CAA de PARIS, 6ème chambre, 02/05/2017, 16PA02469, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision02 mai 2017
Num16PA02469
JuridictionParis
Formation6ème chambre
PresidentMme FUCHS TAUGOURDEAU
RapporteurMme Marie-Isabelle LABETOULLE
CommissaireM. BAFFRAY
AvocatsG&B GARRIGUES BEAULAC ASSOCIES

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté 2015/460 du 12 mai 2015 par lequel le maire de Brie-Comte-C... l'a placée en congé de maladie ordinaire pour la période du 31 mai 2015 au 3 juin 2015, d'annuler la décision du maire de Brie-Comte-C... du 26 mai 2015 l'informant que la date de consolidation de son état de santé était fixée au 30 mai 2015 avec une incapacité permanente partielle (IPP) de 25%, d'enjoindre à la commune de Brie-Comte-C... de la placer rétroactivement en congé pour accident de service à compter du 31 mai 2015 et de retenir un taux d'IPP de 70% sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de statuer de nouveau et de mettre à la charge de la commune de Brie-Comte-C... une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens éventuels.

Par un jugement n° 1506174 du 1er juin 2016 le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 12 mai 2015 du maire de Brie-Comte-C... plaçant Mme B...en congé pour maladie ordinaire du 31 mai au 3 juin 2015, ainsi que la décision du 26 mai 2015 et a enjoint au maire de saisir la commission de réforme dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et de statuer sur la demande de Mme B...dans un délai d'un mois suivant la réception de l'avis de la commission de réforme.
Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2016, la commune de Brie-Comte-C... demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er juin 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de rejeter la demande de Mme B...présentée devant le Tribunal administratif de Melun ;

3°) de mettre à la charge de Mme B...le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le tribunal administratif a à tort jugé que la commission de réforme aurait du être saisie avant l'intervention des décisions attaquées alors d'une part, que l'article 13 du décret du 14 mars 1986 exclut cette saisine lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration et d'autre part, qu'aucun texte ne prévoit la saisine de cette commission pour fixer la date de consolidation de l'état de l'agent et son éventuel taux d'IPP.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2017, Mme B...demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Brie-Comte-C... une somme de 4 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 janvier 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 février 2017.
Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;
- le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ;
- le décret n°2005-442 du 2 mars 2005 relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- les observations de MeD..., pour la commune de Brie-Comte-C...,
- et les observations de MeA..., pour MmeB....

Une note en délibéré, enregistrée le 20 avril 2017, a été présentée par MeD..., pour la commune de Brie-Comte-C....



1. Considérant que Mme B..., agent administratif de la commune de Brie-Comte-C..., a été victime le 28 janvier 2010 d'un accident qui a été reconnu imputable au service par son employeur, et a été placée de ce fait en congé de maladie durant de longues périodes ; que cette commune a, au printemps 2015, saisi un rhumatologue agréé d'une demande d'expertise de l'état de MmeB... ; que suivant les conclusions de cette expertise en date du 4 mai 2015, elle a, par décision communiquée à l'intéressée par lettre du 26 mai 2015, fixé au 30 mai 2015 la date de consolidation de son état de santé, et retenu une incapacité permanente partielle à hauteur de 25% ; qu'entretemps, Mme B...ayant adressé à la commune un nouvel arrêt de maladie pour la période du 6 mai au 3 juin 2015, la commune, tirant les conséquences de l'expertise diligentée fixant la date de consolidation au 30 mai 2015 a, par arrêté du 12 mai 2015, placé l'intéressée en congé de maladie ordinaire pour la période du 31 mai au 3 juin 2015 ; que Mme B...a dès lors saisi le Tribunal administratif de Melun qui a annulé cet arrêté du 12 mai 2015 ainsi que la décision contenue dans la lettre du 26 mai 2015, par un jugement du 1er juin 2016 dont la commune interjette appel ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée: " Le fonctionnaire en activité a droit : (...)2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 58./ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite./ Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales./ (...) " ; qu'aux termes de l'article 16 du décret du 30 juillet 1987 susvisé : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2e alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné. / Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé. / La commission de réforme n'est pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. La commission de réforme peut, en tant que de besoin, demander à l'administration de lui communiquer les décisions reconnaissant l'imputabilité. " ;

3. Considérant que ces dernières dispositions n'excluent la saisine de la commission de réforme que pour autant que l'imputabilité au service de la maladie est reconnue par l'administration ; qu'elles ne peuvent dès lors avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser la collectivité employeur de saisir cette commission pour déterminer le régime applicable pour les périodes pour lesquelles cette imputabilité n'est pas reconnue ; qu'il s'ensuit que dès lors qu'elle s'était vu adresser un nouvel arrêt de travail pour Mme B...pour la période du 9 mai au 3 juin 2015 alors qu'elle ne reconnaissait l'imputabilité de l'état de santé de celle-ci à l'accident de service du 28 janvier 2010 que jusqu'à la date du 30 mai 2015, la commune de Brie-Comte-C... ne pouvait placer cet agent en congé de maladie ordinaire du 31 mai au 3 juin 2015 sans saisir la commission de réforme ; que le tribunal a pu dès lors sans erreur de droit juger que l'arrêté du 12 mai 2015 était entaché d'illégalité ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du décret n°2005-442 du 2 mars 2005 susvisé : " La réalité des infirmités invoquées par le fonctionnaire, leur imputabilité au service, la reconnaissance du caractère professionnel des maladies, leurs conséquences ainsi que le taux d'invalidité qu'elles entraînent sont appréciés par la commission de réforme prévue par l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 susvisé " ; que, dès lors que la commune entendait par la décision du 26 mai 2015 déterminer son taux d'invalidité, même si Mme B...n'avait pas présenté de demande d'allocation temporaire d'invalidité, il lui appartenait de saisir à cette fin la commission de réforme ; que dans ces conditions, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, la commune ne pouvait sans irrégularité prendre la décision attaquée sans consulter préalablement la commission de réforme ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Brie-Comte-C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 12 mai 2015 par lequel le maire de cette commune a placé Mme B... en congé maladie ordinaire pour la période du 31 mai 2015 au 3 juin 2015, ainsi que la décision du maire de Brie-Comte-C... du 26 mai 2015 informant Mme B...que la date de consolidation de son état de santé était fixée au 30 mai 2015 avec une incapacité permanente partielle de 25% ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B... qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante la somme que la commune de Brie-Comte-C... demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la commune de Brie-Comte-C... le versement à Mme B...d'une somme de 1 500 euros sur le même fondement ;
DÉCIDE :


Article 1er : La requête de la commune de Brie-Comte-C... est rejetée.
Article 2: La commune de Brie-Comte-C... versera à Mme B...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Brie-Comte-C... et à MmeE... B....

Délibéré après l'audience du 18 avril 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 2 mai 2017.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLELe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au préfet de Seine et Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA02469