cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 04/06/2024, 22TL21215, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 4 octobre 2018 et les arrêtés des 11 et 16 octobre 2018 du vice-président de la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet Agglomération, ensemble la décision du 14 février 2019 rejetant son recours gracieux, refusant d'imputer au service les arrêts de travail pour la période postérieure au 26 avril 2018 et la plaçant en congé de maladie ordinaire, d'enjoindre à la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet de prendre en charge au titre de l'imputabilité au service de l'accident du 29 mars 2018 les arrêts de travail postérieurs au 27 avril 2018 et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1901565 du 9 avril 2021, le tribunal administratif de Toulouse a ordonné, avant dire droit, une expertise médicale aux fins de déterminer dans quelle mesure les soins et arrêts de travail dont Mme C... a bénéficié à compter du 27 avril 2018 présentent un lien direct, et non nécessairement exclusif, avec son accident de trajet du 29 mars 2018.
Par un jugement n° 1901565 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 4 octobre 2018 et les arrêtés des 11 et 16 octobre 2018 ensemble la décision du 14 février 2019 rejetant le recours gracieux de Mme C..., enjoint au président de la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet de prendre une décision reconnaissant l'imputabilité au service des pathologies de Mme C... en lien direct avec l'accident de trajet du 29 mars 2018 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et d'en tirer les conséquences qui s'y attachent, mis à la charge définitive de la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 1 200 euros, ainsi qu'une somme de 1 500 euros à verser à Mme C... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et rejeté les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 mai 2022, la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet, représentée par la Selarl Consilium avocats agissant par Me Rouxel, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 mars 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) de mettre les frais d'expertise à la charge de Mme C... ;
3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les décisions sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation, il n'existe aucun lien direct entre la pathologie anxio-dépressive de Mme C... et l'accident de la circulation du 29 mars 2018 reconnu imputable au service ;
- la commission de réforme du 10 septembre 2018 faisait état d'une date de consolidation au 27 avril 2018 avec un taux d'invalidité permanente partielle de 0 % de sorte que tout arrêt de travail ou soin postérieur à cette date relève du régime de la maladie ordinaire ;
- la déclaration d'accident ne faisait pas état d'une pathologie psychiatrique et le recours gracieux de Mme C... n'en faisant pas non plus mention ;
- les troubles psychologiques de Mme C... ont pour origine des difficultés professionnelles, sans lien avec l'accident de service ;
- la date de consolidation de la pathologie dorso lombaire de Mme C... ne peut être postérieure au 30 octobre 2018.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 juin 2023, Mme C..., représentée par Me Sabatté, conclut au rejet de la requête, à l'annulation des arrêtés des 4, 11 et 16 octobre 2018, ensemble la décision du 14 février 2019 rejetant son recours gracieux et demande qu'il soit enjoint à la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet de prendre en charge au titre de l'imputabilité au service de l'accident du 29 mars 2018 son indisponibilité et ses soins jusqu'au 31 mai 2020 et de la rétablir dans ses droits à rémunération notamment dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et enfin de mettre à la charge de la communauté d'agglomération une somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la communauté d'agglomération reconnaît que la pathologie dorso lombaire a été ignorée à tort alors qu'elle impliquait la prise en charge des arrêts de travail et des soins liés à l'accident jusqu'au 30 octobre 2018 ;
- l'apparition d'un syndrome de stress post traumatique a été médicalement constatée et est liée directement, même de manière non exclusive, à l'accident de trajet du 29 mars 2018.
Par une ordonnance du 15 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 juin 2023 à 12h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- les observations de Me Sabatté, représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., agent spécialisé principal de deuxième classe des écoles maternelles de la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet (Tarn), a été victime, le 29 mars 2018, d'un accident de trajet reconnu imputable au service. Les arrêts de travail du 29 mars au 26 avril 2018 ont alors été pris en charge au titre de cet accident. Par arrêté du 11 octobre 2018, le président de la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet a regardé les arrêts de travail de Mme C... comme relevant d'un congé de maladie ordinaire à compter du 27 avril 2018. Par arrêté du 16 octobre suivant, la même autorité a reconnu l'imputabilité au service de l'accident de trajet et des arrêts de travail pour la période du 29 mars au 26 avril 2018. Ces décisions ont été notifiées à Mme C... accompagnées d'un courrier, en date du 4 octobre 2018, l'informant notamment des retenues sur traitement qui allaient être opérées pour la période postérieure au 26 avril 2018. Mme C... a formé un recours gracieux contre ces trois décisions le 11 décembre 2018 qui a été rejeté le 14 février 2019. Saisi par Mme C... d'une demande d'annulation de la décision du 4 octobre 2018 et des arrêtés des 11 et 16 octobre 2018, ensemble la décision du 14 février 2019 rejetant son recours gracieux, le tribunal administratif de Toulouse a diligenté une expertise médicale par un jugement avant-dire droit du 9 avril 2021, puis, par un jugement du 18 mars 2022, annulé les décisions contestées. La communauté d'agglomération Gaillac Graulhet relève appel de ce dernier jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 applicable au litige: " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ".
3. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions citées au point 2, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Il résulte par ailleurs de ces dispositions que doivent être pris en charge au titre de l'accident de service les arrêts de travail et les frais médicaux présentant un lien direct et certain avec l'accident initial y compris, le cas échéant, s'ils interviennent postérieurement à la date de consolidation constatée par l'autorité compétente.
4. S'il est désormais constant que la névralgie cervico-brachiale droite dont souffre Mme C... ainsi que sa pathologie dorso lombaire sont en lien direct avec l'accident de trajet du 29 mars 2018, la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet conteste l'existence d'un lien de causalité entre la pathologie anxio-dépressive mentionnée dans le certificat de prolongation d'arrêt de travail du 19 juillet 2018 et l'accident reconnu imputable au service. Toutefois, la circonstance que la commission de réforme du 10 septembre 2018 ait retenu une date de consolidation au 27 avril 2018 avec un taux d'invalidité permanente partielle de 0 % ou celles supplémentaires que la déclaration d'accident initial ou le recours gracieux de Mme C... ne faisaient pas état d'une pathologie psychiatrique, ne sont pas de nature à écarter la prise en charge des arrêts de travail intervenus postérieurement à la date de consolidation, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'expertise du docteur B... se référant au diagnostic du médecin psychiatre, que ces manifestations anxio-dépressives ont à la fois pour origine l'accident de circulation du 29 mars 2018 et les difficultés professionnelles rencontrées alors par l'intéressée. Cette dernière circonstance, ni celle selon laquelle les formulaires d'arrêts de travail à compter du 31 octobre 2018 ont été établis sur un formulaire de maladie ordinaire, conformément d'ailleurs à la consigne donnée par la collectivité, n'est pas de nature à remettre en cause l'existence d'un lien direct, qui n'a pas à être exclusif, avec l'accident de service. Les moyens tirés de l'erreur de droit et l'erreur d'appréciation doivent par suite être écartés.
5. Il résulte de ce qui précède que la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision du 4 octobre 2018, les arrêtés des 11 et 16 octobre 2018 ensemble la décision du 14 février 2019 rejetant le recours gracieux de Mme C..., et lui a enjoint de tirer les conséquences qui s'y attachent, notamment en assurant la prise en charge de ses arrêts de travail à plein traitement à compter du 27 avril 2018 ainsi que les soins y afférents en lien avec ces pathologies.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
6. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Gaillet Graulhet une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet est rejetée.
Article 2 : La communauté d'agglomération Gaillac Graulhet versera à Mme C... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et à la communauté d'agglomération Gaillac Graulhet.
Délibéré après l'audience du 21 mai 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
Mme Arquié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2024.
La rapporteure,
C. Arquié
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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