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CAA de DOUAI, 3ème chambre, 19/03/2024, 22DA02131, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 février 2021 par lequel le président de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont elle est atteinte, d'autre part, d'enjoindre à l'administration, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de régulariser sa situation et de lui notifier la prise en charge de sa maladie professionnelle. Par un jugement n° 2101576 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 octobre 2022 et le 11 mai 2023, Mme B..., représentée par la SCP Cherrier-Bodineau, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler l'arrêté du 24 février 2021 par lequel le président de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie déclarée le 6 février 2020 ; 3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise psychiatrique afin d'évaluer le taux d'incapacité permanente partielle prévisible ; 4°) d'enjoindre à l'administration, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de régulariser sa situation et de lui notifier la prise en charge de sa maladie professionnelle ; 5°) de mettre à la charge de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge, une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la présence au sein de la commission de réforme d'un médecin spécialiste de la pathologie dont est atteint l'agent constitue une garantie pour celui-ci ; en l'absence d'un médecin spécialiste en psychiatrie parmi ses membres, la commission de réforme était irrégulièrement composée, ce qui vicie la décision du 24 février 2021 contestée ; - l'avis de la commission de réforme est insuffisamment motivé ; - en l'absence de motivation, la décision refusant de reconnaître l'imputabilité de sa maladie au service méconnaît l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; - l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que les éléments et avis médicaux permettent d'établir que son syndrome anxiodépressif résulte directement de ses conditions de travail et qu'il doit être reconnu imputable au service ; par ailleurs, sa pathologie devait donner lieu à l'évaluation d'un taux d'incapacité permanente partielle supérieur à 25 %. Par un mémoire en défense, enregistré, le 9 décembre 2022, la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge, représentée par Me Gillet, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 11 mai 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 30 mai 2023 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 modifié ; - le décret n° 2012-924 du 30 juillet 2012 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, - et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... B..., fonctionnaire territoriale titulaire du grade de rédactrice territoriale, occupe depuis 2011 les fonctions d'agent d'accueil et de gestion administrative au sein de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge. Elle a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 23 janvier 2020. Par une déclaration déposée le 6 février 2020, Mme B... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service du syndrome anxiodépressif dont elle est atteinte. Un premier avis défavorable a été émis par la commission de réforme à l'issue d'une séance du 25 juin 2020, confirmé lors d'une séance ayant eu lieu le 15 octobre suivant. Le président de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge, par un arrêté initial du 29 juin 2020, a refusé de reconnaître la maladie déclarée par Mme B... comme étant imputable au service. Après avoir retiré ce premier arrêté par une décision du 24 février 2021, le président a pris une nouvelle décision de refus le même jour. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler ce dernier arrêté du 24 février 2021 et d'enjoindre à la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge, de prendre en charge sa maladie professionnelle. Mme B... relève appel du jugement du 20 septembre 2022 par lequel ce tribunal a rejeté ses demandes. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, la commission de réforme comprend : " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions que, dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée est nécessaire pour éclairer l'examen du cas du fonctionnaire, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 4. Il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme, appelée à se prononcer sur l'imputabilité au service du syndrome anxiodépressif déclaré par Mme B..., s'est réunie le 18 juin 2020 et s'est prononcée sans la présence d'un spécialiste des maladies mentales. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme s'est de nouveau réunie le 15 octobre suivant, pour se prononcer sur l'origine du syndrome anxiodépressif de Mme B... et qu'elle s'était adjointe la participation d'un médecin spécialiste de la pathologie de l'agent. Dans ces conditions, sans qu'ait d'incidence la circonstance que l'arrêté du 24 février 2021 ne mentionne pas ce second avis, la commission départementale de réforme doit être regardée comme ayant régulièrement émis son avis. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ". L'article L. 211-5 du même code dispose : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Il résulte de ces dispositions que la décision refusant à un fonctionnaire le bénéfice de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 alors en vigueur doit être regardée comme refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, au sens de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle est ainsi au nombre des décisions qui, en application de cet article, doivent être motivées et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement sous réserve cependant des dispositions figurant à l'article L. 211-6 du même code, selon lesquelles ses dispositions " ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret ". 6. En outre, en application de l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, les avis de la commission départementale de réforme doivent être motivés dans le respect du secret médical. 7. D'une part, il ressort du procès-verbal de la séance du 15 octobre 2020 de la commission de réforme que cette dernière a estimé, en précisant le motif de sa saisine et le sens défavorable de son avis, que compte tenu de l'expertise médicale du médecin psychiatre agréé déterminant un taux d'IPP de 15 %, de l'enquête administrative et de la déclaration de l'agent, le syndrome anxiodépressif n'entre pas dans les critères d'une maladie professionnelle hors tableau. Ainsi formulé, cet avis satisfait à l'exigence de motivation qui résulte de l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004. 8. D'autre part, l'arrêté du 24 février 2021 contesté vise les textes applicables, la demande de reconnaissance de maladie professionnelle de Mme B..., le rapport d'enquête administrative du 29 avril 2020, les conclusions du médecin psychiatre agréé en date du 12 mai 2020 concluant à l'existence d'une invalidité partielle de 15 % ainsi que l'avis de la commission de réforme du 18 juin 2020. En outre, il mentionne que l'agent n'établit pas que la maladie dont elle souffre est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et entraîne une incapacité permanente au moins égale à 25 %. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient l'appelante, cet arrêté précise les motifs de droit et de fait sur lesquels l'autorité territoriale a fondé sa décision pour refuser de reconnaître la maladie déclarée imputable au service. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté doit être écarté. 9. En troisième lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif (...) / IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 37-8 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner. Il est déterminé par la commission de réforme compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ". Enfin, l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale dispose que : " Le taux d'incapacité mentionné au septième alinéa de l'article L. 461-1 est fixé à 25 % ". 10. Il résulte des dispositions précitées du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 que dans l'hypothèse où le mécanisme de présomption prévu par le premier alinéa ne peut être retenu, comme le prévoit le troisième alinéa, peut être regardée comme imputable au service une maladie lorsqu'il est démontré qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions, et donc, si elle présente un lien direct avec l'exercice de ces fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de cette maladie, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de cette maladie du service. 11. Le 6 février 2020, Mme B... a adressé à son employeur un formulaire de déclaration de maladie professionnelle, en raison d'un syndrome anxiodépressif constaté par son médecin traitant et pour lequel elle a bénéficié, à compter du 23 janvier 2020, d'un certificat médical la plaçant en arrêt de travail. Il est constant que cette pathologie, compte tenu de sa nature, ne figure pas au nombre de celles pour lesquelles joue le mécanisme de présomption prévu par les dispositions citées au point 9. Pour soutenir que son syndrome dépressif est directement et essentiellement en relation avec son environnement professionnel, Mme B... se prévaut d'un courrier annexé au formulaire de déclaration précité, dans lequel elle a exposé le contexte permettant selon elle de relier sa pathologie à son environnement de travail. 12. Mme B... relate d'abord qu'elle a obtenu la reconnaissance de la qualité de travailleuse handicapée en raison d'une déficience visuelle provoquant une importante fatigue visuelle, une baisse d'acuité, des migraines ophtalmiques et des céphalées, rendant nécessaire un aménagement de son poste de travail, conformément aux recommandations de son médecin ophtalmologue et du médecin de prévention. Mme B... allègue que la plupart des adaptations recommandées à la suite de l'étude réalisée par un ergonome sont restées lettre morte. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment de l'enquête administrative à laquelle a procédé la collectivité employeur pour instruire la demande de reconnaissance d'imputabilité de la maladie au service, que Mme B... a bénéficié à la suite du rapport de l'ergonome d'une modification de son poste de travail, consistant notamment en une amélioration de l'éclairage, l'achat d'un second écran, d'un pied ajustable et d'un logiciel proposant une loupe intégrée. 13. Mme B..., fait ensuite état de ce qu'elle est " sous-affectée " en ce sens que, titulaire du grade de rédactrice territoriale relevant du cadre d'emplois de la catégorie B, elle occupe depuis le 1er janvier 2017 un poste d'agent d'accueil relevant du cadre d'emplois de la catégorie C, ce qui constituerait une " mise au placard ". Il ressort de l'intitulé de sa fiche de poste qu'elle occupe les fonctions d'agent d'accueil et de gestion administrative au sein du service environnement, lesquelles comportent, parmi les missions principales, outre des tâches d'accueil physique et téléphonique et d'enregistrement de dossiers dans le logiciel d'urbanisme, un ensemble de tâches diverses de gestion de la facturation, du programme d'entretien des installations d'assainissement et des contrôles périodiques. De telles tâches participent des tâches de gestion administrative pouvant être confiées à des rédacteurs territoriaux, conformément à l'article 3 du décret du 30 juillet 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux. Par suite, le contenu des missions confiées à Mme B..., qu'au demeurant elle avait acceptées dans le cadre de la réorganisation territoriale induite par l'évolution du périmètre de la communauté de communes, ne révèle pas une affectation dans un emploi non compatible avec son cadre d'emplois. 14. Mme B... invoque également être victime sur son lieu de travail de mesures vexatoires, de brimades et d'une mise à l'écart de la part de ses collègues ainsi qu'être l'objet de propos vexatoires de la part de sa hiérarchie. Pour cela, Mme B... se fonde sur deux attestations de son entourage familial et d'un certificat non circonstancié en date du 5 février 2020 émanant d'une psychologue déclarant assurer sa prise en charge psychologique depuis le 10 septembre 2018 " en lien avec une situation de stress au travail où elle décrit un contexte difficile ". Cependant, il ressort des pièces du dossier, et notamment du recueil des témoignages des agents interrogés dans le cadre de l'enquête administrative, collègues ou supérieurs hiérarchiques de Mme B..., qu'aucun élément ne permet de confirmer la situation de souffrance au travail décrite par l'intéressée. La plupart de ces témoignages, dont l'appelante ne conteste pas utilement la teneur, font au contraire état de ce qu'en dépit de leurs bonnes relations de travail, elle s'est placée dans une attitude d'isolement et de distanciation avec les membres de son environnement professionnel. 15. Dans ces conditions, et alors que la commission de réforme a rendu successivement deux avis défavorables à l'imputabilité au service de la pathologie, les pièces produites ne permettent pas d'établir que les conditions de travail de l'intéressée sont essentiellement et directement à l'origine du développement de sa pathologie anxiodépressive. 16. En dernier lieu, Mme B... ne saurait utilement se prévaloir de ce qu'elle présente un taux d'incapacité de 30 % supérieur au taux de 15 % évalué par le psychiatre agréé, dès lors que, comme il vient d'être dit, sa pathologie ne présente pas de lien essentiel et direct avec le service. 17. Il s'ensuit que le président de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 26 janvier 1984 en refusant de reconnaître l'imputabilité au service du syndrome anxiodépressif développé par Mme B.... 18. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 février 2021 par lequel le président de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction. Sur les frais liés au litige : 19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme B... au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées par la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge sur ce même fondement et de mettre à la charge de l'intéressée une somme de 500 euros. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Mme B... versera la somme de 500 euros à la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la communauté de communes Lieuvin Pays d'Auge. Délibéré après l'audience publique du 5 mars 2024 à laquelle siégeaient : - Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024. Le rapporteur, Signé : F. Malfoy La présidente de chambre, Signé : M-P. Viard Le greffier, Signé : F. Cheppe La République mande et ordonne au préfet de l'Eure en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme Le greffier, F. Cheppe No 22DA02131 2
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 12/03/2024, 22TL00223, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes : 1°) d'annuler la décision du 24 avril 2019 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard l'a placé en congé de maladie ordinaire du 1er octobre 2018 au 29 mai 2019 et a mis à sa charge les frais et soins en relation avec son accident de service, ainsi que la décision du 26 septembre 2019 rejetant son recours gracieux ; 2°) d'enjoindre à l'autorité territoriale de prendre en charge, à compter du 1er octobre 2018, ses arrêts de travail et les soins induits au titre de la rechute de son accident imputable au service du 7 novembre 1999 et, en conséquence, de régulariser sa rémunération pour les périodes du 15 novembre 2018 au 13 mars 2019 et du 5 au 29 mai 2019, et de lui rembourser le jour de carence du 1er octobre 2019 ; 3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1904161 du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a : - annulé les décisions des 24 avril 2019 et 26 septembre 2019, - enjoint au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision plaçant M. D... en congé de maladie imputable au service du 1er au 29 octobre 2018 avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur la rémunération de M. D... et de prendre en charge au titre du régime des accidents de service les soins relatifs aux acouphènes entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, - mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, - et rejeté le surplus de la demande de M. D.... Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°22MA00223, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°22TL00223, et un mémoire enregistré le 5 juin 2023, M. F... D..., représenté par Me Coudurier de la SCP Coudurier et Chamski, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) de réformer ce jugement du 18 novembre 2021 en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail sur la totalité de la période allant jusqu'au 30 septembre 2019 ; 2°) de rejeter l'appel incident du service départemental d'incendie et de secours du Gard ; 3°) d'enjoindre au président du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision le plaçant en congé de maladie imputable au service du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019, avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur sa rémunération ; 4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens. Il soutient que : - la mise en congé maladie imputable au service ne pouvait être limitée du 1er au 29 octobre 2018 au regard de la nécessité de traitements longs et prolongés ; - la décision du 26 septembre 2019 est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et a été prise en violation de l'article 57 alinéa 2 de la loi du 26 janvier 1984 dès lors que les arrêts de travail depuis le 1er octobre 2018 sont la conséquence directe et certaine de l'accident de service du 7 novembre 1999, s'agissant d'une rechute ; il en est de même de la prise en charge des soins relatifs aux acouphènes ; - sa demande devant le tribunal administratif n'était pas tardive ; - il a présenté une demande d'annulation des décisions contestées et non une demande indemnitaire. Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 janvier 2023 et 23 octobre 2023, le service départemental d'incendie et de secours du Gard, représenté par Me Journault, conclut au rejet de la requête et demande, par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du 18 novembre 2021 et de mettre à la charge de M. D... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens. Il fait valoir que : - le lien direct et certain entre les arrêts de travail de M. D... et le service n'est pas établi, en l'absence d'aggravation de son état ou d'une nouvelle lésion ; - d'une part, ces arrêts concernent la période courant jusqu'au 29 mai 2019 et non jusqu'au 30 septembre 2019 et, d'autre part, son état a été déclaré consolidé en janvier 2003 ; - seule la période du 1er au 5 octobre 2018 peut être considérée comme présentant un lien direct avec l'accident de service, celle du 16 au 29 octobre 2018 étant dépourvue de lien direct avec celui-ci ; - les conséquences financières dont il demande la prise en charge sont patrimoniales et se confondent avec celles réparées par l'allocation temporaire d'invalidité ; - les soins relatifs aux acouphènes, dont le montant n'a jamais été communiqué au service et dont la matérialité n'est pas établie, ne peuvent être pris en charge en l'absence de nécessité. Par ordonnance du 25 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 novembre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Journault, représentant le service départemental d'incendie et de secours du Gard. Considérant ce qui suit : 1. M. D..., qui exerçait en qualité d'adjudant de sapeur-pompier professionnel, a été victime d'un accident reconnu imputable au service le 7 novembre 1999 alors qu'il était affecté au centre de secours d'Uzès. Son état de santé a été déclaré consolidé le 13 janvier 2003 et son taux d'incapacité a été fixé à 38 % avec effet au 13 janvier 2003, puis porté à 54 % à compter du 13 janvier 2008. L'intéressé a obtenu à ce titre l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité pour un montant de près de 600 euros par mois. M. D... a été placé en arrêt de travail à compter du 1er octobre 2018. Il a transmis à son employeur des certificats médicaux d'accident de travail pour la période et demandé la prise en charge de ses arrêts courant jusqu'au 29 mai 2019 au titre d'une rechute de son accident de service du 7 novembre 1999, ainsi que les soins reçus pendant cette période. Par une décision du 24 avril 2019, le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard a rejeté sa demande, l'a placé en congé de maladie ordinaire du 1er octobre 2018 au 29 mai 2019 et a mis à sa charge les frais et soins en relation avec son accident. Son recours gracieux a été rejeté le 26 septembre 2019. M. D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation des décisions prises les 24 avril et 26 septembre 2019. Par un jugement du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé ces décisions et a enjoint au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision plaçant M. D... en congé de maladie imputable au service du 1er au 29 octobre 2018 avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur la rémunération de l'intéressé, et de prendre en charge au titre du régime des accidents de service les soins relatifs aux acouphènes entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019. M. D... relève appel de ce jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail sur la totalité de la période allant jusqu'au 30 septembre 2019 et demande d'enjoindre au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision le plaçant en congé de maladie imputable au service jusqu'à cette date, avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur sa rémunération. Le service départemental d'incendie et de secours du Gard demande, par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du 18 novembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes. Sur le bien-fondé du jugement : 2. Aux termes des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans leur rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 3. Lorsque l'état d'un fonctionnaire est consolidé postérieurement à un accident imputable au service, le bénéfice de ces dispositions est subordonné, non pas à l'existence d'une rechute ou d'une aggravation de sa pathologie, mais à l'existence de troubles présentant un lien direct et certain avec l'accident de service. 4. Pour refuser de prendre en charge les arrêts de travail de M. D... à compter du 1er octobre 2018 au titre de l'accident de service dont il a été victime le 7 novembre 1999, le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard s'est fondé sur l'absence de rechute de l'accident initial et sur la circonstance que ces arrêts ne peuvent être considérés ni comme justifiés ni comme nécessaires, alors même que le lien entre les troubles et l'accident initial n'est pas contesté. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui a été victime d'un traumatisme crânien avec vertiges et surdité à la suite de l'accident de service du 7 novembre 1999, présente une surdité nécessitant le port de prothèses auditives, ainsi que des acouphènes invalidants. Il a été hospitalisé du 1er au 5 octobre 2018 à la clinique du docteur A... C... pour y subir un traitement destiné à diminuer la gêne des acouphènes, puis du 16 au 29 octobre 2018 en centre de soins de suite à la clinique les Oliviers afin de reprendre une thérapie permettant également de réduire ces acouphènes. Selon le certificat médical de son médecin traitant du 20 novembre 2018 et celui du médecin de la clinique du docteur A... C... du 22 novembre 2018, un traitement par appareillage masqueur d'acouphènes d'une durée de douze mois était prévu à la suite de la première hospitalisation. Si ces soins présentent un lien direct et certain avec l'accident de service du 7 novembre 1999, ainsi qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par le service départemental d'incendie et de secours, il ne ressort cependant d'aucune pièce médicale produite que la poursuite du traitement à l'issue de la seconde hospitalisation, limitée au port de cet appareillage pendant une durée maximale de six heures par jour, faisait obstacle à la poursuite de l'activité professionnelle de M. D..., laquelle ne comporte que des tâches administratives, à l'exclusion de toute intervention sur le terrain. Ainsi, selon le docteur E..., les acouphènes invalidants dont souffre M. D... nécessitent des périodes régulières de mise en place d'un masqueur d'acouphènes d'une durée d'un à deux mois. En outre, selon l'expert B..., la thérapie sonore suivie à compter d'octobre 2018, qui ne nécessite que 2 heures par jour et non 8 heures, est compatible avec une activité professionnelle à temps plein. Si cet expert a estimé que ces soins ne présentaient pas un caractère de nécessité, il ressort cependant des pièces médicales produites que cette thérapie a été prescrite à M. D... dans un contexte de recrudescence des acouphènes dont il souffrait depuis le printemps 2018. Par suite, elle présentait un caractère d'utilité directe pour M. D..., alors même que son état ne se serait pas aggravé de manière sensible comme l'a constaté le dernier expert mandaté. Dans ces conditions, en dépit de la circonstance que la commission de réforme a émis, le 10 septembre 2019, un avis favorable à l'imputabilité à l'accident de service des arrêts de travail de M. D... du 1er octobre 2018 au 31 mars 2019, seule la prise en charge des arrêts de travail au titre de la période du 1er au 29 octobre 2018, date de sortie de M. D... de la clinique les Oliviers, est justifiée en raison du lien direct et certain avec l'accident de service initial. 5. S'agissant ensuite de la prise en charge des soins relatifs aux acouphènes, il résulte de ce qui vient d'être exposé que, contrairement à ce que persiste à faire valoir le service départemental d'incendie et de secours du Gard, la thérapie suivie par M. D... présentait un caractère d'utilité directe. Alors que l'allocation temporaire d'invalidité n'a pas vocation à réparer les conséquences financières d'un accident de service portant sur les frais de santé, M. D... était fondé à solliciter la prise en charge de ces frais au titre de la totalité de la période des soins, soit jusqu'au 30 septembre 2019. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a seulement fait droit de manière partielle à sa demande en enjoignant au service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision le plaçant en congé de maladie imputable au service du 1er au 29 octobre 2018 avec toutes les conséquences qu'une telle décision implique sur sa rémunération, et de prendre en charge au titre du régime des accidents de service les soins relatifs aux acouphènes entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019. Il y a lieu par voie de conséquence de rejeter les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par le service départemental d'incendie et de secours du Gard tendant à l'annulation du jugement. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... une somme au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours du Gard et non compris dans les dépens. 9. En l'absence de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions des parties tendant à l'attribution de leur charge sont sans objet et doivent donc être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le service départemental d'incendie et de secours du Gard au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative et à fin d'appel incident sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au service départemental d'incendie et de secours du Gard. Délibéré après l'audience du 27 février 2024, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°22TL00223 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 12/03/2024, 23MA02153, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions de Marseille d'annuler l'arrêté interministériel du 3 décembre 2018 réduisant le montant de sa pension militaire d'invalidité à un taux global de 85 %. Par un jugement n° 18/00163 du 30 août 2019, le tribunal des pensions de Marseille a partiellement annulé cet arrêté, notamment en tant qu'il supprime la mention de la perte de sélectivité et a décidé que M. B... avait droit au renouvellement, à titre définitif, de l'infirmité " hypoacousie bilatérale ", avec un taux fixé à 40 %, dont 22 % imputable au service, avec majoration de 10 % pour perte de sélectivité, avant d'enjoindre à l'administration de procéder à la liquidation de la pension de M. B... au taux global de 90 %, avec le versement d'une allocation de grand invalide. Procédure devant la Cour avant cassation : Par un recours et des mémoires complémentaires, enregistrés le 7 novembre 2019, et les 21 février et 3 juillet 2020, le ministre des armées demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal des pensions de Marseille du 30 août 2019. Il soutient que : - l'hypoacousie bilatérale dont M. B... est atteint et qui est d'origine traumatique n'ayant pu s'aggraver en l'absence d'exposition à de nouveaux traumatismes, sa baisse d'audition est due à une presbyacousie qui constitue une infirmité distincte ; - la majoration pour perte de sélectivité n'était plus constituée à la date du renouvellement de cette infirmité qui n'avait pu être reconnue qu'à titre temporaire, nonobstant l'existence d'une décision judiciaire devenue définitive. Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 janvier, 27 février et 9 juillet 2020, M. B..., représenté par Me Paolantonacci, conclut, à titre principal, au rejet de ce recours, à titre subsidiaire, à ce qu'une expertise médicale soit ordonnée et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que les moyens soulevés par le ministre des armées ne sont pas fondés. Par un arrêt n° 19MA04751 du 26 janvier 2021, la Cour a réformé le jugement du tribunal des pensions de Marseille du 30 août 2019 en ce qu'il porte le taux de l'infirmité " hypoacousie bilatérale " à 40 %, dont 22 % imputables au service, et a rejeté le surplus des conclusions du recours du ministre des armées. Par une décision n° 451212 du 11 août 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt de la Cour du 26 janvier 2021 en tant qu'il statue sur la majoration de 10 % pour perte de sélectivité et, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, lui a renvoyé l'affaire qui porte désormais le n° 23MA02153. Procédure devant la Cour après cassation : Par des courriers du 17 août 2023, la Cour a informé les parties de la reprise d'instance après cassation. Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 octobre et 5 décembre 2023, M. B... conclut : - à ce que, avant dire droit, la Cour désigne un expert de justice avec pour mission de : . se placer à la date de conversion en pension définitive, soit le 29 octobre 2017 ; . décrire l'infirmité " perte de sélectivité ", après avoir pratiqué un examen audiométrique complet ; . donner son avis sur les divers audiogrammes pratiqués avant la date de conversion et après ladite date ; . fixer le taux d'invalidité au regard du guide barème applicable aux pensions militaires d'invalidité et, plus précisément en l'espèce, du décret du 3 décembre 1971 modifié par le décret du 30 janvier 1993 ; . d'une manière générale, faire toute constatation médicale utile à la solution du litige ; - à ce que la Cour sursoie à statuer sur le surplus. Il fait valoir que : - le rapport dressé le 30 août 2018 n'a pas été établi conformément au guide-barème applicable ; - la perte de sélectivité a toujours été observée sur l'ensemble de la période courant de 2015 à 2019 ; - le code impose de se placer à la date de la demande mais pas d'écarter des débats les documents qui, bien que postérieurs à cette date, tendent à établir la réalité et l'importance de l'infirmité à cette même date ; si toutes les pièces postérieures à la date de référence, soit le 29 octobre 2017, devaient être écartées, le rapport dressé le 30 août 2018 devrait l'être aussi ; - en l'état, une mesure d'expertise est seule de nature à trancher la question médicale posée. Par des mémoires complémentaires, enregistrés les 30 novembre et 15 décembre 2023, le ministre des armées demande à la Cour de rejeter les conclusions présentées par M. B... tendant à la désignation d'un expert de justice et au bénéfice de la majoration de 10 % au titre d'une perte de sélectivité. Il soutient que : - le code des pensions militaires d'invalidité exige de se placer à la date du renouvellement de la pension, soit, en l'espèce, le 29 octobre 2017, au regard des résultats d'expertise rendus conformément aux obligations prévues par la circulaire relative à la constitution, à l'instruction et à la liquidation des dossiers de pension d'invalidité du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre du 12 février 2010, et par l'instruction ministérielle n° 606 B du 20 juillet 1976 relative aux expertises médicales ; M. B... ne peut utilement se prévaloir des audiogrammes des 28 mai 2015, 8 janvier 2019 et 25 septembre 2023 pour remettre en cause les résultats de celui réalisé le 13 août 2018, ni pour solliciter avant dire droit, la mise en œuvre d'une expertise médicale ; - le taux d'invalidité résultant de l'hypoacousie de M. B... ne peut être majoré de 10 dès lors que ce dernier n'invoque aucun moyen susceptible de remettre en cause la validité de l'audiogramme du 13 août 2018, qui a été réalisé dans le cadre de sa demande de renouvellement, au plus proche de la date du 29 octobre 2017, et qui a montré une différence de 40 décibels (dB) entre les seuils d'audition sur les fréquences 4 000 et 1 000 hertz (Hz) pour la meilleure oreille. Un courrier du 8 novembre 2023, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 15 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lombart, - et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. En exécution d'un jugement du tribunal des pensions de Marseille du 13 avril 2017, confirmé par un arrêt de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence rendu le 14 mai 2018, M. B..., né le 22 juillet 1948, militaire de carrière radié des cadres le 30 octobre 1991, alors titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux global de 40 %, s'est vu reconnaître, par un arrêté interministériel du 16 juillet 2018, le droit à la révision de cette pension, dont le taux global a été porté à 90 %, du fait de deux infirmités nouvelles, dont une hypoacousie bilatérale. Le taux de cette infirmité, arrêté à titre temporaire pour la période du 29 octobre 2014 au 28 octobre 2017, était alors évalué à 30 %, dont 12 % imputables au service, avec majoration de 10 % pour perte de sélectivité, soit un taux indemnisable de 22 %. Par un arrêté interministériel du 3 décembre 2018 statuant sur le droit au renouvellement de la pension versée au titre de ces infirmités nouvelles à compter du 29 octobre 2017, le taux global de la pension attribuée à M. B... a été ramené à 85 %, par suite de la réévaluation constatée de l'hypoacousie bilatérale, dont le taux d'invalidité a été limité à 12 %, sans droit à la majoration de 10 % pour perte de sélectivité, tandis qu'une nouvelle baisse auditive bilatérale non imputable au service a été identifiée, dont le taux a été évalué à 28 %. Par un jugement du 30 août 2019, le tribunal des pensions de Marseille a, saisi par M. B..., jugé que ce dernier avait droit au renouvellement à titre définitif de la pension versée au titre de l'infirmité " hypoacousie bilatérale ", dont il a fixé le taux à 40 %, dont 22 % imputable au service, avec une majoration de 10 % pour perte de sélectivité. Sur appel du ministre des armées, la Cour a, par l'arrêt n° 19MA04751 du 26 janvier 2021, réformé ce jugement en ce qu'il a porté le taux de l'infirmité " hypoacousie bilatérale " à 40 %, dont 22 % imputable au service, en jugeant que M. B... ne pouvait prétendre qu'à un taux de 12 % imputable au service mais avec une majoration de 10 % pour perte de sélectivité. Par la décision susvisée rendue le 11 août 2023, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi du ministre des armées, annulé cet arrêt de la Cour en tant qu'il statue sur cette majoration de 10 % pour perte de sélectivité et lui a renvoyé l'affaire dans cette mesure. 2. Aux termes de l'article L. 8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 121-8 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension temporaire est concédée pour trois années. Elle est renouvelable par périodes triennales après examens médicaux. / Au cas où la ou les infirmités résultent uniquement de blessures, la situation du pensionné doit, dans un délai de trois ans, à compter du point de départ légal défini à l'article L. 6, être définitivement fixée soit par la conversion à un taux supérieur, égal ou inférieur au taux primitif, de la pension temporaire en pension définitive, sous réserve toutefois de l'application de l'article 29, soit, si l'invalidité a disparu ou est devenue inférieure au degré indemnisable par la suppression de toute pension. (...) ". 3. Par ailleurs, le guide barème des invalidités, qui constitue l'annexe 2 au code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicable au présent litige, précise, en ce qui concerne les diminutions d'acuité auditive : " Pour tenir compte des pertes de sélectivité importantes qui peuvent être la conséquence d'une atteinte post-traumatique ou toxique, ces taux seront majorés de 10 lorsque, pour la meilleure oreille (celle dont la PA est la moins accentuée), la différence des seuils d'audition sur les fréquences 4 000 et 1 000 Hz (4 000 - 1 000) est égale ou supérieure à 50 dB, à la condition toutefois que la perte auditive moyenne en dB (PA) de la meilleure oreille soit inférieure à 60 dB, car la gêne fonctionnelle qui résulte d'une perte de sensibilité supérieure n'est que fort peu aggravée par la perte de sélectivité ". Il résulte de ces dispositions que si la perte de sélectivité ne peut être retenue que sous la forme d'une majoration du taux de l'hypoacousie, et non d'une infirmité distincte, les conditions qu'elles prévoient doivent néanmoins être appréciées sur la base de l'ensemble des pertes auditives que présente l'intéressé, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre le taux de ces pertes auditives imputables au service et le taux de celles qui ne le sont pas. Ainsi, en cas d'aggravation de l'hypoacousie pour une cause non imputable au service, l'application de ces dispositions peut conduire à ce qu'une perte de sélectivité précédemment égale ou supérieure à 50 décibels (dB), et comme telle ouvrant droit à une majoration de 10, soit constatée comme inférieure à 50 dB, et comme telle comme n'ouvrant plus droit à cette majoration. 4. Au cas particulier, il résulte de l'instruction, et notamment des résultats de l'audiométrie pratiquée, le 13 août 2018, par le chef du service oto-rhino-laryngologiste (ORL) de l'hôpital d'instruction des armées (HIA) Laveran, que les seuils d'audition sur la meilleure oreille de M. B..., soit celle de droite, ont été mesurés à 80 dB, sur la fréquence 4 000 hertz (Hz), et à 40 dB, sur la fréquence 1 000 Hz. La différence des seuils d'audition sur les fréquences 4 000 et 1 000 Hz pour cette oreille était ainsi alors égale à 40 dB, soit un niveau inférieur au minimum de 50 dB ouvrant droit à une majoration du taux d'invalidité pour pertes de sélectivité importantes. En se bornant à affirmer que ce chef de service n'aurait pas appliqué le guide-barème, à se prévaloir d'audiogrammes réalisés le 28 mai 2015, les 24 janvier et 17 décembre 2019, et le 25 septembre 2023, et à soutenir que les résultats obtenus peuvent varier en fonction de l'appareil utilisé, M. B... n'apporte pas d'éléments suffisamment circonstanciés pour remettre en cause les relevés du chef du service ORL de l'HIA Laveran qui ont été opérés à la date la plus proche de celle du 29 octobre 2017, date du renouvellement de la pension, ni à justifier que soit ordonnée une expertise avant dire droit. Dès lors, M. B... ne peut prétendre à la majoration du taux d'invalidité prévue par les dispositions citées au point 3 ci-dessus du présent arrêt. 5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise avant dire-droit comme le demande en défense M. B..., le ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 30 août 2019, le tribunal des pensions de Marseille a retenu une majoration de 10 % pour perte de sélectivité. D E C I D E : Article 1er : Le jugement n° 18/00163 du tribunal des pensions de Marseille du 30 août 2019 est également annulé en tant qu'il a retenu une majoration de 10 % pour perte de sélectivité. Article 2 : La demande de première instance de M. B... tendant au bénéfice de cette majoration ainsi que les conclusions à fin d'expertise qu'il a présentées devant la Cour sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. A... B.... Délibéré après l'audience du 20 février 2024, où siégeaient : - Mme Helmlinger, présidente, - M. Revert, président assesseur, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024. 2 No 23MA02153
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 6ème chambre, 12/03/2024, 22NT03709, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, devenu compétent par l'effet de la loi du 13 juillet 2018, d'annuler la décision du 24 avril 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation. Par un jugement n° 1905899 du 26 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 30 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Ongis, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 26 septembre 2022 ; 2°) d'annuler la décision du 24 avril 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation ; 3°) d'ordonner une expertise médicale pour fixer le niveau d'aggravation de son infirmité " séquelles de méniscectomie externe du genou gauche " ; 4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - l'expertise réalisée le 2 janvier 2019 est insuffisante : * les derniers clichés radiologiques réalisés en décembre 2018 produits au soutien de sa demande de révision de sa pension n'ont pas été pris en compte par l'expert ; * l'expert se borne à indiquer, sans en justifier, qu'il ne présente pas une aggravation de son infirmité ; * ce rapport d'expertise n'est qu'un " copier-coller " de l'examen clinique réalisé en 2013 et il n'a pas été réalisé dans des conditions satisfaisantes ; - l'état de son genou gauche s'est aggravé et il souffre d'une arthrose persistante ; - les éléments produits à l'instance sont de nature à mettre en cause les conclusions du rapport d'expertise et à justifier une demande de nouvelle expertise. Par un mémoire en défense, enregistré le 15 janvier 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. B.... Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pons, - et les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjudant de gendarmerie rayé des contrôles le 7 avril 2005, bénéficie d'une pension militaire d'invalidité depuis 2001, portée au taux global de 70 % à titre définitif depuis le 20 avril 2015, pour les infirmités " séquelles de méniscectomie externe du genou gauche " au taux de 35 %, " séquelles de méniscectomie interne du genou droit " au taux de 35 % et " séquelles de fracture de la tête radiale droite " au taux de 10 %. Il a présenté, le 9 octobre 2017, une demande de révision de sa pension pour aggravation de l'infirmité " séquelles de méniscectomie externe du genou gauche ". Par décision du 24 avril 2019, le ministre des armées a rejeté sa demande. M. B... relève appel du jugement du 26 septembre 2022 du tribunal administratif de Nantes ayant rejeté sa demande. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article L. 125-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le taux d'invalidité reconnu à chaque infirmité examinée couvre l'ensemble des troubles fonctionnels et l'atteinte à l'état général. ". Aux termes de l'article L. 154-1 du même code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". Aux termes du guide barème s'agissant du genou : " raideurs articulaires : 5 à 30 pour cent ". 3. Il résulte de l'instruction que M. B... a été examiné par un expert agréé, le 2 janvier 2019. A cette occasion, l'expert a constaté : " un appui monopodal stable, une marche sans canne, légère boiterie, une marche sur pointe des pieds et talons déclarée impossible, un accroupissement incomplet, un flessum de 10°, une flexion du genou gauche de 95°, une distance talon-fesse de 38 cm à gauche, une amyotrophie de la jambe gauche et une gonarthrose bilatérale tri-compartimentale ". L'expert conclut que l'aggravation est peu significative sur le plan clinique et maintient le taux de 35% pour l'infirmité " séquelles de méniscectomie externe du genou gauche ". Cette expertise est confirmée par l'analyse du médecin en chef du bureau des expertises et analyses médicales, dans son avis du 13 février 2019, qui relève que l'expertise est similaire à celle faite par le même expert en 2013 et constate seulement une " légère boiterie à gauche et une limitation de la flexion de 10° par rapport à l'expertise de 2013 ". Il estime que les séquelles ont peu évolué et confirme le maintien du taux de 35%. Contrairement à ce qui est allégué par le requérant, l'expert a pris en compte, dans le cadre de son évaluation, les précédents clichés radiologiques réalisés par M. B... puisqu'il souligne : " il a apporté à l'expertise des radiographies des deux genoux de face (appui unipodal et fémoro-patellaire) montrant une arthrose tri-compartimentale prédominant en fémoro-tibial interne de façon bilatérale, mais également fémoro-tibiale externe gauche. " et souligne " qu'il a également bénéficié d'une imagerie par résonance magnétique, le 19 décembre 2018, montrant une aggravation des lésions dégénératives par rapport aux examens antérieurs ". De même, si l'expert a repris la trame de son rapport d'expertise du 25 novembre 2013, le rapport du 2 janvier 2019 ne saurait être regardé comme un " copier-coller " du précédent examen clinique, l'expert ayant relevé des modifications par rapport à la précédente expertise tenant notamment à l'impossibilité de marcher sur talon et pointe et à la mobilité du genou gauche avec un déficit en flexion de 10°. Les certificats médicaux des 10 et 20 octobre 2022 produits par le requérant, qui se bornent à constater une aggravation de sa gonarthrose fémoro-tibiale externe entre les clichés radiographiques de 2001 et de 2018 sans attester d'une gêne fonctionnelle plus importante que celle constatée par le médecin expert, ne sont pas de nature à remettre en cause les avis concordants des médecins experts ayant examiné M. B.... Sur les conclusions à fin d'indemnisation : 4. Dès lors que l'administration n'a en l'espèce commis aucune faute, les conclusions indemnitaires du requérant, au demeurant irrecevables car nouvelles en appel, ne peuvent qu'être rejetées. 5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise médicale au regard des motifs développés au point 3, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 6. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 16 février 2024, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. Pons, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mars 2024. Le rapporteur, F. PONSLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT03709
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANCY, 2ème chambre, 14/03/2024, 21NC03161, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 12 février 2020 par laquelle le président de l'université de Lorraine a décidé de suivre l'avis émis par la commission de réforme de l'admettre à la retraite pour invalidité à compter du 1er septembre 2019 à la suite d'une inaptitude totale et définitive à ses fonctions et à toutes fonctions dans la fonction publique de l'Etat. Par un jugement n° 2001332 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement les 9 décembre 2021 et 15 février 2023, Mme B..., représentée par Me Bauer, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 14 octobre 2021 ; 2°) à titre principal, d'annuler la décision du 12 février 2020 et, à titre subsidiaire, l'arrêté du 22 mai 2020 par lequel le ministre de l'enseignement supérieur l'a admise d'office à la retraite ; 3°) ordonner une expertise judiciaire afin de déterminer l'origine et les causes de ses différentes pathologies ; 4°) de mettre à la charge de l'université de Lorraine la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme B... soutient que : - le courrier du 12 février 2020 par lequel le président de l'université de Lorraine a décidé de suivre l'avis émis par la commission de réforme ne constitue pas un acte préparatoire, il est décisoire puisque le président décide de suivre l'avis consultatif de la commission de réforme et lui fait grief ; - la décision est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où la composition de la réforme est irrégulière en ce qu'elle ne comprenait pas de psychiatre en méconnaissance de l'article R. 45 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; - elle est entachée d'une erreur d'appréciation en ce que les expertises relatives à son état de santé sont contradictoire et incomplètes ; - en ne prenant aucune mesure pour mesurer son exposition aux ondes magnétiques, son employeur a méconnu son obligation de sécurité. Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2022, l'université de Lorraine, représentée par Me Jeandon, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 850 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la lettre du 12 février 2020 est dépourvue de caractère décisoire ; - les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté de la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation du 22 mai 2020 sont tardives. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Mosser, - les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique, - et les observations de Me Bauer, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Maître de conférences à l'université de Lorraine, Mme B... a été placée en congé longue maladie, puis longue durée du 1er septembre 2014 au 31 août 2019. Par un avis du 11 février 2020, la commission de réforme a émis un avis favorable à son admission d'office à la retraite à compter du 1er septembre 2019 en raison d'une inaptitude totale et définitive à ses fonctions et à toute fonction dans la fonction publique de l'Etat. Par un courrier du 12 février 2020, le président de l'université de Lorraine l'a informée de la teneur de cet avis et qu'il avait " décidé de suivre cet avis ". Par un arrêté du 22 mai 2020, la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation l'a admise à la retraite d'office pour invalidité à compter du 1er septembre 2019. Mme B... relève appel du jugement du 14 octobre 2021 du tribunal administratif de Nancy qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et demande à titre principal l'annulation de la décision du 12 février 2020 et à titre subsidiaire, celle de l'arrêté du 22 mai 2020. Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 mai 2020 : 2. Dans le mémoire en réplique présentée en première instance pour Mme B... et enregistré le 18 juin 2021, l'avocat se borne à demander au tribunal, " de considérer les griefs exposés par Mme B... en contestation de la décision du 12 février 2020 comme des griefs dirigés dont l'arrêté prononcé par le ministère de l'enseignement supérieur en date du 4 juin 2020 ", étant précisé que le 4 juin 2020 est la date à laquelle la direction des ressources humaines de l'université a reçu l'arrêté ministériel du 22 mai 2020. Ce faisant l'avocat, qui ne critique d'ailleurs pas le jugement attaqué sur ce point, n'a entendu demander, ni à titre principal, ni à titre subsidiaire l'annulation de cet arrêté devant les premiers juges. Dès lors, les conclusions tendant à son annulation, soulevées à titre subsidiaire dans sa requête d'appel, sont présentées directement devant la cour. Par suite, elles sont irrecevables comme nouvelles en appel. Sur les conclusions dirigées contre la décision du 12 février 2020 : 3. Il ressort des pièces du dossier que le 11 février 2020, la commission de réforme a rendu un avis favorable à l'admission de Mme B... à la retraite d'office pour raisons de santé. Par le courrier contesté du 12 février 2020, le président de l'université l'a informée de la teneur de cet avis de la commission de réforme, qu'il " [avait] décidé de suivre cet avis ", et que son dossier serait étudié par la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation dont elle relevait, dans l'attente, sa rémunération étant maintenue à demi-traitement. Ainsi, cette lettre, en dépit de sa formulation maladroite, n'a eu pour seule conséquence que de transmettre son dossier à la ministre qui l'a admise, par arrêté du 22 mai 2020, à la retraite pour invalidité à titre rétroactif à compter du 1er septembre 2019, le maintien de sa rémunération à demi-traitement étant prévu par les dispositions des articles 27 et 47 du décret du 14 mars 1986. Dès lors, ce courrier constitue une simple lettre d'information, non prévue par les dispositions législatives ou règlementaires et n'a pas eu d'effet juridique sur la situation de la requérante. Par suite, il ne peut pas être regardé comme une décision faisant grief, susceptible d'un recours en excès de pouvoir et les conclusions dirigées contre lui sont irrecevables. 4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'université de Lorraine, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme B... une somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'université de Lorraine présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par l'université de Lorraine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à l'université de Lorraine. Délibéré après l'audience du 15 février 2024, à laquelle siégeaient : Mme Rousselle, présidente, M. Agnel, président-assesseur, Mme Mosser, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2024. La rapporteure, Signé : C. MosserLa présidente, Signé : P. Rousselle La greffière, Signé : C. Schramm La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, C. Schramm 2 N° 21NC03161
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 08/02/2024, 21VE01061, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme H... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision implicite du ministre de la transition écologique et solidaire rejetant sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service des congés de maladie pris depuis le 13 janvier 2014 ou d'attribution d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service et d'enjoindre à l'État de prononcer cette imputabilité ou, à défaut, de se prononcer à nouveau sur sa demande et, d'autre part, de condamner l'État à lui verser la somme de 65 830 euros. Par un jugement n° 1903252 du 8 février 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 avril et 25 juin 2021 et le 19 juillet 2023, Mme A..., représentée par Me Arvis, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler le rejet implicite du ministre de la transition écologique et solidaire de sa demande formée le 27 décembre 2018 ; 3°) d'enjoindre au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de prononcer la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses congés de maladie pris depuis le 13 janvier 2014, ou l'attribution d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter de la même date ou, à défaut, de se prononcer à nouveau sur sa demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) d'enjoindre également au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de lui attribuer ses droits à congés annuels depuis l'année 2017 ou, à défaut, de se prononcer à nouveau sur sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 5°) de condamner l'État à lui verser la somme de 65 830 euros, sauf à parfaire, avec intérêts de droit à compter de la date de réception de la demande préalable et capitalisation de ces intérêts à compter de la date anniversaire de cet événement et à chacune des échéances annuelles successives postérieures ; 6°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la minute du jugement n'est pas signée en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; - les premiers juges ont omis de statuer sur sa demande tendant à l'annulation du refus de régularisation de ses droits à congés depuis l'année 2017 ; ils ont ainsi insuffisamment motivé leur réponse sur ce point ; - les premiers juges ont omis de répondre aux moyens de légalité externe et interne soulevés à l'encontre du refus d'imputabilité de ses congés maladie au service ; - les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de la faute de l'Etat dans la gestion des demandes de formation en ce qu'elle concernait le refus d'autorisation d'absence pour participer aux épreuves du concours interne d'attaché ; - le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, concernant le refus de la formation " gestion conflits ", des sessions " coopérations échanges " et de la demande de congé de formation professionnelle ; - aucune exception de la chose jugée ne peut lui être opposée s'agissant du refus de reconnaissance d'imputabilité de ses congés au service ; la circonstance que le tribunal et la cour aient déjà statué sur une demande précédente ne pouvait faire obstacle à ce qu'elle présente une nouvelle demande ; les précédents juges n'ont jamais statué au fond sur sa demande de reconnaissance ; au contraire, l'administration devait, pour l'exécution de la précédente annulation, statuer à nouveau sur sa demande ; l'administration n'a pas respecté l'injonction précédente de réexaminer sa demande dans les deux mois ; - le rejet implicite de sa demande du 27 décembre 2018 sur ce point n'a pas été précédé d'un avis de la commission de réforme ; ce rejet est illégal et entaché d'une erreur d'appréciation dès lors que son état est en lien direct et essentiel avec l'accident du 13 janvier 2014 qui lui a causé une lésion psychologique ; cet accident a eu lieu sur son lieu de travail à l'occasion d'un différend avec sa supérieure ; la dégradation de ses conditions de travail ressort de plusieurs pièces du dossier et, notamment, du rapport d'expertise commandé par l'administration ; en outre, le rapport remis à la commission de réforme ne comprenait aucun rapport du médecin de prévention alors que celui-ci avait alerté à plusieurs reprises sur la dégradation de ses conditions de travail ; ses congés maladie du 14 janvier 2014 au 8 novembre 2015 sont donc imputables au service ; - elle est en droit de bénéficier d'une indemnisation pour les divers préjudices qu'elle a subis ; - en premier lieu, du fait de l'illégalité de l'évaluation professionnelle de 2012 et des refus successifs de lui attribuer des réductions d'ancienneté alors qu'aucun motif n'était avancé pour lui refuser ces réductions, que le compte-rendu d'entretien professionnel comportait des incohérences et des commentaires sans lien avec sa manière de servir, était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ou portaient sur des reproches qui ne pouvaient pas lui être imputés, comme l'utilisation de l'application OCTET, ses statistiques montrant qu'elle se situait au moins dans la moyenne et que des réductions ont été proposées à des agents moins bien classés ; - en deuxième lieu, du fait de la gestion fautive de ses demandes de formation ; l'administration a refusé sa participation à la formation " gestion des conflits ", même si une formation similaire existait à Paris, et aux sessions coopérations-échanges, qui n'était pas d'une durée excessive, sans motif légitime ; elle lui a également refusé, sans raison valable, une autorisation d'absence pour les épreuves du concours interne d'attaché d'administration ; en outre, alors qu'elle a sollicité un congé de formation professionnelle le 15 janvier 2015, la réponse tardive du service des ressources humaines, après la date de début de la formation, a empêché son inscription en brevet de technicien supérieur en économie sociale et familiale ; - en troisième lieu, du fait du harcèlement moral ainsi que d'un dépassement anormal du pouvoir hiérarchique ; elle a subi des agissements vexatoires de la part de sa cheffe de service ; sa hiérarchie, qui ne souhaitait pas son affectation à Versailles, l'a mise en difficulté dans l'accomplissement de ses missions ; ces agissements ont perduré à son retour en novembre 2015 ; aucun travail ne lui a été confié et elle n'a pas pu récupérer ses affaires personnelles ; aucun matériel adéquat ne lui a été fourni ; l'administration n'apporte aucun élément de nature à établir que ces agissements sont étrangers à tout harcèlement ; - son préjudice est d'abord financier puisqu'elle a subi un retour d'au moins trois ans dans sa progression d'échelon, soit environ 20 000 euros de pertes ; il est ensuite lié aux frais d'avocat qu'elle a dû engager, pour 5 830 euros, indépendamment des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; elle a subi également un préjudice de carrière, en étant écartée du concours interne d'attaché, alors qu'elle avait une chance sérieuse de le réussir, à hauteur de 20 000 euros ; elle a connu des troubles dans les conditions d'existence et un préjudice moral indemnisable à hauteur de 20 000 euros ; - à sa reprise de fonctions en décembre 2016, elle a constaté que l'application Casper qui gère les horaires variables affichait un solde négatif, alors que son compteur horaire affichait un excédent de 99h59 ; elle n'a bénéficié d'aucune récupération pour ces heures ; les dysfonctionnements de l'application n'ont jamais été corrigés ; le refus de régulariser est entaché d'une erreur de droit et d'une rupture d'égalité dès lors qu'elle est placée dans une situation défavorable par rapport à ses collègues secrétaires administratifs. Par des mémoires en défense enregistrés les 25 avril 2022 et 22 décembre 2023, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Liogier, - les conclusions de M. Illouz, rapporteur public, - et les observations de Me Arvis, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme H... A..., secrétaire d'administration et de contrôle de classe normale du développement durable 7ème échelon, affectée à la direction de la régulation des transports routiers de la direction régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Île-de-France, a demandé, par un courrier du 27 décembre 2018, au ministre de la transition écologique et solidaire de reconnaître l'imputabilité au service de ses congés maladie depuis le 13 janvier 2014, de régulariser ses droits à congés à compter de 2017 et de l'indemniser à raison de plusieurs préjudices à hauteur de 65 830 euros. Elle fait appel du jugement du 8 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté, d'une part, sa demande tendant à l'annulation du rejet implicite de cette demande et, d'autre part, ses conclusions indemnitaires. Sur la régularité du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". 3. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 précité du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de ce que la minute du jugement attaqué n'est pas été signée ne peut qu'être écarté. 4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance, ainsi que des visas et des motifs du jugement attaqué, que le tribunal administratif a expressément traité, au point 7. du jugement attaqué, la question de la responsabilité de l'État à raison de la " gestion fautive des demandes de formation ". Dans le cadre de ce fondement de responsabilité, Mme A... se prévalait, notamment, du refus d'une autorisation d'absence pour le concours interne d'attaché. S'il est vrai, comme le soutient la requérante, que les premiers juges n'ont pas expressément écarté ce fait, il ne s'agissait toutefois que d'un argument au soutien de la démonstration de la même faute, commise par l'État dans la gestion de ses demandes de formation, invoquée dans le cadre des conclusions tendant à ce que la responsabilité de l'État soit engagée à raison de cette faute. Ainsi, il ne s'agissait pas d'une faute distincte. Les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués au soutien de la même faute. Le tribunal administratif ayant répondu, par suite, à la faute alléguée, tenant à cette gestion fautive, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer sur ce point ne peut qu'être écarté. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". 6. Il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges, après avoir précisé au point 1. que Mme A... était affectée en Ile-de-France, ont considéré que le refus de l'inscrire à une formation à Clermont-Ferrand pouvait être fondé sur le motif tiré de ce qu'une formation identique se tenait à Paris, le jugeant, ainsi, nécessairement légitime et proportionné. De même, s'agissant des sessions " coopérations-échanges ", les premiers juges ont estimé que la durée de deux semaines de la formation était " excessive " au regard de l'intérêt du service eu égard " aux missions prioritaires de contrôle " de la requérante, détaillant ainsi suffisamment leur réponse sur ce point. Enfin, pour la demande de congé de formation professionnelle, contrairement à que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance, qu'il y aurait eu débat entre les parties sur la date de constitution du dossier par Mme A... et sur la date de réponse de l'administration. Dès lors, en estimant que le délai entre ces deux dates n'était pas suffisant pour permettre " une instruction rapide " de sa demande par l'administration, les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse sur ce point également. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du jugement doivent être écartés. 7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1351 du code civil : " L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ". L'autorité de chose jugée s'attache non seulement au dispositif mais encore aux motifs qui en constituent le support nécessaire. 8. Par un jugement n°1505392 du 15 mai 2017, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 20 mai 2015 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont Mme A... s'est déclarée victime le13 janvier 2014 et des congés de maladie pris en conséquence, dès lors que le motif du lien direct et exclusif de la pathologie avec le service, avancé par le ministre, était illégal. Ce jugement a été confirmé en appel par un arrêt, devenu définitif, nos 17VE02260 et 17VE02465 du 8 novembre 2018 de la cour administrative d'appel de Versailles, qui a écarté la demande de substitution de motifs du ministre, a confirmé l'illégalité du premier motif fondant le refus et, enfin, a constaté des irrégularités dans la procédure d'édiction du refus, en l'absence de rapport du médecin de prévention devant la commission de réforme saisie pour avis. Compte tenu de ce précédent jugement, confirmé en appel, les premiers juges ont considéré que l'autorité de la chose jugée faisait obstacle à ce que Mme A... demande l'annulation d'un nouveau refus à l'encontre d'une demande similaire de reconnaissance d'imputabilité au service de ses congés maladie mais qu'elle pouvait, si elle s'y croyait fondée, demander au juge l'exécution de l'arrêt du 8 novembre 2018 qui enjoignait à l'administration de réexaminer sa demande. Les premiers juges ont donc écarté comme irrecevables les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation du rejet implicite de sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service des congés de maladie pris à l'issue d'un accident dont elle s'est déclarée victime le 13 janvier 2014. 9. Toutefois, s'il était loisible à Mme A... de s'adresser au juge de l'exécution pour obtenir l'exécution de l'arrêt nos 17VE02260 - 17VE02465 du 8 novembre 2018, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il vient d'être dit, que l'administration était ressaisie de l'examen de la demande de reconnaissance de Mme A... en raison de l'annulation, devenue définitive, de sa décision du 20 mai 2015. Or, le motif d'annulation retenu dans le précédent litige ne faisant pas obstacle à ce que l'administration reprenne régulièrement la même décision, et Mme A... était recevable à contester la nouvelle décision, prise en exécution de la précédente annulation contentieuse et sollicitée par son courrier du 27 décembre 2018, sans que ne puisse lui être opposée, dans le cadre de cette nouvelle demande, l'autorité de chose jugée par le jugement du 15 mai 2017 du tribunal administratif de Versailles, confirmé en appel. Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont écarté comme irrecevables les conclusions de Mme A..., en accueillant l'exception de chose jugée opposée en défense. Par suite, le jugement attaqué, en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A... à l'encontre du refus de reconnaissance d'imputabilité au service de congés maladie résultant d'un accident de service, est irrégulier et doit être annulé. 10. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance, ainsi qu'il a été dit au point 1, que Mme A... demandait également l'annulation du rejet implicite de sa demande du 27 décembre 2018 de régulariser ses droits à congés à compter de 2017. Or, il ressort des visas du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas visé ces conclusions comme des conclusions d'annulation, mais comme des conclusions à fin d'injonction. En outre, il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal a statué sur ces conclusions au stade des conclusions indemnitaires, en contradiction tant avec les écritures de Mme A... qu'avec les visas du jugement. Par suite, le jugement attaqué, en tant qu'il s'est mépris sur la portée des écritures de Mme A... et a, ainsi, omis de statuer sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation du rejet implicite de régulariser ses congés, est irrégulier et doit être annulé. 11. Il y a lieu de statuer, immédiatement, par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mme A... à fin d'annulation et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur ses conclusions indemnitaires. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne le refus d'imputabilité au service des congés maladie : 12. Lorsque le silence gardé par l'administration sur une demande dont elle a été saisie a fait naître une décision implicite de rejet, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement se substitue à la première décision. En l'espèce, les conclusions de Mme A... dirigées contre le refus implicite de sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service du 27 décembre 2018 doivent être regardées comme dirigées contre la décision explicite du 15 mars 2021 par laquelle la directrice régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Ile-de-France a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 13 janvier 2014. 13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme a, au cours d'une séance du 8 octobre 2020, examiné à nouveau la demande de Mme A... de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 13 janvier 2014, après avoir eu connaissance du rapport du médecin de prévention, ainsi que le montre le courriel du 29 juin 2020 versé au dossier. Par suite, les moyens tirés du défaut de consultation de la commission de réforme et de transmission à cette commission du rapport du médecin de prévention manquent en fait et doivent être écartés. 14. En second lieu, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa version applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 15. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions citées au point précédent, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien ou tout autre échange professionnel entre un agent et son supérieur hiérarchique ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 16. Il ressort des pièces du dossier que le vendredi 10 janvier 2014, une discussion houleuse s'est engagée entre Mme A... et sa supérieure hiérarchique, avec qui elle entretenait des relations difficiles depuis plusieurs semaines, s'agissant d'un fond de dossier égaré. Au retour du week-end, le lundi 13 janvier suivant, Mme A... ne parvenant pas à retrouver le dossier, sa supérieure lui a adressé un courriel à la suite duquel Mme A... a fait un malaise, puis a été placée en arrêt maladie. Or, si le courriel était rédigé dans des termes sévères et si certains agents de la chaine hiérarchique ont été mis en copie du courriel, ni les reproches qui lui ont été adressés à cette occasion ni les termes utilisés par sa supérieure n'ont excédé l'exercice normal de l'autorité hiérarchique. La circonstance que Mme A... ait fait un malaise à la suite de cet échange n'est pas, par elle-même, de nature à établir qu'elle aurait été victime d'un accident de service. En outre, il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé la commission de réforme dans son avis du 8 octobre 2020, que le différend de l'intéressée avec sa supérieure hiérarchique apparait comme " la manifestation de la décompensation d'un état pathologique " qui était antérieur à ce conflit. Dans ces conditions, dès lors que l'événement survenu le 13 janvier 2014 ne constitue pas un accident de service, en refusant de reconnaître son imputabilité au service, ainsi que des congés maladie qui s'en sont suivis, la directrice régionale et interdépartementale de l'équipement et de l'aménagement d'Ile-de-France n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de rejet du 15 mars 2021. En ce qui concerne le refus de régularisation des droits à congés : 17. Mme A... soutient, tout d'abord, que le refus de régulariser ses droits à congés méconnaît les dispositions du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État, dès lors qu'à son retour en décembre 2016, le solde horaire sur l'application Casper était négatif alors que le compteur horaire affichait un excédent de 99h59 et qu'elle n'a pu bénéficier d'aucune journée de récupération à raison de ces heures. Toutefois, s'il est manifeste que des dysfonctionnements techniques ont eu lieu sur l'application, il ne ressort pas des pièces du dossier que le solde négatif de -383h30 au 1er janvier 2017 serait anormal, alors que l'administration soutient, sans être contredite, que ce solde était antérieur au départ en congé de formation de Mme A..., ni que le solde positif de 99h59 apparaissant pour les mois de janvier à mars 2017, dont elle se prévaut, serait avéré alors que les pointages effectués montrent un excédent d'heures effectuées, pour ces mois-là, entre 8 et 13 heures mensuellement. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'une régularisation de son dossier a eu lieu en avril 2017, les soldes devenant, à compter de cette date, cohérents avec les pointages réalisés. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient Mme A..., il ressort des captures d'écran produites au dossier qu'elle a bénéficié d'une demi-journée de récupération en décembre 2017, puis à six reprises entre janvier et août 2018 mais qu'elle a, ensuite, à nouveau accumulé des déficits horaires ne permettant pas la prise de journées de récupération. Enfin, si Mme A... soutient qu'il y a une rupture d'égalité de traitement entre agents de même grade, aucune pièce du dossier ne permet de l'établir. Par suite, sa demande tendant à l'annulation du refus implicite de régulariser ses droits à congés doit être rejetée. Sur les conclusions indemnitaires : 18. En premier lieu, Mme A... soutient que la responsabilité de l'administration est engagée du fait de l'illégalité de son évaluation professionnelle de l'année 2012. Or, il ressort des termes de ce compte-rendu que le supérieur hiérarchique a mentionné les objectifs de contrôles et le nombre de contrôles réalisés, correspondant à environ 70% de l'objectif fixé. Le compte-rendu relève également un manque de rigueur dans la rédaction des procès-verbaux et invite à des progrès dans l'adaptation de la requérante aux évolutions techniques. Il ressort par ailleurs de ce compte-rendu que les cases cochées, au deuxième ou troisième niveau sur les quatre existants, ne sont pas incohérentes avec les appréciations littérales et les reproches qui lui sont faits. La circonstance que le supérieur ait fait mention de son arrêt maladie du mois de juin, de la mise en place de l'application Greco-Web qui a posé des difficultés et de la nécessaire disponibilité des forces de l'ordre pour les contrôles, éléments permettant de contextualiser les résultats de Mme A..., n'est pas de nature à entacher ce compte-rendu d'incohérences. Par ailleurs, s'il est constant que des difficultés techniques ont eu lieu sur l'application Greco-web en fin d'année 2012, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance aurait pu, à elle seule, expliquer la non-atteinte des objectifs de la requérante, les pièces apportées se limitant à des échanges sur des problèmes techniques en 2013 et 2014 engendrant des indisponibilités limitées de l'application, insusceptibles d'avoir influencé ses résultats de 2012, et à un document démontrant qu'un seul contrôle effectué par Mme A... en 2012 n'avait pas pu être intégré dans l'application, bien en-deçà du nombre de contrôles qu'elle n'a pas clôturés dans l'année et, en tout état de cause, inférieur au nombre de contrôles non pris en compte pour d'autres de ses collègues placés dans une situation similaire. Si Mme A... se plaint de ce que les contrôles sont attribués par la hiérarchie, elle n'établit pas que cette attribution l'aurait particulièrement pénalisée, en se bornant à produire un échange de courriels avec sa supérieure, daté de 2013, au sujet d'un contrôle qui lui a été refusé et un autre sur lequel elle ne s'est pas rendue alors qu'il lui avait été attribué. De même, l'attestation de son collègue et le message syndical, s'ils évoquent des difficultés et des tensions dans l'équipe à la suite d'un déménagement scindant l'équipe en deux groupes, aucun élément ne permet de faire le lien avec les résultats personnels de Mme A... et, par suite, d'établir que le compte-rendu professionnel de l'année 2012 serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Mme A... n'est donc pas fondée à soutenir que l'administration aurait entaché son compte-rendu d'entretien professionnel au titre de l'année 2012 d'une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité. 19. En deuxième lieu, la requérante soutient que la responsabilité de l'administration se trouve engagée du fait de l'illégalité des refus successifs de lui attribuer une réduction d'ancienneté. Toutefois, Mme A... n'assortit son moyen des précisions suffisantes de nature à en apprécier le bien-fondé que s'agissant de l'année 2012. Pour cette année-là, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'il serait illégal dès lors qu'il se fonde sur un compte-rendu professionnel lui-même illégal car, ainsi qu'il vient d'être dit, ce compte-rendu n'était entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation. En outre, contrairement à ce que soutient la requérante, le rejet du 11 décembre 2013 de son recours gracieux formulé à l'encontre du refus de réduction d'ancienneté, qui explicite les motifs de ce refus, est fondé sur la non-atteinte des objectifs de contrôles et les difficultés de la requérante face aux évolutions techniques. Les autres éléments mentionnés dans le courrier, comme l'utilisation de l'outil OCTET, portent sur l'année 2013 pour mettre en exergue que l'évolution postérieure de son travail ne permet pas d'accueillir favorablement sa demande de révision. Si la requérante allègue que son rendu se trouvait dans la moyenne et que des agents moins bien classés ont eu droit à une réduction d'ancienneté, cette circonstance, non établie de façon probante par des tableaux non contextualisés, ne permettrait, en tout état de cause, pas de considérer que le refus dont elle a fait l'objet serait illégal ou constituerait une rupture d'égalité dès lors que l'attribution d'une réduction d'ancienneté peut également résulter d'autres facteurs que le rendu statistique des contrôleurs. Il suit de là que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait engagé sa responsabilité en lui refusant illégalement des réductions d'ancienneté. 20. En troisième lieu, Mme A... soutient que la gestion de ses demandes de formation par son employeur serait fautive et de nature à engager la responsabilité de l'État. Toutefois, s'agissant de la formation " gestion des conflits " à Clermont-Ferrand, il résulte de l'instruction qu'une formation similaire se tenait à Paris alors que la requérante était affectée en Ile-de-France, et l'administration fait valoir, sans être contredite, que les formations dispensées en Ile-de-France sont prioritaires en vertu d'une note de service du 29 février 2012 applicable à tous les agents. En outre, s'agissant des sessions " coopérations-échanges " d'une durée de deux semaines, la longueur de la formation, eu égard aux missions prioritaires de contrôle incombant à la requérante, qui ne remplissait pas ses objectifs de contrôle, a été jugée contraire aux intérêts du service. Par ailleurs, Mme A... ne conteste pas que l'autorisation d'absence pour passer les épreuves du concours interne d'attaché de son ministère, qui n'est pas de droit, ne lui a été refusée qu'en raison d'une autre autorisation d'absence qui lui avait déjà été octroyée la même année pour le concours d'entrée à l'IRA de Bastia et que le règlement intérieur, applicable à l'ensemble des agents de sa direction, prévoit une autorisation de droit à hauteur d'un jour par an, le surplus étant à la discrétion de la hiérarchie. Enfin, en ce qui concerne la demande de congé de formation professionnelle afin de passer le brevet de technicien supérieur en économie sociale et familiale, il est constant que la requérante a déposé sa demande de congé le 15 janvier 2015, accordée par une décision du 29 mai 2015, notifié le 3 juin 2015 après le début de la formation. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'organisme responsable de la formation, après l'avoir vainement contactée le 20 avril, lui a refusé l'entrée en formation au motif que le dossier administratif et financier devait être réglé, Mme A... n'établissant pas que, sur ce point, l'administration aurait tardé de façon excessive à traiter sa demande. Il résulte d'ailleurs de l'instruction que la requérante a effectivement bénéficié d'un congé de formation professionnelle pour passer un DUT carrières sociales option assistance sociale qui lui a été accordé du 1er septembre au 9 décembre 2016. 21. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ;/3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. ". 22. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 23. Mme A... soutient qu'elle a subi des faits de harcèlement moral provenant de sa supérieure hiérarchique. Toutefois, si Mme A... affirme qu'elle aurait été dénigrée et placée en difficulté à dessein par sa hiérarchie, cela ne résulte pas de l'instruction. En particulier, si le ton employé dans le courriel du 13 janvier 2014 de sa supérieure à la suite duquel Mme A... a fait un malaise, est ferme, ce courriel est isolé et ne dépasse pas le cadre normal du pouvoir hiérarchique, ainsi qu'il a été dit au point 16. Par ailleurs, si Mme A... soutient que le harcèlement a perduré à son retour de congé maladie, qu'elle se serait trouvée isolée et privée de travail, que ses mails auraient été supprimés, qu'elle se serait vu opposer un refus de délivrance d'une carte de circulation ou attribuer un ordinateur ayant une batterie défaillante, ces circonstances ne sont établies par aucune pièce probante versée aux débats. 24. Néanmoins, il résulte de l'instruction que Mme A... entretenait des rapports difficiles avec sa supérieure hiérarchique et ses collègues qui ont conduit à des arrêts de travail réguliers pour " anxiété " puis un arrêt maladie de longue durée à compter du 13 janvier 2014, après une altercation par courriel avec cette supérieure, pour un " état dépressif sévère ", ainsi qu'il ressort de l'expertise psychiatrique demandée par l'administration en septembre 2014. Il résulte également de l'instruction que les médecins de prévention ont, à trois reprises, entre 2010 et 2013, estimé que les conditions de travail de Mme A... étaient " dégradées " et demandaient à ce qu'elles soient améliorées. Enfin, il résulte des termes du rapport issu de l'enquête administrative diligentée par l'administration dans le cadre des conflits de Mme A... avec sa hiérarchie que la requérante est probablement isolée sur son lieu de travail et que la situation a été " difficile et douloureuse ". Ces éléments suffisent à faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral. 25. Toutefois, ces derniers faits ne peuvent être appréciés sans tenir compte du comportement de l'intéressée et de l'intérêt du service. Or, il ressort des termes du même rapport d'enquête produit au dossier, remis en janvier 2015 après audition de Mme A..., que les inspecteurs n'ont relevé aucun manquement grave du fonctionnement de la chaîne hiérarchique " si ce n'est des difficultés à régler, en amont, avec suffisamment de fermeté un problème singulier, lié à un agent qui n'est manifestement plus apte à exercer des fonctions de contrôle des transports terrestres ". En outre, s'il ressort effectivement d'un courriel du 11 février 2013 que sa supérieure hiérarchique n'était pas favorable à sa venue dans l'équipe de Versailles, il ne résulte pas des termes de ce courriel, qui note l'absence de concertation et d'information en amont de la direction, ainsi qu'une incohérence à affecter un agent à distance de ses lieux de contrôle, que ce désaccord serait lié à la personne de Mme A... ou qu'elle nourrissait une quelconque animosité à son égard. Il résulte également de l'instruction, ainsi qu'il a été notamment rappelé au point 18, que Mme A... rencontrait des difficultés pour remplir ses objectifs de contrôle, et montrait une inaptitude à s'adapter aux évolutions techniques nécessaires à la bonne réalisation des contrôles. De même, s'il est constant que sa supérieure a, à plusieurs reprises, refusé de valider ses horaires de travail et ses demandes d'affectation sur certains contrôles, il ne résulte pas de l'instruction que ces décisions auraient été prises à tort, alors que la requérante devait se conformer à la décision du 26 mars 2013 relative à son affectation à Versailles, qui fixe son secteur d'intervention et exige qu'elle s'organise pour du co-voiturage avec les contrôleurs concernés. Enfin, il résulte de l'instruction que Mme A... connaissait déjà des difficultés avec sa hiérarchie dans ses affectations précédentes, ce qui a conduit, selon ses propres termes, à ce qu'elle accepte d'être affectée à Versailles, à la faveur d'une réorganisation, dans un souci d'apaisement. Dans ces conditions, les faits, relevés au point 24 ne peuvent pas être qualifiés de harcèlement moral et ne constituent pas une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'État. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées à ce titre ne peuvent être que rejetées. 26. En conséquence, Mme A... n'est pas fondée à demander la condamnation de l'État à l'indemniser des préjudices dont elle demande réparation ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses demandes indemnitaires. Sur les conclusions à fin d'injonction : 27. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation du rejet de sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de l'événement du 13 janvier 2014 et du rejet de sa demande de régularisation de ses congés. En conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être écartées. Sur les frais liés à l'instance : 28. L'État n'étant pas partie perdante, les conclusions présentées par Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratives ne peuvent qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1903252 du 8 février 2021 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... est annulé. Article 2 : La demande de Mme A... présentée devant le tribunal administratif de Versailles, tendant à l'annulation du rejet de ses demandes de reconnaissance d'imputabilité au service de l'événement du 13 janvier 2014 et des congés maladie qui s'en sont suivis et de régularisation de ses congés, est rejetée. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024, à laquelle siégeaient : Mme Besson-Ledey, présidente, Mme Danielian, présidente assesseure, Mme Liogier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 février 2024. La rapporteure, C. LiogierLa présidente, L. Besson-Ledey La greffière, A. Audrain-Foulon La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N°21VE01061 2
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 22BX02005, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... Biron a demandé au tribunal administratif de Bordeaux : - d'annuler la décision implicite de la commune de Teuillac et la décision du 20 juillet 2018 de la communauté de communes Couserans-Pyrénées rejetant sa réclamation indemnitaire préalable et sa demande tendant à ce que sa situation soit régularisée avec sa mutuelle, au regard de ses salaires et de son avancement, ainsi que sa demande tendant à être placée à la retraite pour invalidité imputable au service à défaut d'un reclassement ; - de condamner la commune de Teuillac et la communauté de communes Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 335 704,21 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices découlant de sa maladie, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles subis dans ses conditions d'existence ainsi que la somme de 60 000 euros au titre de l'allocation temporaire d'invalidité ; - de condamner la commune de Teuillac à lui payer une somme qui ne saurait être inférieure à 30 000 euros au titre des rémunérations qui auraient dû lui être versées pendant ses congés de maladie imputables au service ; - d'enjoindre à la commune de Teuillac de régulariser sa situation au titre de la mutuelle nationale territoriale et d'enjoindre à la commune de Teuillac et à la communauté de communes Couserans-Pyrénées de régulariser sa situation au titre de l'avancement et de la retraite et de procéder à liquidation et au versement de l'allocation temporaire d'invalidité qui lui est due, et de la placer à la retraite pour invalidité imputable au service avec un taux qui ne serait être inférieur à 30 %, sauf reclassement possible. Par un jugement n° 1804139 du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à verser à Mme Biron la somme de 119 980, 70 euros, a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros et a annulé la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Teuillac a refusé de verser à Mme Biron la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Le tribunal a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée et a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, ainsi que la somme correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019 et les frais d'expertise. Procédure devant la Cour : I. Sous le n° 21BX04225, par une requête et des mémoires, enregistrés, les 16 novembre 2021, 25 octobre 2023, la communauté de communes Couserans-Pyrénées, représentée par la société Urbi et Orbi avocats, agissant par Me Magrini, demande à la Cour : 1°) de réformer partiellement le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 septembre 2021 précité ; 2°) de limiter sa condamnation au versement à la commune de Teuillac de la somme correspondant seulement aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2017, et non jusqu'au 31 décembre 2019, et de réformer le jugement en ce qu'il a de contraire à l'arrêt à intervenir ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Teuillac une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - en jugeant qu'elle devait supporter la charge des traitements de Mme Biron entre le 9 décembre 2007 et le 31 décembre 2019, le tribunal a commis une erreur d'appréciation ; d'une part, le comportement de la commune de Teuillac a été de nature à retarder la reprise de l'agent, son reclassement ou sa mise à la retraite ; d'autre part, la commune de Teuillac a été plus que négligente dans la gestion de la carrière de Mme Biron ; ainsi dès la fin de sa reprise à mi-temps thérapeutique le 10 avril 2011, la commune de Teuillac aurait dû engager la procédure permettant d'établir son aptitude à exercer ses fonctions et examiner si elle pouvait bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou être mise en mesure de demander son reclassement si elle était déclarée en mesure d'occuper les fonctions correspondantes ; or, il s'est passé quatre années durant lesquelles la commune n'a rien mis en œuvre pour entamer le reclassement de l'agent ou procéder à une mise à la retraite pour invalidité ; - en outre, par un avis du 17 février 2016, le comité médical départemental a indiqué que l'agent était inapte à ses fonctions ; par courrier du 28 avril 2016, la commune a alors demandé à l'agent d'engager une procédure de reclassement mais cette demande n'a pas été suivie d'effet ; rien ne s'est alors passé avant l'année 2018 ; les premiers juges ont estimé que la procédure de reclassement aurait pu aboutir le 31 décembre 2019 commettant une erreur d'appréciation dès lors qu'elle aurait pu aboutir dans le délai raisonnable d'un an, soit au 31 décembre 2017. Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 août 2023 et le 14 novembre 2023, la commune de Teuillac, représentée par la SCP Kappelhoff-Lançon-Valdes, agissant par Me Valdes, conclut : - à la confirmation du jugement attaqué en ce qu'il a d'une part condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à réparer l'entier préjudice de Mme Biron et d'autre part déclaré recevable son action récursoire à l'encontre de la communauté de communes ; - à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a limité la période de remboursement des traitements dus à Mme Biron par la communauté de communes Couserans-Pyrénées à la commune de Teuillac jusqu'au 31 décembre 2019 et non jusqu'à sa mise en retraite ; - à la condamnation de la communauté de communes à lui rembourser, d'une part, la somme de 388 165,56 euros correspondant aux traitements versés à Mme Biron par la commune de Teuillac depuis 2007 jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité et, d'autre part, la somme de 720,36 euros correspondant à la facture de la cure thermale de Mme Biron et à la note de consultation du docteur A... ; - et, en outre, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés ; Mme Biron a sollicité sa reprise du travail pour la fin de l'année 2015 ainsi que la réalisation d'un bilan de compétences en 2016 mais n'a jamais donné suite au courrier du 28 avril 2016 de la commune de Teuillac lui demandant de produire son bilan de compétence afin de pouvoir procéder à une recherche de reclassement ; la commission de réforme a ensuite rendu le 4 avril 2018 un avis d'inaptitude définitive à toute fonction et, par un avis du 6 juin 2018, elle a rendu un avis favorable à sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service ; ces éléments démontrent que la commune de Teuillac s'est particulièrement préoccupée de son agent et a été active dans la gestion de son dossier ; - s'agissant du versement des salaires, à ce jour et depuis 2007, la commune de Teuillac a versé à Mme Biron la somme de 318 361,15 euros à titre de traitements ; la Cour doit dès lors condamner la communauté de communes à lui rembourser cette somme ; - au regard des pièces versées, la communauté de communes doit être condamnée à rembourser à la commune de Teuillac la somme de 69 804,41 euros, soit un total de 388 156,56 euros correspondant au versement de son traitement depuis 2007 jusqu'à sa mise en retraite pour invalidité, ainsi que les frais de cure thermale. Par ordonnance du 26 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 27 novembre 2023. Par un courrier du 21 décembre 2023, les parties ont été informées, qu'en application de l'article L. 611-7 du code de justice administrative, la Cour était susceptible de se fonder sur le moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions incidentes présentées par la commune de Teuillac tendant à la condamnation de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale. II. Sous le n° 22BX02005, par un courrier du 21 février 2022, Mme C... Biron, représentée par la société d'avocats Cabinet Laveissière, agissant par Me Laveissière, a demandé à la Cour l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1804139 du 22 septembre 2021. Par un courrier du 1er juin 2022, la commune de Teuillac, représentée par la SCP Kappelhoff-Lançon-Valdes, agissant par Me Valdes, a fait valoir, d'une part, que les sommes de 5 000 euros et 1 200 euros ont été versées à Mme Biron, d'autre part, que la communauté de communes Couserans-Pyrénées ne lui a toujours pas versé la somme de 223 303,74 euros correspondant aux traitements payés à Mme Biron du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019, ainsi que les frais de cure thermale. Par une ordonnance du 30 août 2022, une procédure juridictionnelle a été ouverte sous le n° 22BX02005 en vue de prescrire, s'il y a lieu, les mesures nécessaires à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 septembre 2021. Par un mémoire, enregistré le 10 novembre 2022, Mme Biron demande à la Cour d'enjoindre à la communauté de communes Couserans-Pyrénées d'exécuter le jugement attaqué dans le délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, et, en outre, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de cette dernière sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2023, la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, représentée par la société Urbi et Orbi avocats, agissant par Me Magrini, demande à la Cour de prononcer un non-lieu à statuer dès lors qu'elle a exécuté le jugement. Elle indique que la somme totale de 122 280,70 euros a été mise en paiement le 13 janvier 2023. Par ordonnance du 19 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 novembre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code des communes ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de M. Duplan, rapporteur public, - les observations de Me Brouquières, substituant Me Magrini, pour la communauté de communes Couserans-Pyrénées, Me Valdes pour la commune de Teuillac et Me Roncin, substituant Me Laveissière, pour Mme Biron. Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 janvier 2024, présentée par la commune de Teuillac dans le dossier 21BX04225. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... Biron, agent territorial spécialisé des écoles maternelles (ATSEM), titularisée par un arrêté du 10 août 2005 du président de la communauté de communes du canton de Massat (Ariège), a présenté dans le courant de l'année 2006, à l'âge de 32 ans, des paresthésies des deux mains puis des membres inférieurs, symptomatiques de ce qui a alors été diagnostiqué comme une méningo-radiculite. Mme Biron a ensuite été recrutée à compter du 1er août 2007, par voie de mutation, par la commune de Teuillac (Gironde). Elle a subi des récidives de polyradiculonévrite aux mois de novembre et décembre 2007 et a été placée en congé maladie ordinaire à compter du 9 décembre 2007, puis en congé de longue maladie à compter du 7 janvier 2014, après avoir été reconnue comme travailleur handicapé le 1er septembre 2009 par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Par un jugement du 4 février 2013, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé un premier arrêté du maire de Teuillac du 29 avril 2010 refusant de reconnaître comme imputable au service la pathologie contractée par Mme Biron et lui a enjoint de réexaminer la demande de l'intéressée. Par un jugement du 6 octobre 2015, le tribunal a annulé un deuxième arrêté du maire de Teuillac du 4 avril 2014 rejetant de nouveau la demande de Mme Biron d'imputabilité au service de sa pathologie. Dans l'intervalle, et après une expertise médicale, qui a conclu à la contamination par la fièvre Q ou méningo-encéphalite à Coxiella Borneti de Mme Biron dans le cadre des fonctions exercées au sein de l'école de Soulan, la commission départementale de réforme a reconnu, le 22 janvier 2014, l'imputabilité au service de sa maladie à compter du 1er janvier 2006. Par un troisième arrêté du 30 octobre 2014, la commune de Teuillac a reconnu que la pathologie de Mme Biron était imputable au service accompli au sein de la communauté de communes. Par un jugement du 13 octobre 2015, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 16 octobre 2017, le tribunal a rejeté la demande présentée par la communauté de communes, tendant à l'annulation de ce dernier arrêté. 2. Par un courrier du 22 mai 2018, Mme Biron a adressé une réclamation indemnitaire à la commune de Teuillac et à la communauté de communes Couserans-Pyrénées et leur a demandé de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière, et de la placer à la retraite pour invalidité imputable au service, sauf si un reclassement était possible. Elle a demandé au tribunal l'annulation de la décision implicite née le 24 juillet 2018 du silence gardé par le maire de la commune de Teuillac sur ses demandes de versement de traitements, de l'allocation temporaire d'invalidité et de non placement à la retraite pour invalidité, et l'annulation de la décision du 20 juillet 2018 par laquelle le président de la communauté de communes Couserans-Pyrénées a rejeté ces mêmes demandes. Elle a également sollicité la condamnation des collectivités en cause à réparer les divers préjudices qu'elle a subis et qu'il leur soit enjoint de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière. 3. Par un jugement du 22 septembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné la communauté de communes Couserans-Pyrénées à verser à Mme Biron la somme de 119 980,70 euros au titre de divers préjudices, a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, a annulé la décision implicite par laquelle la commune de Teuillac a refusé de payer à Mme Biron la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Le tribunal a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée et a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, ainsi que la somme correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019 et a mis à sa charge les frais d'expertise. 4. Par sa requête n° 21BX04225, la communauté de communes Couserans-Pyrénées fait appel de ce jugement dont elle demande la réformation en tant seulement qu'il l'a condamnée à verser les traitements dus à Mme Biron jusqu'au 31 décembre 2019 et demande que le terme du versement de ces traitements soit fixé au 31 décembre 2017. La commune de Teuillac conclut au rejet de cette requête et, par la voie de l'appel incident, demande que la condamnation de la communauté de communes au paiement des traitements dus à Mme Biron soit prolongée jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité et que la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale soit mise à la seule charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. Par la requête n° 22BX02005, Mme Biron et la commune de Teuillac demandent l'exécution du jugement. Sur la requête n° 21BX04225 : En ce qui concerne la recevabilité : 5. La commune de Teuillac réitère devant la Cour ses conclusions tendant à la condamnation de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à lui verser la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale. Ainsi que les parties en ont été informées par courrier du 21 décembre 2023, de telles conclusions sont irrecevables dès lors que la commune de Teuillac a déjà obtenu satisfaction devant le tribunal sur ce point et ne justifie par suite pas d'un intérêt pour agir. En ce qui concerne le bien-fondé du jugement : 6. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci (...) ". 7. D'autre part, aux termes de l'article 81 de la même loi : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / Lorsque l'admission à la retraite pour invalidité intervient après que les conditions d'ouverture du droit à une pension de droit commun sont remplies par ailleurs, la liquidation des droits s'effectue selon la réglementation la plus favorable pour le fonctionnaire. / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. En aucun cas, elle ne pourra avoir une date d'effet postérieure à la limite d'âge du fonctionnaire sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 36 du même décret : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 8. En application de ces dispositions, la collectivité au service de laquelle se trouvait l'agent lors de l'accident de service doit supporter les conséquences financières de la rechute consécutive à cet accident, alors même que cette rechute est survenue alors qu'il était au service d'une nouvelle collectivité. La collectivité qui employait l'agent à la date de l'accident doit ainsi prendre en charge non seulement les honoraires médicaux et les frais exposés par celui-ci qui sont directement entraînés par la rechute mais aussi le remboursement des traitements qui lui ont été versés par la collectivité qui l'emploie à raison de son placement en congé de maladie ordinaire, de congé de longue maladie ou de congé de longue durée, dès lors que ce placement a pour seule cause la survenue de la rechute consécutive à l'accident de service. Si la collectivité qui l'emploie est tenue de verser à son agent les traitements qui lui sont dus, elle est cependant fondée à demander à la collectivité qui l'employait à la date de l'accident, par une action récursoire, le remboursement de ceux de ces traitements qui sont liés à la rechute ainsi que des éventuels honoraires médicaux et frais qu'elle aurait pris en charge du fait de cette rechute. Cette action récursoire ne peut être exercée, s'agissant des traitements, qu'au titre de la période qui est raisonnablement nécessaire pour permettre la reprise par l'agent de son service ou, si cette reprise n'est pas possible, son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois ou encore, si l'agent ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, pour que la collectivité qui l'emploie prononce sa mise d'office à la retraite par anticipation. 9. Il résulte également des dispositions combinées citées aux points 5 et 6, que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. L'administration a l'obligation de maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite. 10. La communauté de communes de Couserans-Pyrénées soutient que la date du 31 décembre 2019, qui correspond selon les premiers juges à celle à laquelle il était raisonnable de penser que Mme Biron aurait pu être reclassée, est entachée d'erreur d'appréciation et doit être ramenée au 31 décembre 2017. La commune de Teuillac, par la voie de l'appel incident, soutient qu'elle n'a commis aucune faute ou retard dans la prise en charge de la situation de Mme Biron et demande la réformation du jugement en tant qu'il a fixé au 31 décembre 2019 et non à la date de la mise en retraite pour invalidité de Mme Biron la fin de la prise en charge des traitements de Mme Biron par la communauté de communes Couserans-Pyrénées. 11. Il résulte des points 5 et 6 et il n'est d'ailleurs pas contesté que la communauté de communes de Couserans-Pyrénées doit verser à Mme Biron les traitements dont cette dernière a été illégalement privée à compter du 9 décembre 2007, date de son placement en congé de maladie, et que les traitements effectivement versés par la commune de Teuillac à Mme Biron durant ses périodes d'arrêts de travail doivent être mis à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées, dans la mesure où elle a fait elle-même toutes diligences pour mettre un terme à ces arrêts de travail. 12. Il résulte de l'instruction, et notamment du tableau récapitulatif produit par la commune de Teuillac, qui n'a pas fait l'objet de contestation, que cette dernière a payé à Mme Biron les sommes dues au titre des traitements durant ses périodes d'arrêts de travail. Il résulte également de l'instruction qu'en dehors d'une période de reprise de ses fonctions d'ATSEM à mi-temps thérapeutique du 11 octobre 2010 au 10 avril 2011, Mme Biron a été placée, sans discontinuité, en congé de maladie pour accident de service depuis le 9 décembre 2007. Le 18 janvier 2010, elle a bénéficié de la reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, dont l'équipe disciplinaire avait constaté que les possibilités pour Mme Biron d'obtenir ou de conserver un emploi étaient réduites. Après que sa maladie a été reconnue imputable au service par la commune de Teuillac par un arrêté du 30 octobre 2014, Mme Biron a informé le maire de la commune de son souhait de reprendre une activité sur un poste aménagé avant de demander le 24 octobre 2015 à cette même autorité de transmettre à la commission de réforme sa demande de mise à la retraite pour invalidité. Le 17 février 2016, le comité médical départemental a reconnu Mme Biron inapte à ses fonctions d'ATSEM et la commune de Teuillac lui a alors demandé, le 26 avril 2016, de lui transmettre les documents nécessaires à la recherche de son reclassement, sans obtenir de réponse. Or, il ne résulte pas de l'instruction qu'entre avril 2016 et le 23 novembre 2017, date de saisine de la commission de réforme pour qu'elle se prononce sur son aptitude à l'exercice de ses fonctions, la commune de Teuillac aurait engagé une procédure ni sollicité l'avis d'aucune instance consultative, ni d'un médecin expert quant à la situation administrative et médicale de son agent. Il résulte également de l'instruction que ce n'est que le 13 décembre 2018 que la commune de Teuillac a transmis à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL) un dossier d'études des droits à pension pour invalidité de Mme Biron. 13. Ainsi, il appartenait à la commune de Teuillac dès le courant de l'année 2016 d'engager la procédure permettant d'établir, après consolidation de son état de santé, l'aptitude de Mme Biron à reprendre son service et d'examiner si elle pouvait, le cas échéant, bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, à défaut, être mise en mesure de demander son reclassement dans un emploi. Ainsi, l'ensemble de ces procédures pouvaient aboutir au plus tard au 31 décembre 2018, si elles avaient été menées avec une diligence adéquate par la commune de Teuillac. 14. Dans ces conditions, la communauté de communes de Couserans-Pyrénées est fondée à demander la réformation du jugement sur ce point et à demander que seuls les traitements que la commune de Teuillac justifie avoir versés à Mme Biron entre le 9 décembre 2007 et le 31 décembre 2018 soient mis à sa charge. Le jugement doit par suite être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Sur la requête n° 22BX02005 : 15. A la demande de Mme Biron, le président de la Cour a, par une ordonnance du 30 août 2022, décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de l'exécution du jugement n° 1804139 du 21 septembre 2021 qui fait l'objet du présent arrêt. 16. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Aux termes de l'article L. 911-4 du même code : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. (...) Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". 17. Il appartient au juge saisi d'une demande d'exécution d'une décision de justice sur le fondement de l'article L. 911-4 d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être. 18. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Mme Biron a perçu la somme de 119 980,70 euros en réparation de ses préjudices découlant de sa maladie d'origine professionnelle et la somme de 1 100 euros pour les frais d'expertise et la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que l'établit le mandat de paiement émis le 13 janvier 2023 par la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. 19. En deuxième lieu, le tribunal a condamné la commune de Teuillac à verser à Mme Biron la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et a enjoint à la commune de Teuillac de payer à Mme Biron le complément de rémunération correspondant à la fraction des traitements dont elle a été illégalement privée. Il résulte de la lettre de la commune de Teuillac du 1er juin 2022, non contestée par Mme Biron, que la commune de Teuillac a versé à Mme Biron les sommes de 5 000 euros et 1 200 euros en application du jugement précité ainsi que les traitements dont elle a été illégalement privée jusqu'à sa mise à la retraite. 20. Par suite, le jugement n° 1804139 du 21 septembre 2021 dont il n'était pas fait appel de ces condamnations a été exécuté sur ces points. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer. 21. En troisième lieu, le tribunal a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros et il ne résulte pas de l'instruction que la communauté de communes a exécuté le jugement sur ce point. Par suite, il y a lieu d'enjoindre à la communauté de communes de verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros correspondant à une cure thermale, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la période de deux mois suivant la notification du présent arrêt. 22. En dernier lieu, le tribunal a condamné la communauté de communes de Couserans-Pyrénées à verser à la commune de Teuillac les sommes correspondant aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron durant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2019. Par le présent arrêt, la Cour réforme partiellement le jugement n° 1804239 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux sur ce point. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions tendant à l'exécution du jugement sur ce point présentées par la commune de Teuillac sont rejetées. Sur les frais d'instance : 23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes de Couserans-Pyrénées qui n'est pas la partie perdante dans l'instance n° 21BX04225, la somme demandée par la commune de Teuillac au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Teuillac la somme demandée au même titre par la communauté de communes de Couserans-Pyrénées. Au titre de l'instance n° 22BX02005, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté de communes Couserans-Pyrénées une somme de 1 000 euros à verser à Mme Biron en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 22BX02005 en tant qu'elles concernent la demande de Mme Biron. Article 2 : La communauté de communes de Couserans-Pyrénées est condamnée à verser à la commune de Teuillac les sommes correspondantes aux traitements payés par cette dernière à Mme Biron pendant la période du 9 décembre 2007 au 31 décembre 2018. Article 3 : Le jugement n° 1804239 du 22 septembre 2021 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2 du présent arrêt. Article 4 : Il est enjoint à la communauté de communes Couserans-Pyrénées de verser à la commune de Teuillac la somme de 720,36 euros, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Article 5 : la communauté de communes Couserans-Pyrénées versera à Mme Biron une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes Couserans-Pyrénées, à la commune de Teuillac, à Mme C... Biron, à la CPAM du Tarn et à la CPAM de la Gironde. Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. La rapporteure, Caroline B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine JussyLa République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 21BX04225-22BX02005 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 5ème chambre, 09/02/2024, 22MA02830, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite de rejet de son recours préalable obligatoire dirigé contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées en tant qu'elle a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la 9ème période de congé de longue durée pour maladie dont elle a bénéficié, la décision du 3 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a partiellement agréé le recours précité et décidé de soumettre son dossier au comité supérieur médical, en application de l'article R. 4138-50 du code de la défense, la décision du 14 octobre 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision du 28 juillet 2017 en tant qu'elle ne reconnaît pas le lien au service de son congé de longue durée pour maladie, la décision du 14 septembre 2020 de la ministre des armées rejetant le recours administratif préalable obligatoire formé devant la commission des recours des militaires et dirigé contre l'arrêté du 24 octobre 2019 portant radiation des cadres pour réforme définitive, ainsi que cet arrêté du 24 octobre 2019. Par un jugement n° 2000124, 2002404, 2102841 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, rejeté les requêtes n° 2000124 et n° 2102841, à l'article 2, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions, présentées dans la requête n° 2002404, tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours administratif obligatoire formé contre cet acte et, à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 2002404. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 novembre 2022 et 30 novembre 2023, sous le n° 22MA02830, Mme A..., représentée par Me Moumni, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 septembre 2022 ; 2°) d'annuler les décisions de la ministre des armées contestées aux termes des requêtes n° 2000124, 2002404, 2102841 ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de reconnaître le lien au service de son affection et de prendre une décision d'attribution d'un congé de longue durée pour maladie en lien avec le service dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir et de reconnaître le lien au service de l'affection ayant motivé sa radiation pour réforme définitive et ce dans le même délai et la même astreinte ; 4°) de solliciter une expertise avant-dire droit si la Cour estime que l'état actuel du dossier ne permet pas d'apprécier l'existence d'un lien potentiel entre l'affection et le service ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les premiers juges ont commis une erreur de droit dès lors qu'ils ont recherché l'existence d'un lien de causalité exclusif entre l'affection ayant motivé le congé de longue durée pour maladie et le service alors que seul un lien de causalité direct doit être recherché ; - ce lien est suffisamment établi en l'espèce ; - l'apparition de la pathologie sur le temps et le lieu de service n'est pas douteuse dont la réalité n'est pas contestée ; - la procédure de pension militaire d'invalidité est de nature à entrer dans le faisceau d'indices ; - ses troubles de l'humeur sont secondaires à ses accidents de service et ont été constatés lors de la visite médicale permettant la mise en congé ; - les séquelles constatées lors de l'examen de sa demande de pension militaire d'invalidité comportaient notamment des troubles du caractère et thymie souvent dépressive avec hyperémotivité ; - elle ne présentait aucun antécédent psychiatrique avant l'entrée en service. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête de Mme A.... Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé le 20 septembre 2017 dirigé contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées dès lors que la décision du 3 avril 2018 prise à la suite du recours administratif préalable de Mme A... s'est substituée nécessairement à cette décision et est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Des observations en réponse au moyen d'ordre public ont été produites le 24 janvier 2024 par le ministre des armées, et communiquées le même jour. Vu les autres pièces du dossier. Vu, - le code de la défense, - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Marchessaux, - et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A... née le 6 novembre 1975 qui exerçait en qualité d'infirmière en soins généraux de premier grade de l'armée de l'air, a été victime le 24 septembre 2005 d'un accident de parachutisme lui occasionnant un choc hémorragique, une fracture du bassin et du thorax, une fracture de la cheville droite ainsi qu'un traumatisme crânien avec perte de connaissance. Des droits à pension militaire d'invalidité au taux de 60 % lui ont été ouverts à compter du 4 octobre 2008 à raison des infirmités résultant des blessures contractées en service. La requérante a bénéficié d'un congé longue maladie renouvelé au cours de la période du 23 octobre 2007 au 22 janvier 2010. Alors qu'elle avait repris le travail le 23 janvier 2010 sur un poste sédentaire au sein du centre de traitement de l'information médicale des armées à Saint-Mandé (Val-de-Marne), elle a été victime d'un accident de trajet le 29 janvier 2013 entraînant une fracture du poignet droit. A la suite d'un état dépressif médicalement constaté en juin 2013, elle a été placée en congé de maladie puis en congé de longue durée pour maladie au cours de la période du 16 juillet 2013 au 15 juillet 2017. Par une décision du 28 juillet 2017 prise après l'avis technique émis le 27 juillet 2017 par le médecin général inspecteur, le congé de longue durée pour maladie a été renouvelé pour une 9ème période allant du 16 juillet 2017 au 15 janvier 2018 inclus. Mme A... a formé un premier recours administratif préalable obligatoire enregistré le 20 septembre 2017 contre la décision du 28 juillet 2017 en tant qu'elle ne mentionne pas que la 9ème période de congé de longue durée pour maladie est imputable au service. Par une décision du 3 avril 2018, la ministre des armées a partiellement agréé le recours et a décidé de soumettre le dossier de Mme A... au comité supérieur médical. Lors de séance du 18 juin 2018, ce comité a considéré qu'il n'y avait pas de lien potentiel entre le service et la maladie de Mme A.... Par une décision du 22 janvier 2019, la direction centrale du service de santé des armées a agréé la demande de présentation devant une commission de réforme des militaires de l'intéressée. Mme A... a alors formé le 25 mars 2019 un deuxième recours administratif préalable obligatoire contre la décision du 22 janvier 2019, enregistré le 28 mars 2019. Par une décision du 14 octobre 2019, la ministre des armées a rejeté ce recours. Enfin, par une décision du 24 octobre 2019 rectifiée le 2 mars 2020, la ministre des armées a radié des cadres Mme A... pour réforme définitive à compter du 5 mars 2019. La requérante a formé contre cette décision un troisième recours administratif préalable obligatoire enregistré le 23 décembre 2019. Par une décision du 14 septembre 2020, la ministre des armées a rejeté ce recours préalable. Mme A... relève appel du jugement du 20 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulon a, à l'article 1er, rejeté les requêtes n° 2000124 et n° 2102841, à l'article 2, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions, présentées dans la requête n° 2002404, tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours administratif obligatoire formé contre cet acte et, à l'article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête n° 2002404. En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé le 20 septembre 2017 dirigé contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées : 2. Aux termes du I de l'article R. 4125-1 du code de la défense, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. (...) ". Aux termes de l'article R. 4125-10 du même code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. (...) / L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission ". 3. L'institution par ces dispositions d'un recours administratif, préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale. Elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Si l'exercice d'un tel recours a pour but de permettre à l'autorité administrative, dans la limite de ses compétences, de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision initiale, sans attendre l'intervention du juge, la décision prise sur le recours n'en demeure pas moins soumise elle-même au principe de légalité. 4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a formé, le 20 septembre 2017, un recours préalable obligatoire contre la décision du 28 juillet 2017 de la ministre des armées qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet puis d'une décision explicite du 3 avril 2018. Cette dernière décision, qui s'est nécessairement substituée à la décision implicite de rejet, est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Par suite, les conclusions de Mme A... doivent être regardées comme tendant à l'annulation de cette décision du 3 avril 2018 et celles tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet sont ainsi irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées. En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé contre cette décision : 5. Mme A... reprend en appel ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet du recours préalable obligatoire formé contre cette décision. Toutefois, elle ne conteste pas le non-lieu à statuer sur ces conclusions opposé par le tribunal dès lors que la décision expresse de rejet du 14 septembre 2020 s'est substituée à ces décisions. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées comme irrecevables. En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de la décision du 14 octobre 2019 : 6. Le jugement n° 1801739 du 22 avril 2021 par lequel le tribunal a annulé la décision du 14 octobre 2019 a lui-même été annulé par un arrêt définitif n° 21MA02435 de la Cour administrative d'appel de Marseille du 15 octobre 2021. Par suite, la décision du 14 octobre 2019 a été rétablie rétroactivement dans l'ordonnancement juridique et l'exception de non-lieu à statuer, opposée par la ministre des armées, doit être écartée. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la légalité des décisions des 3 avril 2018 et 14 octobre 2019 relatives à l'octroi d'un congé de longue durée pour maladie : 7. Aux termes de l'article L. 4138-12 du code de la défense, dans sa rédaction applicable : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, après épuisement des droits de congé de maladie ou des droits du congé du blessé prévus aux articles L. 4138-3 et L. 4138-3-1, pour les affections dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. / Lorsque l'affection survient du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions ou à la suite de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ce congé est d'une durée maximale de huit ans. Le militaire perçoit, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, sa rémunération pendant cinq ans, puis une rémunération réduite de moitié les trois années qui suivent / Dans les autres cas, ce congé est d'une durée maximale de cinq ans et le militaire de carrière perçoit, dans les conditions définies par décret en Conseil d'État, sa rémunération pendant trois ans, puis une rémunération réduite de moitié les deux années qui suivent (...) ". Aux termes de l'article R. 4138-47 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le congé de longue durée pour maladie est la situation du militaire, qui est placé, au terme de ses droits à congé de maladie (...) dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions pour l'une des affections suivantes : (...) 3° Troubles mentaux et du comportement présentant une évolution prolongée et dont le retentissement professionnel ainsi que le traitement sont incompatibles avec le service ". L'article R. 4138-48 du même code dispose que : " Le congé de longue durée pour maladie est attribué, sur demande ou d'office, dans les conditions fixées à l'article L. 4138-12, par décision du ministre de la défense (...) sur le fondement d'un certificat médical établi par un médecin ou un chirurgien des hôpitaux des armées, par périodes de trois à six mois renouvelables ". Enfin, aux termes de l'article R. 4138-49 du même code : " La décision mentionnée à l'article R. 4138-48 précise si l'affection ouvrant droit à congé de longue durée pour maladie est survenue ou non du fait ou à l'occasion de l'exercice des fonctions (...) ". 8. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 9. Il ressort des pièces du dossier que le 24 septembre 2005, Mme A... a été victime d'un grave accident de parachute qui a entraîné un choc hémorragique, une fracture du bassin et du thorax, une fracture de la cheville droite ainsi qu'un traumatisme crânien avec perte de connaissance à la suite duquel elle a été placée en congé de longue maladie. Lors de sa séance du 18 novembre 2008, la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité lui a accordé un taux d'invalidité de 60 % dont 20 % pour " un syndrome subjectif des traumatisés crâniens avec troubles de l'attention et de la concentration, troubles mnésiques importants, troubles du caractère, thymie souvent dépressive avec hyperémotivité, sensations vertigineuses lors de changement de positions ". Elle a ainsi reconnu l'existence de troubles dépressifs en lien avec l'accident survenu en 2005. En 2011, la requérante est victime d'un accident de voiture qui selon une fiche de constatation initiale extraite de son livret médical du 19 juin 2013, mentionne qu'elle " déclenche un état dépressif " nécessitant un suivi psychiatrique depuis novembre 2012 avec prise de Séroplex. A la suite de son retour au travail, elle est victime, le 29 janvier 2013, d'une chute dans les escaliers à l'occasion d'un trajet de son travail à son domicile occasionnant une fracture du poignet et la pose de broche. Elle s'est vu attribuer un congé de longue durée pour maladie du 16 juillet 2013 au 15 juillet 2017. Par ailleurs, le médecin principal des armées relève, le 22 novembre 2016 : " Patiente ayant eu un accident de parachutisme avec multiples blessures. Une reprise du travail avait été effectuée mais avait pu difficilement être maintenue dans le temps du fait d'épisodes dépressifs récurrents nécessitant une prise en charge spécialisée plus rapprochée ". Le même médecin mentionne que : " il persiste une grave labilité émotionnelle avec des périodes d'effondrement dépressif. On perçoit un débordement émotionnel intense ". Ce certificat médical tend à confirmer que des troubles dépressifs présents depuis le premier accident de service survenu en 2005 ont fragilisé la reprise du travail de la requérante le 23 janvier 2010. Un autre médecin militaire, le Dr C... estimait, en novembre 2014, qu'il s'agit d'une " patiente âgée de 39 ans placée en congé de longue durée depuis un an et demi en raison d'un trouble de l'humeur d'évolution prolongée. Celui-ci s'organise autour du vécu douloureux et invalidant de divers accidents depuis 2005 et au retentissement somatique et psychologique toujours important ". Mme A... produit également un certificat médical établi le 18 avril 2022 par son médecin psychiatre, qui certifie l'avoir reçu régulièrement en consultation de septembre 2006 à octobre 2012 pour des troubles anxiodépressifs, associés à un accident de parachute. Dans ces conditions, Mme A... est fondée à soutenir que son état dépressif présente un lien direct avec son accident de service survenu le 24 septembre 2005. En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 septembre 2020 relative à la radiation des cadres : 10. Aux termes de l'article L. 4139-14 du code de la défense : " La cessation de l'état militaire intervient d'office dans les cas suivants : / (...) 4° Pour réforme définitive, après avis d'une commission de réforme dont les modalités d'organisation et de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'État ; (...) " et aux termes de l'article R. 4138-56 du même code : " Le militaire ayant bénéficié de la totalité de ses droits à congés de longue durée pour maladie est, s'il demeure dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, radié des cadres ou rayé des contrôles pour réforme définitive après avis de la commission mentionnée au 4o de l'article L. 4139-14 ". 11. Il ressort des pièces du dossier que pour prendre la décision en litige, la ministre des armées s'est fondée sur l'avis du comité supérieur médical du 18 juin 2018 concluant à l'absence de lien entre le service et l'affection de Mme A... et, et sur le fait que cette dernière avait dès lors épuisé ses droits au placement en congé de longue durée pour maladie. Toutefois, compte tenu de ce qui a été dit aux points 8 et 9 concernant le lien au service des troubles dépressifs de la requérante, cette décision est entachée d'une erreur de droit. 12. Il résulte de tout ce qui précède sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête et d'ordonner une expertise dès lors qu'elle ne revêtirait pas de caractère utile, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ces demandes tendant à l'annulation des décisions des 3 avril 2018, 14 octobre 2019 et 14 septembre 2020. Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte : 13. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ". 14. Le motif d'annulation des décisions contestées implique nécessairement, par application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre des armées, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte. Sur les frais liés au litige : 15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 septembre 2022 et les décisions des 3 avril 2018, 14 octobre 2019 et 14 septembre 2020 sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au ministre des armées de prendre un arrêté reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de Mme A... et d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative, dans la mesure rendue nécessaire par l'attribution rétroactive de ses congés pour maladie imputable au service, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 26 janvier 2024, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - Mme Marchessaux, première conseillère, - Mme Poullain, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 février 2024. 2 2 N° 22MA02830 bb
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 23BX02137, Inédit au recueil Lebon
Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 novembre 2019 par lequel le maire de Libourne a refusé de reconnaître imputables à l'accident de service du 4 décembre 2018 les arrêts de travail et soins à compter du 20 mars 2019. Par un jugement n° 1906239 du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné, avant-dire-droit, une expertise, puis par un jugement 12 octobre 2022, il a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et a enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. Mme C... A... a également demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le maire de Libourne l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022. Par un jugement n° 2106201 du 7 juin 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Procédures devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 décembre 2022 et le 18 décembre 2023, sous le n° 22BX03035, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 octobre 2022 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation, et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 à 12 heures par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai et 13 novembre 2023 sous le n° 23BX01254, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1906239 du 12 octobre 2022 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 22BX03035. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 28 juillet et le 18 décembre 2023 sous le n° 23BX02136, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2023 sous le n° 23BX02137, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 23BX02136. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 9 janvier 2017 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public ; - et les observations de Me Bach, pour la commune de Libourne. Vu les notes en délibéré, enregistrées le 9 janvier 2024, présentées pour la commune de Libourne dans les quatre instances. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... A..., adjointe technique territoriale, exerce ses fonctions dans le service de la propreté urbaine de la commune de Libourne. Le 4 décembre 2018, elle a été victime pendant son travail d'un traumatisme à l'épaule droite qui a été considéré comme imputable au service par un arrêté du maire de Libourne du 31 décembre 2018. Le 5 mars 2019, elle a repris ses fonctions. Le 20 mars 2019, elle a présenté un certificat médical de rechute de son accident de service. Suivant l'avis défavorable émis par la commission de réforme, réunie le 16 octobre 2019, le maire de Libourne a refusé de reconnaître les arrêts et soins à compter du 20 mars 2019 imputables au service et l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter de cette date, par un arrêté du 7 novembre 2019. Si Mme A... a repris ponctuellement le travail, elle a notamment été placé en congé de maladie ordinaire du fait de sa pathologie à l'épaule droite du 14 septembre 2020 au 13 septembre 2021. Après avis du comité médical départemental en date du 6 octobre 2021, elle a été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022, par un arrêté du maire de Libourne en date du 14 octobre 2021. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation des arrêtés des 7 novembre 2019 et 14 octobre 2021. Par jugement avant-dire droit en date du 20 octobre 2021, le tribunal a ordonné une expertise. Le rapport d'expertise a été déposé au greffe le 15 avril 2022 et complété le 10 juillet 2022. Par un jugement du 12 octobre 2022, le tribunal a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. La commune de Libourne relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n° 22BX03035, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution par la requête enregistrée sous le n° 23BX01254. Par un jugement du 7 juin 2023, le tribunal a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Mme A... relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n°23BX02136, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution, par la requête enregistrée sous le n° 23BX02137. 2. Les affaires enregistrées sous les numéros 22BX03035, 23BX01254, 23BX02136, et 23BX02137 concernent la situation d'un même agent et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. 3. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Ces dispositions ne sont ainsi entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, et que la commune de Libourne ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, fonder le refus d'imputabilité à l'accident de service survenu antérieurement à cette date sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. 4. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. 5. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de l'accident de service : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. 6. Il ressort des pièces du dossier que, le 4 décembre 2018, alors qu'elle descendait du toit d'un véhicule de nettoyage en prenant appui sur l'une de ses portières, Mme A... a chuté lorsque celle-ci s'est ouverte, ce qui lui a occasionné un traumatisme de l'épaule droite caractérisé par un phénomène de " traction contre résistance ". Même si aucune lésion organique n'a été révélée par l'échographie puis l'IRM passés les 23 janvier et 4 mars 2019 et qu'aucune indication chirurgicale n'a été alors posée, les douleurs provoquées ont justifié la prescription de quinze séances de rééducation et plus de deux mois d'arrêts de travail, son médecin traitant ayant retenu le 4 mars 2019 " une guérison apparente avec possibilité de rechute ultérieure ". Mme A... a repris son activité le 5 mars 2019 mais a présenté un certificat médical de rechute de son accident du travail à compter du 20 mars 2019 pour une récidive des douleurs. Si le diagnostic d'entorse acromio-claviculaire posé par ce certificat n'a pas été confirmé par les examens postérieurs et est réfuté par l'expert désigné par le tribunal, il est constant que Mme A..., lors de la reprise de ses fonctions, a été affectée sur un poste consistant à vider les poubelles et collecter les encombrants, et sollicitant ainsi son épaule alors que le médecin du travail, lors de la visite de reprise en date du 13 mars 2019, avait interdit le port de charges supérieures à 5 kg et les manutentions répétées. L'expert, qui a conclu à l'absence d'éléments médicaux permettant de rattacher le nouvel arrêt de travail à l'accident de service, au motif de l'absence de lésion organique et de séquelle identifiée, affirme néanmoins, dans son complément d'expertise du 10 juillet 2022 comme " probable qu'une activité manuelle relativement physique soit à l'origine d'une majoration de [sa] plainte algique ". En outre, devant la persistance des douleurs, Mme A... sera finalement opérée le 12 août 2021 d'une bursectomie sous-acromiale, une acromioplastie et une ténotomie du biceps. Enfin, il n'est fait état d'aucun autre état antérieur expliquant que l'intéressée, âgée seulement de 29 ans lors de son accident, souffre, à compter du 20 mars 2019, de la même symptomatologie algique que celle ayant suivi son traumatisme de l'épaule, reconnue imputable au service. Dans ces conditions, les arrêts et soins postérieurs au 20 mars 2019 doivent être regardés présentent un lien direct avec l'accident de service initial du 4 décembre 2018. 7. La commune de Libourne ne peut se prévaloir utilement des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui, ainsi qu'il a été dit, ne sont pas applicables ratione temporis au présent litige. 8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019, puis, par voie de conséquence, l'arrêté du 14 octobre 2021 par son jugement du 7 juin 2023. Sur les dépens de première instance : 9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a mis à sa charge, conformément aux dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 845 euros par une ordonnance de la présidente du tribunal du 25 avril 2022. Sur les conclusions aux fins de sursis : 10. Le présent arrêt statuant sur les appels de la commune de Libourne dirigés contre les jugements n° 1906239 du 12 octobre 2022 et n° 2106201 du 7 juin 2023 du tribunal administratif de Bordeaux, les conclusions des requêtes n° 23BX01254 et n° 23BX02137 tendant ce qu'il soit sursis à leur exécution ont perdu leur objet. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ces conclusions. Sur les frais de l'instance : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Libourne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Libourne une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n°23BX01254 et n° 23BX02137. Article 2 : Les requêtes n°s 22BX03035 et 23BX02136 de la commune de Libourne sont rejetées. Article 3 : La commune de Libourne versera à Mme A... une somme globale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Libourne et à Mme C... A.... Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président assesseur, M. Julien Dufour, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. Le rapporteur, Julien B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°22BX03035-23BX01254-23BX02136-23BX02137 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 08/02/2024, 23BX02136, Inédit au recueil Lebon
Vu les procédures suivantes : Procédures contentieuses antérieures : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 novembre 2019 par lequel le maire de Libourne a refusé de reconnaître imputables à l'accident de service du 4 décembre 2018 les arrêts de travail et soins à compter du 20 mars 2019. Par un jugement n° 1906239 du 20 octobre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a ordonné, avant-dire-droit, une expertise, puis par un jugement 12 octobre 2022, il a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et a enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. Mme C... A... a également demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le maire de Libourne l'a placée en disponibilité d'office pour raison de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022. Par un jugement n° 2106201 du 7 juin 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Procédures devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 décembre 2022 et le 18 décembre 2023, sous le n° 22BX03035, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 12 octobre 2022 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation, et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 à 12 heures par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai et 13 novembre 2023 sous le n° 23BX01254, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1906239 du 12 octobre 2022 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 22BX03035. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 28 juillet et le 18 décembre 2023 sous le n° 23BX02136, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de rejeter la demande de première instance ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens, en ce compris les frais d'expertise. Elle soutient que : - l'accident du 5 octobre 2018 n'a eu aucune séquelle sur l'agent, qui était guérie, au 5 mars 2019 et a repris une activité normale du 5 au 20 mars 2019 ; - la guérison doit être distinguée de la simple consolidation et aucune des conditions posées par la jurisprudence pour caractériser une rechute n'est remplie ; - Mme A... n'a pas davantage été victime d'un second accident de service, qu'elle n'a pas déclaré et ne souffre d'aucune entorse acromio-claviculaire et conflit sous-acromial, ni d'aucune autre lésion ; - aucun lien d'imputabilité direct et certain n'est établi entre l'accident de service et la pathologie ; - Mme A... n'a jamais déclaré de maladie imputable au service ; une entorse ne peut être qualifiée de maladie, pas plus que des douleurs ; - la condition d'invalidité prévue au IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, applicable en l'espèce, n'est pas respectée. Par un mémoire en défense, enregistré le 11 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les moyens tirés de l'absence de rechute et de maladie professionnelle sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par la commune de Libourne ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2023 par une ordonnance du 13 novembre 2023. Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2023 sous le n° 23BX02137, la commune de Libourne, représentée par Me Bach, demande à la Cour : 1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2106201 du 7 juin 2023 ; 2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle reprend les mêmes moyens que dans l'instance enregistrée sous le n° 23BX02136. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2023, Mme C... A..., représentée par Me Baulimon, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Libourne le versement d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La clôture de l'instruction a été fixée au 13 novembre 2023 par une ordonnance du 10 octobre 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 9 janvier 2017 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Au cours de l'audience publique, ont été entendus : - le rapport de M. B..., - et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public ; - et les observations de Me Bach, pour la commune de Libourne. Vu les notes en délibéré, enregistrées le 9 janvier 2024, présentées pour la commune de Libourne dans les quatre instances. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... A..., adjointe technique territoriale, exerce ses fonctions dans le service de la propreté urbaine de la commune de Libourne. Le 4 décembre 2018, elle a été victime pendant son travail d'un traumatisme à l'épaule droite qui a été considéré comme imputable au service par un arrêté du maire de Libourne du 31 décembre 2018. Le 5 mars 2019, elle a repris ses fonctions. Le 20 mars 2019, elle a présenté un certificat médical de rechute de son accident de service. Suivant l'avis défavorable émis par la commission de réforme, réunie le 16 octobre 2019, le maire de Libourne a refusé de reconnaître les arrêts et soins à compter du 20 mars 2019 imputables au service et l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter de cette date, par un arrêté du 7 novembre 2019. Si Mme A... a repris ponctuellement le travail, elle a notamment été placé en congé de maladie ordinaire du fait de sa pathologie à l'épaule droite du 14 septembre 2020 au 13 septembre 2021. Après avis du comité médical départemental en date du 6 octobre 2021, elle a été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022, par un arrêté du maire de Libourne en date du 14 octobre 2021. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation des arrêtés des 7 novembre 2019 et 14 octobre 2021. Par jugement avant-dire droit en date du 20 octobre 2021, le tribunal a ordonné une expertise. Le rapport d'expertise a été déposé au greffe le 15 avril 2022 et complété le 10 juillet 2022. Par un jugement du 12 octobre 2022, le tribunal a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019 et enjoint à la commune de Libourne de procéder à la reconnaissance de l'imputabilité au service des arrêts de travail de Mme A... à compter du 20 mars 2019 et à la reconstitution de sa carrière. La commune de Libourne relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n° 22BX03035, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution par la requête enregistrée sous le n° 23BX01254. Par un jugement du 7 juin 2023, le tribunal a annulé l'arrêté du 14 octobre 2021 et a enjoint à la commune de Libourne de placer Mme A... en congé imputable au service pour la période du 14 septembre 2021 au 13 mars 2022 et de procéder à la reconstitution de sa carrière, en la rétablissant dans ses droits à pension et dans ses droits sociaux. Mme A... relève appel de ce jugement par la requête enregistrée sous le n°23BX02136, et demande que soit ordonné le sursis à son exécution, par la requête enregistrée sous le n° 23BX02137. 2. Les affaires enregistrées sous les numéros 22BX03035, 23BX01254, 23BX02136, et 23BX02137 concernent la situation d'un même agent et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. 3. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Ces dispositions ne sont ainsi entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, et que la commune de Libourne ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, fonder le refus d'imputabilité à l'accident de service survenu antérieurement à cette date sur l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. 4. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. 5. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de l'accident de service : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. 6. Il ressort des pièces du dossier que, le 4 décembre 2018, alors qu'elle descendait du toit d'un véhicule de nettoyage en prenant appui sur l'une de ses portières, Mme A... a chuté lorsque celle-ci s'est ouverte, ce qui lui a occasionné un traumatisme de l'épaule droite caractérisé par un phénomène de " traction contre résistance ". Même si aucune lésion organique n'a été révélée par l'échographie puis l'IRM passés les 23 janvier et 4 mars 2019 et qu'aucune indication chirurgicale n'a été alors posée, les douleurs provoquées ont justifié la prescription de quinze séances de rééducation et plus de deux mois d'arrêts de travail, son médecin traitant ayant retenu le 4 mars 2019 " une guérison apparente avec possibilité de rechute ultérieure ". Mme A... a repris son activité le 5 mars 2019 mais a présenté un certificat médical de rechute de son accident du travail à compter du 20 mars 2019 pour une récidive des douleurs. Si le diagnostic d'entorse acromio-claviculaire posé par ce certificat n'a pas été confirmé par les examens postérieurs et est réfuté par l'expert désigné par le tribunal, il est constant que Mme A..., lors de la reprise de ses fonctions, a été affectée sur un poste consistant à vider les poubelles et collecter les encombrants, et sollicitant ainsi son épaule alors que le médecin du travail, lors de la visite de reprise en date du 13 mars 2019, avait interdit le port de charges supérieures à 5 kg et les manutentions répétées. L'expert, qui a conclu à l'absence d'éléments médicaux permettant de rattacher le nouvel arrêt de travail à l'accident de service, au motif de l'absence de lésion organique et de séquelle identifiée, affirme néanmoins, dans son complément d'expertise du 10 juillet 2022 comme " probable qu'une activité manuelle relativement physique soit à l'origine d'une majoration de [sa] plainte algique ". En outre, devant la persistance des douleurs, Mme A... sera finalement opérée le 12 août 2021 d'une bursectomie sous-acromiale, une acromioplastie et une ténotomie du biceps. Enfin, il n'est fait état d'aucun autre état antérieur expliquant que l'intéressée, âgée seulement de 29 ans lors de son accident, souffre, à compter du 20 mars 2019, de la même symptomatologie algique que celle ayant suivi son traumatisme de l'épaule, reconnue imputable au service. Dans ces conditions, les arrêts et soins postérieurs au 20 mars 2019 doivent être regardés présentent un lien direct avec l'accident de service initial du 4 décembre 2018. 7. La commune de Libourne ne peut se prévaloir utilement des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui, ainsi qu'il a été dit, ne sont pas applicables ratione temporis au présent litige. 8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par son jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019, puis, par voie de conséquence, l'arrêté du 14 octobre 2021 par son jugement du 7 juin 2023. Sur les dépens de première instance : 9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Libourne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a mis à sa charge, conformément aux dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 845 euros par une ordonnance de la présidente du tribunal du 25 avril 2022. Sur les conclusions aux fins de sursis : 10. Le présent arrêt statuant sur les appels de la commune de Libourne dirigés contre les jugements n° 1906239 du 12 octobre 2022 et n° 2106201 du 7 juin 2023 du tribunal administratif de Bordeaux, les conclusions des requêtes n° 23BX01254 et n° 23BX02137 tendant ce qu'il soit sursis à leur exécution ont perdu leur objet. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur ces conclusions. Sur les frais de l'instance : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Libourne demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Libourne une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n°23BX01254 et n° 23BX02137. Article 2 : Les requêtes n°s 22BX03035 et 23BX02136 de la commune de Libourne sont rejetées. Article 3 : La commune de Libourne versera à Mme A... une somme globale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Libourne et à Mme C... A.... Délibéré après l'audience du 8 janvier 2024 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président assesseur, M. Julien Dufour, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024. Le rapporteur, Julien B... La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°22BX03035-23BX01254-23BX02136-23BX02137 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux