CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 07/12/2021, 21MA00437

Information de la jurisprudence
Date de décision07 décembre 2021
Num21MA00437
JuridictionMarseille
Formation4ème chambre
PresidentM. BADIE
RapporteurM. Alexandre BADIE
CommissaireM. ANGENIOL
AvocatsMDMH - MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 19 août 2016 par le tribunal départemental des pensions du Gard et transmise le 6 novembre 2019, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, au tribunal administratif de Nîmes, M. B... A... a demandé d'annuler la décision du 15 février 2016 en tant que le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " Séquelles d'entorse de cheville droite avec dorsiflexion à 100 % et extension normale sur cheville stable. Origine par preuve blessure reçue par le fait du service le 8 mars 2011 - Hors guerre " et l'infirmité " Séquelles de traumatisme externe de l'oreille gauche par capot de déventement sur fond de perte auditive moyenne de l'oreille gauche - 32,5 db ", ainsi que la fiche descriptive des infirmités du 23 février 2016.


Par un jugement n° 1903689 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er février et le 31 août 2021, M. A..., représenté par Me Moumni, demande à la cour :


1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 3 décembre 2020 ;


2°) d'annuler la décision du 15 février 2016 du ministre de la défense qui refuse de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " Séquelles d'entorse de cheville droite avec dorsiflexion à 100 % et extension normale sur cheville stable " et l'infirmité " Séquelles de traumatisme externe de l'oreille gauche par capot de déventement sur fond de perte auditive moyenne de l'oreille gauche - 32,5 db ", ainsi que la fiche descriptive des infirmités du 23 février 2016.


3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.


Il soutient que sa requête est recevable ; le jugement est irrégulier faute d'avoir respecté le caractère exécutoire du jugement avant dire droit du 9 juin 2017 du tribunal départemental des pensions du Gard, en violation de l'article L. 11 du code de justice administrative ; le jugement ne comporte pas le visa du jugement avant dire droit du 9 juin 2017 du tribunal départemental des pensions du Gard ; en n'exigeant pas la remise de son rapport par l'expert, le tribunal administratif a également méconnu le principe du contradictoire en ne le mettant en position de présenter ses observations ; les expertises médicales produites contredisent l'absence de caractère non indemnisable de ses deux infirmités.


Par une décision du 15 mars 2021 le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A....


Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que le jugement est régulier et que les moyens du requérant ne sont pas fondés.


Une ordonnance du 1er septembre 2021 clos l'instruction au 24 septembre 2021 à
12 heures.


Un mémoire présenté le 21 septembre 2021 par la ministre des armées n'a pas été communiqué.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;


Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Badie, rapporteur,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public ;


Considérant ce qui suit :


1. M. A..., né le 24 avril 1957, s'est engagé le 1er avril 1978 et a été radié des contrôles le 25 novembre 2015, au grade de major. Il est titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " Séquelles de fracture bimalléolaire de la cheville gauche avec arrachement du tubercule externe ostéosynthésé. Origine par preuve blessure reçue par le fait du service le 8 mars 2011 - Hors guerre " au taux de 15 %. Il a sollicité les 1er et 3 mars 2015 l'attribution d'une pension militaire d'invalidité pour quatre nouvelles infirmités : blessure cheville droite, hernie discale, blessure talon gauche et choc à l'oreille gauche et, le 30 mai 2015, le renouvellement de son infirmité pensionnée. Par un arrêté du 15 février 2016 et une fiche descriptive des infirmités du 23 février 2016, le ministre de la défense a renouvelé à titre définitif la pension pour l'infirmité " Séquelles de fracture bimalléolaire de la cheville gauche avec arrachement du tubercule externe ostéosynthésé. Origine par preuve blessure reçue par le fait du service le 8 mars 2011 - Hors guerre" au taux de 15 %, et a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " Lombo sciatalgie gauche sur hernie discale L5/S1 ancienne ", pour l'infirmité " Séquelles d'entorse de cheville droite avec dorsiflexion à 100 % et extension normale sur cheville stable " ainsi que pour l'infirmité " Séquelles de traumatisme externe de l'oreille gauche par capot de déventement sur fond de perte auditive moyenne de l'oreille gauche - 32,5 db ". M. A... relève appel du jugement du 3 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2016 et de la fiche descriptive des infirmités du 23 février 2016 en tant que le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité portant sur l'infirmité " Séquelles d'entorse de cheville droite avec dorsiflexion à 100 % et extension normale sur cheville stable " et sur l'infirmité " Séquelles de traumatisme externe de l'oreille gauche par capot de déventement sur fond de perte auditive moyenne de l'oreille gauche - 32,5 db ".


Sur la régularité du jugement :


2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative :
" (...) La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application (...) ".

3. M. A... soutient que les premiers juges ont omis de viser le jugement avant dire droit du 9 juin 2017 du tribunal départemental des pensions du Gard. Mais, une telle circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à vicier la régularité du jugement attaqué, dès lors que ce jugement avant-dire-droit a été nécessairement compris dans le visa général, " vu les autres pièces du dossier ".



4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. La mission confiée à l'expert peut viser à concilier les parties ". Aux termes de l'article L. 11 du code de justice administrative : " Les jugements sont exécutoires. ". Lorsqu'il a ordonné une expertise par un jugement avant-dire droit, le tribunal administratif est tenu d'assurer le suivi de cette mesure d'instruction, en invitant l'expert à clore ses opérations soit en dressant un procès-verbal de carence soit en déposant son rapport et, dans cette hypothèse, de prendre en compte ce rapport dans les motifs de son jugement au fond.


5. Par un jugement avant dire droit du 9 juin 2017, le tribunal départemental des pensions du Gard a ordonné une expertise confiée au docteur E... C..., chirurgien orthopédique, avec pour mission d'examiner M. A.... Après plusieurs changements d'expert, il a finalement désigné le 18 septembre 2019 le docteur D... pour y procéder. Il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance que, malgré les demandes de M. A..., le tribunal administratif de Nîmes ait invité l'expert à clore ses opérations soit en dressant un procès-verbal de carence soit en déposant son rapport. En omettant de le faire, alors au demeurant qu'il ressort des pièces du dossier que l'expert a procédé à l'examen médical du requérant, les premiers juges ont entaché leur décision d'irrégularité. Le jugement attaqué ne peut, par suite, qu'être annulé. Il y a lieu de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Nîmes.


6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.






D É C I D E :


Article 1er : Le jugement n° 1903689 du 3 décembre 2020 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 2 : M. A... est renvoyé devant le Tribunal administratif de Nîmes pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.

Copie en sera transmise à M. D..., expert.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Badie, président,
M. Revert, président assesseur,
Mme Renault, première conseillère.




Rendu public par mise à disposition du greffe, le 7 décembre 2021.




N° 21MA00437 2