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CAA de NANCY, 4ème chambre, 28/11/2023, 21NC01975, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner l'Etat à lui verser la somme de 600 789 euros en réparation des préjudices qu'elle estime imputables à un accident de service qui serait survenu en août 2001. Par un jugement n° 2000677 du 6 mai 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 6 juillet 2021, Mme A... C..., représentée par Me Brey, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 600 789 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 31 décembre 2019 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le syndrome de stress post-traumatique dont elle souffre, qui résulte d'une agression commise sur son lieu de travail en août 2001, est imputable au service et lui ouvre droit à indemnisation ; c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'action indemnitaire était conditionnée à une reconnaissance préalable par l'administration de l'imputabilité au service de l'accident ou de la maladie contractée en service, le jugement est entaché d'erreurs de droit et d'appréciation ; - son préjudice s'élève à la somme totale de 600 789 euros ; l'incapacité permanente partielle s'élevant à 30 %, elle a droit à 70 000 euros à ce titre ; l'incapacité temporaire de travail, d'une durée de 161 mois, doit être indemnisée à hauteur de 80 500 euros ; elle a droit à 400 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ; son préjudice financier, tenant aux difficultés rencontrées en raison de son placement à demi-traitement puis en disponibilité d'office, ayant occasionné d'importants frais bancaires et une augmentation des intérêts de ses prêts, s'établit à 30 000 euros ; le pretium doloris, évalué à 3,5 sur une échelle de 7, et le préjudice moral justifient l'octroi de 8 000 euros ; elle a droit à 5 000 euros au titre du préjudice d'agrément, ainsi qu'à 5 000 euros au titre du préjudice sexuel ; elle doit être indemnisée des frais liés à l'expertise à hauteur de 1 020 euros, correspondant à l'assistance par un médecin conseil, et de 269 euros pour les frais de transport ; les frais d'avocat exposés en amont de la procédure contentieuse s'établissent à 1 000 euros. Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - à titre principal, les conclusions indemnitaires sont irrecevables, en l'absence de réclamation préalable effectivement présentée ; - à titre subsidiaire, la requête n'est pas fondée ; la cour n'a pas annulé une décision refusant de reconnaître l'imputabilité de la pathologie au service, alors que le tribunal a rejeté la demande de la requérante contestant l'admission à la retraite de l'intéressée pour invalidité non imputable au service, par deux décisions devenus définitives ; la requérante ne saurait donc être indemnisée des conséquences d'une pathologie qui n'est pas imputable au service ; il s'en rapporte pour le surplus aux écritures de première instance. Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 26 septembre 2023. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Samson-Dye, - les conclusions de M. Michel, rapporteur public, - et les observations de Me Brey, pour Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., qui était agent des services techniques de deuxième classe du cadre national des préfectures, fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 600 789 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'accident dont elle dit avoir été victime en août 2001, en service, et de la pathologie qu'il aurait occasionnée. 2. Mme C... sollicite l'indemnisation de son préjudice sur le fondement de la responsabilité sans faute, en se prévalant des principes dégagés par la décision du Conseil d'Etat du 4 juillet 2003, Mme B..., n° 211106. Toutefois, l'application des principes résultant de cette décision nécessite que l'agent qui s'en prévaut ait été préalablement reconnu victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle. Or, il est constant que ni l'accident ni la pathologie de la requérante n'ont été reconnus imputables au service par l'Etat et que les recours contentieux dirigés contre les refus de reconnaissance d'imputabilité au service ont été rejetés. Dans ces conditions, la requérante ne saurait rechercher la responsabilité sans faute de l'Etat en se prévalant d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle, ainsi que l'ont retenu à juste titre les premiers juges. 3. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée dans toutes ses conclusions, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre à la demande de première instance. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à Me Brey et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Ghisu-Deparis, présidente, - Mme Samson-Dye, présidente-assesseure, - Mme Roussaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023 La rapporteure, Signé : A. Samson-Dye La présidente, Signé : V. Ghisu-Deparis La greffière, Signé : N. Basso La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, N. Basso 2 N° 21NC01975
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 07/11/2023, 22DA01186, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens : Sous le n° 2100009, d'une part, d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2020 par lequel le président de la communauté de communes Thelloise a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie, d'autre part, d'enjoindre au président de la communauté de communes Thelloise de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et de prendre en charge les soins qui lui sont liés dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et enfin de mettre à la charge de la communauté de communes Thelloise une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sous le n° 2100962, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 février 2021 du président de la communauté de communes Thelloise en ce qu'il lui refuse la prolongation de son congé de longue maladie du 1er mars 2021 au 30 avril 2021, d'autre part, d'enjoindre au président de la communauté de communes Thelloise de la placer en congé de longue maladie pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020 dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans le même délai et enfin de mettre à la charge de la communauté de communes Thelloise une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sous le n° 2101795, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 mars 2021 par lequel le président de la communauté de communes Thelloise l'a radiée des cadres pour abandon de poste à compter du 15 mars 2021 ainsi que l'arrêté du 19 mars 2021 par lequel ce président a décidé une retenue sur son traitement pour la période du 1er mars au 15 mars 2021, d'autre part, d'enjoindre au président de la communauté de communes Thelloise de la placer dans une position régulière à compter du 1er mars 2021, de lui verser ses arriérés de rémunération et de reconstituer sa carrière et ses droits sociaux. En outre, Mme B... a demandé que soit mise à la charge de la communauté de communes Thelloise une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2100009, 2100962 et 2101795 du 6 avril 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté l'ensemble de ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires enregistrés le 7 juin 2022, le 20 février 2023 et le 29 mars 2023, Mme B..., représentée par Me Delarue, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler les décisions attaquées ; 3°) d'enjoindre à la communauté de communes Thelloise de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et de prendre en charge les soins qui lui sont liés dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) d'enjoindre à la communauté de communes Thelloise de la placer en congé de longue maladie pour une durée de six mois dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans le même délai ; 5°) d'enjoindre à la communauté de communes Thelloise de la placer dans une position régulière à compter du 1er mars 2021, de lui verser ses arriérés de rémunération et de reconstituer sa carrière et ses droits sociaux ; 6°) de mettre à la charge de la communauté de communes Thelloise une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier ; ses visas mentionnent une note en délibéré enregistrée le 25 mars 2022 dans la requête n° 2100962 alors qu'elle n'a adressé aucune note en délibéré ; - l'arrêté du 2 novembre 2020 refusant de reconnaître l'imputabilité de sa maladie au service a été pris sans qu'un rapport du médecin de prévention soit adressé à la commission de réforme ; l'omission de cette formalité imposée par l'article 37-7 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 l'a privée d'une garantie et vicie la procédure de consultation de la commission de réforme ; l'existence du rapport du médecin de prévention ne peut être établie par l'attestation du président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Oise ; il n'est pas davantage établi que le médecin de prévention aurait été informé de la réunion de la commission de réforme et de son objet ; - il n'est pas démontré que les documents médicaux fondant sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie ont été effectivement communiqués à la commission de réforme ; cette omission, constitutive d'une méconnaissance de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, l'a privée d'une garantie ; - l'avis rendu par la commission de réforme est également irrégulier dès lors qu'il n'est pas établi que le mandat de son président ait été régulièrement prolongé ; les dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 ont donc été méconnues ; - en l'absence de motivation, notamment en ce qui concerne le lien de causalité entre les fonctions exercées et la maladie, l'avis défavorable rendu par la commission de réforme méconnaît l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004 ainsi que l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation en ce qui concerne le lien entre sa maladie et le service et méconnaît l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - l'arrêté du 19 février 2021 refusant de prolonger son congé de longue maladie pour la période comprise entre le 1er mars et le 30 avril 2021 est intervenu au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le médecin de prévention n'a pas remis son rapport au comité médical en méconnaissance des articles 9, 24 et 33 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; ce rapport est requis, même lorsque le comité médical est saisi d'une demande d'avis sur la prolongation du congé de longue maladie ; en outre, ce rapport était obligatoire dès lors que le comité médical devait également se prononcer sur son aptitude à reprendre ses fonctions ; en l'absence d'un tel rapport, elle a été privée d'une garantie ; - il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le comité médical s'est prononcé au regard de l'avis du comité médical supérieur du 1er décembre 2020 rendu sur la demande de congé de longue durée ; - il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le comité médical n'avait pas été saisi d'une demande d'avis sur son aptitude à reprendre son poste ; - l'irrégularité de la procédure découle également de ce que le comité médical s'est prononcé sur son aptitude à reprendre son poste sans avoir procédé aux examens prévus par les articles 12 et 13 de l'arrêté ministériel du 3 octobre 1977 relatif aux examens médicaux effectués en vue du dépistage chez les candidats aux emplois publics des affections ouvrant droit au congé de longue maladie et de l'octroi aux fonctionnaires des congés de longue maladie ; - cet arrêté a aussi été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il se prononce implicitement sur la capacité de Mme B... à reprendre son poste sans qu'un médecin spécialiste agréé ne se soit prononcé sur son aptitude à la reprise ; - il est entaché d'une erreur de droit, la communauté de communes Thelloise s'étant crue liée par l'avis du comité médical ; - sa maladie rendant nécessaire un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée, la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du 3° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ; - l'arrêté du 18 mars 2021 portant radiation des cadres pour abandon de poste est intervenu selon une procédure irrégulière dès lors que le temps imparti par la mise en demeure pour rejoindre son poste était insuffisant ; - son état de santé justifiait qu'elle soit convoquée à une visite de reprise avec le médecin de prévention ; l'absence d'une telle visite fait obstacle à ce qu'elle puisse être regardée en situation d'abandon de poste ; - en sollicitant une visite médicale de reprise, elle a manifesté sa volonté de ne pas rompre le lien avec le service ; - à défaut d'être affectée sur un emploi précis à la date du 15 mars 2021, elle ne peut être considérée comme ayant abandonné son poste ; - l'arrêté du 18 mars 2021 portant radiation des cadres pour abandon de poste et l'arrêté du 19 mars 2021 opérant une retenue sur son traitement doivent être annulés en conséquence de l'illégalité de la décision 19 février 2021 refusant de prolonger son congé de longue maladie. Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 janvier et 14 mars 2023, la communauté de communes Thelloise, représentée par Me Creveaux, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement est régulier ; - les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 30 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 17 avril 2023 à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - l'arrêté du 3 octobre 1977 relatif aux examens médicaux effectués en vue du dépistage chez les candidats aux emplois publics des affections ouvrant droit au congé de longue maladie et de l'octroi aux fonctionnaires des congés de longue maladie ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, - les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de Me Creveaux pour la communauté de communes Thélloise. Considérant ce qui suit : 1. Depuis le 1er janvier 2016, Mme A... B..., rédactrice territoriale, exerçait en qualité d'instructrice droit des sols, au sein du service de l'urbanisme de la communauté de communes Thelloise. Elle a été placée en congé de longue maladie à partir du 1er août 2018. Le 12 février 2020, Mme B... a demandé la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie. La commission de réforme a rendu un avis défavorable à cette demande le 18 juin 2020 et le président de la communauté de communes Thelloise a rejeté la demande de l'intéressée, par un arrêté du 25 juin 2020. Toutefois, il a retiré cet arrêté le 21 octobre 2020 qui faisait l'objet d'une contestation auprès du tribunal administratif d'Amiens de la part de Mme B..., cette dernière invoquant une irrégularité lors du recueil de l'avis de la commission de réforme. A nouveau saisie, la commission de réforme a rendu un nouvel avis défavorable le 24 septembre 2020. Par un arrêté du 2 novembre 2020, le président de la communauté de communes Thelloise a alors de nouveau rejeté la demande de l'intéressée. Mme B... a demandé l'annulation de cette décision au tribunal administratif d'Amiens aux termes d'une requête enregistrée sous le n° 2100009. 2. Par la suite, consulté le 18 février 2021, le comité médical départemental s'est prononcé en faveur de la prolongation du congé de longue maladie de Mme B... du 1er novembre 2020 au 18 février 2021 et de son aptitude à exercer ses fonctions à cette dernière date. Par un arrêté du 19 février 2021, le président de la communauté de communes Thelloise a prolongé son congé de longue maladie du 1er novembre 2020 au 28 février 2021. Par une deuxième requête enregistrée sous le n° 2100962, Mme B... en a demandé l'annulation au tribunal administratif d'Amiens, en tant que cet arrêté lui refuse la prolongation de ce congé du 1er mars 2021 au 30 avril 2021. 3. Enfin, au vu de l'avis précité du comité médical départemental, par un courrier du 19 février 2021, le président de la communauté de communes Thelloise a décidé que Mme B... était apte à reprendre son service à compter du 1er mars 2021. Mme B... n'ayant cependant pas rejoint son service à cette date, la collectivité lui a adressé un courrier daté du 5 mars 2021 la mettant en demeure de reprendre ses fonctions le 15 mars 2021 à 8 heures 30. L'intéressée ne s'est pas présentée aux jour et heure précités de sorte que par un arrêté du 18 mars 2021, le président de la communauté de communes Thelloise a radié Mme B... des cadres pour abandon de poste. Le lendemain, par un arrêté du 19 mars 2021, cette même autorité a décidé d'opérer une retenue sur le traitement de Mme B... pour la période courant du 1er au 15 mars 2021. Par une troisième requête, enregistrée sous le n° 2101795, Mme B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation de ces deux arrêtés. 4. Le tribunal administratif d'Amiens, qui a joint les trois requêtes, a rejeté l'ensemble de ses demandes par un jugement du 6 avril 2022. Mme B... relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 5. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique [...] Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. ". 6. Eu égard à l'objet de l'obligation ainsi prescrite, qui est de permettre à l'auteur de la note en délibéré de s'assurer que la formation de jugement en a pris connaissance, la circonstance qu'une note en délibéré n'a pas été mentionnée dans la décision, en méconnaissance de cette obligation, ne peut être utilement invoquée pour contester cette décision que par la partie qui a produit cette note. 7. Il ressort des visas du jugement la mention d'une note en délibéré enregistrée le 25 mars 2022 dans la requête n° 2100962 présentée par Mme B.... Il est constant que l'auteur de cette note est la communauté de communes Thelloise. L'attribution erronée de cette note à Mme B... constitue une simple erreur matérielle sans influence sur la régularité du jugement. En tout état de cause, compte tenu du principe précédemment rappelé, Mme B..., qui n'est pas l'auteure véritable de la note en délibéré, ne peut utilement invoquer ce moyen de régularité. Sur le bien-fondé du jugement : Sur les conclusions d'annulation de la décision du 2 novembre 2020 refusant de reconnaître l'imputabilité de la maladie au service : 8. En premier lieu, aux termes de l'article 16 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, applicable à la situation de Mme B... : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2e alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné. ". 9. Si Mme B... soutient qu'aucun rapport écrit n'a été établi par le médecin de prévention en vue de l'examen de sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie, cette affirmation est contredite par le courrier que le président du centre de gestion (CDG) de la fonction publique territoriale de l'Oise a adressé au président de la communauté de communes Thelloise le 22 mars 2021. Il ressort de ce courrier, la confirmation, par le président du CDG, d'une part, que le dossier soumis à la commission de réforme contenait un rapport du médecin de prévention, en date du 18 mai 2020, établi lors d'une visite médicale à laquelle s'était présentée Mme B..., transmis sous pli confidentiel à la commission, et d'autre part, que l'agent concerné venu consulter son dossier à trois reprises les 10 juin, 6 août et 21 septembre 2020 s'était vu remettre une copie intégrale de son dossier contenant ce rapport. Dans ces conditions, ce courrier suffisamment précis et circonstancié, émanant d'une autorité qui n'est pas liée à la collectivité d'emploi de l'agent, doit être regardé comme de nature à établir l'existence du rapport du médecin de prévention, au demeurant soumis au secret médical. Mme B..., n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie que constitue la transmission, à la commission de réforme, du rapport écrit d'un médecin du service de médecine préventive. 10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. / Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. / Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". 11. Il ressort des observations consignées dans le courrier cité au point 9, que le dossier dont avait été initialement saisie la commission de réforme devant siéger le 18 juin 2020, comportait les documents remis par Mme B... sous pli confidentiel, mais que les membres de la commission avaient omis d'en prendre connaissance. Pour ce motif, l'examen de la situation de Mme B... a été renvoyé à une séance programmée le 24 septembre 2020. S'il apparaît, dans le procès-verbal de cette seconde séance, la mention selon laquelle l'agent n'a remis aucun document, cette indication ne permet pas d'affirmer, comme le fait l'appelante, que l'ensemble des documents qu'elle avait souhaité soumettre initialement à l'appréciation des membres de la commission de réforme n'auraient pas été mis à leur disposition. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la commission de réforme a statué sur la base d'un dossier incomplet. 12. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé : " Le président de la commission de réforme est désigné par le préfet qui peut choisir soit un fonctionnaire placé sous son autorité, soit une personnalité qualifiée qu'il désigne en raison de ses compétences, soit un membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme. Dans ce cas, un président suppléant, n'appartenant pas à la même collectivité, est désigné pour le cas où serait examinée la situation d'un fonctionnaire appartenant à la collectivité dont est issu le président. Le président dirige les délibérations mais ne participe pas au vote. / Cette commission comprend : / 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ; / 2. Deux représentants de l'administration ; / 3. Deux représentants du personnel. (...) ". Aux termes de l'article 8 du même arrêté : " (...) Le mandat au sein de la commission de réforme des représentants des collectivités se termine au terme du mandat de l'élu, quelle qu'en soit la cause. Celui-ci est dès que possible remplacé ou reconduit dans ses attributions. (...) Toutefois, en cas de besoin, notamment en cas d'urgence, le mandat des membres de la commission de réforme peut être prolongé jusqu'à l'installation des nouveaux titulaires. (...) ". 13. Il ressort du courrier déjà cité du 22 mars 2021 du président du centre de gestion de l'Oise, que le président de la commission de réforme doit être regardé comme ayant été désigné par le préfet en qualité de membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme. Il est constant qu'il n'était plus titulaire de son mandat à la date du 24 septembre 2020, au cours de laquelle il a présidé la séance de la commission chargée d'examiner la situation de Mme B.... Contrairement aux affirmations contenues dans ce courrier, sa qualité d'administrateur du CDG ne permet pas de considérer qu'à cette dernière date, il était membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme au sens des dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004, qui ne concernent que les élus des assemblées délibérantes des collectivités territoriales. Toutefois, si, selon le troisième alinéa de l'article 3 précité, le président de la commission de réforme dirige les délibérations sans participer aux votes, cette circonstance ne le prive pas de la qualité de membre de la commission. Dans ces conditions, les dispositions de l'article autorisant, en cas de besoin, notamment en cas d'urgence, la prolongation du mandat des membres de la commission de réforme jusqu'à l'installation des nouveaux titulaires lui sont applicables au même titre que les membres représentant des collectivités. Il s'ensuit que dans l'attente de l'installation des nouveaux titulaires de ces collectivités, le mandat du président de la commission de réforme pouvait être prolongé. A cet égard, le délai écoulé entre le mois de juin 2020 et le 24 septembre suivant ne saurait être regardé comme excessif, compte tenu notamment de la crise sanitaire à laquelle les collectivités et les administrations étaient confrontées. En tout état de cause, à supposer que les dispositions de l'article 8 ne puissent être étendues au mandat du président de la commission de réforme, la prolongation irrégulière de son mandat n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de l'arrêté contesté dès lors qu'il est constant que le président n'a pas voix délibérative et elle ne saurait ainsi être regardée comme ayant, en l'espèce, privé Mme B... d'une garantie, laquelle n'allègue au demeurant pas que le président aurait cherché à influencer les membres de la commission ou aurait fait preuve de partialité ou d'une animosité particulière à son encontre. Par suite, ce moyen doit être écarté. 14. En quatrième lieu, l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé dispose : " Les avis sont émis à la majorité des membres présents. Ils doivent être motivés, dans le respect du secret médical. ". 15. Il ressort du procès-verbal de séance du 24 septembre 2020 de la commission de réforme que cette dernière a estimé, en précisant le motif de sa saisine et le sens défavorable de son avis, que la pathologie " est hors tableau d'une maladie professionnelle avec un taux d'IPP de 20 % au vu des éléments du dossier, taux inférieur à 25 % ", pour en conclure que les conditions du congé d'invalidité temporaire imputable au service n'étant pas remplies, la pathologie ne peut être reconnue imputable au service. Il résulte de ces énonciations, que cet avis satisfait à l'exigence de motivation qui résulte de l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004. 16. En cinquième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 17. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 21 bis aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / (....) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". 18. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc applicables, s'agissant de la fonction publique territoriale, que depuis l'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret dont l'intervention était, au demeurant, prévue par le VI de cet article 21 bis. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, soit le 12 avril 2019. 19. Dès lors que les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la situation de Mme B... dont le syndrome dépressif pour épuisement moral et décompensation a été diagnostiqué le 1er août 2018, conformément à ce que l'intéressée a indiqué dans sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service présentée le 12 février 2020, était exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues avant l'entrée en vigueur des dispositions législatives et réglementaires relatives au nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. 20. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduise à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 21. Pour demander que soit reconnu le lien direct avec l'exercice de ses fonctions du syndrome dépressif qu'elle a déclaré auprès de son employeur le 12 février 2020, Mme B... invoque un contexte professionnel à l'origine de la dégradation de son état de santé ayant débuté à compter du mois de mars 2018, correspondant à sa reprise d'activité, à la suite d'une interruption pour cause de maladie depuis le mois de novembre 2017. 22. Il ressort des expertises médicales versées au dossier, réalisées par deux médecins agréés à la demande de la collectivité ainsi que des certificats établis par des médecins psychiatres assurant la prise en charge et le suivi de Mme B..., que l'intéressée présente, depuis le 1er août 2018, un état anxiodépressif sans état antérieur et sans facteurs prédisposants, pour lequel elle bénéficie d'un suivi régulier par un psychothérapeute, un médecin psychiatre et se rend en consultation dans un hôpital spécialisé dans les pathologies de " souffrance au travail ". Pour conclure à l'origine professionnelle de son affection psychique, ces praticiens se fondent sur le récit fait par Mme B..., des conditions dans lesquelles elle a repris son travail, après son interruption de quatre mois, pour une pathologie intestinale particulièrement invalidante. Selon le médecin agréé, qui l'a examinée le 3 septembre 2019 dans le cadre de sa demande de congé de longue maladie, Mme B... ayant vécu une situation médicale douloureuse et difficile pendant quatre mois attendait un peu de bienveillance de son employeur et d'empathie, mais s'est trouvée confrontée à une remise en cause de sa situation médicale par sa hiérarchie, comportement qualifié " d'agression ". Il ressort des pièces du dossier que Mme B... s'est vu reprocher, au cours des mois de mai et juin 2018, par la responsable du service urbanisme puis par la directrice générale des services, des retards et des absences, notamment à des réunions, qui n'avaient fait l'objet d'aucune information ou demande préalable, qui l'ont contrainte à devoir se justifier notamment par la production de certificats d'arrêts de travail ainsi qu'à régulariser ses absences. Si, dans ce contexte, en particulier lors d'échanges de courriels ou d'entretiens avec la directrice générale des services, Mme B... a pu nourrir le sentiment d'une remise en cause de la réalité de sa pathologie et de la sincérité de ses arrêts de travail, il ne ressort toutefois pas du dossier que la directrice générale des services aurait exigé la production de l'ensemble des feuillets composant les certificats d'arrêt de travail remis. La circonstance que dans ce contexte de suspicion de remise en cause de sa maladie, Mme B... en soit venue, après un entretien ayant eu lieu le 28 juin avec la directrice générale des services, à lui proposer de consulter son dossier médical et à se soumettre à un contrôle médical, ne permet pas d'établir la volonté de la directrice de remettre en cause sa pathologie ou les motifs de ses retards ou absences dès lors que par un courriel du 3 juillet, cette dernière lui a fait connaître que sa situation était régularisée et qu'elle n'entendait pas s'immiscer dans sa vie privée en consultant son dossier médical. Si Mme B... impute également la dégradation de son état de santé à un incident s'étant produit avec un collègue l'ayant raillée sur le ton d'une allusion raciste au sujet de son régime alimentaire au cours d'une pause déjeuner du 4 juin 2018, il ne ressort aucunement qu'elle ait mis cet épisode en exergue dans ses doléances auprès des experts agréés ou de ses médecins traitants. Au demeurant, contrairement à ce qu'elle soutient, il ressort des pièces du dossier que son employeur n'est pas demeuré silencieux à la suite de cet incident dès lors qu'elle a convoqué l'agent pour l'admonester. Enfin, il ressort du témoignage circonstancié de la responsable du service urbanisme, qui n'est pas contesté par Mme B..., que dès son retour le 19 mars 2018, l'intéressée s'est mise en retrait et s'est placée dans une attitude d'isolement et de distanciation avec sa communauté de travail. Par suite, alors même que les médecins psychiatres experts ont estimé établi le lien entre la pathologie anxiodépressive de Mme B... et le service, le contexte professionnel ne permet pas de caractériser des conditions de travail de nature à susciter le développement de cette maladie. 23. Dans ces conditions, le président de la communauté de communes Thelloise n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 en refusant de reconnaître l'imputabilité au service du syndrome anxiodépressif développé par Mme B.... 24. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 2 novembre 2020 par laquelle le président de la communauté de communes Thelloise a refusé de reconnaître l'imputabilité de sa pathologie au service. Sur les conclusions d'annulation de la décision du 19 février 2021 refusant de prolonger le congé de longue maladie du 1er mars au 30 avril 2021 : 25. En premier lieu, aux termes de l'article 9 du décret du 30 juillet 1987 susvisé : " Le médecin du service de médecine préventive prévu à l'article 108-2 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée compétent à l'égard du fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir s'il le demande communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. Il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 24, 33 et 37-7 ci-dessous. / L'intéressé et l'administration peuvent faire entendre le médecin de leur choix par le comité médical. ". En vertu de l'article 24 de ce décret : " Lorsque l'autorité territoriale estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs d'un fonctionnaire, que celui-ci se trouve dans la situation prévue à l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée, elle peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 25 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive attaché à la collectivité ou établissement dont relève le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier. ". En outre, aux termes de l'article 33 du même décret : " Le comité médical, consulté sur l'aptitude d'un fonctionnaire territorial mis en congé de longue maladie ou de longue durée à reprendre l'exercice de ses fonctions, peut formuler des recommandations sur les conditions d'emploi de l'intéressé sans qu'il puisse porter atteinte à sa situation administrative. / Le dossier soumis au comité médical comporte un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive. / Si l'intéressé bénéficie d'un aménagement des conditions de son travail, le comité médical, après avis du service de médecine préventive, est appelé de nouveau, à l'expiration de périodes successives d'une durée comprise entre trois et six mois, à formuler des recommandations auprès de l'autorité territoriale sur l'opportunité du maintien ou de la modification de ces aménagements. / (...) ". Enfin, selon les dispositions de son article 31 : " Le bénéficiaire d'un congé de longue maladie ou de longue durée ne peut reprendre ses fonctions à l'expiration ou au cours dudit congé que s'il est reconnu apte après examen par un spécialiste agréé et avis favorable du comité médical compétent. / Cet examen peut être demandé soit par le fonctionnaire, soit par la collectivité ou l'établissement dont il relève. / Les conditions exigées pour que la réintégration puisse être prononcée sont fixées par l'arrêté prévu à l'article 39 ci-dessous. ". 26. La situation régie par les dispositions de l'article 24 cité ci-dessus, correspond exclusivement au cas où l'administration sollicite le comité médical pour placer d'office l'agent en position de congé de maladie. Dans ces conditions, Mme B..., qui a sollicité la prolongation de son congé de longue maladie, ne peut utilement invoquer leur méconnaissance, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges. 27. En revanche, il résulte de la combinaison des articles 31 et 33 du décret du 30 juillet 1987 que lorsque le comité médical est consulté sur une demande de prolongation du congé de longue maladie, il doit nécessairement se prononcer sur l'aptitude de l'agent à reprendre l'exercice de ses fonctions, ce qui implique alors que le dossier soumis au comité médical comporte un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive. 28. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie. 29. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le médecin chargé de la prévention aurait remis un rapport au comité médical départemental conformément à ce que prévoient les dispositions rappelées au point 25. La décision contestée est ainsi entachée d'un vice de procédure. Toutefois, la communauté de communes a produit un courriel daté du 25 janvier 2021, que la direction des ressources humaines a adressé au médecin de prévention pour l'informer que le dossier de demande de prolongation du congé de longue maladie de Mme B... serait examiné par le comité médical départemental le 18 février 2021, de sorte que, s'il l'estimait utile, il était loisible à ce dernier de présenter des observations écrites dans la perspective de cette séance dont il avait été informé. De plus, le comité médical ayant déjà été saisi de la situation de Mme B... pour l'octroi du congé de maladie initial et son renouvellement, il disposait d'éléments suffisants pour émettre son avis quant à l'aptitude de Mme B... à reprendre ses fonctions, en connaissance de cause. Dans ces circonstances, l'absence de rapport écrit du médecin de prévention n'a pas été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de l'arrêté contesté, qui au demeurant prolonge le congé de longue maladie pour une période de quatre mois et il ne saurait être regardé comme ayant, en l'espèce, privé Mme B... d'une garantie. 30. En deuxième lieu, aux termes de l'article 25 du décret du 30 juillet 1987 susvisé : " Pour bénéficier d'un congé de longue maladie ou de longue durée le fonctionnaire en position d'activité, ou son représentant légal, doit adresser à l'autorité territoriale une demande appuyée d'un certificat de son médecin traitant spécifiant qu'il est susceptible de bénéficier des dispositions de l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée. / Le médecin traitant adresse directement au secrétaire du comité médical compétent un résumé de ses observations et les pièces justificatives qui peuvent être prescrites dans certains cas par l'arrêté visé à l'article 39 du présent décret. / Au vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause. / Le dossier est ensuite soumis au comité médical. Si le médecin agréé qui a procédé à la contre-visite ne siège pas au comité médical, il peut être entendu par celui-ci. / L'avis du comité médical est transmis à l'autorité territoriale qui, en cas de contestation de sa part ou du fonctionnaire intéressé, le soumet pour avis au comité médical supérieur visé à l'article 5 du présent décret. (...) ". 31. Mme B... ne conteste pas que son dossier comportait les pièces requises par l'article 25 cité ci-dessus, mais soutient que son dossier était irrégulièrement composé dans la mesure où le comité médical départemental s'est prononcé au vu d'un avis du comité médical supérieur qui n'avait pas été saisi de son congé de longue maladie. Il ressort des pièces du dossier que dans son avis rendu le 18 février 2021, le comité médical départemental a visé l'avis émis par le comité médical supérieur lors d'une séance du 1er décembre 2020. Il est constant que le comité médical supérieur n'avait été saisi que de l'examen de la demande d'octroi d'un congé de longue durée. Dès lors, la circonstance que son avis ait été visé, n'est susceptible d'avoir exercé aucune influence sur le sens de l'avis rendu par les membres du comité médical. Au surplus, d'une part, il n'est pas contesté que le comité médical supérieur s'était par ailleurs, facultativement, prononcé défavorablement et d'autre part, que la collectivité avait indiqué son souhait de ne pas remettre en cause l'octroi du congé de longue maladie sur la période antérieure. Dans ces conditions, et alors que le comité médical départemental, a rendu un avis favorable unanime à la demande de prolongation du congé de longue maladie pour une durée de quatre mois sur la base des documents médicaux qui lui étaient soumis, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que, pour se prononcer, ce comité se serait fondé sur l'avis du comité médical supérieur, ni qu'il se serait senti lié par celui-ci. 32. En troisième lieu, aux termes de l'article 32 du décret du 30 juillet 1987 : " Si, au vu de l'avis du comité médical compétent et éventuellement de celui du comité médical supérieur, dans le cas où l'autorité territoriale ou l'intéressé jugent utile de le provoquer, le fonctionnaire est reconnu apte à exercer ses fonctions, il reprend celles-ci dans les conditions fixées à l'article 33 ci-dessous. / (...) ". 33. Il résulte de ce qui a été dit au point 29, contrairement à ce que soutient l'appelante, que le comité médical s'est prononcé sur son aptitude à la reprise de ses fonctions. De même, il ressort des dispositions précitées des articles 31 et 32, que si l'avis de l'expert agréé est requis, il n'appartient pour autant qu'au seul comité départemental d'émettre l'avis final sur l'aptitude ou l'inaptitude et celui-ci n'est pas lié par le sens de l'avis rendu par le médecin expert. 34. En quatrième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (...) ". 35. D'abord, ainsi qu'il a été dit au point 31, pour apprécier la demande de prolongation du congé de longue maladie de Mme B..., le comité médical départemental s'est prononcé après avoir pris en considération l'ensemble des pièces médicales à sa disposition et ne s'est pas fondé sur l'avis du comité médical supérieur du 1er décembre 2020. 36. Ensuite, si Mme B... soutient que tous les éléments médicaux convergent pour démontrer que son état de santé ne lui permettait pas de reprendre son poste, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges, ni l'avis rendu par un médecin expert agréé le 3 septembre 2019 sur la prolongation du congé de longue maladie, ni celui du psychiatre agréé daté du 25 mars 2019, ni la circonstance qu'en 2020, elle continuait d'être suivie par un psychiatre et son médecin traitant, ne sont de nature à établir qu'au début de l'année 2021, sa maladie présentait un caractère invalidant et de gravité confirmée. A cet égard, l'avis du médecin expert l'ayant examinée le 2 février 2021, qui se contente d'indiquer un état clinique compatible avec une prolongation du congé de longue maladie d'une durée de six mois, ne comporte aucune appréciation sur le caractère invalidant et de gravité de la pathologie. Dès lors, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation en regard des dispositions du 3° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, que le président de la communauté de communes Thelloise a pu refuser de prolonger le congé de longue maladie de Mme B... au-delà du 1er mars 2021. 37. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 19 février 2021 par laquelle le président de la communauté de communes Thelloise a refusé de prolonger son congé de longue maladie du 1er mars 2021 au 30 avril 2021. Sur les conclusions d'annulation de l'arrêté du 18 mars 2021 prononçant la radiation des cadres pour abandon de poste : 38. Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il court d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé. 39. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B... a été mise en demeure, par un courrier du 5 mars 2021, de rejoindre son poste le 15 mars suivant, à 8 h 30. Il est constant que ce courrier de mise en demeure, dont elle était en mesure d'apprécier la portée, lui a été notifié le 10 mars 2021. Par suite, le délai laissé à Mme B... pour rejoindre son poste était suffisant. 40. En deuxième lieu, l'agent qui se trouve en position de congé de maladie est regardé comme n'ayant pas cessé d'exercer ses fonctions. Par suite, il ne peut en principe faire l'objet d'une mise en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service à la suite de laquelle l'autorité administrative serait susceptible de prononcer son licenciement pour abandon de poste. Il en va toutefois différemment lorsque l'agent, reconnu apte à reprendre ses fonctions par le comité médical départemental, se borne, pour justifier sa non présentation ou l'absence de reprise de son service, à produire un certificat médical prescrivant un nouvel arrêt de travail sans apporter, sur son état de santé, d'éléments nouveaux par rapport aux constatations sur la base desquelles a été rendu l'avis du comité médical. 41. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le courrier du 5 mars 2021 mettant Mme B... en demeure de reprendre ses fonctions le 15 mars 2021, l'informait qu'elle encourait un risque de radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable en cas de non-reprise. Si l'intéressée se prévaut de ce que le comité médical ne se serait pas formellement prononcé sur sa reprise du travail à son poste puisqu'il l'avait estimée apte à " des missions relevant de son cadre d'emplois ", il ressort cependant du même avis que le comité a estimé que le maintien en congé de longue maladie n'était plus justifié à compter du 19 février 2021 de sorte qu'il a nécessairement estimé qu'elle pouvait réintégrer les fonctions qu'elle occupait auparavant au sein de la collectivité. Si, dans son avis, le comité a par ailleurs, préconisé une visite médicale de reprise avec le médecin de prévention, cette recommandation ne saurait être regardée comme suggérant une affectation sur un autre emploi ou sur un poste aménagé, qu'au demeurant l'intéressée n'a pas sollicité. De même, si le comité médical a indiqué que l'agent devait bénéficier d'une visite médicale de reprise avec le médecin de prévention, son objet n'était pas de définir les modalités médicales de sa reprise mais de s'assurer du respect des dispositions du décret n°85-603 du 10 juin 1985 qui instaure une surveillance médicale renforcée pour les agents réintégrés après un congé de longue maladie. A cet égard aucune disposition n'impose à l'administration d'organiser la visite de reprise avant le retour effectif de l'agent au service. 42. D'autre part, si, pour justifier son absence, Mme B... se prévaut, à compter du 1er mars 2021, de trois arrêts de travail délivrés successivement les 1er, 2 et 9 mars, respectivement pour les journées du 1er mars, puis du 2 au 9 mars et enfin du 10 au 29 mars, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, il apparaît qu'ils constituent des arrêts de prolongation des précédents arrêts de travail en lien avec son syndrome anxiodépressif. Aussi, Mme B... ne peut être regardée comme justifiant avoir apporté des éléments nouveaux sur son état de santé par rapport aux constatations sur la base desquelles a été rendu l'avis du comité médical départemental du 18 février 2021, l'ayant déclarée apte à reprendre ses fonctions. Dans ces conditions, Mme B... ne pouvant être regardée comme ayant apporté une justification médicale à son absence irrégulière, le président de la communauté de communes Thelloise était fondé à la radier des cadres pour abandon de poste. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté. 43. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mars 2021 par lequel le président de la communauté de communes Thelloise a prononcé sa radiation des cadres. Sur les conclusions d'annulation de l'arrêté du 19 mars 2021 prononçant une retenue sur traitement en l'absence de service fait : 44. En l'absence d'illégalité de la décision de radiation des cadres pour abandon de poste, les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de la décision du 19 mars 2021 opérant une retenue sur son traitement pour absence de service fait du 1er mars au 14 mars 2021, ne peuvent qu'être rejetées. 45. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, que la requête de Mme B... doit être rejetée. Sur les frais liés au litige : 46. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Thelloise, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par Mme B... au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la communauté de communes Thelloise sur ce même fondement. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la communauté de communes Thelloise présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la communauté de communes Thelloise. Délibéré après l'audience publique du 17 octobre 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023. Le rapporteur, Signé : F. Malfoy La présidente de chambre, Signé : M-P. Viard La greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au préfet de l'Oise en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, N. Roméro N° 22DA01186 2
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de MARSEILLE, 2ème chambre, 10/11/2023, 21MA03773, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le département du Var à lui payer la somme de 62 094,24 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de sa demande préalable et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1803222 du 2 juillet 2021, le tribunal administratif de Toulon a, d'une part, condamné le département du Var à payer à Mme A... une somme de 3 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2018 et de la capitalisation des intérêts à compter du 14 juin 2019, d'autre part, rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 1er septembre 2021, le 27 juin 2022 et le 5 avril 2023, Mme A..., représentée par Me Varron Charrier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) d'annuler ce jugement du 2 juillet 2021 en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande ; 2°) de surseoir à statuer sur sa demande tendant à l'indemnisation de ses préjudices au titre de l'incidence professionnelle en attendant le placement en retraite pour invalidité ou, à tout le moins, de réserver ses droits au titre de l'indemnisation de ses préjudices au titre de l'incidence professionnelle en attendant le placement en retraite pour invalidité ; 3°) de condamner le département du Var à lui payer la somme de 60 278,78 euros au titre de ses préjudices, sauf à parfaire ; 4°) d'assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter de la date de sa demande préalable avec capitalisation annuelle dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil ; 5°) à titre subsidiaire, de désigner un expert afin d'évaluer ses préjudices ; 6°) en toute hypothèse, de mettre à la charge du département du Var la somme de 4 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal a insuffisamment évalué son préjudice moral et ses troubles dans les conditions d'existence ; - elle sollicite, à titre principal, l'engagement de la responsabilité pour faute du département avec une réparation intégrale de l'ensemble de ses dommages et, à titre subsidiaire, l'engagement de la responsabilité sans faute du département afin d'obtenir, en complément de l'allocation temporaire d'invalidité (ATI), une indemnité complémentaire réparant les préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux réparés par l'ATI et/ ou les préjudices personnels ; - le département du Var, qui n'a pris aucune mesure pour faire cesser le comportement de harcèlement dont elle était victime alors qu'il y était tenu par les dispositions de l'article 2-1 du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive de la fonction publique territoriale, engage sa responsabilité pour faute ; - elle a droit à réparation de ses préjudices à hauteur de 4 184,54 euros s'agissant des pertes de gains professionnels, de 8 500 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, de 7 500 euros au titre des souffrances endurées, de 15 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence et de 20 581 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ; - il serait d'une bonne administration de la justice de surseoir à statuer en attendant la décision de placement en retraite pour invalidité afin de lui permettre de chiffrer son préjudice d'incidence professionnelle. Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 mars et 20 septembre 2022 et le 5 octobre 2023, le département du Var, représenté par Me Pontier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures : 1°) à titre principal, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné à payer à Mme A... la somme de 3 000 euros et de rejeter la requête ; 2°) à titre subsidiaire, de confirmer le jugement attaqué et de rejeter la requête ; 3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de la requérante la somme de 2 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - dès lors que la situation dont se plaint Mme A... ne relève pas du harcèlement moral, il n'a pas commis de faute en ne prenant pas de mesure particulière pour la faire cesser et, par conséquent, seuls les souffrances endurées et le préjudice moral pourront être pris en charge par le département en application de la jurisprudence du Conseil d'Etat dite " Moya-Caville ", à condition qu'ils présentent un lien de causalité direct et certain avec l'accident de service ; - les prétendues irrégularités dans la procédure de placement de la requérante en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS) ne sauraient être considérées comme étant à l'origine de l'accident de service ; - les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés. Par lettre du 15 mai 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de ce que le jugement attaqué est irrégulier en l'absence de communication par le tribunal de la demande présentée par Mme A... à la caisse de sécurité sociale à laquelle celle-ci est affiliée, alors qu'elle demandait réparation d'une lésion au sens de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Par lettre du 15 septembre 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de ce que si Mme A... demande à la Cour de " réserver ses droits au titre de l'indemnisation de ses préjudices au titre de l'incidence professionnelle en attendant le placement en retraite pour invalidité ", une telle demande est irrecevable dès lors qu'il n'appartient pas au juge administratif de réserver des droits. La procédure a été communiquée à la caisse primaire centrale d'assurance maladie du Var, qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ; - le décret n° 2005-442 du 2 mai 2005 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Mahmouti, - et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., rédacteur principal de première classe et occupant les fonctions d'assistante du responsable du service " solidarités logement " au sein du conseil départemental du Var, a déclaré, le 23 juin 2017, un arrêt de travail de trente jours, accompagné d'une demande d'imputation au service, à la suite d'une altercation survenue avec l'une de ses collègues au cours d'un exercice de sécurité s'étant déroulé la veille. Après l'avoir placée en congé de maladie ordinaire, le département du Var a, suite à l'expertise médicale du docteur C... du 31 août 2017 et à l'avis de la commission de réforme du 21 décembre 2017 pris à la suite d'une expertise du docteur D..., psychiatre, du 19 novembre 2018 retenant un taux de 15 % d'incapacité permanente partielle (IPP), favorables à cette imputation, finalement reconnu l'imputation au service de cet accident, par un arrêté du 9 janvier 2018. Mme A... a par ailleurs obtenu le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité avec effet au 19 novembre 2018. Elle a vainement formé le 14 juin 2018 un recours préalable afin d'obtenir " l'indemnisation des préjudices subis du fait de cet accident de service, du fait de ses placements en congé maladie ordinaire ainsi que du fait de l'abstention fautive du département qui n'a pris aucune mesure afin d'éviter qu'elle ne soit victime de harcèlement dans le cadre de l'exercice de ses fonctions ". Elle a alors demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner le département du Var à lui payer la somme de 62 094,24 euros au titre de ses préjudices subis du fait de ces trois mêmes circonstances. Par un jugement du 2 juillet 2021, le tribunal a, d'une part, condamné cette collectivité à payer à Mme A... une somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence au titre de la responsabilité sans faute et, d'autre part, rejeté le surplus de sa demande. Mme A... relève appel de ce jugement en sollicitant une meilleure indemnisation. Elle demande, à titre principal, la réparation intégrale des dommages subis du fait de son accident de service imputable à une faute de nature à engager la responsabilité du département du Var, et, à titre subsidiaire, l'engagement de la responsabilité sans faute du département afin d'obtenir, en complément de l'allocation temporaire d'invalidité (ATI), une indemnité complémentaire réparant les préjudices patrimoniaux d'une autre nature que ceux réparés par l'ATI et/ ou les préjudices personnels. Par la voie de l'appel incident, le département du Var demande, à titre principal, l'annulation du jugement en tant qu'il l'a condamné à payer à Mme A... la somme de 3 000 euros. Sur la régularité du jugement : 2. L'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ouvre aux caisses de sécurité sociale qui ont servi des prestations à la victime d'un dommage corporel un recours subrogatoire contre le responsable de ce dommage. Le huitième alinéa de cet article prévoit notamment : " L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement. (...) ". En application de ces dispositions, il incombe au juge administratif, saisi d'un recours indemnitaire de la victime contre une personne publique regardée comme responsable du dommage, de mettre en cause les caisses auxquelles la victime est ou était affiliée. Le défaut de mise en cause de la caisse entache la procédure d'irrégularité. 3. Il résulte de l'instruction que le tribunal administratif de Toulon, saisi de la demande de Mme A... dirigée contre le département du Var et tendant à la condamnation de celui-ci à réparer les préjudices résultant des conditions dans lesquelles elle a été employée, a omis de mettre en cause d'office la caisse primaire d'assurance maladie du Var aux fins de l'exercice éventuel par celle-ci de l'action instituée à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Par suite, le jugement de première instance, qui est entaché d'irrégularité du fait de cette omission, doit être annulé. La cour ayant, dans la présente instance, mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie du Var, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme A.... Sur la demande de Mme A... : 4. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. En ce qui concerne la faute : 5. Les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents. Il leur appartient à ce titre, sauf à commettre une faute de service, d'assurer la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet, ainsi que le précise l'article 2-1 du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction issue du décret du 16 juin 2000. 6. D'une part, il résulte de l'instruction, et notamment des quatre témoignages produits par la requérante, que celle-ci a subi durant plusieurs années des insultes et des brimades de la part d'une collègue de travail. Le 22 juin 2017 à 17 heures, au cours d'un exercice d'évacuation incendie dont elle assurait le bon déroulement en sa qualité de référente sécurité, Mme A... a été invectivée par cette même collègue. Il est établi, tant par les attestations versées au dossier, qui témoignent de la réalité de la souffrance de Mme A..., que par les éléments médicaux, notamment l'expertise du docteur C... du 31 août 2017, et l'attestation de son psychiatre du 21 février 2018, que la santé de Mme A... est très affectée par l'incident du 22 juin 2017. Il ressort également des pièces du dossier qu'elle a été hospitalisée à deux reprises, en juillet et en novembre 2017, et s'est trouvée en particulier en grande détresse psychologique en juillet 2017. Les diagnostics de " burn-out " et d'épisode dépressif majeur ont par ailleurs été médicalement posés. 7. D'autre part, il résulte de l'instruction que le département du Var, informé, tant par l'intéressée que par les autres agents du service, des agissements d'un autre agent à l'égard de Mme A..., n'a pris aucune mesure pour faire cesser ces agissements qui, contrairement à ce que soutient le département, ne constituent pas seulement des querelles entre personnes mais relèvent, eu égard à leur teneur et à leur caractère répété, de propos et d'attitudes de nature à affecter la santé psychique de la requérante. Il en résulte également que, le 22 juin 2017 à 17 heures, au cours d'un exercice d'évacuation incendie dont elle assurait le bon déroulement en sa qualité de référente sécurité, l'intéressée a été très vivement invectivée par cette même collègue. Si le rapport d'enquête interne dont se prévaut le département évoque certes les comportements de Mme A... qui avait elle-même régulièrement tenu des propos et commis des actes dénués de mesure contribuant ainsi à la détérioration du climat de travail du service, ce rapport ne remet en cause, ni la matérialité, ni la gravité des propos et attitudes de cet agent à son égard. Il en ressort également que deux autres agents du service se sont plaintes des mêmes faits qu'elle reproche au même agent. Enfin, si le département fait valoir que Mme A... avait fait état de signes anxio-dépressifs dans sa demande de reclassement formulée en 2007, il ne résulte pas de l'instruction que la survenue du dommage dont elle demande réparation serait directement causée par cette circonstance ancienne par rapport aux faits en litige. Par suite, Mme A... est fondée à engager la responsabilité du département du Var pour la faute de service qu'il a commise en laissant les agissements de cet agent à son égard perdurer sans prendre les mesures adéquates pour les faire cesser. Elle est, dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le harcèlement moral qu'elle invoque ou sur la responsabilité sans faute, fondée à obtenir la réparation intégrale de l'ensemble du dommage. En ce qui concerne les préjudices de Mme A... : S'agissant des préjudices patrimoniaux : 8. Il n'est pas contesté par la requérante que le montant de 4 513,24 euros qu'elle réclame au titre des pertes de gains professionnels lui a été versé pour partie en décembre 2017 (3 680,24 euros correspondant au demi-traitement pour la période de septembre à novembre 2017) puis en janvier 2018 (833 euros correspondant à l'indemnité d'exercice de mission annuel pour le mois de novembre 2017). Elle ne peut donc prétendre à indemnisation à ce titre. 9. En revanche, si la requérante demande l'indemnisation de l'incidence professionnelle, ce chef de préjudice n'est pas établi par la seule demande de placement en retraite pour invalidité dont elle se prévaut. Il n'y a, dès lors, pas lieu de surseoir à statuer sur ce point. Il n'appartient pas non plus à la cour de réserver les droits de la requérante au titre de ce chef de préjudice. S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux : 10. Pour solliciter une indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire, Mme A... expose que la décision refusant de reconnaître que son accident survenu le 22 juin 2017 était imputable au service a généré des conséquences sur sa vie personnelle ainsi que celle ses enfants. En s'abstenant toutefois d'étayer ses allégations qui ne ressortent par ailleurs d'aucune pièce du dossier, ce chef de préjudice n'est pas établi au regard des circonstances invoquées qui sont, en tout état de cause, pas de nature à relever du chef de préjudice dont elle demande réparation. 11. Compte tenu des éléments rappelés aux points 6 et 7 et de ce que la défense n'en conteste pas la réalité, il sera fait une juste appréciation des souffrances endurées par Mme A... à hauteur de 3 000 euros. Il sera également fait une juste appréciation du préjudice moral subi et des troubles dans les conditions d'existence en lui allouant la somme de 3 000 euros. 12. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise médicale du docteur C... du 31 août 2017 et de l'expertise du 19 novembre 2018 du docteur D..., tous deux missionnés par la commission départementale de réforme, que Mme A... conserve, exclusivement du fait de l'accident survenu le 22 juin 2017, une incapacité permanente partielle que le second rapport a, après consolidation, évalué à un taux de 15 %. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient le département du Var, il ne résulte pas de la circonstance que Mme A... ait fait état de signes anxio-dépressifs dans sa demande de reclassement formulée en 2007 et de celle qu'elle a elle-même suscité des conflits au sein de son service, qu'une partie de son déficit serait imputable, même partiellement, à un état antérieur. Par suite, eu égard au taux de son déficit permanent et compte tenu de l'âge de la requérante à la date de consolidation, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice à la somme de 21 000 euros, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise sur ce point. 13. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin ni de surseoir à statuer, ni d'ordonner d'expertise, le département du Var doit être condamné à payer à Mme A... une somme de 27 000 euros. Sur l'appel incident présenté par le département du Var : 14. Compte tenu de tout ce qui vient d'être dit, l'appel incident présenté par le département du Var doit être rejeté. Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : 15. D'une part, la somme de 27 000 euros allouée à Mme A... au point 13 sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2018, date de réception par l'administration de la demande préalable formulée par Mme A.... 16. D'autre part, aux termes de l'article 1343-2 du code civil : " Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise ". Pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. Mme A... a demandé, par requête enregistrée le 12 octobre 2018 au greffe du tribunal, la capitalisation des intérêts. A cette date, les intérêts n'étaient pas encore dus pour une année entière. Il y a lieu, dès lors, de faire droit à la demande de Mme A... un an après la date de réception de sa demande préalable, soit le 15 juin 2019. Sur la déclaration d'arrêt commun : 17. La caisse primaire centrale d'assurance maladie du Var, mise en cause, n'a pas produit d'observations. Il y a lieu, dès lors, de lui déclarer commun le présent arrêt. Sur les frais liés au litige : 18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département du Var une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le département du Var sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 1803222 du 2 juillet 2021 du tribunal administratif de Toulon est annulé. Article 2 : Le département du Var est condamné à payer à Mme A... une somme de 27 000 euros. Article 3 : La somme de 27 000 euros, mentionnée à l'article 2, est assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2018 et de la capitalisation des intérêts à compter du 15 juin 2019. Article 4 : Le département du Var versera à Mme A... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt est déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Var. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au département du Var et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var. Délibéré après l'audience du 19 octobre 2023 où siégeaient : - Mme Fedi, présidente de chambre, - Mme Rigaud, présidente-assesseure, - M. Mahmouti, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 novembre 2023. 2 N° 21MA03773
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 07/11/2023, 22BX01368, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B..., Mme A... B..., M. C... B..., M. D... B... et Mme A... B..., cette dernière agissant en qualité de représente légale de ses trois filles mineures, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune d'Arcachon, d'une part, à leur verser la somme de 39 416 euros en réparation des préjudices subis par M. F... B..., d'autre part, à verser à Mme E... B..., veuve de M. F... B..., la somme de 164 680,04 euros à titre de dommages et intérêts, enfin, à verser à chacun des trois enfants de M. B... la somme de 30 000 euros ainsi que la somme de 10 000 euros à chacune de ses petites filles à titre de dommages et intérêts. Par un jugement n° 2002223 du 16 mars 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 mai 2022, 23 janvier 2023 et 20 avril 2023, Mme E... B..., Mme A... B..., M. C... B..., M. D... B... et Mme A... B... agissant en qualité de représente légale de ses trois filles mineures, représentés par Me Noël, demandent à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 mars 2022 ; 2°) de désigner un expert chargé de prendre connaissance du dossier médical de M. F... B..., de dire si sa maladie et son décès sont imputables au service, si la commune d'Arcachon a pris toutes les mesures de sécurité pour prévenir le risque de survenance de la maladie dont l'intéressé a été victime ; 3°) de condamner la commune d'Arcachon à leur verser la somme totale de 39 416 euros en réparation des préjudices subis par M. F... B..., assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, date de réception de leur réclamation indemnitaire préalable, avec capitalisation ; 4°) de condamner la commune d'Arcachon à verser Mme E... B... la somme totale de 164 680,04 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à la suite du décès de son époux, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, avec capitalisation ; 5°) de condamner la commune d'Arcachon à verser à chacun des trois enfants de M. B... la somme de 30 000 euros en réparation de leur préjudice d'affection, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, avec capitalisation ; 6°) de condamner la commune d'Arcachon à verser la somme de 10 000 euros à chacune des petites-filles de M. B..., assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 février 2020, avec capitalisation ; 7°) de mettre à la charge de la commune d'Arcachon une somme de 1 500 euros à verser à Me Noël sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; 8°) de mettre à la charge de la commune d'Arcachon une somme de 1 500 euros à verser à Mme A... B... et M. C... B..., chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - M. B..., agent de la commune depuis 1975, s'est vu diagnostiqué en 2015 " un carcinome non à petites cellules paratrachéal droit ", cette maladie étant référencée au tableau des maladies professionnelles et qui a été reconnue imputable au service à compter du 2 octobre 2015, M. B... étant décédé le 18 juillet 2016 ; par suite, le tribunal a commis une erreur de fait en jugeant que les arrêtés du maire des 23 mai et 25 octobre 2016, reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie de M. B... et de son décès, ont été abrogés, alors que ces décisions sont devenues définitives et ont créé des droits acquis à leur profit ; - les premiers juges ont retenu à tort que la maladie dont était atteint M. B... était imputable à son tabagisme et que les travaux effectués par ce dernier n'entraient pas dans la liste limitative des travaux définis par le tableau 16 bis des maladies professionnelles et ont méconnu les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, qui prévoient que si la condition tenant à la liste limitative des travaux n'est pas remplie, la maladie désignée au tableau des maladies professionnelles peut être reconnue imputable au service quand l'agent ou ses ayants-droits établissent qu'elle est directement causée par les fonctions ; - le tribunal, qui a fondé son appréciation sur le rapport d'expertise d'un médecin généraliste sans tenir compte de l'avis d'autres médecins spécialistes de pathologies professionnelles, ne pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation juger, qu'il n'y avait pas de lien direct et certain entre la maladie de M. B... et son exposition pendant plus de dix ans aux goudrons de houille et de silice ; - cette situation engage la responsabilité pour faute de la commune qui a manqué à son obligation d'assurer la sécurité de ses agents, laquelle découle de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de l'article 2-1 du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique alors que les risques liés à l'exposition aux goudrons de houille sont connus depuis au moins 1972 et que la commune n'a pas justifié avoir mis en place des équipements de protection individuelle pour prévenir l'exposition aux goudrons de houille ; - ils ont droit à être indemnisés de l'ensemble des préjudices qui découlent de la maladie et du décès de M. B... qui a connu un déficit fonctionnel temporaire, a enduré des souffrances et subi un préjudice moral, un préjudice d'agrément, un préjudice esthétique et un préjudice sexuel à hauteur d'une somme totale de 39 416 euros ; - Mme E... B..., sa veuve, subit un préjudice économique, un préjudice d'affection, des troubles dans ses conditions d'existence et a assumé des frais d'obsèques et a droit à la somme totale de 164 680,04 euros ; - les enfants de M. B... ont subi un préjudice d'affection qui sera évalué à 30 000 euros chacun et à 10 000 euros pour chacun des petits-enfants de M. B.... Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2023, la commune d'Arcachon, représentée par la SARL Boissy Avocats Associés, agissant par Me Boissy, conclut : 1°) à titre principal, au rejet de la requête ; 2°) à titre subsidiaire, à la limitation des indemnités demandées par les requérants en réparation de leurs préjudices. Elle soutient que les moyens doivent être écartés comme infondés. Le 3 octobre 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le jugement attaqué est irrégulier pour avoir omis d'appeler à la cause la caisse primaire d'assurance maladie dont relevait F... B... en vue de lui permettre, le cas échéant, d'obtenir le remboursement de ses débours. Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux du 29 septembre 2022, Mme E... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle. Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux du 10 novembre 2022, M. D... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 916647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Frédéric Faïck, - les conclusions de M. Anthony Duplan, rapporteur public, - et les observations de Me Latour représentant les consorts B... et de Me Dubois, substituant Me Boissy, représentant la commune d'Arcachon. Considérant ce qui suit : 1. M. F... B..., fonctionnaire territorial né le 4 mai 1956, a été employé par la commune d'Arcachon, comme agent technique de voirie entre 1975 et 1988, puis comme agent technique aux espaces verts de 1988 à 2015. Après qu'un cancer des poumons lui eut été diagnostiqué le 2 octobre 2015, M. B... est décédé de cette maladie le 18 juillet 2016. Par une décision du 21 juin 2017, la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé d'accorder à Mme E... B..., veuve de M. B..., le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité au motif que le lien direct et certain entre la maladie et l'exercice des fonctions n'était pas établi. La requête de Mme B... dirigée contre cette décision a été rejetée par un jugement du 23 février 2021 devenu définitif. A la demande de Mme E... B... et de ses trois enfants, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, a, par une ordonnance du 17 avril 2018, ordonné une expertise en vue d'examiner le dossier médical de M. B... et de déterminer si sa maladie et son décès sont en lien avec ses fonctions exercées comme agent de voirie. Après le dépôt du rapport d'expertise en mai 2019, Mme B... et ses enfants ont, le 30 janvier 2020, adressé une demande préalable d'indemnisation à la commune d'Arcachon qui a été implicitement rejetée. Mme B..., ses enfants et petits-enfants ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande tendant à la condamnation de la commune d'Arcachon à les indemniser de leurs préjudices résultant de la maladie et du décès de leur époux, père et grand-père. Ils relèvent appel du jugement rendu le 16 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. Aux termes du huitième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement (...). 3. Il appartient au juge administratif qui dirige l'instruction d'assurer, en tout état de la procédure, le respect des dispositions précitées. Ainsi, le tribunal administratif, saisi par la victime ou ses ayants droit d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause la caisse. La méconnaissance de cette obligation entache le jugement d'une irrégularité que le juge d'appel doit, au besoin, relever d'office. 4. Si Mme B... s'est vu refuser le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité, les consorts B... conservent le droit de demander à la commune d'Arcachon la réparation de leurs préjudices. Par suite, il appartenait au tribunal administratif de Bordeaux d'appeler dans la cause la caisse de sécurité sociale à laquelle M. B... était affilié. En s'abstenant d'y procéder, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées en première instance par les consorts B.... Sur la responsabilité de la commune d'Arcachon : 5. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales du II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984, les articles 1er et 2 du décret du 2 mai 2005, relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale, ainsi que les article 37, 40 et 42 du décret du 26 décembre 2003, relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. 6. Ces dispositions ne font en revanche obstacle, ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne, ces actions pouvant être présentées par ses ayants droit. 7. Ainsi qu'il a été dit, M. F... B... a travaillé pour la commune d'Arcachon comme agent technique de voirie entre 1975 et 1988, période durant laquelle il a pu être exposé aux goudrons de houille et à la silice. Il résulte de l'instruction que, après avis favorable de la commission de réforme, sa maladie a été reconnue imputable au service par une décision du maire prise le 23 mai 2016. Son décès, survenu le 18 juillet suivant, a également été reconnu imputable au service par une décision du 25 octobre 2016 faisant suite à un avis favorable de la commission de réforme. Par une décision du 21 juin 2017, la CNRACL a toutefois refusé d'accorder à Mme E... B..., veuve de M. B..., le bénéfice d'une rente viagère d'invalidité au motif que l'existence d'un lien direct entre la maladie et l'exercice des fonctions n'était pas établi. L'expert désigné par le juge des référés du tribunal a également estimé, dans son rapport remis en mai 2019, qu'il n'existait pas de lien direct entre les conditions de travail de M. B... et son décès. 8. En premier lieu, si les décisions précitées du 23 mai 2016 et du 25 octobre 2016 ont créé des droits au profit de M. B... et de ses ayants droit, les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'ils tirent des décisions des 23 mai et 25 octobre 2016 un droit acquis à être indemnisés de leurs préjudices découlant du décès de M. B.... 9. En second lieu, selon le certificat médical rédigé le 11 janvier 2016 par le médecin chef du service de médecine du travail et des pathologies professionnelles du centre hospitalier universitaire de Bordeaux, le cancer des poumons dont a été victime M. B... est " en rapport avec une exposition professionnelle aux goudrons de houille et silice ". Pour justifier cette conclusion, l'auteur de ce certificat se réfère au tableau 16 bis des maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale annexé à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Toutefois, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau n'ont été rendues applicables aux agents de la fonction publique territoriale que le 13 avril 2019, date d'entrée en vigueur du décret du 1er avril 2019 visé ci-dessus, soit après le décès de M. B..... Au surplus, il résulte de l'instruction que les tâches effectuées par M. B... comme agent de voirie n'entraient pas dans la liste, limitative, des travaux définis par le tableau 16 bis comme étant susceptibles de provoquer un cancer broncho-pulmonaire primitif présumé d'origine professionnelle. Dans ces conditions, il appartient aux appelants d'établir que la maladie dont a souffert M. B... présente un lien direct avec les conditions dans lesquelles ce dernier a exercé ses fonctions d'agent de voirie, de nature à susciter le développement de sa maladie, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 10. Le certificat médical du 17 août 2016 que produisent les requérants se borne à affirmer que le décès de M. B... est la conséquence de sa maladie professionnelle sans que cette conclusion soit précédée d'une quelconque démonstration. L'autre certificat daté du 2 mars 2017 adopte la même conclusion, en se fondant uniquement sur le certificat médical précité du 11 janvier 2016 qui retient à tort que M. B... aurait accompli des travaux relevant du tableau 16 bis des maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale. 11. Il est constant, comme cela a été rappelé par l'expert judiciaire, que M. B... présentait de forts antécédents de tabagisme, ayant fumé pendant 30 ans, jusqu'à l'annonce de sa maladie, l'équivalent d'un paquet de cigarettes par jour. Selon le rapport d'expertise, non seulement le tabagisme est le premier facteur du cancer du poumon, dont il provoque la survenance dans neuf cas sur dix pour les patients de sexe masculin, mais sa durée est un facteur plus important encore que la quantité fumée dans la réalisation du risque. Toutefois, l'expert n'a pas omis d'étudier si les travaux de voirie auxquels M. B... a participé entre 1975 et 1988 ont contribué à la survenance de sa maladie, l'exposition aux goudrons de houilles pouvant se combiner avec le tabagisme pour favoriser une telle maladie. Ainsi, s'il résulte, certes, de l'instruction qu'à l'occasion de certaines tâches qu'il a été amené à effectuer, M. B... a pu être exposé aux goudrons de houille et de silice, les requérants n'apportent pas, en appel comme en première instance, d'éléments permettant d'apprécier les circonstances exactes et la fréquence de l'exposition de l'intéressé à ces substances, alors que l'expert souligne, en particulier, qu'aucune anomalie médicale n'a été relevée chez M. B... après qu'il eut cessé, en 1988, ses fonctions comme agent technique de voirie. 12. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'expertise repose sur une argumentation suffisamment étayée, et se réfère à une bibliographie médicale citée en annexe relative au type de cancer dont a souffert M. B.... Pour contester les conclusions de l'expert judiciaire, les requérants produisent en appel une " note médico-légale " du 7 septembre 2022 regrettant que l'avis de spécialistes consultés par l'expert judiciaire n'ait pas été retranscrit dans le rapport, et que le tableau 16 bis des maladies professionnelles n'ait pas servi de référence. Toutefois ces seuls éléments, alors que les travaux accomplis par M. B... n'étaient en tout état de cause pas au nombre de ceux visés au tableau précité, ne sont pas suffisants pour remettre en cause les conclusions de l'expert judiciaire. De même, l'auteur de la note du 7 septembre 2022 se borne à relever que le lien entre la maladie de M. B... et son tabagisme n'est pas nécessairement exclusif, sans apporter d'éléments de nature à établir que les conditions dans lesquelles l'intéressé a exercé ses fonctions d'agent de voirie auraient pu être la cause, qui n'a certes pas à être exclusive, mais qui doit être directe, de sa maladie et de son décès. 13. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, les consorts B... ne sont pas fondés à demander la condamnation de la commune d'Arcachon à réparer les préjudices qu'ils allèguent. 14. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande. Sur les frais d'instance : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions des consorts B... tendant à ce que la commune d'Arcachon qui n'est pas la partie perdante à l'instance, leur verse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DECIDE Article 1er : Le jugement n° 2202223 du tribunal administratif de Bordeaux du 16 mars 2022 est annulé. Article 2 : La demande de première instance et les conclusions d'appel des consorts B... sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., à Mme A... B..., à M. C... B..., à M. D... B..., à la commune d'Arcachon, et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde. Délibéré après l'audience du 9 octobre 2023 à laquelle siégeaient : Mme Ghislaine Markarian, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023. Le rapporteur, Frédéric Faïck La présidente, Ghislaine Markarian La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 22BX01368 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 07/11/2023, 22DA01658, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2020 par lequel le président du conseil régional des Hauts-de-France a refusé de reconnaître l'imputabilité de sa maladie au service et de condamner la région Hauts-de-France à l'indemniser de ses préjudices. Par un jugement n° 2100531 du 2 juin 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2022 et le 24 mars 2023, M. A... B..., représenté par Me Fillieux, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 ; 2°) de désigner un expert afin de se prononcer sur sa situation médicale et l'origine de sa pathologie ; 3°) d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2020 par lequel le président du conseil régional des Hauts-de-France a refusé de reconnaître l'imputabilité de sa maladie au service ; 4°) d'enjoindre à la région Hauts-de-France de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de la région Hauts-de-France une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision contestée est entachée d'incompétence ; - il n'a pas été informé de la possibilité de se faire assister par un médecin dans les conditions prévues par l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 et a ainsi été privé d'une garantie ; - la commission de réforme a omis de se prononcer sur son taux d'incapacité, en méconnaissance de l'article 37-8 du décret du 30 juillet 1987 ; - la commission ne pouvait se prononcer sur sa situation alors que son état n'était pas consolidé ; - il devait être placé en congé d'invalidité temporaire imputable au service de façon provisoire, dans l'attente de sa consolidation ; - son état préexistant ne fait pas obstacle à la reconnaissance d'une maladie professionnelle dès lors que cet état n'aurait pas suffi à le mettre dans l'incapacité d'exercer ses fonctions et que l'aggravation de sa pathologie présente un lien direct avec ses conditions de travail ; - sa pathologie doit être reconnue comme imputable au service en application du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 dès lors qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice de ses fonctions, qu'elle a entraîné une incapacité permanente de 25 % et qu'elle ne résulte pas de son comportement mais de ses conditions de travail ; - il a droit au bénéfice d'un congé d'invalidité temporaire imputable au service à compter du 29 juin 2020. Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2023, la région Hauts-de-France, représentée par Me Genies, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 400 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la circonstance que la convocation à la commission de réforme omette de préciser la possibilité de se faire assister d'un médecin n'a pas privé le requérant d'une garantie ; - la pathologie du requérant n'est pas imputable au service, eu égard à son état antérieur ; - cette pathologie trouve son origine déterminante dans le comportement du requérant, de telle sorte qu'elle doit être détachée du service. La région Hauts-de-France a présenté le 12 octobre 2023 un mémoire qui n'a pas été communiqué. Par une ordonnance du 12 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 13 octobre 2023, à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur, - les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de Me Dantec, représentant M. B..., et de Me Genies, représentant la région Hauts-de-France. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjoint administratif territorial de la région Hauts-de-France, est affecté à la direction du patrimoine immobilier, sur le site du service de gestion foncière et immobilière implanté à Amiens. Placé en congé de maladie depuis le 29 juin 2020, il a présenté une demande d'imputabilité de sa maladie au service, qui a été rejetée par un arrêté du président du conseil régional des Hauts-de-France du 24 décembre 2020. Par un jugement du 2 juin 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 2020. M. B... relève appel de ce jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, par un arrêté du 4 mars 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la région, le président du conseil régional des Hauts-de-France a donné délégation à Mme C..., responsable du département de la gestion du personnel, pour signer, notamment, les actes de gestion se rapportant aux accidents de service et aux maladies professionnelles. Mme C... avait donc compétence pour signer, le 24 décembre 2020, l'arrêté refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. B.... Par suite, le moyen tiré d'une prétendue incompétence de l'auteur de l'acte contesté doit être écarté. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 14 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le secrétariat de la commission de réforme convoque les membres titulaires et l'agent concerné au moins quinze jours avant la date de la réunion. / La convocation mentionne la liste des dossiers à examiner, les références de la collectivité ou de l'établissement employeur, l'objet de la demande d'avis (...) ". Aux termes de l'article 16 du même arrêté : " (...) Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". 4. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 27 novembre 2020, M. B... a été convoqué à la séance de la commission de réforme prévue le 14 décembre suivant et a été informé, par ce même courrier, de la possibilité de se faire entendre par la commission et d'y être assisté, sans autre précision. L'appelant soutient que, dûment informé de la possibilité de se faire assister d'un médecin de son choix ou par un conseiller, il aurait privilégié la première option dès lors que l'assistance par un médecin devant la commission de réforme est plus appropriée que celle apportée par un représentant du personnel. Toutefois, en informant M. B... de la possibilité d'être assisté devant la commission de réforme, le courrier du 27 novembre 2020 l'a mis à même de solliciter le concours de toute personne de son choix, dont un médecin. En outre, il ressort des pièces du dossier que le requérant ne s'est pas rendu à la séance du 14 décembre 2020, que deux représentants du personnel y ont assisté à sa demande pour le défendre et que la commission a disposé du rapport d'expertise établi par un médecin psychiatre l'ayant examiné et a ainsi été suffisamment éclairée sur sa situation médicale. Dans ces conditions, la circonstance que le courrier du 27 novembre 2020 omette de préciser la possibilité d'être assisté par un médecin n'a privé l'intéressé d'aucune garantie et n'a pas eu d'incidence sur le sens de l'arrêté contesté. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif (...) / IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 37-8 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner. Il est déterminé par la commission de réforme compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ". 6. Il n'est pas contesté que le syndrome anxiodépressif dont souffre M. B... ne relève pas des tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Par ailleurs, il résulte des dispositions précitées du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 que la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles est subordonnée à la réalisation de deux conditions cumulatives, tenant, d'une part, à ce que la pathologie présente un lien essentiel et direct avec l'exercice des fonctions et, d'autre part, à ce qu'elle entraîne une incapacité correspondant à un taux déterminé. Il ressort des pièces du dossier que, le 14 décembre 2020, la commission de réforme a rendu un avis défavorable sur la demande d'imputabilité de M. B... au motif que son état antérieur ne permet pas de rattacher de manière exclusive, directe et certaine sa pathologie aux missions exercées. La commission a donc estimé que la maladie de M. B... n'a pas de lien essentiel et direct avec l'exercice de ses fonctions et que la première condition prévue pour la reconnaissance d'une imputabilité au service n'est pas remplie. Elle n'avait donc pas à se prononcer sur la seconde condition prévue par le IV de l'article 21 bis se rapportant au taux d'incapacité résultant de la pathologie. Pour les mêmes raisons, et contrairement à ce que soutient le requérant, la commission n'était pas tenue d'attendre la consolidation de son état de santé pour se prononcer sur cette incapacité. Le moyen tiré d'un vice de procédure sur ce point ne peut qu'être écarté. 7. En quatrième lieu, pour l'application des dispositions du troisième alinéa du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, citées au point 5, une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée. 8. M. B... soutient que sa situation professionnelle s'est dégradée à compter de l'année 2018 avec l'arrivée d'un nouveau directeur et une réorganisation du service lui faisant craindre de devoir changer de poste. Estimant avoir fait l'objet de reproches injustifiés et de divers agissements dénigrants et humiliants, il indique avoir fait l'objet d'accusations infondées en mars 2020 qui ont conduit à sa suspension à titre provisoire puis à son exclusion temporaire pour une durée de trois mois à titre disciplinaire. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du médecin psychiatre du 1er octobre 2020, que si M. B... présente une personnalité anxieuse obsessionnelle ancienne, son incapacité de travail résulte d'un syndrome dépressif d'intensité sévère apparu après qu'il a été suspendu de ses fonctions le 13 mars 2020 puis sanctionné le 16 juillet suivant. Si le rapport du médecin psychiatre évoque un trouble thymique antérieur, il est précisé que ce trouble a cessé en 1992. Il n'est donc pas établi que l'état antérieur de l'intéressé aurait déterminé à lui seul son incapacité professionnelle, alors que le médecin psychiatre comme le médecin de prévention ont conclu à une origine professionnelle de son syndrome dépressif. Dans les circonstances de l'espèce, et en l'absence de tout élément de sa vie personnelle pouvant expliquer la symptomatologie de M. B... à compter de l'année 2020, les difficultés tenant à sa situation professionnelle depuis cette date ont pu se trouver à l'origine d'une souffrance au travail dont a résulté sa pathologie dépressive. 9. Toutefois, s'il est vrai que pour suspendre M. B... à titre provisoire le 13 mars 2020, l'administration lui a reproché d'avoir, le 10 mars précédent, fait une proposition sexuelle à une collègue, ce que celle-ci a démenti, il ressort des pièces du dossier qu'il a eu à son égard un geste et des propos à connotation sexuelle, inappropriés dans le cadre du service. Par ailleurs, le comportement au travail de M. B... se caractérise depuis plusieurs années par un manque de tempérance, puisqu'il impose sa présence de façon intrusive dans les bureaux de ses collègues, en alternant périodes de tension et périodes d'accalmie, et que l'intéressé se trouve à l'origine d'une dégradation des conditions de travail au sein du service. Outre un comportement inadapté dans les relations avec ses collègues, sa hiérarchie et les partenaires institutionnels de la région, l'administration a retenu le geste et les propos inappropriés du 10 mars 2020 pour engager une procédure disciplinaire contre M. B..., conduisant à une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois, dont il n'est pas démontré qu'elle serait entachée d'inexactitude matérielle ou serait disproportionnée. Le requérant ne démontre ni qu'il ferait l'objet de reproches infondés dans la réalisation de ses missions, ni que celles-ci seraient contrôlées par un agent dépourvu d'autorité hiérarchique, ni encore que ses évaluations auraient subi une baisse injustifiée ou que l'administration se refuserait à appliquer les restrictions médicales le concernant. Il résulte de ce qui précède que le comportement de M. B... dans le cadre professionnel, qui a justifié l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre le 20 avril 2020, lequel a été suivi d'un arrêt de travail à compter du 29 juin suivant, doit être regardé comme étant la cause déterminante de la dégradation de ses conditions de travail à la région Hauts-de-France. Un tel comportement est constitutif d'un fait personnel de l'agent de nature à détacher la maladie du service. 10. En dernier lieu, M. B... ne saurait utilement se prévaloir de ce qu'il présente une incapacité de 25 % dès lors que sa pathologie ne présente pas de lien essentiel et direct avec le service. La circonstance qu'il aurait dû bénéficier d'un congé pour invalidité temporaire imputable au service à titre provisoire pendant l'instruction de sa demande est également sans influence sur la légalité de la décision contestée. 11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions présentées à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la région Hauts-de-France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B... demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme dont la région Hauts-de-France demande le versement sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la région Hauts-de-France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la région Hauts-de-France. Délibéré après l'audience publique du 17 octobre 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre, - M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, - Mme Dominique Bureau, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023. Le président-rapporteur, Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre, Signé : M.-P. ViardLa greffière, Signé : N. Roméro La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière N. Roméro 2 N° 22DA01658
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de TOULOUSE, 1ère chambre, 09/11/2023, 21TL21973, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La commune de Tournefeuille a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre le 11 août 2017 par la commune de Ramonville-Saint-Agne, pour un montant de 83 078,69 euros, de la décharger du paiement de la somme de 41 162,92 euros et de condamner la commune de Ramonville-Saint-Agne à lui verser une somme de 12 518,62 euros. Par un jugement n° 1705983 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune de Ramonville-Saint-Agne à verser une somme de 6 079,31 euros à la commune de Tournefeuille et rejeté le surplus des conclusions de cette dernière. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 12 mai 2021, sous le n° 21BX01973 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et ensuite sous le n° 21TL21973 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire complémentaire enregistré le 19 octobre 2022, la commune de Tournefeuille, représentée par Me Lapuelle et Me Foucard, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement, en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de sa demande ; 2°) de déclarer le titre exécutoire nul et non avenu et de la décharger du paiement de la somme de 83 078,69 euros ; 3°) à titre subsidiaire, d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre le 11 août 2017 et de la décharger du paiement de la somme de 41 162,92 euros ; 4°) à titre infiniment subsidiaire, d'annuler ce titre exécutoire et de la décharger du paiement de la somme de 28 150,43 euros ; 5°) de condamner la commune de Ramonville-Saint-Agne à lui verser une somme de 12 518,62 euros ; 6°) de mettre à la charge de la commune de Ramonville-Saint-Agne une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le tribunal n'a pas soulevé d'office le moyen d'ordre public tiré de l'inexistence du titre exécutoire contesté ; - le titre exécutoire attaqué est dépourvu d'existence matérielle ; - il est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la commune de Ramonville-Saint-Agne, qui n'a pas saisi le médecin agréé et la commission de réforme et qui a tardé à saisir le médecin de prévention, a excédé la période qui était raisonnablement nécessaire pour permettre la reprise de son agent ; - la responsabilité de la commune de Ramonville-Saint-Agne est totale dans le refus de prise en charge, par son assureur, des sommes versées à raison du traitement de l'agent concerné entre le 30 avril 2012 et le 15 décembre 2013. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 18 août 2022 et le 6 décembre 2022, la commune de Ramonville-Saint-Agne, représentée par Me Blanchet, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune de Tournefeuille sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la commune requérante ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Lafon, - les conclusions de M. Clen, rapporteur public, - et les observations de Me Foucard pour la commune de Tournefeuille. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., adjoint technique territorial, a été victime le 16 mai 2006, alors qu'il était employé en qualité de cuisinier par la commune de Tournefeuille, d'un accident reconnu imputable au service. M. A... a ensuite été recruté le 1er avril 2009 par la commune de Ramonville-Saint-Agne et placé en congé de maladie pour rechutes du 2 décembre 2009 au 15 février 2010, du 12 octobre 2010 au 28 février 2011, puis du 28 février 2012 au 15 décembre 2013. Il a ensuite été autorisé à reprendre ses fonctions à temps partiel thérapeutique du 16 décembre 2013 au 15 mars 2014. La commune de Tournefeuille a reçu le 26 octobre 2017 une lettre de relance faisant référence à un titre exécutoire émis à son encontre le 11 août 2017 par la commune de Ramonville-Saint-Agne, pour un montant de 83 078,69 euros, correspondant aux traitements versés à M. A... durant les quatre périodes de congé de maladie et de reprise à temps partiel. Elle a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler ce titre exécutoire, de la décharger du paiement de la somme de 41 162,92 euros et de condamner la commune de Ramonville-Saint-Agne à lui verser une somme de 12 518,62 euros, en réparation des préjudices subis du fait des conditions de transmission des documents relatifs au traitement de M. A.... Par un jugement du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté les conclusions dirigées contre le titre exécutoire et fait partiellement droit à ces prétentions indemnitaires en condamnant la commune de Ramonville-Saint-Agne à lui verser une somme de 6 079,31 euros. La commune de Tournefeuille fait appel de ce jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de sa demande. Elle demande également à la cour de la décharger du paiement de la somme totale de 83 078,69 euros. Sur la régularité du jugement : 2. La commune de Tournefeuille soutient que le jugement attaqué est irrégulier au motif que les premiers juges ont omis de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'inexistence matérielle du titre exécutoire émis le 11 août 2017. Toutefois, l'omission qu'aurait ainsi commise le tribunal administratif, à la supposer établie, a trait au bien-fondé du jugement attaqué et demeure, par suite, sans incidence sur sa régularité. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le titre exécutoire émis le 11 août 2017 : 3. En premier lieu, la commune de Ramonville-Saint-Agne a versé au dossier l'avis des sommes à payer valant titre exécutoire contesté, émis et rendu exécutoire le 11 août 2017. En outre, dans un certificat administratif du 31 octobre 2022, le maire de Ramonville-Saint-Agne indique que l'avis fourni en première instance, qui comportait une date d'émission postérieure, correspondait à une copie réémise pour les besoins de sa production en justice. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le titre exécutoire attaqué serait dépourvu d'existence matérielle manque en fait et doit être écarté. 4. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. (...) La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci (...) ". 5. D'autre part, aux termes de l'article 81 de la même loi, applicable au présent litige : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliées à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / Lorsque l'admission à la retraite pour invalidité intervient après que les conditions d'ouverture du droit à une pension de droit commun sont remplies par ailleurs, la liquidation des droits s'effectue selon la réglementation la plus favorable pour le fonctionnaire. / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. En aucun cas, elle ne pourra avoir une date d'effet postérieure à la limite d'âge du fonctionnaire sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 36 du même décret : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) ". 6. En application de ces dispositions, la collectivité au service de laquelle se trouvait l'agent lors de l'accident de service doit supporter les conséquences financières de la rechute consécutive à cet accident, alors même que cette rechute est survenue alors qu'il était au service d'une nouvelle collectivité. La collectivité qui employait l'agent à la date de l'accident doit ainsi prendre en charge non seulement les honoraires médicaux et les frais exposés par celui-ci qui sont directement entraînés par la rechute mais aussi le remboursement des traitements qui lui ont été versés par la collectivité qui l'emploie à raison de son placement en congé de maladie ordinaire, de congé de longue maladie ou de congé de longue durée, dès lors que ce placement a pour seule cause la survenue de la rechute consécutive à l'accident de service. Si la collectivité qui l'emploie est tenue de verser à son agent les traitements qui lui sont dus, elle est cependant fondée à demander à la collectivité qui l'employait à la date de l'accident, par une action récursoire, le remboursement de ceux de ces traitements qui sont liés à la rechute ainsi que des éventuels honoraires médicaux et frais qu'elle aurait pris en charge du fait de cette rechute. Cette action récursoire ne peut être exercée, s'agissant des traitements, qu'au titre de la période qui est raisonnablement nécessaire pour permettre la reprise par l'agent de son service ou, si cette reprise n'est pas possible, son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois ou encore, si l'agent ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, pour que la collectivité qui l'emploie prononce sa mise d'office à la retraite par anticipation. 7. Il résulte de l'instruction qu'un médecin agréé saisi par la commune de Tournefeuille a, dans un rapport d'expertise du 17 septembre 2012, fixé au 23 septembre 2012 la date de consolidation de l'état de M. A... et estimé qu'il restait " inapte en l'état à assurer ses anciennes fonctions de cuisinier, avec nécessité de poste aménagé évitant les prises de force avec sa main droite ; à définir au mieux avec le médecin de prévention ". Saisi à nouveau par la même commune sur l'avis du médecin de prévention du 4 février 2013, le médecin agréé a indiqué, dans un rapport du 19 août 2013, que la reprise était possible sur le poste aménagé préconisé, dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique d'une durée de trois mois. Ces conclusions ont été confirmées par un avis du 21 novembre 2013 de la commission de réforme des agents des collectivités territoriales de la Haute-Garonne, convoquée par la commune de Tournefeuille. D'une part, il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Tournefeuille a mené la procédure conduisant à la saisine du médecin agréé et de la commission de réforme, alors qu'il appartenait à la commune de Ramonville-Saint-Agne de le faire en sa qualité d'employeur de M. A..., pour pallier une inertie de celle-ci. D'autre part, il résulte d'un courriel du 17 octobre 2012 de la direction des ressources humaines de cette commune qu'elle avait transmis au médecin de prévention, à cette date, le rapport d'expertise du 17 septembre 2012, de sorte que le délai mis par l'intéressé pour rendre son avis du 4 février 2013 n'est pas imputable à l'intimée. Dans l'ensemble de ces conditions, en autorisant M. A... à reprendre ses fonctions à compter du 16 décembre 2013, soit moins d'un mois après l'intervention de l'avis du 21 novembre 2013, la commune de Ramonville-Saint-Agne n'a pas excédé la période qui était raisonnablement nécessaire pour permettre cette reprise. Il en résulte que cette commune était en droit d'émettre, dans le cadre d'une action récursoire exercée à l'encontre de la commune de Tournefeuille, qui employait M. A... à la date de l'accident de service, un titre exécutoire pour obtenir le remboursement de l'ensemble des traitements qu'elle justifie avoir versés à l'intéressé durant les périodes de congés liés à la rechute et de reprise à temps partiel. En ce qui concerne les conclusions indemnitaires : 8. Il résulte de l'instruction que l'assureur de la commune de Tournefeuille n'a pas remboursé la part qu'il s'était engagé à prendre en charge des sommes versées à raison du traitement de M. A... entre le 30 avril 2012 et le 15 décembre 2013. Il n'est pas sérieusement contesté que ce refus, opposé le 10 février 2016, est motivé par un retard de transmission des pièces justificatives et qu'il est à l'origine, pour la commune de Tournefeuille, d'un préjudice financier d'un montant total de 12 158,62 euros. 9. D'une part, il est constant que la totalité des pièces sollicitées le 25 mars 2015 par la commune de Tournefeuille n'ont été transmises par la commune de Ramonville-Saint-Agne que le 29 février 2016. Le délai de plus de onze mois mis, dans les circonstances de l'espèce, par cette commune pour délivrer les documents réclamés, constitués notamment de bulletins de paie qu'elle avait en sa possession, alors qu'elle a fait l'objet de plusieurs relances, est constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité. 10. D'autre part, il résulte de l'instruction que la commune de Tournefeuille a mis plus de trois mois pour saisir la commune de Ramonville-Saint-Agne de la demande de son assureur du 10 décembre 2014 et, à nouveau, pour la relancer à la suite de la transmission partielle, le 30 octobre 2015, des documents attendus. Ces délais sont également constitutifs d'une faute. 11. Dans les circonstances de l'espèce, le tribunal administratif de Toulouse s'est livré à une exacte appréciation de la réparation due à la commune de Tournefeuille en condamnant la commune de Ramonville-Saint-Agne à la réparation de la moitié du préjudice subi. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a condamné cette dernière à verser à la première, compte tenu du partage de responsabilité, une somme de 6 079,31 euros. 12. Il résulte de ce qui précède que la commune de Tournefeuille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions dirigées contre le titre exécutoire émis le 11 août 2017 et limité à la somme de 6 079,31 euros la condamnation de la commune de Ramonville-Saint-Agne. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Ramonville-Saint-Agne, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Tournefeuille le versement à la commune de Ramonville-Saint-Agne de la somme de 2 000 euros en application de ces dispositions. D E C I D E : Article 1er : La requête présentée par la commune de Tournefeuille est rejetée. Article 2 : La commune de Tournefeuille versera à la commune de Ramonville-Saint-Agne la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tournefeuille et à la commune de Ramonville-Saint-Agne. Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de la région Occitanie et du département de la Haute-Garonne. Délibéré après l'audience du 26 octobre 2023, où siégeaient : - M. Barthez, président, - M. Lafon, président assesseur, - Mme Restino, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023. Le rapporteur, N. Lafon Le président, A. Barthez Le greffier, F. Kinach La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N°21TL21973 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de PARIS, 6ème chambre, 07/11/2023, 22PA03548, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 3 mai 2019 par laquelle le chef du département de la gestion collective de la direction générale de l'aviation civile du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a rejeté sa demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle et d'enjoindre à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. Par un jugement n° 1915028/5-3 du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 29 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Bost, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ; 3°) d'enjoindre à la direction générale de l'aviation civile de prendre une décision d'imputabilité au service de sa maladie ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision du 3 mai 2019 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie, dont il est atteint, est entachée d'une erreur d'appréciation ; - cette pathologie est en lien direct avec ses conditions de travail, dans le cadre desquelles il a été victime de discrimination en raison de son handicap et n'a pas bénéficié d'un aménagement de poste adapté. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, représenté par Me Abbal, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt pourrait être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de la méconnaissance, par la décision en litige, du champ d'application du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, issu de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017, les dispositions de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 n'étant pas encore entrées en vigueur faute d'un texte règlementaire d'application à la date à laquelle la pathologie de M. B... a été reconnue, et qu'en conséquence il y avait lieu de procéder à une substitution de base légale et d'appliquer les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Par une ordonnance du 19 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 19 juillet 2023 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 t ; - le décret n° 2019-122 du 21 février 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme d'Argenlieu, - les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique, - et les observations de Me Bost pour M. B... et de Me Hubert-Hugoud pour le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., technicien supérieur des études et de l'exploitation de l'aviation civile de classe normale, a été affecté du 1er octobre 2014 au 1er septembre 2019 à la sous-direction des finances au sein de la direction des services de la navigation aérienne, service rattaché à la direction générale de l'aviation civile (DGAC) du ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Le 29 novembre 2018, il a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service du symptôme dépressif dont il est atteint. Par une décision du 3 mai 2019, le chef du département de la gestion collective de la DGAC a rejeté sa demande. Par un jugement du 1er juin 2022, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issues de l'ordonnance du 19 janvier 2017, était manifestement impossible en l'absence de texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. En conséquence ces dispositions, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique d'État, qui sont entrées en vigueur le lendemain de la date de publication, le 23 février 2019, du décret du 21 février 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique d'État, n'étaient pas encore applicables à la date à laquelle la pathologie, dont M. B... est atteint, a été reconnue, soit le 10 mars 2017. Le pouvoir d'appréciation dont bénéficie l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, ici applicable, est le même que celui dont l'investissent les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. Les garanties dont sont assortis ces textes sont similaires. Dans ces conditions, et ainsi qu'en ont été informées les parties, il y a lieu de substituer les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa version applicable, à la base légale retenue par le chef du département de la gestion collective de la DGAC, dans sa décision du 3 mai 2019. 3. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, dans sa version applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : / .../2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions, prévus en application de l'article 35. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; (...) ". 4. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée. 5. D'une part, s'agissant de ses conditions de travail à l'époque des faits, M. B... fait valoir que sa hiérarchie n'a pas procédé aux aménagements de poste, auxquels il avait droit du fait de son statut de travailleur handicapé, et a notamment refusé de supprimer une imprimante laser installée dans son bureau, alors que cela avait été préconisé, en juillet et septembre 2017, par le médecin traitant et le neurologue qui le suivent, ainsi que par l'étude de poste réalisée par la médecine de prévention, le 2 novembre 2017. Il se prévaut également de ce que sa demande de deux jours et demi de télétravail par semaine a été refusée, alors que celle d'un collègue, effectuant selon lui les mêmes missions, a été accordée. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa hiérarchie, à la suite de l'étude de poste, a émis des recommandations collectives visant à limiter l'usage de l'imprimante, laquelle a été paramétrée de façon à réduire au maximum les bruits qu'elle générait, et que le refus opposé à la demande de travail est justifié par des contraintes liées à la sécurité et la confidentialité des missions confiées à l'intéressé. Aussi, et alors même que le Défenseur des droits a estimé insuffisante l'adaptation de ses conditions de travail à son état de santé, ces seules circonstances ne suffisent pas à établir que M. B... aurait, comme il le soutient, subi un traitement discriminatoire. 6. D'autre part, s'agissant de la pathologie dont est atteint M. B... et de son évolution, si les différents certificats médicaux versés au dossier relatent une dégradation de son état de santé avec, notamment, l'apparition de signes cliniques pouvant caractériser l'existence d'un syndrome anxio-dépressif, ces mêmes certificats, trop peu circonstanciés, ne permettent pas d'établir que cette pathologie résulterait directement des conditions de travail de l'intéressé. En revanche, dans le cadre de l'expertise réalisée le 14 novembre 2018, le psychiatre agréé a conclu à l'absence de lien direct entre l'anxiété profonde ressentie par l'intéressé et ses conditions de travail. De même, le comité médical a estimé, dans son avis du 11 janvier 2019, que M. B... était apte à exercer ses fonctions en milieu ordinaire et la commission de réforme, dans son avis du 22 mars 2019, s'est prononcée défavorablement à la reconnaissance de maladie professionnelle. Dans ces conditions, le chef du département de la gestion collective de la DGAC a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation des faits, refuser de faire droit à la demande de M. B... tendant à ce que sa pathologie soit regardée comme imputable au service. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais de l'instance. Il y a lieu également, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, à laquelle siégeaient : - Mme Bonifacj, présidente de chambre, - M. Niollet, président-assesseur, - Mme d'Argenlieu, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023. La rapporteure, L. d'ARGENLIEULa présidente, J. BONIFACJ La greffière, E. TORDO La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA03548
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 09/11/2023, 21BX02568, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler la décision du 26 mars 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 1901573 du 14 avril 2021, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 juin 2021 et 21 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Rakotonirina, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Réunion du 14 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision ministérielle du 26 mars 2019 ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de lui accorder une pension militaire d'invalidité, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt. Il soutient que : - la pathologie lombaire étant apparue après une chute le 2 février 2011 alors qu'il était en service sur un porte-avion, ainsi que cela ressort du recueil chronologique, il doit bénéficier de la présomption énoncée à l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; l'infirmité qui en résulte, ainsi que l'état dépressif qui s'en est suivi, persistent ; - l'administration n'apporte aucun élément de nature à démontrer une autre origine à la dépression et aux douleurs lombaires qui ont entraîné son inaptitude au service ; le ministre ne produit pas davantage le livret médical dans son intégralité ; - le taux d'invalidité qui lui a été reconnu est de 15 %, soit un taux supérieur à celui exigé pour ouvrir un droit à pension. Par deux mémoires en défense, enregistrés les 25 novembre 2022 et 3 février 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - M. A... ne peut bénéficier de la présomption de l'article L. 3 du code, dès lors que la constatation de son infirmité n'a pas été réalisée au cours de son service militaire ou d'une expédition déclarée campagne de guerre ; il doit apporter la preuve que cette infirmité résulte d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine des affections, qui ne peut pas résulter de la seule circonstance que cette infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, d'une vraisemblance ou d'une probabilité, ni des conditions générales de service ; aucun document médico-administratif ne vient corroborer ses déclarations selon lesquelles il aurait été victime d'une chute dans les cuisines du porte-avion pendant la période du 30 septembre 2010 au 18 février 2011, et notamment pas le 2 février 2011, d'autant que l'intéressé souffrait déjà de problèmes lombaires avant les faits litigieux ; le syndrome anxio-dépressif, dû à la perte d'un métier qu'il appréciait et à des problèmes familiaux, est une maladie sans lien avec le service ; aucune des deux expertises médicales n'est de nature à établir un lien entre la pathologie lombaire et l'état dépressif d'une part, et un fait précis ou des circonstances particulières de service d'autre part ; - la copie du livret médical, qui est produit en entier, confirme l'absence de chute le 2 février 2011, des problèmes de dos dès décembre 2010, sans mention d'un traumatisme et une chute le 14 février 2011 hors service ; - ce n'est pas à l'administration d'apporter la preuve d'une cause étrangère. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 octobre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Olivier Cotte, - les conclusions de Mme Charlotte Isoard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., quartier-maître de deuxième classe, est entré dans la marine nationale le 23 avril 2007. Il a été radié des contrôles par décision du 14 août 2012 avec effet le 12 septembre 2012, après que la commission de réforme a constaté son inaptitude physique à l'exercice effectif des fonctions afférentes aux emplois de son grade. Le 3 avril 2014, M. A... a sollicité une pension militaire d'invalidité en soutenant que les douleurs au dos et le syndrome anxiodépressif qui ont entraîné son inaptitude physique étaient consécutifs à une chute sur le porte-avion " Charles de Gaulle ", survenue durant son service, entre le 30 septembre 2010 et le 18 février 2011. Par une décision du 26 mars 2019, le ministre des armées a rejeté sa demande. Saisi par M. A..., le tribunal régional des pensions militaires de Saint-Denis a transmis la demande, en application du décret du 28 décembre 2018, au tribunal administratif de la Réunion qui, par un jugement du 14 avril 2021 dont l'intéressé relève appel, a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 26 mars 2019. 2. D'une part, aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 3 de ce code, alors en vigueur : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. / (...) / La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, soit pendant le service accompli au cours de la guerre 1939-1945, soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale, compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 3. D'autre part, aux termes de l'article L. 4 du même code, alors en vigueur : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples. (...) ". 4. En premier lieu, si M. A... soutient que sa lombalgie chronique est due à une chute qui serait survenue le 2 février 2011 durant son service, il résulte de l'instruction, et notamment du recueil chronologique du livret médical, qu'aucun évènement n'a été signalé ce jour-là, que l'intéressé a bien déclaré des douleurs lombaires aigües le 12 février 2011 au réveil, mais sans mentionner de traumatisme à l'origine de celles-ci, qu'il avait auparavant déjà consulté le médecin pour ce motif en décembre 2010 et que la mention d'un lumbago, constaté le 11 avril 2011 et qui aurait été occasionné par une chute sur les fesses huit semaines auparavant, est assortie de la précision " hors service ". Dans ces conditions, en l'absence de tout autre élément, M. A..., qui ne peut se prévaloir de la présomption légale instaurée par l'article L. 3 précité faute de remplir la condition selon laquelle la constatation de la blessure ait eu lieu durant la guerre 1939-1945, une campagne de guerre ou le service militaire, n'établit pas que ses douleurs résulteraient d'une blessure consécutive à un fait précis de service et devraient par suite lui ouvrir un droit à pension. Au surplus, le médecin rhumatologue qui l'a examiné, le 30 janvier 2018, a constaté, au vu notamment d'un examen d'imagerie (IRM), l'absence de séquelle radio-clinique objective. 5. En second lieu, il résulte des mentions du recueil chronologique du livret médical que les premiers signes liés au syndrome anxio-dépressif sont relevés en avril 2011 et reliés à la situation familiale de M. A... et à la garde de son fils, et non à ses douleurs lombaires. L'expertise menée le 31 janvier 2018 par le médecin psychiatre près la commission de réforme a rattaché cette souffrance psychologique, d'une part, à la perte d'un métier qui lui plaisait et, d'autre part, à la perte de sa place d'époux et à la dislocation de la cellule familiale, et a conclu que cet état dépressif modéré prolongé sans caractère post-traumatique était sans lien avec le service. Dans ces conditions, faute d'apporter d'éléments permettant de remettre en cause cette appréciation, M. A... n'établit pas que cette infirmité psychiatrique serait imputable au service. Au surplus, le taux de 15 % n'ouvrirait pas un droit à pension pour cette maladie. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande d'annulation de la décision ministérielle du 26 mars 2019. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 novembre 2023. Le rapporteur, Olivier Cotte La présidente, Catherine Girault La greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02568
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 09/11/2023, 21BX02560, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 7 mai 2019 par laquelle la ministre des armées a refusé de renouveler son indemnité de soins à compter du 1er février 2017 et d'enjoindre à la ministre de réexaminer sa demande. Par un jugement n° 1905582 du 13 avril 2021, le tribunal a annulé la décision du 7 mai 2019 et a enjoint à la ministre des armées de réexaminer la demande de M. B.... Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 15 juin 2021, la ministre des armées demande à la cour d'annuler ce jugement. Elle soutient que : - la demande introductive d'instance présentée par M. B..., qui ne comportait ni conclusions, ni moyens, était irrecevable, et n'a pas pu être régularisée par le mémoire déposé tardivement, le 16 octobre 2020, par l'avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle ; - si la cour estimait que la demande introductive d'instance comportait un moyen de légalité interne, le moyen de légalité externe auquel le tribunal a fait droit était irrecevable dès lors qu'il relevait d'une cause juridique distincte et qu'il a été invoqué après l'expiration du délai de recours contentieux ; le tribunal aurait dû soulever d'office cette irrecevabilité ; - si la cour estimait que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision du 7 mai 2019 était recevable, c'est à tort que le tribunal y a fait droit dès lors que les dispositions de l'article L. 151-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicables à la date de cette décision, prévoyaient seulement la motivation des décisions comportant attribution de pension ; ainsi, le législateur a entendu exclure les autres décisions du champ de l'obligation de motivation, notamment celles rejetant les demandes de pension et l'indemnité de soins aux tuberculeux, et eu égard à ces dispositions spéciales, celles du code des relations entre le public et l'administration relatives à la motivation des décisions administratives n'étaient pas applicables ; le moyen était ainsi inopérant. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., engagé volontaire le 1er avril 1948 et radié des contrôles pour infirmités graves et incurables le 1er avril 1957, était titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive, concédée au taux de 100 % par arrêté du 18 février 2013, avec jouissance à compter du 12 mai 2011, assortie de l'indemnité de soins prévue pour les pensionnés à 100 % pour tuberculose. Le 14 septembre 2017, il a sollicité le renouvellement de cette indemnité. Par une décision du 7 mai 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal des pensions militaires de Bordeaux. L'affaire a été transmise au tribunal administratif de Bordeaux en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018. Par un jugement du 13 avril 2021 dont la ministre des armées relève appel, ce tribunal a annulé la décision du 7 mai 2019 pour défaut de motivation, et a enjoint à l'administration de réexaminer la demande. M. B... est décédé en cours d'instance, l'affaire étant en état d'être jugée. 2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " Dans sa requête sommaire intitulée " recours contre la décision portant suspension d'une indemnité de soins ", enregistrée au greffe du tribunal des pensions militaires de Bordeaux le 12 août 2019, dans le délai de recours contentieux, M. B... a fait valoir qu'il souffrait " jusqu'à ce jour d'une maladie chronique ", la tuberculose, et que son taux d'invalidité était de 100 %. Il doit ainsi être regardé comme s'étant prévalu d'un droit au renouvellement de l'indemnité de soins. Par suite, la demande de première instance n'était pas irrecevable. 3. Toutefois, l'unique moyen de légalité interne invoqué dans la demande introductive d'instance ne relève pas de la même cause juridique que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation, invoqué pour la première fois dans le mémoire enregistré le 16 octobre 2020, postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux. Si le fait que le tribunal n'a pas relevé d'office cette irrecevabilité n'entache pas la régularité du jugement, le ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a fait droit à ce moyen de légalité externe irrecevable. 4. Il y a lieu pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen de légalité interne présenté par M. B... devant le tribunal. 5. Aux termes de l'article L. 41 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Sous réserve qu'il remplisse les conditions définies par décret, tout pensionné à 100 % pour tuberculose a droit à une indemnité de soins. / (...). " Aux termes de l'article D. 8 du même code : " Tout invalide titulaire d'un titre de pension ou d'un titre d'allocation provisoire d'attente de 100 % pour tuberculose a droit, s'il remplit les conditions spécifiées aux articles D. 9 à D. 19, à une indemnité de soins dont le montant annuel est déterminé par l'indice de pension 916. / (...). " Aux termes de l'article D. 9 de ce code : " L'indemnité prévue à l'article D. 8 est servie à l'intéressé jusqu'à sa guérison (...). / Pour l'application du présent chapitre, il y a lieu d'entendre par guérison, non la disparition des lésions, mais la disparition durable des signes et des symptômes d'activité et d'évolution lésionnelles. " 6. M. B... était titulaire d'une pension au taux de 100 % pour l'infirmité de tuberculose pulmonaire bilatérale excavée largement à gauche, maladie contractée en service et constatée le 22 mai 1954. Toutefois, les pièces du dossier, y compris le certificat du médecin pneumologue produit à l'appui de la demande, ne font pas état de symptômes d'activité ou d'évolution lésionnelles de cette maladie, mais seulement de lésions séquellaires. Par suite, M. B... ne pouvait pas prétendre au renouvellement de l'indemnité de soins. 7. Il résulte de ce qui précède que le ministre des armées est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 13 avril 2021, et que la demande présentée par M. B... devant le tribunal doit être rejetée. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 1905582 du 13 avril 2021 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à la succession de M. C... B.... Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02560
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 09/11/2023, 470523, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 juin 2019 établissant le tableau d'avancement pour l'accès au grade de contrôleur de 1ère classe des douanes et droits indirects au titre de l'année 2019, à titre principal, en tant qu'il n'y figure pas ainsi que les arrêtés de promotion et de nomination des contrôleurs des douanes et droits indirects promus au titre de l'année 2019 et, d'autre part, d'annuler la décision de la directrice générale des douanes et droits indirects, révélée par un courriel du 3 juin 2019, refusant de prendre en compte les années de service qu'il a effectuées en qualité de militaire pour le calcul de son ancienneté dans son corps d'accueil. Par un jugement n° 1908630 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 3 juin 2019 et les arrêtés de promotion et de nomination des contrôleurs des douanes et droits indirects promus au titre de l'année 2019, a enjoint à l'administration de réexaminer les candidatures de M. A... et des contrôleurs des douanes et droits indirects promus au titre de l'année 2019 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par un arrêt n° 21PA06082 du 6 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le ministre de l'économie, des finances et de la relance contre ce jugement. Par un pourvoi, enregistré le 16 janvier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la défense ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 95-380 du 10 avril 1995 ; - le décret n° 2008-953 du 12 septembre 2008 ; - le décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Alexandre Adam, maître des requêtes, - les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Poupet et Kacenelenbogen, avocat de M. A... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., militaire de carrière de la marine nationale, a été recruté le 1er mars 1998 en qualité d'agent de constatation stagiaire des douanes et droits indirects au titre des emplois réservés sur le fondement des dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense puis a été titularisé dans le corps des agents de constatation des douanes et droits indirects à compter du 1er mars 1999 et radié des contrôles de l'armée active. Après avoir été admis à l'examen professionnel pour l'accès au corps de contrôleur des douanes et droits indirects et nommé au 11ème échelon du grade de contrôleur des douanes et droits indirects de 2ème classe à compter du 31 décembre 2018, M. A... a postulé au tableau d'avancement pour l'accès au grade de contrôleur de 1ère classe en se prévalant de l'ancienneté qu'il avait acquise en tant que militaire de carrière. Sa candidature n'ayant pas été retenue, M. A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 3 juin 2019 établissant le tableau d'avancement pour l'accès au grade de contrôleur de 1ère classe des douanes et droits indirects au titre de l'année 2019 ainsi que les arrêtés de promotion et de nomination des contrôleurs des douanes et droits indirects promus au titre de l'année 2019, et d'enjoindre à l'administration de réexaminer l'ensemble des candidatures au grade de contrôleur de 1ère classe au titre de l'année 2019. Par un jugement du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 décembre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement. 2. Aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense : " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre./ En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B ". 3. Aux termes de l'article 1er du décret du 10 avril 1995 portant statut particulier du corps des contrôleurs des douanes et droits indirects : " Le corps des contrôleurs des douanes et droits indirects, classé dans la catégorie B prévue à l'article L. 411-2 du code général de la fonction publique, est régi par les dispositions du décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat et par celles du présent décret ". Aux termes du I de l'article 18 du même décret : " Les conditions d'accès au grade de contrôleur des douanes et droits indirects de 1ère classe (...) sont fixées conformément aux dispositions de l'article 25 du décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat ". Aux termes du I de l'article 25 du décret du 11 novembre 2009 dans sa rédaction alors applicable : "Peuvent être promus au deuxième grade de l'un des corps régis par le présent décret :/ (...) 2° Par la voie du choix, après inscription sur un tableau d'avancement établi après avis de la commission administrative paritaire, les fonctionnaires justifiant d'au moins un an dans le 6e échelon du premier grade et justifiant d'au moins cinq années de services effectifs dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau (...) ". 4. Il résulte des dispositions citées au point 3 que pour pouvoir être inscrits sur le tableau d'avancement prévu au I de l'article 25 du décret du 11 novembre 2009, les agents appartenant au corps des contrôleurs des douanes et droits indirects doivent justifier d'au moins cinq ans de services effectifs accomplis en qualité de fonctionnaire dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau. 5. Ni les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense, citées au point 2, ni aucune autre disposition législative ou règlementaire ne prévoit que lorsque qu'un militaire est intégré dans la fonction publique en étant recruté sur un emploi réservé selon la procédure prévue par l'article L. 4139-3, l'appréciation de la durée de service exigée pour l'avancement dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil doit inclure les services qu'il a antérieurement accomplis en tant que militaire. Par suite, en jugeant que, pour apprécier la durée des services accomplis par M. A... dans le corps des contrôleurs des douanes et droits indirects, l'administration devait tenir compte des services militaires accomplis par l'intéressé avant son recrutement sur un emploi réservé de catégorie C, la cour a commis une erreur de droit. Dès lors, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 6 décembre 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris. Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A.... ECLI:FR:CECHR:2023:470523.20231109
Conseil d'Etat