CAA de LYON, 3ème chambre - formation à 3, 31/01/2017, 15LY00283, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision31 janvier 2017
Num15LY00283
JuridictionLyon
Formation3ème chambre - formation à 3
PresidentM. ALFONSI
RapporteurMme Nathalie PEUVREL
CommissaireM. CLEMENT
AvocatsBRUN

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

I. Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 19 décembre 2011 par lesquelles le directeur du centre hospitalier "Lucien Hussel" de Vienne a, d'une part, renouvelé son placement en disponibilité d'office à compter du 1er août 2011 et, d'autre part, supprimé son traitement pour les mois d'août à octobre 2011 ;

II. Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 20 juin 2012 par laquelle le directeur du centre hospitalier "Lucien Hussel" de Vienne a renouvelé son placement en disponibilité d'office à compter du 1er mai 2012 et de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1200374-1204574 du 23 septembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2015, MmeB..., représentée par Me Brun, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 septembre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions des 19 décembre 2011 et 20 juin 2012 susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier "Lucien Hussel" de Vienne le versement d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que les décisions du 19 décembre 2011 et du 20 juin 2012 sont illégales en ce qu'elles sont rétroactives.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2015, le centre hospitalier "Lucien Hussel" de Vienne, représenté par la SELARL BCV Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de MmeB....

Il fait valoir que :
- la décision du 19 décembre 2011 n'est contestée qu'en tant qu'elle renouvelle le placement en disponibilité d'office de Mme B...;
- dans la mesure où l'intéressée a refusé toute visite médicale et s'est abstenue de solliciter son admission à la retraite, la disponibilité d'office constituait la seule position régulière dans laquelle il pouvait la placer ; dès lors, le caractère rétroactif des décisions contestées n'est pas illégal.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 20 octobre 2016, le centre hospitalier "Lucien Hussel" informe la cour que Mme A...B...est décédée le 29 novembre 2015 et qu'aucun ayant-droit ne s'est manifesté depuis auprès de lui.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 novembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller,
- les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public,
- et les observations de Me Madjri, pour MmeB..., ainsi que celles de MeC..., pour le centre hospitalier "Lucien Hussel" de Vienne ;



1. Considérant que MmeB..., agent titulaire du centre hospitalier "Lucien Hussel" de Vienne, a été placée en congé de longue durée du 23 décembre 2004 au 22 décembre 2009 ; que le centre hospitalier l'a placée en position de disponibilité d'office pour une période de six mois à compter du 1er mars 2011 par décision du 22 février 2011 ; que, par décisions du 19 décembre 2011 et du 20 juin 2012, elle a été maintenue dans cette position à compter du 1er août 2011 pour une période de neuf mois et du 1er mai 2012 pour une période de douze mois ; que sa demande tendant à l'annulation de ces deux dernières décisions a été rejetée par jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 septembre 2014, dont Mme B...relève appel ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son établissement, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 41 et à l'article 43 et dans les cas prévus aux articles 55 et 56 ou à l'issue de la période correspondant à la situation définie à l'article 50-1. (...) " ; qu'aux termes de l'article 35 du décret du 19 avril 1988 susvisé : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. (...) " ; qu'aux termes de l'article 36 du même décret : " La mise en disponibilité prévue aux articles 17 et 35 du présent décret est prononcée après avis du comité médical ou de la commission départementale de réforme sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions. / Elle est accordée pour une durée maximale d'un an et peut être renouvelée à deux reprises pour une durée égale. / Toutefois, si à l'expiration de la troisième année de disponibilité le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, mais s'il résulte d'un avis du comité médical qu'il doit normalement pouvoir reprendre ses fonctions avant l'expiration d'une nouvelle année, la disponibilité peut faire l'objet d'un troisième renouvellement. / L'avis est donné par la commission de réforme lorsque le congé antérieur a été accordé en vertu du deuxième alinéa du 4° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. / Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical. Toutefois, lors du dernier renouvellement de la mise en disponibilité, c'est la commission de réforme qui est consultée. " ;
3. Considérant que, si les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir, s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires, des militaires ou des magistrats, l'administration peut, en dérogation à cette règle, leur conférer une portée rétroactive dans la stricte mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., convoquée le 15 décembre 2009 devant le médecin du travail, puis le 21 décembre 2009 devant un expert médical, ne s'est pas présentée à ces consultations, puis a refusé toute visite médicale ; que le comité médical, le médecin du travail et la commission de réforme ont constaté qu'ils ne disposaient pas des éléments médicaux leur permettant d'émettre un avis sur l'aptitude de l'intéressée à reprendre ses fonctions ou sa mise en retraite pour invalidité ; qu'à compter du 1er juin 2011, Mme B...a rempli les conditions lui permettant de bénéficier d'une pension de retraite à taux plein ; qu'elle n'a, toutefois, pas sollicité son admission à la retraite ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que les décisions contestées du centre hospitalier "Lucien Hussel", qui était tenu de la placer dans une position statutaire régulière le temps que les organismes médicaux compétents se prononcent sur sa capacité à reprendre ses fonctions, seraient entachées d'illégalité en raison de leur caractère rétroactif ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier "Lucien Hussel", qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'avocat de la requérante de la somme demandée au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...la somme que demande le centre hospitalier "Lucien Hussel" en application de ces dispositions ;


DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier "Lucien Hussel" tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me Madjri, avocat de Mme A...B..., et au centre hospitalier "Lucien Hussel".
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,
- M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2017.
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N° 15LY00283