Conseil d'État, 10ème chambre, 05/10/2016, 387025, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au tribunal des pensions de Rennes d'annuler la décision n° 50199 du 26 septembre 2011 du ministre de la défense rejetant sa demande de paiement d'une pension militaire d'invalidité en raison d'un adénome carcinome bronchique diagnostiqué en 2009. Par un jugement n° RG 11/00149 du 12 décembre 2013, ce tribunal a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° RG 13/00011 du 7 novembre 2014, la cour régionale des pensions de Rennes a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 9 janvier et 9 avril 2015, M. A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la décision du 29 juin 2015 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a pas renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. A...;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Manon Perrière, auditeur,
- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Blondel, avocat de M. A...;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... A... souffre d'un carcinome broncho-pulmonaire dont le diagnostic a été formulé en 2009 ; qu'il a saisi le tribunal des pensions militaires de Rennes de la décision du ministre de la défense du 26 septembre 2011 rejetant sa demande de pension au titre de cette pathologie ; qu'il se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour régionale des pensions de Rennes du 7 novembre 2014 qui a confirmé le jugement du tribunal des pensions de Rennes du 12 décembre 2013 rejetant son recours contre la décision du ministre ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : / 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (...) " ;
3. Considérant que ces dispositions organisent les conditions et modalités de reconnaissance de l'imputabilité au service des maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service, en vue de l'octroi d'une pension militaire d'invalidité ; qu'elles s'appliquent aux militaires au titre de leurs années de service dans l'un des trois corps d'armée ; qu'aucune disposition ne rend applicables à ces derniers les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...sollicite l'attribution d'une pension militaire d'invalidité en raison de l'imputabilité du cancer bronchique dont il souffre à l'inhalation de poussières d'amiante auxquelles il a été exposé au cours de ses années de service dans la marine nationale ; qu'en conséquence, les articles L. 2 et L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre lui sont applicables ; que dès lors, en relevant, pour rejeter sa requête, que les conditions tenant à la liste limitative des travaux figurant au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles n'étaient pas remplies, la cour régionale des pensions de Rennes a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Rennes du 7 novembre 2014 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Caen.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre de la défense.