CAA de LYON, 3ème chambre - formation à 3, 11/05/2017, 15LY01386, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision11 mai 2017
Num15LY01386
JuridictionLyon
Formation3ème chambre - formation à 3
PresidentM. ALFONSI
RapporteurM. Samuel DELIANCOURT
CommissaireM. CLEMENT
AvocatsPITAUD QUINTIN

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés en date des 7 et 10 mars 2014 par lesquels le président du conseil régional d'Auvergne l'a radiée des cadres à compter du 23 mars 2014 et l'a mise à la retraite à compter du 23 mars 2014, d'annuler l'arrêté en date du 23 avril 2014 par lequel le président du conseil régional d'Auvergne l'a maintenue en congé de longue durée et à demi-traitement du 6 février au 22 mars 2014, de condamner la région Auvergne à lui verser la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier, d'enjoindre au président du conseil régional de procéder au règlement du demi-traitement qui lui est dû depuis le 23 mars 2014, la somme en cause devant être assortie des intérêts au taux légal et de condamner la région Auvergne au paiement des entiers dépens, outre le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1401344 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 avril 2015 et des mémoires enregistrés les 22 juillet et 27 août 2015, MmeB..., représentée par Me Pitaud Quintin, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1401344 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 mars 2015 ;

2°) d'annuler les arrêtés en date des 23 avril, 7 mars et 10 mars 2014 du président du conseil régional d'Auvergne ;

3°) de condamner la région Auvergne à lui verser la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier ;

4°) d'ordonner à la région Auvergne de procéder sans délai au règlement du demi-traitement qui lui est dû depuis le 23 mars 2014, avec intérêts au taux légal ;

5°) de condamner la région Auvergne au paiement des entiers dépens, outre le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- les conclusions à fins d'annulation sont recevables dès lors que l'arrêté du 10 mars 2014 ne lui a pas été notifié et que la région a répondu à sa demande préalable le 2 juin 2014 ;
S'agissant de l'arrêté du 10 mars 2014 :
- le jugement attaqué ne tient pas compte de l'avis défavorable du 16 mai 2014 de la CNRACL ;
- le tribunal a dénaturé l'arrêté du 10 mars 2014 qui la place en retraite, non pas pour limite d'âge, mais pour invalidité ;
- l'article 2 du décret du 26 décembre 2003 n'est par suite pas applicable ;
S'agissant des arrêtés des 7 mars et 24 avril 2014 :
- le jugement attaqué ne tient pas compte de l'avis défavorable du 16 mai 2014 de la CNRACL ;
S'agissant des trois arrêtés :
- ils ne lui ont pas été légalement notifiés car ils ne l'ont été que tardivement sans porter la mention de leur notification ;
- ils ne sont pas motivés en droit comme en fait ;
- ils ne rappellent pas sa situation en congé de longue durée pour cinq ans jusqu'au 5 mai 2015 ;
- la procédure de mise à la retraite n'a pas été respectée ;
- elle n'a jamais été informée de son droit à communication de son dossier ;
- elle a droit à un congé de longue durée de cinq ans en application de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 en raison de la pathologie mentale qu'elle a développée pendant le service ;
- elle ne pouvait être mise à la retraite qu'à l'expiration de son congé de longue durée ;
- elle est fondée à solliciter le règlement du demi-traitement qui lui est dû depuis le 23 mars 2014 ;
- elle subit de graves difficultés financières et souffrances morales car elle est sans ressources depuis le 23 mars 2014 estimée à 9 000 euros en raison de cette radiation humiliante ;
- elle a été rejetée et humiliée et a pu obtenir grâce à sa persévérance l'abrogation des arrêtes du 3 août et 30 novembre 2010 l'ayant placé pour 6 mois en congé de longue maladie ;
- le conseil régional a toujours refusé de la reclasser sans motif.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 juillet 2015 et un mémoire complémentaire enregistré le 4 août 2015, la région Auvergne, représentée par la SELAS Fidal, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme B...à lui verser une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par Mme B...n'est fondé.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 20 mai 2015.

L'instruction a été close le 16 septembre 2016 à 16 h 30 par ordonnance du président de la 3ème chambre en date du 25 août 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ;
- le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ;
- le décret n° 2011-2103 du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'Etat ;
- le décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse
- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Samuel Deliancourt, premier conseiller,
- les conclusions de M. Marc Clément, rapporteur public,
- et les observations de Me Joly, avocat, pour la région Auvergne.


1. Considérant que MmeB..., adjointe technique territorial de 2ème classe des établissements d'enseignement, relève appel du jugement du 24 mars 2015 par lequel tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2014 par lequel le président du conseil régional d'Auvergne a prononcé sa mise à la retraite à compter du 23 mars 2014, et des arrêtés des 7 mars et 23 avril 2014 par lesquels cette même autorité l'a maintenue en congé de longue durée à demi-traitement du 1er au 22 mars 2014 puis du 6 février au 22 mars 2014, outre la condamnation de ladite région à lui verser la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier ;


Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la circonstance que le jugement contesté ne tient pas compte de l'avis défavorable du 16 mai 2014 de la CNRACL, qui se rapporte à son bien-fondé, est sans incidence sur sa régularité ;


Sur les conclusions en excès de pouvoir :

S'agissant des conclusions dirigées contre les arrêtés des 7 mars 2014 et 23 avril 2014 maintenant Mme B...en congés de longue durée :

3. Considérant que par arrêté du 7 mars 2014, le président du conseil régional d'Auvergne a, dans l'attente de l'avis du comité médical, maintenu Mme B...en congé de longue durée du 1er mars au 22 mars 2014, puis, par arrêté du 23 avril 2014 pris après avis favorable du comité médical du 18 avril 2014, l'a maintenue dans cette position du 6 février au 22 mars 2014 ;

4. Considérant, en premier lieu, que les circonstances que les arrêtés susmentionnés du président de la région Auvergne ne comportent pas la mention de leur notification et qu'ils auraient été notifiés tardivement est sans influence sur leur légalité ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les arrêtés en cause, qui n'entrent pas dans les prévisions des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ni d'aucune autre disposition législative ou réglementaire relative à la motivation des actes administratifs, n'avaient pas à être motivés ; que le moyen tiré de leur insuffisante motivation qui, au demeurant, manque en fait, doit, par suite, être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'impose à l'autorité investie du pouvoir de nomination de mettre un agent qu'il se propose de placer ou de maintenir en congé de longue durée à même de consulter son dossier ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que MmeB..., qui ne peut utilement soutenir qu'elle devait bénéficier d'un congé de longue durée se prolongeant jusqu'à une date postérieure à celle à laquelle elle était atteinte par la limite d'âge fixée pour la retraite, n'est pas fondée à soutenir que les arrêtés litigieux seraient entachés d'une erreur de fait en ce qu'ils n'auraient pas tenu compte de ce qu'elle devait être maintenue en position de congé de longue durée au-delà de son soixante-cinquième anniversaire ;



8. Considérant, enfin, que Mme B...ne peut utilement se prévaloir des difficultés morales et financières que lui auraient causées ces arrêtés ;

S'agissant des conclusions dirigées contre l'arrêté du 10 mars 2014 portant mise à la retraite de Mme B...:

9. Considérant que l'arrêté du président du conseil régional d'Auvergne du 10 mars 2014, s'il mentionne par erreur que Mme B...est mise à la retraite "pour invalidité" à compter du 23 mars 2014, a été pris, ainsi que cela résulte de ses mentions mêmes, pour le motif que l'intéressée aura atteint, le 22 mars 2014, l'âge limite de départ à la retraite, fixé à soixante-cinq ans pour les agents nés avant le 1er juillet 1951 par le décret n° 2011-2103 du 30 décembre 2011 ; que le président du conseil régional étant tenu de prononcer l'admission à la retraite des agents atteints par la limite d'âge fixée par ces dernières dispositions, il y a lieu d'écarter comme inopérants tous les moyens invoqués par Mme B...contre l'arrêté litigieux ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions Mme B...tendant à l'annulation des trois arrêtés sus mentionnés du président de la région Auvergne doivent être rejetées ;


Sur les conclusions indemnitaires :

11. Considérant, d'une part, que, ainsi qu'il vient d'être dit, l'arrêté du 4 mars 2014 par lequel le président du conseil régional d'Auvergne, agissant dans l'exercice d'une compétence liée, a mis à la retraite Mme B...n'est pas illégal ; que les conclusions de cette dernière tendant à être indemnisée des préjudices qui auraient résulté d'une prétendue faute résultant de l'illégalité de cet arrêté doivent, par suite, être rejetées ;

12. Considérant, d'autre part, que MmeB..., demande à être indemnisée des préjudices qu'elle soutient avoir subis en raison des démarches qu'elle a entreprises en vue d'obtenir l'abrogation des arrêtés des 3 août 2010 et 30 novembre 2010 la plaçant en congés de longue maladie pour une durée de six mois, et du refus de la reclasser sur un poste aménagé qui lui aurait été opposé ; que toutefois, et dès lors qu'elle n'établit, ni même n'allègue, que les décisions en cause seraient entachées d'illégalité, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en la plaçant dans de telles positions statutaires, la région Auvergne aurait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité à son égard ;

13. Considérant, enfin, que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme B...ne peut prétendre à être maintenue régulièrement en congé de longue maladie au-delà de son 65ème anniversaire ; que ses conclusions tendant à la condamnation de la région Auvergne à lui payer une indemnité correspondant au demi traitement qu'elle estime lui être dû à compter du 24 mars 2014, date de son admission à la retraite par limite d'âge, doivent, par suite, être rejetées ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;




Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par MmeB..., qui a la qualité de partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme B...à payer à la région Auvergne une somme de 1 500 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions ;


DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Mme B...est condamnée à payer à la région Auvergne une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et à la région Auvergne Rhône-Alpes.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Jean-François Alfonsi, président de la chambre,
- M. Hervé Drouet, président-assesseur,
- M. Samuel Deliancourt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 mai 2017.

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