CAA de LYON, 7ème chambre, 25/08/2020, 19LY04044, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision25 août 2020
Num19LY04044
JuridictionLyon
Formation7ème chambre
PresidentM. JOSSERAND-JAILLET
RapporteurM. Daniel JOSSERAND-JAILLET
CommissaireM. CHASSAGNE
AvocatsCIZERON

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal des pensions militaires de Lyon d'annuler la décision du 24 mai 2017, par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de révision pour aggravation de sa pension militaire d'invalidité.

Par un jugement n° 17/00015 du 9 avril 2019, le tribunal des pensions militaires a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2019, et un mémoire, enregistré le 29 juin 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal des pensions militaires du 9 avril 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 24 mai 2017 ;
3°) de porter le taux de sa pension d'invalidité à 50 % ;
4°) le cas échéant, qu'une expertise soit ordonnée ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais de justice.

Il soutient que :
- il justifie, par la production de certificats médicaux, l'aggravation de son état neuro-psychiatrique ;
- le médecin désigné par la commission de réforme avait admis une aggravation au taux indemnisable de 10 % ;
- le rapport d'expertise du 4 avril 2016 a été dénaturé ;
- il souffre d'une hypertension artérielle induite qui n'était pas relevée lors de la précédente expertise en 2012.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2020, et un mémoire complémentaire, enregistré le 2 juillet 2020 (non communiqué), la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :
- l'expertise du 4 avril 2016 ne révèle pas d'aggravation de l'état de santé du requérant ;
- le lien de filiation entre l'infirmité de M. C... et son hypertension artérielle n'est pas établie.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président,
- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1 M. A... C... a été supplétif de l'armée française en Algérie du 1er juin 1959 au 30 avril 1962. Une pension militaire d'invalidité pour un syndrome psycho-traumatique de guerre lui a été concédée au taux de 25 % à compter du 8 mars 2007. Ce taux a été porté, pour aggravation, à 30 % à compter du 26 août 2009, puis au taux de 40 % et à titre définitif à compter du 19 mars 2012 par un arrêté du 8 juillet 2013. Le 9 avril 2014, M. C... a sollicité la révision de sa pension pour aggravation de son infirmité. Cette demande a été rejetée par une décision du ministre de la défense du 24 mai 2017. Par un jugement du 9 avril 2019, le tribunal des pensions militaires de Lyon a rejeté son recours contre ce refus et sa demande tendant à porter le taux de sa pension à 50 %. M. C... demande à la cour l'annulation de ce jugement, de la décision du 24 mai 2017 et que le taux de sa pension soit fixé à 50 %.
2 Aux termes de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : /1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...). " Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Est présumée imputable au service : / (...) 2° Toute blessure constatée durant les services accomplis par un militaire en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure mentionnée à l'article L. 4123-4 du code de la défense ou pendant la durée légale du service national et avant la date de retour sur le lieu d'affectation habituelle ou la date de renvoi dans ses foyers ; / 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ; / 4° Toute maladie constatée au cours d'une guerre, d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure mentionnée à l'article L. 4123-4 du code de la défense (...) ". L'article L. 121-2-3 dudit code précise que " La recherche d'imputabilité est effectuée au vu du dossier médical constitué pour chaque militaire lors de son examen de sélection et d'incorporation. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. " Aux termes de l'article L. 154-1 de ce code : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. Cette demande est recevable sans condition de délai. La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. " Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'est demandée la révision d'une pension concédée pour prendre en compte une affection nouvelle que l'on entend rattacher à une infirmité déjà pensionnée, cette demande ne peut être accueillie si n'est pas rapportée la preuve d'une relation non seulement certaine et directe, mais déterminante, entre l'infirmité antécédente et l'origine de l'infirmité nouvelle.
3 D'autre part, aux termes de l'article L. 121-4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le taux d'invalidité résultant de l'application des guides barèmes mentionnés à l'article L. 125-3. " L'article L. 121-5 précise que " La pension est concédée : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le taux global d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le taux d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : - a) 30 % en cas d'infirmité unique ; - b) 40 % en cas d'infirmités multiples. / Aucune pension n'est concédée en deçà d'un taux d'invalidité de 10 %. "
4 Il est en premier lieu constant que l'infirmité unique au titre de laquelle a été concédée à compter du 8 mars 2007 la pension militaire d'invalidité dont l'intéressé demande la révision consiste en un syndrome psycho-traumatique, à expression anxieuse dominante, avec troubles du sommeil. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment des expertises médicales du 12 décembre 2012 et du 4 avril 2016, que l'hypertension relevée par les experts, d'ailleurs constatée depuis 2012, antérieurement à la précédente révision, trouve un lien de filiation avec cette infirmité et en serait une aggravation, contrairement à ce qu'affirme le requérant.
5 En second lieu, il résulte du rapprochement de ces deux expertises, sans qu'aucun des documents médicaux produits par M. C... à l'instance ne l'infirme, une stabilité, appréciée à travers son interrogatoire et les examens cliniques, de l'état, certes sévère, du syndrome dont est affecté l'intéressé entre le 19 mars 2012, date d'effet de la révision opérée par l'arrêté du 8 juillet 2013, et la date du 9 avril 2014 à laquelle il a présenté sa demande de révision ayant abouti à la décision en litige. Si notamment le requérant fait essentiellement état d'un sommeil plus perturbé, l'expert a relevé dans ses conclusions du 4 avril 2016 que, dans un tableau clinique psychotraumatique chronique, cette manifestation, sans facteur retrouvé, s'était ainsi aggravée depuis les trois années précédant l'examen, soit à une date à laquelle cette branche de l'infirmité a nécessairement été prise en compte par la révision précédente au regard de la description faite par l'expert qui l'a examiné le 12 décembre 2012 et qui reste semblable à celle réalisée à l'issue de l'expertise du 4 avril 2016, qui au surplus ne lie pas l'appréciation de la ministre par ses conclusions. Il ne saurait enfin être tiré de la modification de la posologie d'un des médicaments antidépresseurs prescrits à M. C..., laquelle relève de l'adaptation de la thérapie aux caractéristiques de cette substance dans un traitement au long cours, une aggravation de l'état de santé objectif de l'intéressé.
6 Dans ces conditions, M. C... n'établit pas, à la date de sa demande de révision, d'aggravation de l'infirmité au titre de laquelle il est pensionné.
7 Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal des pensions militaires de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2020, à laquelle siégeaient :
M. Josserand-Jaillet, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Burnichon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 août 2020.

N° 19LY04044