CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 01/02/2022, 19MA04778, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision01 février 2022
Num19MA04778
JuridictionMarseille
Formation4ème chambre
PresidentM. BADIE
RapporteurM. Alexandre BADIE
CommissaireM. ANGENIOL
AvocatsPAOLANTONACCI

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal des pensions de Marseille d'annuler la décision du 11 janvier 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande d'octroi d'une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelle de traumatisme cheville gauche ".

Par un jugement n° 17/00047 du 13 septembre 2018, le tribunal des pensions de Marseille a annulé la décision de la ministre des armées du 11 janvier 2017 et reconnu à
M. C... un droit à pension au titre de l'infirmité " séquelles de traumatisme de la cheville gauche avec fracture spiroïde extra articulaire uni corticale du corps de la première du
4ème orteil gauche, non déplacée, traitée par ligamentoplastie le 25 mars 2015 ; troubles trophiques ", au taux de 15%.


Procédure devant la Cour :

Par une requête, produite après déclaration d'appel formée le 15 octobre 2018, la ministre des armées a demandé à la Cour régionale des pensions militaires d'Aix-en Provence, d'annuler le jugement du tribunal des pensions militaires de Marseille du 13 septembre 2018.




Elle soutient que l'infirmité au titre de laquelle M. C... a demandé l'octroi d'une pension militaire d'invalidité entraîne un taux d'infirmité inférieur au minimum requis pour ouvrir droit à pension.
Par acte de transmission du dossier, enregistré le 1er novembre 2019, et en application des dispositions du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 portant transfert de compétence entre juridictions de l'ordre administratif, la cour administrative d'appel de Marseille est saisie de la présente affaire.


Par un mémoire en défense, enregistré par la Cour le 25 novembre 2021, M. C..., représenté par Me Paolantonacci, conclut au rejet de la requête de la ministre des armées et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Badie,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.



Considérant ce qui suit :


1. M. A... C..., né le 17 janvier 1994, s'est engagé au sein de la Légion étrangère, pour une durée de cinq ans, à compter du 30 août 2013. Il a sollicité, le 26 août 2014, l'octroi d'une pension militaire d'invalidité pour des séquelles de traumatisme de la cheville gauche. Par décision du 11 janvier 2017, la ministre des armées a rejeté sa demande. Saisi d'un recours à l'encontre de cette décision, le tribunal des pensions de Marseille, par un jugement avant-dire droit du 26 octobre 2017, a ordonné une expertise médicale qui a été confiée au docteur B..., chirurgien orthopédique. Par un jugement du 13 septembre 2018, dont la ministre des armées relève appel, le tribunal des pensions de Marseille a annulé la décision de la ministre des armées et reconnu à M. C... un droit à pension au titre de l'infirmité " séquelles de traumatisme de la cheville gauche avec fracture spiroïde extra articulaire uni corticale du corps de la première du 4ème orteil gauche, non déplacée, traitée par ligamentoplastie le 25 mars 2015 ; troubles trophiques ", au taux de 15%.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande : " Ouvrent droit à pension :
1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ", et aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; (...). ".
3. D'autre part, si, en vertu des dispositions de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, la décision relative à l'évaluation relative à l'invalidité au titre de laquelle la demande de pension est sollicitée doit se placer à la date de demande de la pension pour apprécier le degré d'invalidité de l'infirmité invoquée, cette évaluation doit, en application des termes mêmes de l'article L. 26 du même code, tenir compte de la gêne fonctionnelle engendrée dans le temps par ces infirmités.
4. Il ressort des pièces du dossier que, le 17 décembre 2013, M. C... a fait une chute lors d'un cross réalisé durant le service, lui causant immédiatement une vive douleur au niveau de la cheville gauche. Une IRM réalisée le 5 mars 2014 a mis en évidence une fracture du tibia distal, des lésions ostéo-chondrales tibio-taliennes ainsi qu'une rupture du faisceau
talo-fibulaire antérieur. Le docteur D..., médecin chef à l'hôpital d'instruction des armées (HIA) Laveran, indique, à la date du 27 juin 2014, que " le travail en charge s'accompagne de douleurs et le sevrage de la canne n'a pas pu être encore réalisé ". Le 2 juillet 2014, des radiographies de l'avant-pied gauche mettent en évidence en outre une " fracture spiroïde extra articulaire uni corticale du corps de la première du 4ème orteil gauche, non déplacée ".
Le docteur D... indique, à l'issue d'une consultation du 14 octobre 2014 que " on note une diminution des troubles trophiques, une flexion tibio-talienne récupérée mais avec des douleurs en fin d'amplitude. Le contrôle proprioceptif n'est toujours pas satisfaisant en appui monopodal. (...) au niveau fonctionnel [M. C...] reste perturbé par des douleurs tibio taliennes nécessitant l'utilisation d'une canne anglaise et provoquant une boiterie d'esquive sans canne ". Enfin il ressort du rapport d'expertise ordonnée par le tribunal des pensions de Marseille et réalisé par le docteur B... qu'à la date de sa demande, M. C... souffrait de " douleurs de cheville avec boiterie liées à des lésions chondrales du talus, instabilité de la cheville liée à une lésion du ligament talo-fibulaire antérieur et perte modérée de la mobilité active de la cheville sans position vicieuse en talus ou en équin ". S'il ne ressort pas des pièces du dossier que la fracture du 4ème orteil gauche soit à l'origine d'une quelconque gêne fonctionnelle et s'il n'y a pas lieu de prendre en compte, pour apprécier celle-ci, l'apparition très temporaire de troubles trophiques, les lésions dont souffrait M. C... à la date de sa demande d'octroi d'une pension militaire d'invalidité à titre temporaire, ainsi que la gêne fonctionnelle qu'elles induisaient, justifiaient que soit retenu un taux d'infirmité de 10% pour les séquelles de traumatisme de la cheville gauche, conformément aux indications du guide barème.
5. Il résulte de ce qui précède que la ministre des armées est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont reconnu à M. C... un droit à pension militaire d'invalidité au taux de 15%, à compter du 26 août 2014, pour l'infirmité " séquelles de traumatisme de la cheville gauche avec fracture spiroïde extra articulaire uni corticale du corps de la première du 4ème orteil gauche, non déplacée, traitée par ligamentoplastie le
25 mars 2015 ; troubles trophiques " et à demander à ce que ce taux soit ramené au taux de 10%, pour l'infirmité " séquelles de traumatisme cheville gauche ".
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. C... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :





Article 1er : La pension militaire d'invalidité accordée à M. C... à compter du 26 août 2014 au titre de l'infirmité " séquelles de traumatisme de la cheville gauche avec fracture spiroïde extra articulaire uni corticale du corps de la première du 4ème orteil gauche, non déplacée, traitée par ligamentoplastie le 25 mars 2015 ; troubles trophiques ", au taux de 15%, doit être ramenée au taux de 10% au titre de l'infirmité " séquelles de traumatisme cheville gauche ".
Article 2 : Le jugement du tribunal des pensions de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions de M. C... devant la Cour en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre des armées et à M. A... C....
Copie en sera transmise à M. le docteur B..., expert.


Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022, où siégeaient :

- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2022.


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N°19MA04778