Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 22/03/2011, 10PA00295, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision22 mars 2011
Num10PA00295
JuridictionParis
Formation4ème chambre
PresidentM. PIOT
RapporteurM. Laurent BOISSY
CommissaireMme DESCOURS GATIN
AvocatsVIDAL

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 janvier et 12 juillet 2010, présentés pour M. Amara A, demeurant ..., par Me Vidal ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0909709/12-1 en date du 14 décembre 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2008 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de la qualité de combattant ;

2°) d'annuler ladite décision ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 publiée au journal officiel de la République française le 24 juillet 2010 ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu l'arrêté du 11 février 1975 relatif aux formations constituant les forces supplétives françaises ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2011 :

- le rapport de M. Boissy, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Descours-Gatin, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité algérienne, a présenté une demande tendant à la reconnaissance de la qualité de combattant qui lui a été refusée par le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, par une décision du 29 décembre 2008 ; que M. A fait appel de l'ordonnance en date du 14 décembre 2009 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : / Les militaires des armées françaises / Les membres des forces supplétives françaises possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande ou domiciliés en France à la même date. / Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. / Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. / Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa. ; qu'aux termes de l'article R. 223 du même code : La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : Sont considérés comme combattants : (...) / D - Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : (...) / c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / I. - Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; / Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; / Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; / 2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; / 3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; / 4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; / 5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; / 6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève (...) ; que l'arrêté inter ministériel du 11 février 1975 susvisé qui énumère les formations constituant les forces supplétives françaises qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 mentionne notamment 1. Les formations de harkis (...) ;

Considérant que M. A, à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2008, a soutenu qu'il avait servi en qualité de harki pendant la guerre d'Algérie en produisant notamment une attestation des services militaires mentionnant une durée des services en Algérie supérieure à quatre mois ; que, dès lors, même si ces arguments et les différentes pièces produites n'étaient pas nécessairement de nature, à eux seuls, à reconnaître à l'intéressé la qualité de combattant, ils étaient toutefois susceptibles de venir au soutien du moyen tiré de la violation des articles L. 253, L. 253 bis et R. 224 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; que, par suite, en jugeant que la demande de M. A pouvait être rejetée par ordonnance sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, au motif que les faits allégués ne pouvaient manifestement pas venir au soutien du moyen soulevé, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a fait une inexacte application de ces dispositions ; que, par suite, l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 14 décembre 2009 doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l' attestation des services militaires établie le 24 mai 2004 par les services du ministre de la défense, dont les mentions ne sont pas contestées, que M. A a servi dans une formation de harkis du 20 décembre 1959 au 8 avril 1962 ; qu'il a donc été membre des forces supplétives françaises pendant une période d'au moins 4 mois et remplit ainsi la condition de services et de durée susanalysée lui ouvrant droit à la reconnaissance de la qualité de combattant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris ne pouvait pas, sans entacher la décision contestée d'illégalité, lui refuser la qualité de combattant au motif qu'il ne justifiait pas d'une présence en Afrique du nord pendant au minimum 120 jours et à en demander l'annulation ;
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 0909709/12-1 en date du 14 décembre 2009 du vice-président du Tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : La décision du 29 décembre 2008 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris a refusé de reconnaître à M. A la qualité de combattant est annulée.
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N° 10PA00295