COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 3ème chambre - formation à 3, 29/09/2009, 07LY02339, Inédit au recueil Lebon
Date de décision | 29 septembre 2009 |
Num | 07LY02339 |
Juridiction | Lyon |
Formation | 3ème chambre - formation à 3 |
President | M. FONTANELLE |
Rapporteur | Mme Pascale PELLETIER |
Commissaire | Mme HUMBERT-BOUVIER |
Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2007, présentée par M. François A, demeurant ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 060869 en date du 10 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2006 ayant prononcé sa mise à la retraite d'office pour invalidité non imputable au service ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;
M. A soutient que :
- s'agissant de sa manière de servir : le tribunal ne s'est fondé que partiellement sur une appréciation hiérarchique de 1995 qui estimait aussi qu'il fournissait des services de qualité et qui a fait l'objet d'un jugement du tribunal administratif en date du 27 décembre 1999, lequel a annulé la notation pour l'année 1996 ;
- s'agissant du caractère définitif ou provisoire de son affection : plusieurs avis antérieurs au certificat du Dr B ont conclu au caractère non définitif de l'affection et le tribunal n'a pas tenu compte non plus des arguments et pièces attestant de ce que son poste n'était pas aménagé, de ce que ses troubles étaient liés à la symptomatologie lombaire, et de ce qu'une reprise de travail s'avérait possible : le jugement est donc insuffisamment motivé sur ce point ;
- en ne prenant pas en compte l'absence d'un réel aménagement de son poste de travail et des certificats produits à cet effet, le tribunal n'a pas examiné le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; ces dispositions ainsi que celles de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite impliquent que la mise à la retraite ne puisse être prononcée qu'en cas d'impossibilité pour l'administration de reclasser l'agent ; le décret n° 2000-198 du 6 mars 2000 prévoit à ce titre que plusieurs emplois pouvant être pourvus par la voie du détachement doivent être proposés au fonctionnaire, ce qui n'a pas été fait par l'administration malgré sa demande ;
- le tribunal n'a pas examiné le moyen tiré de l'absence de réexamen de son taux d'incapacité pour troubles lombaires qui était préconisé par le Dr B ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, le mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2008, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, qui conclut au rejet de la requête et reprend devant la Cour les observations en défense produites devant le tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 modifié ;
Vu le décret n° 2000-198 du 6 mars 2000 modifiant le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2009 :
- le rapport de Mme Pelletier, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Humbert-Bouvier, rapporteur public ;
Considérant que, par la présente requête, M. A demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 10 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2006 ayant prononcé sa mise à la retraite d'office pour invalidité non imputable au service ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que, dans son mémoire devant le tribunal administratif enregistré le 22 septembre 2006, M. A soutenait que l'arrêté dont il demandait l'annulation était irrégulier faute pour l'administration de n'avoir effectué aucune démarche pour procéder à son reclassement dans un autre corps de la fonction publique ; que le tribunal administratif n'a pas examiné ce moyen qui n'était pas inopérant ; qu'il s'ensuit que le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer et doit être annulé ; qu'il y a lieu, pour la Cour, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Sur la légalité de l'arrêté du 14 février 2006 :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C, chef du bureau des pensions, des maladies et de l'action sociale au secrétariat général pour l'administration de la police de Lyon avait reçu, par arrêté préfectoral n° 2006-1294 du 10 février 2006, délégation de signature pour signer l'arrêté attaqué en cas d'absence ou d'empêchement de M. Henri D, lui-même autorisé à signer en cas d'absence ou d'empêchement de M. Gilbert E, secrétaire général adjoint ; que celui-ci avait lui-même reçu délégation de signature en cas d'absence ou d'empêchement de M. Jean-Pierre F, secrétaire général, ayant régulièrement reçu délégation du préfet de la zone de défense Sud-Est ; que M. A qui n'apporte aucun élément pour établir que l'un ou l'autre des délégataires n'aurait pas été absent ou empêché, n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;
Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée qui vise l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite et l'incapacité permanente de l'intéressé de continuer à exercer ses fonctions en raison d'infirmités non imputables au service est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ; qu'en particulier, l'intéressé n'étant atteint que d'une seule infirmité non reconnue imputable au service, l'arrêté attaqué n'avait pas à mentionner expressément la nature de cette infirmité ;
Considérant, en dernier lieu, qu'en vertu de l'article 5 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, le comité médical est composé de deux praticiens de médecine générale dont le président, ainsi que d'un médecin spécialiste de l'infirmité pour laquelle l'avis est demandé ; que le procès-verbal de la séance du 6 février 2006 du comité médical interdépartemental de la police nationale mentionne le nom et la qualité du président, du médecin titulaire et du médecin spécialiste ; que contrairement à ce que soutient M. A, ce procès-verbal permet d'établir que les membres du comité médical signataires étaient présents à la séance au cours de laquelle la situation de M. A a été examinée ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'avis médical du psychiatre qui a examiné M. A le 20 janvier 2006, avant la réunion de la commission de réforme, que celui-ci présentait des troubles anxio-dépressifs en rapport avec une personnalité paranoïaque, que le taux d'invalidité de cette affection peut être fixé à 60% et que cette affection psychiatrique le rend définitivement inapte à tout emploi dans la police ; que le requérant ne peut utilement contredire le caractère définitif de cette affection de nature psychiatrique en produisant des certificats médicaux préconisant l'aménagement de son poste de travail dès lors que ces documents concernent une autre affection liée aux séquelles physiques d'accidents de travail ; que le certificat médical établi le 16 janvier 2006 par le Dr G, rhumatologue précisant que les lombalgies dont souffre M. A du fait d'un non aménagement adapté du poste de travail, ont débouché sur le développement d'un syndrome anxio dépressif n'est pas de nature à lui-seul à établir que l'affection psychiatrique dont il souffre serait imputable au service ; qu'enfin, si M. A fait valoir que cette affection a aussi pour origine l'ambiance de travail dans laquelle il se trouve et le harcèlement dont il est l'objet, il n'apporte aucun élément de nature à établir le bien-fondé de ces allégations ; que, dans ces conditions, la décision attaquée ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et n'est pas entachée d'une erreur d'appréciation ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite : Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 peut être radié des cadres soit sur sa demande, soit d'office... ; qu'aux termes de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 : Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration n'est pas tenue de rechercher un poste de reclassement pour un agent dont le reclassement est impossible ;
Considérant que selon le docteur B, l'affection psychiatrique dont souffre M. A le rend définitivement inapte à tout emploi dans la police ; que dans sa séance du 6 février 2006, le comité médical interdépartemental de la Police Nationale a conclu à l'inaptitude absolue, permanente et définitive à tout emploi, même en reclassement, que cette impossibilité de reclassement a été confirmée par la commission de réforme, le 13 février 2006 ; que, compte tenu de ces éléments, M. A n'était pas susceptible de remplir des fonctions dans un corps de reclassement, au sens des dispositions précitées de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 et le préfet de la zone de défense sud-est n'était pas tenu de lui proposer un reclassement dans un autre corps de la fonction publique ;
Considérant enfin que M. A soutient que la décision de le mettre à la retraite pour invalidité est entachée de détournement de pouvoir ; que dans les circonstances de l'espèce, l'administration ne peut être regardée comme ayant agi dans un but étranger à l'intérêt du service ; que le détournement de pouvoir allégué n'est dès lors pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de sa mise à la retraite d'office pour invalidité ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 10 juillet 2007 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. François A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2009 à laquelle siégeaient :
M. Fontanelle, président de chambre,
M. Seillet, premier conseiller,
Mme Pelletier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2009.
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