CAA de NANCY, 2ème chambre - formation à 3, 01/06/2017, 15NC01907, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision01 juin 2017
Num15NC01907
JuridictionNancy
Formation2ème chambre - formation à 3
PresidentM. MARTINEZ
RapporteurM. Olivier DI CANDIA
CommissaireMme PETON
AvocatsSELARL CABINET CESIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1401183 du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 septembre 2015, MmeB..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401183 du tribunal administratif de Besançon du 9 juillet 2015 ;

2°) de prononcer la réduction de l'imposition en litige ;



3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- elle est fondée à demander l'application d'une demi-part supplémentaire à son quotient familial en qualité de veuve de son défunt époux, qui était titulaire de la carte de combattant, dès lors que les dispositions de l'article 195 du code général des impôts ne conditionnent pas le bénéfice de cette demi-part à l'obtention, par le conjoint décédé, de la demi-part au titre d'une année d'imposition au moins ;
- l'administration a restreint de manière unilatérale, sur le fondement de sa propre doctrine, le champ d'application du 1.f de l'article 195 du code général des impôts en ajoutant une condition supplémentaire pour prétendre au bénéfice de cette demi-part, non prévue par la loi ;
- elle est fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine en vigueur avant le 25 mars 2015.


Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
- dès lors que l'époux de la requérante, titulaire d'une carte d'ancien combattant, décédé avant l'âge de soixante-quinze ans, n'a pu bénéficier de la demi-part supplémentaire de quotient familial, son épouse ne peut bénéficier de cette demi-part supplémentaire sur le fondement de l'article 195 du code général des impôts ;
- la doctrine a toujours exigé que la condition d'âge soit remplie par les deux membres du couple.


Vu :
- les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 11 mai 2017 :
- le rapport de M. Di Candia,
- et les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public.


1. Considérant que MmeB..., âgée de plus de soixante-quinze ans, a demandé, en qualité de veuve d'une personne titulaire d'une carte de combattant décédée à l'âge de soixante-et-onze ans, à bénéficier d'une demi-part supplémentaire au titre de l'année 2012 et à ce que la cotisation d'impôt sur le revenu qu'elle avait acquittée soit réduite en conséquence ; que l'intéressée relève appel du jugement du 9 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la réduction de ladite cotisation d'impôt sur le revenu ;


2. Considérant que par dérogation aux dispositions du I de l'article 194 du code général des impôts attribuant aux contribuables veufs sans enfant à charge une part de quotient familial supplémentaire, l'article 195 du même code dispose que : " 1. Par dérogation aux dispositions qui précèdent, le revenu imposable des contribuables célibataires, divorcés ou veufs n'ayant pas d'enfant à leur charge, exclusive, principale ou réputée également partagée entre les parents, est divisé par 1,5 lorsque ces contribuables : (... ) f. Sont âgés de plus de 75 ans et titulaires de la carte du combattant ou d'une pension servie en vertu des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; cette disposition est également applicable aux veuves, âgées de plus de 75 ans, des personnes mentionnées ci dessus ; (...) " ; qu'en vertu du 6 du même article les contribuables mariés titulaires de la carte de combattant et qui remplissent les mêmes conditions d'âge bénéficient d'une demi-part supplémentaire ;

3. Considérant qu'il ressort des travaux parlementaires de la loi du 30 décembre 1981 portant loi de finances pour 1982, dont le IV de l'article 12 a été codifié au f du 1 de l'article 195 du code général des impôts, que le législateur a entendu attribuer une demi-part supplémentaire aux anciens combattants remplissant certaines conditions, dont une condition d'âge, initialement fixée à 75 ans, puis à leurs veuves lorsqu'elles atteignaient le même âge ; qu'il résulte des travaux parlementaires de la loi du 30 décembre 1987 portant loi de finances pour 1988 que le 6 du même article a été introduit par cette dernière afin que, alors que la codification de l'amendement parlementaire issu de la loi du 30 décembre 1981 laissait subsister une ambiguïté sur ce point, les contribuables qui remplissaient les deux conditions prévues au f du 1 de l'article 195 puissent bénéficier de cette demi-part alors même qu'ils étaient mariés ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que sont incluses, parmi les veuves visées au f du 1 de l'article 195 du code général des impôts, celles qui relevaient, avant le décès de leur mari, du 6 de ce même article ; que la condition d'âge ainsi posée au f du 1 de l'article 195 du code s'apprécie, dans ce cadre, par référence à l'âge du mari au jour de son décès ; que, dès lors, le bénéfice de la demi-part supplémentaire de quotient familial est seulement attribué aux veuves de plus de soixante-quinze ans dont le mari était lui-même âgé de plus de soixante-quinze ans au jour de son décès ; que, par suite, Mme B...n'est fondée à soutenir ni que l'administration fiscale aurait ajouté une condition supplémentaire à la loi fiscale, ni qu'en rejetant sa réclamation, elle aurait méconnu les dispositions précitées ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que si Mme B...se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du § 170 de l'instruction administrative référencée BOI-IR-LIQ-10-20-20-20-20120912, selon lequel il paraît possible " d'accorder le bénéfice de la demi-part supplémentaire de quotient familial aux veuves d'anciens combattants qui seraient en possession d'une attestation, délivrée par les services départementaux de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre de leur résidence, établissant que leur époux remplissait les conditions requises pour se voir reconnaître la qualité de combattant ", ce même paragraphe précise que cette disposition " implique que le défunt ait bénéficié, au moins au titre d'une année d'imposition, de la demi-part supplémentaire " ; que tel n'était pas le cas du défunt mari de la requérante ; que dès lors MmeB..., qui ne justifie au demeurant pas être en possession d'une telle attestation, n'entre pas dans les prévisions de cette instruction ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;





D É C I D E :


Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'économie.


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