Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 29 décembre 1993, 105287, inédit au recueil Lebon
Vu l'ordonnance enregistrée le 18 février 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a renvoyé au Conseil d'Etat, l'appel dirigé par M. André X... contre le jugement du 6 décembre 1988 du tribunal administratif de Bordeaux ;
Vu la requête sommaire, enregistrée le 7 février 1989 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux et le mémoire complémentaire enregistré le 20 mars 1989 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. André X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 décembre 1988, par lequel celui-ci a rejeté sa demande du 16 janvier 1987, tendant à l'annulation des décisions des 19 juin et 17 juillet 1986 du secrétaire d'Etat aux anciens combattants lui refusant respectivement l'attribution des titres de combattant et de combattant volontaire de la Résistance ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
Vu le décret n° 75-275 du 6 août 1975, validé par la loi du 18 janvier 1986 ;
Vu l'ordonnance du 6 juillet 1943 relative à la légitimité des actes accomplis pour la cause de la libération de la France et à la révision des condamnations intervenues pources faits, complétée et modifiée par les ordonnances des 2 octobre, 1er novembre, 21 décembre 1943 et du 5 juillet 1944 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bardou, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne le titre de combattant volontaire de la Résistance :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er dernier alinéa du décret n° 75-275 du 6 août 1975, auquel la loi du 18 janvier 1986 a donné valeur législative : "Pour ce qui concerne la reconnaissance de la qualité de combattant volontaire de la Résistance, ne peuvent être présentées que les demandes fondées sur des services rendus dans la Résistance, qui ont fait l'objet d'une homologation par l'autorité militaire" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si, à l'appui de sa demande d'obtention du titre de combattant volontaire de la Résistance, M. X... a produit diverses attestations de personnes notoirement connues dans la Résistance témoignant d'actions accomplies en 1942 et 1943, en particulier au bénéfice de M. Y..., celles-ci n'ont pas été homologuées par l'autorité militaire ; que, dans ces conditions, l'administration ne pouvait, en application de la disposition susrappelée de l'article 1er du décret du 6 août 1975 que rejeter sa demande d'attribution de la carte de combattant volontaire de la Résistance ;
En ce qui concerne le titre de combattant :
Considérant qu'aux termes de l'article L.253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : "Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans des conditions fixées aux articles R.223 à R.235 ; qu'aux termes de l'article R.224 C-II 3° du même code : "Sont considérés comme combattants pour les opérations effectuées après le 2 septembre 1939 : ... les agents et les personnes qui ... ont .. effectivement pris part à la Résistance dans les conditions déterminées à l'article A.123-I" ; que l'article A.123-I de ce code dispose : "Ont droit à la qualité de combattant les personnes qui justifient ... par deux témoignages circonstanciés établis par deux personnalités notoirement connues pour leur action dans la Résistance, avoir accompli pendant trois mois, consécutifs ou non, l'un ou plusieurs des actes individuels de résistance énumérés limitativement ci-dessous : ... rédaction, impression, transport habituel de tracts ou journaux clandestins, établis par une organisation reconnue : fabrication habituelle et non rétribuée de pièces d'identité pour des membres de la Résistance ; ... hébergement gratuit et habituel de résistants traqués au cours d'une action militaire, de militaires français ... ; passage habituel à titre gratuit de résistants ou de militaires évadés hors du territoire occupé vers la France libre ou les pays alliés" ... ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'aucun des témoignages et attestations émanant de personnes notoirement connues dans la Résistance et produits par M.GONZALEZ n'atteste que les actions qu'il a accomplies puissent être considérées comme actes de résistance au sens de l'article A.123-I précité ; qu'en particulier, il n'est pas établi qu'il ait distribué des tracts ; qu'il a joué un rôle actif dans le sauvetage de personnes susceptibles d'être victimes de persécutions raciales, dont il ne conteste pas à l'exception de M. Y..., qu'elles n'aient pas été membres de la Résistance ; qu'en ce qui concerne plus précisément M. Y..., celui-ci n'est devenu membre de la Résistance que postérieurement aux actions accomplies à son bénéfice par M. X... et qu'en tout état de cause, il s'agissait d'un acte isolé ne pouvant relever des actes de résistance énumérés à l'article A.123-I ; que M. X... ne peut donc être regardé comme ayant apporté la preuve de sa qualité de combattant telle qu'elle est exigée pour l'attribution du titre correspondant ;
Considérant enfin que M. X... estime que les dispositions précitées sont trop restrictives pour ce qui concerne les activités du type au titre desquelles il revendique les titres sollicités ; qu'il demande au Conseil d'Etat en s'appuyant sur les termes de l'ordonnance du 6 janvier 1943, qui est sans objet avec le litige, de "corriger" ces "omissions" ; qu'il n'appartient pas au Conseil d'Etat de se substituer au législateur qui a voulu limiter les cas d'attribution des titres sollicités et qui a prévu à cette fin que les conditions d'attribution de titres seraient fixées par des textes d'application ; et qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 19 juin et 17 juillet 1986 du secrétariat d'Etat aux anciens combattants refusant de lui attribuer respectivement le titre de combattant et de combattant volontaire de la Résistance ;
Rejet.