Conseil d'État, 1ère SSJS, 27/04/2015, 374541

Information de la jurisprudence
Date de décision27 avril 2015
Num374541
Juridiction
Formation1ère SSJS
RapporteurM. Laurent Cytermann
CommissaireM. Alexandre Lallet
AvocatsSCP TIFFREAU, MARLANGE, DE LA BURGADE ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 juillet 2012 par laquelle le maire de la commune de Roissy-en-Brie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. Par un jugement n° 1208061 du 12 novembre 2013, le tribunal administratif de Melun a annulé cette décision.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 janvier et 10 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Roissy-en-Brie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Melun du 12 novembre 2013 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de MmeB... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B...la somme de 3 000 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 2005-442 du 2 mai 2005 ;
- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cytermann, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Tiffreau, Marlange, de la Burgade, avocat de la commune de Roissy-en-Brie, et à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de MmeB....





Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, lors de sa séance du 3 juillet 2012, la commission départementale de réforme de Seine-et-Marne a émis un avis défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de MmeB..., agent titulaire de la commune de Roissy-en-Brie exerçant les fonctions d'agent d'entretien, en se fondant sur la circonstance qu'il s'agissait " d'une tendinite calcifiante, non prise en compte dans le tableau n° 57 ". Par une décision du 24 juillet 2012, la commune a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette maladie, au motif que la commission départementale de réforme avait émis un avis défavorable. Par un jugement du 12 novembre 2013, contre lequel la commune de Roissy-en-Brie se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Melun, saisi par MmeB..., a annulé la décision du 24 juillet 2012.

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps (...) peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ".

3. Aucune disposition ne rend applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale qui demandent le bénéfice des dispositions combinées du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau.

4. Il en résulte que le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la commune de Roissy-en-Brie n'avait pu légalement se fonder, pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont était atteinte MmeB..., sur la seule circonstance que l'affection en cause n'était pas prise en compte dans le tableau n° 57 des maladies professionnelles.

5. En outre, le décret du 2 mai 2005 relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière n'est pas applicable à la reconnaissance de l'imputation d'une maladie au service pour le bénéfice du maintien d'un congé de maladie à plein traitement. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'article 2 de ce décret renvoie, pour la définition des invalidités ouvrant droit à cette allocation, aux articles L. 461-1 et L. 461-2 du code de la sécurité sociale, était sans incidence sur la solution du litige et le tribunal administratif de Melun pouvait s'abstenir d'y répondre sans entacher son jugement d'insuffisance de motivation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Roissy-en-Brie n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

7. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de MmeB..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Roissy-en-Brie une somme de 3 000 euros à verser à Mme B....



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la commune de Roissy-en-Brie est rejeté.
Article 2 : La commune de Roissy-en-Brie versera à Mme B...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Roissy-en-Brie et Mme A...B....

ECLI:FR:CESJS:2015:374541.20150427