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CAA de DOUAI, 3ème chambre, 06/04/2023, 22DA00481, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé, par deux requêtes distinctes, au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision n° 455 du 29 mai 2019 par laquelle La Poste l'a placé en congé de maladie ordinaire du 12 avril 2012 au 11 avril 2013 puis en disponibilité maladie du 12 avril 2013 au 11 avril 2017, ensemble la décision implicite portant rejet de son recours gracieux, de désigner un expert pour notamment dire quelle était la nature du congé maladie dont il devait bénéficier à compter du 12 avril 2012 et s'il était apte à reprendre ses fonctions ou d'autres fonctions à l'issue notamment de ses droits à congé maladie, d'annuler la décision n° 239-005 du 26 août 2020 par laquelle la directrice générale adjointe, directrice des ressources humaines et des relations sociales du groupe La Poste l'a admis d'office à compter du 12 avril 2017 à faire valoir ses droits à la retraite au titre des articles L. 29 et L. 24, I, 2°, du code des pensions civiles et militaires de retraite, d'enjoindre à La Poste de réexaminer sa situation et de mettre dans chacune des deux instances à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement commun n° 1910440 et 2008530 du 24 décembre 2021 le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 28 février, 14 novembre, 16 décembre 2022 et 23 janvier 2023, M. B... A..., représenté par Me Fillieux, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'ordonner une expertise médicale sur son aptitude à reprendre ses fonctions ; 3°) d'annuler la décision n° 455 du 29 mai 2019 par laquelle La Poste l'a placé en congé de maladie ordinaire du 12 avril 2012 au 11 avril 2013 puis en disponibilité maladie du 12 avril 2013 au 11 avril 2017, ensemble la décision implicite portant rejet de son recours gracieux ; 4°) d'annuler la décision n° 239-005 du 26 août 2020 par laquelle la directrice générale adjointe, directrice des ressources humaines et des relations sociales du groupe La Poste l'a admis d'office à compter du 12 avril 2017 à faire valoir ses droits à la retraite au titre des articles L. 29 et L. 24, I, 2°, du code des pensions civiles et militaires de retraite ; 5°) d'enjoindre à La Poste de réexaminer sa situation ; 6°) de mettre à la charge de La Poste la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'expertise sollicitée auprès du tribunal, refusée sans motif explicite, apparaît particulièrement utile compte-tenu des avis médicaux contradictoires s'agissant de son aptitude à reprendre ses fonctions ou au contraire son inaptitude à toutes fonctions ; - il aurait dû être placé en congé de longue maladie dès le 28 novembre 2011, au titre de la maladie mentale, puis, à l'issue de ce congé, en congé de longue durée ; - il avait la possibilité de prétendre au bénéfice d'un temps partiel thérapeutique et était apte à la reprise de ses fonctions ; - La Poste ne pouvait le placer en disponibilité sans l'avoir préalablement invité à présenter une demande de reclassement et sans avoir recherché à procéder à un tel reclassement ; - la décision du 26 août 2020 est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il ne se trouvait pas dans l'incapacité permanente d'exercer ses fonctions ; - le tribunal administratif a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'avait pas contesté l'avis du comité médial du 13 juillet 2018. Par des mémoires en défense enregistrés les 24 octobre, 30 novembre 2022 et 6 janvier 2023, La Poste, représentée par Me Bellanger, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la demande d'expertise sollicitée par l'appelant est dépourvue de toute utilité dès lors que celui-ci a déjà été examiné par plusieurs médecins experts ayant unanimement conclu à son inaptitude définitive à toutes fonctions jusqu'à sa mise à la retraite anticipée ; - les moyens soulevés par M. A... sont infondés. Par lettre du 14 mars 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de ce que dans l'hypothèse où la cour annulerait la décision n° 455 du 29 mai 2019 de placement en congé de maladie ordinaire du 12 avril 2012 au 11 avril 2013 puis en disponibilité maladie du 12 avril 2013 au 11 avril 2017, la décision n° 239-005 du 26 août 2020 admettant d'office à compter du 12 avril 2017 l'intéressé à faire valoir ses droits à la retraite serait annulée par voie de conséquence. Par ordonnance du 26 janvier 2023 la date de clôture de l'instruction a été fixée au 13 février 2023 à 12 heures. La Poste, représentée par Me Bellanger, a produit une note en délibéré le 23 mars 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public, - et les observations de Me Anger Bourez pour M. A... et de Me Gueutier pour La Poste. Considérant ce qui suit : 1. M. B... A... était employé par La Poste en qualité d'agent technique et de gestion de niveau 2, occupant les fonctions de guichetier confirmé au sein d'un bureau de poste. Par un avis du 13 juillet 2018, le comité médical de La Poste a estimé qu'il devait être placé en congé de maladie ordinaire du 12 avril 2012 au 11 avril 2013, suivi d'une mise en disponibilité à compter du 12 avril 2013. Il s'est prononcé en faveur de l'inaptitude définitive de M. A... à toutes fonctions. Par une décision du 29 mai 2019, La Poste a placé M. A... en congé de maladie ordinaire puis en disponibilité pour ces périodes. La commission de réforme de La Poste a émis deux avis favorables à la mise à la retraite d'office de M. A... pour invalidité les 18 juin 2019 et 15 octobre 2019. Par une décision n° 239-005 du 26 août 2020, la directrice générale adjointe du groupe La Poste a admis d'office M. A... à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 12 avril 2017. Par un jugement du 24 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 29 mai 2019 et de la décision implicite par laquelle La Poste a rejeté son recours administratif formé à l'encontre de cette décision, ainsi que de la décision du 26 août 2020. M. A... relève appel de ce jugement. Sur la régularité du jugement : 2. Le tribunal administratif, qui avait préalablement estimé au vu des moyens et des pièces dont il était saisi que La Poste avait valablement pu admettre d'office M. A... à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité à compter du 12 avril 2017, a pu, sans entacher son jugement d'irrégularité, rejeter ses conclusions tendant à la désignation d'un expert dès lors qu'il résultait nécessairement du jugement qu'une telle expertise était dépourvue d'utilité. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 29 mai 2019 : 3. Aux termes de l'article 9 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le comité médical supérieur, saisi par l'autorité administrative compétente, soit de son initiative, soit à la demande du fonctionnaire, peut être consulté sur les cas dans lesquels l'avis donné en premier ressort par le comité médical compétent est contesté ". Aux termes de l'article 27 du même décret : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable, s'il ne bénéficie pas de la période de préparation au reclassement prévue par le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. (...) ". 4. Comme indiqué au point 1, par un avis du 13 juillet 2018, le comité médical a émis un avis d'inaptitude définitive. Par un courrier du 29 juin 2018 avertissant M. A... de la réunion de ce comité médical, M. A... avait été informé de la possibilité de contester l'avis à intervenir. Dans cette hypothèse, La Poste l'invitait à lui " faire parvenir dans les meilleurs délais [sa] requête ". Par un courriel du 19 août 2018, après en avoir confirmé la réception le 11 août 2018, M. A... a expressément contesté l'avis du comité médical. En réponse, par un courriel du 29 août 2018, la chargée des relations humaines a pris acte de son souhait de contester cet avis et lui a indiqué qu'il serait informé de la suite accordée à [sa] demande ". Toutefois, le comité médical supérieur n'a jamais été consulté. Dans les circonstances de l'espèce, l'administration devait saisir le comité médical supérieur et ne pouvait se prononcer sur la situation de M. A... avant de recueillir l'avis de ce comité. Une telle omission de consultation préalable du comité médical supérieur a privé M. A... d'une garantie et constitue une irrégularité de nature à entacher la légalité de la décision attaquée. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision du 29 mai 2019, ensemble le rejet de son recours gracieux, et du jugement attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions précitées. En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 26 août 2020 : 5. En premier lieu, la décision n° 239-005 du 26 août 2020 de la directrice générale adjointe, directrice des ressources humaines et des relations sociales du groupe La Poste a admis d'office M. A... à compter à faire valoir ses droits à la retraite du 12 avril 2017, au titre des articles L. 29 et L. 24, I, 2°, du code des pensions civiles et militaires de retraite. M. A... invoque des vices de procédure dont serait entaché l'avis du comité médical du 13 juillet 2018. Toutefois cet avis n'est pas visé par la décision précitée du 26 août 2020 qui se fonde sur les avis de la commission de réforme des 18 juin 2019 et 18 février 2020. Par suite, le moyen précité doit être écarté comme étant inopérant. 6. En deuxième lieu, si M. A... soutient que les avis émis par la commission de réforme les 18 juin 2019 et 18 février 2020 révèlent l'absence de sérieux et d'intérêt des praticiens l'ayant examiné il n'apporte aucun élément probant au soutien de ses affirmations. Les circonstances qu'un médecin n'a signé le procès-verbal de la réunion du 18 juin 2019 que le 29 juillet 2019 et indiqué n'avoir pas de remarques particulières à apporter et qu'un autre aurait indiqué, par courrier manuscrit, être opposé à la demande de contre-expertise sollicitée, sont sans incidence sur la régularité de ces avis. 7. En troisième lieu, M. A... soutient que la décision du 26 août 2020 est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il ne se trouvait pas dans l'incapacité permanente d'exercer des fonctions et qu'il avait la possibilité de prétendre au bénéfice d'un temps partiel thérapeutique et était apte à la reprise de ses fonctions. Toutefois il ressort des rapports d'examen psychiatrique des 9 avril 2018, 21 février et 9 décembre 2019 que le praticien a, notamment, relevé que l'état de santé de l'intéressé était dominé par un trouble dépressif avec un trouble obsessionnel compulsif associé à une alcoolo-dépendance et une poly-neuropathie carentielle. Les avis médicaux établis entre les mois de juin 2018 et février 2019 produits par M. A... ne permettent pas de remettre en cause les rapports circonstanciés d'examen psychiatrique et les avis du comité médical et de la commission de réforme précités. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit être écarté. 8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 24 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 mai 2019. En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction : 9. Compte tenu du motif d'annulation de la décision du 29 mai 2019 retenu au point 7, il y a lieu d'enjoindre à La Poste de procéder au réexamen de la situation administrative de M. A... concernant la période du 12 avril 2012 au 11 avril 2017. Sur les frais d'instance : 10. Aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de La Poste le paiement de la somme de 1 500 euros qui sera versée à M. A... en application des dispositions précitées. En revanche les conclusions de La Poste tendant à la condamnation de M. A... sur le fondement des mêmes dispositions doivent être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La décision du 29 mai 2019 de La Poste, ensemble le rejet du recours gracieux de M. A..., ainsi que le jugement du 24 décembre 2021 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il statue sur les conclusions dirigées à l'encontre de ces décisions sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à La Poste de réexaminer la situation administrative de M. A... pour la période du 12 avril 2012 au 11 avril 2017. Article 3 : La Poste versera la somme de 1 500 euros à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. A... et les conclusions présentées par La Poste sont rejetés. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à La Poste. Délibéré après l'audience publique du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, - M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, - M. Frédéric Malfoy, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2023. Le président-rapporteur, Signé : M. C... La présidente de chambre, Signé : G. Borot La greffière, Signé : C Huls-Carlier La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme La greffière, C. Huls-Carlier 2 N° 22DA00481
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 06/04/2023, 21BX04583, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner l'Etat à lui verser la somme de 35 000 euros en réparation des préjudices causés par sa perte d'audition due à l'exposition au bruit dans l'exercice de ses fonctions. Par un jugement n° 1604919 du 19 novembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 19BX00464 du 12 novembre 2020, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement. Par une décision n° 448614 du 17 décembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Bordeaux. Procédure devant la cour : Par un mémoire récapitulatif enregistré le 16 mai 2022 et un mémoire enregistré le 11 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Moumni, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 novembre 2018 ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 37 500 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 22 février 2016 en réparation des préjudices que lui a causé la perte d'audition ont il a été victime ; 3°) subsidiairement de nommer, avant dire droit, un expert médical pour fixer l'étendue de ses préjudices ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance. Il soutient que : - sa demande d'indemnisation n'était pas tardive ; - la date de consolidation de son état de santé ne correspond pas à la date à laquelle il a été radié des contrôles des armées ni à celle à laquelle le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Nouméa a fixé son droit à pension mais doit seulement être regardée comme acquise au 21 décembre 2018 ; - il justifie de la réalité et du montant de ses préjudices. Par un mémoire enregistré le 13 juin 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que la demande d'indemnisation présentée par l'intéressé est tardive dès lors que son état de santé est consolidé depuis le 1er septembre 1992 ou, au plus tard, à compter de l'audiogramme réalisé le 8 mars 2001. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., né le 30 août 1944, a servi dans l'armée de l'air du 1er octobre 1962 au 1er septembre 1992. Mécanicien logistique technique, il a été affecté, du mois de janvier 1973 au mois d'octobre 1982, au Groupement d'entretien et de réparation des matériels aériens spécialisés (GERMAS) à Istres puis, de 1987 à 1992, à la base aérienne de Bordeaux-Mérignac. Dans l'exercice de ces fonctions, il a été exposé au bruit des réacteurs d'avions gros porteurs, ce qui lui a causé une hypoacousie bilatérale de perception pour laquelle il a bénéficié d'une pension militaire d'invalidité fixée au taux de 10 % par une décision du 17 mars 1993 du tribunal des pensions de Montpellier, ensuite porté à 25 % puis, finalement, à 100 % par un jugement du 8 avril 2013 du tribunal des pensions de Nouméa. Sa demande tendant à l'indemnisation de ses préjudices non réparés par cette pension, reçue par l'administration le 24 février 2016, a été implicitement rejetée, de même que le recours qu'il a formé le 3 juin 2016 devant la commission des recours des militaires. Par un jugement du 19 novembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 35 000 euros en réparation de ces préjudices. Par un arrêt du 12 novembre 2020, la cour a rejeté l'appel formé par M. B... contre cet arrêt. Par une décision n° 448614 du 17 décembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour. Sur la prescription quadriennale : 2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public ". S'agissant d'une créance indemnitaire détenue sur une collectivité publique au titre d'un dommage corporel engageant sa responsabilité, le point de départ du délai de prescription prévu par ces dispositions est le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les infirmités liées à ce dommage ont été consolidées. 3. D'une part, il résulte de l'instruction, en particulier, du rapport d'expertise judiciaire du 22 avril 2011, que l'hypoacousie dont souffre M. B... " continue à évoluer malgré la cessation de l'exposition ; les études récentes confirment que plusieurs phénomènes concourent à ces effets " et que cette aggravation " est en relation médicale directe et déterminante avec l'infirmité indemnisée au taux de 25% de l'hypoacousie bilatérale de perception ". En outre, le rapport d'expertise médicale non contradictoire réalisé par un médecin du ministère des armées le 15 mai 2017 indique qu'" il existe une véritable déchéance cochléaire qui se poursuit longtemps après le retrait du milieu bruyant. " Il résulte de ces éléments que l'aggravation sévère de l'hypoacousie de M. B... entre 1992 et 2017 n'est pas due au seul vieillissement de l'intéressé mais est directement liée au traumatisme sonore subi au cours de ses années de service. Dans ces conditions, le ministre des armées n'est pas fondé à soutenir que l'état de santé de M. B... doit être regardé comme consolidé au 1er septembre 1992, date de fin d'exposition au bruit des réacteurs d'avions gros porteurs, et ne peut pas utilement se prévaloir, à cet égard, des mentions figurant au tableau des maladies professionnelles 4. D'autre part, il résulte des expertises ci-dessus mentionnées que M. B... souffrait d'une perte auditive mesurée entre 85 et 92 décibels en 2001 et 2002 puis à 105 décibels des deux cotés en 2017. Par suite, eu égard au caractère évolutif de cette hypoacousie et des dommages qui en ont résulté au cours de cette période, le ministre des armées n'est pas davantage fondé à soutenir que l'infirmité de M. B... doit être regardée comme consolidée, au plus tard, à la date du rapport d'expertise médicale du 7 décembre 2001 ou de l'audiogramme réalisé le 8 mars 2002. 5. Enfin, eu égard à ce qui a été dit précédemment, et ainsi que le soutient l'appelant, c'est également à tort que le tribunal administratif a considéré que cette hypoacousie devait être regardée comme consolidée à compter du 29 mai 2009, date de la saisine du tribunal des pensions militaires alors, au demeurant, qu'il ressort de la décision susmentionnée du Conseil d'Etat du 17 décembre 2021 que cette saisine aurait eu pour effet d'interrompre une éventuelle prescription. 6. Il résulte de ce qui précède que le délai de prescription quadriennale n'a pas pu courir avant la consolidation de l'infirmité, médicalement constatée le 21 décembre 2018. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la prescription quadriennale était acquise le 22 février 2016, date de la réclamation indemnitaire présentée par M. B.... Sur la réparation des préjudices : 7. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...) " ; 8. En instituant la pension militaire d'invalidité, le législateur a entendu déterminer forfaitairement la réparation à laquelle les militaires victimes d'un accident de service peuvent prétendre, au titre de l'atteinte qu'ils ont subie dans leur intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe à l'Etat de les garantir contre les risques qu'ils courent dans l'exercice de leur mission. Toutefois, si le titulaire d'une pension a subi, du fait de l'infirmité imputable au service, d'autres préjudices que ceux que cette prestation a pour objet de réparer, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ces préjudices. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre l'Etat, dans le cas notamment où l'accident serait imputable à une faute de nature à engager sa responsabilité. 9. Eu égard à la finalité qui lui est assignée par les dispositions alors applicables de l'article L. 1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et aux éléments entrant dans la détermination de son montant, tels qu'ils résultent des dispositions des articles alors en vigueur L. 8 bis à L. 40 du même code, la pension militaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer, d'une part, les pertes de revenus et l'incidence professionnelle de l'incapacité physique et, d'autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l'ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de la vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, à l'exclusion des souffrances éprouvées avant la consolidation, du préjudice esthétique, du préjudice sexuel, du préjudice d'agrément lié à l'impossibilité de continuer à pratiquer une activité spécifique, sportive ou de loisirs, et du préjudice d'établissement lié à l'impossibilité de fonder une famille. Lorsqu'elle est assortie de la majoration prévue à l'article L. 18 du code, la pension a également pour objet la prise en charge des frais afférents à l'assistance par une tierce personne. 10. En l'espèce, M. B..., qui ne fonde pas son action indemnitaire sur une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, n'a pas droit à la réparation intégrale de son dommage, il peut néanmoins prétendre, comme indiqué au point 8 du présent arrêt, au titre de la garantie contre les risques courus dans l'exercice des fonctions, à une indemnité complémentaire égale au montant des préjudices qu'il a subis du fait de l'infirmité imputable au service, distincts de ceux que sa pension d'invalidité a pour objet de réparer. 11. En premier lieu, l'hypoacousie dont souffre M. B... présentait, dès l'année 2001, un caractère sévère et n'a cessé, depuis lors, de s'aggraver jusqu'à sa consolidation. Elle a progressivement compromis sa capacité à entretenir des relations sociales et à communiquer avec ses proches, ce qui a entraîné, au vu des pièces du dossier, un isolement social mais aussi familial important, à l'origine de souffrances morales significatives pendant près de vingt ans. Il sera fait une juste appréciation de ces souffrances morales en les évaluant à la somme de 5 000 euros. 12. En deuxième lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément permanent de M. B..., privé de très nombreuses activités de loisirs et culturelles, préjudice que l'expert du ministère des armées a évalué à 6 sur une échelle allant jusqu'à 7, en l'évaluant à la somme de 10 000 euros. 13. En troisième lieu, il sera fait une juste appréciation du préjudice esthétique de l'appelant, évalué à 1 sur une échelle allant jusqu'à 7, en allouant à l'intéressé une somme de 1 000 euros. 14. Enfin, il résulte de ce qui a été dit au point 9 du présent arrêt que la pension militaire d'invalidité dont bénéficie M. B... a, notamment, pour objet de réparer forfaitairement les troubles dans ses conditions d'existence. Par suite, ses conclusions tendant à l'indemnisation de ce chef de préjudice ne peuvent qu'être rejetées. 15. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelant est seulement fondé à demander que l'Etat soit condamné à lui verser la somme totale de 16 000 euros en réparation des préjudices causés par son exposition au bruit dans l'exercice de ses fonctions et qui n'ont pas déjà été réparés par la pension militaire d'invalidité dont il bénéficie. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2016, date à laquelle l'administration a reçu sa demande indemnitaire préalable. 16. Par ailleurs, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif du tribunal administratif de Bordeaux du 19 novembre 2018 est annulé. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. B... une somme totale de 16 000 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2016. Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient : Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente, M. Manuel Bourgeois, premier conseiller, Mme Agnès Bourjol, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2023. Le rapporteur, Manuel C... La présidente, Marie-Pierre Beuve DupuyLa greffière, Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21BX04583 2
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 30/03/2023, 460907
Vu la procédure suivante : Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle le président du conseil départemental du Var a rejeté sa demande du 4 septembre 2017 tendant à l'attribution de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2015 et de condamner le département du Var à lui verser cette allocation à compter de cette date. Par un jugement n° 1800904 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande. Par une ordonnance n° 21MA00976 du 25 janvier 2022, enregistrée le 28 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 15 mars 2021 au greffe de cette cour, présenté par Mme A.... Par ce pourvoi et un nouveau mémoire, enregistré le 15 juin 2022, Mme A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge du département du Var la somme de 3 000 euros, à verser à la SARL Didier, Pinet, son avocat, au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code du travail ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'arrêté du 25 juin 2014 portant agrément de la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage et les textes qui lui sont associés ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Ariane Piana-Rogez, auditrice, - les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet François Pinet, avocat de Mme B... et à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat du département du Var ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., adjointe technique territoriale de 1ère classe au sein des services du département du Var, a été placée en congé de longue durée à compter du 1er juin 2010. Par un courrier du 15 septembre 2014, elle a sollicité du président du conseil départemental du Var la prolongation de son congé de longue durée jusqu'au 15 août 2015 puis son admission à la retraite anticipée pour invalidité à compter du 1er septembre 2015. Par un arrêté du 7 août 2015 du président du conseil départemental du Var, pris après un avis de la commission départementale de réforme de la fonction publique territoriale du 26 février 2015 ayant conclu à une inaptitude définitive et absolue à ses fonctions ainsi qu'à toutes fonctions et un avis favorable de la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales du 31 juillet 2015 ayant conclu à la mise à la retraite anticipée de l'intéressée au motif d'un taux global d'invalidité de 50 % et à ce que la pension à verser ne soit pas assortie d'une rente d'invalidité, Mme A... a été radiée des cadres à compter du 1er septembre 2015 pour invalidité et admise à la retraite anticipée. Mme A... s'est ensuite inscrite sur la liste des demandeurs d'emploi à compter du 29 décembre 2015. Par un courrier du 4 septembre 2017, elle a demandé au président du conseil départemental du Var de lui accorder le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Une décision implicite de rejet de cette demande est née le 7 novembre 2017 du silence gardé par ce dernier. Eu égard aux moyens qu'elle invoque, Mme A... doit être regardée comme demandant l'annulation du jugement du 16 octobre 2020 du tribunal administratif de Toulon en tant que, par son article 2, il rejette ses conclusions tendant à ce que le département du Var lui accorde le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2015. 2. Aux termes de l'article L. 5421-1 du code du travail : " En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi (...), aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre ". L'article 1er du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage agréée par l'arrêté du 25 juin 2014 du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social, applicable au litige, prévoit que : " Le régime d'assurance chômage assure un revenu de remplacement dénommé allocation d'aide au retour à l'emploi, pendant une durée déterminée, aux salariés involontairement privés d'emploi qui remplissent des conditions d'activité désignées période d'affiliation, ainsi que des conditions d'âge, d'aptitude physique, de chômage, d'inscription comme demandeur d'emploi, de recherche d'emploi ". Ces dispositions sont applicables aux agents des collectivités territoriales dans les conditions prévues par l'article L. 5424-1 du code du travail. Il appartient aux collectivités territoriales qui assurent la charge et la gestion de l'indemnisation de leurs agents en matière d'allocation d'aide au retour à l'emploi de s'assurer, lorsqu'ils demandent le bénéfice de cette allocation, qu'ils remplissent l'ensemble des conditions auxquelles son versement est subordonné. 3. Si l'ouverture du droit à l'allocation d'aide au retour à l'emploi sollicité par Mme A... était subordonnée à la condition, prévue à l'article L. 5421-1 du code du travail et reprise à l'article 1er du règlement annexé à la convention du 14 mai 2014, qu'elle soit physiquement apte au travail, cette condition, dont le contrôle relève, en vertu de l'article R. 5426-1 de ce code, de la compétence du préfet, était satisfaite aussi longtemps qu'elle demeurait inscrite sur la liste des demandeurs d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-1 du même code, sur laquelle, en vertu de l'article L. 5411-5 du code du travail, ne peuvent être inscrites, pendant la durée de leur incapacité, les personnes invalides mentionnées aux 2° et 3° de l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale, c'est-à-dire " absolument incapables d'exercer une profession ", bénéficiaires à ce titre d'un avantage social lié à une incapacité totale de travail. Ainsi, le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant que Mme A... ne justifiait pas qu'elle remplissait la condition d'aptitude à l'emploi en se prévalant de son inscription sur la liste des demandeurs d'emploi, alors même qu'elle ne produisait pas de pièce médicale et que la commission de réforme de la fonction publique territoriale avait émis le 26 février 2015 un avis favorable à sa mise à la retraite anticipée pour invalidité au motif qu'elle présentait une inaptitude définitive et absolue à l'exercice de toute fonction dans la fonction publique. 4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, Mme A... est fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement qu'elle attaque. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, dans la mesure de la cassation prononcée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 6. Lorsqu'il statue sur un recours dirigé contre une décision par laquelle l'administration, sans remettre en cause des versements déjà effectués, détermine les droits d'une personne en matière d'aide ou d'action sociale, de logement ou au titre des dispositions en faveur des travailleurs privés d'emploi, et sous réserve du contentieux du droit au logement opposable, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention qu'à sa qualité de juge de plein contentieux, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d'examiner les droits de l'intéressé, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction et, notamment, du dossier qui lui est communiqué en application de l'article R. 772-8 du code de justice administrative. Au vu de ces éléments, il lui appartient d'annuler ou de réformer, s'il y a lieu, cette décision, en fixant alors lui-même tout ou partie des droits de l'intéressé et en le renvoyant, au besoin, devant l'administration afin qu'elle procède à cette fixation pour le surplus, sur la base des motifs de son jugement. Dans le cas d'un contentieux portant sur les droits au revenu de remplacement des travailleurs privés d'emploi, c'est au regard des dispositions applicables et de la situation de fait existant au cours de la période en litige que le juge doit statuer. 7. D'une part, si, ainsi qu'il a été dit au point 2, les agents des collectivités territoriales ont droit à une allocation d'assurance dans les conditions prévues par l'article L. 5424-1 du code du travail, le droit à cette allocation est, aux termes de l'article L. 5422-1 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige, de même qu'en vertu de l'article 1er du règlement général annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l'indemnisation du chômage, ouvert aux seuls " travailleurs involontairement privés d'emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement ". 8. D'autre part, aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) " et aux termes du premier alinéa de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande ". Il résulte de ces dispositions que seule la mise à la retraite d'office constitue un cas de perte involontaire d'emploi pouvant ouvrir droit, pour un agent des collectivités territoriales, lorsque les autres conditions en sont remplies, à une allocation d'assurance telle que prévue à l'article L. 5424-1 du code du travail. 9. En l'espèce, il résulte de l'instruction que Mme A... a sollicité auprès du président du conseil départemental du Var, par courrier du 15 septembre 2014, son admission à la retraite anticipée pour invalidité à compter du 1er septembre 2015. Ainsi, il résulte de ce qui a été dit aux points 7 et 8 que Mme A..., qui ne peut être regardée comme ayant été involontairement privée d'emploi, ne peut prétendre à l'allocation de retour à l'emploi sollicitée. 10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par le département du Var, que les conclusions de la demande de Mme A..., présentées devant le tribunal administratif de Toulon, tendant à ce que le département du Var lui accorde le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2015 doivent être rejetées. 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département du Var, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme que ce département demande au titre des mêmes dispositions.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'article 2 du jugement du 16 octobre 2020 du tribunal administratif de Toulon est annulé. Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme A..., présentées devant le tribunal administratif de Toulon, tendant à ce que le département du Var lui accorde le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 1er septembre 2015 et celles présentées, tant devant ce tribunal que devant le Conseil d'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées. Article 3 : Les conclusions présentées par le département du Var au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B... épouse A... et au département du Var. Délibéré à l'issue de la séance du 15 mars 2023 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Alain Seban, M. Jean-Luc Nevache, M. Damien Botteghi, M. Alban de Nervaux, M. Jérôme Marchand-Arvier, conseillers d'Etat et Mme Ariane Piana-Rogez, auditrice-rapporteure. Rendu le 30 mars 2023. Le président : Signé : M. Jacques-Henri Stahl La rapporteure : Signé : Mme Ariane Piana-Rogez Le secrétaire : Signé : M. Hervé HerberECLI:FR:CECHR:2023:460907.20230330
Conseil d'Etat
CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 07/04/2023, 21MA01499, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision implicite par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande du 22 mai 2018 tendant à la régularisation de ses droits à pension. Par une ordonnance n° 1803626 du 18 février 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 avril 2021 et 21 mars 2022, sous le n° 21MA01499, M. B..., représenté par Me Hollet, demande à la Cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulon du 18 février 2021 ; 2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande du 22 mai 2018 ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 316 512,98 euros correspondant à 12 ans et 2 mois d'arriérés de pension de retraite pour la période courant du 8 octobre 1991 au 31 décembre 2003 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - sa requête est recevable ; - la créance s'est poursuivie dans le temps et n'est pas prescrite ; - le premier juge a estimé à tort que son moyen n'était manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier son bien-fondé ; - il a été mis hors de cause pour les faits ayant justifié la décision de suspension de ses droits à pension par une ordonnance du tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion ; - la somme de 316 512 98 euros correspond à 12 ans et 2 mois d'arriérés de pension de retraite pour la période courant du 8 octobre 1991 au 31 décembre 2003. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2022, la ministre des armées conclut au rejet de la requête de M. B.... Elle fait valoir que : - la requête est irrecevable en raison de sa tardiveté ; - la créance est prescrite en application de la loi du 31 décembre 1968 ; - les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., capitaine au sein des troupes de marine en service au 53ème bataillon de commandement et des services, occupait les fonctions de chef du district interarmées des forces armées de la zone sud de l'océan Indien à Saint-Denis de la Réunion. Il a été suspendu de ses fonctions le 9 avril 1990 pour avoir été soupçonné de détournement de deniers de l'Etat. Il a été placé, sur sa demande, en position de retraite et rayé des contrôles de l'armée active à compter du 5 juin 1990. Par décision du 8 octobre 1991, le droit à jouissance de sa pension militaire de retraite a été suspendu. Par une ordonnance du 1er juillet 1996, le tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion a prononcé un non-lieu à statuer sur les faits reprochés au requérant. Par une décision n° 130290 du 28 février 1997, le Conseil d'Etat a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 8 octobre 1991 précitée. Le requérant a sollicité de la ministre des armées la régularisation ses droits à pension par un courrier du 22 mai 2018 qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. M. B... relève appel de l'ordonnance du 18 février 2021 par laquelle le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de rejet. Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens (...) qui (...) ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ". 3. A l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Toulon, M. B... a soutenu que le juge judiciaire a prononcé un non-lieu le 1er juillet 1996, estimant qu'il n'existait pas de charges suffisantes d'avoir commis les faits reprochés, sous les qualifications de faux et usage de faux, escroqueries, complicité de faux et escroqueries, et recels et qu'il a été mis hors de cause pour les faits qui lui ont été reprochés par le ministre de la défense lors de sa suspension de droit à pension par une ordonnance du 8 octobre 1991. Il ajoutait que cette suspension n'étant à ce jour aucunement justifiée, il était pleinement en droit de demander une régularisation de ses droits à pension de retraite. Il a également produit à l'appui de sa requête une ordonnance de non-lieu du 1er juillet 1996 du tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion. Ainsi, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a estimé que ce moyen n'était manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé et a rejeté sa requête sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Par suite, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée. 4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon et devant la Cour. Sur l'exception de prescription quadriennale opposée par la ministre des armées : 5. Aux termes du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'État, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : / (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; / (...) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée. ". Aux termes de l'article 6 du même texte : " Les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi. ". Aux termes du premier alinéa de son article 7 : " L'Administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond. ". 6. Aux termes de l'article L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa version abrogée par l'article 65 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 à compter du 1er janvier 2004 : " Le droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension et de la rente viagère d'invalidité est également suspendu à l'égard de tout bénéficiaire du présent code qui aura été révoqué ou mis à la retraite d'office (...) et pour avoir été reconnu coupable de détournement soit de deniers de l'Etat, des départements, des communes ou établissements publics, soit de dépôts de fonds particuliers versés à sa caisse ou de matières reçues et dont il doit rendre compte. (...) La même disposition est applicable, pour des faits qui auraient été de nature à entraîner la révocation ou la mise à la retraite d'office, lorsque les faits sont révélés ou qualifiés après la cessation de l'activité. Dans tous les cas, l'organisme disciplinaire compétent est appelé à donner son avis sur l'existence et la qualification des faits. ". 7. Il résulte de l'instruction que par une décision du 8 octobre 1991, le ministre de la défense a suspendu le droit à jouissance de la pension militaire de retraite de M. B... sur le fondement de l'article L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite au motif que les faits reprochés à l'intéressé ont été qualifiés de détournement de deniers de l'Etat à la suite de l'avis du conseil d'enquête du 19 juin 1991. En outre, par une ordonnance du 1er juillet 1996, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion a prononcé un non-lieu en raison de ce que les faits reprochés à M. B... étaient atteints par la prescription. Par une décision n° 130290 du 28 février 1997, le Conseil d'Etat a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 8 octobre 1991 précitée. A la suite de l'abrogation de l'article L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite par l'article 65 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, le requérant a perçu une pension à compter du 1er juillet 2004. Toutefois, ce n'est que par un courrier du 22 mai 2018 que M. B... a demandé à la ministre des armées la régularisation ses droits à pension alors que le jugement de relaxe qu'il invoque date du 1er juillet 1996 et que la loi lui permettant de bénéficier d'une pension depuis le 1er janvier 2014 a été votée le 21 août 2003. Par suite et en application de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, cette demande relative à la période du 8 octobre 1991 au 31 décembre 2003 était prescrite à la date à laquelle elle a été effectuée. 8. Il résulte de tout ce qui précède sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande du 22 mai 2018 tendant à la régularisation de ses droits à pension et la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 316 512,98 euros. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : L'ordonnance du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulon du 18 février 2021 est annulée. Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Toulon et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 24 mars 2023, où siégeaient : - Mme Chenal-Peter, présidente de chambre, - Mme Ciréfice, présidente assesseure, - Mme Marchessaux, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2023. 2 N° 21MA01499 fa
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 4ème chambre, 31/03/2023, 22PA02712, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés des 11 juillet, 9 août et 3 octobre 2019 par lesquels le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis l'a placée en congé de maladie ordinaire, à plein traitement du 25 au 27 mai 2019 puis à demi-traitement du 28 mai au 27 septembre 2019 ainsi que la décision implicite de refus de reconnaissance d'imputabilité au service de son accident. Par un jugement n° 1911048-1911058-1913352-1913400-1911035 du 13 mai 2022 le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 13 juin 2022, Mme C..., représentée par la SELAFA Cassel, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil ; 2°) d'annuler les arrêtés des 11 juillet, 9 août et 3 octobre 2019 du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis ainsi que sa décision implicite de refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie et l'arrêté du 27 janvier 2020 par lequel il a rejeté de manière expresse sa demande ; 3°) d'enjoindre au président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis de la placer en congé pour invalidité imputable au service sur la période considérée ou à défaut de réexaminer son dossier, le tout sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - les décisions implicites et expresses refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie sont insuffisamment motivées ; - son accident est manifestement imputable au service. Par un mémoire en défense enregistré le 2 décembre 2022, le département de la Seine-Saint-Denis, représenté par la SELAS Seban et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 3 750 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - et les conclusions de Mme Jayer, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., rédactrice principale de première classe au sein du service des affaires européennes de la direction Europe et International du département de la Seine-Saint-Denis, a déclaré un accident survenu le 19 juillet 2018 après la lecture d'un courriel de son supérieur hiérarchique et à la suite duquel elle a été arrêtée. Par des arrêtés des 11 juillet, 9 août et 3 octobre 2019, le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis l'a placée en congé de maladie ordinaire à plein traitement du 25 au 27 mai 2019 puis à demi-traitement du 28 mai au 27 septembre 2019 et, par un arrêté du 27 janvier 2020, il a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident. Mme C... relève appel du jugement n° 1911048-1911058-1913352-1913400-1911035 du 13 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". 3. D'une part, l'arrêté du 27 janvier 2020 par lequel le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de Mme C... s'est substitué à la décision implicite de rejet de sa demande. Dès lors, la requérante ne peut utilement soutenir que cette dernière décision serait insuffisamment motivée. 4. D'autre part, l'arrêté du 27 janvier 2020 vise les textes applicables ainsi, notamment, que l'avis de la commission de réforme et indique : " considérant que les faits déclarés ne sont pas consécutifs d'un accident de service ", avant de décider que l'accident de Mme C... n'est pas imputable au service. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que Mme C... a été mise en possession de l'avis de la commission de réforme, qui a conclu que les faits déclarés ne sont pas constitutifs d'un accident de service. Ainsi a-t-elle été, en l'espèce, mise à même de comprendre que l'administration s'est appropriée l'avis de la commission de réforme et d'en connaître le sens. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit être écarté. 5. En second lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-53 du 10 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Constitue un accident de service, pour l'application de cet article, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. 6. Il ressort des pièces du dossier que par un courriel du 18 juillet 2018, le chef de service de Mme C... lui a indiqué être interpellé par une incohérence entre son temps de présence au bureau et son temps de travail affiché sur Chronos, lui précisant qu'elle avait badgé la veille à 12 heures 30 et à 12 heures 48 mais avait été vue à la cantine à 13 heures 00 et était revenue dans son bureau à 14 heures 05, et l'a convoquée à un entretien avec la directrice pour un rappel des règles. Ni les termes du courriel, ni les faits qui y sont mentionnés et dont la matérialité n'est au demeurant pas contestée, ni, enfin, la convocation à un entretien n'excèdent l'exercice de son pouvoir hiérarchique par le chef de service de Mme C.... La commission de réforme a d'ailleurs, à l'unanimité, estimé que la réception du courriel en cause ne constituait pas un accident de service. Si la requérante fait également état d'un contexte de travail dégradé, celui-ci, à le supposer même établi, n'est pas de nature à conférer le caractère d'accident à la réception du courriel que son chef de service lui a adressé le 18 juillet 2018. Les faits à l'origine de ce courriel sont en outre dépourvus de lien avec le contexte de travail dégradé allégué par la requérante. Dans ces conditions, le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident déclaré par Mme C.... 7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être également rejetées. Sur les frais du litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Saint-Denis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande sur ce fondement. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le département de la Seine-Saint-Denis et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Mme C... versera une somme de 1 000 euros au département de la Seine-Saint-Denis en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au département de la Seine-Saint-Denis. Délibéré après l'audience du 17 mars 2023, à laquelle siégeaient : Mme Briançon, présidente, Mme d'Argenlieu, première conseillère, Mme Saint-Macary, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2023. La rapporteure, M. B... La présidente, C. BRIANÇON La greffière, O. BADOUX-GRARE La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22PA02712
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 28/03/2023, 21MA02325, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par deux requêtes distinctes, M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les décisions implicites par lesquelles la direction départementale des finances publiques des Alpes-Maritimes a rejeté, d'une part, sa demande tendant au versement de diverses primes et indemnités et, d'autre part, sa demande d'indemnisation de préjudices résultant d'une maladie reconnue imputable au service à la suite de faits de harcèlement moral. Par un jugement n° 1902626, 1902631 du 23 avril 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté les demandes de M. C.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 15 juin 2021, M. B... C..., représenté par Me Callon, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1902626, 1902631 du 23 avril 2021 du tribunal administratif de Nice ainsi que les décisions implicites de rejet nées du silence conservé par la direction départementale des finances publiques des Alpes-Maritimes dans les deux mois suivant les demandes du 30 janvier 2019 réceptionnées le 5 février 2019 ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70 256,52 euros de dommages et intérêts au titre des primes qui auraient dues lui être versées de 2008 à 2012, la somme de 160 000 euros en réparation de son déficit fonctionnel permanent et de son préjudice moral, avec anatocisme, la somme de 120 000 euros en réparation d'un préjudice de refus d'avancement et de perte de retraite avec anatocisme, et une somme de 96 000 euros du fait des pertes de gains liées à l'incapacité provisoire de travail de 2003 à 2011 avec anatocisme ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'absence de versement des primes et indemnités en cas de congé maladie imputable au service du fait du harcèlement moral subi pendant des années méconnait l'article 1er du décret du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés ; cette illégalité constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; la reconnaissance tardive de l'imputabilité de sa maladie au service l'a empêché d'obtenir le paiement de toutes les primes qui lui étaient dues de 2008 à 2012 ; il est par suite fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 70 256,52 euros en réparation de son préjudice financier ; - l'Etat a commis une seconde faute en refusant de l'indemniser des préjudices résultant de sa dépression chronique développée à compter de 2002, du fait d'un harcèlement au travail, et reconnue comme maladie professionnelle imputable au service ; il est fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 60 0000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent imputable à cette maladie, la somme de 100 000 euros au titre de son préjudice moral, la somme de 120 000 euros en réparation d'un préjudice de refus d'avancement et de perte de retraite, et la somme de 96 000 euros du fait des pertes de gains liées à l'incapacité provisoire de travail de 2003 à 2011. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué. Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés et s'en remet à ses écritures de première instance. Un courrier du 10 janvier 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 3 février 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Par un courrier du 7 mars 2023, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce qu'un agent public victime d'une maladie ou d'un accident professionnel peut obtenir, sur le terrain de la responsabilité sans faute, une indemnisation, complémentaire à la réparation forfaitaire, de préjudices ne revêtant pas un caractère patrimonial. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus, au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. C..., inspecteur des finances publiques affecté à la direction départementale des finances publiques des Alpes-Maritimes, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 7 janvier 2013. Précédemment, il avait été placé en congé longue maladie à compter du 7 janvier 2008, puis en congé de longue durée à compter du 7 janvier 2009. A la suite d'un jugement du 16 juin 2017, devenu définitif, par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 7 avril 2015 par laquelle la direction départementale des finances publiques des Alpes-Maritimes avait rejeté la demande de M. C... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie dépressive, l'administration a, par décision du 11 décembre 2017, fait droit à la demande de l'intéressé en reconnaissant l'imputabilité au service de la maladie survenue le 24 septembre 2002, et lui a versé un complément de rémunération n'incluant toutefois pas les primes et indemnités auparavant perçues au titre de l'exercice de ses fonctions. Par courriers du 30 janvier 2019, l'assureur de M. C... a saisi l'administration de deux demandes préalables, la première tendant au versement de ces primes pour la période courant de 2008 à 2012, et la seconde tendant à la réparation des préjudices extrapatrimoniaux résultant de la maladie reconnue comme imputable au service. Par la présente requête, M. C... demande à la Cour d'annuler le jugement du 23 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes d'annulation des décisions implicites de rejet nées du silence conservé par l'administration sur ses demandes et de condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis. Sur la légalité de la décision implicite de rejet de la demande de versement de primes et indemnités : 2. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ; / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence (...) ". Aux termes de l'article 37 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " A l'issue de chaque période de congé de longue maladie ou de longue durée, le traitement intégral ou le demi-traitement ne peut être payé au fonctionnaire qui ne reprend pas son service qu'autant que celui-ci a demandé et obtenu le renouvellement de ce congé. / Au traitement ou au demi-traitement s'ajoutent les avantages familiaux et la totalité ou la moitié des indemnités accessoires, à l'exclusion de celles qui sont attachées à l'exercice des fonctions ou qui ont le caractère de remboursement de frais ". Il résulte de ces dispositions que les fonctionnaires de l'Etat placés en congé de longue maladie ou de longue durée n'ont pas droit au maintien des indemnités attachées à l'exercice des fonctions. 3. D'autre part, aux termes du I de l'article 1er du décret du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés, dans sa version applicable au litige : " 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, aux magistrats de l'ordre judiciaire et, le cas échéant, aux agents non titulaires relevant du décret du 17 janvier 1986 susvisé est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et des articles 10, 12, 14 et 15 du décret du 17 janvier 1986 susvisé (...) ". Si ces dispositions ont pour objet d'étendre la règle du maintien du traitement prévu par l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 aux primes et indemnités versées aux agents placés en situation de congés annuels, de congés de maladie ordinaire, et de congés de maternité, elles n'ont toutefois ni pour objet ni pour effet d'instaurer un tel droit au bénéfice des agents placés en position de congé de longue maladie ou de longue durée au titre des 3° et 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. 4. Il ressort des pièces du dossier que, par décision du 11 décembre 2017, l'administration a reconnu l'imputabilité au service de la maladie de M. C... survenue le 24 septembre 2002. Si cette décision fait référence aux dispositions du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 relatives au congé de maladie ordinaire, elle indique néanmoins expressément que le complément de rémunération qui doit être versé à l'intéressé du fait de cette reconnaissance d'imputabilité concerne les périodes au titre desquelles il était placé en congé de longue durée. Il en résulte qu'elle n'a emporté aucune modification quant à la position statutaire qui était celle de l'appelant entre le 7 janvier 2008 et le 7 janvier 2013, date de sa mise à la retraite pour invalidité, de sorte qu'il est demeuré placé en congé de longue maladie du 7 janvier 2008 au 6 janvier 2009 puis en congé de longue durée du 7 janvier 2009 au 6 janvier 2013. Dans ces conditions, les dispositions de l'article 1er du décret du 26 août 2010 instaurant le principe du maintien des primes et indemnités versées aux agents placés dans certaines situations de congés n'étaient pas applicables à sa situation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté. 5. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande du 30 janvier 2019 tendant au versement de primes et indemnités. Par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 70 256,52 euros au titre des années 2008 à 2012 ne peuvent qu'être rejetées, et ce, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'exception de prescription quadriennale opposée en première instance par l'administration. Sur les conclusions indemnitaires fondées sur l'existence d'une situation de harcèlement moral : En ce qui concerne la responsabilité pour faute : 6. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : /1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés (...). ". 7. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement et il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. 8. Si, ainsi qu'il a été précédemment exposé, l'administration a fait droit, par une décision du 11 décembre 2017, à la demande de M. C... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie dépressive survenue à compter de la fin de l'année 2002, une telle circonstance ne saurait, par elle-même, impliquer nécessairement l'existence de faits de harcèlement moral, la décision dont il s'agit étant intervenue, au demeurant, à la suite d'un jugement du tribunal administratif de Nice annulant une précédente décision refusant de procéder à cette reconnaissance d'imputabilité non pas en raison d'une erreur d'appréciation, mais au motif qu'elle était entachée d'une erreur de droit. En outre, il résulte des pièces médicales produites au dossier, notamment du certificat du médecin du travail du 3 juillet 2006 ainsi que du rapport d'expertise médicale du 2 mai 2018, que si l'appelant présente un état dépressif d'évolution chronique résultant de sa situation professionnelle, aucun de ces certificats pas plus qu'aucune autre pièce du dossier ne permet pour autant d'établir l'existence d'agissements répétés susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. Si, pour étayer l'affirmation selon laquelle il aurait néanmoins été victime d'un tel harcèlement, M. C... produit également deux attestations selon lesquelles il aurait subi des actions dégradantes de mise à l'écart pendant plusieurs années et aurait été victime d'une animosité palpable très répandue ainsi que d'une forme de marginalisation, notamment caractérisée par l'attribution d'un bureau isolé, sombre et situé derrière un pilier, celles-ci demeurent néanmoins insuffisantes pour faire présumer de l'existence d'une situation de harcèlement moral, l'administration faisant par ailleurs valoir, sans être contredite, que l'un des rédacteurs était fréquemment absent au moment des faits, de surcroît antérieurs de plus de vingt ans, en raison de ses obligations syndicales. De plus, tant la note circonstanciée rédigée par le supérieur hiérarchique de M. C... dans le cadre de son évaluation au titre de l'année 2002 que le rapport étayé du chef du département informatique du 6 avril 2011 démontrent que l'intéressé, qui n'a pas été privé d'attributions même si celles-ci ont dû évoluer pour tenir compte de l'activité à temps partiel qu'il a sollicitée à partir de l'année 1999, a par ailleurs bénéficié de conditions matérielles d'installation identiques à celles de ses collègues et compatibles avec le bon exercice de ses fonctions, au titre desquelles il n'a d'ailleurs pas toujours donné satisfaction, sans pour autant faire l'objet d'une baisse de sa notation. Dans ces conditions, en l'absence d'éléments précis et concordants de nature à faire présumer de l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral perpétrés à son encontre par l'administration ou ses supérieurs hiérarchiques successifs, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. En ce qui concerne la responsabilité sans faute : 9. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, visée ci-dessus : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, (...) sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par :/ (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; (...) ". 10. Il résulte de l'instruction que, par décision du 24 août 2011, l'administration a refusé de faire droit à la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la maladie de l'appelant. Il en résulte que le délai de prescription a commencé à courir le 1er janvier de l'année suivant celle de notification de cette décision. Toutefois, par une demande enregistrée le 9 novembre 2011 au greffe du tribunal administratif de Nice, M. C... a sollicité que soit prononcée l'annulation, pour excès de pouvoir, de cette décision. Une telle démarche a interrompu, en application des dispositions citées au point précédent de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968, le délai de prescription, lequel a recommencé à courir à compter de la date de notification du jugement du 28 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 24 août 2011. Si, à la suite de ce jugement, l'administration a de nouveau rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité formulée par M. C... par une décision du 7 avril 2015, le délai de prescription a de nouveau été interrompu par le recours exercé contre cette décision par l'intéressé devant le tribunal administratif de Nice, pour ne recommencer à courir qu'à compter de la date de notification du jugement du 16 juin 2017, devenu définitif, par lequel le tribunal administratif de Nice l'a annulée. Dans ces conditions, le délai de prescription quadriennale n'était pas expiré à la date à laquelle l'administration a été saisie d'une demande tendant à l'indemnisation des préjudices personnels subis par l'appelant. Il s'ensuit que l'exception de prescription quadriennale opposée en première instance par le ministre de l'économie, des finances et de la relance ne peut qu'être écartée. 11. En second lieu, compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d'invalidité et l'allocation temporaire d'invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions, qui instituent ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 12. Il résulte de ce qui a été précédemment exposé que la maladie dépressive de M. C... a été reconnue imputable au service et que celui-ci bénéficie d'une rente viagère d'invalidité. Il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment des conclusions du rapport d'expertise médicale du 2 mai 2018, mais également des écritures produites par l'administration en première instance, que cette maladie, intervenue en l'absence de toute pathologie préexistante, résulte de manière directe et certaine d'un climat de travail dégradé. L'intéressé est par conséquent en droit de prétendre, même en l'absence de faute commise par l'administration, à la réparation des préjudices personnels subis à raison de cette maladie. 13. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard à l'âge de l'appelant à la date de consolidation de son état de santé, qui doit être fixée au 7 janvier 2013 selon le rapport d'expertise du 2 mai 2018, et à la circonstance que, selon ce même rapport, la maladie de l'intéressé, imputable au service, est à l'origine d'un déficit fonctionnel permanent évalué à 40 %, il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices personnels de M. C..., comprenant son préjudice moral, en les fixant à la somme globale de 61 500 euros, laquelle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 février 2019, date de réception de la réclamation préalable, ces intérêts portant eux-mêmes intérêts un an après cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette même date. 14. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à être indemnisé des préjudices extrapatrimoniaux résultant de sa maladie reconnue comme étant imputable au service. L'Etat doit être condamné à verser une somme de 61 500 euros à M. C..., laquelle sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 février 2019, date de réception de la réclamation préalable, ces intérêts portant eux-mêmes intérêts un an après cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette même date. Sur les frais d'instance : 15. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à M. C... demande au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. C... une somme de 61 500 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 février 2019. Les intérêts échus au 5 février 2020, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 23 avril 2021 est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus. Article 3 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. 2 No 21MA02325
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 9ème chambre, 17/03/2023, 21PA05313, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : I- Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle la maire de Paris a implicitement rejeté sa demande du 20 février 2019 tendant au retrait des décisions par lesquelles elle a été placée et maintenue en congés de maladie ordinaire du 3 mai 2016 au 2 mai 2017. Par un jugement n° 1921557 du 7 mai 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. II- Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler deux arrêtés de reversement du 4 mai 2018 par lesquels la maire de Paris lui a réclamé le remboursement de rémunérations versées à tort, d'une part, pour la période du 16 novembre 2016 au 30 novembre 2016, pour une somme de 422,87 euros et, d'autre part, au titre de la période du 15 janvier 2017 au 31 janvier 2017, pour une somme de 490,42 euros, ainsi que les avis de sommes à payer correspondant émis le 14 mai 2018 par la direction des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris. Par un jugement commun n°1902515, 1902531, 1907178 et 1907208 du 7 mai 2021, le tribunal administratif de Paris, après avoir constaté que l'étendue du litige se limitait à la somme de 456,64 euros à la suite d'une remise gracieuse accordée à hauteur de 456,65 euros, a annulé les avis de sommes à payer émis le 14 mai 2018 et a rejeté le surplus des demandes de Mme B.... Procédures devant la Cour : I- Par une requête n° 21PA05313, des pièces complémentaires et des mémoires, enregistrés les 4 octobre 2021, 20 mai 2022 et 7 juillet 2022, Mme B..., représentée par Me Vernon, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures : 1°) avant dire droit, de surseoir à statuer dans l'attente de l'ordonnance prise par le tribunal administratif de Paris sur la demande d'expertise sollicitée par une requête enregistrée sous le n° 2210389 le 6 mai 2022 ; 2°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise médicale ; 3°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 7 mai 2021 ; 4°) d'enjoindre à la maire de Paris de la placer en congé de maladie ordinaire à plein traitement entre le 3 mai 2016 et le 2 mai 2017 et de rétablir ses droits à bénéficier d'un plein traitement au titre de cette période ; 5°) à titre subsidiaire, de rétablir ses droits à percevoir un congé de maladie à plein traitement pendant trois mois à compter du 3 mai 2016 ; 6°) d'enjoindre à la maire de Paris de réexaminer ses droits à congé de maladie ordinaire à plein traitement entre le 3 mai 2016 et le 2 mai 2017 et de ses droits à bénéficier d'un plein traitement au titre de cette période ; 7°) d'ordonner l'exécution de cette injonction dans le délai d'un mois à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 8°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 2 000 euros à verser à Me Vernon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; Elle soutient que : - le moyen tiré de l'irrecevabilité de sa requête est lui-même irrecevable, faute d'avoir été soulevé en première instance ; - la décision par laquelle la maire de Paris a refusé implicitement le retrait des décisions la plaçant en congés de maladie ordinaire du 3 mai 2016 au 2 mai 2017, est entachée d'un défaut de motivation ; - en l'absence de décision de la commission de réforme fixant la date de consolidation de son état de santé, son placement en congé de maladie ordinaire a été décidé à la suite d'une procédure irrégulière ; - son placement en congé de maladie ordinaire à demi traitement du 3 mai 2016 au 2 mai 2017, est entaché d'erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que sa situation relevait du deuxième alinéa du 2° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et qu'en l'absence de consolidation de son état de santé, elle ne pouvait être privée du bénéfice d'un congé à plein traitement, y compris au cours de son congé de maladie ordinaire ; - la ville de Paris a manqué à son obligation de reclassement et d'adaptation de son poste de travail compatible avec son état de santé. Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2022, la ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - la requête de Mme B... qui est dirigée contre une décision purement confirmative d'une décision devenue définitive, est irrecevable en raison de sa tardiveté ; - les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée et du vice de procédure, en l'absence de détermination d'une date de consolidation de son état de santé, sont inopérants ; - les autres moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 août 2021. II- Par une requête n° 21PA05319, des pièces complémentaires et un mémoire, enregistrés les 5 octobre 2021 et 20 mai 2022, Mme B..., représentée par Me Vernon, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures : 1°) avant dire droit, de demander au bureau d'aide juridictionnelle la communication de la lettre de notification à Mme B... de la décision d'aide juridictionnelle du 3 août 2021 ; 2°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'ordonnance prise par le tribunal administratif de Paris sur la demande d'expertise sollicitée par une requête enregistrée sous le n° 2210389 le 6 mai 2022 ; 3°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise médicale ; 4°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 7 mai 2021 en tant qu'il rejette ses demandes enregistrées sous les numéros 1902515 et 1902531 ; 5°) d'annuler les arrêtés de reversement de la maire de Paris du 4 mai 2018 ; 6°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 2 000 euros à verser à Me Vernon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; 7°) de mettre à la charge de de la ville de Paris la somme de 13 euros, au titre des droits de plaidoirie, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est entaché d'une inexactitude matérielle des faits et d'une erreur de droit ; - les décisions contestées ont été signées par une autorité dont la compétence n'est pas établie ; - elles sont entachées d'un défaut de motivation en droit et en fait ; - l'arrêté contesté est entaché d'une erreur de droit, tirée de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision du 4 juillet 2016 qui l'a placée en congé maladie ordinaire à compter du 3 mai 2016 à l'issue de son congé initial à plein traitement en méconnaissance des dispositions du 2ème alinéa de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ; elle était en droit de conserver l'intégralité de son traitement ; - l'arrêté attaqué est illégal dès lors que la ville n'a pas procédé à son reclassement et a manqué à son obligation de lui proposer un emploi adapté à son état physique. Par deux mémoires en défense, enregistrés les 16 mars 2022 et 9 janvier 2023, ce second mémoire n'ayant pas été communiqué, la ville de Paris, représentée par Me Falala, conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions en tant qu'elles portent sur la somme de 456,65 euros et au rejet du surplus ou subsidiairement au rejet de l'ensemble des conclusions. Elle fait valoir que : - la ville de Paris ayant accordé par une décision devenue définitive, une remise gracieuse à Mme B... à hauteur de 456,65 euros, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de reversement en tant qu'elle porte sur la somme totale de 913,29 euros ; - la requête est irrecevable en raison de sa tardiveté, à défaut de justification de la date de notification de la décision d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle accordée à Mme B... le 3 août 2021 ; - les moyens soulevés en appel par Mme B... dans les mêmes termes que ceux énoncés en première instance, ne sont pas susceptibles de remettre en cause le jugement attaqué ; - l'administration étant en situation de compétence liée pour procéder à la récupération d'un indu de rémunération versé à un agent public, les moyens soulevés sont inopérants ; - le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions attaquées est inopérant ; - les autres moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. La requête a été communiquée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris qui n'a pas produit d'observation. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 août 2021. Vu : - les autres pièces des dossiers. Vu : - le code général des collectivités territoriales ; - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code générale de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; - le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 ; - le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public, - les observations de Me Vernon, représentant Mme B... et celles de Me Gorse, représentant la ville de Paris. Des notes en délibéré ont été présentées pour Mme B... les 22 et 23 février 2023 et n'ont pas été communiquées. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., recrutée par la ville de Paris en qualité d'agent d'accueil et de surveillance de 2ème classe stagiaire, a été affectée à la direction des espaces verts et de l'environnement à compter du 21 septembre 2015. Elle a été placée en congé de maladie pour accident de service entre le 1er janvier 2016 et le 2 mai 2016, puis en congés de maladie ordinaire du 3 mai 2016 au 2 mai 2017. Par un courrier du 18 février 2019, elle a sollicité le retrait des décisions la plaçant en congé de maladie ordinaire, cette demande ayant été rejetée implicitement. Par une première requête, Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Paris n° 1921557 du 7 mai 2021 rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision et doit être regardée comme demandant également l'annulation de la décision en litige. Parallèlement, par deux arrêtés du 4 mai 2018, la maire de Paris a émis des arrêtés de reversement réclamant à Mme B... les sommes de 422,87 euros et de 490,42 euros indûment perçues au titre des périodes du 16 novembre 2016 au 30 novembre 2016 et du 15 janvier 2017 au 31 janvier 2017. Des avis des sommes à payer n° 0090238 et n° 0090240 ont en conséquence été émis par le comptable de la ville de Paris. Par une seconde requête, elle relève appel du jugement commun n° 1902515, 1902531, 1907178 et 1907208 du 7 mai 2021 en tant que le tribunal administratif de Paris, après avoir constaté que l'étendue du litige se limitait à la somme de 456,64 euros à la suite d'une remise gracieuse accordée à hauteur de 456,65 euros et annulé les avis de sommes à payer émis le 14 mai 2018, a rejeté les demandes de Mme B... tendant à l'annulation des arrêtés de reversement. Sur la jonction : 2. Les requêtes susvisées de Mme B... sont relatives à la situation administrative d'un même agent, présentent à juger des questions connexes et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt. Sur la requête n° 21PA05313 : 3. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs énoncés au point 2 du jugement attaqué et non critiqués par de nouveaux arguments, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée. 4. En deuxième lieu, il est constant que la ville de Paris a reconnu comme étant imputable au service l'accident survenu à Mme B... le 19 décembre 2015 et pris en charge à ce titre le congé maladie qui lui a été prescrit entre le 1er janvier 2016 et le 2 mai 2016. Contrairement à ce qu'elle soutient, aucune disposition législative ou règlementaire n'imposait que la commission de réforme fixe une date de consolidation de son état de santé à l'issue de cette période d'arrêt de travail initiale de quatre mois, alors même que le médecin agréé du service de la médecine statutaire a constaté sa guérison à la date du 2 mai 2016 et qu'elle n'a pas contesté, avant le mois de février 2019, le placement en congé maladie ordinaire dont elle a bénéficié à compter du 3 mai 2016. Par suite, Mme B..., qui ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles 3 et 6 du décret n° 2005-442 et de l'article 25 de l'arrêté ministériel du 4 août 2004 qui se rapportent à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité, n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige serait entachée d'un vice de procédure. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ". 6. Mme B... soutient qu'elle aurait dû être maintenue en congé au titre de la législation sur les accidents de service à compter du 3 mai 2016 et percevoir l'intégralité de sa rémunération jusqu'à sa réintégration en application des dispositions précitées du deuxième alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. D'une part, aucune des pièces médicales produites au dossier ne permet de démontrer que son inaptitude alléguée à reprendre ses fonctions à compter du 3 mai 2016 trouve son origine dans l'accident survenu au mois de décembre 2015. Si les certificats médicaux présentés constatent que l'intéressée a présenté une fragilité psychologique postérieurement à l'accident de service survenu le 19 décembre 2015, Mme B... ne démontre ni que ses troubles aient été à l'origine de la prescription d'arrêt de travail au cours de la période du 3 mai 2016 au 2 mai 2017, ni qu'ils présentent un lien direct et certain avec son accident de service. D'autre part, dès lors qu'il est constant que Mme B... a été déclarée comme étant guérie avec retour à l'état antérieur, à la date du 2 mai 2016, son état de santé, à l'expiration du congé pour accident du travail, ne lui ouvrait pas droit au bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 entre le 3 mai 2016 et le 2 mai 2017. Par suite, et alors même en outre qu'à raison de son état de guérison, elle n'a pas fait l'objet d'un examen complémentaire aux fins de constater sa consolidation, Mme B... ne pouvait prétendre au maintien de son plein traitement au cours de cette période. Si elle soutient n'avoir perçu qu'un demi-traitement dès le 3 mai 2016, elle ne conteste pas que la ville de Paris a régularisé sa situation financière au mois de juillet 2016 en lui versant l'intégralité de la rémunération qu'elle était en droit de percevoir sur une période de trois mois, déduction faite de sept jours rémunérés à plein traitement au titre d'un précédent congé de maladie ordinaire. Enfin, les arrêts de travail présentés par l'intéressée ayant donné lieu à une prise en charge au titre des congés de maladie ordinaire au cours de la période en litige, les dispositions de l'article 10 du décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 auxquelles elle se réfère sont en l'espèce inopérantes. Les moyens tirés de l'erreur de droit ou de l'erreur d'appréciation doivent ainsi être écartés. 7. En quatrième lieu, d'une part, si, en vertu d'un principe général du droit dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés que les règles statutaires applicables aux fonctionnaires, en cas d'inaptitude physique définitive, médicalement constatée, à occuper un emploi, il appartient à l'employeur de reclasser l'intéressé dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer son licenciement dans les conditions qui lui sont applicables, ni ce principe général, ni les dispositions de la loi du 13 juillet 1983, ni celles de la loi du 26 janvier 1984 et du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985, ne confèrent aux fonctionnaires stagiaires, qui se trouvent dans une situation probatoire et provisoire, un droit à être reclassés dans l'attente d'une titularisation en cas d'inaptitude à l'exercice de leurs fonctions par suite d'altération de leur état physique. 8. D'autre part, le fonctionnaire territorial, y compris le fonctionnaire territorial stagiaire, qui, à la suite d'un accident de service ou d'une maladie contractée ou aggravée en service et en application du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, a bénéficié d'un congé de maladie et qui, au terme du délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. S'il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n'est pas possible, il peut être mis d'office à la retraite par anticipation. En l'espèce, Mme B... a été placée en congé maladie ordinaire entre le 3 mai 2016 et le 2 mai 2017. Aucune des pièces du dossier ne permet de retenir qu'elle aurait été dans l'impossibilité définitive et absolue de poursuivre ses fonctions au cours de cette période, son inaptitude définitive à ses fonctions et à toutes fonctions ayant été constatée par le comité médical le 15 avril 2019. Au demeurant, alors même qu'elle avait été placée en congé maladie ordinaire à compter du 3 mai 2016 et jusqu'au 2 mai 2017, des adaptations de son poste de travail ont été recommandées par le comité médical les 29 mai 2017 et 5 mars 2018, des propositions de changement de poste ayant par ailleurs été déclinées par l'intéressée. Par suite, aucune obligation d'adaptation de son poste de travail ou de reclassement ne s'imposait à la ville de Paris. 9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la recevabilité de la requête et de la demande de première instance, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer et d'ordonner une mesure d'expertise médicale, notamment dans l'attente de l'ordonnance prise par le tribunal administratif de Paris sur la demande d'expertise sollicitée par une requête enregistrée sous le n° 2210389 le 6 mai 2022, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais liés à l'instance et des droits de plaidoirie doivent également être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée par la ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur la requête n° 21PA05319 : Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée en défense : 10. Il résulte de l'instruction que postérieurement à l'introduction des demandes de première instance par Mme B..., la ville de Paris lui a accordé une remise gracieuse à hauteur de 456,65 euros par une délibération n° 2019 DRH des 12, 14 et 15 novembre 2019, ainsi que par un arrêté du 27 novembre 2019. Par suite, il n'y a plus lieu à statuer à hauteur de cette somme. Sur la régularité du jugement attaqué : 11. Dans le cadre de l'effet dévolutif, le juge d'appel, qui est saisi du litige, se prononce non sur les motifs du jugement de première instance mais directement sur les moyens mettant en cause la régularité et le bien-fondé de la décision en litige. Par suite, Mme B... ne peut utilement soutenir que les premiers juges ont entaché leur jugement d'une inexactitude matérielle des faits ou d'une erreur de droit pour en obtenir l'annulation. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 12. Une somme indûment versée par une personne publique à l'un de ses agents au titre de sa rémunération, incluant un trop-perçu à raison d'un congé pour maladie, peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement, sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée. Dans les deux hypothèses mentionnées au deuxième alinéa de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 visée ci-dessus, la somme peut être répétée dans le délai de droit commun prévu à l'article 2224 du code civil. 13. En premier lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs énoncés aux points 3 et 6 du jugement attaqué et non critiqués par de nouveaux arguments, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur des actes et de l'insuffisance de motivation. 14. En deuxième lieu, si Mme B... conteste, par voie d'exception, la légalité de son placement en congé maladie ordinaire à compter du 3 mai 2016 et soutient qu'elle aurait dû bénéficier des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 relatives aux accidents de service, ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 6 du présent arrêt. 15. En dernier lieu, le moyen tiré du manquement à l'obligation de reclassement et d'adaptation de son poste de travail doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 7 et 8. 16. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la recevabilité de la requête et, notamment, de demander au bureau d'aide juridictionnelle de Paris communication de la lettre de notification de sa décision du 3 août 2021, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer et d'ordonner une mesure d'expertise médicale, notamment dans l'attente de l'ordonnance prise par le tribunal administratif de Paris sur la demande d'expertise sollicitée par une requête enregistrée sous le n° 2210389 le 6 mai 2022, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 4 mai 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais liés à l'instance et des droits de plaidoirie doivent également être rejetées. D E C I D E : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par Mme B... tendant au remboursement des sommes indument perçues à hauteur de 456,65 euros. Article 2 : Le surplus de la requête n° 21PA05319 et la requête n° 21PA05313 sont rejetés. Article 3 : Les conclusions présentées par la ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à l'appui de la requête n° 21PA05313 sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à la ville de Paris et au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris. Délibéré après l'audience du 17 février 2023, à laquelle siégeaient : - M. Carrère, président, - M. Soyez, président assesseur, - Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 17 mars 2023. La rapporteure, C. A... Le président, S. CARRERE La greffière, C. DABERT La République mande et ordonne au préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 Nos 21PA05313, 21PA05319
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de VERSAILLES, 4ème chambre, 21/03/2023, 20VE02445, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par une première demande, enregistrée sous le numéro 1708544, Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de faire droit à sa demande de régularisation de sa situation, formée le 16 mai 2017, et, d'autre part, d'enjoindre à l'AP-HP de reconstituer sa carrière compte tenu de son placement en congé pour maladie professionnelle du 9 avril 2008 jusqu'à la date de sa mise à la retraite, et de tirer toutes les conséquences, notamment financières, de ce congé pour maladie professionnelle. Par une seconde demande, enregistrée sous le numéro 1807041, Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'annuler l'arrêté du 22 décembre 2017 par lequel le directeur général de l'AP-HP " l'a placée en congé de maladie ordinaire ", d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel le directeur général de l'AP-HP a prononcé son admission à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 3 décembre 2017, d'enjoindre à l'AP-HP de reconnaître l'imputabilité au service de son arrêt de travail prescrit du 19 octobre 2017 jusqu'au 3 décembre 2017, date de son admission à la retraite et de prononcer son admission à la retraite pour invalidité imputable au service. Par un jugement n° 1708544, 1807041 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir annulé l'arrêté du 5 janvier 2018 du directeur général de l'AP-HP et enjoint à cette autorité de prendre une nouvelle décision portant admission de Mme C... à faire valoir ses droits à une pension de retraite pour invalidité et radiation des cadres, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a rejeté les conclusions de la demande n° 1708544 ainsi que le surplus des conclusions de la demande n° 1807041. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2020, Mme A... C..., représentée par Me Laplante, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le directeur général de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de faire droit à sa demande de régularisation formée le 16 mai 2017 ; 3°) d'annuler les arrêtés des 22 décembre 2017 et 5 janvier 2018 ; 4°) d'enjoindre au directeur général de l'AP-HP de reconstituer sa carrière, et de tirer toutes les conséquences, notamment financières, de son placement en congé pour maladie professionnelle à compter du 9 avril 2008 et jusqu'à sa mise à la retraite ; 5°) d'enjoindre à la même autorité de reconnaître l'imputabilité au service de son arrêt de travail à compter du 19 octobre 2017 et jusqu'à son admission à la retraite le 3 décembre 2017 ; 6°) d'enjoindre également au même directeur de prononcer son admission à la retraite pour invalidité imputable au service ; 7°) de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier ; d'une part, il ne tire pas toutes les conséquences des pièces produites devant le tribunal administratif ; d'autre part, les premiers juges ont dénaturé ses écritures en considérant qu'elle demandait l'annulation de la décision la plaçant en disponibilité d'office ; enfin, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur de fait en jugeant que l'arrêté du 22 décembre 2017 n'a pas placé Mme C... en congé de maladie ordinaire ; - la décision par laquelle l'AP-HP a refusé de régulariser sa situation est irrégulière dès lors qu'elle était placée en congé de maladie professionnelle à compter du 9 avril 2008 et jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service ; - les arrêtés des 22 décembre 2017 et 5 janvier 2018 sont entachés d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation dans la mesure où elle avait droit à la prolongation de son arrêt de maladie imputable au service au-delà du 19 octobre 2017 puis à sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service ; - elle est fondée à demander le remboursement des sommes indûment retenues sur ses salaires. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2021, l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), représentée par Me Lacroix, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que Mme C... soit condamnée à lui verser une somme de 1 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - en exécution du jugement, elle a pris un nouvel arrêté le 31 juillet 2020 radiant des cadres Mme C... à compter du 3 décembre 2017, avec maintien de rémunération jusqu'au 31 du même mois ; - les moyens relatifs à la régularité du jugement ont trait en réalité à son bien-fondé ; - les autres moyens soulevés ne sont pas fondés. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 janvier 2018 du directeur général de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; - le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique, - et les observations de Me Neven pour l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., infirmière titulaire au sein de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), affectée à l'hôpital Louis Mourier de Colombes, a été victime d'un accident, le 9 avril 2008, lequel a été reconnu imputable au service par une décision du 14 janvier 2010. Le 23 mars 2010, elle a déclaré souffrir depuis cet accident de service d'une nouvelle pathologie, à savoir des lombalgies. En exécution du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 3 décembre 2015, prononçant l'annulation de la décision de refus de reconnaissance du caractère professionnel de cette pathologie, l'AP-HP a, par une décision du 19 janvier 2016, reconnu l'imputabilité au service des lombalgies à compter du 9 avril 2008. En outre, par des décisions des 13 et 14 juillet 2017, l'AP-HP a admis la prise en charge, au titre de la législation sur les accidents de service et les maladies d'origine professionnelle, des soins médicalement justifiés par une pathologie déclarée le 16 juin 2017 et reçus entre le 30 novembre 2016 et le 30 octobre 2017. En revanche, par une décision du 22 décembre 2017, l'AP-HP a refusé la prise en charge au titre de la législation sur les accidents de service et les maladies d'origine professionnelle, des soins dispensés du 19 octobre 2017 au 30 avril 2018. 2. Par ailleurs, Mme C... a été placée en congé de longue durée du 2 mai 2011 au 4 octobre 2012 et du 7 mai 2013 au 3 octobre 2016, puis, par un arrêté du 22 juillet 2016, en disponibilité d'office du 4 octobre 2016 jusqu'à la date effective de sa mise à la retraite pour invalidité, laquelle a été prononcée à compter du 3 décembre 2017 par un arrêté du 5 janvier 2018. Par un courrier présenté le 16 mai 2017, Mme C... a demandé à l'AP-HP l'arrêt de retenues opérées sur son traitement et le remboursement des sommes prélevées depuis le mois de mai 2016 et que " soient tirées toutes les conséquences du jugement rendu le 3 décembre 2015 par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et de la décision (...) prise le 19 janvier 2016 par lesquels [elle] a été rétroactivement placée en congé pour maladie professionnelle à compter du 9 avril 2008 ". Mme C... fait appel du jugement du 15 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir annulé, pour défaut de signature, l'arrêté du 5 janvier 2018 du directeur général de l'AP-HP portant mise à la retraite pour invalidité de Mme C... à compter du 3 décembre 2017, et enjoint à la même autorité de prendre une nouvelle décision portant admission de Mme C... à faire valoir ses droits à une pension de retraite pour invalidité et radiation des cadres, dans un délai de deux mois, a rejeté les conclusions de la demande enregistrée sous le numéro 1708544 ainsi que le surplus des conclusions de la demande enregistrée sous le numéro 1807041. Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 janvier 2018 : 3. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 5 janvier 2018 du directeur général de l'AP-HP. Par suite, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de cet arrêté sont privées d'objet et, pour ce motif, irrecevables. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la décision implicite rejetant la demande formée le 16 mai 2017 : 4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986, dans sa version applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) ". 5. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 16 mai 2017, Mme C... a demandé l'arrêt des retenues opérées sur son traitement, le remboursement des sommes prélevées depuis le mois de mai 2016 et que " soient tirées toutes les conséquences du jugement rendu le 3 décembre 2015 par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et de la décision (...) prise le 19 janvier 2016 par lesquels [elle] a été rétroactivement placée en congé pour maladie professionnelle à compter du 9 avril 2008 ". Toutefois, par son jugement du 3 décembre 2015, confirmé en appel par la cour le 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé le refus de reconnaître l'origine professionnelle des lombalgies déclarées le 23 mars 2010, date à compter de laquelle il a enjoint de reconnaitre l'imputabilité au service de ces maux. En revanche, il a rejeté le surplus des conclusions tendant notamment à la prise en charge des soins prescrits à compter du 28 décembre 2009 ainsi que l'imputabilité au service d'une périarthrite scapulo-humérale bilatérale, également déclarée le 23 mars 2010. En exécution de ce jugement, l'arrêté du 19 janvier 2016 a reconnu comme maladie professionnelle à compter du 9 avril 2008, les lombalgies déclarées par Mme C... et précisé que " les soins et arrêts de travail prescrits à compter du 9 avril 2008 et reconnus comme étant en lien direct avec cette maladie d'origine professionnelle seront pris en charge par le site au titre de la législation sur les maladies d'origine professionnelle. ". 6. En outre, s'agissant des arrêtés des 13 et 14 juillet 2017, le premier impute au service les maux déclarés le 16 juin 2017 et admet la prise en charge au titre de la législation sur les accidents de service et les maladies d'origine professionnelle des soins dispensés du 30 novembre 2016 au 30 juin 2017, tout en précisant que les soins et arrêts ultérieurs seront soumis à avis médical quant à leur éventuelle prise en charge, et le second arrêté étend la période de prise en charge du 1er juillet 2017 au 30 octobre suivant. Toutefois, d'une part, seul le courrier de l'AP-HP du 10 novembre 2016 peut permettre de retenir l'existence d'un arrêt de travail du 9 juin au 16 juillet 2010 en lien avec les lombalgies reconnues imputables au service. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'ensemble des arrêts de travail émis à compter du 7 avril 2011, et qui ont donné lieu à un placement en congé de longue durée du 2 mai 2011 au 4 octobre 2012 et du 7 mai 2013 au 3 octobre 2016, puis à un arrêté de placement en disponibilité d'office après épuisement des droits à congés de maladie, auraient été motivés par une autre pathologie que le syndrome anxio-dépressif dont a également souffert l'intéressée. Au contraire, aucun des nombreux certificats médicaux et arrêts de travail établis par le médecin traitant de Mme C... tout au long de sa prise en charge attestent, en dépit des termes ambigus de celui établi le 11 mai 2017 par le même médecin, lequel est cependant contredit par l'ensemble des autres justificatifs médicaux produits, n'évoque une imputabilité au service de ce syndrome anxio-dépressif. Ainsi, le certificat établi par le médecin de Mme C... en vue de la mise à la retraite pour invalidité de cette dernière, ne porte aucunement sur les lombalgies, seul mal reconnu comme maladie professionnelle. De même la demande déposée par la requérante le 16 juin 2016 ne vise l'obtention que d'une retraite anticipée pour invalidité, sans mention d'une imputabilité au service. Sur ce point, le rapport médical dressé le 12 juin 2017 à la demande de l'employeur et l'avis de la commission de réforme du 20 juin 2017, s'ils confirment l'inaptitude définitive de Mme C... à exercer toute fonction à compter du 4 octobre 2016, ne retiennent un taux d'invalidité imputable au service que de 8 % en raison de la seule lombosciatique gauche, toutes les autres affections justifiant le placement en retraite pour invalidité étant confirmées comme non-imputables au service. Dans ces conditions, Mme C..., qui n'apporte aucun élément supplémentaire par rapport à ceux qu'elle a produits en première instance, n'est pas fondée à soutenir que les arrêtés des 19 janvier 2016 et 13 et 14 juillet 2017 ont eu pour effet de la placer de manière rétroactive en congés de maladie imputable au service. 7. Il résulte de ce qui précède que c'est conformément aux dispositions du 4° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 que Mme C... a été placée en congé de longue durée du 2 mai 2011 au 4 octobre 2012 et du 7 mai 2013 au 3 octobre 2016. Dès lors, il n'est pas sérieusement contesté que la requérante devait percevoir seulement un demi-traitement du 4 octobre 2014 au 3 octobre 2016, puis être placée en disponibilité d'office à compter du 4 octobre 2016, par suite d'épuisement de ses droits à congé maladie statutaires. Par conséquent, l'AP-HP était fondée à récupérer les versements de plein traitement effectués par erreur entre les mois d'octobre 2014 et juin 2015 et le moyen tiré de l'irrégularité de la décision implicite rejetant la demande de régularisation formée le 16 mai 2017 par Mme C... doit être écarté. En ce qui concerne l'arrêté du 22 décembre 2017 : 8. Il ressort de l'arrêté en litige que l'AP-HP refuse de reconnaitre l'imputabilité au service de maux déclarés le 16 juin 2017 et, par suite, de les prendre en charge au titre de la législation sur les accidents de service et les maladies d'origine professionnelle. Il précise également que les soins dispensés du 19 octobre 2017 au 30 avril 2018 seront pris en charge au titre d'un congé de maladie ordinaire. Ainsi qu'il a été dit au point 6, et en l'absence de production à la fois de la déclaration effectuée le 16 juin 2017 et du certificat médical de prolongation du 19 octobre 2017 visé par cet arrêté, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... aurait dû faire l'objet d'un arrêt de maladie en raison de sa pathologie imputable au service au-delà de la date du 19 octobre 2017, alors, et en tout état de cause, qu'elle a été déclarée guérie de l'accident de service du 9 avril 2008 à compter du 28 décembre 2009. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation entachant l'arrêté en litige doivent être écartés. 9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, l'ensemble de ses conclusions aux fins d'injonction ne peut qu'être rejeté. Sur les frais liés à l'instance : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'AP-HP, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme C... demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de cette dernière la somme de 1 500 euros à verser à l'AP-HP sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Mme C... versera à l'AP-HP la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP). Délibéré après l'audience du 14 février 2023, à laquelle siégeaient : M. Brotons, président, Mme Le Gars, présidente assesseure, Mme Bonfils, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2023. La rapporteure M-G. B...Le président, S. BROTONSLa greffière, V. MALAGOLI La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, N° 20VE02445 2
Cours administrative d'appel
Versailles
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 28/03/2023, 21MA04499, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision de la ministre des armées du 30 septembre 2019 en tant que, par celle-ci, la ministre a fixé le taux d'invalidité à 20 % au titre de l'infirmité " séquelles de fracture des lombaires L2 ", d'enjoindre à la ministre des armées de fixer pour cette infirmité le taux d'invalidité à 50 % et d'ouvrir ses nouveaux droits à pension à compter du 11 juillet 2016 et, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale avant-dire droit. Par un jugement n° 1911515 du 21 septembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 novembre 2021 et le 29 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Cohen, demande à la Cour : 1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 septembre 2021 ; 2°) d'annuler la fiche descriptive des infirmités du 3 octobre 2019 ainsi que le titre de pension du 30 septembre 2019 ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées, d'une part, d'établir un nouveau titre de pension, au taux d'invalidité globale de 55 %, correspondant à 30 % au titre de l'infirmité " séquelles de fracture des lombaires L2 ", 10 % + 5 au titre de l'infirmité " séquelles de traumatisme de la région pectorale droite ", et 10 % + 10 au titre de l'infirmité " séquelle de fracture du scaphoïde droit " et d'autre part, d'ouvrir ses droits à pension à compter de l'enregistrement de chaque demande ; 4°) subsidiairement, d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale ; 5°) en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en portant sur sa demande de pension une appréciation contraire à celle de son médecin expert, le ministre des armées a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ; - au titre de la première infirmité, qui cause une gêne douloureuse invalidante, c'est à tort que le ministre a tenu compte de l'absence d'ankylose et de douleurs irradiantes, lesquelles ne sont pas exigées à ce titre par le guide -barème ; - au titre de la deuxième infirmité, le ministre a omis de prendre en compte la pseudarthrose qui laisse un reliquat algique chronique ; - au titre de la dernière infirmité, la blessure dans la région pectorale est, autant que celle au bras droit, imputable à la traction exécutée en service. Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 septembre et 14 décembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens d'appel ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 17 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 1er décembre 2022, à 12 heures, puis a été reportée au 15 décembre 2022, puis enfin au 20 décembre 2022, à 12 heures, par ordonnances des 30 novembre et 14 décembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de Me Cohen, représentant M. C.... Considérant ce qui suit : 1. M. C..., adjudant de la légion étrangère, radié des contrôles le 20 juin 2020, a présenté, le 17 novembre 2016, le 23 août 2017 et le 18 janvier 2018, trois demandes de pension militaire d'invalidité, au titre, d'abord, de séquelles d'une fracture des lombaires L2, ensuite, de séquelles d'une fracture du scaphoïde droit, et enfin, d'un traumatisme de l'épaule et de la région pectorale droite. Par une décision du 3 octobre 2019, la ministre des armées a fait droit à la première demande de pension de M. C... en lui attribuant à ce titre un taux d'invalidité de 20 %, mais a rejeté ses deux autres demandes. Par un arrêté du 30 septembre 2019 une pension a été concédée à ce taux à M. C.... Par un jugement du 21 septembre 2021, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Marseille, auquel a été transmis le recours de l'intéressé par le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté de concession de pension, en tant que par celui-ci, la ministre des armées a fixé un taux de 20 % pour lui accorder une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité dite " séquelles de fracture des lombaires L2 ", et en tant qu'elle a rejeté ses deux autres demandes de pension. Sur le taux d'invalidité au titre des séquelles de fracture des lombaires L2 : 2. Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de pension de M. C... au titre des séquelles de fracture des lombaires L2 : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % (...) ". L'article L. 9 de ce code renvoie à un décret le soin de fixer " les règles et barèmes pour la classification des infirmités d'après leur gravité ". Aux termes de l'article L.10 du même code : " Les degrés de pourcentage d'invalidité figurant aux barèmes prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 9 sont : a) Impératifs, en ce qui concerne les amputations et les exérèses d'organe ; / b) Indicatifs dans les autres cas. / Ils correspondent à l'ensemble des troubles fonctionnels et tiennent compte, quand il y a lieu, de l'atteinte de l'état général ". Aux termes de l'article L. 26 de ce code : " Toute décision administrative ou judiciaire relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué ". 3. Il résulte de l'instruction que le 28 mars 2016, M. C... a été victime d'un accident de parachutisme lui ayant causé une facture des lombaires L2, traitée par corporectomie de L2 par voie antérieure et par arthrodèse transpédiculaire L2 L4. L'examen réalisé le 17 avril 2019 par le médecin expert, spécialiste en orthopédie, a révélé que l'intéressé, dont la fracture a été correctement traitée sur un plan chirurgical, souffrait néanmoins, à la date de sa demande de pension, de séquelles de cette fracture, consistant en d'importants blocage et raideur sur la colonne vertébrale au niveau du rachis, lequel est douloureux avec une nette cyphose dorsale. Ainsi, M. C..., qui ne peut utilement se prévaloir des constatations opérées par son médecin le 19 novembre 2022, nécessairement postérieures à sa demande de pension, ne peut prétendre, en l'absence d'irradiation ou d'ankylose, que l'infirmité pour laquelle il sollicite des droits à pension consisterait, au sens du guide-barème, dont les recommandations ne sont pas impératives dans cette mesure, en une lésion latente de la colonne vertébrale, éligible en vertu de ce barème à un taux d'invalidité compris entre 10 et 30 %, et non une déviation cyphotique douloureuse, susceptible de se voir attribuer un taux compris entre 10 et 20 %. S'il résulte du guide-barème, ainsi que le soutient l'intéressé, que les fractures de la colonne vertébrale ouvrent droit à un taux d'invalidité de 10 à 30 % même quand elles génèrent des douleurs ou des paralysies, cette recommandation ne vaut que si ces douleurs sont initiales et passagères, celles dont se plaint celui-ci ne revêtant pas de tels caractères. Par ailleurs, l'affirmation de l'appelant selon laquelle la raideur du rachis dont il souffre s'apparente à une quasi-ankylose n'est corroborée par aucun élément médical contemporain de sa demande de pension. Compte tenu de l'ensemble des éléments médicaux relatifs à cette infirmité, à la gêne fonctionnelle en résultant, et des indications du guide-barème, c'est à bon droit que la ministre, s'appuyant sur l'avis du médecin chargé des pensions du 18 juin 2019, a accordé, de ce chef, à M. C... une pension d'invalidité au taux de 20 %. Sur le taux d'invalidité au titre des séquelles de fracture du poignet droit : 4. Aux termes de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa version applicable au jour de la demande de pension relative aux séquelles de fracture du poignet droit : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. ". L'article L. 151-6 du même code précise que : " La décision comportant attribution de pension est motivée. Elle fait ressortir les faits et documents ou les raisons d'ordre médical établissant que l'infirmité provient de l'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 ou, lorsque la pension est attribuée par présomption, le droit de l'intéressé à cette présomption. / Elle est accompagnée en outre, d'une évaluation de l'invalidité qui doit être motivée par des raisons médicales et comporter le diagnostic de l'infirmité et sa description complète, faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte à l'état général qui justifie le pourcentage attribué. ". 5. Par ailleurs, l'article L. 121-4 de ce code dispose que : " Les pensions sont établies d'après le taux d'invalidité résultant de l'application des guides barèmes mentionnés à l'article L. 125-3./ Aucune pension n'est concédée en deçà d'un taux d'invalidité de 10 %. ". L'article L. 121-5 du code ajoute que : " La pension est concédée :1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ". 6. Il résulte de l'instruction que lors d'une course à pied, en service, à Djibouti, le 23 mars 2002, M. C... a fait une chute lui ayant causé une fracture du scaphoïde droit qui n'a pas été traitée par un acte de chirurgie, mais sur un plan orthopédique. L'avis du médecin expert du 17 avril 2019, corroboré dans cette mesure par l'avis du médecin chargé des pensions du 18 juin 2019 et celui du médecin conseil du requérant du 19 novembre 2022, montre que les séquelles de cette fracture dont souffre celui-ci à la date de sa demande de pension consistent en une douleur à la tabatière, une légère limitation des amplitudes de mouvement ainsi qu'une perte de force. S'il est constant que, neuf mois après le fait précis de service auquel est imputable cette infirmité, et au jour de la demande de pension, le poignet droit de M. C... a présenté une pseudarthrose, l'avis du médecin expert du 17 avril 2019 précise que celle-ci est peu symptomatique. Il ne résulte ni de ce document, ni d'aucune autre pièce du dossier, pas même de l'avis du médecin conseil de l'appelant, qu'à la date de sa demande de pension, la pseudarthrose du scaphoïde droit lui procurait une gêne fonctionnelle susceptible de justifier, avec les autres séquelles de la fracture, l'attribution d'un taux d'invalidité supérieur au taux de 8 % retenu par la ministre pour statuer sur cette demande, au vu de l'avis du médecin en charge des pensions et des indications du guide-barème. M. C... n'est donc pas fondé à prétendre à l'allocation d'une pension militaire d'invalidité au titre de cette infirmité. Sur l'imputabilité au service des séquelles de traumatisme de la région pectorale droite : 7. En l'absence de présomption légale, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'une relation certaine et directe de cause à effet entre les troubles qu'il invoque et un fait précis de service ou des circonstances particulières de service à l'origine de l'affection. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 8. S'il ressort du registre des constatations des blessures, des infirmités et des maladies, renseigné le 1er juin 2009 par le supérieur hiérarchique de M. C..., ainsi que du livret médical de celui-ci, que le 31 mai 2009, à 7 heures, lors d'un exercice de remontée de traction, l'intéressé s'est blessé au bras droit et a soudainement interrompu tout effort, et que le médecin militaire alors consulté a émis l'hypothèse d'une possible déchirure partielle au biceps droit, ni ces documents, ni aucune autre pièce contemporaine de ces faits n'évoquent une blessure à la région pectorale droite. Il est en outre constant que depuis ce fait de service, auquel le requérant attribue cette dernière blessure, et la première constatation médicale de cette affection, le 9 octobre 2017 à l'occasion d'un examen échographique, l'intéressé n'a reçu aucun soin en lien avec cette affection. Dans ces conditions, alors que le médecin expert ne s'est pas prononcé expressément sur l'imputabilité au service de cette blessure, la seule circonstance que l'avis du médecin conseil de M. C... du 19 novembre 2022 conclut, à partir d'une analyse anatomique et d'une littérature relative aux lésions du faisceau sternal de la région pectorale droite, à l'existence d'une erreur de diagnostic commise en 2009 et d'un lien entre l'accident du 31 mai 2009 et les séquelles de traumatisme de cette région musculaire, qui ne vaut qu'hypothèse médicale, ne saurait suffire à établir une relation certaine et directe de cause à effet entre ces troubles et cet accident. Par suite, c'est à bon droit que la ministre des armées, conformément à l'avis du médecin chargé des pensions, a refusé d'accorder à M. C... une pension au titre de cette infirmité. 9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale, M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Sa requête d'appel doit donc être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. N° 21MA044992
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 28/03/2023, 21MA04862, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'une part d'annuler la décision du 5 décembre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité au titre des infirmités dites " blépharite athrophique bilatérale " et " névrose symptomatique phobo-obsessionnelle avec syndrome anxio-dépressif chronique", et d'autre part de condamner l'Etat à lui verser la somme de 313 200 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. Par un jugement n° 1911510 du 19 octobre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Carbonnier, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2021 du tribunal administratif de Marseille ; 2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 5 décembre 2018 ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 313 200 euros, augmentée des intérêts de retard et de leur capitalisation ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que la copie qui lui a été notifiée ne comporte pas la signature du président de la formation de jugement et du greffier, qu'il n'est pas justifié de la personne qui a versé les pièces visées ni de la teneur de celles-ci dont le requérant n'a pas été mis à même par le tribunal de prendre connaissance en violation des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le jugement attaqué est entaché d'une erreur de motivation, en cela qu'il a appliqué l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de pension, et non de la constatation de l'infirmité ; - le taux d'invalidité attribué au titre de la blépharite atrophique bilatérale, qui présente un caractère incurable et qui justifie l'octroi d'une pension non pas temporaire mais définitive, aurait dû être supérieur à 10%, puisque cette infirmité a été aggravée par l'exposition aux produits toxiques en 1966-1967 ; - sa névrose symptomatique phobo-obsessionnelle avec syndrome anxio-dépressif chronique est imputable par présomption, conformément à l'article L. 3 du code, car en relation avec l'exposition aux produits toxiques ; - c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevables ses conclusions indemnitaires sur le fondement des dispositions des articles R. 421-1 et R. 421-2 du code de justice administrative, inapplicables à la saisine du tribunal des pensions militaires. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens d'appel ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 30 novembre 2022 la clôture d'instruction a été fixée au 16 décembre 2022, à 12 heures. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. C..., - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. B... a obtenu par un jugement du tribunal des pensions militaires d'Aix-en-Provence du 7 février 2005, une pension militaire d'invalidité au taux de 30 %, concédée à titre provisoire, pour la période du 20 avril 1988 au 19 avril 2001 par un arrêté du 7 juin 2005, au titre d'une conjonctivite chronique bilatérale qu'il a contractée à l'issue de son service militaire le 1er mai 1967. Par deux demandes du 8 août 2014 et du 31 mai 2016, M. B... a sollicité le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au titre de deux nouvelles infirmités, l'une dénommée " blépharite athrophique bilatérale " et l'autre " névrose symptomatique phobo-obsessionnelle avec syndrome anxio-dépressif chronique ". Par une décision du 5 décembre 2018, la ministre des armées a refusé de faire droit à ces demandes, au motif que le taux d'invalidité susceptible d'être attribué au titre de la première affection, constitutive d'une maladie, est inférieur à 30 %, et que l'autre infirmité n'est pas imputable au service. Par un jugement du 19 octobre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B... tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 313 200 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. D'une part, contrairement à ce que soutient M. B... qui s'appuie pour ce faire sur la seule expédition du jugement attaqué, la minute de cette décision comporte l'ensemble des signatures prévues à l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Le moyen tiré de ce que ce jugement serait irrégulier faute de comporter ces signatures doit être écarté. 3. D'autre part, le fait que, après avoir analysé les moyens soulevés dans les mémoires produits par les parties, les visas du jugement attaqué mentionnent " les autres pièces du dossier ", sans détailler le contenu de ces pièces, ni identifier la partie qui les a versées au dossier, n'est pas constitutif d'une irrégularité et ne contrevient ni au principe des droits de la défense, ni aux stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 4. Enfin il ne ressort pas du dossier soumis aux premiers juges que, contrairement à ce que soutient sans précision M. B..., celui-ci n'aurait pas eu connaissance de l'ensemble des pièces sur lesquelles ceux-ci se sont fondés pour rendre leur jugement. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne les conclusions de M. B... tendant au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité : S'agissant de ses droits à pension au titre de l'infirmité dite " blépharite athrophique bilatérale " : 5. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction en vigueur à la date des demandes de pension de M. B..., la seule à prendre en compte pour déterminer les droits à pension hors régime de présomption : " Ouvrent droit à pension : (...) / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : (...) 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. ". Enfin l'article L. 26 de ce code précise que : " Toute décision (...) relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué ". 6. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport du médecin expert désigné par le service des pensions du 25 mai 2016, que M. B... présente une blépharite atrophique bilatérale, ainsi qu'un remaniement du bord ciliaire, auxquels cet expert a proposé d'attribuer le taux d'invalidité de 10 %. Si pour contester ce taux, M. B... affirme souffrir d'un lourd handicap visuel présentant un caractère incurable, et justifiant selon lui l'octroi à titre définitif et non pas temporaire de la pension d'invalidité au titre de la conjonctivite chronique bilatérale, et que son état s'est aggravé par son exposition aux produits toxiques lorsqu'il exerçait ses fonctions à la direction régionale de l'industrie de la recherche et de l'environnement de Martigues de 1991 à 2005, de telles circonstances, qui ne sont confortées par aucune pièce de nature médicale, ne sont pas de nature à démontrer que la gêne fonctionnelle, liée à la blépharite atrophique, dont l'intéressé ne conteste pas qu'elle est distincte de la conjonctivite chronique et dont il n'allègue pas qu'elle aurait une filiation médicale avec celle-ci, justifierait un taux d'invalidité supérieur à 10 %. L'infirmité au titre de laquelle M. B... sollicite une pension constituant une maladie et n'entraînant donc pas une invalidité égale ou supérieure à 30%, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses prétentions à ce titre. S'agissant de ses droits à pension au titre de l'infirmité dite " névrose symptomatique phobo-obsessionnelle avec syndrome anxio-dépressif chronique " : 7. En outre, l'article L. 3 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : [...] 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée ". En application de ces dispositions, la présomption d'imputabilité peut bénéficier à l'intéressé à condition que la preuve d'une filiation médicale soit apportée. Cette filiation médicale, qui suppose une identité de nature entre l'infirmité pensionnée et l'infirmité invoquée, peut être établie soit par la preuve de la réalité des soins reçus de façon continue pour l'affection pensionnée soit par l'étiologie même de l'infirmité en cause. 8. D'une part, si M. B... entend rattacher sa névrose symptomatique phobo-obsessionnelle avec syndrome anxio-dépressif chronique, à la conjonctivite bilatérale chronique dont il souffre depuis la fin de son service militaire du fait de l'exposition à des poussières, il résulte de l'instruction qu'aucun trouble de nature psychologique ou psychiatrique n'a été décelé dans les mois suivant l'apparition de cette affection oculaire. Il est en outre constant que l'intéressé, qui n'a évoqué les premières manifestations de ces troubles qu'à compter de 1996, n'a formé une demande de pension pour cette affection que le 31 mai 2016, soit plus de cinquante ans après les faits invoqués comme étant à leur origine. Ainsi, M. B..., qui n'apporte aucun élément médical de nature à démontrer que, comme il l'allègue, son état anxio-dépressif serait dû à son exposition à des produits toxiques pendant son service militaire, ne saurait être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l'imputabilité au service des troubles psychologiques dont il souffre. 9. D'autre part, il n'est pas moins constant qu'aucun constat officiel d'infirmité, contemporain de son affection pensionnée et dans les délais légaux, n'a été dressé au sujet de ces troubles. Si un rapport du médecin expert, spécialiste en ophtalmologie, du 10 juillet 1998, ainsi qu'un certificat d'un chef de clinique du 21 décembre 2016, indiquent que la conjonctivite bilatérale chronique de M. B... provoque un retentissement psychologique important et que les manifestations neuropsychiatriques sont en relation avec cette affection oculaire, le rapport du médecin expert psychiatre, du 15 janvier 2018, qui constate l'absence de motivation de ces deux précédents avis quant à la causalité étiologique entre la maladie pensionnée et les troubles en cause, dénie tout lien direct et certain entre ces deux affections, qu'il s'agisse pour la seconde du trouble phobo-obsessionnelle, ou qu'il s'agisse du syndrome anxio-dépressif, alors que ni le jugement du tribunal des pensions du 7 février 2005, ni l'arrêté de concession du 7 mai 2005, n'ont tenu compte de troubles de cette nature pour accorder à M. B... un droit à pension. Ainsi M. B..., qui ne soutient pas avoir bénéficié de soins psychologiques ou psychiatriques continus depuis l'apparition de sa maladie oculaire, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe pour prétendre au bénéfice des dispositions de la présomption d'imputabilité prévue à l'article L. 3 en l'absence de tout constat officiel, d'une filiation médicale entre l'infirmité pensionnée et celle qu'il revendique au soutien de sa demande de pension. Il ne peut donc se prévaloir du bénéfice du régime de la présomption d'origine prévu par l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de pension. En ce qui concerne les conclusions indemnitaires de M. B... : 11. Pour rejeter les conclusions de M. B... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 313 200 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis dans le déroulement de sa carrière et dans sa vie privée du fait de sa maladie oculaire, le tribunal s'est fondé sur le double motif tiré de l'irrecevabilité de ces prétentions indemnitaires, au regard de l'exigence de décision préalable posée par l'article R. 421-1 du code de justice administrative et de ce que l'intéressé n'établit pas que l'aggravation de sa conjonctivite bilatérale serait liée à son service dans l'armée. En se bornant à soutenir que la règle posée par l'article R. 421-1 du code de justice administrative n'est pas applicable devant la juridiction des pensions, initialement saisie de ses conclusions indemnitaires, M. B... ne conteste pas le motif retenu par le tribunal pour les rejeter comme mal fondées. 12. En outre, dès lors que M. B..., dont les conclusions tendant au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité sont rejetées, n'assortit pas ses prétentions indemnitaires d'une argumentation propre, il y a lieu de rejeter celles-ci par voie de conséquence. 13. Il doit enfin en aller de même de ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023. N° 21MA048622
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