CAA de DOUAI, 3e chambre - formation à 3, 21/06/2018, 16DA00912, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision21 juin 2018
Num16DA00912
JuridictionDouai
Formation3e chambre - formation à 3
PresidentM. Albertini
RapporteurM. Jean-François Papin
CommissaireM. Arruebo-Mannier
AvocatsLUSTEAU

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 18 juin 2010 par lequel le ministre de l'intérieur l'a titularisé dans le corps des gardiens de la paix à compter du 1er septembre 2009, en tant que cet acte tient insuffisamment compte des services qu'il a précédemment effectués en qualité de militaire, ainsi que la décision du 5 juin 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de modifier, dans cette mesure, cet arrêté, d'autre part, de faire injonction au ministre de l'intérieur de prendre en compte, à la date du 1er septembre 2009, les trois-quarts de son ancienneté en tant que militaire.

Par un jugement n° 1402496 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 17 mai 2016, le 18 mai 2017 et le 29 mai 2018, M. C..., représenté par Me D... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 22 mars 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 18 juin 2010, en tant qu'il prend insuffisamment en compte son ancienneté en tant que militaire, ainsi que la décision du 5 juin 2014 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de se prononcer de nouveau sur sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, en prenant en compte, à la date du 1er septembre 2009, les trois quarts de son ancienneté en tant que militaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de la défense ;
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
- le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 ;
- le décret n° 2005-1228 du 29 septembre 2005 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., qui avait souscrit, à compter du 2 juin 1992, un engagement auprès de l'armée de terre, a, au terme de celui-ci, été radié des contrôles de l'armée active le 4 juin 2007. Ayant entre-temps été admis au concours de gardien de la paix, il a, à l'issue de sa scolarité et de la période de stage qui a suivi celle-ci, été titularisé, par un arrêté du ministre de l'intérieur du 18 juin 2010, au deuxième échelon du grade de gardien de la paix à compter du 1er septembre 2009. Estimant toutefois qu'il avait été insuffisamment tenu compte, pour son reclassement dans ce corps, de l'ancienneté antérieure dont il justifiait en tant que militaire, M. C...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté dans cette mesure, de même que la décision du 5 juin 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de reconsidérer sa situation, et de faire injonction au ministre de se prononcer de nouveau sur sa situation en prenant en compte, pour le reclasser à la date du 1er septembre 2009, les trois quarts de son ancienneté en tant que militaire. Il relève appel du jugement du 22 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté cette demande.

2. Aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense : " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. / En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B. ".
3. Ces dispositions doivent être interprétées comme réservant le droit de bénéficier d'une reprise d'ancienneté au militaire qui, après avoir réussi les épreuves organisées pour l'accès aux emplois réservés, a été placé en position de détachement dans l'attente de son intégration ou de sa titularisation et a ainsi conservé la qualité de militaire jusqu'à la date à laquelle celle-ci a été prononcée. En revanche, elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir cette possibilité de reprise d'ancienneté à l'agent qui, avant son intégration ou sa titularisation, a, faute d'avoir sollicité son détachement, cessé d'être militaire et a pu, de ce fait, s'il remplissait les conditions d'ancienneté et de service, bénéficier d'une pension militaire de retraite.
4. Il est constant que, comme il a été dit au point 1, M. C...a été radié des cadres de l'armée à compter du 4 juin 2007, par une décision qui lui donnait ainsi vocation à percevoir un droit à pension au titre des périodes accomplies en tant que militaire engagé. Faute d'avoir sollicité son placement en position de détachement, dans l'attente de sa titularisation dans le corps des gardiens de la paix, qui a été effective au 1er septembre 2009, M. C...n'avait pas conservé, à cette date, la qualité de militaire et ne pouvait, dès lors, plus bénéficier des dispositions précitées de l'article L. 4139-3 du code de la défense.

5. M. C...se prévaut, toutefois, des dispositions de l'article 4 et du I de l'article 5 du décret du 29 septembre 2005 relatif à l'organisation des carrières des fonctionnaires de catégorie C, qui, dans leur rédaction en vigueur à la date de l'arrêté du 18 juin 2010 en litige, ne renvoyaient pas, s'agissant de la situation des militaires nommés dans un corps de fonctionnaires de cette catégorie, aux dispositions précitées du code de la défense en ce qui concerne les conditions de leur reclassement. Cependant, si les dispositions du I de l'article 5 prévoient que les personnes nommées fonctionnaires dans un grade de catégorie C, qui ont ou avaient eu auparavant la qualité d'agent public, sont reclassées avec une reprise d'ancienneté égale aux trois quarts des services civils qu'ils ont accomplis, M.C..., qui sollicite une reprise d'ancienneté correspondant à des services qu'il a effectués en tant que militaire, ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions, dans le champ d'application desquelles il n'entre pas.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.



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