CAA de NANCY, 3ème chambre - formation à 3, 20/12/2016, 15NC02304, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision20 décembre 2016
Num15NC02304
JuridictionNancy
Formation3ème chambre - formation à 3
PresidentMme ROUSSELLE
RapporteurM. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
CommissaireM. COLLIER
AvocatsKUMMER

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'ordonner à l'administration de produire son entier dossier dont son dossier médical, d'annuler la décision du 28 mai 2013 par laquelle le gouverneur militaire de Metz a résilié son contrat d'engagement à titre disciplinaire, d'annuler la décision du 9 octobre 2013 par laquelle le chef d'état major de l'armée de terre a confirmé la décision du 28 mai 2013, d'ordonner sa réintégration juridique et sa réintégration dans ses droits à pension, d'enjoindre au ministre de la défense de lui accorder le bénéfice de l'indemnisation chômage pour perte involontaire d'emploi, de lui allouer une somme de 15 000 euros en réparation des préjudices résultant de la résiliation illégale de son contrat d'engagement, de confirmer son droit à obtenir l'indemnisation financière de l'accident de service survenu en 2011 et d'enjoindre au ministre de la défense de le convoquer devant la commission de réforme.

Par un jugement n° 1302902 du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté l'ensemble de ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2015, M. A... B..., représenté par Me Kummer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 29 septembre 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 28 mai 2013 par laquelle le gouverneur militaire de Metz a résilié son contrat d'engagement à titre disciplinaire, ainsi que la décision du 9 octobre 2013 par laquelle le chef d'Etat-major de l'armée de terre a confirmé cette décision ;

3°) d'ordonner à l'administration de produire son entier dossier, dont son dossier médical, dans le cadre de la présente instance ;

4°) de condamner l'Etat à lui allouer une somme de 15 000 euros en réparation des préjudices résultant de la résiliation illégale de son contrat d'engagement ;

5°) de confirmer son droit à obtenir l'indemnisation financière de l'accident survenu en 2011 pendant son service ;

6°) d'enjoindre à l'administration de procéder à sa réintégration juridique et à sa réintégration dans ses droits à pension, de lui accorder le bénéfice de l'indemnisation chômage pour perte involontaire d'emploi et de le convoquer devant la commission de réforme ;

7°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- son contrat d'engagement a été résilié sans que l'administration le mette régulièrement en demeure de reprendre le service et l'informe de ses droits et des conséquences disciplinaires d'un éventuel refus ;
- l'administration n'établit pas qu'il aurait reçu les courriers des 28 février et 29 avril 2013 le mettant en demeure de reprendre son service ;
- l'autorité militaire avait connaissance de ce qu'il faisait l'objet d'un arrêt pour cause de maladie dès le mois de mars 2013, avant l'envoi de la seconde mise en demeure ;
- le conseil d'enquête n'a pas été consulté ;
- les décisions contestées sont entachées de détournement de procédure et de pouvoir ;
- elles sont entachées d'erreurs de fait et de droit dès lors qu'à l'issue de la visite médicale du 11 février 2013, il a été autorisé à s'absenter du service dans l'attente que la commission de réforme se prononce sur sa situation, puis a fait l'objet d'arrêts de travail à compter du 15 mars 2013 ;

- ses conclusions indemnitaires sont recevables dès lors qu'il a présenté, par un courrier du 1er août 2013, une demande de réparation à l'administration, que celle-ci s'est abstenue de transmettre cette demande à la commission des recours des militaires, qu'il n'a pas été invité à saisir cette commission et que sa demande a été rejetée par la décision du 9 octobre 2013 ;
- ses préjudices matériel et moral s'établissent à 15 000 euros ;
- le tribunal administratif a omis de se prononcer sur sa demande tendant à ce que l'administration produise son dossier médical à l'instance ;
- il est fondé à présenter cette demande et à solliciter qu'il soit enjoint à l'administration de le convoquer devant la commission de réforme, afin qu'il puisse faire valoir ses droits à réparation à la suite de son accident survenu en octobre 2011 ;
- ces demandes ne sont pas irrecevables malgré l'absence de chiffrage de son préjudice dès lors qu'il en a rappelé les éléments d'appréciation dans sa demande préalable.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 26 juillet 2016 et le 24 octobre 2016, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.

Le ministre de la défense fait valoir que :

- les moyens de la requête au soutien des demandes d'annulation ne sont pas fondés ;
- le requérant n'est pas fondé, en l'absence de faute, à demander l'indemnisation des préjudices résultant de son licenciement ;
- il ne justifie ni de troubles dans ses conditions d'existence, ni d'un préjudice moral ;
- les conclusions tendant à la réparation de son accident de service son irrecevables dès lors que l'intéressé a omis de saisir la commission des recours des militaires après le rejet de sa demande préalable, qu'il n'a présenté aucune demande tendant au bénéfice d'une pension d'invalidité et qu'il ne chiffre pas le montant de son préjudice ;
- seul le tribunal départemental des pensions a compétence pour se prononcer sur un refus de versement de pension.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'indemnisation des conséquences dommageables de l'accident dont M. B...a été victime au cours du mois d'octobre 2013 pendant son service dès lors que l'intéressé a saisi la juridiction sans avoir exercé un recours préalable devant la commission de recours des militaires.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 26 mai 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de la défense ;
- le code de justice militaire ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq,
- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.

1. Considérant que M. B...a souscrit un contrat d'engagement volontaire dans l'armée de terre, pour une durée de cinq ans à compter du 4 janvier 2011, et a été affecté au premier régiment de chasseurs de Thierville-sur-Meuse en qualité de soldat, membre d'équipage d'engin blindé ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, victime d'un accident pendant son service au cours du mois d'octobre 2011, a été placé en congé de maladie de mars à juin 2012 puis de novembre 2012 à février 2013 ; que, constatant l'absence irrégulière de M. B...depuis le 19 février 2013, l'autorité militaire lui a adressé un courrier en date du 28 février 2013 le mettant en demeure de reprendre son service au plus tard le 25 mars suivant puis, par un courrier en date du 29 avril 2013, l'a de nouveau mis en demeure de se présenter au service au plus tard le 20 mai 2013 ; que M. B...n'a pas repris son service à l'issue de ces mises en demeure ; que, par une décision en date du 28 mai 2013, le gouverneur militaire de Metz a résilié le contrat d'engagement à titre disciplinaire pour abandon de poste ; que, par un courrier du 1er août 2013, le requérant a saisi, sous couvert de son conseil, le ministre de la défense d'un recours hiérarchique formé contre la décision du 28 mai 2013 et a sollicité en outre l'indemnisation des conséquences dommageables de l'accident précité, survenu en octobre 2011 ; que ce recours hiérarchique a été rejeté par une décision expresse du chef d'Etat-major de l'armée de terre du 9 octobre 2013 ; que M. B... a demandé au tribunal administratif de Nancy l'annulation des décisions des 28 mai et 9 octobre 2013, l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la résiliation de son contrat, ainsi que la production de son dossier médical, la reconnaissance de son droit à obtenir réparation des dommages résultant de l'accident survenu pendant le service, et une mesure d'injonction aux fins que l'administration le convoque devant la commission de réforme ; que le requérant relève appel du jugement du 29 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté l'ensemble de ses demandes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si M. B...a présenté devant le tribunal administratif de Nancy une demande tendant à ce que cette juridiction ordonne à l'administration de produire son entier dossier, dont son dossier médical, et s'il reproche aux premiers juges de n'avoir pas diligenté une telle mesure d'instruction, cette demande, touchant à la conduite de l'instruction, ne saurait être regardée ni comme une conclusion ni comme un moyen sur lesquels il appartenait à la juridiction de se prononcer ; que par suite, le tribunal administratif a pu sans entacher sa décision d'irrégularité rejeter les conclusions d'annulation dont il était saisi par M. B...en se bornant à relever, à cette occasion, l'absence de nécessité présentée par la mesure d'instruction sollicitée par le requérant ;

Sur les conclusions se rapportant à la résiliation du contrat d'engagement :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-2 du code de justice militaire : " Est considéré comme déserteur à l'intérieur en temps de paix : 1° Six jours après celui de l'absence constatée, tout militaire qui s'absente sans autorisation de son corps ou détachement, de sa base ou formation (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 4137-1 du code de défense : " Sans préjudice des sanctions pénales qu'ils peuvent entraîner, les fautes ou manquements commis par les militaires les exposent : 1° A des sanctions disciplinaires prévues à l'article L. 4137-2 (...) / Le militaire à l'encontre duquel une procédure de sanction est engagée a droit à la communication de son dossier individuel, à l'information par son administration de ce droit, à la préparation et à la présentation de sa défense " ; qu'aux termes de l'article L. 4137-2 du même code : " Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes : (...) 3° Les sanctions du troisième groupe sont : (...) b) La radiation des cadres ou la résiliation du contrat. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 4137-3 : " Doivent être consultés : (...) 3° Un conseil d'enquête avant toute sanction disciplinaire du troisième groupe. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4137-92 de ce code : " (...) En cas d'absence illégale ou de désertion avant la procédure, une sanction disciplinaire du troisième groupe peut être prononcée sans que soit demandé l'avis d'un conseil d'enquête. Dans ce cas, la décision prononçant la sanction disciplinaire doit être précédée de l'envoi à la dernière adresse connue du militaire d'une mise en demeure, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, l'enjoignant de rejoindre sa formation administrative et lui indiquant les conséquences disciplinaires de son abandon de poste " ;
4. Considérant qu'il appartient à un militaire en situation d'absence de communiquer à son administration le ou les certificats médicaux le plaçant en arrêt de travail ; que pour éviter d'être en situation de désertion, le militaire doit procéder à cette communication avant la date limite fixée par la mise en demeure de reprendre son service que l'administration lui a adressée ;
5. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., en situation d'absence irrégulière depuis le 12 février 2013 et déclaré en situation de désertion le 19 février 2013, a été mis en demeure, par un courrier du 28 février 2013, de reprendre son service au plus tard le 25 mars suivant ; qu'il ressort du rapport établi le 25 mars 2013 par le commandant du régiment dans lequel le requérant était affecté que ce dernier a transmis au service un avis d'arrêt de travail pour la période du 15 au 31 mars 2013 ; qu'ainsi, M. B..., qui a transmis à son administration un certificat médical le plaçant en arrêt de travail avant le 25 mars 2013, date limite fixée par la mise en demeure précitée, ne pouvait plus, à la suite de cette mise en demeure, être considéré comme se trouvant situation de désertion ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il n'est pas sérieusement contesté par le ministre de la défense que le requérant a encore produit des avis d'arrêt de travail justifiant de son absence pour la période du 1er au 29 avril 2013 inclus ; que le ministre soutient avoir adressé à M. B...le 29 avril 2013 une nouvelle mise en demeure de reprendre le service, par lettre recommandée avec accusé de réception, que l'intéressé conteste expressément avoir reçue ; que, pour justifier de cette notification, l'administration produit à l'instance deux documents justifiant, respectivement, du dépôt d'une lettre recommandée n° 1A 076 846 2365 5 et de la distribution d'une lettre recommandée n° 1A 076 846 2358 7 ; que le premier document est illisible et ne justifie ni de la réception de la mise en demeure du 29 avril 2013 par M.B..., ni que celui-ci en aurait été avisé par les services de La Poste ; que le second document qui indique que M. B...a été avisé le 14 avril 2013 d'un pli qu'il n'a pas réclamé ne peut se rapporter, eu égard à la date précitée, à la mise en demeure du 29 avril 2013 ; que par suite, faute pour l'administration d'établir qu'une mise en demeure a été préalablement adressée au requérant afin de lui impartir un délai approprié pour rejoindre son service, ce dernier est fondé à soutenir que la décision du 28 mai 2013 prononçant la résiliation de son contrat d'engagement à titre disciplinaire est entachée d'illégalité ;
7. Considérant qu'il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à solliciter l'annulation de la décision du 28 mai 2013, ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation de la décision du 9 octobre 2013 rejetant son recours gracieux ;
En ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnisation :
8. Considérant qu'en raison de l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision de résiliation de son contrat d'engagement au motif qu'il ne s'est pas vu impartir un délai approprié pour reprendre son poste, M. B...a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de cette mesure illégalement prise à son encontre ; que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité ;
9. Considérant, d'une part, que M.B..., licencié le 28 mai 2013, a été privé des revenus qu'il pouvait espérer percevoir depuis cette dernière date jusqu'au 4 janvier 2016, date prévue pour la fin de son contrat d'engagement ; qu'eu égard au montant du salaire perçu par l'intéressé lorsqu'il était en activité, lequel correspond au salaire minimum moyen, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait pu se procurer une rémunération par son travail au cours de la période d'éviction, les pertes de revenus doivent être évaluées à 36 000 euros ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par le requérant en l'évaluant à 4 000 euros ; qu'ainsi, les préjudices subis par M. B...s'établissent à 40 000 euros ;
10. Considérant, d'autre part, que M. B...ne produit aucun élément de nature à justifier de ses absences à compter du 30 avril 2013, alors qu'il ne pouvait ignorer qu'il se trouvait en situation irrégulière après cette date ; que son abstention à reprendre le service et à justifier de son absence présentent un caractère fautif et ont contribué aux préjudices dont il demande réparation ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'exonérer l'administration des conséquences de sa responsabilité dans une proportion de trois quarts et d'allouer à M. B... une somme globale de 10 000 euros ;
Sur les conclusions se rapportant à l'accident subi par M. B...pendant son service :
11. Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions du I de l'article R. 4125-1 du code de la défense, et sous réserve des exceptions prévues au II du même article, tout recours contentieux formé par un militaire contre des actes relatifs à sa situation personnelle doit être précédé, à peine d'irrecevabilité, d'un recours administratif préalable, que ce recours tende à l'annulation d'une décision ou à l'octroi d'une indemnité à la suite d'une décision ayant lié le contentieux ; qu'aux termes de l'article R. 4125-2 du même code : " A compter de la notification ou de la publication de l'acte contesté, ou de l'intervention d'une décision implicite de rejet d'une demande, le militaire dispose d'un délai de deux mois pour saisir la commission par lettre recommandée avec avis de réception adressée au secrétariat permanent placé sous l'autorité du président de la commission. / La lettre de saisine de la commission est accompagnée d'une copie de l'acte. Dans le cas d'une décision implicite de rejet, la lettre de saisine est accompagnée d'une copie de la demande (...) " ; qu'il incombe au juge, s'il est saisi par le militaire d'un recours qui n'a été valablement précédé d'aucun recours administratif préalable, de le rejeter comme irrecevable, alors même que l'administration présenterait devant lui des observations au fond ;
12. Considérant que, par un courrier du 1er août 2013, M. B...a demandé au ministre de la défense l'indemnisation des dommages résultant de l'accident survenu en service au cours du mois d'octobre 2011 ; que si le silence conservé par le ministre sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet propre à lier le contentieux, le requérant a omis, après l'intervention de cette décision, de saisir la commission de recours des militaires, ainsi qu'il était tenu de le faire avant de saisir la juridiction ; qu'ainsi, ses conclusions tendant à obtenir la réparation des conséquences dommageables de l'accident précité sont irrecevables ;
13. Considérant, en second lieu, qu'il n'appartient pas au juge administratif d'adresser, en dehors des cas prévus par les dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, des injonctions à l'administration à titre principal ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables les conclusions présentées par M. B...tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de la défense de saisir la commission de réforme ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée par M. B..., que celui-ci est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions des 28 mai et 9 octobre 2013 et à la réparation des conséquences dommageables résultant de ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Considérant que l'annulation d'une décision ayant irrégulièrement évincé un agent public impose à l'autorité compétente de procéder à la réintégration juridique de l'intéressé à la date de cette décision et de prendre rétroactivement les mesures nécessaires pour reconstituer sa carrière et le placer dans une situation régulière ; que le présent arrêt, par lequel la cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. B...implique nécessairement, pour son exécution, qu'il soit enjoint au ministre de la défense de procéder à la réintégration juridique de l'intéressé et à la reconstitution de ses droits sociaux, notamment ses droits à pension, pour la période du 28 mai 2013, date de l'éviction de l'intéressé, jusqu'au 4 janvier 2016, date prévue pour la fin de son contrat d'engagement ; qu'en revanche, il n'implique pas le bénéfice, pendant la période d'éviction, de l'indemnisation chômage pour perte involontaire d'emploi ; que, par suite, il y a seulement lieu d'enjoindre au ministre de la défense de procéder à la réintégration juridique du requérant et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la période précitée dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Kummer, avocate de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette avocate de la somme de 1 200 euros ;



D E C I D E :


Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1302902 du 29 septembre 2015 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions présentées par M. B... à fin d'annulation de la décision du 28 mai 2013 par laquelle le gouverneur militaire de Metz a résilié son contrat d'engagement à titre disciplinaire et de la décision du 9 octobre 2013 par laquelle le chef d'état major de l'armée de terre a confirmé cette décision.

Article 2 : Les décisions du 28 mai 2013 et du 9 octobre 2013 sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de la défense de procéder à la réintégration juridique du requérant et à la reconstitution de ses droits sociaux pour la période du 28 mai 2013 au 4 janvier 2016, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat est condamné à verser la somme de 10 000 (dix mille) euros à M. B....

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1302902 du 29 septembre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article précédent.

Article 6 : L'Etat versera à Me Kummer une somme de 1 200 (mille deux cents) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que le conseil de M. B...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme, président de chambre,
- Mme, président-assesseur,
- M., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2016.

Le rapporteur,
Signé : Le président,
Signé : Le greffier,
Signé : La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier :


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N° 15NC02304