Conseil d'État, 8ème chambre, 21/06/2017, 394874, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision21 juin 2017
Num394874
Juridiction
Formation8ème chambre
RapporteurM. Vincent Ploquin-Duchefdelaville
CommissaireM. Romain Victor
AvocatsSCP BOULLOCHE

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal des pensions de Haute-Corse de réformer l'arrêté du 12 novembre 2013 par lequel le ministre de la défense lui a accordé le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité et de lui accorder le droit au bénéfice des majorations de pension et allocations spéciales mentionnées à l'article L. 37 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Par un jugement n° 14/00048 du 1er décembre 2014, ce tribunal a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 15/00023 du 21 septembre 2015, la cour régionale des pensions de Bastia a rejeté l'appel formé à l'encontre de ce jugement par le ministre de la défense.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 novembre 2015 et le 15 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la défense demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Ploquin-Duchefdelaville, auditeur,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boulloche, avocat de M.B....




Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 12 novembre 2013, le ministre de la défense a révisé, en exécution d'un jugement du tribunal des pensions de Haute-Corse du 15 juillet 2013, la pension militaire d'invalidité concédée à M. B... au titre de cinq infirmités dont les taux sont compris entre 10 % et 80 %. L'intéressé a contesté cet arrêté en tant qu'il ne lui accordait pas le bénéfice des majorations de pension et des allocations spéciales mentionnées à l'article L. 37 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Par un jugement du 1er décembre 2014, le tribunal des pensions de Haute-Corse a fait droit à la demande de M. B...tendant au bénéfice de ces dispositions. Le ministre de la défense se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 21 septembre 2015 par lequel la cour régionale des pensions de Bastia a rejeté l'appel qu'il avait formé contre ce jugement.

2. Aux termes du b) de l'article L. 37, alors en vigueur, du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Sont admis au bénéfice des majorations de pensions et des allocations spéciales prévues par les articles L. 17 et L. 38, les grands invalides : (...) b) Titulaires de la carte du combattant, pensionnés pour une infirmité entraînant à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 85 % ou pour infirmités multiples entraînant globalement un degré d'invalidité égal ou supérieur à 85 % calculé dans les conditions ci-dessus définies par l'article L. 36 et résultant ou bien de blessures reçues par le fait ou à l'occasion du service, ou bien de maladie contractée par le fait ou à l'occasion du service, à charge par les intéressés de rapporter la preuve que celle-ci a été contractée dans une unité combattante ".

3. Il résulte de ces dispositions que, pour être admis au bénéfice des majorations de pensions et des allocations spéciales qu'elles mentionnent, M. B...devait, d'une part, établir que les infirmités multiples dont il souffre, qui entraînent globalement un taux d'invalidité égal ou supérieur à 85 % et dont il est constant qu'elles ne résultaient pas de blessures, résultaient de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service et, d'autre part, apporter la preuve de ce qu'il était affecté dans une unité combattante lorsque ces maladies ont été contractées. En jugeant, d'une part, que M. B...apportait la preuve de l'imputabilité au service des " lombalgies chroniques " dont il souffre au motif qu'une telle imputabilité aurait été admise par l'administration, alors que cette infirmité n'a été reconnue comme lui ouvrant droit à pension qu'au titre de la présomption légale d'imputabilité au service prévue par l'article L. 3 et, d'autre part, que M. B...apportait la preuve que cette infirmité résultait d'une maladie qui avait nécessairement été contractée dans une unité combattante dès lors que l'intéressé avait constamment été affecté, entre 1954 et 1961, dans une telle unité, alors qu'il pouvait seulement être déduit d'une telle circonstance que l'infirmité en cause avait été constatée pendant qu'il était en unité combattante, la cour a commis une double erreur de droit au regard des dispositions du b) de l'article L. 37.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner le premier moyen du pourvoi, que le ministre de la défense, qui avait soulevé devant la cour les moyens mentionnés ci-dessus, est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

5. Les conclusions de M. B...présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées dès lors que l'Etat n'est pas la partie perdante dans la présente instance.



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt n° 15/00023 du 21 septembre 2015 de la cour régionale des pensions de Bastia est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Bastia.

Articles 3 : Les conclusions de M. B...présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées et à M. A... B....


ECLI:FR:CECHS:2017:394874.20170621