CAA de DOUAI, 3ème chambre - formation à 3, 27/04/2017, 14DA01431, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision27 avril 2017
Num14DA01431
JuridictionDouai
Formation3ème chambre - formation à 3
PresidentM. Albertini
RapporteurM. Jean-François Papin
CommissaireM. Habchi
AvocatsSCP MASSE-DESSEN - THOUVENIN - COUDRAY

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé, par plusieurs demandes distinctes, au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir :
- l'arrêté du 16 septembre 1980 l'affectant au lycée de Fourmies, ainsi que les décisions subséquentes qui lui sont défavorables ;
- les arrêtés ministériels du 13 septembre 1983, du 20 juillet 1989, du
25 septembre 1996 et du 20 juillet 1989 et rectoral du 30 août 1989 concernant sa carrière ;
- les décisions du recteur de l'académie de Lille du 10 mars 1986, du 25 mars 1987 et du 2 mai 1988, ainsi que la décision implicite de refus du recteur de l'académie de Lille opposée au recours gracieux qu'elle a formé le 17 décembre 2008 et d'enjoindre à l'administration de tirer les conséquences des annulations qui seraient prononcées, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 700 000 euros à titre de dommages et intérêts, majorées des intérêts de retard au taux légal et de 3 000 000 euros à titre de réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en conséquences des agissements de l'administration à son égard.
Par un jugement nos 0904199, 1000724, 1002650, 1002652, 1002653, 1002654, 1002656, 1002657 et 1004118 du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Lille, après avoir joint l'ensemble de ces demandes, y a fait partiellement droit, d'une part, en annulant seulement l'arrêté du recteur de l'académie de Lille du 11 janvier 1984, les arrêtés du ministre de l'éducation nationale des 2 août 1985 et 21 janvier 1987 et la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Lille a rejeté le recours gracieux formé le 17 décembre 2008, en tant qu'ils n'ont pas pris en compte, pour calculer l'ancienneté de Mme B...A..., les services qu'elle a accomplis au collège privé mixte (CPM) de Saint-Héand du 8 mai 1980 au 14 mai 1980, d'autre part, en faisant injonction au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de reconstituer la carrière de Mme A...en prenant en compte les services qu'elle a accomplis au CPM de Saint-Héand du 8 mai 1980 au 14 mai 1980 et de réévaluer, le cas échéant, ses droits à pension de retraite en intégrant la période de service irrégulièrement omise.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 août 2014, le 2 septembre 2016 et le 9 mars 2017, MmeA..., représentée par la SCP H. Masse-Dessen, G. Thouvenin et O. Coudray, avocats aux Conseils, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 27 mai 2014 en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit aux conclusions de ses demandes ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés et décisions restant en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 700 000 euros, sauf à parfaire, qui sera assortie des intérêts et de la capitalisation de ces intérêts ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier pour ne pas comporter la signature des magistrats qui l'ont rendu, en méconnaissance des prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- dès lors qu'un principe général du droit, de même que les décrets du 5 décembre 1951, du 21 janvier 1975 et du 8 juin 1976, imposaient que les services qu'elle avait accomplis antérieurement à sa titularisation et dont elle justifie, soient pris en compte par l'administration pour la détermination de son ancienneté et de ses droits à pension, l'arrêté rectoral du 11 janvier 1984 et les décisions subséquentes lui refusant cette prise en compte sont illégaux ;
- l'arrêté rectoral du 16 septembre 1980 l'affectant au lycée de Fourmies, qui ne pourra qu'être annulé pour le même motif, est, au surplus, insuffisamment motivé ;
- le fait qu'une bonification de 600 points pour mutation prioritaire n'a pas été prise en compte à son bénéfice est de nature à entacher la légalité de cet arrêté l'affectant, en méconnaissance de ses souhaits géographiques et de sa situation personnelle, à Fourmies ;
- cet arrêté et les décisions par lesquelles elle a ensuite été mutée au collège de Fourmies, puis au collège de Saint-Florentin et enfin sur les demi-postes aux lycées polyvalents de Charolles et Digoin ont été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que la commission administrative paritaire compétente n'a pas été consultée ;
- il n'est pas établi que ces dernières décisions auraient été prises par des autorités valablement habilitées ;

- ces décisions sont illégales en tant qu'elles ne prennent pas en compte sa situation personnelle ;
- elles ont été prises dans un but étranger à l'intérêt du service ;
- l'administration ne pouvait, en tout état de cause, prendre ces décisions à des dates auxquelles elle se trouvait en congé de maladie sans méconnaître l'article 12 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- les décisions par lesquelles elle a été placée en congé de maladie ordinaire, puis en congé de longue durée, enfin, en disponibilité d'office sont insuffisamment motivées ;
- elles sont illégales en tant qu'elles ont une portée rétroactive ;
- les arrêtés des 23 décembre 1981 et 17 décembre 1982 renouvelant chacun pour une durée de neuf mois le congé de longue durée dans lequel elle avait été placée ont été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 24 du décret n° 59-310 du 14 février 1959 ;
- dès lors que son état de santé ne justifiait pas qu'elle soit placée en congé de maladie, ces décisions et arrêtés sont entachés d'erreur d'appréciation ;
- la décision la plaçant en disponibilité d'office a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que la commission de réforme a été consultée à tort ;
- le recteur de l'académie, qui s'est cru à tort lié par l'avis de cette commission et par celui émis par le comité médical départemental, a entaché cette décision d'erreur de droit ;
- cette décision et celles l'ayant maintenu en position de disponibilité ont été prises en méconnaissance des dispositions combinées du 2° de l'article 34 et de l'article 51 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- avant de prendre ces décisions, l'administration s'est abstenue de mettre en oeuvre l'obligation de reclassement qui pesait sur elle en vertu de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et du principe général du droit y afférent ;
- les décisions des 10 mars 1986, 25 mars 1987 et du 11 mai 1989 par lesquelles l'administration a refusé de l'affecter sur le poste de réadaptation qu'elle sollicitait sont insuffisamment motivées ;
- elles ont été prises en méconnaissance de son droit à bénéficier d'un tel poste de réadaptation et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les conclusions qu'elle dirigeait contre l'arrêté ministériel du 25 septembre 1996 la mettant à la retraite d'office à raison d'une invalidité non imputable au service n'étaient pas tardives ;
- dès lors qu'elle n'était pas, à la date de cet arrêté, dans l'incapacité permanente d'exercer toute fonction, le ministre a prononcé à tort sa mise à la retraite d'office ;
- ses conclusions indemnitaires sont recevables ;
- elle a subi des préjudices, de carrière et d'ordre financier et moral, ainsi que des troubles dans les conditions d'existence, en conséquence de l'absence de reprise de l'ensemble de ses services antérieurs et de l'illégalité des décisions prises par l'administration à son égard.


Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2017, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Elle soutient, à titre principal, que :
- Mme A...ayant eu connaissance des arrêtés et décisions contre lesquelles ses conclusions sont dirigées et n'ayant pas contesté ces actes avant l'expiration d'un délai raisonnable, les demandes qu'elle a présentées devant le tribunal administratif de Lille étaient tardives.


Elle soutient, à titre subsidiaire, que :
- les moyens que Mme A...dirige contre l'arrêté du 16 septembre 1980 l'affectant au lycée de Fourmies ne sont pas fondés ;
- il en est de même des moyens dirigés contre les décisions attribuant ensuite d'autres affectations à l'intéressée, celui tiré de ce que ces décisions n'auraient pas pris en compte la réalité de sa situation personnelle n'étant pas assorti de précisions suffisantes et manquant, en tout état de cause, en fait et ces décisions ayant été précédées d'une consultation de la commission administrative paritaire compétente ;
- les moyens dirigés contre les décisions des 10 mars 1986, 25 mars 1987 et 2 mai 1988 ne sont pas davantage fondés ;
- les arrêtés rectoraux des 23 décembre 1981 et 17 décembre 1982 n'étaient pas au nombre des décisions qui devaient être motivées et Mme A...n'expose pas en quoi le fait que ces actes ont renouvelé son congé de longue durée pour une durée supérieure à celle de six mois prévue par l'article 24 du décret du 14 février 1959 alors applicable constituerait un vice substantiel ;
- les arrêtés plaçant et maintenant Mme A...en disponibilité d'office n'ont pas été pris à l'issue de procédures irrégulières et ne sont pas entachés d'erreur manifeste d'appréciation, ni d'erreur de droit ;
- l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 13 décembre 2005 de la cour administrative d'appel de Douai fait obstacle à ce que Mme A...puisse soutenir que son état de santé serait lié à un fait du service et fait également obstacle à ce que l'intéressée puisse contester l'arrêté du 25 septembre 1996 la plaçant à la retraite pour invalidité ;
- dans ces conditions et alors qu'il n'est pas établi que l'Etat aurait commis une quelconque faute à l'égard de MmeA..., ses conclusions indemnitaires, dont le quantum ne repose au demeurant sur aucun élément objectif, devront être rejetées.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté des conclusions de la requête tendant à l'annulation des décisions administratives individuelles contestées par MmeA..., dès lors que l'intéressée a introduit son recours juridictionnel devant le tribunal administratif de Lille au-delà d'un délai raisonnable à compter des dates auxquelles elle a eu connaissance de ces décisions.

Une réponse à cette communication a été présentée pour MmeA..., dans le mémoire enregistré le 2 septembre 2016, par laquelle elle soutient que les demandes qu'elle a présentées devant le tribunal administratif de Lille ne peuvent être regardées comme tardives, dès lors qu'elle était dans l'impossibilité d'agir, compte tenu de son état de santé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 51-1423 du 5 décembre 1951 ;
- le décret n° 59-310 du 14 février 1959 ;
- le décret n° 61-926 du 17 août 1961 ;
- le décret n° 75-36 du 21 janvier 1975 ;
- le décret n° 76-513 du 8 juin 1976 ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 ;
- le décret n° 84-860 du 20 septembre 1984 ;
- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le décret n° 86-185 du 4 février 1986 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Hadi Habchi, rapporteur public.


1. Considérant que MmeA..., qui réside à Saint-Etienne (Loire), a été recrutée dans le corps des professeurs adjoints d'éducation physique et sportive dans le cadre de mesures exceptionnelles de recrutement dans ce corps déterminées par le décret du 8 juin 1976 fixant les conditions exceptionnelles d'accès au corps des professeurs adjoints d'éducation physique et sportive ; qu'elle a été titularisée dans ce corps à compter du 8 septembre 1980 et a été affectée en cette qualité au lycée de Fourmies (Nord), relevant de l'académie de Lille, par arrêté ministériel du 16 septembre 1980 ; qu'elle n'a toutefois jamais rejoint ce poste, ayant été placée, dès le 12 septembre 1980, en congé de maladie par des décisions successives du recteur de l'académie de Lille, jusqu'au 10 décembre 1980 ; que Mme A... a ensuite été placée, par d'autres décisions de la même autorité, en congé de longue durée à compter du 12 décembre 1980, ce congé ayant été renouvelé à plusieurs reprises ; que, par un arrêté ministériel du 13 septembre 1983, Mme A...a été mutée pour raison de service du lycée de Fourmies au collège de la même ville ; qu'elle a ensuite été placée à nouveau en congé de longue durée avec demi-traitement à compter du 12 juin 1984, jusqu'au 11 décembre 1985 ; qu'à cette période de congé de longue durée a succédé un placement en disponibilité d'office du 12 décembre 1985 au 11 décembre 1989 ; que, par un arrêté ministériel du 20 juillet 1989, Mme A... a été mutée au collège Marcel Aymé de Saint-Florentin (Yonne) ; qu'elle a finalement été mise à la retraite d'office pour invalidité non-imputable au service à compter du 12 décembre 1989 ; que Mme A... relève appel du jugement du 27 mai 2014 en tant qu'il n'a fait que partiellement droit aux conclusions de ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation, pour excès de pouvoir, de plusieurs des décisions prises par l'administration à son égard, en ce qui concerne son reclassement après sa titularisation, ses affectations successives, les périodes de congés de maladie puis de longue durée et de disponibilité dont elle a fait l'objet, le bénéfice d'un poste de réadaptation puis son placement à la retraite d'office, d'autre part, à la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ;

3. Considérant que, si Mme A...soutient que le jugement attaqué serait irrégulier pour ne pas comporter, en méconnaissance de ces dispositions, les signatures des magistrats composant la formation de jugement, il résulte de l'examen de la minute de ce jugement, jointe au dossier de première instance transmis à la cour, que ce moyen manque en fait ; que la circonstance que l'expédition notifiée à la requérante ne comporterait pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement ;

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

4. Considérant que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu'en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable ; qu'en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...a produit, au soutien d'une demande dont elle a saisi le tribunal administratif de Lille le 26 février 1991 et qui avait pour objet la contestation de l'arrêté du 29 décembre 1989 du ministre de l'éducation nationale la plaçant à la retraite pour invalidité, la copie d'un grand nombre d'actes pris par l'administration à son égard, au nombre desquels figuraient les arrêtés du recteur de l'académie de Lille des 26 mars 1986, 3 octobre 1986, 18 novembre 1986, 24 février 1987, 23 mars 1988, 24 octobre 1988, 11 avril 1989 et du 18 décembre 1989 la plaçant puis la maintenant en position de disponibilité d'office ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier que Mme A...a produit, à l'appui de la même demande, la copie des décisions des 10 mars 1986, 25 mars 1987 et 11 mai 1989 par lesquelles le recteur de l'académie de Lille a refusé de faire droit à ses demandes successives tendant à ce qu'elle soit affectée sur un poste de réadaptation ; que, s'il n'est pas établi que ces actes aient été effectivement notifiés à l'intéressée, ni qu'elle ait eu communication des voies et délais dans lesquels un recours pourrait être introduit devant le juge administratif pour les contester et si, par suite, le délai de deux mois fixé par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ne lui était pas opposable, il résulte de ce qui précède que Mme A... doit être regardée comme ayant eu connaissance des actes précités au plus tard le 26 février 1991 et que les conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ces actes, dont Mme A... a saisi le tribunal administratif de Lille en 2009 et 2010, soit près de vingt ans plus tard, ont été présentées après l'écoulement d'un délai qui excédait le délai raisonnable durant lequel un recours contentieux pouvait être exercé contre ces actes ;

6. Considérant que, si, pour faire échec à l'application, au cas d'espèce, des principes rappelés au point 2, Mme A...fait état de ce qu'elle se serait trouvée dans l'impossibilité d'agir, compte tenu de son état de santé, le certificat émis le 16 juillet 2009 par le docteur Lora, médecin psychiatre, qu'elle verse au dossier, qui énonce que Mme A...est suivie en psychothérapie analytique depuis de nombreuses années et que l'état de santé de l'intéressée s'est, au fil du temps, considérablement dégradé, n'est pas de nature, à lui seul, faute de précisions suffisamment circonstanciées sur ce point, à établir que l'intéressée, qui n'allègue pas avoir fait l'objet d'une mesure de protection ou d'assistance, était effectivement empêchée de saisir la juridiction administrative, ce qu'elle a d'ailleurs fait à de nombreuses reprises ; que, dans ces conditions, les conclusions des demandes présentées par Mme A...devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des actes précités doivent, en conséquence, être rejetées comme tardives ; qu'il en résulte que Mme A...n'est pas fondée à se plaindre de leur rejet, par le jugement du 27 mai 2014 du tribunal administratif de Lille ; qu'en revanche, les pièces versées au dossier ne suffisent pas à établir de manière certaine les dates auxquelles Mme A...a effectivement eu connaissance des autres décisions en litige ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche doit, en tant qu'elle concerne ces autres décisions, être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la reprise des services antérieurs :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du décret du 5 décembre 1951 portant règlement d'administration publique pour la fixation des règles suivant lesquelles doit être déterminée l'ancienneté du personnel nommé dans l'un des corps de fonctionnaires de l'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale : " Le temps passé en qualité d'élève recruté au concours des Ecoles normales supérieures préparatoires à l'enseignement du second degré (...) entre en compte dans l'ancienneté d'échelon suivant les dispositions ci-après : / 1° Les deux premières années pour la moitié de leur durée ; / 2° La troisième année : / (...) / Pour la totalité si l'intéressé est nommé dans un corps de professeurs certifiés ou un corps de fonctionnaires assimilés visé à l'article 3 du décret précité. / (...) " ;

8. Considérant que, si Mme A...soutient que l'administration n'aurait pas pris en compte, lors de sa titularisation, le 11 septembre 1980, dans le corps des professeurs adjoints d'éducation physique et sportive, les services accomplis par elle en qualité d'élève-professeur à l'institut de préparation à l'enseignement secondaire, elle indique elle-même que le recteur de l'académie dont elle relevait alors a rapporté, à sa demande, son arrêté du 11 septembre 1980 afin de tenir compte de sa scolarité dans cet établissement et qu'il a pris à cette fin, le 11 janvier 1984, un nouvel arrêté la reclassant, en conséquence, à un échelon plus élevé ; que, si Mme A...persiste à soutenir que ce second arrêté ne tiendrait toujours pas compte de l'intégralité des services accomplis par elle en tant qu'élève-professeur, elle ne précise pas dans quelle mesure le reclassement opéré par l'administration par cet acte lui serait défavorable ; qu'ainsi, il n'est pas établi que cet arrêté du 11 janvier 1984, ni, en tout état de cause, " les décisions subséquentes lui refusant cette prise en compte " auraient été pris en méconnaissance des dispositions précitées du décret du 5 décembre 1951, ni de celles des décrets du 21 janvier 1975 et du 8 juin 1976 afférentes aux modalités de reprise des services antérieurs ;

En ce qui concerne les affectations successives de la requérante :

S'agissant des moyens dirigés contre la décision l'affectant au lycée de Fourmies :

9. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté rectoral du 16 septembre 1980 affectant Mme A...au lycée de Fourmies n'a pas été pris sur le fondement ni pour l'application de l'arrêté du 11 janvier 1984 par lequel la même autorité a procédé au reclassement de l'intéressée dans le corps des professeurs adjoints d'éducation physique et sportive ; qu'ainsi et compte tenu, au surplus, de ce qui vient d'être dit au point 8, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 16 septembre 1980 devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté du 11 janvier 1984 ne peut qu'être écarté ;


10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne résulte d'aucune disposition législative, ni réglementaire, ni même d'aucun principe général du droit qu'une décision attribuant une première affectation à un fonctionnaire d'Etat qui vient d'être titularisé après ses périodes de scolarité et de stage probatoire doive être motivée ; qu'une telle décision n'est, en particulier, pas au nombre de celles visées à l'article 1er de la loi, alors en vigueur, du 11 juillet 1979 qui, en vertu de l'article 3 de la même loi, doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que l'arrêté rectoral du 16 septembre 1980 affectant MmeA..., après sa titularisation, au lycée de Fourmies serait insuffisamment motivé doit être écarté comme inopérant ;

11. Considérant, en troisième lieu, que, dès lors que l'arrêté du 16 septembre 1980 a procédé, comme il vient d'être dit au point précédent, à une première affectation de Mme A...au lycée de Fourmies et non à sa mutation dans cet établissement, la requérante ne peut utilement, et en tout état de cause, invoquer le moyen tiré de ce qu'une bonification de 600 points pour mutation prioritaire n'aurait pas été prise en compte par le recteur pour prendre cet arrêté ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que les seules allégations de Mme A...sont insuffisantes à établir, en l'absence de tout élément en ce sens au dossier, que, pour lui attribuer cette première affectation, l'autorité rectorale n'aurait pas pris en compte, outre l'intérêt du service et le rang de classement de l'intéressée, sa situation personnelle et les souhaits d'affectation géographique qu'elle a pu formuler ;

S'agissant des moyens dirigés contre l'ensemble des décisions d'affectation :

13. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 48 de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires, alors en vigueur, l'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires ; que Mme A...ne peut toutefois utilement invoquer ces dispositions pour soutenir que l'arrêté du 16 septembre 1980, qui, comme il a été dit, procède à une première affectation de l'intéressée et non à un mouvement de fonctionnaire, aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour l'autorité rectorale d'avoir recueilli l'avis de la commission administrative paritaire compétente pour connaître de sa situation ; qu'il ressort au surplus des mentions mêmes de cet arrêté, produit devant le tribunal administratif de Lille et dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, qu'il est intervenu après qu'un avis a été émis par la commission administrative paritaire centrale le 13 août 1980 ; qu'en tant qu'il est dirigé contre cet arrêté, le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

14. Considérant, en revanche, que Mme A...soutient en appel que la décision ministérielle du 13 septembre 1983, ainsi que les décisions rectorales des 20 juillet 1989 et 30 août 1989 l'ayant ensuite respectivement mutée au collège de Fourmies, puis au collège de Saint-Florentin et enfin sur deux demi-postes aux lycées polyvalents de Charolles et Digoin (Saône-et-Loire) auraient été prises à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour la commission administrative paritaire compétente d'avoir été consultée ; que, si le ministre fait valoir, en défense, que ces consultations ont été effectuées, il n'assortit toutefois cette allégation d'aucun élément probant ; que la consultation préalable de la commission administrative paritaire constituant une garantie dont, en l'absence de tout élément contraire, Mme A...doit être regardée comme ayant été privée, il y a lieu d'accueillir le moyen tiré de ce que ces décisions ont été prises à l'issue de procédures irrégulières et d'annuler celles-ci pour ce motif, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués à leur encontre ;

En ce qui concerne les décisions plaçant puis maintenant l'intéressée en congé de maladie ordinaire, puis en congé de longue durée :

15. Considérant que, par trois décisions du 20 septembre 1980, le recteur de l'académie de Lille a placé Mme A...en position de congé maladie ordinaire du 12 septembre 1980 au 11 décembre 1980 ; que cette même autorité a ensuite placé l'intéressée, par neuf autres décisions successives, en congé de longue durée à compter du 12 décembre 1980 et jusqu'au 11 décembre 1985 ; que Mme A...conteste la légalité de l'ensemble de ces décisions ;

S'agissant des moyens communs à l'ensemble de ces décisions :

16. Considérant, en premier lieu, que ces décisions ne sont pas au nombre de celles visées à l'article 1er de la loi, alors en vigueur, du 11 juillet 1979 qui doivent, en vertu de l'article 3 de cette loi, comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions doit être écarté comme inopérant ;

17. Considérant, en deuxième lieu, qu'il incombe à l'administration d'assurer le déroulement continu de la carrière de ses agents en plaçant ceux-ci dans une position régulière ; qu'elle peut notamment, afin de régulariser la situation d'agents absents du service, être amenée à prendre des décisions ayant une date d'effet antérieure à celle de leur édiction ; qu'il suit de là que MmeA..., qui n'assortit pas son moyen de précisions tirées du contexte particulier dans lequel chacune des décisions qu'elle conteste a été prise, n'est pas fondée à soutenir que ces décisions seraient illégales au seul motif qu'elles ont une portée rétroactive ;

18. Considérant, en troisième lieu, que, s'il est constant qu'avant sa titularisation dans le corps des professeurs adjoints d'éducation physique et sportive, intervenue le 11 septembre 1980, Mme A...avait été reconnue, à plusieurs reprises, apte à l'exercice de ses futures fonctions, l'intéressée a ensuite produit à l'administration de nombreux certificats médicaux d'arrêt de travail desquels il ressort que son état de santé s'opposait à ce qu'elle puisse, au moins temporairement, faire face à l'exercice de ses fonctions ; que le comité médical a été consulté à de nombreuses reprises sur la situation de Mme A...avant son placement en congé de longue durée et en disponibilité d'office, puis avant chaque prolongation de ces placements ; qu'au demeurant, par l'avis qu'elle a émis le 21 septembre 1989 sur la situation de Mme A..., la commission de réforme du département du Nord a estimé que l'état de santé que présentait l'intéressée l'avait, en définitive, placée dans l'incapacité permanente de poursuivre ses fonctions ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour la placer successivement en congé de maladie ordinaire, puis en congé de longue durée pour raison médicale, l'autorité administrative aurait commis une erreur dans l'appréciation de sa situation ;

S'agissant de la légalité des décisions de renouvellement de congé de longue durée :

19. Considérant qu'aux termes de l'article 24 du décret, alors en vigueur, du 14 février 1959 portant règlement d'administration publique et relatif aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics, à l'organisation des comités médicaux et au régime des congés des fonctionnaires : " Un congé de longue durée ne peut être accordé pour une période inférieure à trois mois, ou supérieure à six mois. (...) / Les congés de longue durée peuvent être renouvelés dans les mêmes conditions et les mêmes limites de durée à concurrence d'un total de cinq années (...) " ;


20. Considérant qu'il est constant que les arrêtés des 23 décembre 1981 et 17 décembre 1982 renouvelant le congé de longue durée dans lequel Mme A...avait été placée ont chacun prolongé ce congé pour une période de neuf mois, excédant celle de six mois que les dispositions précitées de l'article 24 du décret du 14 février 1959 définissent comme constituant la période qu'un tel renouvellement ne peut légalement excéder ; que ce vice entache la légalité interne de ces deux arrêtés, qui ont ainsi été pris en méconnaissance de ces dispositions ; qu'il suit de là que Mme A...est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation de ces deux arrêtés ;

En ce qui concerne le placement à la retraite d'office à raison d'une invalidité non imputable au service :

21. Considérant qu'à l'issue de la dernière période durant laquelle Mme A...était maintenue en disponibilité d'office, l'intéressée a été réintégrée dans ses fonctions, par un arrêté du 29 décembre 1989, puis admise à la retraite pour invalidité ; que, toutefois, estimant que cet arrêté reposait sur un fait matériellement inexact, le ministre a, par un arrêté du 1er juin 1990, procédé au retrait du premier arrêté et placé d'office Mme A...à la retraite en raison d'une invalidité non imputable au service ; que ce second arrêté a été cependant annulé, au motif qu'il était insuffisamment motivé, par un jugement du tribunal administratif de Lille du 28 juin 1994 devenu définitif ; que pour assurer l'exécution de cette décision de justice, le ministre de l'éducation nationale a pris un nouvel arrêté, le 25 septembre 1996, radiant Mme A...des cadres à raison d'une invalidité non imputable au service, après l'avoir placée rétroactivement en disponibilité d'office à compter du 12 décembre 1989 ;

22. Considérant que, par un autre jugement, du 5 décembre 2002, confirmé par un arrêt du 13 décembre 2005 de la cour administrative d'appel de Douai, le tribunal administratif de Lille a rejeté comme tardif et, par suite, comme irrecevable le recours pour excès de pouvoir que Mme A...avait introduit à l'encontre de l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 25 septembre 1996 mentionné au point précédent ; que, par le jugement 27 mai 2014 dont Mme A... relève présentement appel, les premiers juges ont estimé, après avoir accueilli l'exception opposée sur ce point par l'administration, que l'autorité relative de chose jugée attachée au jugement du 5 décembre 2002 faisait obstacle à ce que les conclusions, que Mme A... présentait de nouveau devant ce tribunal, tendant à l'annulation du même arrêté ministériel pour excès de pouvoir, soient accueillies ; que Mme A...ne conteste pas sérieusement, en cause d'appel, le motif qui a été ainsi retenu par les premiers juges ; que ses conclusions tendant à l'annulation de cet acte ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

23. Considérant qu'il résulte de ce qui a été exposé aux points 7 à 22 que Mme A...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la décision ministérielle du 13 septembre 1983, ainsi que des décisions rectorales des 20 juillet 1989 et 30 août 1989 l'ayant respectivement mutée au collège de Fourmies, puis au collège de Saint-Florentin et enfin sur deux demi-postes aux lycées polyvalents de Charolles et Digoin, d'autre part, des arrêtés des 23 décembre 1981 et 17 décembre 1982 renouvelant le congé de longue durée dans lequel elle avait été placée ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

En ce qui concerne le placement et le maintien en disponibilité d'office :

S'agissant de la légalité externe des décisions en cause :

24. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces décisions, dont le seul objet était de régulariser la situation de MmeA..., compte tenu, d'une part, de son inaptitude, médicalement constatée, à reprendre l'exercice de ses fonctions, d'autre part, de l'expiration de ses droits à congé, auraient expressément refusé de réintégrer l'intéressée sur son poste ; qu'elles n'étaient, dès lors, pas au nombre des décisions visées à l'article 1er de la loi, alors en vigueur, du 11 juillet 1979 qui doivent, en vertu de l'article 3 de cette loi, comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions doit être écarté comme inopérant ;

25. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des mentions mêmes de l'arrêté du 26 mars 1986 par lequel le recteur de l'académie de Lille a placé Mme A...en disponibilité d'office que cet acte a été pris après consultation du comité médical départemental du Nord, qui a émis un avis le 14 mars 1986 ; qu'il ne ressort, en revanche, d'aucune des mentions de cet arrêté que la commission de réforme aurait été consultée quant à la perspective d'une telle mise en disponibilité d'office ; que, s'il résulte toutefois de l'instruction que cette commission a émis, le 27 février 1986, un avis sur la situation de MmeA..., celui-ci visait seulement à éclairer l'autorité administrative pour apprécier le taux d'invalidité de l'intéressée durant la période considérée et n'avait aucunement trait à son placement en disponibilité d'office ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 26 mars 1986 aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière pour être intervenu à la suite de la consultation d'un organe consultatif incompétent doit, en tout état de cause, être écarté ;

S'agissant du bien-fondé de ces décisions :

26. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte d'aucun élément de l'instruction que, pour placer Mme A...en disponibilité d'office, le recteur de l'académie de Lille se serait cru à tort lié par l'avis émis par le comité médical départemental ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette autorité aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté ;

27. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 17 et 18, les moyens tirés de la rétroactivité illégale et de l'erreur d'appréciation dont seraient entachées les décisions plaçant et maintenant Mme A...en disponibilité d'office doivent être écartés ;

28. Considérant, en cinquième lieu, qu'en vertu des dispositions combinées du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, lorsque la maladie dont est atteint un fonctionnaire a été contractée ou aggravée à raison de faits du service, l'intéressé conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite et a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ;

29. Considérant que Mme A...soutient que la pathologie psychologique dont elle est atteinte trouverait son origine ou aurait, à tout le moins, été aggravée par des faits du service, en particulier par la décision du 16 septembre 1980 lui attribuant le lycée de Fourmies comme première affectation, puis par les agissements ultérieurs de l'administration dans la gestion de sa carrière ; que toutefois, par l'avis qu'elle a émis le 21 septembre 1989 sur la situation de Mme A..., la commission de réforme du département du Nord a estimé que l'état de santé que présentait l'intéressée l'avait placée dans l'incapacité permanente de poursuivre ses fonctions, mais que la pathologie psychologique dont elle était atteinte n'était pas imputable au service ; que les certificats médicaux que Mme A...verse au dossier, lesquels se limitent à reprendre ses dires quant à l'imputabilité de son état aux agissements de l'administration sans exposer aucun motif tiré de constatations médicales qui permettrait de corroborer cette hypothèse, ne sont pas de nature, à eux seuls, à remettre en cause cette appréciation, portée au terme d'un examen approfondi de la situation, notamment médicale, de l'intéressée ; qu'au demeurant, comme le relève la ministre en défense, Mme A...indique elle-même qu'elle suivait déjà une psychothérapie avant sa première affectation au lycée de Fourmies par la décision du 16 septembre 1980 ; qu'ainsi, les moyens tirés par Mme A...de ce qu'en la plaçant dans la position de disponibilité d'office prévue à l'article 51 de la loi du 11 janvier 1984, alors qu'elle aurait pu prétendre au bénéfice des dispositions, rappelées au point 28, du 2° de l'article 34 de la même loi, l'autorité administrative aurait méconnu ces deux articles de la loi et commis une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ;

En ce qui concerne le respect par l'administration de son obligation de reclassement :

30. Considérant que le second alinéa de l'article 51 de la loi du 11 janvier 1984 dispose que : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 34 ci-dessus (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 63 de la même loi : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes " ; que selon le premier alinéa de l'article 43 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions, dans sa rédaction alors applicable : " La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus à l'article 34 (2°, 3° et 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée " ; qu'enfin, aux termes de l'article 1er du décret, alors en vigueur, du 4 février 1986 relatif aux affectations de certains personnels relevant du ministère de l'éducation nationale dans des emplois de réadaptation : " Les fonctionnaires appartenant aux corps des professeurs et professeurs techniques adjoints des écoles normales nationales d'apprentissage, des chargés d'enseignement d'éducation physique et sportive, des professeurs adjoints d'éducation physique et sportive, (...) des professeurs d'éducation physique et sportive peuvent, sur leur demande et à titre temporaire, recevoir une affectation dans un emploi dit de réadaptation leur permettant d'exercer des activités à caractère pédagogique ou éducatif adaptées à leur situation et de recouvrer la capacité d'assurer la plénitude des fonctions prévues par leurs statuts particuliers respectifs. " ;

31. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A...a présenté, le 21 novembre 1985, une demande tendant à bénéficier de l'affectation sur un poste de réadaptation prévue par les dispositions précitées de l'article 1er du décret du 4 février 1986 ; qu'il est constant que le recteur de l'académie de Lille s'est prononcé sur cette demande le 10 mars 1986, en refusant d'y faire droit, avant de décider, le 26 mars suivant, de placer l'intéressée en disponibilité d'office compte tenu de l'expiration de ses droits à congé ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce refus d'attribuer à MmeA..., à sa demande, un poste de réadaptation, qui a été précédé d'une consultation du comité médical départemental et de la commission administrative paritaire compétente, n'aurait pas été pris à l'issue d'un examen particulier de la situation de l'intéressée ; qu'ainsi, l'administration, à qui il incombait seulement d'examiner, au vu de la demande formée par MmeA..., les possibilités de reclasser celle-ci, qui avait été reconnue inapte à la poursuite de ses fonctions, sur un autre poste, en particulier sur le poste de réadaptation qu'elle sollicitait, avant de placer l'intéressée en disponibilité d'office, n'a pas méconnu l'obligation de reclassement qui pesait sur elle en vertu notamment des dispositions précitées de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 ;

En ce qui concerne le refus d'un poste de réadaptation :

32. Considérant qu'il ne résulte pas des dispositions précitées de l'article 1er du décret, alors en vigueur, du 4 février 1986, ni d'aucune autre disposition de ce décret que les fonctionnaires susceptibles de bénéficier d'une affectation sur un poste de réadaptation auraient pu y prétendre de plein droit ; que, par suite, les décisions par lesquelles le recteur de l'académie d'affectation d'enseignants ayant demandé le bénéfice d'un tel poste d'adaptation pouvait être amené à refuser, sous l'empire de ces dispositions, de faire droit à leur demande n'étaient pas de celles, énumérées à l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable, qui devaient, en vertu de l'article 3 de cette loi, comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituaient le fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions des 10 mars 1986, 25 mars 1987 et du 11 mai 1989 par lesquelles le recteur de l'académie de Lille a refusé, en l'espèce, de faire droit aux demandes que Mme A...avait formées en ce sens ne peut qu'être écarté comme inopérant ;

33. Considérant que, compte tenu de ce qui vient d'être dit au point précédent s'agissant de l'absence d'un droit pour les enseignants à bénéficier de l'octroi d'un poste de réadaptation, le moyen tiré de ce que les décisions de refus des 10 mars 1986, 25 mars 1987 et du 11 mai 1989 opposées par le recteur de l'académie de Lille auraient été prises en méconnaissance d'un tel droit ne peut qu'être écarté ; qu'eu égard notamment à ce qui a été dit au point 18 s'agissant de l'état de santé de MmeA..., il ne résulte pas de l'instruction que, pour lui opposer ces refus, en tenant compte notamment de l'aptitude de l'intéressée et du faible nombre de postes disponibles, le recteur de l'académie de Lille aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne les affectations successives de la requérante :

34. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 9 à 13 que la décision attribuant à Mme A...une première affectation au lycée de Fourmies n'est entachée d'aucune illégalité de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de l'intéressée ;

35. Considérant qu'en revanche, il résulte de ce qui a été dit au point 14 que la décision ministérielle du 13 septembre 1983, ainsi que les décisions rectorales des 20 juillet 1989 et 30 août 1989 ayant ensuite respectivement muté Mme A... au collège de Fourmies, puis au collège de Saint-Florentin et enfin sur deux demi-postes aux lycées polyvalents de Charolles et Digoin doivent être regardées comme ayant été prises à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour l'administration d'avoir pu établir que l'avis de la commission administrative paritaire compétente a été recueilli avant leur prononcé ; qu'il ne résulte, en revanche, d'aucun élément de l'instruction que l'administration se soit abstenue de prendre en compte la situation personnelle de l'intéressée pour prendre ces décisions, alors au demeurant que celles-ci révèlent que l'intéressée a, compte tenu des contraintes du service, progressivement pu obtenir des affectations géographiques conformes à ses souhaits ; qu'enfin, le seul fait que ces décisions ont été prises à des dates auxquelles Mme A... était en congé pour maladie n'est pas de nature à en affecter la légalité, ni à permettre de les regarder comme ayant été prises pour des buts étrangers à l'intérêt du service ou comme constituant des nominations pour ordre méconnaissant l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 ;

36. Considérant que l'illégalité entachant ainsi les décisions mentionnées au point précédent est de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de MmeA... ; que toutefois, les préjudices moral et de carrière dont l'intéressée fait état en ce qui concerne ses affectations géographiques successives se rattachent, pour l'essentiel, à sa première affectation à Fourmies, laquelle a été légalement décidée, et ne peuvent être regardés comme trouvant leur origine directe et certaine dans cette illégalité, qui consistent en des irrégularités de procédure affectant des mutations ultérieures ; que Mme A...ne peut ainsi prétendre à une indemnisation à ce titre ;

En ce qui concerne les deux prolongations du congé de longue durée :

37. Considérant que l'illégalité affectant, ainsi qu'il a été dit au point 20, les arrêtés des 23 décembre 1981 et 17 décembre 1982 renouvelant le congé de longue durée dans lequel Mme A... avait été placée consiste à avoir chacun prolongé ce congé pour une période de neuf mois, excédant celle de six mois que les dispositions alors en vigueur de l'article 24 du décret du 14 février 1959 définissent comme constituant la période qu'un tel renouvellement ne peut légalement excéder ; que, toutefois, les préjudices moral et de carrière dont Mme A...fait état ne peuvent être regardés comme trouvant leur origine directe et certaine dans ce vice, qui, quoique affectant la légalité interne de ces arrêtés, n'a aucunement lésé, par lui-même, l'intéressée ;

En ce qui concerne le placement à la retraite d'office :

38. Considérant enfin que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 18 et 29 en ce qui concerne l'état de santé de MmeA..., pour estimer que cette dernière était dans l'impossibilité permanente de poursuivre ses fonctions à raison d'une pathologie non imputable au service et placer, en conséquence, à la retraite d'office, par l'arrêté du 25 septembre 1996 mentionné au point 21, le ministre de l'éducation nationale n'a pas commis d'erreur d'appréciation ;

39. Considérant qu'il résulte de ce qui a été exposé aux points 24 à 38 que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 mai 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté les conclusions de ses demandes tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

40. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, en application de ces dispositions une somme à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 27 mai 2014 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant seulement qu'il rejette les conclusions des demandes de Mme A...tendant à l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la décision ministérielle du 13 septembre 1983, ainsi que des décisions rectorales des 20 juillet 1989 et 30 août 1989 l'ayant respectivement mutée au collège de Fourmies, puis au collège de Saint-Florentin et enfin sur deux demi-postes aux lycées polyvalents de Charolles et Digoin, d'autre part, des arrêtés des 23 décembre 1981 et 17 décembre 1982 renouvelant le congé de longue durée dans lequel elle avait été placée.

Article 2 : Les décisions et arrêtés mentionnés à l'article 1er ci-dessus sont annulés.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Copie en sera adressée, pour information, au recteur de l'académie de Lille.

Délibéré après l'audience publique du 30 mars 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 27 avril 2017.

Le rapporteur,





Signé : J.-F. PAPIN Le président de chambre,





Signé : P.-L. ALBERTINI Le greffier,





Signé : I. GENOT


La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.


Pour expédition conforme
Le greffier,




Isabelle Genot

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N°14DA01431
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N°"Numéro"