CAA de NANCY, 4ème chambre, 07/11/2023, 21NC01025, Inédit au recueil Lebon

Information de la jurisprudence
Date de décision07 novembre 2023
Num21NC01025
JuridictionNancy
Formation4ème chambre
PresidentMme SAMSON-DYE
RapporteurM. Arthur DENIZOT
CommissaireM. MICHEL
AvocatsADJEMI

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 19 décembre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté la demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, d'autre part, de fixer les taux d'invalidité à 10% pour chacune des deux nouvelles infirmités et d'enjoindre à la ministre des armées de le faire bénéficier de la pension d'invalidité afférente à ces taux, et enfin, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale visant à déterminer le taux d'invalidité de chaque infirmité invoquée.

Par un jugement n° 2000803 du 23 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 avril 2021, M. A... représenté par Me Adjemi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 février 2021 ;

2°) avant-dire droit, d'ordonner une expertise médicale judiciaire pour évaluer le taux d'invalidité pour chaque infirmité ;

3°) d'annuler la décision du 19 décembre 2018 par laquelle la ministre des Armées a rejeté la demande de révision de sa pension militaire d'invalidité ;

4°) de fixer les taux d'invalidité à 10% pour chacune des deux nouvelles infirmités et d'enjoindre à la ministre des Armées de le faire bénéficier de la pension d'invalidité afférente à ces taux.

Il soutient qu'il souffre, d'une part, de séquelles d'une fracture du tibia gauche et, d'autre part, de séquelles d'une luxation acromio-claviculaire gauche, toutes deux imputables au service et qui doivent donner lieu à l'application d'un taux d'invalidité de 10% chacune.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denizot, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

1. M. A..., entré en service le 1er juin 1984 dans le corps des infirmiers et techniciens des hôpitaux militaires, a été radié le 7 août 2015. Depuis le 12 septembre 2012, M. A... est titulaire d'une pension militaire d'invalidité de 25% pour des " séquelles de traumatisme du rachis lombaire avec discopathie L4-L5 et arthrose inter apophysaire postérieure L4-L5 " liées à une mauvaise réception en parachute le 21 février 1994, dans le cadre du service. Le 18 mai 2016, M. A... a sollicité la révision de sa pension pour indemnisation de " séquelles de fracture du tibia gauche " d'un saut en parachute réalisé le 17 décembre 1985, ainsi que de " séquelles de luxation acromio-claviculaire gauche " consécutives à une chute à vélo le 2 septembre 1993. Par une décision du 19 décembre 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. Par une requête, enregistrée au tribunal des pensions de Metz le 22 janvier 2019, puis transmise au tribunal administratif de Strasbourg, M. A... a sollicité l'annulation de la décision du 19 décembre 2018. Par un jugement n° 2000803 du 23 février 2021, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article L.4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa version en vigueur à la date de la demande de révision de pension : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; / 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. / Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage ".

Sur l'infirmité " séquelles de fracture du tibia gauche " :

3. M. A... a été victime, le 17 décembre 1985, d'une fracture fermée non articulaire du tiers inférieur du péroné gauche. Au cours de l'année 2016, M. A... s'est plaint de plusieurs gênes dans la montée et la descente rapide des escaliers, dans la marche ainsi que d'une sensation désagréable au niveau des orteils du pied gauche.

4. Selon l'expertise du 21 février 2018, M. A... souffre d'une pathologie double résultant, d'une part, d'une douleur subjective se traduisant par " une gêne et quelques paresthésies dans le territoire musculo-cutané gauche, sans aucun déficit moteur, ni trouble de la sensibilité profonde, ni amyotrophie, ni trouble de la marche, mais désagréable au frottement des chaussures " et, d'autre part, d'une gêne à la marche. Cette expertise, ainsi que celle plus ancienne du 18 octobre 2004, ont retenu, pour cette infirmité, un taux d'invalidité inférieur à 10%. M. A..., qui admet que sa demande est essentiellement motivée par des raisons financières concernant la prise en charge des soins, se prévaut d'un rapport d'imagerie médicale du 8 avril 2016 concernant sa cheville gauche concluant " qu'il n'y a pas d'anomalie pour expliquer la symptomatologie ". Toutefois, en se prévalant uniquement de cet examen, qui ne contredit nullement les conclusions de l'expertise médicale du 21 février 2018 sur le taux d'invalidité résultant de la fracture du péroné gauche, M. A... ne saurait être regardé comme remettant en cause la circonstance que cette blessure ait provoqué un taux d'invalidité inférieur à 10% n'ouvrant pas droit à indemnisation.

Sur l'infirmité " séquelles de luxation acromio claviculaire gauche " :

5. M. A... a été victime, le 2 septembre 1993, d'une luxation acromio-claviculaire gauche de stade 2.

6. L'expertise médicale du 21 février 2018 relève que M. A... souffre d'une tendinopathie calcifiante sous-acromiale gauche ainsi que de calcifications au niveau de l'espace sous-acromial droit non traumatisé. Cette expertise opère une distinction entre " la pathologie séquellaire acromio claviculaire, de nature arthrosique " et une " pathologie calcifiante de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche, microcristalline ". L'expert estime alors qu'il existe également " une pathologie non traumatique de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche " et, de manière plus générale, " une pathologie microcristalline (...) indépendante de l'arthropathie acromio-claviculaire post-traumatique ". Pour l'expert, cette pathologie microcristalline est de nature bilatérale. L'expert conclut que si l'infirmité invoquée entraîne un taux global d'invalidité de 10%, il n'y a pas d'aggravation significative de la pathologie acromio-claviculaire séquellaire de l'épaule gauche, seule pathologie liée à l'accident de service. Cette analyse a été suivie par le médecin du ministère des armées en charge des pensions militaires d'invalidité le 22 août 2018 et par la commission de réforme le 18 décembre 2018, qui retiennent un taux d'invalidité globale de 10%, mais qui estiment que ce taux résulte en partie d'une pathologie microcristalline bilatérale non imputable à l'accident du 2 septembre 1993.

7. Pour contester cette appréciation, M. A... se prévaut d'un courrier du 5 août 2015 de son chirurgien orthopédique qui semble affirmer que la pathologie liée à l'épaule gauche serait en lien avec l'ancien accident de service. Toutefois, ce courrier, rédigé en des termes allusifs et non affirmatifs, ne permet pas de remettre en cause les constatations réalisées par l'expertise du 21 février 2018. En outre, M. A... n'apporte aucun élément médical de nature à remettre en cause le diagnostic de l'existence d'une pathologie microcristalline, non imputable au service. Par suite, M. A... n'établit pas que sa luxation acromio-claviculaire gauche de stade entraînerait, à elle seule et sans prise en compte de la pathologie microcristalline, un taux d'invalidité de 10 %.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de diligenter une expertise qui revêtirait en l'espèce un caractère frustratoire, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.


D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées.


Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,
- Mme Roussaux, première conseillère,
- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.






Le rapporteur,
Signé : A. DenizotLa présidente,
Signé : A. Samson-Dye
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
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N° 21NC01025