CAA de PARIS, 6ème chambre, 27/03/2018, 17PA00198, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision27 mars 2018
Num17PA00198
JuridictionParis
Formation6ème chambre
PresidentMme FUCHS TAUGOURDEAU
RapporteurMme Marie-Isabelle LABETOULLE
CommissaireM. BAFFRAY
AvocatsEBSTEIN

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 9 décembre 2015 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant.

Par une ordonnance n° 1604608/12-1 du 16 novembre 2016, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.


Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 13 janvier 2017 et 10 février 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 16 novembre 2016 du vice-président du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 9 décembre 2015 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ;

3°) d'enjoindre à la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre de lui reconnaitre la qualité d'ancien combattant, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à Me C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Il soutient que :

- il a servi sous les drapeaux du 17 octobre 1961 au 17 octobre 1963 ;
- la décision attaquée de la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre est insuffisamment motivée et méconnaît les dispositions des articles L. 211-2 à L. 211-6 du code des relations entre le public et l'administration ;
- cette décision est entachée d'erreurs manifestes d'appréciation.


Par un mémoire enregistré le 15 juin 2017, l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre conclut au rejet de cette requête.

Il soutient que :

- le moyen de légalité externe est irrecevable, aucun moyen relevant de cette cause juridique n'ayant été soulevé en première instance dans le délai de recours ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.


Par une ordonnance du 12 juillet 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 août 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Labetoulle,
- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.


1. Considérant que M. B...a déposé le 4 juin 2015, auprès de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre, une demande tendant à se voir reconnaître la qualité d'ancien combattant ; que par décision du 9 décembre 2015 la directrice de cet office a rejeté sa demande ; qu'il a alors formé devant le Tribunal administratif de Paris une requête tendant à l'annulation de cette décision ; que cette requête a été rejetée par une ordonnance du 16 novembre 2016 dont M. B...interjette appel ;
Sur le bien-fondé de l'ordonnance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable à la date d'intervention de la décision contestée et dont les dispositions ont été codifiées ultérieurement sous l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, entré en vigueur le 1er janvier 2016 : " les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. /A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) :-refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi dont les dispositions ont été ensuite codifiées sous l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que la décision contestée vise le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et notamment ses articles L. 253 à L. 254, R. 223 à R. 235, R. 572-2, D. 258 à D. 263 et A. 115 à A. 142, ainsi que le code de la défense, et rejette la demande de l'intéressé au motif qu'il n'a pas effectué de services pendant les périodes de guerre ou assimilables sur les territoires où se déroulaient des combats telles que définies par les textes visés ; que cette décision comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est ainsi suffisamment motivée ; que le moyen tiré de son insuffisance de motivation, qui par ailleurs relève d'une cause juridique nouvelle en appel et est de ce fait irrecevable, doit dès lors en tout état de cause être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 253 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Il est créé une carte de combattant qui est attribuée dans les conditions fixées aux articles R. 223 à R. 235 " ; qu'aux termes de l'article L. 253 bis du même code, encore en vigueur et dans sa version alors applicable : " Ont vocation à la qualité de combattant et à l'attribution de la carte du combattant, selon les principes retenus pour l'application du présent titre et des textes réglementaires qui le complètent, sous la seule réserve des adaptations qui pourraient être rendues nécessaires par le caractère spécifique de la guerre d'Algérie ou des combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 :Les militaires des armées françaises, Les membres des forces supplétives françaises, Les personnes civiles qui, en vertu des décisions des autorités françaises, ont participé aux opérations au sein d'unités françaises, qui ont pris part à des actions de feu ou de combat au cours de ces opérations. Le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ou le directeur général de l'organisme mentionné à l'article L. 517 qu'il a habilité détermine les modalités selon lesquelles la qualité de combattant peut, en outre, être reconnue, par dérogation aux principes visés à l'alinéa précédent, aux personnes ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat ou dont l'unité aura connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat. (....) Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre ou dans plusieurs des pays mentionnés au premier alinéa est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au cinquième alinéa, y compris lorsque ces services se sont poursuivis au-delà du 2 juillet 1962 dès lors qu'ils n'ont connu aucune interruption " ; qu'aux termes de l'article R. 223 de ce code : " La carte du combattant prévue à l'article L. 253 est attribuée à toutes les personnes qui justifient de la qualité de combattant dans les conditions déterminées par les articles R. 224 à R. 229 " ; qu'aux termes de l'article R. 224 du même code " Sont considérés comme combattants :(....) D. Pour les opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 inclus : a) En Tunisie, à compter du 1er janvier 1952 ; b) Au Maroc, à compter du 1er juin 1953 ; c) En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. I.-Sont considérés comme des combattants les militaires des armées françaises et les membres des forces supplétives françaises : 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à une unité combattante ou à une formation entrant dans l'une des catégories énumérées par l'arrêté interministériel prévu au troisième alinéa de l'article L. 253 bis et assimilée à une unité combattante ; Pour le calcul de la durée d'appartenance, les services accomplis au titre d'opérations antérieures se cumulent entre eux et avec ceux des opérations d'Afrique du Nord ; Des bonifications afférentes à des situations personnelles résultant du contrat d'engagement sont accordées pour une durée ne pouvant excéder dix jours, suivant les modalités d'application fixées par arrêtés des ministres intéressés ; 2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; 3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; 4° Qui ont été évacués pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'ils appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ;5° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle ils ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; 6° Qui ont été détenus par l'adversaire et privés de la protection des conventions de Genève ".
5. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. B...a souscrit un engagement de deux ans le 17 octobre 1961 pour servir dans le 21ème bataillon du génie, stationné en France ; qu'il a embarqué à Oran le 21 octobre 1961 et débarqué à Marseille le 22 octobre 1961 ; qu'il se situait ainsi hors zone de conflit, dans une unité qui n'était dès lors pas reconnue comme unité combattante ; que, s'il a ensuite embarqué à Marseille le 27 septembre 1962, et débarqué en Tunisie le 29 septembre 1962 où il a servi jusqu'au 7 octobre 1963, ni la Tunisie ni aucun pays du Maghreb n'avait plus à cette date, et depuis le 2 juillet 1962, le statut d'une zone de conflit ; que, dès lors, il ne satisfait pas aux conditions posées par les dispositions précitées pour se voir reconnaître la qualité de combattant ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant cette qualité serait entachée " d'erreurs manifestes d'appréciations " ; que la circonstance qu'un de ses amis, incorporé en Tunisie en même temps que lui, mais dont il ne précise pas les états de service, se serait vu accorder la carte de combattant est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 décembre 2015 par laquelle la directrice générale de l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre ne lui a pas reconnu la qualité de combattant ; que ses conclusions à fins d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;


DÉCIDE :



Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A...B...et au ministre des armées.
Copie en sera adressée à l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet président assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 27 mars 2018.


Le rapporteur,
M-I. LABETOULLE
Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERTLa République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 17PA00198