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CAA de LYON, 3ème chambre, 27/09/2023, 21LY00585, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Par une requête enregistrée sous le n° 1901959, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2018 par lequel le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes l'a placée en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 27 septembre 2018, ensemble la décision rejetant son recours gracieux. Par une requête enregistrée sous le n° 1901961, Mme A... a demandé à ce même tribunal d'annuler la décision du 9 octobre 2018 par laquelle le responsable de l'unité maladie-retraite de la région Auvergne-Rhône-Alpes a refusé de lui accorder un congé de longue maladie, ensemble la décision rejetant son recours gracieux. Par une requête enregistrée sous le n° 1906856, Mme A... a demandé à ce même tribunal d'annuler l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes l'a maintenue en disponibilité d'office du 27 mars au 5 juin 2019. Par une requête enregistrée sous le n° 1906857, Mme A... a demandé à ce même tribunal d'annuler l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes l'a maintenue en disponibilité d'office pour la période courant du 6 juin 2019 jusqu'à son admission à la retraite pour invalidité. Par une requête enregistrée sous le n° 1910004, Mme A... a demandé à ce même tribunal d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2019 par lequel le directeur des ressources humaines de la région Auvergne-Rhône-Alpes a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie qu'elle présente depuis le 27 septembre 2017. Par un jugement n° 1901959-1901961-1906856-1906857-1910004 du 23 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 février 2021 et le 24 juin 2022, Mme A..., représentée par Me Brun, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 décembre 2020 ; 2°) d'annuler : - l'arrêté du 10 octobre 2018 par lequel le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes l'a placée en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 27 septembre 2018, ensemble la décision rejetant son recours gracieux ; - la décision du 9 octobre 2018 par laquelle le responsable de l'unité maladie-retraite de la région a refusé de lui accorder un congé de longue maladie, ensemble la décision rejetant son recours gracieux ; - l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le président de la même région l'a maintenue en disponibilité d'office du 27 mars au 5 juin 2019 ; - l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le président de la même région l'a maintenue en disponibilité d'office pour la période courant du 6 juin 2019 jusqu'à son admission à la retraite pour invalidité ; - l'arrêté du 23 octobre 2019 par lequel le directeur des ressources humaines de la même région a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie qu'elle présente depuis le 27 septembre 2017 ; 3°) de mettre à la charge de la région Auvergne-Rhône-Alpes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision du 9 octobre 2018 portant refus d'un congé de longue maladie est entachée d'un défaut de motivation et le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit et de fait ainsi que d'une dénaturation des pièces du dossier ; - la décision du 23 octobre 2019 portant refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que son affectation à un poste de secrétaire bureautique a été de nature à détériorer considérablement ses conditions de travail et à aggraver son état de santé ; - dès lors qu'elle aurait dû bénéficier d'un congé longue maladie et que la pathologie qu'elle a présentée à compter du 27 septembre 2017 aurait dû être reconnue comme étant imputable au service, elle ne pouvait valablement être placée en disponibilité d'office pour cause d'épuisement de ses droits à congé de maladie ordinaire. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2021, la région Auvergne-Rhône-Alpes, représentée par Me Magnaval, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La région Auvergne-Rhône-Alpes fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 27 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 juillet 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi de congés de longue maladie ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, - les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public, - et les observations de Me Brun, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Recrutée par contrat en 2006 par la région Auvergne-Rhône-Alpes en qualité de travailleuse handicapée puis titularisée en septembre 2009 dans le grade d'adjointe administrative de première classe, Mme A..., qui a bénéficié de congés de maladie ordinaire à compter du 27 septembre 2017, a demandé l'annulation des arrêtés successifs par lesquels l'autorité territoriale a refusé de lui accorder un congé de longue maladie, l'a placée puis maintenue en disponibilité d'office et a, le 23 octobre 2019, rejeté sa demande tendant à ce que sa pathologie soit reconnue comme étant imputable au service, ensemble les décisions portant rejet de ses recours gracieux. Mme A... fait appel du jugement du 23 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon, après avoir procédé à la jonction de ces requêtes, a rejeté ses demandes. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la décision du 9 octobre 2018 portant refus d'un congé de longue maladie, la décision du 10 octobre 2018 plaçant Mme A... en disponibilité d'office pour six mois à compter du 27 septembre 2018 et les décisions du 20 juin 2019 portant renouvellement d'un tel placement : 2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, désormais repris aux articles L. 822-6 à L. 822-17 du code général de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée (...) ". Aux termes de l'article 18 décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de ces dispositions : " Le fonctionnaire qui est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions par suite d'une maladie grave et invalidante nécessitant un traitement et des soins prolongé est mis en congé de longue maladie, selon la procédure définie à l'article 25 (...) ". Enfin aux termes de l'article 25 du même texte : " Pour bénéficier d'un congé de longue maladie ou de longue durée le fonctionnaire en position d'activité, ou son représentant légal, doit adresser à l'autorité territoriale une demande appuyée d'un certificat de son médecin traitant spécifiant qu'il est susceptible de bénéficier des dispositions de l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée. Le médecin traitant adresse directement au secrétaire du comité médical compétent un résumé de ses observations et les pièces justificatives qui peuvent être prescrites dans certains cas par l'arrêté visé à l'article 39 du présent décret. Au vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause. Le dossier est ensuite soumis au comité médical. Si le médecin agréé qui a procédé à la contre-visite ne siège pas au comité médical, il peut être entendu par celui-ci. L'avis du comité médical est transmis à l'autorité territoriale qui, en cas de contestation de sa part ou du fonctionnaire intéressé, le soumet pour avis au comité médical supérieur visé à l'article 5 du présent décret. ". Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 14 mars 1986 dont les dispositions sont applicables aux fonctionnaires territoriaux : " Les affections suivantes peuvent donner droit à un congé de longue maladie (...) /- maladies mentales (...) ". 3. En premier lieu, si la région Auvergne-Rhône-Alpes soutient que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision de refus d'octroi d'un congé de longue maladie est irrecevable pour n'avoir été invoqué qu'en cause d'appel, un tel moyen se rattache à la légalité externe de cette décision qui a été contestée en première instance. Par suite, et alors qu'il a été présenté dans le délai d'appel et qu'il se rattache à la même cause juridique que le moyen d'incompétence de l'auteur de la décision présenté devant le tribunal administratif, il y a lieu d'écarter la fin de non-recevoir opposée sur ce point en défense. 4. En deuxième lieu, il ressort des pièces versées au dossier que la décision du 9 octobre 2018 portant refus d'octroyer un congé de longue maladie à Mme A... repose sur l'avis défavorable émis le 4 octobre 2018 par le comité médical départemental des agents territoriaux du Rhône, joint à cette décision, et sur la précision apportée par la région selon laquelle aucun élément factuel ne permet d'aller à l'encontre de la position de cette instance. Toutefois, et quand bien même aucune disposition législative ou réglementaire n'impose la motivation de l'avis du comité médical, il ne ressort ni des termes de celui-ci, auquel la décision en litige se réfère, ni des mentions précitées de celle-ci, ni même encore de la décision de la responsable du service de gestion des personnels et de l'insertion du 2 janvier 2019 rejetant le recours gracieux présenté contre cette décision, que les raisons de fait pour lesquelles tant le comité médical que le responsable de l'unité maladie-retraite de la région Auvergne-Rhône-Alpes ont estimé que le congé de maladie justifié par la situation médicale de Mme A... ne relevait pas d'un congé de longue maladie auraient été précisées. La décision du 9 octobre 2018 est par suite insuffisamment motivée et doit être annulée pour ce motif. 5. En troisième lieu, compte tenu du motif retenu au point précédent, il y a lieu d'accueillir le moyen tiré du défaut de base légale des arrêtés des 10 octobre 2018 et 20 juin 2019 du président de la région Auvergne-Rhône-Alpes portant placement de Mme A... en disponibilité d'office et prolongation d'un tel placement, et de les annuler pour ce motif. En ce qui concerne la décision du 23 octobre 2019 portant refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... : 6. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, codifié aux articles L. 822-1 et suivants du code général de la fonction publique, dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : /.../ 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. /.../ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. /.../ ". Il résulte de ces dispositions qu'un fonctionnaire qui souffre d'une maladie contractée ou aggravée en service a droit à un congé de maladie à plein traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite, sauf s'il entre dans les cas prévus pour l'octroi d'un congé de longue maladie ou de longue durée limitant la période de maintien de cette rémunération. L'imputabilité au service de cette maladie est appréciée par la commission de réforme qui rend un avis ne liant pas l'autorité territoriale. 7. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée. 8. Mme A... fait valoir qu'en raison de sa fragilité particulière du fait de sa sensibilité exacerbée au stress, et des douleurs physiques ressenties à l'accomplissement de certaines tâches, notamment de l'activité bureautique, sa pathologie trouve son origine dans la dégradation progressive de ses conditions de travail à compter de la fin de l'année 2015, résultant d'une nouvelle affectation de son poste d'assistante sur un poste comportant pour l'essentiel du travail bureautique incompatible avec le handicap dont elle souffre, alors que le médecin agréé du comité médical départemental a indiqué, le 27 novembre 2006, qu'il convenait de limiter ses tâches bureautiques à moins de 50 % de son temps de travail. Toutefois, ces seules affirmations peu circonstanciées, ainsi que les deux certificats médicaux produits, des 18 décembre 2017 et 1er août 2018 émanant du même médecin, et le certificat médical d'un médecin spécialisé en sénologie du 1er octobre 2018, qui ne portent pas sur les troubles anxio-dépressifs dont souffre Mme A... et se bornent à indiquer que celle-ci est suivie pour une douleur chronique évolutive en lien avec un travail sur ordinateur et souffre " de douleurs accentuées par les manipulations de la souris de l'ordinateur ", ne sont pas de nature, d'une part, à contredire les appréciations de l'expert l'ayant examinée, lequel a indiqué, dans son rapport du 29 mars 2019 que ses troubles " ne paraissent pas pouvoir être considérés comme résultant de manière essentielle et directe de l'exercice des fonctions. " et d'autre part, à établir un lien direct avec l'exercice de ses fonctions ou avec ses conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause. Par suite, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dépressive de Mme A.... 9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus de placement en congé de longue maladie et placement puis maintien en disponibilité d'office, et la décision de rejet de son recours gracieux dans cette mesure. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie essentiellement perdante à la présente instance, la somme que la région Auvergne-Rhône-Alpes demande au titre des frais qu'elle a exposés. Dans les circonstances de l'espèce, il y a en revanche lieu de mettre à la charge de la région Auvergne-Rhône-Alpes la somme de 1 000 euros à verser à Mme A... au titre de ces mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : La décision du 9 octobre 2018 par laquelle le responsable de l'unité maladie-retraite de la région Auvergne-Rhône-Alpes a refusé d'accorder un congé de longue maladie à Mme A..., la décision de la responsable du service de gestion des personnels et de l'insertion du 2 janvier 2019 en tant qu'elle rejette le recours gracieux présenté contre cette décision, ainsi que les arrêtés des 10 octobre 2018 et 20 juin 2019 par lesquels le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a respectivement placé Mme A... en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 27 septembre 2018 et maintenue celle-ci dans cette position pour la période courant du 27 mars 2019 jusqu'à son admission à la retraite pour invalidité, et la décision précitée du 2 janvier 2019 rejetant le recours gracieux formé contre l'arrêté du 10 octobre 2018 sont annulés. Article 2 : Le jugement n° 1901959-1901961-1906856-1906857-1910004 du 23 décembre 2020 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : La région Auvergne-Rhône-Alpes versera à Mme A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... et les conclusions de la région Auvergne-Rhône-Alpes présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la région Auvergne-Rhône-Alpes. Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2023. La rapporteure, Emilie FelmyLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Michèle Daval La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 21LY00585
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 03/10/2023, 21BX03175, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une première requête, Mme C... F... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2019 par lequel le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine l'a placée en congé de maladie ordinaire non imputable au service à demi-traitement pour la période du 1er janvier 2019 au 28 février 2019 et d'enjoindre à cette même autorité de la placer en congé de maladie ordinaire imputable au service à plein traitement. Par une seconde requête, Mme C... F... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2019 par lequel le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine a, d'une part, décidé que les frais médicaux et les arrêts de travail relatifs à l'accident de service dont elle a été victime le 9 février 2017 seront pris en charge par la Région au titre de la garantie accident du travail pour la période du 9 février 2017 au 30 mars 2018 avec prolongation d'une telle prise en charge pour les arrêts de travail jusqu'au 30 septembre 2018, d'autre part, fixé au 30 mars 2018 la date de consolidation de son état de santé suite à cet accident de service, enfin, décidé que les frais médicaux seront à la charge de l'intéressée à compter du 31 mars 2018 et que les arrêts de travail seront pris en compte au titre de congé de maladie ordinaire non imputables au service à compter du 1er octobre 2018 et d'enjoindre à cette même autorité de reconnaître l'imputabilité au service des séquelles dont elle souffre postérieurement à son accident de service et de prendre en charge ses arrêts de travail à compter du 1er octobre 2018. Par un jugement n° 1901140-1901141 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Pau, après avoir joint les deux requêtes, a annulé l'arrêté du président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine du 28 janvier 2019, en tant qu'il fixe la date de consolidation de l'état de santé de Mme F... à la date du 30 mars 2018, décide que les soins prescrits à compter du 31 mars 2018 seront pris en charge par l'intéressée et que les arrêts de travail de cette dernière prescrits à compter du 30 septembre 2018 seront pris au titre de congés de maladie ordinaire non imputable au service, a enjoint au président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine de prendre une nouvelle décision, après un nouvel examen de la situation de Mme F..., et a rejeté le surplus des demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2021, Mme F..., représentée par Me Moura, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 18 mai 2021 précité ; 2°) d'annuler l'arrêté du 16 janvier 2019 par lequel le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine l'a placée en congé de maladie ordinaire non imputable au service à demi-traitement pour la période du 1er janvier 2019 au 28 février 2019 ainsi que l'arrêté du 28 janvier 2019 du président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine précité ; 3°) d'enjoindre à cette même autorité de reconnaître l'imputabilité au service de ses séquelles et de la placer en congé de maladie ordinaire imputable au service à plein traitement. 4°) d'ordonner avant dire droit une expertise médicale. Elle soutient que : - l'arrêté du 16 janvier 2019 contesté est entaché d'incompétence ; - l'arrêté du 28 janvier 2019 indiquant notamment " qu'il fait siennes les conclusions du docteur A... et en conclusions " que la commission fixe un taux d'incapacité permanent partielle de 12% dont 5% en lien avec l'état antérieur " est entaché d'un raisonnement contradictoire et est donc insuffisamment motivé ; il en va de même de l'arrêté du 16 janvier 2019 ; - le président du conseil régional de Nouvelle Aquitaine a méconnu les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 a commis une erreur d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2021, la région Nouvelle-Aquitaine, représentée par la société Centaure Avocats, agissant par Me Magnaval, conclut au rejet de la requête. Elle s'en remet aux observations qu'elle a présentées devant le tribunal administratif. Par une ordonnance du 23 août 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2023. Par un courrier du 6 septembre 2023, les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions de Mme F... tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 janvier 2019 du président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, à défaut d'intérêt pour agir de l'intéressée. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de Mme D..., - et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... F..., adjointe technique territoriale des établissements d'enseignement de la région Nouvelle-Aquitaine, qui exerce ses fonctions au lycée André Campa à Jurançon dans le département des Pyrénées-Atlantiques, a été victime d'un accident de trajet, le 9 février 2017, entre son domicile et son lieu de travail. Par arrêté du 16 mars 2017, le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine a reconnu l'imputabilité au service de cet accident. Après une expertise médicale, la commission départementale de réforme a émis le 13 décembre 2018 un avis défavorable à l'imputabilité des prolongations d'arrêts de travail et de soins présentés à compter du 31 mars 2018. Par arrêté du 16 janvier 2019, le président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine a placé l'intéressée en congé de maladie ordinaire à demi-traitement pour la période du 1er janvier au 28 février 2019. Par arrêté du 28 janvier 2019, cette même autorité a, d'une part, décidé que les frais médicaux et les arrêts de travail relatifs à l'accident de service dont elle a été victime seraient pris en charge par la Région au titre de la garantie accident du travail pour la période du 9 février 2017 au 30 mars 2018 avec prolongation d'une telle prise en charge pour les arrêts de travail jusqu'au 30 septembre 2018, d'autre part, fixé au 30 mars 2018 la date de consolidation de son état de santé, décidé que les frais médicaux seraient à la charge de l'intéressée à compter du 31 mars 2018, et que les arrêts de travail seraient pris en compte au titre des congés de maladie ordinaire non imputable au service à compter du 1er octobre 2018. Mme F... a demandé au tribunal administratif de Pau l'annulation des arrêtés des 16 janvier et 28 janvier 2019 précités. 2. Par un jugement du 18 mai 2021, le Tribunal a annulé l'arrêté du 28 janvier 2019 précité, en tant qu'il fixe la date de consolidation de l'état de santé de Mme F... au 30 mars 2018, décide que les soins prescrits à compter du 31 mars 2018 seront pris en charge par l'intéressée et que les arrêts de travail de cette dernière prescrits à compter du 30 septembre 2018 seront pris au titre de congés de maladie ordinaire non imputable au service, a enjoint au président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine de prendre une nouvelle décision, après un nouvel examen de la situation de Mme F... et a rejeté le surplus de ses demandes. Mme F... relève appel de ce jugement dont elle demande l'annulation. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne l'arrêté du 28 janvier 2019 : 3. Le tribunal administratif de Pau ayant fait droit aux conclusions de la requérante tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 janvier 2019, ses conclusions d'appel tendant à nouveau à l'annulation de cet arrêté sont, à défaut d'intérêt pour agir de l'intéressée, irrecevables. En ce qui concerne l'arrêté du 16 janvier 2019 : 4. En premier lieu, à l'appui de son moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige la requérante ne se prévaut devant la Cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation présentée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué. 5. En deuxième lieu, si Mme F... a entendu invoquer le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 16 janvier 2019, en se bornant à critiquer en appel, la motivation contenue dans l'arrêté du 28 janvier 2019 indiquant que " la commission fixe un taux d'incapacité permanent partielle de 12% dont 5% en lien avec l'état antérieur ", elle ne critique pas utilement la réponse retenue par le tribunal sur ce point. Il ne ressort par ailleurs pas des termes de l'arrêté du 16 janvier 2019 litigieux, qui place Mme F... en congé de maladie ordinaire à demi-traitement pour la période du 1er janvier au 28 février 2019, qu'il contiendrait des mentions contradictoires. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté ne peut qu'être écarté. 6. En troisième lieu, d'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite (...) ". 7. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 8. D'autre part, aux termes du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires issu de l'ordonnance du 19 juillet 2017, créé par l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique : " Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. (...) ". 9. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont en conséquence entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, la situation de l'intéressée n'entrant pas dans le champ d'application des dispositions transitoires prévues à l'article 15 de ce décret. 9. Lorsque l'état d'un fonctionnaire est consolidé postérieurement à un accident imputable au service, le bénéfice des dispositions du 2° de l'article 57 précité et le droit de conserver l'intégralité du traitement est subordonné, non pas à l'existence d'une rechute ou d'une aggravation de sa pathologie, mais à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. 10. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'avant son accident de trajet du 9 février 2017 reconnu comme imputable au service, Mme F... a subi une opération du rachis cervical par une arthrodèse au niveau des cervicales C5-C6 et qu'en mars 2017 il a été établi au vu de plusieurs examens, l'existence d'une capsulite des deux épaules résultant d'un état antérieur à cet accident. D'autre part, les rapports concordants du docteur G..., des 16 mai 2017 et 30 mars 2018, du docteur B..., neuro-chirurgien, du 27 mai 2017, et du docteur A..., du 26 octobre 2018, ont établi le constat d'une amplification liée à son accident de douleurs polyarticulaires arthrosiques anciennes et de séquelles indissociables de l'état médical antérieur de l'intéressée. Enfin, dans son avis du 13 décembre 2018, la commission de réforme a également estimé qu'à la date de consolidation de l'état de santé de Mme F... le 30 mars 2019, les arrêts de travail et les soins nécessaires aux troubles persistants ne relevaient plus que de son état de santé antérieur et ne présentaient ainsi plus de " lien direct, déterminant et certain " avec l'accident de service. 11. Si Mme F... fait valoir notamment que ses douleurs persistantes au niveau des épaules et du rachis cervical sont la résultante directe de l'accident du travail dont elle a été victime le 9 février 2017 en s'appuyant sur le rapport établi le 27 avril 2019 par le docteur E... qui indique : " séquelles d'un accident de trajet du 9 février 2017 raideur modérée de l'épaule gauche, taux d'IPP 7% (imputable au service, dolorisation d'un état antérieur)", le caractère peu précis et circonstancié de cette pièce au regard des douleurs actuelles de la requérante en rapport avec l'accident de service n'est pas de nature à contredire utilement les appréciations concordantes des médecins rappelées au point précédent. Dans ces conditions, les troubles persistants dont la requérante souffre, bien que présentant la même symptomatologie que ceux ayant été amplifiés par l'accident, ne peuvent être regardés comme présentant un lien direct avec cet accident. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation doit être écarté. 12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de désigner un expert, que Mme F... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2019. 13. Les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme F... étant rejetées il y a également lieu de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F... et à la région Nouvelle-Aquitaine. Délibéré après l'audience du 11 septembre 2023 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2023. La rapporteure, Caroline D... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine JussyLa République mande et ordonne au préfet de la région Nouvelle-Aquitaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21BX03175 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 26/09/2023, 21BX03452, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par deux requêtes distinctes, Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les décisions des 25 janvier et 25 février 2019 par lesquelles, respectivement, le directeur de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) et le président du centre intercommunal d'action sociale (CIAS) d'Aire-sur-l'Adour ont rejeté ses recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et qui ont nécessité des arrêts de travail à compter du 30 septembre 2015. Par un jugement n° 1900764-1900767 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté ces demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 20 août 2021 et un mémoire enregistré le 30 août 2023, Mme A..., représentée par Me Diversay, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 15 juin 2021 ; 2°) d'annuler les décisions des 25 janvier et 25 février 2019 par lesquelles, respectivement, le directeur général de la CNRACL et le président du CIAS d'Aire-sur-l'Adour ont rejeté ses recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et qui ont entraîné des arrêts de travail à compter du 30 septembre 2015 ; 3°) d'enjoindre au CIAS d'Aire-sur-l'Adour de procéder à la convocation d'une nouvelle commission de réforme aux fins de statuer sur l'imputabilité au service des pathologies dont elle est atteinte et de son aptitude médicale à exercer ses fonctions, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge conjointe du CIAS d'Aire-sur-l'Adour et de la CNRACL la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les pathologies dont elle est atteinte sont imputables au service ; elle ne souffrait d'aucune pathologie antérieure ; - le tribunal s'est fondé à tort sur un avis du comité médical plutôt que sur l'avis de la commission de réforme ; - la commission de réforme du 27 avril 2018 était irrégulièrement composée et ne s'est pas prononcée au vu d'un rapport du médecin de prévention en méconnaissance des articles 3 et 15 de l'arrêté du 4 août 2004 ainsi que des articles 18 et 26 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986. Par un mémoire enregistré le 3 octobre 2022, la Caisse des dépôts et consignations conclut au rejet de la requête. Elle soutient qu'en application du 7° de l'article R.811-1 du code de justice administrative, la cour n'est pas compétente pour statuer sur la légalité du décompte accompagnant son brevet de pension et que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Par des mémoires enregistrés les 26 et 28 octobre 2022, le CIAS, représenté par Me Loubère, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre des frais exposés pour l'instance. Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... a été engagée comme aide à domicile en contrat à durée déterminée par le centre intercommunal d'action sociale (CIAS) d'Aire-sur-l'Adour (Landes) du 10 août 2006 au 30 septembre 2007. Elle a ensuite été nommée agent social de seconde classe stagiaire à temps non complet à compter du 1er octobre 2007 puis titularisée un an plus tard. Le 1er avril 2015, elle a été affectée au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Olivier Darblade à Aire-sur-l'Adour. Elle a été placée en congé de maladie ordinaire du 30 septembre 2015 au 29 septembre 2016 puis en disponibilité à compter du 30 septembre 2016. Par un arrêté du 27 septembre 2018, le président du CIAS l'a placée en retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 1er juillet 2018. Par une décision du 25 février 2019, cette même autorité a rejeté le recours gracieux présenté par Mme A... concernant l'imputabilité au service de cette invalidité. Par ailleurs, par une décision du 25 janvier 2019, le directeur de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a également rejeté le recours présenté par Mme A... à l'encontre du décompte accompagnant son brevet de pension en tant qu'il mentionnait que son invalidité n'était pas imputable au service. Mme A... relève appel du jugement du 15 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions des 25 janvier et 25 février 2019. Sur la compétence de la cour : 2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions de retraite des agents publics... " 3. Il résulte de ces dispositions que les conclusions de la requête dirigées contre la décision du 25 janvier 2019 par laquelle le directeur de la CNRACL a rejeté le recours présenté par Mme A... à l'encontre du décompte accompagnant son brevet de pension en tant qu'il mentionnait que son invalidité n'était pas imputable au service ne relèvent pas de la compétence d'appel de la cour mais d'un recours en cassation devant le Conseil d'Etat. Par suite, il y a lieu de renvoyer lesdites conclusions devant le Conseil d'Etat. Sur l'avis de la commission de réforme du 27 avril 2018 : 4. En premier lieu, l'article 18 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires alors en vigueur prévoit que : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir, s'il le demande, communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion ; il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous. " En application de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, le médecin du travail, pour la fonction publique hospitalière, compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission. Lorsque la commission statue sur le cas d'un sapeur-pompier professionnel, son secrétariat informe le médecin de sapeurs-pompiers désigné par le préfet sur proposition du directeur départemental des services d'incendie et de secours. Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous. " 5. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la lettre que le CIAS d'Aire-sur-l'Adour a adressé à Mme A... le 23 janvier 2018 ainsi que de l'avis émis par la commission de réforme du 27 avril 2018 que cette commission n'a pas été saisie d'une demande de Mme A... correspondant à l'un des cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 du décret du 14 mars 1986 ou à l'un des cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 de l'arrêté du 4 août 2004 mais d'une demande d'avis du CIAS concernant sa mise à la retraite d'office pour invalidité. Par suite, Mme A... ne peut pas utilement se prévaloir de ce que le médecin de prévention n'a pas remis un rapport à la commission de réforme avant qu'elle ne rende son avis, alors, au demeurant, que cette commission était en possession du rapport établi par le médecin de prévention le 26 avril 2017, lequel concluait déjà, à cette date, à son inaptitude définitive. 6. En deuxième lieu, il résulte des articles 3 et 16 de l'arrêté susvisé du 4 août 2004 que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 7. En l'occurrence, il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme s'est prononcée au vu du rapport d'un médecin rhumatologue agréé, qui a conclu que les pathologies dont elle était atteinte présentaient un caractère purement dégénératif et étaient dès lors sans lien avec le service. En outre l'appelante ne produit aucun élément médical permettant de remettre en cause ce diagnostic ou de considérer que sa situation médicale présenterait une complexité particulière. Dans ces conditions, il n'apparait pas manifeste que la présence d'un médecin spécialiste des pathologies dont elle est atteinte était nécessaire pour éclairer l'examen de son cas. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 3 et 16 de l'arrêté du 4 août 2004 doit être écarté. 8. En troisième et dernier lieu, si l'appelante fait valoir que le médecin agréé l'a examinée le 2 novembre 2017 à la demande du comité médical en vu d'apprécier son inaptitude définitive à toutes fonctions puis qu'il a remis son rapport à la commission de réforme le 31 janvier 2018 sans l'examiner à nouveau, elle n'établit ni même ne soutient que l'évolution de son état de santé ou que les examens médicaux qu'elle aurait subis postérieurement au 2 novembre 2017 seraient de nature à établir l'imputabilité au service de cette pathologie ni, par voie de conséquence, que le rapport du médecin agréé n'était plus d'actualité lors de la réunion de la commission de réforme du 27 avril 2018. 9. Il résulte de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse du 25 février 2019 a été prise au vu d'un avis irrégulier de la commission de réforme. Sur l'imputabilité au service de l'invalidité de Mme A... : 10. Aux termes de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. ". 11. Il ressort du certificat médical établi à sa demande par son médecin généraliste le 4 décembre 2018 que Mme A... souffre d'une gonarthrose fémoro-tibiale bilatérale ainsi que de rachialgies lombaires invalidantes. Ce certificat précise qu'au vu des examens pratiqués ces pathologies présentent un caractère " fortement dégénératif " et qu'elle souffrait déjà de ces pathologies antérieurement à son entrée dans le service en 2006, même si elles se sont depuis " majorées ". En outre, il ressort également des rapports établis par un médecin agréé les 2 novembre 2017 et 31 janvier 2018 que ces pathologies sont purement dégénératives et associées à une obésité morbide. Au vu de ces éléments, en se bornant à faire valoir que son état de santé s'est régulièrement aggravé depuis son entrée en service et à se prévaloir de l'attestation établie par son nouveau médecin généraliste le 21 mai 2019, lequel indique seulement, sans remettre en cause le diagnostic établi, qu'eu égard aux seuls examens paracliniques qu'il a pratiqué le même jour et à l'activité professionnelle de l'intéressée, il lui paraît " très probable " que les lésions douloureuses dont elle souffre soient imputables au service, l'appelante n'est fondée à soutenir ni qu'elle ne présentait aucun état antérieur ni que les pathologies dont elle souffre n'auraient pas évolué pour leur propre compte mais auraient au contraire été causées par les gestes répétitifs liés à son travail d'aide à la personne exécutés depuis 2006. Enfin, si elle entend également se prévaloir, dans ses dernières écritures, du tableau n° 79 des maladies professionnelles figurant à l'annexe II à l'article R. 461-3l du code de la sécurité sociale, qui retient l'imputabilité aux " travaux comportant des efforts ou des ports de charges exécutés habituellement en position agenouillée ou accroupie " des " lésions chroniques à caractère dégénératif du ménisque isolées ou associées à des lésions du cartilage articulaire ", il ne ressort aucunement des pièces du dossier que l'appelante souffrirait de cette dernière pathologie dont elle n'a jamais fait état ni, a fortiori, sollicité qu'elle soit reconnue imputable au service. 12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont considéré que les pathologies invalidantes dont elle souffre n'étaient pas imputables au service et ont, par suite, rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 25 février 2019 par laquelle le président du CIAS d'Aire-sur-l'Adour a rejeté son recours gracieux tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de ces mêmes pathologies. Par suite, ces conclusions ainsi les conclusions de la requête à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à l'encontre du CIAS doivent être rejetées. 13. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du CIAS d'Aire-sur-l'Adour tendant à l'application des mêmes dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Les conclusions de Mme A... dirigées contre la décision du directeur de la CNRACL du 25 janvier 2019 sont renvoyées devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté. Article 3 : Les conclusions du CIAS d'Aire-sur-l'Adour tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., au centre intercommunal d'action sociale d'Aire-sur-l'Adour et à la caisse des dépôts et consignations. Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient : M. Laurent Pouget, président, Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure, M. Manuel Bourgeois, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 septembre 2023. Le rapporteur, Manuel B... Le président, Laurent PougetLa greffière, Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21BX03452 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de TOULOUSE, , 28/09/2023, 22TL21969, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse suivante : Mme A... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de condamner le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne à lui verser une provision de 71 560 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait d'une maladie imputable au service. Par une ordonnance n° 2203247 du 29 août 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 12 septembre 2022 sous le n° 22TL21969, Mme C..., représentée par Me George, demande à la cour : 1°) d'annuler l'ordonnance du 29 août 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse ; 2°) de lui accorder, à titre principal, une provision d'un montant de 71 560 euros ou, à titre subsidiaire, d'un montant de 14 312 euros, à la charge du syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne ; 3°) de condamner le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne à lui verser une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa demande de provision en réparation de préjudices extrapatrimoniaux est justifiée par la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail entre le 31 août 2012 et le 5 novembre 2013 et le 26 novembre 2013 jusqu'à sa consolidation au 9 mars 2021 ; - la créance est établie avec un degré de certitude suffisant pour demander une provision de 15 560 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire pour la période allant du 31 août 2012 au 9 mars 2021 et à une provision de 56 000 euros au titre du préjudice d'incapacité fonctionnelle permanente de 25 % retenu par la commission de réforme le 1er juillet 2021 ; - le juge des référés a commis une erreur de droit en refusant de reconnaître les droits acquis par la décision d'imputabilité au service du 9 décembre 2014 ; - le juge des référés a commis une erreur d'appréciation ; - le juge des référés aurait dû au moins accorder une provision d'un montant de 14 312 euros au regard du taux de déficit fonctionnel permanent de 5 % qu'il a implicitement reconnu comme une créance non sérieusement contestable. Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2023, le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne, représenté par Me Herrmann, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme C... d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la créance revêt un caractère sérieusement contestable en ce qu'elle repose sur les seules allégations de la requérante et non sur des éléments du dossier ; - il résulte des consultations psychiatriques qui se sont succédées entre 2013 et 2021 que la requérante est victime de rechutes dépressives, lesquels sont causées par la procédure contentieuse qu'elle a elle-même initiée et non par le seul accident imputable au service de 2012 ; - Mme C... bénéficie depuis la date de son premier arrêt maladie, le 31 août 2012, d'un traitement brut mensuel de 2 451,49 euros ; - elle a été indemnisée de ses préjudices extrapatrimoniaux par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 12 juillet 2021 revêtu de l'autorité de la chose jugée ; elle n'est pas fondée à demander une nouvelle indemnisation sur le fondement de ces mêmes préjudices, en vertu du principe non bis in idem. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., fonctionnaire employée par le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne, a été placée en congé maladie à compter du 31 août 2012. Elle a repris ses fonctions à mi-temps thérapeutique entre le 5 et 26 novembre 2013 puis a de nouveau été arrêtée pour raisons médicales. Son arrêt maladie initial a été reconnu comme un accident imputable au service par une décision du président de l'établissement public du 9 décembre 2014. La commission de réforme des agents des collectivités territoriales a estimé dans son avis du 1er juillet 2021 que la date de consolidation de cet accident devait être fixée au 9 mars 2021 et proposé de retenir un taux d'incapacité permanente partielle de 25 %. L'intéressée a été admise à la retraite pour invalidité à compter du 1er février 2023 et la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales a décidé le 14 juin 2023 de lui attribuer une rente d'invalidité au taux de 25 % prenant effet le 1er février 223. Mme C... avait aussi saisi le tribunal administratif de Toulouse sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative d'une demande tendant à ce que le syndicat mixte soit condamné à lui verser une provision de 71 560 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'accident de service. Elle fait appel de l'ordonnance du 29 août 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande. Sur la fin de non-recevoir : 2. L'autorité de chose jugée attachée à une décision de justice rendue sur une demande indemnitaire porte sur l'ensemble des chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages invoqués par la victime, causés par le même fait générateur et dont elle supporte la charge financière, à l'exception de ceux qui, tout en étant causés par le même fait générateur, sont nés, se sont aggravés ou ne se sont révélés dans toute leur ampleur que postérieurement à la première réclamation préalable de la victime ou de ceux qui ont été expressément réservés dans sa demande. 3. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêt du 12 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le refus d'octroi de la protection fonctionnelle opposé à Mme C..., enjoint à l'établissement public de lui accorder ladite protection et a fait droit à sa demande d'indemnisation en raison du préjudice moral résultant du harcèlement moral dont elle avait été victime à hauteur de 6 000 euros. La demande de provision qui fait l'objet du présent appel porte sur les préjudices liés aux conséquences dommageables de l'accident de service. Les conclusions de l'appelante portent ainsi sur un objet distinct et sont sans incidence sur l'autorité de chose jugée dont est doté l'arrêt devenu définitif lu le 12 juillet 2021 de la cour administrative d'appel de Bordeaux. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne ne peut être accueillie. Sur la demande de provision : 4. D'une part, aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui paraît revêtir un caractère de certitude suffisant. 5. D'autre part, les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre, au titre des conséquences patrimoniales de l'atteinte à l'intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial, tels que des souffrances physiques ou morales, un préjudice esthétique ou d'agrément ou des troubles dans les conditions d'existence, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait. 6. Ainsi qu'il a été exposé au point 1, par un avis du 1er juillet 2021, la commission départementale de réforme a retenu une consolidation de l'état de santé de Mme C... au 9 mars 2021 et un taux d'incapacité permanente partielle de 25 % conformément à l'expertise médicale réalisée par le docteur D... du 9 mars 2021. Par un arrêté du 2 février 2023, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales a radié l'intéressée des cadres et l'a admise à la retraite pour invalidité puis par une décision du 14 juin 2023 lui a accordé le bénéfice d'une rente d'invalidité de 25 % en application de l'article 37 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales en raison de l'imputabilité au service de son état de santé. Contrairement à ce qu'oppose le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne, la requérante apporte ainsi bien la preuve d'un préjudice, non seulement par les nombreux rapports médicaux faisant état de la dégradation de son état de santé imputable au service mais aussi par l'évaluation du taux d'incapacité en résultant. Si le syndicat fait valoir que le syndrome anxiodépressif dont souffre l'appelante n'est pas uniquement lié au seul accident imputable au service mais résulte de la procédure contentieuse ultérieure qu'elle a elle-même initiée, il résulte des rapports d'expertise du docteur D... que Mme C... n'avait aucun état antérieur de troubles psychologiques avant les événements de 2012 et sa prise de poste, et que sa pathologie a été entièrement causée par la dégradation de ses conditions de travail. La circonstance également avancé en défense que dans un rapport du 22 octobre 2020, le docteur B... a fixé la date de consolidation de l'appelante au 31 août 2015 et le taux d'incapacité permanente partielle à 5 %, n'est pas susceptible de rendre sérieusement contestable l'obligation pesant sur l'administration dès lors que ces conclusions n'ont pas été retenues par la commission de réforme puis par la Caisse nationale de retraites des collectivités locales qui ont admis le taux de 25 %. Dans ces conditions, les préjudices invoqués par Mme C... sont en lien direct avec l'accident du service dont elle a été victime et l'obligation de réparation de ce préjudice par le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne n'est pas sérieusement contestable. 7. La circonstance invoquée en défense que la requérante ait perçu un plein traitement depuis le 31 août 2012 est sans incidence s'agissant de la réparation d'un préjudice lié à la détérioration de son état de santé imputable au service. Eu égard à la situation de la requérante, âgée de 42 ans à la date de consolidation, aux conséquences sur son état de santé évoquées dans le rapport d'expertise susmentionné et au taux de 25 % d'incapacité retenu par le médecin expert, il sera fait une juste appréciation du préjudice lié à cette incapacité en fixant sa réparation à hauteur de 40 000 euros. Mme C... a également été victime d'un déficit fonctionnel temporaire durant la période comprise entre le 31 août 2012 et le 9 mars 202. Il sera fait une juste appréciation du préjudice en lien eu égard aussi au rapport d'expertise du docteur D... en lui accordant la somme de 5 000 euros. 8 Il suit de là qu'en l'état de l'instruction la créance dont se prévaut Mme C... à l'encontre du syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne présente un caractère non sérieusement contestable à hauteur de 45 000 euros. Il y a lieu de condamner cet établissement public à lui verser une provision de ce montant. Sur les frais liés au litige : 9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la requérante présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions du syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne tendant à l'application du même article ne peuvent qu'être rejetées. O R D O N N E : Article 1er : L'ordonnance n° 2203247 du 29 août 2022 du tribunal administratif de Toulouse est annulée. Article 2 : Le syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne est condamné à verser une somme de 45 000 euros à Mme C... à titre de provision, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Les conclusions du syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... C... et au syndicat mixte des eaux et de l'assainissement de la Haute-Garonne Toulouse. Fait à Toulouse, le 28 septembre 2023. Le président, J-F. MOUTTE La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. Pour expédition conforme, La greffière en chef, N°22TL21969 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de PARIS, 8ème chambre, 02/10/2023, 22PA00725, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris puis au Tribunal administratif de Paris auquel a été transféré son recours d'annuler la décision du 19 novembre 2018 par laquelle le directeur de la caisse nationale militaire de sécurité sociale a refusé de prendre en charge sa demande d'appareillage auditif au titre de l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de la décision du 24 avril 2019 en tant que lui a été refusée la prise en charge de l'intégralité du coût de ses prothèses auditives. Par jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse partiellement de prendre en charge les appareils auditifs de M. A... et a condamné la caisse nationale militaire de sécurité sociale à lui rembourser les sommes qu'il a dû verser, sous déduction de celles déjà prises en charge le cas échéant par des organismes de sécurité sociale et de protection sociale complémentaire, avec intérêt au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 19 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle. Procédure devant la Cour : Par requête et un mémoire enregistrés les 16 février 2022 et 20 février 2023, la caisse nationale militaire de sécurité sociale, représentée par son directeur, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) de rejeter la demande de M. A.... Elle soutient que : - le jugement attaqué a méconnu les dispositions de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - en remboursant les prothèses auditives de M. A... uniquement à hauteur de 2 800 euros et non intégralement, la CNMSS a fait une juste application de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de la nomenclature de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l'article L.165-1 du code de la sécurité sociale concernant les aides auditives. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2022, M. A..., représenté par Me Haushalter, conclut au rejet de l'appel de la caisse nationale militaire de sécurité sociale, à la confirmation du jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris et à la condamnation de l'Etat à verser la somme de 2 000 euros à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 27 avril 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense et créant un recours administratif préalable obligatoire en matière de pensions militaires d'invalidité ; - le décret n° 2018-1292 du 28 décembre 2018 pris pour l'application de l'article 51 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - l'arrêté du 14 novembre 2018 portant modification des modalités de prise en charge des aides auditives et prestations associées au chapitre 3 du titre II de la liste des prestations prévues à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Collet, première conseillère, - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. C... A..., né le 29 octobre 1950, militaire de carrière est titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 85 % concédée par un arrêté du 29 mars 2016 à compter du 9 avril 2014 en raison notamment de séquelles de traumatisme sonore avec perte de sélectivité et hypoacousie bilatérale. Le 13 septembre 2018, des prothèses auditives lui ont été prescrites et le 12 novembre 2018, M. A... en a sollicité la prise en charge sur le fondement de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par décision du 19 novembre 2018, le directeur de la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) a refusé de faire droit à cette demande avant finalement d'accepter de les prendre en charge à hauteur de 2 800 euros par décision du 24 avril 2019. Par jugement n°1923752/5-3 du 15 décembre 2021, dont la CNMSS relève appel, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision du 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse partiellement de prendre en charge les appareils auditifs de M. A... et a condamné la CNMSS à lui rembourser les sommes qu'il a dû verser, sous déduction de celles déjà prises en charge le cas échéant par des organismes de sécurité sociale et de protection sociale complémentaire, avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 19 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle. Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Aux termes de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les invalides pensionnés au titre du présent code ont droit aux appareils, produits et prestations nécessités par les infirmités qui ont motivé leur pension. Les appareils sont fournis, réparés et remplacés aux frais de l'Etat dans les conditions prévues par le présent code, tant que l'infirmité en cause nécessite l'appareillage. Les produits et prestations pris en charge par l'Etat sont ceux prévus à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, dans les conditions définies par cet article ou par les dispositions du présent code. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article D. 211-7 de ce code : " Le droit au bénéfice des dispositions des articles L. 212-1, L.213-1 et L. 221-1 suit le sort de la pension d'invalidité ". 3. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la fiche descriptive des infirmités portant décision d'attribution d'une pension militaire d'invalidité du 11 avril 2016 que si une pension militaire d'invalidité a été attribuée à M. A... au titre des " Séquelles de traumatisme sonore avec perte de sélectivité. Hypoacousie bilatérale. Origine par preuve blessure reçue par le fait du service le 13/01/1982 - Hors guerre " avec un taux de 10 % + 15, seule l'infirmité " séquelles de traumatisme sonore avec perte de sélectivité lui a ouvert un droit à pension au taux de 10 % + 15 et que l'hypoacousie est en relation avec l'infirmité pensionnée. Il s'ensuit que dès lors que l'hypoacousie dont souffre M. A... ne lui a pas ouvert un droit à pension spécifique mais est seulement associée à une perte de sélectivité, elle ne peut être regardée comme une infirmité ayant motivé son droit à pension au sens des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et lui ouvrant ainsi droit, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, à la prise en charge par l'État des frais liés à cette infirmité. Or, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la prescription médicale du 13 septembre 2018 du docteur B... et de l'audiogramme du même jour que les prothèses auditives prescrites à M. A... ont pour objectif de corriger la surdité de perception et non sa perte de sélectivité. Par suite, la CNMSS est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision du 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse la prise en charge de l'intégralité du coût de ses prothèses auditives en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 4. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris. Sur les autres moyens invoqués par M. A... en première instance : 5. En premier lieu, M. A... soutient que le directeur de la CNMSS s'est volontairement abstenu de solliciter les services de son médecin conseil, praticien de référence en charge de l'analyse et de l'interprétation des examens médicaux. Toutefois il n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, et notamment pas des textes qui imposeraient un tel recours au médecin conseil. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision du 19 novembre 2018 attaquée pour ce motif ne peut qu'être écarté. 6. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le requérant, le directeur de la CNMSS aurait entaché la décision du 19 novembre 2018 d'un détournement de pouvoir. Par suite, ce moyen n'est pas fondé. 7. En troisième lieu, M. A... soutient qu'aucune disposition du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ne fait mention de caractéristiques audiométriques tonales spécifiques définissant les critères de prise en charge des appareillages pour des hypoacousies. Toutefois, un tel moyen est inopérant dès lors que comme indiqué au point 3, l'hypoacousie dont souffre le requérant ne lui a pas ouvert un droit à pension spécifique et ne constitue pas une infirmité lui donnant droit à pension au sens des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 8. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision du 19 novembre 2018 après avoir mentionné l'article L. 212-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre précise que les caractéristiques de l'hypoacousie figurant sur la fiche descriptive des infirmités de M. A... ne permettent pas sa prise en charge au titre de cet article. En outre, la décision du 24 avril 2019 du directeur de la CNMSS précise, quant à elle, que bien que " les conditions règlementaires de prise en charge ne soient pas totalement satisfaites, la CNMSS accepte, à titre exceptionnel, de prendre en charge vos audioprothèses, au titre de l'article L.213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ". Cette décision ajoute que la prise en charge aura lieu selon le devis établi le 8 novembre 2018 sur la base du tarif de responsabilité de la sécurité sociale fixé dans la liste des produits et prestations remboursables (LPPR), à 1 400,00 euros par appareil, soit 2 800 euros pour les deux audioprothèses. Les décisions attaquées comportent ainsi l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constitue le fondement et sont, suffisamment motivées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions ne peut qu'être écarté. 9. En dernier lieu, la circonstance que les aides auditives ou audio prothèses et prestations associées soient inscrites dans la liste des produits et prestations prévues à l'article L. 165-1 du code de la sécurité sociale n'est pas susceptible d'ouvrir droit à M. A..., contrairement à ce qu'il soutient, à la prise en charge par l'Etat de l'intégralité des frais liés à son appareillage auditif nécessité par son hypoacousie dès lors que comme indiqué au point 3 du présent arrêt, l'hypoacousie dont il souffre ne lui a pas ouvert un droit à pension spécifique et ne constitue ainsi pas une infirmité ayant motivé son droit à pension au sens des dispositions précitées de l'article L. 213-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 10. Il résulte de tout ce qui précède que la CNMSS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 novembre 2018 et la décision du 24 avril 2019 en tant qu'elle refuse partiellement de prendre en charge les appareils auditifs de M. A... et l'a condamné à lui rembourser les sommes qu'il a dû verser, sous déduction des sommes déjà prises en charge le cas échéant par des organismes de sécurité sociale et de protection sociale complémentaire, avec intérêt au taux légal à compter du 19 novembre 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 19 novembre 2019 puis à chaque échéance annuelle. Dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement du 15 décembre 2021 du tribunal et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal, de même que les conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991, l'Etat n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1923752/5-3 du 15 décembre 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions d'appel présentées devant la Cour sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse nationale militaire de sécurité sociale et à M. C... A.... Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient : - M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement, - Mme Collet, première conseillère, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 octobre 2023. La rapporteure, A. COLLET Le président, F. HO SI FAT La greffière, N. COUTY La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00725
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de MARSEILLE, 6ème chambre, 25/09/2023, 21MA03237, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 2 juillet 2019 par laquelle le président de l'université de Corse l'a déclarée définitivement inapte à l'exercice de ses fonctions et à toutes fonctions et l'a placée en retraite pour invalidité à compter du 1er juillet 2019 et de surseoir à statuer dans l'attente du rapport d'expertise dans le cadre de l'instance en référé n° 1901378 ou d'ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise. Par un jugement n° 1901211 du 9 juillet 2021, le tribunal administratif de Bastia a fait droit à sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 2 août 2021, l'université de Corse, représentée par Me Carreras Vinciguerra, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 9 juillet 2021 ; 2°) de rejeter la demande de Mme C... ; 3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que les premiers juges ont admis la recevabilité de la demande de Mme C... alors que cette dernière sollicitait l'annulation d'un acte préparatoire ne lui faisant pas grief ; - en vertu des dispositions combinées de l'article L. 712-2 du code de l'éducation, de l'article 2 du décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985 et de l'article R. 49 bis du code des pensions, le président de l'université a reçu délégation de compétence pour prononcer l'admission à la retraite de Mme C..., adjointe technique de recherche et de formation ; - les conditions de sa mise à la retraite d'office étaient réunies, l'intéressée ne justifiant pas que les pathologies la rendant apte de manière totale et définitive sont imputables au service. Mme C... a été mise en demeure de produire ses conclusions le 13 janvier 2023. Un courrier du 12 juin 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2. Un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 3 août 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code l'éducation ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985 ; - l'arrêté (nor : ESRH1719924A) du 24 juillet 2017 ; - le code de justice administrative. La présidente de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure, - et les conclusions de M. François Point, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Par une décision du 2 juillet 2019, le président de l'université de Corse a déclaré Mme C... définitivement inapte à l'exercice de ses fonctions et à toutes fonctions et l'a placée en retraite pour invalidité à compter du 1er juillet 2019. Mme C... a alors saisi le tribunal administratif de Bastia d'une demande tendant à l'annulation de cette décision. Par le jugement du 9 juillet 2021, le tribunal administratif a fait droit à cette demande. L'université de Corse relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de Mme C... : 2. La décision en litige du 2 juillet 2019 du président de l'université de Corse dispose, dans son article 1er, que " l'état de santé de Mme C... est consolidé le 3 mars 2019 ", dans son article 2, que " Mme C... (...) est reconnue inapte définitivement à l'exercice de ses fonctions et à toutes fonctions et est donc placée en retraite pour invalidité à compter du 1er juillet 2019 " et, dans son article 3, que " les pathologies reconnues comme rendant inapte Mme C... à ses fonctions et à toutes fonctions ne sont pas imputables au service ". Contrairement à ce que soutient l'université de Corse, une telle décision ne saurait être regardée comme un acte préparatoire ou un simple avis insusceptible de recours. La circonstance que cette décision n'a pas été exécutée, ou que l'intéressée a tenté de retarder par tout moyen la transmission de son dossier d'admission à la retraite, est sans incidence sur cette analyse. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par l'université de Corse ne peut être accueillie. En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par les premiers juges : 3. Aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction applicable à la date de la décision : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée. / L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l'article L. 24 du présent code. Par dérogation à l'article L. 16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. ". 4. Aux termes de l'article L. 29 du même code, dans sa rédaction applicable : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office ; dans ce dernier cas, la radiation des cadres est prononcée sans délai si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement, ou à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si celle-ci a été prononcée en application de l'article 36 (2°) de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application de l'article 36 (3°) de ladite ordonnance. L'intéressé a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° du I de l'article L. 24 du présent code, sous réserve que ses blessures ou maladies aient été contractées ou aggravées au cours d'une période durant laquelle il acquérait des droits à pension. Par dérogation à l'article L. 16 du même code, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale. ". 5. Aux termes de l'article L. 31 du même code : " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par le conseil médical mentionné à l'article L. 28 selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. / Le pouvoir de décision appartient, dans tous les cas, au ministre dont relève l'agent et au ministre des finances. (...) ". 6. Aux termes de l'article L. 951-3 du code de l'éducation : " Le ministre chargé de l'enseignement supérieur peut déléguer par arrêté aux présidents des universités et aux présidents ou directeurs des autres établissements publics d'enseignement supérieur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, tout ou partie de ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des personnels titulaires, stagiaires et non titulaires de l'Etat qui relèvent de son autorité, dans la limite des emplois inscrits dans la loi de finances et attribués à l'établissement. (...) ". Aux termes de l'article R. 951-3 du même code : " Pour tous les actes relevant de leur compétence, les présidents des universités et les présidents ou directeurs des autres établissements publics d'enseignement supérieur peuvent déléguer, par arrêté, leur signature au secrétaire général de l'établissement et, en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, à un fonctionnaire de catégorie A placé directement sous l'autorité de ce dernier. Ces délégations fixent les actes et les corps auxquels elles s'appliquent. / Pour les personnels mentionnés aux 2° et 4° de l'article R. 951-1, les présidents des universités peuvent déléguer, par arrêté, leur signature au directeur de l'unité de formation et de recherche de médecine, d'odontologie ou de pharmacie concernée ou, à défaut, au directeur du département qui assure ces formations. ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté susvisé du 24 juillet 2017, dans sa rédaction applicable : " Les pouvoirs délégués aux présidents et directeurs des établissements publics d'enseignement supérieur pour la gestion des personnels (...) sont les suivants : (...) 8° Reconnaissance de l'état d'invalidité temporaire et ouverture du droit au versement de l'allocation d'invalidité temporaire et, le cas échéant, à la majoration pour tierce personne ; (...) 22° Admission à la retraite. ". 7. La décision attaquée place Mme C..., adjointe technique principale de recherche et de formation, en retraite pour invalidité à compter du 1er juillet 2019, son inaptitude totale et définitive à ses fonctions et à toutes fonctions ayant été reconnue à raison de pathologies non imputables au service. Toutefois, si les présidents d'université ont reçu délégation de pouvoir, d'une part, pour reconnaître l'état d'invalidité temporaire et, d'autre part, pour prononcer l'admission à la retraite des agents techniques de recherche et de formation, ils n'ont en revanche pas reçu délégation de pouvoir pour prononcer l'admission à la retraite pour invalidité, compétence qui ressortit, en vertu des dispositions législatives de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite, non à la seule compétence du ministre en charge de l'enseignement supérieur, mais à la compétence conjointe de ce ministre et du ministre en charge des finances. 8. Il résulte de ce qui précède que l'université de Corse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision du président de l'université du 2 juillet 2019 pour incompétence. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'université de Corse dirigées contre Mme C... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. D É C I D E : Article 1er : La requête de l'université de Corse est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'université de Corse et à Mme B... A... épouse C.... Délibéré après l'audience du 11 septembre 2023, où siégeaient : - M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, - Mme Isabelle Gougot, première conseillère, - Mme Isabelle Ruiz, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 septembre 2023. 2 N° 21MA03237
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 9ème chambre, 22/09/2023, 22PA00477, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 15 avril 2019, par laquelle le recteur de l'académie de Paris a prononcé sa mise à la retraite d'office pour invalidité, à compter du 1er février 2019. Par jugement n° 1912332, 1917036 du 2 décembre 2021 le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme B.... Procédure devant la Cour : Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 1er avril 2022, Mme B..., représentée par la société civile professionnelle (SCP) Gadiou Chevallier, avocats au Conseil d'Etat, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1912332, 1917036 du tribunal administratif de Paris en date du 2 décembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision en date du 15 avril 2019 par laquelle le recteur de l'académie de Paris a prononcé sa mise à la retraite d'office pour invalidité, à compter du 1er février 2019 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est entaché d'une analyse insuffisante des conclusions dont le tribunal était saisi, en violation de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; - il est entaché de dénaturation des pièces du dossier ; - la commission de réforme a été saisie sur la base d'un dossier dissimulant les pathologies dont elle est atteinte ; - la commission de réforme, dans sa réunion du 7 décembre 2018, était irrégulièrement composée, faute de comporter la présence d'un médecin spécialiste ; - sa pathologie est en rapport avec son accident de service de 2008. Par un mémoire, enregistré le 10 juin 2022, le recteur de l'académie de Paris conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de l'éducation ; - le code des pensions civiles et militaires ; - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Simon, - et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., professeure certifiée de lettres classiques, a été placée en congé de longue maladie à compter du 13 mai 2013 jusqu'au 12 mai 2014, puis en congé longue durée à compter du 13 mai 2014 jusqu'au 29 février 2016 en raison d'une affection cancéreuse, périodes pendant lesquelles elle a bénéficié d'un plein traitement. Reconnue travailleur handicapée depuis 2005, Mme B... a repris ses fonctions en mars 2016 au collège Georges Braques dans le 13ème arrondissement de Paris dans le cadre d'un temps-partiel pour raison thérapeutique, avant de reprendre une activité professionnelle à temps plein à compter du 1er juin suivant. Par un arrêté du 15 juin 2016, Mme B... a été affectée au sein du collège Jean Moulin dans le 14ème arrondissement de Paris à compter du 1er septembre 2016. A partir du 1er septembre 2016 et jusqu'au 31 août 2018, Mme B... a de nouveau été placée en congé de longue durée, prolongé le 10 juillet 2018 jusqu'au 12 novembre 2018. Elle demande régulièrement à la Cour l'annulation du jugement du 2 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 15 avril 2019, pris après avis de la commission de réforme du 17 décembre 2018, par lequel le recteur de l'académie de Paris a prononcé son admission à la retraite d'office pour invalidité à compter du 1er février 2019, ainsi que l'annulation dudit arrêté. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, Mme B... soutient que le jugement serait irrégulier en tant qu'il aurait analysé de manière insuffisante ses conclusions. Ce moyen n'est toutefois pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. 3. Dans le cadre de l'effet dévolutif, le juge d'appel, qui est saisi du litige, se prononce non sur les motifs du jugement de première instance mais directement sur les moyens mettant en cause la régularité et le bien-fondé des décisions en litige. Par suite, Mme B... ne peut utilement soutenir que les premiers juges ont entaché leur décision d'erreur de fait ou de dénaturation des pièces du dossier pour demander l'annulation du jugement entrepris. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du décret du 14 mars 1986 susvisé : " Il est institué auprès de l'administration centrale de chaque département ministériel un comité médical ministériel compétent à l'égard des personnels mentionnés au 1er alinéa de l'article 14 ci-après. / Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3ème et 4ème) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. ". Aux termes de l'article 19 de ce même décret : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération. / (...) / Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote. / La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages rapports et constatations propres à éclairer son avis. ". 5. Mme B..., qui soutenait en première instance que ses arrêts de travail étaient dus à une maladie dissimulée par l'administration, consistant en une pathologie anxio-dépressive distincte de sa pathologie cancéreuse, fait valoir qu'elle a été soignée pour un cancer du poumon à compter de mai 2013, pathologie sans rapport avec le service, et que la commission de réforme ne pouvait statuer sans la présence d'un médecin oncologue. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'inaptitude de Mme B... pour tout emploi et l'avis défavorable à un reclassement, dont découle l'arrêté attaqué, ont été retenus par le comité médical lors de sa séance du 6 novembre 2018, au cours de laquelle deux médecins spécialistes ont siégé. La commission de réforme, dont l'avis a constaté l'épuisement du droit à congés de l'intéressée, et l'impossibilité d'un reclassement, et s'est prononcée en faveur d'une mise à la retraite pour invalidité, s'est ainsi approprié l'avis du comité médical mentionné et ne nécessitait ainsi pas, dans les circonstances de l'espèce, la présence d'un médecin oncologue lors de sa séance du 17 décembre 2018. Le moyen tenant à l'irrégularité de procédure doit, ainsi, être écarté. 6. En second lieu, si Mme B... soutient avoir demandé la saisine de la commission de réforme ou du comité médical en lien avec un accident de service survenu en 2008, il ne ressort pas du courrier du 23 juillet 2018, versé au dossier de première instance, adressé aux services du rectorat d'académie, qu'elle aurait demandé que son dossier soit réexaminé en ce sens. Par suite, le moyen soulevé, tiré de ce que la commission de réforme a été saisie sur la base d'un dossier dissimulant les pathologies dont elle est atteinte ne peut qu'être écarté. 7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement entrepris du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Paris la mettant à la retraite d'office pour invalidité totale à compter du 1er février 2019. Ses demandes présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par suite, également être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie sera adressée au recteur de l'académie de Paris. Délibéré après l'audience du 8 septembre 2023, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - M. Simon, premier conseiller, - Mme Boizot, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 22 septembre 2023. Le rapporteur, C. SIMONLe président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA00477
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de PARIS, 8ème chambre, 02/10/2023, 22PA04309, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. E... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " gonalgies chroniques sur gonarthrose compartimentaire interne et fémoropatellaire débutante " et de lui accorder une pension militaire d'invalidité au taux de 20 % à compter du 7 février 2017. Par jugement n° 1925022/5-3 du 27 juillet 2022, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 24 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Swennen, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1925022/5-3 du 27 juillet 2022 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler la décision du 19 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité ; 3°) de lui accorder une pension militaire d'invalidité au taux de 20 % à compter du 7 février 2017 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser à son conseil sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision du 19 avril 2018 est insuffisamment motivée ; -l'infirmité " gonalgies chroniques sur gonarthrose compartimentaire interne et fémoropatellaire débutante " dont il souffre constitue une blessure au sens de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Par un mémoire en défense enregistré le 13 avril 2023, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Collet, première conseillère, - les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique, - et les observations de Me Swennen, avocat de M. E... A.... Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 21 janvier 1981, est entré en service dans l'armée de terre le 14 mai 2001 et est toujours en position de service actif. Par une demande enregistrée le 7 février 2017, il a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité en raison de l'infirmité " gonalgies chroniques sur gonarthrose compartimentaire interne et fémoropatellaire débutante ". Par décision du 19 avril 2018, le ministre des armées a rejeté sa demande au motif que le taux d'invalidité de cette infirmité de 20 % est inférieur au minimum indemnisable de 30 % requis pour l'ouverture d'un droit à pension, lorsqu'il s'agit d'une maladie contractée en temps de paix et que l'infirmité invoquée ne peut être regardée comme une blessure, en l'absence de lésion soudaine, mais doit être considérée comme une maladie. Suite au recours formé par M. A... contre cette décision, le Tribunal des pensions militaires d'invalidité de Paris a, par jugement avant dire droit du 27 septembre 2019, ordonné une mesure d'expertise confiée au docteur B... qui a déposé son rapport le 29 mars 2021. Par jugement n° 1925022/5-3 du 27 juillet 2022, dont M. A... relève appel, le Tribunal administratif de Paris, auquel sa requête a été transférée, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. 2. En premier lieu, la décision du 19 avril 2018 du ministre des armées comporte, la mention des circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté. 3. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : 1 ° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service ". Aux termes de l'article L. 121-4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le taux d'invalidité résultant de l'application des guides barèmes mentionnés à l'article L. 125-3. / Aucune pension n'est concédée en deçà d'un taux d'invalidité de 10 % ". Aux termes de l'article L. 121-5 de ce code : " La pension est concédée : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le taux global d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; (...) ". 4. Il résulte de l'instruction, et notamment du livret médical militaire de M. A... que l'intéressé a souffert dès le 19 septembre 2006 de gonalgie gauche, mention réitérée les 2 et 24 octobre 2006 suivie de l'indication le 12 février 2007 de l'existence d'un problème au niveau de la rotule du genou lesquels peuvent être rattachés à l'infirmité " gonalgies chroniques sur gonarthrose compartimentaire interne et fémoropatellaire débutante " pour laquelle il sollicite le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité. 5. Par suite, s'il est constant d'une part, qu'il a été victime le 18 août 2008 d'un accident lors d'une séance de sport au cours de laquelle il a ressenti un craquement et des douleurs au genou gauche lors du démarrage d'un sprint succédant à un footing de huit kilomètres et le 2 février 2017, alors qu'il était en opération extérieure en Crête, d'une vive douleur au genou gauche alors qu'il jouait au bowling, ces incidents survenus au cours d'activités sportives en service ne peuvent toutefois, pas être regardés compte tenu des antécédents de 2006 et de 2007 comme des blessures au sens des dispositions de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre mais sont liés à une maladie. Les circonstances que le capitaine D... ait, sur le rapport circonstancié du 28 août 2018, coché la case " origine de blessure " et que le lieutenant-colonel C... ait transmis une déclaration d'affection présumée imputable au service ne sont pas de nature à remettre en cause la qualification de maladie de l'infirmité en cause. 6. D'autre part, si le docteur B... a considéré dans son rapport déposé le 29 mars 2021 que l'infirmité de M. A... résulte d'une blessure, il résulte de l'instruction que dans ce rapport il ne fait aucune mention des antécédents de 2006 et 2007 et indique, d'ailleurs, au contraire que " l'interrogatoire du jour ne retrouve aucun antécédent ni médical ni chirurgical ayant un rapport avec les faits qui nous occupent ". Il s'ensuit que la qualification juridique donnée par l'expert à cette infirmité ne peut davantage être retenue pour remettre en cause celle de maladie de l'infirmité invoquée et qui a été retenue à juste titre par le ministre des armées dans la décision contestée. 7. Par suite, dès lors que cette maladie n'est à l'origine que d'un taux d'invalidité de 20 % inférieur au seuil minimal de 30 % prévu par les dispositions précitées l'article L. 121-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, elle ne peut lui ouvrir droit au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour cette infirmité. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Dès lors, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023, à laquelle siégeaient : - M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement, - Mme Collet, première conseillère, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 octobre 2023. La rapporteure, A. COLLET Le président, F. HO SI FAT La greffière, N. COUTY La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA04309
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 14/09/2023, 21BX02509, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de La Réunion à lui verser la somme de 80 000 euros en réparation de divers préjudices et, d'autre part, d'annuler la décision du 27 décembre 2019 par laquelle le directeur général du CHU l'a placée du 21 août au 19 décembre 2019 en congé de maladie non imputable au service, ainsi que la décision implicite par laquelle il a rejeté son recours gracieux reçu le 27 février 2020. Par un jugement n° 1901318, 2000479 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de La Réunion, après avoir joint les deux demandes, a condamné le CHU de la Réunion à lui verser la somme de 9 000 euros et a rejeté le surplus de ses conclusions. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 14 juin 2021 et 10 mai 2023, Mme B..., représentée par Me Antelme, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 12 mars 2021 ; 2°) de condamner le CHU de La Réunion à lui verser une indemnité de 80 000 euros ; 3°) d'annuler la décision du directeur général du CHU du 27 décembre 2019, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ; 4°) de mettre à la charge du CHU de la Réunion la somme de 2 712,50 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont joint deux demandes qui n'étaient pas connexes et qui avaient des fondements et des objets différents, la première étant un recours indemnitaire, la seconde un recours en excès de pouvoir ; il s'est en outre abstenu de répondre à plusieurs moyens et conclusions dans les deux procédures ; - l'établissement a commis des fautes en la faisant travailler bien au-delà de la limite réglementaire, en ne cessant de la solliciter durant son arrêt de travail, en la convoquant à des expertises avec un médecin agréé qu'il a seul choisi et qu'il rémunère, et dont l'objectif était de la licencier pour inaptitude ou la mettre à la retraite pour invalidité, en la plaçant à demi-traitement, en ne lui communiquant pas le deuxième rapport d'expertise, son dossier médical et le procès-verbal de la commission de réforme, en ne répondant pas aux sollicitations de son médecin traitant ou d'elle-même, en ne régularisant pas son dossier auprès de la caisse générale de sécurité sociale et en ne tenant pas compte de sa situation de travailleuse handicapée ; l'employeur s'est abstenu de lui proposer un poste adapté alors qu'il a mentionné le 22 août 2019 comme date de reprise et qu'il a refusé les deux projets de formation qu'elle lui a proposés ; les éléments médicaux qu'elle produit démontrent une absence d'amélioration de son état, et même une dégradation ; - l'indemnisation allouée par le tribunal ne répare que l'incapacité permanente partielle qui lui a été reconnue au taux de 8 %, mais pas les autres postes de préjudice ; la dernière expertise comporte de nombreuses erreurs, et les pièces médicales qu'elle produit sont plus circonstanciées sur le lien direct entre ses lésions et l'accident de service, et remettent en cause tant la date de consolidation que la possibilité d'une reprise d'activité ; l'accident a réduit à néant ses perspectives de carrière et l'a atteinte moralement et physiquement, occasionnant un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence ; la circonstance qu'elle ne remplirait pas les conditions de la rente viagère ou de l'allocation temporaire d'invalidité ne fait pas obstacle à la réparation des autres préjudices, dont l'évaluation ne saurait dépendre des seuls éléments avancés par l'employeur ; les certificats et attestations produits justifient la réalité de ses préjudices, qui ne résultent pas seulement d'une tendinite ; - la décision du 27 décembre 2019 est entachée d'un vice de procédure en ce qu'elle n'a pas eu accès à son dossier médical, pas plus que ne lui a été notifié l'avis de la commission de réforme ; - elle est également irrégulière en ce que la commission de réforme n'a pas à être saisie lorsque l'imputabilité au service d'un accident est reconnue par l'administration ; en outre, c'est au fonctionnaire de transmettre un certificat médical de consolidation, ainsi que le prévoit l'article 37-16 du décret du 30 juillet 1987 ; au vu des erreurs contenues dans l'expertise, l'hôpital aurait dû saisir un autre expert, et non pas la commission de réforme, ou engager une médiation ; - la décision est entachée d'une erreur d'appréciation au vu des éléments médicaux circonstanciés de son dossier qui démontrent l'absence de consolidation de son état de santé et l'impossibilité d'une reprise du travail. Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2023, le CHU de la Réunion, représenté par Me Paraveman, conclut au rejet de la requête et demande, par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement en tant qu'il a alloué une indemnisation à Mme B..., en diminuant son montant. Il fait valoir que : - les règles de procédure ont été respectées ; la commission de réforme devait être obligatoirement consultée pour la détermination de l'incapacité permanente et la constatation officielle de la consolidation de la blessure ; au vu des arrêts de travail transmis par Mme B... après la date de consolidation de son état de santé et la fixation de sa date de reprise, l'établissement pouvait légalement consulter un médecin expert afin de se prononcer sur le caractère imputable ou non de ses arrêts ; - l'établissement n'a fait qu'appliquer les textes et il ne saurait lui être reproché d'avoir manifesté une animosité particulière ou d'avoir refusé une solution alternative ; - l'expertise médicale a conclu que les lésions de Mme B..., postérieures à la date de consolidation, ne pouvaient être imputées, de manière certaine, à son accident de service, évoquant la possibilité d'une hyper laxité ; c'est la raison pour laquelle ses arrêts de travail postérieurs à cette date n'ont pas été reconnus imputables au service, sans qu'il y ait de remise en cause de son état de santé, ni de contradiction avec la proposition de reprise du travail ; - aucune faute ne peut être reprochée, durant la période de congé maladie, à l'établissement qui a seulement vérifié son aptitude à une reprise et recherché un poste adapté ; Mme B... a eu une contre-visite du médecin agréé, plus d'un an après la reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident, qui a conclu à la possibilité d'une reprise du travail ; elle a donc été vue par la médecine du travail, puis par ses supérieurs hiérarchiques ; en raison de la prolongation de ses arrêts de travail, elle a rencontré à nouveau le médecin agréé les 30 janvier et 11 mars 2019, et la commission de réforme a confirmé la possibilité d'une reprise sous restrictions ; l'intéressée a eu communication des décisions successives reconnaissant l'imputabilité au service de tous ses arrêts de travail, des convocations aux expertises et des conclusions des experts ; elle a été maintenue, au besoin après régularisation, à plein traitement durant la totalité de son congé maladie ; en vue de préparer un éventuel reclassement, l'avis des experts médicaux concernant l'aptitude de l'agent était nécessaire ; bénéficiaire de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, Mme B... dispose d'une protection renforcée, ce que l'établissement n'a pas ignoré ; - l'accident n'est pas davantage dû à des fautes de l'établissement, le temps de travail de l'agent ayant été conforme à la réglementation ; - l'hôpital n'a eu comme objectif que d'envisager la réintégration de l'intéressée sur un poste adapté à son état de santé, mais son propre comportement a ralenti les démarches, dès lors qu'elle n'a pas répondu à certaines sollicitations en considérant qu'elle avait le droit d'aller au terme des trois ans d'arrêt pour accident de service envisageables au regard de la réglementation ; - la responsabilité sans faute de l'établissement n'est pas davantage engagée ; ne remplissant pas les conditions d'une radiation des cadres ou d'une allocation temporaire d'invalidité, Mme B... ne peut obtenir réparation d'une perte de revenus ou d'une incidence professionnelle ; ses demandes de réparation de préjudices postérieurs à la date de consolidation de son état de santé ne peuvent qu'être rejetées, en l'absence de lien direct avec le service de sa lésion ; - le préjudice allégué, qu'elle n'identifie pas précisément, n'est, au vu du taux d'incapacité permanente partielle retenu à hauteur de 8 %, et du fait qu'elle ne conserve qu'une tendinopathie, ni avéré, ni justifié dans son montant. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Olivier Cotte, - les conclusions de Mme Charlotte Isoard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., aide-soignante au centre hospitalier universitaire (CHU) de La Réunion depuis septembre 2010, a été victime, le 25 novembre 2016, d'un accident, reconnu imputable au service, qui lui a occasionné un traumatisme de l'épaule droite. Par un courrier du 20 juin 2019, elle a demandé à son employeur de l'indemniser des agissements ou inactions dans la gestion de ses droits à congés, lui ayant occasionné des préjudices qu'elle évalue à 80 000 euros. Par une décision du 18 juillet 2019, le CHU a rejeté cette demande pour absence de faute. Par une décision du 27 décembre 2019, le CHU, après nouvelle expertise de son agent par le médecin agréé et avis de la commission de réforme du 27 juin 2019, a fixé la date de consolidation de la pathologie de Mme B... au 11 mars 2019, a reconnu comme imputables au service les arrêts de travail jusqu'au 20 août 2019, et a placé Mme B... à compter de cette date en congé de maladie ordinaire non imputable au service, à plein traitement pendant trois mois, puis à demi-traitement. 2. Mme B... a saisi le tribunal administratif de la Réunion de deux demandes, la première tendant à la condamnation du CHU à lui verser une indemnité de 80 000 euros en réparation des préjudices subis lors du traitement de ses arrêts de travail imputables au service, la seconde tendant à l'annulation de la décision du 27 décembre 2019 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux. Après avoir joint ces deux demandes, le tribunal a condamné le CHU à lui verser une indemnité de 9 000 euros au titre des souffrances physiques et morales endurées et des troubles dans les conditions d'existence du fait de l'accident de service, et a rejeté le surplus des conclusions. Mme B... relève appel de ce jugement, tandis que le CHU de la Réunion demande, par la voie de l'appel incident, de le réformer afin de rejeter la demande d'indemnisation ou, à tout le moins, de réduire le montant des sommes allouées. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. La circonstance que les premiers juges ont joint les deux demandes présentées par Mme B..., la première tendant à la condamnation du CHU à réparer son préjudice, la seconde tendant à l'annulation pour excès de pouvoir d'une de ses décisions, n'est pas de nature, alors même qu'elles auraient un objet différent et n'auraient pas été connexes, à entacher leur jugement d'irrégularité. Sur les conclusions indemnitaires : En ce qui concerne la responsabilité pour faute du CHU : 4. Mme B... entend engager la responsabilité du CHU pour faute, en raison, d'une part, de ses conditions de travail ayant conduit à l'accident de service du 25 novembre 2016 et, d'autre part, des agissements de l'établissement lors de ses congés maladie ultérieurs. 5. Mme B... n'établit pas, par la seule production du planning de service du mois de novembre 2016, avoir effectué une durée de travail non conforme à la réglementation, qui aurait favorisé la survenue de l'accident de service. 6. Il résulte de l'instruction que l'imputabilité au service de l'accident survenu le 25 novembre 2016, ainsi que des arrêts de travail jusqu'au 24 janvier 2017, a été reconnue par le CHU par décision du 30 janvier 2017. Par des décisions des 29 juin 2018 et 7 mars 2019, l'établissement a également admis l'imputabilité au service des prolongations d'arrêt de travail jusqu'au 5 mars 2019. Si Mme B... estime avoir été trop souvent sollicitée par le CHU durant ses congés maladie, ces sollicitations se justifiaient par la nécessité pour l'administration de se prononcer sur l'imputabilité au service de ses arrêts pendant une durée totale de plus de deux ans, et la première contre-visite n'a été effectuée qu'un an après la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident. Il appartenait également à l'administration de se prononcer sur la possibilité et les conditions d'une éventuelle reprise du travail, d'autant que le médecin du travail l'avait estimée, dans une fiche d'aptitude du 30 mai 2018, apte à la reprise du travail avec restrictions et aménagement du poste. L'établissement n'a pas davantage commis de faute en confiant le soin de réaliser une expertise de l'état de santé de Mme B..., à deux reprises, les 7 février 2018 et 30 janvier 2019, au même médecin spécialiste agréé, choisi dans le respect des dispositions du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière. Si la première de ces expertises comporte des erreurs factuelles sur la situation de l'agent, celles-ci n'ont pas fait obstacle à la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident et des arrêts de travail ultérieurs. 7. Mme B... ne peut sérieusement soutenir que l'établissement aurait méconnu sa qualité de travailleuse handicapée, qui lui a été reconnue le 19 juin 2018, et commis une faute en ne lui proposant pas de poste adapté à son état de santé, dès lors que durant toute cette période courant jusqu'au 20 août 2019, et malgré les conclusions du médecin agréé du 7 février 2018 favorables à une reprise, elle a été placée en congé de maladie imputable au service et n'a pas repris le travail. Son état de santé a également justifié le refus de ses deux demandes de formation pour devenir infirmière diplômée d'Etat ou " permanencière ". 8. Si elle a perçu un demi-traitement pour le mois de juin 2018, cette erreur de liquidation a fait l'objet d'une régularisation, et Mme B... n'établit pas avoir subi un quelconque préjudice de ce fait. 9. La circonstance que le médecin agréé n'a pas communiqué son rapport d'expertise du 30 janvier 2019, malgré une demande de Mme B... par l'intermédiaire de son médecin traitant le 2 mars 2019, n'est pas de nature à caractériser une faute de l'établissement, dès lors que ce document n'est pas adressé à l'employeur, qui n'est destinataire que des conclusions de la commission de réforme. L'employeur ne dispose pas davantage du dossier médical de l'intéressée. 10. Enfin, si Mme B... s'est vu réclamer, en mars 2019, par la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion, un indu de prestations pour un montant de 438,97 euros, pour des actes médicaux réalisés en décembre 2016 et mai 2017, au motif de leur absence de justification par un accident de service, cette erreur n'est pas imputable au CHU, dès lors qu'il ressort d'un courrier de cette même caisse qu'elle disposait, à la date du 7 septembre 2018, des documents relatifs à l'accident de service du 25 novembre 2016. 11. Il s'ensuit que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le CHU aurait commis des fautes dans la gestion de son temps de travail et de ses congés de maladie. En ce qui concerne la responsabilité sans faute du CHU : 12. Du fait de l'accident de service dont elle a été victime le 25 novembre 2016 dont elle conserve une incapacité permanente partielle évaluée à 8 %, Mme B... a subi des souffrances, tant physiques que morales, les documents médicaux produits au dossier attestant de l'existence, depuis lors, d'une dépression sévère. La circonstance que le médecin agréé n'ait pu affirmer de manière certaine que les souffrances postérieures à la consolidation, qu'il a fixée au mois de mars 2019, seraient en lien avec l'accident ne permet pas de douter d'un tel lien au regard de l'ensemble des pièces médicales produites au dossier. L'instabilité de son épaule droite empêche également Mme B... d'exercer les activités de bricolage, de pêche et d'équitation auxquelles elle s'adonnait auparavant, ainsi qu'en témoignent ses proches. Dans ces conditions, le préjudice personnel, suffisamment établi, dont elle est fondée à demander réparation, peut être évalué dans sa globalité à la somme de 14 000 euros. 13. Il résulte de ce qui précède que la somme que le CHU de la Réunion a été condamné à verser à Mme B... par le tribunal doit être portée de 9 000 euros à 14 000 euros. Sur la légalité de la décision du 27 décembre 2019 : 14. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ". 15. Aux termes de l'article 16 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction alors applicable : " La commission départementale de réforme des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée si la maladie provient de l'une des causes prévues au deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé. (...) ". Aux termes de l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, dans sa rédaction alors applicable : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. / (...) / L'avis de la commission de réforme est communiqué au fonctionnaire sur sa demande. (...) ". Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé : " (...) Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. " 16. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées que l'administration est tenue de saisir la commission de réforme pour apprécier l'imputabilité au service des infirmités de l'agent, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent et l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. Si Mme B... se prévaut des dispositions du dernier alinéa de l'article 16 de ce décret, selon lesquelles " La commission de réforme n'est pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration ", ces dispositions ne font pas obstacle à la saisine de la commission lorsque l'administration envisage de refuser de reconnaître imputables au service les prolongations d'un arrêt de travail consécutif à un accident de service, comme en l'espèce. 17. Avant de se prononcer sur l'imputabilité au service des prolongations d'arrêt de travail présentées par Mme B... et de saisir la commission de réforme, le CHU de La Réunion a consulté, ainsi qu'il lui était loisible de le faire en application de l'article 16 du décret du 19 avril 1988 précité, un médecin expert agréé qui a rendu un rapport d'expertise le 12 mars 2019. Si Mme B... a critiqué, dans un courrier adressé au CHU le 20 juin 2019, l'expertise de ce médecin agréé qui l'avait déjà vue à deux reprises les 7 février 2018 et 30 janvier 2019, aucune disposition n'imposait à l'administration, avant de solliciter la commission de réforme, d'obtenir l'avis d'un autre médecin expert agréé. Par ailleurs, la circonstance que le CHU n'ait pas donné suite à la proposition de médiation de Mme B... est sans incidence sur la régularité de la procédure. 18. Il ressort des mentions de l'avis de la commission de réforme du 27 juin 2019 que Mme B... a été invitée à prendre connaissance de son dossier et a comparu devant la commission. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que l'intéressée a transmis à la commission de réforme trois pièces, un courrier d'un praticien hospitalier en chirurgie orthopédique et traumatologique du 13 juin 2019, un compte-rendu de consultation au centre de rééducation de Sainte-Clotilde du 28 mai 2019 et la reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé en date du 19 juin 2018. Si Mme B... soutient qu'elle n'a pas eu accès à son dossier médical, elle n'apporte aucun élément qui démontrerait qu'il n'aurait pas été fait droit à une demande préalable à l'édiction de la décision en litige. Par ailleurs, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que Mme B... aurait sollicité, ainsi que le lui permet l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 précité, la communication de l'avis de la commission de réforme avant l'édiction de la décision contestée. 19. Il s'ensuit que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que cette décision aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière. 20. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que l'accident de service dont a été victime Mme B... lui a occasionné une instabilité de l'épaule droite, avec une subluxation postérieure de la tête humérale, mais sans lésion de la coiffe des rotateurs. Le médecin spécialiste agréé qui l'a examinée le 12 mars 2019 à la demande du CHU a estimé que l'écoulement du temps depuis l'accident, la stabilité des lésions et l'absence de soins autres que chirurgical qui seraient de nature à conduire à une amélioration justifiaient que son état de santé soit regardé comme consolidé à la date de l'expertise, et qu'une reprise du travail était possible à mi-temps thérapeutique, sur un poste adapté pour tenir compte des séquelles afin d'éviter le port de charges lourdes et le travail en hauteur au-dessus de l'horizontale. Les certificats du médecin traitant de l'intéressée, d'un praticien hospitalier en chirurgie orthopédique et traumatologique du CHU et d'un médecin de médecine physique et de réadaptation du centre de rééducation de Saint-Clotilde, qui font état de la nécessité de poursuivre les séances de kinésithérapie, ainsi qu'une psychothérapie et un traitement médicamenteux pour traiter sa dépression, n'apportent pas de précisions sur les possibilités d'évolution de l'état de santé de l'intéressée. Par suite, ils ne sont pas de nature à remettre en cause la date de consolidation retenue par l'administration, pas plus que la possibilité de reprendre le travail sur un poste adapté à son état de santé et à sa qualité de travailleur handicapé, ainsi que l'a d'ailleurs reconnu la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées par décision du 19 juin 2018. 21. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision du 27 décembre 2019 serait entachée d'illégalités. 22. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à demander que la somme que le CHU de La Réunion a été condamné à lui verser soit portée de 9 000 euros à 14 000 euros. Sur les frais liés au litige : 23. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du CHU de La Réunion une somme de 1 500 euros à verser à Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : La somme que le CHU de La Réunion a été condamné à verser à Mme B... est portée de 9 000 euros à 14 000 euros. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 12 mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt. Article 3 : Le CHU versera à Mme B... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre hospitalier universitaire de La Réunion. Délibéré après l'audience du 29 août 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 septembre 2023. Le rapporteur, Olivier Cotte La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02509
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 14/09/2023, 21BX02779, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... D... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 3 septembre 2020 de la commission de recours de l'invalidité rejetant son recours administratif préalable à l'encontre de la décision du 12 novembre 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité, d'annuler la décision du 12 novembre 2019, et de lui attribuer le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux de 85 %. Par un jugement n° 2000568 du 17 mai 2021, le tribunal a annulé la décision de la commission de recours de l'invalidité du 3 septembre 2020 et a attribué à M. D... une pension militaire d'invalidité au taux de 85 % à compter du 9 décembre 2013. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 29 juin 2021 et un mémoire enregistré le 18 juillet 2022, le ministre des armées demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. D... devant le tribunal. Il soutient que : - le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il n'explique pas en quoi les troubles moteurs et sensitifs de la tétraparésie seraient imputables en totalité à l'accident de service et les autres pour moitié ; - le tribunal, qui a indiqué que le docteur C... concluait à un lien direct entre l'aggravation de l'état de santé de M. D... et l'accident du 15 novembre 2011 pour la totalité des troubles moteurs et sensitifs de la tétraparésie, n'a pas tenu compte de l'état antérieur pour fixer à 60 % le taux d'invalidité correspondant à ces troubles, ce qui entache le jugement d'une contradiction de motifs ; - les taux imputables retenus par le tribunal sont de 60 % pour les troubles moteurs et sensitifs de la tétraparésie, de 15 % pour les troubles digestifs, de 10 % pour les troubles urinaires et de 5 % pour les troubles sexuels, ce dernier taux inférieur à 10 % n'ouvrant pas droit à pension ; ainsi, le taux global d'invalidité calculé en application des règles fixées à l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre n'est pas de 85 %, mais de 74,4 % arrondis à 75 % ; - comme l'explique l'avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité (PMI) du 17 septembre 2019, confirmé par l'avis de la commission consultative médicale du 27 septembre 2019, la tétraparésie et les troubles digestifs, urinaires et sexuels sont en relation avec l'évolution propre de la syringomyélie, maladie dégénérative qui s'était déjà manifestée sous une forme sensitive au membre supérieur droit (hypoesthésie) depuis 2005 ; si le docteur C... conclut à l'accélération de l'aggravation de la symptomatologie du fait de l'évènement du 15 novembre 2011, il ne fait pas état d'une aggravation objective en lien avec cet évènement, et la preuve de l'imputabilité au service ne saurait résulter d'une probabilité, d'une vraisemblance ou d'une simple hypothèse médicale ; ainsi, les infirmités n'ouvrent pas droit à pension. Par des mémoires en défense enregistrés les 22 novembre 2021 et 19 février 2023, M. D..., représenté par Me Lewis, conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce que la réformation du jugement soit limitée au taux d'invalidité en le ramenant de 85 % à 80 %, et dans tous les cas à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre cité par le jugement prévoit qu'en cas d'aggravation par le fait du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, la pension est établie sur le pourcentage total de l'infirmité aggravée s'il est égal ou supérieur à 60 % ; tel est le cas, puisque le seul pourcentage de l'infirmité relative aux troubles neurologiques à type de tétraparésie est égal à 60 % ; il n'y a donc pas lieu de distinguer l'état antérieur de l'aggravation ; - l'expert a conclu à l'attribution d'un taux de 85 %, auquel l'administration a acquiescé, se décomposant en 60 % pour la partie motrice et sensitive de la tétraparésie en lien avec la syringomyélie et 50 % des signes associés ; si la cour estimait que le taux de 85 % est erroné, les troubles sexuels, qui doivent être majorés de 15 % en application de l'article L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, doivent être pris en compte au taux de 15 % et non de 5 % comme le soutient l'administration, de sorte que le taux global d'invalidité calculé conformément à l'article L. 14 ne serait pas de 75 %, mais de 80 % ; - l'accident du 15 novembre 2011 reconnu imputable au service est en lien direct avec l'aggravation et l'accélération de la symptomatologie, et les conclusions du rapport d'expertise ne sont pas contredites par les avis non circonstanciés du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité (PMI) et de la commission consultative médicale, alors au demeurant que le livret médical ne faisait état d'aucun symptôme d'évolution de la maladie avant l'accident, contrairement à ce qu'indique le médecin chargé des PMI ; - alors qu'il avait toujours été reconnu apte au service sans restriction, les symptômes de la syringomyélie sont apparus brutalement après l'accident du 15 novembre 2011 ; la syringomyélie est une maladie silencieuse qui peut devenir dégénérative à la suite d'un traumatisme, ce qui a été le cas. Par ordonnance du 18 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 18 février 2023. Un mémoire présenté par le ministre des armées a été enregistré le 6 mars 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. D..., engagé dans l'armée de terre le 11 septembre 1988 et radié des contrôles le 8 août 2016 au grade de sergent-chef, a déposé une demande de pension militaire d'invalidité enregistrée le 9 décembre 2013 pour les infirmités de troubles neurologiques à type de tétraparésie, de troubles digestifs, de troubles urinaires et de troubles sexuels, toutes en lien avec une syringomyélie aggravée par un accident de service du 15 novembre 2011. Après avoir fait réaliser une expertise médicale, dont le rapport a conclu que cet accident avait directement aggravé une syringomyélie préexistante et était à l'origine d'un taux global d'invalidité de 85 %, la ministre des armées a rejeté la demande de M. D... par une décision du 12 novembre 2019, au motif que la syringomyélie, affection dégénérative étrangère au service, aurait évolué pour son propre compte et n'aurait pas été aggravée par l'accident du 15 novembre 2011. M. D... a saisi le tribunal administratif de la Martinique d'une demande d'annulation de cette décision, ainsi que de la décision de rejet de son recours préalable obligatoire devant la commission de recours de l'invalidité, et a sollicité l'attribution d'une pension militaire d'invalidité au taux de 85 %. Après avoir rejeté comme irrecevables les conclusions à fin d'annulation de la décision de la ministre des armées, à laquelle s'était substituée la décision de la commission de recours de l'invalidité du 3 septembre 2020, le tribunal, par un jugement du 17 mai 2021, a annulé cette dernière décision et a attribué à M. D... le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux de 85 % à compter du 9 décembre 2013. Le ministre des armées relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. Le jugement relève en son point 12 que M. D..., atteint d'une maladie dégénérative étrangère au service sans aucune restriction d'activité, ayant seulement donné lieu à des symptômes de fourmillements et de perte de sensibilité du membre supérieur droit en 2006, a vu son état de santé se dégrader brutalement après avoir déplacé une remorque dans le cadre du service le 15 novembre 2011, ce qui lui avait causé une vive douleur au bas du dos, suivie de picotements et de sueurs froides. Il décrit cette évolution défavorable, caractérisée par une tétraparésie ainsi que par des troubles urinaires, digestifs et sexuels, et fait référence au rapport d'expertise du 4 juillet 2019 ayant conclu à l'existence d'un lien direct entre l'aggravation de l'état de santé préexistant et l'accident du 15 novembre 2011 pour la totalité des troubles moteurs et sensitifs de la tétraparésie, et pour la moitié des autres troubles. Alors que le jugement rappelle également les dispositions selon lesquelles, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage, il a suffisamment motivé la part d'imputabilité à l'accident de service des différentes infirmités. La contradiction de motifs invoquée par le ministre des armées relève du bien-fondé, et non de la régularité du jugement. Sur le droit à pension de M. D... : En ce qui concerne l'imputabilité au service de l'aggravation de la syringomyélie : 3. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / (...) / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / (...). " Une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine consécutive à un fait précis de service. 4. L'expert a retenu que la syringomyélie était antérieure à l'accident du 5 novembre 2011, en précisant que les premiers symptômes de cette maladie avaient été des signes sensitifs à la main droite notés fin 2005, alors rattachés à une névralgie cervicobrachiale, et qu'une IRM médullaire réalisée le 25 septembre 2006 avait permis de visualiser une cavité syringomyélique de C6 à D6. Si l'expert a cité un médecin évoquant au conditionnel, le 2 mai 2006, des troubles sensitifs du pied gauche, il n'a retrouvé au dossier médical aucun autre symptôme antérieur à l'accident, et notamment pas de troubles urinaires, sexuels ou digestifs, et a relevé que M. D... avait continué, avant le 5 novembre 2011, à courir, à pratiquer " tous les sports militaires ", et à exercer son métier sans aucune restriction d'activité. Les lésions constatées le 24 novembre 2011 étaient des troubles de la sensibilité diffus, une hyperesthésie ou douleur de l'avant-bras droit et des troubles sensitifs des deux jambes. De nouveaux symptômes, parmi lesquels un déficit de sensibilité thermoalgique de la jambe droite et une hypoesthésie de la zone paravertébrale, ont été décrits le 16 décembre 2011, et le 11 octobre 2013, l'état clinique était notamment caractérisé par des dysesthésies des membres inférieurs, des problèmes digestifs et urinaires et une instabilité à la marche. En s'appuyant sur ces éléments, l'expert a constaté que les troubles sensitifs décrits fin 2005, qui n'avaient plus été signalés jusqu'à l'accident du 5 novembre 2011, s'étaient, à partir de celui-ci, rapidement aggravés, globalisés et accompagnés de nouveaux symptômes sexuels, urinaires, de constipation et d'instabilité à la marche. Alors qu'il résulte de l'instruction que les symptômes de la syringomyélie, maladie dégénérative d'apparition lente, peuvent progresser rapidement en raison d'un traumatisme de la colonne vertébrale, l'expert n'a pas évoqué une probabilité, une vraisemblance ou une simple hypothèse médicale, mais s'est fondé sur des faits objectifs, médicalement constatés et concordants pour conclure à une aggravation de la lésion préexistante de syringomyélie imputable à l'accident de service, lequel était un traumatisme de la colonne vertébrale causé par le déplacement d'une remorque. L'avis du médecin chargé des pensions militaires du 17 septembre 2019 relève l'existence de symptômes de la syringomyélie antérieurement à l'accident de service, et celui de la commission consultative médicale du 27 septembre 2019 affirme que la syringomyélie n'est pas en relation médicale avec le service, ce qui ne contredit pas l'expertise. En se référant à nouveau à ces avis dont il s'était prévalu en première instance, le ministre des armées ne conteste pas utilement l'aggravation par l'accident de service de la syringomyélie étrangère au service. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal, qui n'a entaché son jugement d'aucune contradiction de motifs, a retenu, en suivant les conclusions de l'expertise, que la totalité des troubles moteurs et sensitifs de la tétraparésie et la moitié des troubles digestifs, urinaires et sexuels résultaient d'une aggravation de la maladie dégénérative, causée par le fait ou à l'occasion du service. En ce qui concerne le taux de la pension : 5. Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicable au litige : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. / Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage. " Aux termes de l'article L. 14 du même code : " Dans le cas d'infirmités multiples dont aucune n'entraîne l'invalidité absolue, le taux d'invalidité est considéré intégralement pour l'infirmité la plus grave et pour chacune des infirmités supplémentaires, proportionnellement à la validité restante. / A cet effet, les infirmités sont classées par ordre décroissant de taux d'invalidité. / Toutefois, quand l'infirmité principale est considérée comme entraînant une invalidité d'au moins 20 %, les degrés d'invalidité de chacune des infirmités supplémentaires sont élevés d'une, de deux ou de trois catégories, soit de 5, 10, 15 %, et ainsi de suite, suivant qu'elles occupent les deuxième, troisième, quatrième rangs dans la série décroissante de leur gravité. / (...). " Enfin, l'article L.125-3 du même code précise que " Quand l'invalidité est intermédiaire entre deux échelons, l'intéressé bénéficie du taux afférent à l'échelon supérieur. " 6. L'expert a fixé les taux d'invalidité à 60 % pour la partie motrice et sensitive de la tétraparésie, 30 % pour les troubles digestifs, 20 % pour les troubles urinaires et 10 % pour les troubles sexuels, et a retenu comme imputables à l'accident de service les 60 % de la partie motrice et sensitive de la tétraparésie, ainsi que 50 % des signes associés, ce qui n'est pas contesté. Les troubles sexuels imputables n'atteignant ainsi que 5 %, ils ne peuvent être pris en considération au sens des dispositions précitées, et le relèvement des degrés d'invalidité ne leur est donc pas applicable. Par suite, il y a lieu de retenir, pour calculer le taux global de la pension de M. D..., les infirmités et taux suivants : 1°) tétraparésie avec troubles moteurs et sensitifs : 60 % ; 2°) troubles digestifs : 15 % + 5 % ; 3°) troubles urinaires : 10 % + 10 %. La prise en compte successive de ces infirmités, proportionnellement à la validité restante, aboutit à un taux d'invalidité de 74,4 %. Ce taux étant intermédiaire entre deux échelons, M. D... a droit à une pension d'invalidité au taux global de 75 %. 7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre des armées est seulement fondé à demander que le taux de la pension militaire d'invalidité attribuée à M. D... à compter du 9 décembre 2013 par le jugement du tribunal administratif de la Martinique du 17 mai 2021 soit ramené de 85 % à 75 %. Sur les frais exposés à l'occasion du litige : 8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Le taux de la pension militaire d'invalidité attribuée à M. D... à compter du 9 décembre 2013 est ramené de 85 % à 75 %. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de la Martinique n° 2000568 du 17 mai 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. B... D.... Délibéré après l'audience du 29 août 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 septembre 2023. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02779
Cours administrative d'appel
Bordeaux