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CAA de PARIS, 8ème chambre, 31/01/2022, 20PA03407, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... G... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision de la ministre des armées du 21 février 2017 rejetant sa demande du 10 février 2016 tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation des infirmités " 1. Psychosyndrome post-traumatique ", " 2. Séquelles de blessure abdominale par balle. Colectomie transverse partielle " et " 3. Séquelles douloureuses de fracture de l'apophyse transverse de L3. Sciatalgies gauches. Limitation de la flexion du tronc " et au bénéfice d'une majoration pour assistance par une tierce personne. Par un jugement n° 1925008/5-3 du 16 septembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par un recours enregistré le 16 novembre 2020, M. G..., représenté par Me Nataï, demande à la Cour : 1°) d'ordonner une expertise aux fins de fixer le taux d'aggravation correspondant aux infirmités dont il souffre et de se prononcer sur la nécessite de l'assistance d'une tierce personne à titre permanent ou non suite à l'aggravation de son état de santé ; 2°) d'annuler le jugement n° 1925008/5-3 du 16 septembre 2020 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler la décision du ministre de la défense du 21 février 2017 ; 3°) de faire droit à sa demande du 10 février 2016 tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de ses trois infirmités. Il soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il a subi une aggravation de ses infirmités et que cette aggravation est la conséquence directe des blessures constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée et qu'il nécessite l'assistance d'une tierce personne ; - il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il a considéré à tort que le ministre de la défense n'avait pas commis d'erreur de droit en refusant de lui octroyer la majoration pour tierce personne prévue à l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par un mémoire en défense enregistré le 11 février 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. G... et à la confirmation de la décision du ministre de la défense du 21 février 2017. Elle soutient que : - la requête d'appel est irrecevable dès lors qu'en se bornant à reproduire intégralement et exclusivement le texte du mémoire de première instance, elle méconnaît les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; - les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Collet, - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. G..., né le 1er mars 1952 en Tunisie, de nationalité française, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 65 % concédée par un arrêté du 3 janvier 2005 à compter du 5 décembre 2003 au titre des infirmités liées aux blessures reçues en tant que victime civile d'un attentat terroriste le 5 novembre 2000 en Israël " 1. Psychosyndrome post-traumatique ", " 2. Séquelles de blessure abdominale par balle. Colectomie transverse partielle " et " 3. Séquelles douloureuses de fracture de l'apophyse transverse de L3. Sciatalgies gauches ". Le 10 février 2016, il a sollicité la révision de sa pension pour aggravation et le bénéfice d'une majoration pour assistance par une tierce personne. Le ministre de la défense a, par décision du 21 février 2017, rejeté sa demande aux motifs qu'aucune aggravation n'a été constatée et que les seules infirmités pensionnées ne le mettent pas dans l'obligation de recourir à l'aide constante d'une tierce personne pour accomplir les actes les plus nombreux se répartissant tout au long de la journée et lui permettant d'assurer sa vie courante. Une expertise avant-dire droit a été ordonnée par le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris, confiée aux docteurs E..., B... et au professeur Peretti, lesquels ont déposé leur rapport le 31 juillet 2019. Par jugement n° 1925008/5-3 du 16 septembre 2020, dont M. G... relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sur l'aggravation des infirmités dont souffre M. G... : 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, applicable à la date de la demande de révision de la pension : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif ". Il résulte de ces dispositions, nonobstant la circonstance que, pour l'exercice de son office, le juge du contentieux des pensions militaires d'invalidité statue en plein contentieux, que lorsque le titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour infirmité sollicite sa révision du fait de l'aggravation de ses infirmités, l'évolution du degré d'invalidité s'apprécie à la date du dépôt de la demande de révision de la pension, laquelle lie le contentieux ultérieur. 3. Il résulte de l'instruction que pour solliciter le 10 février 2016 la révision de la pension militaire d'invalidité qui lui a été concédée par arrêté du 3 janvier 2005 au taux de 65 %, M. G... a produit un certificat médical du 29 mai 2016, postérieur à sa demande, qui mentionne son incapacité totale de travailler depuis 2014 ainsi que les différents symptômes dont il se plaint sans toutefois les accompagner d'une comparaison par rapport à son état antérieur ayant conduit à l'attribution par arrêté du 3 janvier 2005 d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 65 % qui permettrait d'établir la réalité de l'aggravation alléguée. Il produit également un certificat médical établi le 30 octobre 2016 par le docteur C... qui relate les pathologies dont il souffre sans toutefois mentionner d'aggravation de son état par rapport à la situation antérieure et sans qu'aucun examen médical précis ne soit produit sur le plan orthopédique, digestif et psychologique. Par ailleurs, est annexée à ce certificat une enquête médicale signée par le même médecin qui, s'agissant du pronostic d'évolution, porte la mention " non amélioration probable " et s'agissant de l'autonomie indique qu'il peut tout faire seul mais qu'il est sujet à des malaises, chutes et crises qui impliquent une surveillance constante et que l'assistance d'une tierce personne n'est pas nécessaire de manière constante. Les certificats médicaux établis les 7 septembre 2017, 18 décembre 2018 et 11 juin 2019 par son médecin de famille, le docteur D..., et le 16 décembre 2018 par le docteur A..., psychothérapeute, ne peuvent pas être pris en compte dès lors qu'ils mentionnent une aggravation récente qui est datée postérieurement à la demande de révision et qui ne peut être regardée par les termes employés comme révélant une situation antérieure. 4. Par ailleurs, il ressort du rapport du 31 juillet 2019 de l'expertise confiée aux docteurs B... et E... et au professeur Peretti, et qui a été réalisée sur pièces, le requérant résidant à l'étranger, que, s'agissant de l'infirmité " 1. Psychosyndrome post-traumatique ", le professeur Peretti a relevé que si le docteur A... indique " un suivi depuis 2015 " en lien avec les faits ayant donné lieu au bénéfice de la pension militaire d'invalidité, aucune évaluation objective de ce psychosyndrome post-traumatique n'a été effectuée et il en conclut au maintien au taux de 30 %, de cette infirmité. S'agissant ensuite de l'infirmité " 2. Séquelles de blessure abdominale par balle. Colectomie transverse partielle ", le docteur B... précise que concernant les lésions viscérales initiales (plaie du colon entraînant colectomie droite et colostomie, puis rétablissement de continuité digestive), aucun nouvel élément ne permet de formuler une quelconque aggravation et que concernant les lésions de la paroi abdominale (laparotomie d'urgence, puis réintervention pour fermeture de colostomie et enfin cure d'éventration), il conclut qu'il n'est pas évoqué de nouvelle plainte fonctionnelle en relation. Enfin, s'agissant de l'infirmité " 3. Séquelles douloureuses de fracture de l'apophyse transverse de L3. Sciatalgies gauches. Limitation de la flexion du tronc ", le docteur E... relève qu'aucun document médical ne permet de retrouver un examen clinique du rachis lombaire en testant les mobilités, l'éventuel signe de Lasègue permettant de confirmer la sciatique, un examen neurologique des membres inférieurs et que les pièces présentées font une description des plaintes mais ne s'accompagnent pas d'examen médical précis produit sur le plan orthopédique, digestif et psychologique. Les trois experts concluent en indiquant qu'aucun signe objectif d'aggravation n'a été relevé. 5. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que, conformément aux dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dès lors que les éléments médicaux produits de part et d'autre ne montrent pas, par comparaison avec son état antérieur, l'existence d'une aggravation des trois infirmités pour lesquelles il bénéficie déjà d'une pension militaire d'invalidité et dont il demande la révision, M. G... n'a pas droit à la révision de la pension militaire d'invalidité dont il bénéficie au taux de 65 % à titre définitif depuis le 5 décembre 2003 concédée par un arrêté du 3 janvier 2005 pour les trois infirmités précitées. Par suite, la décision du ministre de la défense du 21 février 2017 n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Sur la demande de majoration pour assistance par tierce personne : 6. Aux termes de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version alors applicable : " Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels de la vie ont droit à l'hospitalisation, s'ils la réclament. En ce cas, les frais de cette hospitalisation sont prélevés sur la pension qui leur est concédée. S'ils ne reçoivent pas ou s'ils cessent de recevoir cette hospitalisation et si, vivant chez eux, ils sont obligés de recourir d'une manière constante aux soins d'une tierce personne, ils ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les infirmités qui doivent être prises en considération pour apprécier si un invalide remplit les conditions spéciales d'invalidité auxquelles le bénéfice de l'hospitalisation ou de la majoration est subordonné sont exclusivement celles qui ouvrent droit à pension au profit de l'intéressé. 7. Si M. G... soutient que l'aggravation de son état de santé nécessite, depuis 2015 de recourir à l'assistance d'une tierce personne, il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, que l'aggravation des trois infirmités pour lesquelles il bénéficie d'une pension militaire d'invalidité soit établie. Par ailleurs, l'attestation rédigée par son épouse le 16 mai 2017, postérieurement à la demande de bénéfice de la majoration pour assistance par tierce personne prévue par l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, n'est pas davantage de nature à elle seule à établir la réalité d'un tel besoin. Il suit de là que la décision du ministre de la défense du 21 février 2017 n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. 8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la ministre des armées, que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense du 21 février 2017. Par suite, sa requête doit être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. G... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... G... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Collet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2022. La rapporteure, A. COLLET Le président, R. LE GOFF La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20PA03407
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de PARIS, 8ème chambre, 31/01/2022, 20PA02686, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... D... a demandé au Tribunal des pensions de Papeete d'annuler la décision de la ministre des armées du 19 décembre 2018 rejetant sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ". Par jugement n° 1900409 du 16 juin 2020, le Tribunal administratif de la Polynésie française, auquel la demande a été transmise en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018, a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 12 septembre 2020 et 4 décembre 2021, M. D..., représenté par Me Neuffer, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1900409 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de la Polynésie française ; 2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 19 décembre 2018 ; 3°) d'ordonner une expertise pour préciser les aggravations intervenues depuis son accident et établir le taux de son invalidité ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - son état de santé s'est dégradé, que son taux d'invalidité est supérieur à 10 % et qu'ainsi le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; - le rappel de sa lombalgie a uniquement pour but d'étayer le faisceau d'indices en vue de permettre de faire droit à sa demande. Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. D... et à la confirmation du jugement n° 1900409 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de la Polynésie française. Elle soutient que : - la requête d'appel de M. D... est irrecevable en ce qui concerne les séquelles de traumatisme du dos en raison de l'abandon de ses prétentions pour cette infirmité avant même l'expertise diligentée par l'administration pour cette affection et du fait qu'il ne s'est pas prévalu de cette infirmité en première instance ; - le requérant n'a produit aucun document de nature à remettre en cause le taux de 10 % retenu à la date de sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ". Par ordonnance du 23 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 novembre 2021 à 12h. Par ordonnance du 15 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été reportée au 16 décembre 2021 à 12h. Un mémoire a été enregistré le 5 janvier 2022 pour la ministre des armées, après la clôture de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Collet, - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. E... D..., né le 10 novembre 1957, s'est engagé dans la Légion étrangère en 1977 et a servi jusqu'à sa radiation des contrôles le 8 juillet 1989. Par une demande enregistrée le 16 septembre 2016, il a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre d'une blessure survenue en service le 18 août 1983 et a précisé, dans son courrier du 2 octobre 2017 reçu le 13 décembre suivant, que cette demande concernait une infirmité à son genou droit. Un rejet de sa demande lui a été opposé par la ministre des armées par une décision du 19 décembre 2018. Par jugement n° 1900409 du 16 juin 2020, dont M. D... relève appel, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. Sur les droits à pension militaire d'invalidité de M. D... : 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en vigueur à la date de la demande de bénéfice de la pension, le 27 septembre 2016 : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". Aux termes de l'article L. 4 du même code alors en vigueur : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage ". 3. M. D..., qui avait rappelé dans sa requête d'appel avoir commencé à souffrir du dos à la suite d'une chute lors d'un exercice, a précisé dans ses dernières écritures qu'il s'agissait d'un rappel de faits destiné à étayer le faisceau d'indices en vue de permettre de faire droit à sa demande de pension, laquelle concerne l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ". La Cour n'a donc pas à se prononcer sur cette infirmité. S'agissant de l'infirmité " séquelles de traumatisme du genou droit (...) " : 4. Il résulte de l'instruction que M. D... a produit, à l'appui de sa demande de pension militaire d'invalidité enregistrée le 16 septembre 2016, un certificat médical établi par le docteur A... le 27 août 2016 mentionnant une douleur du genou droit côté interne et une gêne à la marche et à la flexion. Il a ensuite été examiné le 1er juin 2018, à la demande de la ministre des armées, par le docteur C..., chirurgien orthopédiste. Celui-ci a relevé que M. D... " est gêné par l'instabilité du genou droit avec une gonarthrose très limitée et uniquement interne pour laquelle se discute un traitement chirurgical dont on peut espérer une amélioration très sensible. L'avenir lointain de ce genou est pourtant sombre et il aura sans doute une prothèse de genou dans les dix ans à venir. L'examen de ce genou trouve une articulation normalement mobile sans flexum ", ce qui l'a conduit à conclure, à la date de son examen, à un taux d'invalidité inférieur à 10 % pour ces séquelles qui sont liées à un accident survenu en service le 18 août 1983 à Collioure, appréciation confirmée par le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité de la sous-direction des pensions, dans son avis émis le 12 juillet 2018. 5. Si M. D... conteste ce taux d'invalidité et soutient qu'il a produit des documents médicaux récents qui font état d'aggravations et de douleurs complémentaires, toutefois l'appréciation de son état de santé à la date la plus proche de sa demande, soit le 16 septembre 2016, ne révèle pas de telles constatations médicales. En effet, si les certificats médicaux des docteurs B... et Petitzon mentionnent que la lésion du ligament croisé antérieur consécutive à la grave entorse de 1983 n'a pas été traitée, cette indication ne permet pas de contredire utilement les conclusions précitées du docteur C... et d'établir qu'à la date de sa demande de bénéfice de la pension militaire d'invalidité, son taux d'invalidité ne serait pas inférieur à 10 %. La production du certificat médical non daté établi par le remplaçant du docteur B..., mentionnant une radiographie réalisée en 2019 et montrant une méniscocalcose discrète latérale et une gonarthrose modérée fémoro-tibiale interne droite déjà existante selon les comptes rendus d'échographie et de radiologie du 15 juillet 2016, ne permettent pas davantage de contredire le taux d'invalidité retenu par la ministre des armées dans sa décision du 19 décembre 2018. Enfin, si M. D... se prévaut du certificat médical établi le 12 août 2020 par le docteur C..., lequel indique que depuis l'expertise réalisée le 1er juin 2018, " il existe une dégradation de son genou gauche qui justifie de reconsidérer l'expertise car le taux dépasse à présent les 10 % ", cette évolution est postérieure au 27 septembre 2016, qui est la date de sa demande de pension militaire d'invalidité à laquelle doit être appréciée l'existence et l'ampleur de l'infirmité alléguée. Il suit de là que cette évolution ne saurait être prise en compte dès lors que l'expertise précitée, réalisée le 1er juin 2018 par le docteur C..., à la date la plus proche de cette demande, ne révèle pas de telles constatations médicales. 6. Il résulte de ces différents éléments que, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise, dès lors qu'il n'est pas établi qu'à la date de la demande de bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour " séquelles de traumatisme du genou droit (...) ", le 16 septembre 2016, cette infirmité résultant d'une blessure en service entraînait un taux d'invalidité d'au moins 10 %, c'est sans entacher le jugement attaqué d'une erreur manifeste d'appréciation que les premiers juges ont rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2018 de la ministre des armées. 7. M. D... peut, s'il s'y croit fondé, se prévaloir de cette évolution de son état de santé postérieure à sa demande en formant une nouvelle demande de pension militaire d'invalidité auprès de la ministre des armées. 8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris par voie de conséquence ses conclusions relatives aux dépens et aux frais liés à l'instance. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient : - M. Le Goff, président, - M. Ho Si Fat, président assesseur, - Mme Collet, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2022. La rapporteure, A. COLLET Le président, R. LE GOFF La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 20PA02686
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de MARSEILLE, 9ème chambre, 25/01/2022, 19MA04287, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 17 février 2017 par laquelle la société Orange a prononcé sa retraite pour invalidité en tant que l'imputabilité au service de son état n'a pas été reconnu. Par un jugement n° 1701373 du 28 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 9 septembre 2019, Mme B..., représentée par Me Salies, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 28 juin 2019 du tribunal administratif de Nice ; 2°) d'annuler la décision du 17 février 2017 ; 3°) subsidiairement, d'ordonner une expertise avec pour mission d'examiner si sa retraite pour invalidité est imputable au service ; 4°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a été placée en congé maladie en raison d'un burn out ; les fonctions de " conseiller clients pro " qui lui ont été confiées à partir de mai 2000 sur une plateforme à Toulon la soumettaient à beaucoup de pression et à des objectifs en termes de ventes très difficiles à atteindre ; elle a été victime d'une forte dépression qui trouve son origine dans son activité professionnelle eu égard aux risques psychosociaux auxquels elle a été exposée. La procédure a été communiquée à la société orange, qui n'a pas produit de mémoire en défense. Une ordonnance du 2 septembre 2021 a fixé la clôture de l'instruction au 28 septembre 2021, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congé maladie des fonctionnaires ; - le décret n° 2014-107 du 4 février 2014 relatif à la création du comité médical national et de la commission de réforme nationale de la société anonyme Orange ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Portail, - et les conclusions de M. Roux, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... était employée par la société Orange, sous statut de fonctionnaire de l'Etat. Elle a été admise à la retraite pour invalidité aux termes de ses congés de maladie statutaires. Par une décision du 17 février 2017, la société Orange a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette invalidité. La requérante relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées (...) en service (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ". Aux termes de l'article L. 31 du même code : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat (...) ". 3. Antérieurement aux dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 qui ne sont applicables qu'aux maladies ou aux accidents survenus postérieurement à leur entrée en vigueur, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. Mme B... soutient qu'elle a été placée en congé maladie en raison d'un syndrome d'épuisement professionnel ou " burn out ", car les fonctions de " conseiller clients pro " qui lui ont été confiées à partir de mai 2000 sur une plateforme à Toulon l'auraient soumise à une pression de sa hiérarchie en termes d'objectifs de ventes très difficiles à atteindre, à l'origine de sa dépression. Toutefois, la requérante se borne à produire, au soutien de ses allégations, le certificat du médecin d'un service de psychiatrie qui souligne qu'au cours de leurs entretiens psychologiques, Mme B... a souvent évoqué ses difficultés professionnelles en tant que commerciale, consistant dans des pressions et harcèlements moraux pendant dix ans, et qu'il est probable que ces difficultés ont aggravé ses difficultés psychologiques. Alors que Mme B... n'apporte aucune précision sur les conditions de travail qui ont été les siennes au sein de la société Orange et les circonstances dans lesquelles elle a été placée en congé maladie, cette simple supposition d'un médecin n'est pas de nature à établir l'existence d'un lien direct entre cette pathologie et l'exercice de ses fonctions ou des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause ou à provoquer son aggravation. La commission de réforme a estimé d'ailleurs dans son avis du 9 février 2017 que la pathologie de l'intéressée est sans lien avec son activité professionnelle. 5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 6. La société Orange n'étant pas partie perdante, les conclusions de Mme B... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la société Orange. Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022 où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente de la Cour, - M. Portail, président assesseur, - Mme Carassic, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2022. 2 N°19MA04287
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 18/01/2022, 21DA00258, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation de la décision du 4 juin 2018 de la ministre des armées rejetant sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité et tendant à ce que soit fixé à 45% le taux de son invalidité en ce qui concerne les séquelles du traumatisme du genou droit dont il souffre, à compter du 28 décembre 2016. Par un jugement n° 1909453 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande et mis à la charge de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle les frais et honoraires de l'expertise judiciaire liquidés et taxés à la somme de 600 euros. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 5 février 2021, M. B..., représenté par Me Evelyne Ingwer, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 4 juin 2018 de la ministre des armées ; 3°) de fixer le taux de son invalidité à 45% à compter du 28 décembre 2016, date de sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ; - le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Muriel Milard, première conseillère, - et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., né le 22 août 1948, admis en qualité d'apprenti mécanicien à compter du 4 janvier 1965, radié des cadres de l'armée de l'air à compter du 28 février 1994 au grade d'adjudant-chef, s'est vu accorder, par une décision du 18 novembre 2013, une pension militaire d'invalidité au taux de 35 % pour une infirmité résultant de séquelles de traumatisme du genou droit à la suite d'une blessure reçue par le fait du service le 14 janvier 1969, hors guerre. Le 28 décembre 2016, M. B... a demandé la révision de sa pension pour une aggravation de son infirmité. Par une décision du 4 juin 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. B... relève appel du jugement du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la révision de sa pension. 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en vigueur à la date de la demande de révision de la pension de M. B..., devenu l'article L. 154-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 p 100 au moins du pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " Il résulte de ces dispositions que l'aggravation ne peut être prise en compte que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable à la maladie ou la blessure constitutive de l'infirmité pour laquelle la pension a été accordée. L'évolution des infirmités pensionnées s'apprécie sur une période comprise entre l'octroi de la pension et la date de dépôt de la demande de révision, soit, en l'espèce, entre le 18 novembre 2013 et le 28 décembre 2016. 3. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'expertise diligentée à la suite du jugement avant-dire-droit du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Lille du 5 juin 2020, que M. B... a fait l'objet en mars 1981 d'une arthotomie et d'une ablation de corps étrangers articulaires et qu'il a un handicap en rapport avec des luxations rotuliennes, des épisodes d'instabilité et des gonalgies. L'expert a également relevé que l'intéressé avait subi en mars 1991 un traumatisme au même genou droit résultant d'un mécanisme d'entorse lors de la traversée d'une chaussée à Reims sur un passage clouté mouillé, alors que l'intéressé n'était pas en service, qui a nécessité une intervention chirurgicale le 12 avril 1991 consistant en une réaxation tubérositaire avec ostéosynthèse pour recentrage de l'appareil fémoro-patellaire. L'expert constate que l'entorse dont l'intéressé a été victime en mars 1991 a été à l'origine d'une dégradation progressive de l'articulation du genou droit, avec un phénomène de dégénérescence articulaire ayant conduit à une gonarthrose justifiant la mise en place prochaine d'une prothèse de ce genou. Il résulte ainsi des conclusions du rapport d'expertise qu'à supposer que la fragilité du genou droit de M. B... ait favorisé cette aggravation, celle-ci n'est, en tout état de cause, pas exclusivement imputable à la maladie ou la blessure constitutive de l'infirmité pour laquelle la pension a été accordée et ne justifie donc pas que le taux de cette infirmité soit désormais fixé à 45 %. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande de révision pour aggravation de sa pension d'invalidité. 4. Il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des conclusions de la requête de M. B... doit être rejeté. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des armées. La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, Anne-Sophie Villette 3 N°21DA00258
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Douai
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 18/01/2022, 21DA00137, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires de Lille puis au tribunal administratif de Lille l'annulation de la décision du 21 février 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de son invalidité et de fixer le taux d'invalidité, à compter du 26 novembre 2015, à 30 %. Par un jugement n° 1909465 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. B... et mis à la charge définitive de l'Etat, au titre de l'aide juridictionnelle, les frais et honoraires de l'expertise judiciaire, liquidés et taxés pour un montant de 600 euros. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2021, M. B..., représenté par Me Evelyne Ingwer, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de faire droit à ses demandes de première instance. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère, - et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 16 août 1951, a subi le 4 mai 1972, au cours de son service militaire, un traumatisme du genou gauche avec amyotrophie du quadriceps et arthrose secondaire, pour lequel il s'est vu accorder une pension militaire d'invalidité au taux de 20 % qui lui a été concédée à titre définitif à compter du 4 mai 2007. Par lettre du 24 novembre 2015, reçue le 26 novembre 2015, l'intéressé a demandé la révision de sa pension pour l'aggravation de son infirmité. Par une décision du 21 février 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. B... a demandé l'annulation de cette décision au tribunal des pensions militaires de Lille qui, par un jugement avant dire droit du 28 octobre 2019, a ordonné une expertise et a transmis le jugement de l'affaire au tribunal administratif de Lille. L'expert désigné par le président du tribunal administratif de Lille a remis son rapport le 26 juin 2020. Par un jugement du 8 décembre 2020, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. B... et mis à la charge définitive de l'Etat, au titre de l'aide juridictionnelle, les frais et honoraires de l'expertise judiciaire. 2. Aux termes de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, alors en vigueur : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. (...) La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le degré d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 % au moins du pourcentage antérieur. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la pension d'invalidité concédée à titre définitif dont la révision est demandée pour aggravation n'est susceptible d'être révisée que lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités se trouve augmenté d'au moins dix points. 3. En l'espèce, il résulte de l'instruction et en particulier des conclusions de l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Lille que, dans les suites de l'arthroplastie totale du genou gauche que M. B... a subie le 25 septembre 2015, l'infirmité dont souffre l'intéressé et qui a justifié la concession de la pension militaire d'invalidité en litige, a été aggravée par l'apparition d'une instabilité elle-même génératrice de phénomènes douloureux mais avec l'absence d'ankylose et de cal vicieux, l'expert ayant conclu à une aggravation du taux d'infirmité de cinq points, portant le taux d'invalidité de M. B... à 25 %. M. B..., qui se borne à faire valoir l'importance de ses crises douloureuses, déjà prises en compte par l'expert judiciaire dans son évaluation, n'a produit, ni devant les premiers juges, ni devant la cour, d'éléments médicaux de nature à remettre en cause l'évaluation de l'aggravation de son invalidité. Dans ces conditions, l'augmentation du taux d'invalidité de M. B..., limitée à cinq points, ne lui ouvre aucun droit à révision de la pension militaire d'invalidité qui lui a été concédée à titre définitif. Si M. B... soutient que ses crises douloureuses évaluées à 6 sur une échelle de 10 sont importantes et l'obligent à un repos forcé et à la prise d'un traitement spécifique, ces allégations ne sont pas de nature à remettre en cause le taux retenu par l'expert judiciaire qui a bien pris en compte ces circonstances dans le cadre de son expertise. Dans ces conditions, c'est à bon droit que la ministre de la défense a rejeté la demande de révision de pension présentée par M. B.... 4. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité et, l'intéressé ayant été admis à l'aide juridictionnelle, mis à la charge définitive de l'Etat les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 600 euros. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience publique du 4 janvier 2022, à laquelle siégeaient : - Mme Anne Seulin, présidente de chambre, - Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, - Mme Anne Khater, première conseillère. La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière Anne-Sophie Villette 3 N°21DA00137
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de NANCY, 2ème chambre, 31/12/2021, 19NC02326, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions implicites nées du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur ses demandes formées les 3 août 2001, 14 février et 16 juin 2002 tendant à son admission à la retraite à compter du 25 janvier 2002 pour invalidité au taux de 83,20 % et à l'attribution d'une rente viagère d'invalidité ainsi que d'une pension civile d'invalidité au taux de 50 % complétée de la majoration spéciale définitive au titre de l'assistance journalière d'une tierce personne et des rappels ou arrérages dus à compter du 25 janvier 2002, ces conclusions en annulation étant assorties de conclusions à fin d'injonction et de conclusions à fin d'indemnité. Par un jugement n° 1604215 du 3 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 juillet 2019, 21 février et 26 juin 2020, M. A... C..., représenté par Me Welzer, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 3 mai 2019 ; 2°) d'annuler les décisions implicites nées du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur ses demandes formées les 3 août 2001, 14 février et 16 juin 2002 tendant à son admission à la retraite à compter du 25 janvier 2002 pour invalidité au taux de 83,20 % et à l'attribution d'une rente viagère d'invalidité ainsi que d'une pension civile d'invalidité au taux de 50 % complétée de la majoration spéciale définitive au titre de l'assistance journalière d'une tierce personne et des rappels ou arrérages dus à compter du 25 janvier 2002 ; 3°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande d'indemnité qui a été réévaluée à 200 000 euros, augmentée de 870 euros pour les mois suivants revalorisés et assortis des intérêts de retard, moratoires, compensatoires et de capitalisation à compter du 25 janvier 2002 jusqu'à la date de la régularisation de sa situation administrative par l'administration en réparation des préjudices moraux, psychologiques et financiers et d'autres natures consécutifs aux décisions illégales de l'administration de refuser irrégulièrement de l'admettre à la retraite le 25 janvier 2002 pour incapacité permanente d'exercer ses fonctions et autre travail, de lui attribuer une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension civile d'invalidité, et de lui attribuer la majoration spéciale au titre de l'assistance journalière d'une tierce personne ; 4°) d'annuler par voie de conséquence la décision du 27 octobre 2006 prononçant sa radiation des cadres à compter du 9 février 2002 ; 5°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de le radier des cadres pour admission à la retraite à compter du 25 janvier 2002 pour invalidité dans les conditions qu'il demande ; 6°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur et au ministre de l'action et des comptes publics de lui attribuer une pension d'invalidité au taux de 50 % de son dernier traitement, une rente viagère d'invalidité au taux de 83,20 % et la majoration spéciale au titre de l'assistance d'une tierce personne, ainsi que le versement des arrérages estimés à 400 000 euros pour la période à compter du 25 janvier 2002, revalorisés et assortis des intérêts de retard, moratoires, compensatoires et de capitalisation ; 7°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 200 000 euros augmentée de 870 euros pour les mois suivants revalorisés et assortis des intérêts de retard, moratoires, compensatoires et de capitalisation à compter du 25 janvier 2002 jusqu'à la date de la régularisation de sa situation par l'administration en réparation des troubles moraux, psychologiques, et financiers ; 8°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : Sur la régularité du jugement : - le jugement méconnaît le principe du contradictoire faute pour le tribunal d'avoir sollicité auprès du ministère de l'intérieur des justificatifs à l'appui de ses allégations erronées ; Sur le " bien-fondé du jugement " : - sa requête est bien recevable, l'autorité de la chose jugée n'y faisant pas obstacle ; - en raison de son incapacité permanente à l'exercice de ses fonctions au 25 janvier 2002, les décisions attaquées méconnaissent les dispositions des articles L. 24-2°, L. 27, L. 28 et L. 30 du code des pensions civiles et militaires de retraite, sans qu'il y ait lieu de rechercher une aggravation de son état postérieurement à l'avis du comité médical supérieur de juin 2001 ; - il est fondé à demander la majoration au titre de l'assistance d'une tierce personne à compter du 25 janvier 2002 en application de l'article R 43 du code des pensions civiles et militaires ; - l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires ne lui est pas opposable puisqu'il n'a pas sollicité la révision de sa pension civile de retraite sur le fondement des articles L. 4-1° et L. 25-1° du code des pensions civiles et militaires mais sur le fondement des articles L. 24-12°, L. 27, L. 28 et L.30 ; - les décisions attaquées sont entachées d'un vice de procédure, faute pour la commission de réforme d'avoir été saisie conformément aux dispositions de l'article 13 du décret du 14 mars 1986 ; - l'illégalité des décisions attaquées constitue une faute de l'Etat justifiant une indemnité de 200 000 euros augmentée de 870 euros pour les mois suivants jusqu'à ce que l'administration régularise sa situation par sa mise à la retraite à la date du 25 janvier 2002 pour invalidité imputable au service, avec l'attribution d'une rente viagère d'invalidité sur la base de son taux d'invalidité de 83,20 % et de son traitement au 10ème échelon cumulable avec une pension au taux de 50 % sur le 10ème échelon rémunérant ses services de sous-brigadier de police avec majoration spéciale et son renouvellement au titre de l'assistance d'une tierce personne, le versement des arrérages estimés à 400 000 euros à compter du 25 janvier 2002 revalorisés et assortis des intérêts de retard, moratoires, compensatoires et de capitalisation à compter du 25 janvier 2002. Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 13 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 12 octobre 2021. Un mémoire présenté pour M. C... a été enregistré le 15 novembre 2021, postérieurement à la clôture d'instruction. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-16 du 16 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lambing, - et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... C..., qui exerçait les fonctions de sous-brigadier de la police nationale, a été victime les 27 août 1983, 5 octobre 1987 et 11 mai 1992 d'accidents reconnus imputables au service. Par un arrêté du 20 octobre 1997, le ministre chargé des finances lui a accordé une allocation temporaire d'invalidité au taux de 17 % pour la période du 29 décembre 1993 au 28 décembre 1998 en raison de ces deux derniers accidents en application de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984. Le 19 octobre 1998, M. C... a été victime d'une chute qui a été également reconnue comme imputable au service. Par courrier du 13 décembre 1999, l'administration a indiqué à M. C... que le médecin inspecteur régional l'avait reconnu apte à reprendre ses fonctions dès le 25 novembre 1999 dans un poste administratif et lui a prescrit de rejoindre son poste immédiatement. Sur saisine de M. C..., le comité médical départemental a, par avis du 18 janvier 2000, confirmé son aptitude à reprendre ses fonctions à compter du 25 novembre 1999. Cette décision a été validée par le comité médical supérieur par avis du 26 juin 2001. En dépit des mises en demeure de reprendre son poste sous peine de radiation des cadres des 16 et 31 juillet 2001, M. C... a maintenu sa position en arrêt de travail. Le médecin agréé n'a pas constaté d'aggravation de son état de santé lors de l'analyse de l'état de santé de l'intéressé le 6 septembre 2001. Malgré une ultime mise en demeure du préfet du 29 janvier 2002 restée vaine, le ministre de l'intérieur l'a radié des cadres de la police nationale pour abandon de poste par décision du 25 avril 2002. Cette décision ayant été annulée par arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 4 mai 2006, le ministre a pris une nouvelle décision le 27 octobre 2006 radiant M. C... des cadres de la police nationale pour abandon de poste à compter du 9 février 2002. La légalité de cette décision a été confirmée par un arrêt devenu définitif de la cour administrative d'appel de Nancy du 3 décembre 2009. Par courriers des 3 août 2001, 14 février 2002, 22 novembre 2002, 16 novembre 2006 et 5 octobre 2010, M. C... a demandé au ministre de l'intérieur de lui octroyer une pension civile d'invalidité à un taux de 50 % à compter du 25 janvier 2002 accompagnée d'une rente viagère d'invalidité et de la majoration pour tierce personne avec demande des arrérages estimés à 400 000 euros. Par courrier du 16 juin 2002, M. C... a également demandé une indemnité par mois de retard de 870 euros assortis des intérêts de retard, moratoires, compensatoires et de capitalisation. Par courriers des 16 juin 2002, 20 mars et 16 juin 2007, M. C... a demandé à bénéficier du renouvellement de la majoration spéciale pour l'assistance d'une tierce personne. Enfin, le 27 juin 2016, M. C... a demandé à l'administration une indemnité de 150 510 euros en réparation de tous ses préjudices matériels et moraux au titre de la période du 25 janvier 2002 au 30 juin 2016. Ces demandes ont toutes été implicitement rejetées. M. C... relève appel du jugement du 3 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'ensemble de ces décisions et par voie de conséquence de la décision du 27 octobre 2006 prononçant sa radiation des cadres à compter du 9 février 2002, ainsi que ses conclusions indemnitaires et celles à fin d'injonction. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, l'article L. 5 du code de justice administrative dispose que : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes ". 3. La demande faite à une partie de produire des pièces constitue une mesure d'instruction qui relève de l'office et des pouvoirs propres du juge administratif. Compte tenu de la formulation des moyens soulevés devant lui par M. C..., le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas méconnu son office en n'exigeant pas la communication des pièces évoquées en appel par le requérant dès lors que les premiers juges ont pu estimer disposer des éléments nécessaires pour apprécier si l'autorité administrative avait, à tort, estimé qu'il ne présentait pas d'incapacité permanente de continuer ses fonctions. Il suit de là que M. C... n'est pas fondé à soutenir que, du seul fait de l'absence de mise en œuvre de cette mesure d'instruction, le jugement serait irrégulier. 4. En second lieu, M. C... ne saurait soutenir que le tribunal administratif aurait entaché son jugement d'erreur d'appréciation dès lors que cette critique des motifs du jugement ne concerne pas la régularité du jugement mais son bien-fondé. Sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction : 5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ainsi que du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée. (...) ". Aux termes de l'article L. 28 du même code : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies à l'article L. 30 ter, avec la pension rémunérant les services. (...) / Le montant de la rente d'invalidité est fixé à la fraction du traitement ou de la solde de base définis à l'article L. 15 égale au pourcentage d'invalidité. (...) ". Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. (...) " Aux termes de l'article 63 de la même loi : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. (...) " 6. Il résulte de la combinaison des articles 34 et 63 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente d'exercer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emploi, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. Il appartient à l'autorité compétente de se prononcer sur la situation de l'intéressé au vu des avis émis par le comité compétent, sans être liée par ceux-ci. En l'absence de modification de la situation de l'agent, l'administration a l'obligation de le maintenir en congé de maladie avec plein traitement jusqu'à la reprise de service ou jusqu'à sa mise à la retraite, qui ne peut prendre effet rétroactivement. 7. M. C... soutient qu'en raison de son incapacité permanente de reprendre ses fonctions, il devait être mis à la retraite pour invalidité et bénéficier à ce titre d'une pension civile d'invalidité complétée d'une rente viagère d'invalidité ainsi que du renouvellement de la majoration spéciale pour l'assistance d'une tierce personne qu'il percevait avant sa radiation des cadres pour abandon de poste. 8. Le requérant produit un rapport établi le 25 janvier 2002 par le docteur B..., médecin généraliste agréé par l'administration, qui évalue sa situation à cette date. Après avoir rappelé les séquelles liées aux accidents des 5 octobre 1987, 11 mai 1992 et 19 octobre 1998, ainsi que leurs aggravations en 1994, 1998 et 2001, le médecin procède à un examen clinique de l'intéressé. Il constate une boiterie sévère au genou gauche résultant du pincement de l'articulation, d'une insuffisance veineuse et d'une instabilité ligamentaire et qui occasionne un déficit de mobilité à la hanche. Il estime que les lésions à long terme vont engendrer une aggravation de la gonarthrose fémoro-tibiale et fémoro-patellaire ainsi qu'une aggravation des lésions de l'articulation de la hanche gauche justifiant la poursuite des soins médicaux. S'agissant du rachis cervical et de l'articulation mandibulaire, l'expert considère que le traumatisme cervical résultant de l'accident du 11 mai 1992 a déclenché une arthrose débutante en C0-C1 et C1-C2 et l'apparition d'une hernie discale cervicale le 17 janvier 2000. Il constate des séquelles en lien avec cet accident consistant en des cervicalgies chroniques associées à une névralgie d'Arnold, une névralgie cervico-brachiale gauche avec un déficit moteur au membre supérieur gauche, un déficit de mobilité du cou, un déficit moyen de la force motrice du membre supérieur gauche, un déficit important de la force de serrage, un déficit d'ouverture de la bouche avec une douleur modérée et incessante au niveau de l'articulation temporo-maxillaire gauche accentuée lors de la mastication, des acouphènes aux deux oreilles et une baisse de la vision ainsi que des troubles du sommeil ayant un retentissement sur l'humeur et sur la capacité intellectuelle. Il a précisé également que ces infirmités ne peuvent que s'aggraver à long terme justifiant la poursuite de soins médicaux. Enfin, concernant l'accident de 1998 ayant occasionné des lésions internes intervertébrales et vertébrales et des lésions au sacrum et coccyx, le docteur B... observe un déficit important de la mobilité du rachis lombaire avec une importante limitation des mouvements de flexion, d'hyperextension, de rotations droite et gauche, et de flexions latérales droites et gauche. Il a noté la présence de lombo-sciatalgies persistantes et douloureuses imposant une station allongée à plat dès que la douleur est " au-delà du supportable ", de douleurs sacro-coccygiennes avec une inflammation au niveau de l'articulation de la hanche imposant également une telle station allongée, une impossibilité de marcher sur les talons et les pointes révélant un déficit moteur dans la zone L5/S1, une marche difficile avec canne résultant de déficits musculaires et des troubles du sphincter. Au terme de son raisonnement clinique, le docteur B... conclut qu'au 25 janvier 2002, les infirmités du genou gauche de M. C... entraînent un taux d'invalidité de 30 %, que celles du rachis cervical et de l'articulation mandibulaire entraînent un taux d'invalidité de 40 % et que celles du rachis lombaire, du sacrum et du coccyx entraînent un taux d'invalidité de 60 %. Le requérant produit également des certificats du Dr D..., médecin agréé par l'administration, notamment ceux datés des 23 janvier 2002 et 20 mars 2007, qui indiquent en des termes identiques que M. C... " souffre d'une impotence fonctionnelle articulaire et motrice " l'empêchant de s'accroupir et se relever, de conduire de véhicule, et qui nécessite qu'il soit aidé dans les actes du quotidien et dans ses déplacements. Le praticien conclut que l'état de santé de l'intéressé ne lui permet pas de travailler quel que soit le poste de travail et ce pour une durée indéterminée. 9. Il résulte cependant de l'instruction que le comité médical interdépartemental de Metz a, dans sa séance du 18 janvier 2000, confirmé l'avis du médecin inspecteur régional quant à l'aptitude de M. C... à reprendre ses fonctions depuis le 25 novembre 1999 dans un poste administratif. Par avis du 26 juin 2001, le comité médical supérieur, saisi par l'administration, a également conclu à l'aptitude de l'agent à reprendre ses fonctions dans un poste aménagé. Le requérant conteste avoir été examiné par le médecin inspecteur régional et par le médecin agréé par l'administration qui s'est prononcé le 6 septembre 2001 sur l'absence d'aggravation de son état. Toutefois, à supposer même ces faits établis, il n'est pas justifié que ces praticiens ne pouvaient se prononcer à partir des éléments médicaux mis à leur disposition, dont les certificats médicaux communiqués par l'intéressé à son administration. En outre, la circonstance que le médecin inspecteur régional, qui a donné un avis sur la capacité de M. C... à reprendre ses fonctions sur un poste aménagé, aurait été condamné pénalement à une interdiction définitive d'exercer son métier en raison de faits d'agressions sexuelles, n'enlève rien au caractère probant de son rapport. 10. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, les certificats médicaux dont se prévaut M. C..., qui se bornent à décrire une situation à une date donnée sans constater un incapacité définitive et permanente d'exercer des fonctions dans le poste administratif adapté proposé à l'intéressé par son administration, ne remettent pas en cause les constatations sur la base desquelles ont été rendus les avis du comité médical interdépartemental du 18 janvier 2000 et les avis du médecin conventionné de la police à Epinal et du médecin inspecteur régional du secrétariat général pour l'administration de la police de Metz en date du 15 janvier 2002. Si les séquelles résultant des trois accidents de service sont importantes, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas établi que M. C... ne pourrait pas occuper un poste aménagé en disposant d'aides techniques et humaines afin de lui permettre d'être accompagné dans sa reprise de travail et serait ainsi inapte totalement et définitivement à l'exercice de toute fonction. Par suite, c'est à bon droit que le ministre de l'intérieur a estimé que M. C... ne se trouvait pas dans l'incapacité permanente d'exercer ses fonctions au sens de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Il s'ensuit que le ministre chargé du budget a pu légalement refuser d'attribuer à M. C... une pension civile d'invalidité à un taux de 50 % à compter du 25 janvier 2002, une rente viagère d'invalidité et la majoration spéciale pour l'assistance tierce personne dès lors que le fonctionnaire n'avait pas à être radié des cadres pour une invalidité imputable au service. 11. En second lieu, aux termes de l'article 27 du décret du 14 mars 1986 dans sa rédaction applicable au présent litige : " (...) Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative ne peut prononcer la mise à la retraite d'office d'un agent sans avoir examiné s'il était inapte totalement et définitivement à l'exercice de toute fonction. 12. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que c'est à bon droit que M. C... n'a pas été mis à la retraite pour invalidité. Par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions et soutenir que l'administration était tenue de saisir la commission de réforme. 13. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu d'annuler par voie de conséquence la décision du 27 octobre 2006 prononçant sa radiation des cadres à compter du 9 février 2002. Sur les conclusions indemnitaires : 14. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions instituant ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité. 15. La circonstance que le fonctionnaire victime d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle ne remplit pas les conditions auxquelles les dispositions mentionnées ci-dessus subordonnent l'obtention d'une rente ou d'une allocation temporaire d'invalidité fait obstacle à ce qu'il prétende, au titre de l'obligation de la collectivité qui l'emploie de le garantir contre les risques courus dans l'exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle. En revanche, elle ne saurait le priver de la possibilité d'obtenir de cette collectivité la réparation de préjudices d'une autre nature, dès lors qu'ils sont directement liés à l'accident ou à la maladie. 16. Il résulte de l'instruction que, par courriers des 3 août 2001, 14 février et 16 juin 2002, 16 janvier et 20 mars 2007, M. C... a demandé sa mise à la retraite pour invalidité à compter du 25 janvier 2002, ainsi que l'attribution d'une rente viagère pour invalidité cumulable avec une pension civile d'invalidité, avec la majoration spéciale, l'assistance d'une tierce personne le versement des arrérages estimés à 400 000 euros à compter du 25 janvier 2002 revalorisés et assortis des intérêts de retard, moratoires, compensatoires et de capitalisation à compter du 25 janvier 2002. Eu égard à ce qui a été dit précédemment, le refus de l'administration de mettre M. C... en retraite pour invalidité n'était pas illégal. Par suite, en l'absence de faute de l'administration, le requérant n'est pas fondé à demander la réparation du préjudice financier résultant de l'illégalité des décisions implicites rejetant ses demandes. Il s'ensuit que M. C... ne faisant état d'aucun préjudice moral dans ses écritures, ses conclusions tendant à l'indemnisation du seul préjudice financier résultant de l'illégalité de ces décisions implicites, ne peuvent qu'être rejetées. 17. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté l'ensemble de ses demandes. Sur les frais de justice : 18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, verse à M. C... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. 3 N° 19NC02326
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de NANCY, 2ème chambre, 31/12/2021, 19NC02549, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 10 avril 2017 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 29 mai 2017 par lesquelles le président du département du Territoire de Belfort a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Par un jugement n° 1701688, 1801000 du 13 juin 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 août 2019 et 13 juillet 2020, Mme B... D..., représentée par Me Suissa, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 13 juin 2019 ; 2°) d'annuler cette décision du 10 avril 2017 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 29 mai 2017 ; 3°) d'enjoindre au département du Territoire de Belfort de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de condamner le département du Territoire de Belfort à lui payer une somme totale de 13 500 euros en réparation des préjudices subis, augmentée des intérêts de droit courant à compter du 16 février 2018 et de capitaliser cette somme à l'issue d'une année ; 5°) de mettre à la charge du département du Territoire de Belfort une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la signature apposée sur la décision contestée ne permettait pas d'identifier avec certitude l'auteur de la décision ainsi que sa qualité ; - il n'est pas justifié de la compétence du signataire de la décision attaquée ; - la décision n'est pas motivée en droit ; - la décision lui refusant la reconnaissance d'imputabilité au service de sa maladie méconnaît l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et est entachée d'une erreur d'appréciation ; - elle a subi à compter de l'année 2015 des manquements et des agissements répétés constitutifs de harcèlement moral, qui ont affecté son état de santé et sa situation professionnelle ; - le département a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité quant à la gestion de sa carrière et aux manquements à l'obligation de sécurité et de protection de la santé de ses agents ; - elle a subi des préjudices d'ordre moral et financier à hauteur d'une somme de 13 500 euros. Par un mémoire en défense et des pièces complémentaires, enregistrés les 10 juin 2020 et 18 novembre 2021, le département du Territoire de Belfort conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme D... une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Lambing, - les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique, - et les observations de Me Naudin, représentant Mme D.... Considérant ce qui suit : 1. Mme D... a été recrutée le 9 mai 2005 par le département du Territoire de Belfort en qualité d'agent contractuel. A la suite de la réussite du concours d'attaché territorial, l'intéressée a été titularisée en juin 2010 à ce grade. Par un arrêté du 26 mars 2012, elle a été nommée au poste de directrice de la relation aux habitants. Mme D... a été en congés de maladie du 13 au 29 janvier 2016, du 4 au 25 mars 2016 et du 5 avril au 3 mai 2016. Elle a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de ces arrêts de maladie. Le directeur général des services du département du Territoire de Belfort a, par une décision du 10 avril 2017, refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme D.... Le recours gracieux qu'elle a formé le 29 mai 2017 a été implicitement rejeté. Mme D... relève appel du jugement du 13 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 10 avril 2017 ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 29 mai 2017. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. ". 3. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 10 avril 2017 a été signée par M. C... A..., avec la mention, quant à sa qualité, " pour le président du conseil départemental, le sous-préfet, directeur général des services ". S'il est vrai que cette mention comporte l'indication de son corps d'origine de sous-préfet, il est cependant constant que le courrier portait l'en-tête du conseil départemental du Territoire de Belfort et non d'un service de l'Etat. De plus, eu égard aux fonctions de Mme D..., directrice au sein du conseil départemental, qui avait eu l'occasion d'échanger à plusieurs reprises avec M. A... depuis son arrivée en juillet 2015 en qualité de directeur général des services du département, il ne pouvait y avoir pour cette dernière aucune ambiguïté sur l'identité et les fonctions du signataire de la décision attaquée. Il s'ensuit que, dans les circonstances de l'espèce, l'indication du corps d'origine du directeur général des services dans le cachet ne saurait constituer un vice entachant d'irrégularité la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté. 4. En deuxième lieu, par arrêté n°2016-1104 du 8 juillet 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département le 18 novembre 2016, qui est disponible au public sur le site internet du département, le président du conseil départemental du Territoire de Belfort a délégué sa signature à M. A... en sa qualité de directeur général des services " à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions (...) relevant des attributions de la direction générale des services (...). Cette délégation s'étend en particulier (...) aux décisions relatives à la gestion du personnel placé sous son autorité ". Par suite, le moyen tiré de l'incompétence manque en fait. 5. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " 6. Il résulte de ces dispositions, que la décision refusant à un fonctionnaire le bénéfice des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 relatives aux congés de maladie doit être regardée comme refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, au sens des dispositions du 6° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle est ainsi au nombre des décisions qui, en application de cet article, doivent être motivées. 7. En outre, l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 21 bis aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...) / IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. / VI. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires. " 8. L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 9. Mme D... soutient que la décision est insuffisamment motivée en droit dès lors qu'elle ne vise pas l'ordonnance n°2017-53 du 19 janvier 2017 précitée. Toutefois, il résulte de ce qui vient d'être dit que les dispositions de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 dont se prévaut la requérante n'étaient pas entrées en vigueur. Dès lors, la décision attaquée n'avait pas à s'y référer. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance motivation en droit doit être écarté. 10. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 7 à 9, Mme D... ne saurait se prévaloir d'une présomption d'imputabilité de sa maladie au service, résultant de l'ordonnance n°2017-53 du 19 janvier 2017, qui au demeurant ne s'applique qu'aux maladies désignées par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractées dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. 11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. " 12. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 13. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'un audit organisationnel et de l'arrivée d'un nouveau directeur général des services en juillet 2015, le poste de directrice de la relation aux habitants occupé jusqu'alors par Mme D... a été supprimé au 1er janvier 2016 dans l'intérêt du service, dans le but d'une refonte totale de l'organisation. Le nouvel organigramme des services du département a été validé par le comité technique lors de sa séance du 30 septembre 2015, puis présenté au personnel par courriel du directeur général des services du 1er octobre 2015 et lors d'une réunion avec l'ensemble du personnel le 13 octobre 2015. Mme D... a été reçue par le directeur général des services le 14 octobre 2015 pour échanger sur cette réorganisation. Le 19 octobre 2015, le directeur général des services a rencontré les agents de la direction de la relation aux habitants et Mme D.... Le 25 novembre 2015, une réunion d'information a eu lieu avec Mme D... sur la nouvelle organisation, en présence des deux directeurs dont relèvent dorénavant les missions de la direction de la relation aux habitants. Par courrier électronique du 27 novembre 2015, Mme D... a informé le directeur général des services et la direction des ressources humaines qu'elle prenait acte du nouveau cadre organisationnel et qu'elle était dans l'attente de sa réaffectation. Des postes vacants ont été proposés en interne, sur lesquels Mme D... ne s'est pas positionnée. A compter du 1er janvier 2016, la réorganisation des services a été mise en œuvre. Durant sa première période en arrêt de maladie ordinaire du 13 au 29 janvier 2016, Mme D... a demandé par deux courriers du 14 janvier 2016, d'une part, le bénéfice d'un travail à temps partiel pour une quotité de travail de 60 %, et d'autre part, que sa nouvelle affectation lui soit précisée. Le 8 février 2016, le directeur général des services et le directeur des ressources humaines lui ont proposé un poste à la direction de l'agriculture, de l'environnement, des risques et du développement durable. Quand bien même cette affectation ne s'est pas concrétisée, la situation de Mme D... a ainsi été prise en considération par la collectivité. Eu égard à ces circonstances, si toute réorganisation de services peut être anxiogène, il n'en demeure pas moins qu'en l'espèce Mme D... a été régulièrement informée des modalités de la réorganisation des services entre septembre et novembre 2015, cette dernière ayant d'ailleurs accepté le 27 novembre 2015 le principe de la suppression de son poste. Enfin, le courrier de la médecine du travail du 22 février 2016 adressé au président du conseil départemental du Territoire de Belfort, qui alerte la collectivité de la souffrance et du mal être au travail de certains agents du département en lien avec la réorganisation en cours, est rédigé en des termes généraux et n'évoque pas en particulier la situation de Mme D... ou la direction qu'elle pilotait. Dans ces conditions, les faits décrits ne caractérisent pas un contexte professionnel pathogène qui aurait pu être à l'origine de la maladie de Mme D.... A cet égard, un tel contexte ne ressort pas davantage du certificat médical d'un médecin généraliste du 18 avril 2016, produit par la requérante, qui évoque " un mal être profond que Mme D... dit lié à ses conditions de travail ", et se borne ainsi à retranscrire les propos de cette dernière. Il s'ensuit que l'affection dont la requérante a souffert ne peut être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions ou avec ses conditions de travail. Mme D... n'est dès lors pas fondée à soutenir que le département du Territoire de Belfort a commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne le harcèlement moral et le comportement fautif dans la gestion de la carrière de Mme D... : 14. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ". Aux termes du IV de l'article 11 de la même loi : " La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. ". 15. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement, notamment lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtant un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 16. Mme D... soutient qu'elle a fait l'objet, de septembre 2015 à mai 2016, de faits constitutifs d'un harcèlement moral en raison des agissements de ses supérieurs hiérarchiques tels que la suppression de son poste de direction, l'absence d'instruction quant aux suites à donner aux projets en cours en fin d'année 2015, le retrait de sa délégation de signature, sa mise à l'écart de réunions, l'absence de mention de son nom sur le nouvel organigramme et son positionnement dans le logiciel de gestion de temps de travail dans une rubrique " divers ", la privation d'accès aux outils informatiques, une campagne de " décrédibilisation " et de dénigrement, et enfin son agenda vide au 1er janvier 2016. 17. Il ne résulte pas de l'instruction que la réorganisation des services du département n'aurait pas été réalisée dans l'intérêt du service. Si cette restructuration a eu pour conséquence de supprimer le poste occupé par Mme D... et de diminuer son niveau de responsabilité à compter du 1er janvier 2016, l'intéressée n'a pas présenté de candidature consécutivement à la proposition à l'issue de la réorganisation des services entre octobre et novembre 2015 d'une dizaine de postes relevant de son grade. La requérante ne peut se prévaloir de l'inadéquation du poste qui lui a été proposé en février 2016, notamment en raison de l'absence d'encadrement et de compétences dans le domaine financier qu'elle ne possédait pas, dès lors que le grade de catégorie A n'induit pas nécessairement des fonctions de management et qu'il lui était possible d'adapter ses compétences par une formation. Enfin, les indemnités versées dans les précédentes fonctions de direction de Mme D... correspondaient aux spécificités du poste, notamment s'agissant de la nouvelle bonification indiciaire liée aux fonctions d'encadrement. En l'absence de telles sujétions dans les nouvelles fonctions proposées, leur suppression était justifiée sans que cela révèle une marque d'hostilité à son égard. Dans ces conditions, et compte tenu de l'ensemble des échanges contradictoires entre le département et Mme D..., les faits allégués par cette dernière ne caractérisent ni un harcèlement moral ni un comportement fautif du département dans la gestion de la carrière de la requérante. La circonstance qu'elle ait été placée en congé de maladie en raison d'un état dépressif et d'un stress au travail n'est pas de nature à infirmer cette analyse. En ce qui concerne le manquement à l'obligation de sécurité : 18. Aux termes de l'article 2-1 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale : " Les autorités territoriales sont chargées de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité. ". 19. Mme D... demande à être indemnisée du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison du manquement du département à l'obligation de sécurité qui pèse sur l'employeur public en vertu de l'article 2-1 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 précité. 20. Il résulte de ce qui a été dit aux points 13 et 17 que le département du Territoire de Belfort n'a pas méconnu son obligation de veiller à la sécurité et à la protection de la santé de Mme D.... Par suite, le département n'a pas non plus sur ce point commis de faute de nature à engager sa responsabilité envers Mme D.... En ce qui concerne les fautes résultant de décisions illégales : 21. Il résulte de ce qui vient d'être dit que la décision du président du département du Territoire de Belfort du 10 avril 2017 et la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par la requérante ne sont entachées d'aucune illégalité. Les conclusions indemnitaires de Mme D... tendant à la réparation des préjudices liés à une prétendue illégalité fautive de ces décisions ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. 22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'injonction : 23. Le présent arrêt, qui n'admet ni les conclusions à fin d'annulation ni les conclusions indemnitaires présentées par Mme D..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme D... doivent être rejetées. Sur les frais de justice liés au litige : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du département du Territoire de Belfort, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que réclame Mme D... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accorder au département du Territoire de Belfort la somme qu'il demande au même titre. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Les conclusions du département du Territoire de Belfort présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au département du Territoire de Belfort. 4 N° 19NC02549
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de NANCY, 3ème chambre, 29/12/2021, 19NC00948, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 19 août 2016 par lequel le président du conseil départemental du Haut-Rhin a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie au titre de l'accident survenu le 16 novembre 2012, ensemble la décision du 15 décembre 2016 portant rejet du recours gracieux formé le 21 octobre 2016. Par un jugement n° 1700793 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de Mme C.... Procédure devant la cour : Par une requête et deux mémoires enregistrés les 29 mars 2019, 18 septembre 2020 et 13 octobre 2020, Mme B... C..., représentée par Me Grimaldi, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 janvier 2019 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 19 août 2016 du président du conseil départemental du Haut-Rhin et la décision du 15 décembre 2016 ; 3°) d'enjoindre au département du Haut-Rhin de réexaminer sa demande, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge du département du Haut-Rhin une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; - il n'est pas justifié que la minute comporte les signatures exigées par l'article R. 741-1 du code de justice administrative ; - l'arrêté du 19 août 2016 est entaché de vices de procédure en raison, d'une part, de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme et, d'autre part, du défaut d'information du médecin du service de médecine professionnelle et préventive et de l'absence de rapport écrit rédigé par ce médecin, avec lequel elle n'a pas pu s'entretenir au titre de sa demande de reconnaissance d'un accident de service ; - cet arrêté est insuffisamment motivé ; - le refus de reconnaissance d'un accident imputable au service est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par des mémoires enregistrés les 27 septembre 2019 et 25 septembre 2020, le département du Haut-Rhin, auquel s'est substituée au 1er janvier 2021 la collectivité européenne d'Alsace, représentée par Me Eglie-Richters, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme C... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens invoqués par Mme C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Samson-Dye, - les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public, - et les observations de Me Krasniqi, pour la collectivité européenne d'Alsace. Considérant ce qui suit : 1. Le président du conseil départemental du Haut-Rhin, auquel s'est substituée au 1er janvier 2021 la collectivité européenne d'Alsace, a accordé un congé de longue durée pour maladie contractée en service, du 19 novembre 2012 au 15 janvier 2015, puis du 30 août 2015 au 10 janvier 2016, à Mme C..., assistante socio-éducative, en raison d'une dépression. Le 15 février 2016, l'intéressée a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie, non plus au titre de la maladie, mais en tant qu'accident survenu, selon elle, le 16 novembre 2012, lors d'une réunion, à laquelle elle participait, de la commission locale d'évaluation des situations préoccupantes. A la suite de l'avis défavorable de la commission de réforme du 9 juin 2016, le président du conseil départemental du Haut-Rhin, par un arrêté du 19 août 2016, a rejeté cette nouvelle demande au motif que l'affection dont souffre l'intéressée relève, non pas de l'accident de service, mais de la maladie contractée en service. Par un courrier du 21 octobre 2016, Mme C... a formé un recours gracieux, qui a été rejeté le 15 décembre 2016. Elle relève appel du jugement du 31 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 août 2016 et de la décision du 15 décembre 2016. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 3. Le jugement du 31 janvier 2019 répond de manière circonstanciée aux moyens opérants invoqués par Mme C... dans ses écritures de première instance. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision des premiers juges ne peut, dès lors, qu'être écarté. 4. D'autre part, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 5. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement contesté a été signée par le président de la formation de jugement, par le rapporteur et par la greffière d'audience. Par suite, le moyen tiré de du défaut de justification du respect des dispositions citées au point précédent doit être écarté. Sur le refus de reconnaissance d'un accident imputable au service : 6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 19 août 2016. En outre, la décision du 15 décembre 2016 se bornant à rejeter le recours gracieux dirigé contre cet arrêté, les vices propres dont serait entachée cette décision ne peuvent être utilement contestés, de sorte que le moyen tiré de ce que cette décision est insuffisamment motivée est inopérant. 7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004, relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le président de la commission de réforme est désigné par le préfet qui peut choisir soit un fonctionnaire placé sous son autorité, soit une personnalité qualifiée qu'il désigne en raison de ses compétences, soit un membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme. (...) / Cette commission comprend : 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats, mais ne prend pas part aux votes ; 2. Deux représentants de l'administration ; 3. Deux représentants du personnel ". L'article 16 de cet arrêté dispose : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". 8. Il résulte des articles 3 et 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 9. Il ressort des pièces du dossier que, si la commission départementale de réforme comprenait deux praticiens de médecine générale lors de sa séance du 9 juin 2016, au cours de laquelle la demande de reconnaissance d'un accident de service de Mme C... a été examinée, aucun médecin spécialiste n'y a en revanche participé. Toutefois, il ressort du procès-verbal de cette réunion que la commission s'est prononcée au regard de son précédent avis, émis lors de sa séance du 17 septembre 2015, au cours de laquelle elle avait estimé que la dépression de l'intéressée présentait le caractère de maladie imputable au service, ainsi que du rapport d'expertise du 3 juillet 2015, établi par un psychiatre, et du rapport du médecin de prévention du 13 mai 2015, qui avaient été réalisés dans le cadre de cette précédente demande. Le rapport du psychiatre évoque des oublis liés au stress et des difficultés professionnelles à l'origine, notamment, de " reviviscences nocturnes des anciennes agressions ", alors que le médecin de prévention relève un " épuisement professionnel avec anxiété généralisée suite à différents chocs émotionnels sur le lieu de travail ". Ces éléments non seulement éclairaient la commission sur le lien de la pathologie avec le service mais lui permettaient aussi de porter une appréciation quant à l'existence d'un évènement unique et soudain qui en aurait été à l'origine, permettant de caractériser un accident, alors même qu'ils avaient été recueillis pour l'instruction d'une demande de reconnaissance de maladie imputable au service, et non d'accident de service. Dans ces conditions, la présence d'un médecin spécialisé en psychiatrie n'était pas nécessaire pour éclairer l'examen de la demande de Mme C.... Par suite, l'absence de médecin spécialiste lors de la séance de la commission de réforme du 9 juin 2016 n'a pas privé l'intéressée d'une garantie. Cette absence étant par ailleurs demeurée sans influence sur la décision finale, le moyen ainsi tiré du vice de procédure doit être écarté. 10. En troisième lieu, aux termes de l'article 16 du décret du 30 juillet 1987, alors en vigueur, pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2e alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné. / Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé. / La commission de réforme n'est pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. La commission de réforme peut, en tant que de besoin, demander à l'administration de lui communiquer les décisions reconnaissant l'imputabilité ". Selon l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 précédemment mentionné : " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, le médecin du travail, pour la fonction publique hospitalière, compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission (...) Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous ". 11. Il est constant que le dossier soumis à la commission de réforme qui s'est réunie le 9 juin 2016 ne comprenait pas de nouveau rapport du médecin de prévention, réalisé spécifiquement au regard de la demande de Mme C... portant sur la reconnaissance d'un accident de service. De plus, il n'est pas établi que le secrétariat de cette commission aurait informé ce praticien préalablement à cette séance. En revanche, ce dernier a été avisé par des courriels du département du Haut-Rhin, en mai 2016, que Mme C... avait présenté une nouvelle demande en évoquant non plus une apparition progressive de la maladie mais un évènement déclencheur qui jusque-là n'avait pas été évoqué et qui serait intervenu au cours d'une réunion. Le département précisait au médecin de prévention que sa position sur cette question était souhaitée et qu'il pouvait se borner à préciser qu'il n'avait pas d'observations particulières à émettre. Ni la circonstance que l'information du médecin de prévention ait émané de la collectivité, alors que la saisine aurait dû être effectuée par le secrétariat de la commission de réforme, ni les termes dans lesquels s'est faite cette information n'ont privé Mme C... d'une garantie, le département ne pouvant être regardé comme ayant incité ce praticien à garder le silence ou à adopter une position particulière. Par ailleurs, le docteur A..., médecin de prévention, a répondu, le 11 mai 2016, qu'après examen du dossier, il n'avait pas d'observation complémentaire à apporter par rapport à son précédent avis émis en mai 2015. Dans ces conditions, la requérante n'a été privée d'aucune garantie du fait de l'absence de nouveau rapport du médecin du service de médecine professionnelle et préventive soumis aux membres de la commission de réforme, alors qu'il ressort du procès-verbal de la réunion du 9 juin 2016 que cette commission a statué au regard du précédent avis du médecin de prévention, dont ce dernier avait entendu maintenir les termes. La requérante n'est pas davantage fondée à faire valoir qu'elle n'a pas pu échanger avec le médecin de prévention, dès lors que les dispositions précédemment mentionnées n'imposent pas que le médecin rencontre l'intéressé avant d'émettre son avis ou qu'il soit présent lors de la séance de la commission de réforme. Les vices invoqués sont, par ailleurs, demeurés sans incidence sur le sens de l'arrêté litigieux. Par suite, les moyens tirés du vice de procédure au regard de la consultation du médecin de prévention ne sauraient prospérer. 12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors applicable : " (...) si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ". Constitue un accident de service, pour l'application de ces dispositions, un évènement soudain et violent, survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. 13. Mme C... soutient qu'elle a été victime d'un accident de service le vendredi 16 novembre 2012, lors d'une réunion de la commission locale d'évaluation des situations préoccupantes, au cours de laquelle elle s'est rendu compte qu'elle connaissait la mère d'enfants mentionnés comme étant victimes d'actes graves de la part de cette dernière. Selon les témoignages produits, elle s'est effondrée en larmes à l'issue de cette réunion. Il ressort du certificat rédigé par son médecin traitant, chez lequel elle s'est rendue le lundi suivant, qu'il l'a alors reçue dans un état de grande fragilité émotionnelle, à la suite d'un épisode professionnel particulièrement éprouvant lié à cette réunion et qu'elle ne présentait pas, auparavant, de signes cliniques d'anxiété généralisée ou d'éléments dépressifs. Toutefois, alors même que la réunion du 16 novembre 2012 aurait constitué, ainsi que le relève le médecin de la requérante, un déclencheur de sa dépression, cette circonstance ne suffit pas à caractériser un accident de service, alors notamment qu'il n'est pas établi, ni même allégué que Mme C... aurait été l'objet, lors de cette réunion, d'actes ou de paroles susceptibles d'être assimilés à des violences. Dans ces conditions et au regard de l'ensemble des pièces du dossier, la réunion en cause ne saurait être regardée comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'elle a pu produire sur l'agent. Dès lors, le refus de reconnaissance d'un accident de service n'est pas entaché d'erreur d'appréciation. 14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du 31 janvier 2019, de l'arrêté du 19 août 2016 et de la décision du 15 décembre 2016 doivent donc être rejetées. Sur les conclusions accessoires : 15. En premier lieu, le présent arrêt rejetant les conclusions aux fins d'annulation, il n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte de Mme C... ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées. 16. En second lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la collectivité européenne d'Alsace, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme C... la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la collectivité européenne d'Alsace sur le fondement de ces dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la collectivité européenne d'Alsace au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la collectivité européenne d'Alsace. 4 N° 19NC00948
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 24/12/2021, 19MA05725, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, par une requête n° RG 18/64, d'annuler la décision du ministre de l'économie et des finances du 27 décembre 2016 suspendant à compter du 1er janvier 2011 le paiement de l'allocation spéciale n° 9 dont est assortie sa pension militaire d'invalidité n° 16-002.247 B pour un montant de 6006, 62 euros et en totalité à compter du 18 mars 2011 et, par une requête n° RG 17/88, d'annuler la décision du même jour suspendant à compter du 2 avril 2013 le versement de l'allocation spéciale n° 9 dont est assortie sa pension militaire d'invalidité n° 16-002.959 D. Par un jugement n° 17/00088 du 8 août 2019, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, après avoir joint les deux recours, a annulé les décisions du ministre de l'économie et des finances du 27 décembre 2016 suspendant l'allocation spéciale n° 9 respectivement à compter du 1er janvier 2011 et à compter du 2 avril 2013, et a mis à la charge de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance. Procédure devant la Cour : La cour régionale des pensions militaires d'Aix en Provence a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, le recours du ministre de l'action et des comptes publics, enregistré à son greffe le 7 octobre 2019. Par ce recours, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 8 août 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille ; 2°) de rejeter les demandes de M. A... B.... Le ministre soutient que : - le jugement est irrégulier faute pour le tribunal de l'avoir appelé dans la cause, en méconnaissance de l'article R. 731-3 du code des pensions militaire d'invalidité et des victimes de guerre ; - si le montant de la pension militaire d'invalidité ne doit pas être pris en compte pour l'ouverture du droit à l'allocation n° 9, il doit être inclus dans le montant global des ressources du pensionné pour la détermination du montant de cette allocation ; - dès lors que le montant global des ressources de l'intimé, qui a atteint l'âge de 65 ans au 18 mars 2011, est supérieur à l'indice de pension 1 200, le versement de l'allocation spéciale n° 9 a été régulièrement suspendu ; - faute pour l'intéressé d'avoir déclaré ses revenus pour établir le calcul de son allocation, c'est à juste titre que le service a évalué d'office l'ensemble de ses revenus. Une décision du 26 juin 2020 accorde l'aide juridictionnelle totale à M. A... B.... Par un mémoire enregistré le 4 novembre 2021, M. A... B... représenté par Me Van Robays, conclut au rejet du recours et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat les entiers dépens et la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 75 du 10 juillet 1991. Il fait valoir que - le recours est irrecevable, faute pour le ministre de justifier que son signataire dispose d'une délégation régulière ; - le jugement n'est pas irrégulier, dès lors qu'il a lui-même respecté les dispositions de l'article R. 731-3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, et que le ministre a été bel et bien partie à la première instance, son choix de ne pas y produire lui-même d'écritures se justifiant par sa volonté de se faire représenter par la ministre des armées ; - le ministre ne fait pas la démonstration qu'il recevait, au titre de ses ressources réelles, un revenu supérieur au salaire qu'il percevrait s'il travaillait ; - c'est à tort que le ministre a fondé sa décision sur des revenus potentiels et non vérifiés de sommes placées en établissement bancaire, sans plus de précisions ; - en instaurant un indice de pension différent selon que le pensionné a 65 ans, ou plus de 65 ans, l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre méconnaît l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne qui prohibent les discriminations liées à l'âge ; - le ministre ne démontre pas qu'il perçoit un revenu supérieur au salaire qu'il percevrait s'il travaillait par application des articles L. 371-4 et L. 371-7 du code de la sécurité sociale. La clôture de l'instruction a été fixée au 15 novembre 2021 à 12 heures, par ordonnance du 15 octobre 2021. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance a produit un mémoire le 3 décembre 2021, après la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le décret n° 61-443 du 2 mai 1961 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Revert, - les conclusions de M. Ury, rapporteur public, - les observations de Me Van Robays, représentant M. A... B.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., né le 18 mars 1946, titulaire de pensions militaires d'invalidité, et bénéficiaire de l'allocation spéciale n° 9, a vu le versement de cette allocation suspendu, en totalité, à compter du 18 mars 2011 par décision du 27 décembre 2016, et par décision du même jour, à compter du 2 avril 2013, dont il a demandé l'annulation au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, par deux requêtes distinctes. Par jugement du 8 août 2019, dont le ministre de l'action et des comptes publics relève appel, le tribunal, après avoir joint les deux requêtes, a annulé ces décisions. Sur la fin de non-recevoir opposé au recours du ministre : 2. Par un arrêté du 10 septembre 2019, publié au Journal officiel de la République française du 12 septembre 2019, M. C... D..., administrateur civil, chef du bureau de affaires juridiques, a reçu du directeur général des finances publiques, délégation à l'effet de signer, au nom du ministre chargé du budget, tous actes, à l'exclusion des décrets, dans la limite de ses attributions. Cette délégation lui donnait compétence pour signer au nom du ministre de l'action et des comptes publics le recours en appel. M. A... B... n'est ainsi pas fondé à soutenir que le recours du ministre est irrecevable du fait de l'incompétence de son signataire. Sur le bien-fondé du jugement 3. Aux termes de l'article L. 35 bis du code des pensions militaire d'invalidité et des victimes de guerre, devenu article L. 131-2 de ce code : " Il est alloué une allocation spéciale aux pensionnés qui se trouvent dans l'impossibilité médicalement constatée d'exercer une activité professionnelle quand cette impossibilité a sa cause déterminante dans une ou plusieurs infirmités incurables indemnisées au titre du présent code, si le reclassement social du pensionné est impossible et si celui-ci ne dispose pas par ailleurs, sous la forme d'une hospitalisation ou tout autrement, de ressources suffisantes. Le reclassement social est réputé possible quand l'invalidité de l'intéressé ne met pas obstacle à sa rééducation professionnelle, éventuellement précédée de sa réadaptation fonctionnelle. Cette allocation a pour effet de porter le montant global des ressources de ces pensionnés à des taux dont le plus élevé ne pourra excéder celui de la pension à l'indice 1500.Un décret, pris dans la forme du décret en Conseil d'Etat, fixera les conditions d'application du présent article ". En vertu de l'article 1er du décret du 2 mai 1961, pris pour l'application de ces dispositions, l'allocation spéciale qu'elles prévoient porte le numéro 9. Aux termes de l'article 5 de ce décret : " Les ressources sont considérées comme suffisantes : / a) soit lorsque le montant annuel des ressources personnelles de l'invalide, non compris la pension d'invalidité servie au titre du code, excède le montant correspondant à l'indice de pension 900 ; / b) soit lorsque l'invalide bénéficie d'un avantage de vieillesse faisant appel à une contribution des travailleurs et pouvant être considéré comme étant le prolongement d'un traitement ou d'un salaire. ". L'article 9 du même décret dispose que : " L'allocation spéciale a pour effet de porter le montant global des ressources de l'invalide pensionné : a) Au taux correspondant à l'indice de pension 1500 pour les invalides âgés de moins de 65 ans ; / b) Au taux correspondant à l'indice de pension 1200 pour les invalides âgés de 65 ans et plus. ". L'article 10 du décret précise, quant à lui, que : " Pour l'application des articles 5 et 9 du présent décret, entrent en compte les ressources personnelles, tous les avantages de vieillesse, les revenus professionnels et autres estimés selon les règles fixées à l'article L. 689 du code de la sécurité sociale. / (...) ". 4. Si, en vertu des termes mêmes de l'article 5 du décret du 2 mai 1961, il ne peut être tenu compte de la pension militaire d'invalidité pour la détermination des droits de l'invalide pensionné à l'allocation spéciale instituée par l'article L. 35 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, il résulte de la combinaison des articles 9 et 10 du décret du 2 mai 1961 que le taux du montant total des ressources de l'invalide pensionné que le versement de l'allocation ne doit pas avoir pour effet de dépasser, correspond à l'ensemble des ressources qui ne sont pas expressément écartées par l'alinéa 2 de l'article 10, et qui recouvrent notamment la pension militaire d'invalidité. 5. Pour annuler les décisions portant suspension du versement de l'allocation spéciale n° 9 au bénéfice de M. A... B..., le tribunal s'est fondé sur le caractère aléatoire et non justifié de l'évaluation faite par les services du ministère chargé du budget des revenus tirés par M. A... B... de placements immobiliers, et sur l'impossibilité légale pour ces services de tenir compte de la pension militaire d'invalidité de l'intéressé pour le calcul de cette allocation. 6. Toutefois et d'une part, il résulte des termes mêmes des certificats de suspension en litige qu'au titre de chaque année éligible à l'allocation spéciale n° 9, a été retenue avec suffisamment de précision la somme de 603, 92 euros, dont ni l'origine tirée de placements immobiliers, ni le montant, ne sont discutés par M. A... B... qui, en se bornant à relever que l'administration ne lui a pas adressé de demande d'informations complémentaires, ne conteste pas davantage ne pas avoir fourni aux services compétents l'ensemble des informations nécessaires à l'établissement de ses ressources personnelles pour ces années. Ainsi lesdites sommes, qui entrent en compte dans les ressources personnelles de M. A... B... au titre des dispositions des articles 9 et 10 du décret du 2 mai 1961, ont été prises en considération à bon droit par le ministre pour suspendre le versement de l'allocation spéciale n° 9 de l'intéressé. 7. D'autre part et en tout état de cause, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges et à ce que persiste à affirmer M. A... B... en cause d'appel, que pour décider de suspendre le versement de son allocation spéciale n° 9, le ministre aurait tenu compte, au titre de l'établissement de ses droits à allocation, de sa pension militaire d'invalidité, il est constant que le montant de l'ensemble des ressources personnelles de l'intéressé au titre des années en cause, susceptibles d'être prises en compte pour l'application de l'article 9 du décret du 2 mai 1961 et au nombre desquelles le ministre pouvait légalement tenir compte de ladite pension, excède le taux correspondant à l'indice de pension 1 200 prévu à l'article 9 de ce décret. 8. Il suit de là que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que pour annuler ses décisions, le tribunal s'est fondé sur ces deux motifs. 9. Il appartient ainsi à la Cour, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de première instance et d'appel de M. A... B.... 10. D'une part, M. A... B... prétend que les dispositions de l'article 9 du décret du 2 mai 1961 méconnaissent le principe de non-discrimination en fonction de l'âge, tel que rappelé par l'article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et tel que posé par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mais l'article 51 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne prévoit que : " 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union. (...) ". Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 21 de cette Charte ne peut ainsi être accueilli, dès lors que ni le décret du 2 mai 1961, ni les décisions litigieuses ne mettent pas en œuvre le droit de l'Union. En outre, dans la mesure où le principe de non-discrimination posé par l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ne concerne que la jouissance des droits et libertés reconnus par la convention et ses protocoles additionnels et où, pour se prévaloir de ce principe, M. A... B... n'invoque aucun droit ni aucune liberté dont la jouissance se trouverait affectée par la discrimination alléguée, son moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations est lui aussi inopérant. 11. D'autre part, dès lors que pour prendre les mesures en litige, le ministre s'est fondé sur les dispositions de l'article 9 du décret du 2 mai 1961, dont l'application ne dépend pas des revenus perçus par l'invalide pensionné en période d'activité professionnelle, M. A... B..., dont la pension militaire d'invalidité n'est d'ailleurs pas versée par la sécurité sociale au titre de l'assurance invalidité, ne peut utilement affirmer que le ministre ne démontrerait pas que ses revenus seraient supérieurs au salaire qu'il percevrait s'il travaillait. 12. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille a annulé ses décisions. Il y a donc lieu d'annuler ce jugement et de rejeter les demandes de M. A... B.... Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une quelconque somme au titre des frais exposés par M. A... B... et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre doivent donc être rejetées. D É C I D E : Article 1er : Le jugement 17/00088 du 8 août 2019 du tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille est annulé. Article 2 : Les demandes présentées par M. A... B... devant le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille et ses conclusions d'appel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 21 décembre 2021 à laquelle siégeaient : M. Revert, président-assesseur, Mme Marchessaux, première conseillère, Mme Renault, première conseillère. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 24 décembre 2021. N° 19MA057253
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 29/12/2021, 19BX04062, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... C... a demandé au tribunal des pensions de Pau d'annuler la décision du 26 janvier 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour les infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques post-traumatiques. Par un jugement du 21 février 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête sommaire enregistrée le 26 mars 2019 et un mémoire ampliatif enregistré le 17 avril 2019, Mme C..., représentée par Me Marbot, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) à titre principal, de lui reconnaître un droit à pension au taux de 10 % pour chacune des deux infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques post-traumatiques, ou à titre subsidiaire d'ordonner une expertise afin de se prononcer sur le lien entre ces infirmités et l'accident du 5 août 2002 ; 3°) d'annuler la décision du 26 janvier 2017 et d'enjoindre à la ministre des armées de statuer à nouveau sur sa demande en tenant compte de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement au profit de son conseil d'une somme de 3 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Elle soutient que : - le tribunal n'a pas répondu au moyen relatif au taux de l'infirmité de cervicalgies chroniques, évalué à 10 % par l'expert désigné par l'administration, que cette dernière met en cause en qualifiant arbitrairement les séquelles de " minimes " ; le jugement doit ainsi être annulé ; - elle établit la continuité des soins entre 2002 et 2005, de sorte que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, il n'y a pas eu de rupture dans la chaîne de causalité ; le tribunal n'a pas tenu compte du rapport circonstancié de l'accident établi le 16 juin 2014, mentionnant des cervicalgies et des lombalgies post-traumatiques ; un certificat médical établit qu'elle a été suivie de façon permanente jusqu'en 2010 pour des problèmes de lombalgies et de cervicalgies, et un autre précise qu'elle est suivie depuis 2005 pour des lombalgies aiguës évoluant depuis l'accident de 2002 ; ces éléments constituent un commencement de preuve suffisant pour renvoyer la charge de la preuve à l'administration, ou à tout le moins faire trancher la question par un expert. Par un mémoire en défense enregistré le 20 janvier 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que : - le litige ne porte pas sur les taux de 10 % retenus par l'expert pour chacune des deux infirmités, mais sur l'existence d'une relation médicale certaine, directe et déterminante entre l'accident de la circulation du 5 août 2002 et les pathologies ; - c'est à bon droit que le tribunal a retenu une rupture dans la chaîne de causalité pour rejeter la demande ; - en l'absence d'une filiation médicale avérée, une expertise serait sans utilité. Mme C... a été maintenue de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 novembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique, Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., caporale-cheffe de l'armée de terre, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive, concédée au taux de 10 % par arrêté du 21 février 2005, pour l'infirmité de séquelles de traumatisme du genou gauche. Le 29 janvier 2015, elle en a sollicité la révision pour les infirmités nouvelles de lombalgies et de cervicalgies chroniques post-traumatiques qu'elle attribuait à un accident de la circulation survenu en service le 5 août 2002. Par une décision du 26 janvier 2017, le ministre de la défense a rejeté sa demande au motif que les taux d'invalidité étaient inférieurs au minimum indemnisable pour des maladies, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de rechercher l'origine des infirmités. Mme C... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions de Pau, lequel, par un jugement avant dire droit du 11 janvier 2018, a enjoint aux parties de produire les pièces médicales et administratives afférentes à l'accident du 5 août 2002, puis, par un jugement du 21 février 2019, a rejeté la demande au motif que l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre l'accident et les infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques n'était pas établie. Mme C... relève appel de ce dernier jugement. La procédure a été transmise à la cour administrative d'appel de Bordeaux en application de la loi du 13 juillet 2018 susvisée. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service / (...). " Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / (...) / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. " Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...)". 3. Il résulte de l'instruction que le 5 août 2002, Mme C..., qui conduisait un véhicule dans le cadre du service, a été victime d'un accident de la circulation et a été transportée par les pompiers au centre hospitalier de Brignoles dont elle est sortie le 8 août 2002 avec un diagnostic de cervico-dorso-lombalgies secondaires à un accident de la voie publique et une prescription de Tétrazépam, spécialité myorelaxante indiquée pour le traitement des contractures musculaires. Le dossier médical militaire précise que l'intéressée présentait le 5 août 2002 des contusions multiples, et qu'elle a été déclarée apte à la reprise du travail avec une exemption de port de charge et de sport le 8 août 2002. A cette dernière date, la persistance d'une cervico-dorsalgie d'origine musculaire a été constatée et a donné lieu à la prescription de séances d'électrothérapie. Mme C... a été déclarée inapte à la conduite de poids-lourds le 5 septembre 2002, et le commandant de la compagnie à laquelle elle était alors affectée atteste qu'elle souffrait de douleurs multiples à la jambe et au dos, qu'elle a été affectée au bureau administratif de la compagnie, et qu'elle a bénéficié d'autorisations d'absence pour des séances de kinésithérapie. La poursuite d'une kinésithérapie pour des douleurs cervicales est attestée par le commandant de l'unité que Mme C... a rejointe postérieurement au mois d'août 2003. Le 25 janvier 2005, le dossier médical fait état de lombalgies chroniques, c'est-à-dire persistantes dans la durée antérieurement à cette date. Par la suite, cette pathologie est documentée dans le dossier médical avec deux épisodes de lombalgie aiguë les 19 mai et 20 juin 2005, le second entraînant une inaptitude à la station debout prolongée, puis le 25 juin 2005 avec la " persistance de douleurs lombaires type lumbago, avec cervicalgie paravertébrale haute sur contracture, et un bilan radiologique retrouvant un pincement discal L5-S1 avec épisode de sciatalgie ", et en décembre 2005 avec la récidive de douleurs lombaires et la consultation d'un neurochirurgien. En février 2006, un bilan de lombalgies et cervicalgies a conclu à une discopathie L5-S1 avec lombalgies chroniques invalidantes entraînant une inaptitude au port de charges lourdes et au service outre-mer. Enfin, un certificat de visite du médecin du centre médical des armées de Pau du 13 janvier 2015 a mentionné une affection médicale imputable au service, caractérisée par des lombalgies et cervicalgies chroniques imputables à un accident de la voie publique du 5 août 2002, et le médecin des armées a émis le 22 mars 2017 un avis défavorable au renouvellement du contrat de Mme C... en mentionnant notamment des douleurs chroniques du rachis cervical et lombaire suite à cet accident. Contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, ces éléments apportent un faisceau d'indices suffisant de la continuité des pathologies depuis l'accident. Par suite, la filiation entre la blessure survenue le 5 août 2002 et les infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques doit être regardée comme établie. 4. L'expert désigné par l'administration a évalué à 10 % le taux d'invalidité des lombalgies chroniques post-traumatiques avec irradiations fessières gauches, et à 10 % celui des cervicalgies chroniques post-traumatiques avec irradiations névralgiques intermittentes. La ministre des armées n'apporte aucune précision quant aux raisons pour lesquelles la décision de rejet du 26 janvier 2017 a retenu un taux inférieur à 10 % pour la seconde infirmité. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, Mme C... est fondée à demander l'annulation de la décision du ministre de la défense du 26 janvier 2017 et, par voie de conséquence, celle du jugement du tribunal des pensions de Pau du 21 février 2019. 5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " L'annulation prononcée au point précédent implique nécessairement qu'il soit fait droit à la demande de Mme C.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de Mme C... en tenant compte des infirmités de lombalgies chroniques au taux de 10 % et de cervicalgies chroniques au taux de 10 %, avec effet à compter du 29 janvier 2015, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. 6. Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Marbot. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal des pensions de Pau du 21 février 2019 et la décision du ministre de la défense du 26 janvier 2017 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de Mme C... en tenant compte des infirmités de lombalgies chroniques au taux de 10 % et de cervicalgies chroniques au taux de 10 %, avec effet à compter du 29 janvier 2015, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Me Marbot une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 30 novembre 2021 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Nathalie Gay, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 décembre 2021. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLe greffier, Fabrice Benoit La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 5 N° 19BX04062
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Bordeaux