Conseil d'Etat, 1 / 4 SSR, du 3 novembre 1997, 150539, inédit au recueil Lebon
Vu la requête, enregistrée le 3 août 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Yves X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 4 septembre 1991 du ministre de l'économie, des finances et du budget, ramenant à 18 % le taux de l'allocation temporaire d'invalidité qui lui avait été attribué à la suite de deux accidents du travail ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 et le décret n° 66-904 du 9 août 1966 qui l'a modifié ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Pineau, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu de l'article 5 du décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960, pris pour l'application des dispositions du statut général de la fonction publique de l'Etat, relatives à l'octroi de l'allocation temporaire d'invalidité, celle-ci est accordée pour une période de cinq ans ; que, toutefois, à l'expiration de cette période, les droits du fonctionnaire font l'objet d'un nouvel examen, dans les conditions fixées à l'article 3 du décret précité ; qu'aux termes de cet article 3, dans sa rédaction issue du décret n° 66-904 du 9 août 1966 : "La réalité des infirmités invoquées par le fonctionnaire, leur imputabilité au service, les conséquences ainsi que le taux d'invalidité qu'elles entraînent sont appréciés par la commission de réforme prévue à l'article L. 31 du code des pensions civiles et miliaires de retraite" ;
Considérant qu'il résulte de l'article 19 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, relatif à la désignation des médecins agréés et à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, que, devant la commission de réforme, dont la compétence consultative englobe, en vertu de l'article 13 du même décret, les questions relatives à l'allocation temporaire d'invalidité, "le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou, par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme" ; qu'il est, en outre, spécifié que l'intéressé "peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux" ;
Considérant que M. X..., inspecteur principal de police, qui était titulaire d'une allocation temporaire d'invalidité au taux de 41 %, a été informé que la commission de réforme se réunirait le 13 septembre 1990 pour émettre un avis sur la révision du taux de son allocation ; qu'il est constant, en revanche, qu'il n'a pas été avisé de ce qu'une seconde réunion de la commission se tiendrait le 21 février 1991 pour qu'il soit délibéré, à nouveau, de son cas ; que, ni le fait que cette nouvelle réunion a eu lieu sur la demande du ministre du budget, ni le fait qu'elle a abouti à la confirmation de l'avis émis le 13 septembre 1990, n'étaient de nature à dispenser l'administration de se conformer aux dispositions réglementaires précitées, qui ont pour objet, préalablement à chaque réunion de la commission de réforme, de permettre au fonctionnaire intéressé de présenter, s'il le souhaite, des observations écrites et de fournir, le cas échéant, des certificats médicaux ; que, dès lors, la décision du 4 septembre 1991 par laquelle le ministre de l'économie, des finances et du budget a ramené à 18 % le taux de l'allocation temporaire d'invalidité qui avait été attribuée à M. X... a été prise à la suite d'une procédure irrégulière et doit, pour ce motif, être annulée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif de Caen en tant que celui-ci a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre la décision ministérielle du 4 septembre 1991 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 15 juin 1993, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. X... dirigées contre l'arrêté ministériel du 4 septembre 1991, ainsi que cet arrêté, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Yves X..., au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre de l'intérieur.