CAA de PARIS, 6ème chambre, 02/05/2017, 16PA01582, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 30 septembre 2014 par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant et d'enjoindre à cet office de lui délivrer la carte de combattant.
Par un jugement n°1428265 du 8 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 mai 2016 et 17 février 2017, M. C... représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 30 septembre 2014, par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ;
3°) à titre subsidiaire d'enjoindre à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre de fournir son entier dossier militaire, le cas échéant sous astreinte et de surseoir à statuer dans l'attente de cette production.
Il soutient que :
- il satisfait aux conditions posées par l'article L. 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dès lors que si son état de service ne mentionne que son transfert à Mazagan le 5 novembre 1955, il a en réalité été rappelé dans l'armée dès le mois d'août 1955 et jusqu'au 15 février 1956, nonobstant la circonstance que, ne possédant plus son avis d'incorporation, il ne peut justifier de la date de son rappel ;
- la Cour ne peut se fonder sur son état de service incomplet pour rejeter sa requête et, ne pouvant exiger du requérant de rapporter la preuve de sa date d'incorporation, elle doit mettre en oeuvre ses pouvoirs d'instruction en exigeant de l'administration la production de son entier dossier militaire.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2016, l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 23 février 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mars 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Labetoulle,
- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.
1. Considérant que M. A...C...a sollicité auprès de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre l'attribution de la carte de combattant ; que par décision du 30 septembre 2014, la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre a rejeté sa demande ; que l'intéressé a saisi le Tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision par jugement du 8 mars 2016 dont M. C...interjette appel ;
Sur les conclusions à fins d'injonction sous astreinte et de sursis à statuer :
2. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties et que si celui-ci peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance ; que, le cas échéant, il revient au juge, avant de se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l'administration en défense, de mettre en oeuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l'administration compétente la production de tout document susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur ;
3. Considérant que le requérant fait valoir qu'il aurait été rappelé dès le mois d'août 1955 à Casablanca, avant d'être transféré à Mazagan le 5 novembre 1955 mais convient ne pas apporter la preuve de cette allégation qui contredit les mentions de son état de service ; que la circonstance qu'il n'existerait pas de trace de son incorporation à Mazagan ne permet pas d'établir, contrairement à ce qu'il soutient, qu'il aurait été incorporé à une date et en un lieu antérieur ni moins encore que cette incorporation aurait eu lieu à Casablanca en août 1955 alors qu'il n'existe aucune trace d'une telle incorporation ; que ses allégations relatives à son incorporation supposée à Casablanca en août 1955 ne peuvent ainsi être regardées comme des allégations suffisamment sérieuses et non démenties par les éléments versés au dossier en défense alors qu'elles sont contredites par l'extrait de son état de service et ne sont corroborées par aucune autre pièce ; qu'il n'est par suite pas fondé à demander à la Cour de mettre en oeuvre ses pouvoirs généraux d'instruction en enjoignant à l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre de produire, le cas échéant sous astreinte, son entier dossier militaire et de surseoir à statuer dans l'attente de cette production ; que ces conclusions à fins d'injonction et de sursis à statuer ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 " ; qu'aux termes de l'article R. 223 de ce code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code "Sont considérés comme combattants : (...)D-Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : a) En Tunisie, à compter du 1er janvier 1952 ; b) Au Maroc, à compter du 1er juin 1953 ; c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. I.-Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ;2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; 3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; 4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; 5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; 6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève. II.-Les listes des unités combattantes des armées de terre, de mer et de l'air, de la gendarmerie et des services communs et des formations des forces supplétives françaises assimilées sont établies par le ministre de la défense sur les bases suivantes : Sont classées, pour une durée d'un mois, comme unités combattantes ou formations assimilées, les unités et formations impliquées dans au moins trois actions de feu ou de combat distinctes au cours d'une période de trente jours consécutifs.Les éléments détachés auprès d'une unité reconnue comme combattante suivent le sort de cette unité. Des bonifications afférentes à des opérations de combat limitativement désignées peuvent être accordées. La liste de ces opérations et bonifications est fixée par un arrêté conjoint du ministre de la défense et du secrétaire d'Etat aux anciens combattants " ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis alors en vigueur du même code : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 : Les militaires des armées françaises, Les membres des forces supplétives françaises, Les personnes civiles possédant la nationalité française à la date de la présentation de leur demande qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. Une commission d'experts, comportant notamment des représentants des intéressés, est chargée de déterminer les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. Les adaptations visées au premier alinéa ci-dessus ainsi que les modalités d'application du présent article, et notamment les périodes à prendre en considération pour les différents théâtres d'opérations, seront fixées par décret en Conseil d'Etat ; un arrêté interministériel énumérera les catégories de formations constituant les forces supplétives françaises. Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa, y compris lorsque ces services se sont poursuivis au-delà du 2 juillet 1962 dès lors qu'ils n'ont connu aucune interruption ".
5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que sont considérés comme combattants, pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus, notamment les personnes ayant appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation assimilée à une unité combattante ou satisfaisant à une autre des conditions posées par l'article R. 224 D précité et que par ailleurs pour une personne ayant servi en Algérie, en Tunisie ou au Maroc une durée de quatre mois de services dans l'un de ces pays est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat requises par ailleurs ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier et notamment de l'état de services de l'intéressé que M. C...a servi dans l'armée française en qualité de rappelé du contingent affecté au sein du 1er groupe du 7ème régiment d'artillerie antiaérienne coloniale au Maroc du 5 novembre 1955 au 15 février 1956 ; que le 1er groupe du 7ème régiment d'artillerie antiaérienne coloniale n'ayant été reconnu comme une unité combattante que pour la période du 2 au 31 août 1958, le requérant ne conteste pas ne pouvoir être regardé comme ayant appartenu à une unité combattante et ne satisfaire à aucune autre des conditions posées par l'article R. 224 D précité ; qu'il fait en revanche valoir que nonobstant les mentions de son état de service, il aurait été rappelé dès le mois d'août 1955 à Casablanca, avant d'être transféré à Mazagan le 5 novembre 1955 et justifierait ainsi d'une durée de service de plus de quatre mois, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article L. 253 bis précité ; que toutefois, ainsi qu'il a déjà été dit au point 3 il convient ne pas apporter la preuve de cette allégation qui contredit les mentions de son état de service ; qu'il ne peut dès lors être tenu pour établi qu'il justifierait d'une durée de service de quatre mois dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article L. 253 bis précité ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2014, par laquelle la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de la défense.
Copie en sera adressé à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre.
Délibéré après l'audience du 18 avril 2017, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2017.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERANDLa République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01582