CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 06/02/2018, 16BX01291, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 5 septembre 2013 par laquelle le maire de La Rochelle a fixé à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle dont elle reste atteinte à la suite d'un accident de service.
Par un jugement n°1302252 du 18 novembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête du 14 avril 2016, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) A titre principal :
- d'annuler ce jugement du 18 novembre 2015 du tribunal administratif de Poitiers ;
- d'annuler la décision du 5 septembre 2013 ;
- de fixer le taux d'incapacité permanente partielle à 10 % ;
2°) A titre subsidiaire :
- d'ordonner une expertise à l'effet pour l'expert de prendre connaissance du dossier médical, d'indiquer si les lésions ont un lien de causalité avec l'accident du 5 février 1979 et de fixer le taux d'invalidité permanente partielle (IPP) ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Rochelle la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 5 septembre 2013 est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le maire a suivi l'avis de la commission de réforme du 30 août 2013, alors qu'il n'est pas lié par cet avis ;
- la décision du 5 septembre 2013 est incohérente au regard des certificats médicaux établis par le docteur Even les 15 mars 2013 et 21 mars 2016 et par le docteur Denis, rhumatologue, le 3 juin 2014, selon lesquels le taux d'IPP à raison de son accident de service du 5 février 1979 est de 10 %.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 juillet 2016, la commune de La Rochelle, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête de Mme A...et à ce que soit mise à sa charge la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision attaquée n'est pas au nombre des décisions entrant dans le champ d'application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 selon la jurisprudence du Conseil d'Etat, notamment l'arrêt du 28 janvier 1993, n° 346819 ; en tout état de cause, la décision est suffisamment motivée, dès lors que le maire indique qu'il fait sien l'avis de la commission de réforme et a joint à sa décision la copie du procès-verbal de la commission ;
- en ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision du 5 septembre 2013 par laquelle le maire de La Rochelle a fixé à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle, en vertu de l'article 5 du décret n°2005-442 du 2 mai 2005 relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale, le taux d'invalidité est fixé en fonction d'un barème indicatif fixé par l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le décret n° 68-756 du 13 août 1968 affecte un taux d'invalidité variant en fonction de la partie du corps concernée et des séquelles conservées ;
- en ce qui concerne le pied, le taux d'invalidité s'apprécie en fonction de trois critères que sont la douleur, la mobilité et la stabilité ;
- 8 degrés de gravité sont ainsi définis et la fourchette de taux s'élève du taux le plus léger compris entre 0 à 5 %, jusqu'au taux le plus grave égal à 35 % ;
- en ce qui concerne le cas de MmeA..., le décret du 13 août 1968 prévoit que pour ce qui est de douleurs intermittentes entrainant une limitation modérée des mouvements des différentes articulations, et une légère claudication, mais avec une stabilité du pied, le taux d'incapacité est compris entre 3 et 8 % , et en l'espèce, le médecin expert a proposé le taux le plus élevé de cette fourchette, soit la situation la plus favorable pour MmeA... ;
- les différents avis médicaux produits par Mme A...ne sont pas de nature à remettre en cause les appréciations des experts et de la commission de réforme ni la décision du 5 septembre 2013 du maire de La Rochelle fixant à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle alors qu'au demeurant, les avis des 3 juin 2014 du docteur Denis et du 21 mars 2016 du docteur Even sont postérieurs à la décision du 5 septembre 2013 ;
- enfin, la réalisation d'une nouvelle expertise médicale est inutile et les conclusions présentées en ce sens par Mme A...doivent être rejetées.
Par ordonnance du 28 août 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 6 octobre 2017 à 12 heures.
Un mémoire a été produit pour Mme A...le 3 janvier 2018, mais n'a pas été communiqué.
Mme A...à été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle (à hauteur de 25 %) par une décision du 11 février 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le décret n°2005-442 du 2 mai 2005 relatif à l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le décret n° 68-756 du 13 août 1968 dans sa version issue du décret n° 2001-99 du 31 janvier 2001 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la commune de La Rochelle.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., agent territorial spécialisé des écoles maternelles de la commune de La Rochelle, a été victime d'une chute le 5 février 1979 provoquant une fracture de la cheville droite bi-malléolaire. Cet accident a été reconnu imputable au service.
2. Mme A...relève appel du jugement du 18 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en annulation de la décision du 5 septembre 2013 par laquelle le maire de La Rochelle a limité à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) résultant de l'accident de service du 5 février 1979.
3. Aux termes de l'article 1er du décret n°2005-442 du 2 mai 2005 : " L'allocation temporaire d'invalidité est accordée, dans les conditions fixées par le présent décret, aux fonctionnaires [territoriaux] qui sont affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. " Selon l'article 2 du même décret : " L'allocation est attribuée aux fonctionnaires maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant : a) Soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 10 % (...) " et en vertu de l'article 5 dudit décret : " Le taux d'invalidité est déterminé compte tenu du barème indicatif prévu à l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite.(...) " et aux termes de l'article 6 : " La réalité des infirmités invoquées par le fonctionnaire, leur imputabilité au service, la reconnaissance du caractère professionnel des maladies, leurs conséquences ainsi que le taux d'invalidité qu'elles entraînent sont appréciés par la commission de réforme prévue par l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 susvisé. / Le pouvoir de décision appartient, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse des dépôts et consignations, à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination. ".
4. La date de consolidation de l'état de santé lié à l'accident du 5 février 1979 a été fixée au 16 septembre 1979 et il a été reconnu à MmeA..., un taux d'IPP de 15%, ce qui lui a permis de bénéficier d'une allocation temporaire d'invalidité sur la base de ce taux. A la suite de l'intervention de l'avis du 30 août 2013 de la commission de réforme selon lequel le taux d'IPP inhérent à l'accident de service du 5 février 1979 ne serait plus que de 8 %, le maire de La Rochelle par une décision du 5 septembre 2013 a fixé le taux d'incapacité permanente partielle de Mme A...à raison de l'accident de service du 5 février 1979 à 8% .
5. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision du 5 septembre 2013 par laquelle, sur le fondement des dispositions précitées, le maire de La Rochelle a fixé à 8 % le nouveau taux d'IPP qui lui était reconnu, ne présente pas ainsi que l'a jugé le tribunal, le caractère d'une décision défavorable soumise à obligation de motivation au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; dès lors, la décision litigieuse n'avait pas en tout état de cause, à être motivée.
6. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que contrairement à ce que Mme A...fait valoir, le maire de La Rochelle n'aurait pas, comme le lui impose l'article 6 du décret du 2 mai 2005, exercé son pouvoir d'appréciation et se serait estimé lié par l'avis de la commission de réforme.
7. En troisième lieu, MmeA..., en faisant valoir les " incohérences " de la décision du 5 septembre 2013 fixant à 8 % son nouveau taux d'IPP à raison de l'accident de service du 5 février 1979, doit être regardée comme invoquant l'erreur d'appréciation dont serait entachée cette décision. En vertu du point II.8 du chapitre XIII du barème annexé au décret du 13 août 1968, pris pour l'application de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite auquel renvoie l'article 2 précité du décret n°2005-442 du 2 mai 2005, le " Cas particulier du pied : (...) - douleurs intermittentes, limitation modérée des mouvements des différentes articulations, légère claudication, mais stabilité du pied " justifie un taux d'incapacité de " 3 à 8 % ". Mme A...se prévaut de deux certificats émanant d'un médecin généraliste, le docteur Even, établis les 15 mars 2013 et 21 mars 2016, et d'un certificat établi par le docteur Denis, rhumatologue, le 3 juin 2014, certificats selon lesquels le taux d'IPP à raison de son accident de service du 5 février 1979 est de 10 %. Les certificats médicaux des 3 juin 2014 et 21 mars 2016, postérieurs à la décision attaquée, ne comportent aucun élément permettant d'estimer que les données dont ils font état remonteraient à une période antérieure à l'intervention de la décision attaquée. Si le certificat du 15 mars 2013 fait état de l'arthrose dont souffrirait MmeA..., une telle affection n'avait jamais été évoquée antérieurement à la décision du 5 septembre 2013, notamment lors de la réalisation de l'expertise médicale réalisée pour la commission de réforme, par le docteur Lecuelle, rhumatologue, les 15 novembre 2012 et en juin 2013, et le lien de causalité entre l'arthrose invoquée et l'accident de service du 5 février 1979 ne résulte d'aucune pièce du dossier et n'est d'ailleurs pas allégué par la requérante. La décision du 5 septembre 2013 par laquelle le maire de La Rochelle a fixé à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle n'est donc pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Dans ces conditions et dès lors que par ailleurs, la demande d'expertise sollicitée par Mme A... n'est pas justifiée, faute d'éléments suffisants de nature à remettre en cause les expertises réalisées par le docteur Lecuelle, rhumatologue, le 15 novembre 2012 et en juin 2013, sur lesquelles se fonde la décision du 5 septembre 2013, la requête de Mme A...tendant à l'annulation de cette décision, doit être rejetée.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 18 novembre 2015, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 septembre 2013 par laquelle le maire de La Rochelle a fixé à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle.
9. Compte tenu du rejet des conclusions principales, les conclusions en injonction présentées par Mme A...et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune de La Rochelle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de La Rochelle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...et à la commune de La Rochelle.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
M. Frédéric Faick, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 6 février 2018.
Le rapporteur,
Pierre Bentolila
Le président,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX01291