CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 22/06/2020, 18BX01375, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision22 juin 2020
Num18BX01375
JuridictionBordeaux
Formation6ème chambre
PresidentM. LARROUMEC
RapporteurMme Florence REY-GABRIAC
CommissaireM. BASSET
AvocatsLECLER-CHAPERON CÉCILE

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Par deux recours distincts, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers :
- d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le président de la communauté d'agglomération du Niortais sur sa demande présentée le 27 janvier 2015 et tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle, d'enjoindre audit président de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et de l'affecter sur un poste correspondant à celui qu'elle occupait avant le 2 octobre 2013 dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et de condamner la communauté d'agglomération du Niortais à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à cause du harcèlement moral dont elle a été victime ;
- d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2015 par lequel le président de la communauté d'agglomération du Niortais a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 2 octobre 2013, et d'enjoindre audit président de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident, de lui verser l'intégralité de son traitement et de rembourser ses frais médicaux et pharmaceutiques.

Par un jugement n° 1501180, 1600162 du 7 février 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté les demandes de Mme A....
Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 5 avril 2018 et le 15 mai 2019, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 février 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le président de la communauté d'agglomération du Niortais sur sa demande présentée le 27 janvier 2015 et tendant au bénéfice de la protection fonctionnelle ;

3°) d'enjoindre au président de la communauté d'agglomération du Niortais de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner la communauté d'agglomération du Niortais à lui verser la somme de 30 000 euros à parfaire, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à cause du harcèlement moral dont elle a été victime ;

5°) d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2015 par lequel le président de la communauté d'agglomération du Niortais a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 2 octobre 2013 ;

6°) d'enjoindre audit président de lui accorder l'imputabilité pour cet accident et de la rétablir dans ses droits à indemnisation intégrale depuis le 2 octobre 2013 et à la prise en charge de ses frais médicaux et pharmaceutiques ;

7°) de mettre à la charge communauté d'agglomération du Niortais, outre les entiers dépens, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- elle a subi, à partir d'octobre 2013, une situation de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie au sens de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ; ce harcèlement s'est caractérisé par un non-respect des préconisations médicales sur les horaires de travail, un dénigrement par la note du 16 octobre 2013, un déclassement dans ses fonctions et, pour finir, son placement en disponibilité ;
- elle doit donc bénéficier de la protection fonctionnelle et elle doit être indemnisée de ses préjudices, le harcèlement qu'elle a subi ayant entraîné une dégradation de ses conditions de travail portant atteinte à ses droits et à sa dignité et une altération de sa santé physique et psychique ;
- son accident du 2 octobre 2013 doit être reconnu imputable au service en vertu de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984; cet accident est issu du refus de la collectivité de la faire bénéficier d'horaires adaptés à son état de santé ; la communauté d'agglomération a fait une interprétation erronée du rapport d'expertise du 9 septembre 2015, notamment en considérant que son accident du 2 octobre 2013 était dû à un état préexistant.



Par un mémoire en défense et un mémoire en réplique, enregistrés le 23 novembre 2018 et le 4 juillet 2019, la communauté d'agglomération du Niortais conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.


Par une ordonnance en date du 4 juin 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 juillet 2019.


Mme A... a produit un nouveau mémoire en réplique, enregistré le 30 août 2019, qui n'a pas été communiqué.


Vu les autres pièces du dossier.


Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant la communauté d'agglomération du Niortais.


Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A..., née en 1975, a été recrutée par la communauté d'agglomération du Niortais (Deux-Sèvres) en qualité d'agent d'entretien stagiaire à compter du 1er janvier 2004. Elle a été titularisée le 10 janvier 2005. Elle a été placée en congé de longue maladie du 19 mars 2005 au 18 mai 2006, puis en congé de longue durée jusqu'au 9 août 2006. Du 10 août 2006 au 29 novembre 2006, elle a bénéficié d'un congé maternité. Elle reprend son poste, mais est à nouveau placée en congé de longue durée du 11 décembre 2006 au 17 juin 2007, puis reclassée pour raison de santé, en qualité d'adjoint technique de 2ème classe, et chargée, au service du musée, à compter du 18 juin 2007, de fonctions d'accueil du public, de surveillance des lieux et d'entretien des salles d'exposition, réserves, sanitaires et autres locaux. Elle a de nouveau été placée en congé de longue durée du 17 août 2009 au 30 septembre 2012. Elle a repris le travail à partir du 1er octobre 2012, en bénéficiant d'un temps partiel thérapeutique jusqu'au 31 août 2013, puis en reprenant ses fonctions à temps plein à compter du 1er septembre 2013. Cependant, à compter du 19 septembre 2013, elle sera à nouveau très fréquemment placée en arrêt maladie, entrecoupés de brèves reprises de ses fonctions, puis à nouveau en congé de longue durée. Par un arrêté du 18 juillet 2019, à la suite de l'avis du comité médical ayant estimé qu'elle devait bénéficier d'une retraite pour invalidité en raison d'une inaptitude définitive et absolue à toute fonction elle a été placée en position de disponibilité d'office dans l'attente de l'avis de la commission de réforme. Par courrier du 27 janvier 2015, Mme A... a demandé le bénéfice de la protection fonctionnelle contre le harcèlement moral dont elle s'estime victime depuis le 2 octobre 2013. Elle a formé deux recours devant le tribunal administratif, en demandant, d'une part, l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le président de la communauté d'agglomération du Niortais sur sa demande de protection fonctionnelle ainsi que la condamnation de cette collectivité à réparer son préjudice moral à hauteur de 30 000 euros et, d'autre part, l'annulation de l'arrêté du 12 novembre 2015 par lequel le président de la communauté d'agglomération a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 2 octobre 2013. Elle fait appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 7 février 2018 qui, après avoir joints ses recours, les a rejetés.


Sur la demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident du 2 octobre 2013 :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ".

3. D'une part, un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet accident du service, le caractère d'un accident de service. D'autre part, le droit, prévu par les dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. Toutefois, l'application de ce régime de présomption suppose la démonstration de l'existence même d'un accident survenu pendant le temps de service et durant l'accomplissement des fonctions.

4. Par un courrier du 8 juin 2015, Mme A... a entendu déclarer un accident de service qui serait survenu le 2 octobre 2013, date de diffusion d'un courriel qui aurait, selon elle, dévoilé à ses collègues des informations confidentielles sur son état de santé et aurait marqué le début du harcèlement moral à son encontre. La commission de réforme a, dans sa séance du 6 octobre 2015, émis un avis favorable à la reconnaissance de cette imputabilité, après avoir estimé que la date du 2 octobre 2013 correspondait à un événement déclencheur de la dégradation de l'état de santé de l'intéressée, en raison de la diffusion du courriel précité. Cependant, d'une part, aux termes de son expertise, le Dr Dufour, qui a examinée Mme A... le 8 septembre 2015 à la demande de la communauté d'agglomération du Niortais, a conclu à l'impossibilité de certifier l'existence d'une " relation directe et unique " entre la pathologie de l'intéressée et son travail compte tenu de ses antécédents, dès lors qu'elle avait déjà été placée en congé de longue maladie puis de longue durée pour la même pathologie. En effet, il ressort des pièces du dossier que, depuis l'année 2009 au moins, l'intéressée présente un syndrome anxio-dépressif, associé à une phobie sociale et à des troubles de l'adaptation dans un contexte familial difficile, au titre duquel elle a, à sa demande, bénéficié d'un congé de longue durée, en dernier lieu pour la période du 17 août 2009 au 30 septembre 2012, puis qu'elle a été placée jusqu'au 31 août 2013 en mi-temps thérapeutique, justifié par la persistance de ce syndrome anxio-dépressif. Enfin, le courriel incriminé, qui est en réalité une note datée du 16 octobre 2013, soit à une date postérieure à l'accident invoqué, ne comportait aucune information confidentielle sur l'état de santé de Mme A... et ne comportait aucun propos vexatoire ou humiliant à son endroit. En outre, ce document n'a pas été diffusé auprès de l'ensemble du personnel du musée, mais était exclusivement destiné aux responsables du service en vue de prévoir l'organisation dudit service, et avait été placé sur le réseau interne dans un dossier au nom de sa responsable, dossier dans lequel s'est introduit irrégulièrement un agent du musée, qui en a remis une copie à Mme A... alors en arrêt de travail. Ainsi, et en tout état de cause, Mme A... n'était pas en service au moment de la survenance de l'accident allégué.

5. Dans ces conditions, comme l'ont déjà relevé à bon droit les premiers juges, le président de la communauté d'agglomération du Niortais a pu, sans commettre d'erreur de droit, de fait ou d'appréciation, refuser de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident qui serait survenu le 2 octobre 2013, dès lors que la pathologie de Mme A... était préexistante et n'est pas en lien direct avec un quelconque fait survenu en service à cette date. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation l'arrêté du 12 novembre 2015 doivent être rejetées.


Sur la demande de protection fonctionnelle :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. (...) ".

7. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

8. Mme A... soutient avoir été victime de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie à partir du 2 octobre 2013, qui a grandement contribué à la dégradation de son état physique et psychique. Elle fait valoir que ce harcèlement est notamment caractérisé par un non-respect par la collectivité des préconisations médicales effectuées par la médecine de prévention concernant ses horaires de travail, un dénigrement personnel par la note du 16 octobre 2013 qui a été diffusée en interne, un déclassement dans ses fonctions et le cantonnement dans des fonctions d'agent d'entretien, ainsi que par le refus de lui reconnaître l'imputabilité au service de son accident du 2 octobre 2013 puis, pour finir, par son placement en disponibilité.

9. Cependant, il ressort des pièces du dossier que Mme A..., après avoir travaillé en temps partiel thérapeutique, a été déclarée le 3 septembre 2013 apte à reprendre le travail à temps plein sous réserve d'un aménagement de son poste ou de ses horaires, le médecin du travail ayant précisé dans un courrier du 12 septembre 2013 qu'il s'agissait, en raison de sa grande fatigabilité, de ne pas faire travailler cet agent après 15h 30. Si les horaires de Mme A... ont été fixés, le 2 octobre 2013, de 8h 30 à 12h 30 et à 14h 30 à 17h 00, ce n'était qu'à titre d'essai pour les deux jours suivants afin de vérifier si une telle organisation de son travail pouvait lui convenir. Au demeurant, ces horaires, qui ne répondaient certes pas aux prescriptions du médecin du travail, n'ont jamais été effectués par l'intéressée dès lors qu'elle a été placée en congé de maladie en vertu d'arrêts de travail successifs à compter du 3 octobre 2013 et qu'entre-temps, ses horaires ont été aménagés, le 7 novembre 2013, de 8h00 à 15h00 conformément aux prescriptions dudit médecin. Ne correspondant pas aux heures d'ouverture du musée, à partir de 10h 00, ce réaménagement horaire a impliqué de confier à l'intéressée davantage de tâches d'entretien. Par la suite, alors que Mme A..., après avoir de nouveau été placée en congé de maladie en vertu d'arrêts de travail successifs du 6 mars 2013 au 2 juin 2014, a demandé à quitter le service des musées, il a été fait droit à sa demande en l'affectant au service Patrimoine, Logistique, Energie pour effectuer des tâches d'entretien à compter du 6 juin 2014, ses horaires de travail ayant alors été fixés de 6h 00 à 13h 00 conformément aux prescriptions du médecin du travail. Au 1er janvier 2016, et à sa demande à nouveau, elle a été affectée au service de la médiathèque et de la lecture publique, sur des horaires conformes aux préconisations du médecin de prévention. En octobre 2018, une nouvelle réaffectation lui a été proposée, à laquelle elle n'a cependant pas répondu, n'ayant pas repris ses fonctions. Ainsi, la collectivité apparaît avoir cherché à accompagner Mme A... en lui proposant, à de multiples reprises, des affectations et des horaires compatibles à la fois avec les préconisations médicales et les nécessitées du service. Si l'intéressée se plaint d'avoir été " déclassée " en étant peu à peu cantonnée à des tâches d'entretien des locaux, d'une part, ces tâches faisaient partie de sa fiche de poste en qualité d'adjoint technique territorial, alors en outre qu'elle a continué à effectuer des tâches d'accueil tant qu'elle était affectée au service du musée et, d'autre part, les aménagements d'horaires dont elle avait besoin, en début de journée, ont pu nécessiter une adaptation de ses missions compte tenu des contraintes de l'organisation du service, à savoir une orientation vers davantage de tâches d'entretien et moins de tâches d'accueil. Par ailleurs, la formation d'initiation à la saisie d'un inventaire informatisé, à laquelle elle avait elle-même demandé à participer en mars 2013, lui a été accordée. S'agissant ensuite du " dénigrement " dont elle aurait été victime, comme cela a été mentionné au point 4 ci-dessus, la note en date du 16 octobre 2013 constituait uniquement un document interne en direction de sa hiérarchie concernant l'aménagement de son poste et les implications pour l'organisation du service. Si cette note indiquait de manière erronée que Mme A... n'était plus en capacité de travailler en contact du public, elle n'était pas destinée à être diffusée et ne comportait aucune information confidentielle sur son état de santé ni ne formulait de propos dégradant à son égard, mais traduisait au contraire la volonté de prévenir des réactions négatives à son encontre de la part de collègues qui auraient pu interpréter l'aménagement de ses horaires comme un privilège. S'agissant de l' " accident " qui serait survenu le 2 octobre 2013, comme cela a également été exposé aux points 4 et 5 du présent arrêt, c'est à bon droit, compte-tenu de son état de santé préexistant et du résultat de l'expertise du Dr Dufour, que le président de la communauté d'agglomération du Niortais a pu refuser de lui reconnaître l'imputabilité au service. Enfin, la circonstance qu'elle ait été, en juillet 2019 et après avis du comité médical, placée en disponibilité d'office dans l'attente de l'avis de la commission de réforme quant à un placement en retraite pour invalidité en raison d'une inaptitude définitive et absolue à toute fonction médicalement constatée et à la suite d'une nouvelle expertise menée en juin 2019 par le Dr A..., ne saurait non plus être regardée comme la manifestation d'un harcèlement moral de la collectivité à son encontre. En tout état de cause, ces dernières circonstances, qui sont postérieures au refus contesté, sont inopérantes au soutient de cette contestation.

10. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges, ont considéré que Mme A... ne pouvait être regardée comme apportant les éléments de fait susceptibles de faire présumer que les actes et faits reprochés constitueraient des agissements répétés de harcèlement moral au sens de l'article 6 quinquies précité de la loi du 13 juillet 1983.

11. En second lieu, aux termes de l'article 11 de la loi précitée du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ".

12. D'une part, les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 établissent à la charge des collectivités publiques, au profit des fonctionnaires et des agents publics non titulaires lorsqu'ils ont été victimes d'attaques dans l'exercice de leurs fonctions, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général. Si cette obligation peut avoir pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles le fonctionnaire ou l'agent public est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu'il a subis, laquelle peut notamment consister à assister, le cas échéant, l'agent concerné dans les poursuites judiciaires qu'il entreprend pour se défendre, il appartient dans chaque cas à la collectivité publique d'apprécier, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la question posée au juge et du caractère éventuellement manifestement dépourvu de chances de succès des poursuites entreprises, les modalités appropriées à l'objectif poursuivi. D'autre part, des agissements répétés de harcèlement moral sont de ceux qui peuvent permettre, à l'agent public qui en est l'objet, d'obtenir la protection fonctionnelle prévue par les dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont les fonctionnaires et les agents publics non titulaires pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions.

13. Il incombe à l'agent qui demande le bénéfice de la protection fonctionnelle de fournir à l'autorité administrative les éléments lui permettant de statuer sur sa demande. En l'espèce, comme cela a été dit ci-dessus, les éléments apportés par la requérante n'établissent pas la réalité d'agissements constitutifs de harcèlement moral. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le président de la communauté d'agglomération du Niortais avait pu ne pas donner suite à la demande de protection formulée par l'intéressée sans méconnaître l'obligation de protection édictée par les dispositions précitées.

14. Par voie de conséquence, et en l'absence de faute de la collectivité, les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... doivent également être rejetées.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.


Sur les conclusions à fin d'injonction :

16. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme A..., tant à l'encontre du refus de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle que de lui reconnaître l'imputabilité au service de l'accident du 2 octobre 2013. Par suite, ses conclusions en injonction ne peuvent être accueillies.


Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur ce fondement.









DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Niortais sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et à la communauté d'agglomération du Niortais.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2020 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme Karine Butéri, président-assesseur,
Mme E..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 juin 2020.
Le président,
Pierre Larroumec



La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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