouissance de l'allocation temporaire d'invalidité est fixée à la date de reprise des fonctions après consolidation ou, dans les cas prévus au quatrième alinéa de l'article 1er, à la date de la constatation officielle de la consolidation de la blessure ou de l'état de santé de l'intéressé. Cette allocation est concédée et payée dans les conditions prévues pour les pensions civiles et militaires de retraite. (...) ". Aux termes de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services. Le droit à cette rente est également ouvert au fonctionnaire retraité qui est atteint d'une maladie professionnelle dont l'imputabilité au service est reconnue par la commission de réforme postérieurement à la date de la radiation des cadres, dans les conditions définies à l'article L. 31. Dans ce cas, la jouissance de la rente prend effet à la date du dépôt de la demande de l'intéressé, sans pouvoir être antérieure à la date de publication de la loi n° 2000321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Il en est également ainsi lorsque l'entrée en jouissance de la pension est différée en application de l'article L. 25 du présent code. Le montant de la rente d'invalidité est fixé à la fraction du traitement ou de la solde de base définis à l'article L. 15 égale au pourcentage d'invalidité. Si le montant de ce traitement ou de cette solde de base dépasse un montant correspondant à la valeur de l'indice majoré 681 au 1er janvier 2004, revalorisé dans les conditions prévues à l'article L. 16, la fraction dépassant cette limite n'est comptée que pour le tiers. Toutefois, il n'est pas tenu compte de la fraction excédant dix fois ce montant brut. Le taux d'invalidité est déterminé compte tenu d'un barème indicatif fixé par décret. (...) ". 4. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions, rappelées ci-dessus, qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. En ce qui concerne la responsabilité de l'administration : 5. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 1, un conflit a opposé M. B...à certains enseignants de l'école Louis Pasteur à Deuil-la-Barre, au cours de l'année scolaire 2004-2005, au sujet du non-respect par ces derniers des horaires et du projet d'école. M. B...en a informé l'inspectrice d'académie du Val-d'Oise par un courriel du 6 février 2005. Sans contester le bien-fondé des critiques exprimées par M. B... à l'encontre de ces enseignants, l'inspectrice d'académie lui a conseillé, dans une lettre du 11 février 2005, d'apporter " des modifications tangibles " à sa pratique professionnelle et de " reconquérir rapidement la sérénité professionnelle nécessaire à [son] travail de directeur d'école ". Elle l'a par ailleurs informé des plaintes qui lui étaient adressées par les enseignants concernés, en présentant les intéressés comme des " personnes plutôt tranquilles " se déclarant victimes d'un " climat pesant " et de " pratiques atypiques ", caractérisées notamment par une " autorité excessive " et un " souci excessif de respect des législations diverses ". L'inspectrice d'académie a enfin conseillé à M. B...de prendre contact avec les services chargés d'aider à l'exercice des métiers de l'enseignement. S'estimant désavoué par sa hiérarchie dans le conflit qui l'opposait à ces enseignants, M. B... a subi une dépression nerveuse pour laquelle il a été placé en congé maladie le 25 mars 2005. 6. Il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'inspection établi le 12 décembre 2000, que M. B...s'est très fortement investi dans ses fonctions de directeur d'école entre 1994 et 2005 et a fait l'objet d'appréciations élogieuses de la part de sa hiérarchie. Toutefois, ce même rapport indique que ses collègues ont " parfois pâti de son caractère perfectionniste et/ou de son engagement personnel très important " et que " son désir d'être suivi rapidement, en étant compris et approuvé, lui a parfois valu des désillusions et a parfois créé des réactions d'opposition ou d'inquiétudes vives ". L'administration a néanmoins constaté qu'" avec le recul, il avait appris à attendre, à accepter que tout ne soit pas parfait, et à prendre de la distance dans les relations professionnelles ", et l'a encouragé à " continuer à formaliser et temporiser lorsque l'implication affective des parties en présence est trop forte ". Dans ce contexte, et compte tenu du rôle d'un inspecteur d'académie, consistant notamment à conseiller et à évaluer les personnels d'encadrement des équipes pédagogiques, l'inspectrice a pu, sans commettre de faute, et dans les termes mentionnés au point 5, alerter le requérant sur la situation en lui proposant des solutions de nature à remédier aux difficultés constatées de part et d'autre. Ainsi, si M. B...fait valoir qu'il s'est senti totalement désavoué par sa hiérarchie à cette occasion, le courrier susmentionné de l'inspectrice d'académie du 11 février 2005 n'avait d'autre but que de l'aider à régler un conflit dont il n'était pas seul responsable, mais qui impliquait notamment de sa part, compte tenu de ses fonctions d'encadrement, davantage de recul et de pondération. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'administration a commis à son égard une faute de nature à engager sa responsabilité. 7. En second lieu, ainsi qu'il a été dit au point 1, par un arrêt du 18 avril 2013, la Cour a reconnu l'imputabilité au service de l'affection psychique dont souffre M.B..., à hauteur de 50 % compte tenu de son état antérieur. Par suite, en rejetant la demande présentée en 2007 par M. B...tendant à ce que sa dépression soit reconnue comme imputable au service, l'administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, pour autant qu'elle ait été à l'origine d'un préjudice direct et certain. En ce qui concerne les préjudices : 8. En premier lieu, la faute commise par l'administration en rejetant la demande de M. B... tendant à ce que sa dépression soit reconnue comme imputable au service n'est pas la cause de sa pathologie, ni celle de son placement en position de retraite pour invalidité à compter du 25 juin 2006, placement qu'il avait au demeurant sollicité le 16 avril 2005. Dès lors que la maladie de M. B...n'est pas imputable à une faute de l'administration, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que les conclusions de M. B...tendant à l'indemnisation de préjudices liés à des pertes de rémunération et à l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par sa maladie ne peuvent qu'être rejetées. 9. En deuxième lieu, pour demander la condamnation de l'administration à lui verser une indemnité au titre du coût du traitement médicamenteux qu'il suit depuis 2005 et des séances de psychothérapie suivies, M. B...n'apporte, devant le juge d'appel, aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers juges. Il y a donc lieu de rejeter ces conclusions par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif. 10. En dernier lieu, M. B...soutient qu'il a subi un préjudice moral pour lequel il demande la somme de 410 000 euros. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par l'intéressé tant du fait de sa pathologie, que du fait des difficultés qu'il a rencontrées pour voir reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie, en l'évaluant, compte tenu de son état antérieur, à la somme de 5 000 euros, tous intérêts confondus. 11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'État à lui verser la seule somme de 5 000 euros. Sur les frais liés à l'instance : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée. N° 17VE00706 2
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de LYON, 3ème chambre - formation à 3, 25/06/2019, 17LY02905, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble : 1°) d'annuler la décision du 26 novembre 2014 par laquelle le maire de Grenoble a, d'une part, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre à l'épaule droite et, d'autre part, a limité à 8 % son taux d'incapacité permanente partielle pour une autre pathologie reconnue imputable au service ; 2°) d'enjoindre au maire de Grenoble, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, de réexaminer sa situation et de fixer à 12 % le taux d'incapacité permanente partielle relative à celle des deux maladies d'ores et déjà reconnue imputable au service ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat ou de la commune de Grenoble une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1500426 du 30 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 27 juillet 2017 M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2017 ; 2°) d'annuler la décision du 26 novembre 2014 par laquelle le maire de Grenoble a, d'une part, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre à l'épaule droite et, d'autre part, a limité à 8 % son taux d'incapacité permanente partielle pour une autre pathologie reconnue imputable au service ; 3°) d'enjoindre, sous astreinte, à la ville de Grenoble de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie déclarée le 15 octobre 2013 au titre de l'épaule droite (MP 57A) et de fixer au taux de 12 % l'invalidité permanente partielle découlant de sa maladie professionnelle déclarée au titre de l'épaule gauche ; 4°) de mettre à la charge de la ville de Grenoble la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : S'agissant de l'affection à l'épaule droite : * la décision attaquée est insuffisamment motivée ; * son affection de l'épaule droite doit être reconnue comme imputable au service ; S'agissant de son affection à l'épaule gauche et du taux d'incapacité permanente partielle : - son affection justifie un taux d'incapacité permanente partielle de 12 % selon le décret n° 68-756 du 13 août 1968 pris pour l'application de l'article L. 28 (3e alinéa) du code des pensions civiles et militaires de retraite, en ce qui concerne la " raideur articulaire " de l'épaule par référence au taux prévu au barème pour une " limitation modérée de tous les mouvements de l'épaule bien compensés par l'omoplate ". Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2018, la ville de Grenoble, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de M. C... la somme de 2 500 euros. Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : * la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; * la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; * le décret n° 68-756 du 13 août 1968 pris en application de l'article 28 (3e alinéa) de la loi n° 64-1339 du 26 décembre 1964 portant réforme du code des pensions civiles et militaires de retraite ; * le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : * le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller, * les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public, * et les observations de Me E...substituant Me B...représentant M.C..., de Me H...substituant Me G...représentant la ville de Grenoble ; Considérant ce qui suit : 1. M. I... C..., né en 1960, est adjoint technique de deuxième classe employé par la ville de Grenoble au service de la propreté urbaine, où il exerce des fonctions de cantonnier. Il a été placé en arrêt de travail à compter du 15 mai 2012, en raison de " douleurs chroniques des deux épaules (...) ". A la suite d'un examen médical réalisé le 21 mars 2013 par le DrD..., le maire de Grenoble a, par un arrêté du 5 juillet 2013, admis l'imputabilité au service de la tendinopathie aigüe dont souffre M. F...à l'épaule gauche. 2. Après avoir recueilli l'avis de la commission de réforme, elle même éclairée par les résultats d'un nouvel examen de M. C... par le DrD..., le maire de Grenoble a, par décision du 26 novembre 2014, d'une part, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la scapulalgie de l'épaule droite dont souffre M. F...et, d'autre part, fixé à 8 % le taux de l'incapacité permanente partielle résultant de la tendinopathie affectant son épaule gauche. M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2017 qui a rejeté sa demande d'annulation de cette décision du 26 novembre 2014. Sur la légalité de la décision du maire de Grenoble du 26 novembre 2014 : En ce qui concerne l'affection dont souffre M. C... à l'épaule droite : 3. En mentionnant les motifs, qu'il s'est ainsi appropriés, par lesquels la commission de réforme a émis un avis défavorable à la reconnaissance de la pathologie dont souffre M. C... à l'épaule droite comme maladie professionnelle inscrite au tableau 57 A, le maire de Grenoble a exposé de façon suffisamment précise les éléments de fait et de droit sur lesquels il s'est fondé pour refuser d'admettre l'imputabilité au service de la scapulalgie de l'épaule droite de M.F.... 4. Aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service, (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé, si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " (...) Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau (...) ". 5. Aucune disposition ne rend applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale, qui demandent le bénéfice des dispositions combinées du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau. Il appartient donc au fonctionnaire qui entend voir reconnaître le caractère professionnel d'une pathologie dont il souffre d'apporter des éléments de nature à justifier l'existence d'un lien direct entre cette pathologie et son travail habituel. 6. Il ressort des pièces du dossier que M. C... souffre de scapulalgie à l'épaule droite depuis le mois de mai 2011. Un bilan échographique de cette épaule pratiqué le 25 mai 2011, a mis en évidence une légère hypertrophie hétérogène du supra épineux "compatible avec une tendinopathie". Un examen par imagerie par résonnance magnétique (IRM) pratiqué le 9 mai 2012 a permis de constater une trophicité musculaire normale, de retrouver une arthrose acromio claviculaire, mais n'a pas révélé de tendinopathie. Au regard de ses éléments le DrD..., après avoir examiné M. C... le 21 mars 2013, a conclu que l'affection de l'épaule droite ne relevait pas d'une pathologie reconnue comme maladie professionnelle. 7. En appel, M. C... produit un " avis médical consultatif " daté du 20 juin 2017, rédigé à la demande de son conseil et sur pièces par le docteur A...selon lequel l'IRM du mois de mai 2012 a été réalisée dans des conditions techniques incomplètes, qui ont conduit à écarter, à tort, une tendinopathie de l'épaule droite. 8. En supposant même que l'examen par IRM du 9 mai 2012 ait été incomplet, une telle circonstance ne permet pas de déduire l'existence d'une tendinopathie à cette date. En effet, le DrD..., appelé à se prononcer à nouveau sur le cas de M. C... a considéré, dans son rapport du 13 mars 2014 établi au vu d'un nouvel examen par IRM de l'épaule droite effectué le 11 octobre 2013, que la tendinopathie objectivée par ce dernier examen, qui résulte d'un conflit d'origine dégénérative, était une pathologie d'allure récente. M. C..., qui n'a pas repris ses fonctions depuis le mois de mai 2012, ne produit par ailleurs aucun élément médical permettant d'établir un lien certain, même sans caractère exclusif, entre l'affection de son épaule droite et ses conditions habituelles de travail. 9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que le refus par le maire de Grenoble de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie affectant son épaule droite est entaché d'illégalité. En ce qui concerne le taux d'incapacité permanente partielle relatif à l'affection de l'épaule gauche : 10. Il ressort des pièces du dossier que l'affection reconnue imputable au service dont M. C... souffre à l'épaule gauche est une tendinopathie aigüe. Ainsi que l'a à bon droit relevé le tribunal administratif de Grenoble, le décret n° 68-756 du 13 août 1968 précise que le taux d'invalidité pour ce type d'affection doit être évalué entre 0 et 7 %. 11. M. C... soutient que le taux qui lui a été attribué doit être porté à 12 % en se référant à un autre chapitre de ce même décret concernant l'appareil locomoteur et, plus particulièrement, à celles de ses dispositions qui concernent les raideurs articulaires conduisant à une limitation modérée de tous les mouvements. Toutefois, et dès lors qu'il n'est pas établi qu'il présente de tels symptômes, M. F...ne peut se prévaloir des dispositions réglementaires qu'il invoque pour soutenir qu'en limitant à 8 % le taux qu'il lui a attribué à raison de la tendinopathie aigüe de son épaule droite, le maire de Grenoble a entaché sa décision attaquée d'excès de pouvoir. 12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à titre que, par son jugement attaqué le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction et sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. Les conclusions à fin d'annulation de M. C... devant être rejetées, il s'ensuit que doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ces dispositions faisant obstacle à ce que le juge administratif fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. 14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme demandé par ville de Grenoble au titre de ces mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de ville de Grenoble tendant l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I...C...et à la ville de Grenoble. Délibéré après l'audience du 21 mai 2019 à laquelle siégeaient : M. Jean-François Alfonsi, président de chambre, Mme Virginie Chevalier-Aubert, présidente assesseure, M. Pierre Thierry, premier conseiller. Lu en audience publique, le 25 juin 2019. No 17LY02905 2 sh
Cours administrative d'appel
Lyon
Conseil d'État, Section, 01/07/2019, 413995, Publié au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, la décision du 13 mars 2015 du directeur du service des retraites de l'Etat en tant qu'elle rejette implicitement sa demande de remboursement des sommes retenues sur sa pension au titre d'un trop-perçu entre les mois de janvier 2002 et de janvier 2015, d'autre part les décisions par lesquelles le ministre des finances et des comptes publics et le ministre de la défense ont rejeté ses demandes indemnitaires préalables, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 17 304,50 euros, à parfaire, en réparation de son préjudice, avec intérêt au taux légal à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire préalable. Par un jugement n° 1503230 du 23 août 2017, le tribunal administratif de Nantes a condamné l'Etat à verser à M. A... la somme de 16 804,50 euros, portant intérêt à compter du 16 avril 2015, puis rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par un pourvoi, enregistré le 4 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean-Yves Ollier, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Balat, avocat de M. A...; 1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B...A..., qui perçoit une pension militaire d'invalidité depuis l'année 1975, a été informé le 28 juillet 1997 par l'administration de l'existence d'un trop perçu au titre de sa pension militaire d'invalidité. Un ordre de recettes indiquant que cette somme serait recouvrée pour un montant de 29 822 francs, soit 4 546 euros, au moyen de retenues égales au cinquième des arrérages de sa pension à compter du mois d'août 1997, dans la limite du montant du débet, lui a été adressé. Le 12 février 2015, M. A...a demandé à l'administration de suspendre le prélèvement annuel de 1 298,85 euros, soit 8 520,60 francs, dont il faisait l'objet à cette date. Par une décision du 10 mars 2015, le directeur des services de retraite de l'Etat a levé la suspension des arrérages de sa pension pour ce montant à compter du 1er février 2015. Par un courrier du 14 avril 2015, M. A... a adressé à l'administration une demande tendant au remboursement, pour la période de janvier 2002 à janvier 2015, de la somme annuelle de 1 298,85 euros, qu'il estimait avoir été indument prélevée sur sa pension. Par un jugement du 23 août 2017, contre lequel le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Nantes a condamné l'Etat à lui verser la somme de 16 804,50 euros, en écartant l'exception de prescription quadriennale soulevée par le ministre de l'économie, des finances et des comptes publics, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. 2. Le pourvoi du ministre de l'action et des comptes publics doit être regardé comme tendant à l'annulation du jugement en tant qu'il a fait droit aux conclusions indemnitaires de M.A.... Sur l'application des règles de prescription : 3. Le premier alinéa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics dispose que : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ". 4. Lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit, le fait générateur de la créance se trouve en principe dans les services accomplis par l'intéressé. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à ces services court, sous réserve des cas prévus à l'article 3 précité de la loi du 31 décembre 1968, à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au titre de laquelle ils auraient dû être rémunérés, y compris lorsque le litige porte sur un prélèvement indu, à la condition qu'à cette date l'étendue de cette créance puisse être mesurée. Lorsque le préjudice allégué résulte non des règles relatives à la rémunération ou de leur application mais d'une décision individuelle explicite illégale, le fait générateur de la créance doit alors être rattaché, sous les mêmes réserves, non à l'exercice au cours duquel la décision a été prise, mais à celui au cours duquel elle a été valablement notifiée. 5. Lorsqu'un litige oppose un ancien agent public à l'administration sur une erreur ne tenant ni à la liquidation ni à la révision de sa pension, mais au versement de celle-ci, les règles de prescriptions applicables sont fixées par les dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968 et non par les dispositions particulières du code des pensions civiles et militaires de retraite ou du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Le fait générateur de la créance se trouve en principe dans les échéances de cette pension. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative aux arrérages de pension court, sous réserve des cas prévus à l'article 3 de la loi de 1968, à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle les arrérages correspondants auraient dû être versés, y compris lorsque le litige porte sur un prélèvement indu, à la condition qu'à cette date, l'étendue de cette créance puisse être mesurée. 6. Il résulte de ce qui précède que, dès lors que le litige portait sur des sommes dues au requérant du fait du retard mis par l'administration à interrompre un prélèvement opéré sur sa pension, le délai de prescription courait, sous réserve des cas prévus à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle les arrérages correspondants auraient dû être versés, à la condition qu'à cette date, l'étendue de la créance pût être mesurée. En conséquence, en écartant l'exception de prescription quadriennale opposée par l'administration à la demande de M. A...au seul motif que le délai de prescription de la créance dont se prévalait l'intéressé courait, en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle était intervenu l'acte ayant régularisé sa situation, le tribunal administratif de Nantes a entaché son jugement d'une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a accueilli les conclusions indemnitaires de M.A.... 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond dans cette mesure, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. Sur le règlement au fond : 8. M. A...demande le versement d'une somme de 15 804,50 euros, correspondant au montant des sommes indûment prélevées sur les arrérages de sa pension militaire d'invalidité, assortie d'une indemnité de 1 500 euros au titre de son préjudice moral. En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale : 9. Ainsi qu'il a été dit au point 5, le délai de prescription de la créance d'un ancien agent public relative à une erreur dans le versement de la pension à laquelle il a droit court, sous réserve des cas prévus à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle les arrérages correspondants auraient dû être versés, y compris lorsque le litige porte sur un prélèvement indu, à la condition qu'à cette date, l'étendue de cette créance puisse être mesurée. 10. Il résulte de l'instruction que le montant total à recouvrer sur la pension de M. A...à la suite d'un trop-perçu lui a été notifié dans l'ordre de recettes émis par la trésorerie générale de la Seine-Maritime en juillet 1997 et qu'il lui a été indiqué que la récupération serait opérée par un prélèvement représentant 20 pour cent des arrérages de sa pension. Dès lors, les circonstances de l'espèce ne faisaient pas obstacle à ce que les modalités d'extinction de la dette de M. A...correspondant au trop-perçu sur sa pension militaire d'invalidité pussent être connues et mesurées au cours de chaque année où les arrérages auraient dû être versés. 11. M. A...ne peut, compte tenu des circonstances relevées au point précédent, être regardé comme ayant légitimement ignoré l'existence de la créance résultant pour lui de la poursuite de ces retenues au-delà de l'année 2002. Il ne peut donc être soutenu que M. A... se trouvait dans l'un des cas visés à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 susceptibles de faire obstacle à ce que le délai de prescription puisse courir. 12. Il résulte de ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que les créances correspondant aux années 2002 à 2010 étaient prescrites lorsque M. A...a demandé, le 12 février 2015, que ce prélèvement soit suspendu, et que celui-ci ne pouvait se prévaloir d'une créance qu'en ce qui concerne la période du 1er janvier 2011 au 31 janvier 2015. En ce qui concerne les sommes demandées par M. A...: 13. Il résulte de l'instruction que le montant de la somme due à M. A...au titre des retenues indues sur les arrérages de sa pension s'élève à 5 304,25 euros, correspondant à la part non prescrite de ces prélèvements. 14. Il résulte par ailleurs de l'instruction que le préjudice moral invoqué par M. A... n'est pas établi. 15. M. A...est, par suite, fondé à demander que l'Etat soit condamné à lui verser une somme globale de 5 304,25 euros. En ce qui concerne les intérêts : 16. Lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter de la réception par la partie débitrice de la réclamation de la somme principale ou, le cas échéant, faute de demande préalable indemnitaire, de l'enregistrement de cette demande au tribunal. Dans la présente espèce, il ne résulte pas de l'instruction que les administrations concernées aient reçu la demande présentée le 14 avril 2015 par M. A...avant l'enregistrement de sa requête au tribunal administratif de Nantes le 16 avril 2015. Il y a donc lieu de faire courir les intérêts à compter du 16 avril 2015. Sur les frais du litige : 17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'article 1er du jugement du 23 août 2017 du tribunal administratif de Nantes est annulé. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. A...une somme de 5 304,25 euros. Cette somme portera intérêt à compter du 16 avril 2015. Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. A...est rejeté, ainsi que ses conclusions devant le Conseil d'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics et à M. B...A.... Copie en sera adressée à la ministre des armées.ECLI:FR:CESEC:2019:413995.20190701
Conseil d'Etat
CAA de NANTES, 6ème chambre, 19/07/2019, 18NT02667, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme de 1 554 euros correspondant aux honoraires qu'il a d'ores et déjà versés à son conseil pour le représenter. Par un jugement n° 1603545 du 15 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 13 juillet 2018, M.C..., représenté par Me B..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 mai 2018 ; 2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande préalable d'indemnisation ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme de 4 048,20 euros, à parfaire, correspondant aux honoraires versés à son conseil pour le représenter ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'une d'erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation : * l'attribution de l'échelon exceptionnel résulte directement de la parution du décret n° 2011-1234 du 4 octobre 2011 dont les dispositions ont majoré le contingentement pour l'accession à l'échelon exceptionnel du grade de major portant de fait rétroactivement le nombre de proposables d'un effectif de 111 à 146 ; * l'administration a fait preuve d'une inertie fautive dans le délai de traitement de l'attribution de l'échelon exceptionnel ce qui constitue une atteinte disproportionnée à sa situation individuelle ; * l'administration ne pouvait ignorer ni la promotion du requérant à l'échelon exceptionnel, ni la date de départ en retraite ; * trois sous-officiers également visés par la décision du 13 février 2012 portant attribution à titre rétroactif de l'échelon exceptionnel du grade de major à compter du 1er mars 2011 et partis à la retraite un an après le requérant ont bénéficié d'une reconstitution de carrière ce qui constitue une rupture d'égalité entre militaires ; - son préjudice matériel peut être évalué à la somme de 29 837,44 euros et son préjudice moral à la somme de 5 000 euros ; Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. C...sont infondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le décret n° 2011-1234 du 4 octobre 2011 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pons ; - les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M.C..., titulaire du grade de major dans l'armée de terre, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er décembre 2011. Sa pension de retraite a été liquidée à cette date sur la base des émoluments afférents au 5ème échelon du grade de major. Par décision du 13 février 2012, l'intéressé a été admis au bénéfice de l'échelon exceptionnel de ce grade avec effet rétroactif à compter du 1er mars 2011. En octobre 2012, le service des ressources humaines et de la solde du ministère de la défense l'a informé qu'il percevrait un rappel de traitement consécutif à son reclassement pour la période courant du 1er mars au 1er décembre 2011. Puis, par décision du 9 mai 2012, le ministre de la défense a rejeté la demande de M. C... tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major. Par un jugement du 10 juin 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de M. C...tendant à l'annulation de cette décision du ministre de la défense du 9 mai 2012. Par sa présente requête, M. C...relève appel du jugement du 15 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 34 837,44 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral à la suite de la décision de refus du ministre de la défense de faire droit à sa demande tendant à ce que sa pension de retraite soit révisée afin d'être calculée sur la base de l'échelon exceptionnel du grade de major et à lui rembourser la somme correspondant aux honoraires qu'il a d'ores et déjà versés à son conseil pour le représenter. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, la décision implicite par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande préalable indemnitaire de M. C...n'a eu pour seul effet que de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande du requérant qui, en formulant les conclusions à fin de condamnation sus-analysées, leur a donné le caractère de conclusions de plein contentieux. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de la décision rejetant la demande préalable indemnitaire de M. C...sont irrecevables. Sur les conclusions à fin d'indemnisation : 3. Aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : à tout moment en cas d'erreur matérielle ; dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit ". Si cette dernière disposition permet notamment de redresser toute erreur de droit concernant la détermination de la situation administrative du fonctionnaire retraité au jour de son admission à la retraite et ayant eu une influence sur la liquidation de sa pension, il appartient à l'autorité chargée de cette liquidation de vérifier, sous le contrôle du juge, l'existence et la portée des erreurs alléguées, sans que les intéressés puissent se prévaloir de droits acquis qu'ils tiendraient d'actes intervenus postérieurement à la date de leur admission à la retraite et modifiant rétroactivement leur situation administrative à cette date, pour des motifs autres que l'exécution d'une loi, d'un règlement ayant légalement un effet rétroactif ou d'une décision du juge de l'excès de pouvoir. 4. En premier lieu, si le décret susvisé du 4 octobre 2011 a rétroactivement porté de 19 % à 25 % le pourcentage de l'effectif de majors pouvant se voir attribuer l'échelon exceptionnel au titre d'une année donnée et que le nombre de majors remplissant les conditions d'ancienneté dans le grade au sein de l'armée de terre pour bénéficier de cette attribution en 2011 a ainsi été porté rétroactivement de 111 à 146, il n'est pas contesté que cette augmentation du contingentement de promouvables a permis à M. C...de se voir attribuer ledit échelon et de bénéficier d'une revalorisation de sa solde à compter du 1er mars 2011. Toutefois, contrairement à ce qui est allégué, l'administration n'était pas légalement tenue de conférer au requérant cet avantage, dès lors qu'elle disposait d'un pouvoir discrétionnaire pour procéder à l'examen et à la suite donnée aux demandes des différents militaires remplissant les conditions réglementaires pour bénéficier d'un avancement de grade. Par suite, l'attribution au choix de l'échelon exceptionnel au requérant, postérieurement à sa radiation des cadres, n'a pas résulté directement de l'exécution rétroactive d'un règlement. En conséquence, le ministre de la défense n'a commis aucune illégalité fautive en refusant à l'intéressé de modifier les bases de liquidation de sa pension. 5. En second lieu, l'attribution à M. C...de l'échelon exceptionnel résulte directement de la modification du contingentement introduite par le décret du 4 octobre 2011. Il ressort des dispositions de ce décret qu'il s'est écoulé un délai de moins de deux mois entre le 6 octobre 2011, date de publication au Journal Officiel du décret en question, et le 1er décembre 2011, date de radiation des contrôles de M.C.... Dans ces conditions, l'administration ne saurait être regardée comme ayant fait preuve d'inertie fautive en ne prenant pas la décision d'attribution de l'échelon exceptionnel à M. C...dans ce délai de deux mois, mais seulement à la date du 13 février 2012, quatre mois après la date de publication dudit décret. En l'espèce, ce délai de quatre mois n'apparait pas anormalement long s'agissant d'une décision de cette nature. Par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que la responsabilité de l'Etat serait engagée à son égard du fait du retard fautif de l'administration dans le cadre du traitement de l'attribution à l'intéressé de l'échelon exceptionnel du grade de major. 6. En troisième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. Si M. C... fait valoir que trois autres sous-officiers également visés par la décision du 13 février 2012 ont bénéficié d'une " reconstitution de carrière ", il n'est pas contesté que ces personnes ont pris leur retraite un an après l'intéressé. Dans ces conditions, les sous-officiers en question n'étaient pas placés dans une situation comparable. Par suite, la circonstance que l'avancement d'échelon des ces sous-officiers ait été pris en compte par l'administration pour le calcul de leurs droits à pension ne saurait induire une rupture du principe d'égalité. 7. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. C...au titre des frais liés au litige. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 24 juin 2019, à laquelle siégeaient : - M. Lenoir, président de chambre, - M. Francfort, président-assesseur, - M. Pons, premier conseiller. Lu en audience publique, le 19 juillet 2019. Le rapporteur, F. PONSLe président, H. LENOIR Le greffier, E. HAUBOIS La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 5 N°18NT02667
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 7ème chambre, 15/07/2019, 427935, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2015 par lequel la garde des sceaux, ministre de la justice, l'a titularisé dans le corps des surveillants pénitentiaires en tant que cet arrêté limite sa reprise d'ancienneté à trois mois et neuf jours, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 1600954 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 18NC01165 du 13 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. B...contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 février et 13 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - l'ordonnance n° 2019-2 du 4 janvier 2019 ; - le décret n° 2006-441 du 14 avril 2006 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de M. B...;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...a été recruté en qualité de militaire du 29 août 2000 au 29 août 2010, date à laquelle il a été radié des cadres. Du 9 janvier 2012 au 22 septembre 2013, M. B...a exercé les fonctions d'adjoint de sécurité au sein de la police nationale. Après avoir été nommé le 22 septembre 2013 dans un emploi réservé aux anciens militaires en tant qu'élève à l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire, il a été nommé surveillant pénitentiaire stagiaire le 2 juin 2014. Par un arrêté de la garde des sceaux, ministre de la justice, du 10 décembre 2015, M. B...a été titularisé à compter du 2 septembre 2015 au deuxième échelon du grade de surveillant pénitentiaire, avec une ancienneté de trois mois et neuf jours. Par un courrier du 22 janvier 2016, M. B...a contesté cet arrêté devant la directrice de l'administration pénitentiaire en demandant que la durée de ses services accomplis en qualité de militaire sous contrat entre 2000 et 2010 soit reprise en totalité pour le calcul de son ancienneté dans le corps des surveillants pénitentiaires. Par un jugement du 13 février 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2015 en tant qu'il limite sa reprise d'ancienneté à trois mois et neuf jours, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. M. B...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 13 décembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel contre ce jugement. Par ailleurs, à l'appui de ce pourvoi, M. B...soutient, par un mémoire distinct, que les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense, telles qu'elles sont interprétées par la jurisprudence du Conseil d'Etat, portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution. Sur la question prioritaire de constitutionnalité : 2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux. 3. Aux termes de l'article L. 4111-1 du code de la défense, le statut des militaires " (...) offre à ceux qui quittent l'état militaire les moyens d'un retour à une activité professionnelle dans la vie civile (...) ". 4. Aux termes de l'article L. 4139-3 du même code de la défense, dans sa rédaction applicable au litige, sur lequel la cour administrative d'appel s'est fondée pour rejeter l'appel de M. B...: " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre./ En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B ". Ces dispositions fixent les modalités selon lesquelles la carrière antérieure du militaire qui devient fonctionnaire en étant recruté sur un emploi réservé est prise en considération pour déterminer l'ancienneté dont il bénéficie dans le corps qu'il rejoint lors de sa titularisation. Cette reprise d'ancienneté permet de déterminer, au regard des dispositions statutaires propres à chaque corps, l'échelon auquel il doit être reclassé et, par suite, l'indice qui en résulte. Ces dispositions ne prévoient pas que le reclassement dans la fonction publique d'un ancien militaire, recruté au titre de la législation sur les emplois réservés, tienne compte de l'indice détenu par l'intéressé lorsqu'il était militaire. 5. Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un ou l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 6. Les militaires en activité qui accèdent à un emploi réservé ne sont pas dans la même situation que les anciens militaires qui accèdent à ces mêmes postes, compte tenu de l'objectif fixé à l'article L. 4111-1 du code de la défense de favoriser le retour des militaires à une activité professionnelle dans la vie civile. Il est par conséquent loisible au législateur de prévoir des règles de reprise d'ancienneté uniquement pour les militaires en position d'activité lors de leur intégration dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil. Par suite, alors même que l'ordonnance du 4 janvier 2019 portant simplification des dispositifs de reconversion des militaires et des anciens militaires dans la fonction publique civile a supprimé ces règles spécifiques aux militaires en activité, le grief tiré de ce que le législateur aurait méconnu le principe d'égalité en prévoyant des règles de reclassement différentes pour les militaires en activité et pour les anciens militaires ne présente pas un caractère sérieux. 7. Il résulte de tout ce qui précède que la question soulevée par M.B..., qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux et qu'il n'y pas lieu, par suite, de la transmettre au Conseil constitutionnel. Sur les autres moyens du pourvoi : 8. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ". 9. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque, M. B...soutient, en outre, que la cour administrative d'appel de Nancy a : - commis une erreur de droit en considérant que l'administration était fondée à lui refuser, lors de sa titularisation comme surveillant pénitentiaire, la reprise de son ancienneté au titre des services qu'il a accomplis en tant que militaire ; - commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en jugeant que son ancienneté dans son nouveau poste de surveillant pénitentiaire était limitée à 3 mois et 9 jours, alors d'une part qu'il bénéficiait d'une ancienneté de 20 mois en tant qu'adjoint de sécurité et, d'autre part, que le décret du 24 avril 2006 prévoyait une reprise d'ancienneté à hauteur des trois-quarts de la durée des services antérieurs effectués par les agents de droit public non contractuels qui accèdent à un emploi de surveillant pénitentiaire. 10. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.D E C I D E : -------------- Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.B.... Article 2 : Le pourvoi de M. B...n'est pas admis. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B.... Copie en sera adressée au Premier ministre, à la garde des sceaux, ministre de la justice, à la ministre des armées et au Conseil constitutionnel. ECLI:FR:CECHS:2019:427935.20190715
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème chambre, 17/07/2019, 421912, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A...B..., veuve de M.C..., a demandé au tribunal administratif de Paris de lui accorder le bénéfice d'une pension de réversion. Par une ordonnance n° 1801066 du 23 avril 2018, la présidente de la 5ème section de ce tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable. Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 juin 2018 et 3 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) réglant l'affaire au fond, d'attribuer l'affaire au tribunal des pensions de Paris ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 56-897 du 8 septembre 1956 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Liza Bellulo, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de Mme B...; Considérant ce qui suit : 1. Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris de lui accorder le bénéfice d'une pension de réversion. Elle se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 23 avril 2018 par laquelle la présidente de la 5ème section du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté cette demande comme irrecevable. Sur la recevabilité du pourvoi : 2. Mme B...étant représentée, depuis le 1er avril 2019, par la SCP Monod, Colin, Stoclet, la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'action et des comptes publics, tirée de ce que le pourvoi a été présenté en méconnaissance des dispositions de l'article R. 432-1 du code de justice administrative, ne peut, en tout état de cause, qu'être écartée. Sur le bien fondé du pourvoi : 3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Paris que, par sa demande, enregistrée le 23 janvier 2018, Mme B...sollicitait le bénéfice d'une pension de réversion en qualité de veuve de M.C..., décédé le 25 avril 2014, ancien combattant de la seconde guerre mondiale et titulaire à ce titre d'une pension militaire d'invalidité qui lui avait été concédée le 8 décembre 1984. Elle devait, dès lors, nécessairement être regardée comme demandant le bénéfice d'une pension de réversion en application des dispositions de l'article L. 141-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, aux termes duquel : " Le droit à pension est ouvert au conjoint ou partenaire survivant mentionnés à l'article L. 141-1 : / 1° Lorsque le militaire est décédé en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension (...) ". 4. En application de l'article R. 731-1 du même code, les règles de recevabilité des demandes de pensions militaires d'invalidité sont déterminées par les dispositions de ce code, par celles du code de procédure civile auxquelles elles renvoient expressément et, dans le silence de ce code, par les règles générales de procédure applicables aux juridictions administratives. En l'absence de toute disposition du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ou de toute règle générale de procédure applicable aux juridictions administratives prévoyant que les parties non représentées par un avocat qui ont leur résidence en dehors du territoire français doivent y élire domicile, aucune fin de non-recevoir ne peut être opposée à un demandeur d'une pension de réversion formée en application de l'article L. 141-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, tirée de l'absence d'élection de domicile en France. Par suite, la présidente de la 5ème section du tribunal administratif de Paris a entaché son ordonnance d'une erreur de droit en rejetant la demande de Mme B...comme irrecevable au motif qu'elle n'avait pas élu domicile dans le ressort de ce tribunal en application des dispositions de l'article R. 431-8 du code de justice administrative. 5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, que Mme B...est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 7. Aux termes de l'article L. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les contestations individuelles auxquelles donne lieu l'application des dispositions du livre Ier et des titres Ier, II et III du livre II sont jugées en premier ressort par le tribunal des pensions et en appel par la cour régionale des pensions. / (...) Les juridictions des pensions constituent des juridictions administratives. ". Aux termes de l'article R. 711-2 du même code : " Le tribunal des pensions de Paris et la cour régionale des pensions de Paris sont chargés de statuer sur les contestations mentionnées à l'article L. 711-1 soulevées par les personnes résidant à l'étranger. / Par exception aux dispositions de l'alinéa précédent, les contestations sont portées : / (...) 2° Devant le tribunal des pensions et la cour régionale des pensions de Montpellier, pour les ressortissants résidant dans le ressort de l'ancienne cour d'appel d'Oran (...) ". 8. Si, en vertu des dispositions combinées de l'article 51 de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense et de l'article 6 du décret du 28 décembre 2018, pris pour son application, ces contestations, à compter du 1er novembre 2019, relèveront respectivement, en premier ressort et en appel, des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, auxquels seront transférées en l'état les procédures en cours, il résulte des dispositions citées au point précédent qu'une demande de pension d'un conjoint survivant d'un titulaire de pension militaire d'invalidité relève, jusqu'au 1er novembre 2019, de la compétence des juridictions des pensions. 9. En vertu de l'article 2 du décret du 8 septembre 1956 fixant les modalités d'application de la loi n° 55-1083 du 7 août 1955 portant création des cours d'appel d'Oran et de Constantine, la wilaya de Tiaret, où réside MmeB..., est située dans le ressort de la cour d'appel d'Oran. Il y a lieu, dès lors, d'attribuer le jugement de l'affaire au tribunal des pensions de Montpellier. 10. Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à celle-ci. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'ordonnance du 23 avril 2018 de la présidente de la 5ème section du tribunal administratif de Paris est annulée. Article 2 : Le jugement de la demande de Mme B...est attribué au tribunal des pensions de Montpellier. Article 3 : L'Etat versera à la SCP Monod, Colin, Stoclet une somme de 1 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B..., à la ministre des armées, au ministre de l'action et des comptes publics et au président du tribunal des pensions de Montpellier. ECLI:FR:CECHS:2019:421912.20190717
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème chambre, 26/06/2019, 416864, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B...A...a demandé au tribunal des pensions de Nanterre, d'une part, d'annuler l'arrêté ministériel du 15 février 2016 fixant à 35 % le taux global de sa pension militaire d'invalidité et, d'autre part, d'enjoindre à la ministre des armées de calculer à nouveau sa pension en prenant en compte le taux d'invalidité de 20 %, définitivement acquis pour l'infirmité principale de séquelles de contusion du globe oculaire gauche. Par un jugement n° 16/00009 du 24 janvier 2017, le tribunal des pensions a fait droit à sa demande. Par un arrêt n° 17/01714 du 24 octobre 2017, la cour régionale des pensions de Versailles a rejeté l'appel formé par la ministre des armées contre ce jugement. Par un pourvoi, enregistré le 27 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Louise Bréhier, auditrice, - les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public, La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, Le Guerer, avocat de M. A...; 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... bénéficiait depuis le 17 avril 1992 d'une pension militaire d'invalidité pour séquelles de contusion du globe oculaire gauche concédée au taux de 19,5 %, arrondi à 20 %. Par arrêté du 12 novembre 2013, M. A...s'est vu concéder une pension militaire d'invalidité mixte au titre de séquelles de contusion du globe oculaire gauche, acouphènes bilatéraux et hypoacousie bilatérale à un taux de 35 %. M. A...a demandé au tribunal des pensions de Nanterre d'annuler l'arrêté ministériel du 15 février 2016 par lequel la ministre des armées, saisie d'une demande de révision de sa pension pour aggravation de ses infirmités auditives, a reconduit et consolidé à titre définitif cette pension aux taux précédemment établis. Le tribunal a fait droit à cette demande et enjoint à la ministre des armées de calculer de nouveau la pension servie à M. A...en tenant compte du taux définitif de 20 % pour l'infirmité de séquelles de contusion du globe oculaire gauche. La ministre des armées se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour régionale des pensions de Versailles qui a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement. 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable à la date du litige : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. (...) ". 3. Aux termes de l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable à la date du litige : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. Tous les calculs d'infirmités multiples prévus par le présent code, par les barèmes et textes d'application doivent être établis conformément aux dispositions de l'alinéa premier du présent article sauf dans les cas visés à l'article L. 15 ". Il résulte des dispositions de l'article L. 9 du même code, dans sa rédaction applicable à la date du litige et dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 125-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, que " (...) Quand l'invalidité est intermédiaire entre deux échelons, l'intéressé bénéficie du taux afférent à l'échelon supérieur (...) ". 4. Quand le titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour infirmité simple sollicite sa révision du fait de l'apparition de nouvelles infirmités ou de l'aggravation de ses infirmités n'entrainant pas une invalidité absolue, le calcul de sa pension révisée doit s'effectuer sur la base du degré réel d'invalidité correspondant à l'infirmité principale déjà pensionnée et du degré réel d'invalidité correspondant aux infirmités supplémentaires avec une exactitude arithmétique, sans qu'il soit possible d'arrondir à l'unité supérieure les chiffres fractionnaires intermédiaires. La règle de l'arrondi énoncée à l'article L. 9 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ne s'applique, le cas échéant, qu'une fois obtenu le degré global d'invalidité pour déterminer le taux de pension correspondant. 5. Pour confirmer le jugement par lequel le tribunal des pensions de Nanterre a annulé l'arrêté ministériel du 15 février 2016 et enjoint au ministre des armées de calculer à nouveau la pension concédée à M.A..., la cour régionale des pensions de Versailles a jugé que le chiffre à prendre en compte pour l'infirmité de séquelles de contusion du globe oculaire gauche était le taux définitif de pension de 20 %, concédé le 17 avril 1992 après application de l'arrondi prévu à l'article L. 9 et par application des dispositions citées ci-dessus du troisième alinéa de l'article 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de prendre en compte le degré réel d'invalidité correspondant à l'infirmité, la cour régionale des pensions de Versailles a commis une erreur de droit. Par suite, la ministre des armées est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 7. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que M.A..., qui ne bénéficie pas d'un droit acquis au maintien du taux de 20 % concédé après application de l'arrondi prévu aux dispositions de l'article L. 9 pour le calcul de la pension dont il sollicitait la révision, n'est pas fondé à soutenir que la ministre des armées aurait dû prendre en compte ce taux pour l'infirmité principale de séquelles de contusion du globe oculaire gauche. 8. Ainsi, la ministre des armées est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions de Nanterre a annulé l'arrêté ministériel du 13 janvier 2015 et lui a enjoint de calculer à nouveau la pension de M.A.... 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 24 octobre 2017 de la cour régionale des pensions de Versailles et le jugement du 24 janvier 2017 du tribunal des pensions de Nanterre sont annulés. Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal des pensions de Nanterre est rejetée. Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées et à M. B... A....ECLI:FR:CECHS:2019:416864.20190626
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 28/06/2019, 422920
Vu la procédure suivante : M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 643 000 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices résultant de l'accident de service dont il a été victime. Par un jugement n° 1502165/5-1 du 11 février 2016, le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à M. B...la somme de 24 500 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2014 et de la capitalisation des intérêts, et a rejeté le surplus des conclusions de M.B.... Par un arrêt n° 16PA01283 du 5 juin 2018, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la ministre des armées ainsi que l'appel incident de M.B.... Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 3 août 2018 et 18 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M.B.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B...;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces soumises au juge du fond que M.B..., caporal au sein du régiment d'infanterie de chars de marine de Poitiers, affecté sur la base opérationnelle avancée de Zouar au Tchad, a été blessé par des éclats de balles à la tête, le 7 avril 2012, à l'âge de 26 ans, à la suite d'une erreur de manipulation de son arme par un autre militaire qui a été reconnu coupable des chefs de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois, d'usage illicite de stupéfiants et de violation de consignes par militaire, par un jugement correctionnel du tribunal de grande instance de Paris du 1er avril 2014. M. B...a obtenu le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux de 40 %, à compter du 18 juillet 2012. Il a également présenté une demande d'indemnisation des préjudices subis, qui a été rejetée par le ministre de la défense. Par un jugement du 11 février 2016, le tribunal administratif de Paris, saisi par M.B..., a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 24 500 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant pour lui de cet accident. Par un arrêt du 5 juin 2018, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la ministre des armées contre ce jugement, ainsi que l'appel incident formé par M. B...tendant à ce que le montant de l'indemnité soit porté à la somme de 789 724 euros. La ministre des armées se pourvoit en cassation contre cet arrêt. 2. Aux termes de l'article L. 4123-2 du code de la défense : " Les militaires bénéficient des régimes de pensions ainsi que des prestations de sécurité sociale dans les conditions fixées par le code des pensions civiles et militaires de retraite, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et le code de la sécurité sociale ". Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors applicable : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". 3. En instituant la pension militaire d'invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires victimes d'un accident de service peuvent prétendre, au titre de l'atteinte qu'ils ont subie dans leur intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe à l'Etat de les garantir contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur mission. Toutefois, si le titulaire d'une pension a subi, du fait de l'infirmité imputable au service, d'autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre l'Etat, dans le cas notamment où l'accident serait imputable à une faute de nature à engager sa responsabilité. 4. Pour déterminer si l'accident de service ayant causé un dommage à un militaire est imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, de sorte que ce militaire soit fondé à engager une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale par l'Etat de l'ensemble du dommage, il appartient au juge administratif, saisi de conclusions en ce sens, de rechercher si l'accident est imputable à une faute commise dans l'organisation ou le fonctionnement du service. 5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour retenir l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, la cour administrative d'appel de Paris s'est bornée à relever que l'accident dont a été victime M. B...trouvait sa cause dans la faute commise par un autre militaire, qui a procédé au nettoyage de son arme sans respecter les consignes de sécurité applicables, et que cette faute, commise sur les lieux et durant le temps du service, avec une arme de service, présentait malgré sa gravité un lien avec le service suffisant à engager la responsabilité de l'Etat. En déduisant de la seule circonstance que la faute personnelle commise par cet autre militaire avait un lien avec le service que cette faute était de nature à engager la responsabilité de l'Etat, sans rechercher si l'accident de service dont a été victime M. B... était imputable à une faute commise par l'administration dans l'organisation ou le fonctionnement du service, la cour a commis une erreur de droit. 6. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la ministre des armées est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 5 juin 2018 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris. Article 3 : Les conclusions formées par M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées et à M. A... B....ECLI:FR:CECHR:2019:422920.20190628
Conseil d'Etat