Cour administrative d'appel de Nantes, 3e chambre, du 27 mai 1999, 96NT01581, inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 juillet 1996, présentée pour Mme Edith X..., demeurant ..., au lieu-dit L'Immaculée, à Saint-Nazaire (44600), par Me ROSSINYOL, avocat au barreau de Nantes ;
Mme X... demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92-5593 du 27 mars 1996 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 avril 1992 du ministre du budget, confirmée le 12 août 1992, refusant de lui accorder le bénéfice d'une pension de réversion de rente viagère d'invalidité à la suite du décès accidentel de son mari ;
2 ) d'annuler les décisions des 14 avril et 12 août 1992 susmentionnées et de la renvoyer devant le ministre de l'économie, des finances et du budget pour qu'il soit procédé à la liquidation de ladite pension de réversion de rente viagère d'invalidité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code des débits de boissons ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 1999 :
- le rapport de M. CHAMARD, premier conseiller,
- les observations de Me BOULANGER, substituant Me ROSSINYOL, avocat de Mme X..., requérante,
- et les conclusions de Mme COËNT-BOCHARD, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L.27, L.28, L.31, L.38 et R.38 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la veuve d'un fonctionnaire civil décédé en activité ne peut percevoir la réversion de la moitié de la rente d'invalidité dont celui-ci aurait pu bénéficier que si l'accident ayant entraîné son décès résulte d'un fait précis et déterminé de service ; que tel n'est pas le cas si cet accident est directement imputable à un fait personnel de l'agent constitutif d'une faute détachable du service ;
Considérant que M. Philippe X..., agent des douanes, est décédé le 5 août 1991 au cours d'un accident d'automobile survenu en effectuant un trajet dans le cadre de son service ; que, par une décision du 14 avril 1992, confirmée le 12 août 1992 sur recours gracieux, le ministre de l'économie, des finances et du budget a refusé à Mme Edith X... de lui attribuer une pension de réversion de rente viagère d'invalidité à la pension de veuve qu'il lui avait attribuée, au motif qu'en raison du taux d'alcoolémie de 1,02 g pour mille révélé par l'analyse du prélèvement sanguin effectué sur son mari, l'accident avait pour cause une faute personnelle de ce dernier détachable de l'exécution du service et ne pouvait donc être qualifié d'accident de service ;
Considérant, en premier lieu, que si les fiches d'analyse et de vérification établies par la gendarmerie, dites fiches A et B, et faisant apparaître le taux d'alcoolémie susmentionné, comportent des ratures et des rectifications de prénom, les autres indications figurant sur ces fiches, relatives à l'année de naissance, à l'adresse, à la profession et aux circonstances de l'accident, correspondent à la personne de M. Philippe X... ; que, dans ces conditions, ces documents doivent, contrairement à ce que soutient la requérante, être regardés comme concernant son mari ;
Considérant que si, de leur propre initiative, la victime d'un accident de la route sur qui a été effectué un contrôle sanguin de taux d'alcoolémie ou ses ayants droit peuvent, en vertu des dispositions de l'article R.26 du code des débits de boissons, demander à ce que soit effectuée une analyse de contrôle, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration de proposer aux ayants droit d'une victime décédée de faire procéder à une telle analyse de contrôle ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve, qui lui incombe, de l'état d'imprégnation alcoolique de M. Philippe X... au moment de son accident automobile ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que M. Philippe X..., en raison d'activités liées, pour partie, au service, ait accumulé une importante fatigue physique, si elle a pu diminuer sa vigilance, ne saurait être regardée, en l'espèce, eu égard aux résultats de l'analyse sanguine et contrairement à ce qu'allègue la requérante, comme la cause de son décès accidentel ; que, dès lors, le fait, pour la victime, d'avoir, en état d'imprégnation alcoolique, perdu le contrôle de son véhicule dans un virage, sans que soit établi que d'autres faits auraient pu être la cause directe de l'accident, traduit une faute de conduite détachable du service ; que, la circonstance que la victime aurait absorbé de l'alcool à l'occasion d'un vin d'honneur organisé dans les locaux du service est sans influence sur la légalité des décisions contestées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de Mme Edith X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Edith X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.