CAA de PARIS, 2ème chambre, 21/12/2020, 19PA02141, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I - Par une demande enregistrée sous le n° 1715484, M. B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 août 2017 par lequel la ministre de la culture l'a placé en congé de maladie ordinaire du 7 juillet 2017 au 27 juillet 2017 et d'enjoindre à l'Etat de le placer en congé de maladie imputable au service du 7 juillet 2017 au 27 juillet 2017 ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.
II - Par une demande enregistrée sous le n° 1715679, M. B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 août 2017 par lequel la ministre de la culture l'a placé en congé de maladie ordinaire du 28 juillet 2017 au 3 août 2017 et d'enjoindre à l'Etat de le placer en congé de maladie imputable au service du 28 juillet 2017 au 3 août 2017 ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.
Par un jugement nos 1715484/5-3, 1715679/5-3 du 29 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 juillet 2019, M. B..., représenté par la Selafa Cabinet Cassel, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement nos 1715484/5-3, 1715679/5-3 du 29 mai 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les arrêtés contestés devant ce tribunal ;
3°) d'enjoindre au ministre de la culture de le placer en congé de maladie imputable au service du 7 juillet au 3 août 2017 ou, à défaut, de procéder au réexamen de son dossier, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a écarté les moyens qu'il avait invoqués au motif qu'il n'avait pas saisi l'administration d'une demande de reconnaissance de l'imputabilité de sa pathologie au service ; à la date à laquelle il a saisi le tribunal, aucun texte ne subordonnait la reconnaissance du caractère imputable au service d'une pathologie à une demande de l'agent ; il est constant qu'il a effectué une déclaration d'accident de service et qu'il a adressé au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, un rapport circonstancié pour compléter l'instruction de sa demande de reconnaissance imputable au service de sa pathologie ; ce faisant, non seulement le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit mais il l'a également entaché d'une erreur de fait ;
- les arrêtés en litige ont été pris par une autorité incompétente ;
- les arrêtés en litige ont été pris au terme d'une procédure irrégulière à défaut pour l'administration d'avoir saisi la commission de réforme ;
- il est victime d'un syndrome anxio-dépressif imputable au service ; il a été victime de remarques et d'agissements vexatoires de la part de la part de l'adjointe technique et membre de l'encadrement de l'équipe de nuit dont l'intention était de l'évincer du service ; le chef du département d'accueil et de surveillance, son supérieur hiérarchique, a systématiquement pris parti contre lui ; il en va de même de même du responsable de l'équipe B de nuit qui a rédigé un rapport incendiaire à son encontre ; il a été suspendu de ses fonctions puis a été sanctionné alors qu'il avait fait part à son supérieur hiérarchique du harcèlement moral dont il était victime ; son état de santé s'étant dégradé, il a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail et a été vu en consultation au centre psychiatrique de l'hôpital Saint-Anne pour un syndrome anxio-dépressif imputable à ses conditions de travail ; ce faisant, les arrêtés contestés sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 avril 2020, le ministre de la culture conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 27 octobre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 13 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., recruté sans concours, le 1er janvier 2004, en qualité d'agent technique d'accueil, de surveillance et de magasinage et affecté au musée d'Orsay, a, en dernier lieu, été déclaré admis au concours exceptionnel interne d'adjoint technique d'accueil, de surveillance et de magasinage au titre de l'année 2006 et titularisé dans le grade d'adjoint technique d'accueil, de surveillance et de magasinage à compter du 1er avril 2007. Depuis 2006, M. B... exerce les fonctions d'agent d'intervention de nuit. Par deux arrêtés du 8 août 217, le ministre de la culture et de la communication a placé M. B... en congé de maladie ordinaire du 7 au 27 juillet 2017 puis du 28 juillet au 3 août 2017. Par un jugement un jugement n°s 1715484/5-3, 1715679/5-3 du
29 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés du 8 août 2017 et à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de le placer en congé de maladie imputable au service du 7 au 27 juillet 2017 et du 28 juillet au 3 août 2017 ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard.
2. En premier lieu, M. B... invoque, comme il le faisait en première instance, le moyen tiré de ce que les arrêtés en litige ont été signés par une autorité incompétente. En l'absence de pièces et d'arguments nouveaux et pertinents produits en appel au soutien de ce moyen, il y a lieu, par adoption du motif retenu à bon droit par le tribunal au point 3. du jugement attaqué, de l'écarter.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. (...). / (...). / II. - Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. / (...). / IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / (...). / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l''exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. / (...). / VI. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires. Il fixe également les obligations auxquelles les fonctionnaires demandant le bénéfice de ce congé sont tenus de se soumettre en vue, d'une part, de l'octroi ou du maintien du congé et, d'autre part, du rétablissement de leur santé, sous peine de voir réduire ou supprimer le traitement qui leur avait été conservé. / (...) ".
4. M. B... fait valoir que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal aux points 6. et 8. du jugement attaqué, à la date à laquelle il l'a saisi de conclusions à fin d'annulation des arrêtés du 8 août 2017, aucun texte ne subordonnait la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une pathologie à une demande de l'agent. Il invoque, à l'appui de son argumentation, les dispositions précitées de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, créé par l'ordonnance du 19 janvier 2017, et soutient que ce n'est que par un décret n° 2019-122 du 21 février 2019 qu'a été introduite l'obligation d'une demande préalable.
5. Toutefois, les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. Or, les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, issues d'une ordonnance du 19 janvier 2017, n'étaient, en tout état de cause, pas en vigueur à la date à laquelle est intervenu l'accident de service invoqué par M. B..., soit le 16 janvier 2017, date à laquelle s'est tenue la réunion dont il fait état dans son courrier du 19 juin 2017. Sa situation était dès lors régie par les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984.
6. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) ; / A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...)/ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. (...) ". Aux termes de l'article 26 du décret du 14 mars 1986 : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, les commissions de réforme prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus sont obligatoirement consultées dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 34 (2°), 2° alinéa, de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui leur est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. / La commission de réforme n'est toutefois pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration ". Aux termes de l'article 32 de ce même décret : " Lorsque le congé de longue durée est demandé pour une maladie contractée dans l'exercice des fonctions, le dossier est soumis à la commission de réforme. Ce dossier doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. La demande tendant à ce que la maladie soit reconnue comme ayant été contractée dans l'exercice des fonctions doit être présentée dans les quatre ans qui suivent la date de la première constatation médicale de la maladie. / La commission de réforme n'est toutefois pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. / L'avis de la commission de réforme et le dossier dont elle a disposé sont transmis à l'administration dont relève l'agent intéressé ". Il résulte de ces dispositions que la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident est subordonnée à la présentation par le fonctionnaire d'une demande en ce sens.
7. En troisième lieu, M. B... soutient que, contrairement à ce qu'a relevé le tribunal, il a effectué une déclaration d'accident de service et a adressé au CHSCT un rapport circonstancié pour compléter l'instruction de sa demande d'imputabilité au service de sa pathologie.
8. Toutefois, M. B... ne produit aucun élément probant et pertinent de nature à étayer ses allégations. Le courrier du 19 juin 2017 auquel il se réfère constitue un simple rapport circonstancié adressé au CHSCT relatif à l'accident de service du 16 janvier 2017. S'il y indique, en conclusion, que sa santé a été " sévèrement impactée ", il ne formule aucune demande expresse d'imputabilité au service de sa pathologie. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, qu'il pourrait être regardé comme s'étant prévalu, même implicitement, des dispositions précitées de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 auprès de l'administration. Dans ces conditions, M. B... ne peut être regardé comme ayant sollicité le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 au sens de l'article 26 du décret de l'article 14 mars 1986. Il suit de là que le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission de réforme par le ministre de la culture et de la communication ne peut qu'être écarté.
9. En quatrième et dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 8. du présent arrêt que M. B... n'a pas saisi l'administration d'une demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie. Dans ces conditions, le ministre de la culture et de la communication n'a pu se prononcer sur une telle demande. Il suit de là qu'en plaçant M. B... en congé de maladie ordinaire, le ministre de la culture et de la communication ne saurait être regardé comme ayant commis une erreur d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête, ensemble les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte qu'il a présentées devant la Cour ainsi que celles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la culture.
Délibéré après l'audience du 9 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2020.
Le rapporteur,
S. C...Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de la culture, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02141