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CAA de NANTES, 6ème chambre, 18/07/2023, 21NT03163, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 1er avril 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension en qualité de conjointe survivante d'un mécanicien ayant servi dans la marine nationale. Par un jugement n° 1905852 du 13 septembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 10 novembre 2021, Mme D..., représentée par Me Quinquis, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 13 septembre 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 1er avril 2019 ; 3°) de reconnaître imputable au service la maladie dont est décédé son mari ; 4°) de lui allouer une pension militaire d'invalidité en qualité de conjointe survivante ; 5°) d'assortir les sommes dues des intérêts au taux légal à compter de la saisine de la ministre des armées ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la maladie dont son mari est décédé est imputable au service. Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que la requête présentée par Mme D... est irrecevable et à titre subsidiaire qu'elle n'est pas fondée. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gélard, - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... D..., mécanicien embarqué dans la Marine nationale de 1962 à 1980, est décédé le 13 mai 2018 d'un cancer du rectum. Le 29 novembre 2018, son épouse a sollicité une pension militaire d'invalidité en qualité de conjointe survivante. Par une décision du 1er avril 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. Mme D... relève appel du jugement du 13 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision. Sur le caractère professionnel de la pathologie dont est décédé M. D... : 2. Aux termes de l'article L.121-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Est présumée imputable au service : (...) 3° Toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le militaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ces tableaux ; 4° Toute maladie constatée au cours d'une guerre, d'une expédition déclarée campagne de guerre, d'une opération extérieure (...) ". Aux termes de l'article L. 121-2-1 du même code : " Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau de maladies professionnelles mentionné aux articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 461-3 du code de la sécurité sociale peut être reconnue imputable au service lorsque le militaire ou ses ayants cause établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux précités lorsque le militaire ou ses ayants cause établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions. ". Aux termes de l'article L. 141-1 de ce code : " Au décès du militaire, le conjoint survivant ou le partenaire d'un pacte civil de solidarité bénéficie d'un droit à pension dans les conditions prévues au présent titre. ". L'article L. 141-2 du même code dispose que : " Le droit à pension est ouvert au conjoint ou partenaire survivant mentionnés à l'article L. 141-1 : 1° Lorsque le militaire est décédé en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension (...) 3° Lorsque le décès du militaire résulte de maladies contractées ou aggravées par suite de fatigues, dangers ou accidents survenus par le fait ou à l'occasion du service, et ce, quel que soit le pourcentage d'invalidité éventuellement reconnu à l'ouvrant droit. ". 3. En l'absence de présomption légale, le demandeur d'une pension doit rapporter la preuve de l'existence d'une relation certaine et directe de cause à effet entre les troubles qu'il invoque et un fait précis de service ou des circonstances particulières de service à l'origine de l'affection. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle. 4. Il est constant qu'à la date de son décès, M. D... ne bénéficiait d'aucune pension militaire d'invalidité. Par ailleurs, sa pathologie, découverte à la suite d'une biopsie pratiquée le 30 mars 2018 alors qu'il avait cessé ses fonctions depuis de nombreuses années, ne figure pas aux tableaux 30 et 30 bis des maladies se rapportant à l'inhalation de poussières d'amiante. Par suite, la requérante doit apporter la preuve d'un lien de causalité certain et direct entre le cancer développé par son mari et l'activité professionnelle de ce dernier au sein de la Marine nationale. 5. Mme D... se prévaut du rapport non contradictoire établi le 11 septembre 2019 par le professeur B... de l'institut " qualité risques sécurité " du centre hospitalier régional universitaire de Brest, qui conclut que l'état actuel des connaissances ne permet pas de retenir un lien de causalité entre le cancer du rectum et l'exposition à l'amiante. Par ailleurs, si certaines études scientifiques produites par la requérante tendent à montrer une relation entre une exposition prolongée à de niveaux d'amiante élevés et l'apparition de cancers " digestifs ", l'étude publiée le 12 août 2016 réalisée dans le cadre du programme de dépistage français ARDCo, souligne qu'il n'existe pas de preuves " claires " d'une association entre le cancer du rectum et l'inhalation de poussières d'amiante. Les décisions des juridictions spécialisées compétentes en matière de reconnaissance des maladies professionnelles dont se prévaut Mme D... se fondent sur ces données. Elles n'ont admis le caractère professionnel d'un cancer du rectum que pour un salarié exposé à l'amiante pendant plus de 30 ans dont les autres facteurs de risques ne sont pas connus. Or, s'il n'est pas contesté que M. D... a été soumis à une exposition forte à l'amiante en raison de ses fonctions de mécanicien naval, le certificat du médecin traitant en date du 27 juin 2018 qu'il produit indique qu'il souffrait d'insuffisances cardiaque et rénale et le compte-rendu d'hospitalisation établi à la suite d'une admission en urgence le 27 septembre 2017 pour une dyspnée sévère, mentionne une consommation d'alcool à forte dose ancienne mais un sevrage tabagique extrêmement récent, facteurs susceptibles de provoquer l'apparition de cancers. Par suite, en l'absence de données scientifiques convergentes, Mme D... ne peut être regardée comme apportant la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre le cancer dont son mari a été victime et ses activités professionnelles au sein de la marine nationale entre 1962 et 1980. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre des armées, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme D... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 30 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juillet 2023. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT03163
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 18/07/2023, 22NT01176, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 20 avril 2018 par laquelle la ministre des armées a décidé de présenter son dossier devant la commission de réforme des militaires et la décision implicite rejetant son recours administratif préalable obligatoire. Il a également demandé au tribunal d'enjoindre à la ministre de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie " liée aux évènements du 19 février 2018 ". Par une deuxième requête, M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 13 juin 2018 par lequel la ministre des armées l'a radié des contrôles d'office à compter du 20 juin 2018 pour inaptitude physique ainsi que la décision implicite rejetant son recours administratif préalable obligatoire. Par une troisième requête, M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel la ministre des armées a expressément rejeté ses recours administratifs préalables obligatoires. Par un jugement n° 1802916, 1900040, 1901587 du 24 mars 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté ces trois requêtes. Par un arrêt n° 20NT01535 du 9 novembre 2021, la cour a annulé ce jugement du tribunal administratif de Caen ainsi que la décision du 4 juin 2019 de la ministre des armées portant radiation des contrôles de M. A... pour inaptitude définitive. Par un article 2, il a été enjoint à la ministre des armées de prononcer, dans un délai d'un mois, la réintégration juridique de M. A... à la date de prise d'effet de la décision de radiation des contrôles pour inaptitude jusqu'à ce que, après une nouvelle saisine de la commission de réforme, l'autorité compétente prenne une nouvelle décision statuant sur son éventuelle inaptitude à l'exercice de toute fonction dans les armées. Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. A... a été rejeté et la somme de 1 800 euros a été mise à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Procédure en exécution devant la cour : Par une lettre, enregistrée le 10 février 2022, M. A... a présenté une demande tendant à obtenir l'exécution de l'arrêt n° 20NT01535 du 9 novembre 2021. Par une ordonnance n° 22NT01176 du 21 avril 2022, le président de la cour a ouvert une phase juridictionnelle en vue de prescrire les mesures d'exécution de l'arrêt n° 20NT01535. Par un arrêt du 23 décembre 2022, la cour a enjoint, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, au ministre des armées de rétablir M. A... dans ses droits à pension de retraite dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Par un courrier du 1er mars 2023, le président de la cour a demandé au ministre des armées de justifier sous 15 jours de la nature et de la date des mesures prises pour l'exécution de l'arrêt mentionné ci-dessus ou lui faire connaître les raisons qui pourraient en retarder l'exécution. Par un mémoire enregistré le 5 mai 2023, le ministre des armées précise que : - la somme de 1 505,40 euros a été versée à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; - le 25 novembre 2022, la direction du personnel militaire de la Marine a établi un nouvel état général des services prenant en compte la réintégration juridique de M. A... du 20 juin 2018 au 9 octobre 2018 ; - le 9 mars 2023 ce document a été transmis au service des retraites de l'Etat pour l'émission d'un nouveau titre de pension aux fins de liquidation des nouveaux droits à pension de l'intéressé, liés à sa réintégration juridique. Par un mémoire enregistré le 11 mai 2023, le ministre des armées a transmis à la cour le nouveau titre de pension émis le 11 avril 2023 régularisant M. A... dans ses droits à pension. Il considère que l'arrêt n° 22NT01176 est par suite entièrement exécuté. Par un mémoire enregistré le 22 mai 2023, M. A..., représenté par Me Maumont, soutient que : - la reconstitution de carrière opérée par le ministère ne tient pas compte de l'accident imputable au service du 19 février 2018 en méconnaissance du jugement du tribunal administratif de Caen du 24 mars 2020 (1901588) ; - la pièce communiquée par le ministre, qui ne mentionne pas cette pension au titre d'une invalidité imputable au service, est incomplète. Par un mémoire enregistré le 13 juin 2023, le ministre des armées précise que : - le jugement du 24 mars 2022 du tribunal administratif de Caen a été entièrement exécuté ; - le nouveau titre de pension " au titre de l'invalidité " procède bien à la régularisation de M. A... dans ses droits à pension. Par un mémoire enregistré le 19 juin 2023, M. A..., représenté par son conseil, maintient ses précédentes écritures. Un mémoire présenté par le ministre des armées a été enregistré le 26 juin 2023. Vu : - le code de la défense ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gélard, - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A... a intégré la Marine nationale le 10 octobre 2016 en qualité de volontaire aspirant. Son contrat d'un an, prenant fin le 9 octobre 2017, a été renouvelé une fois. A compter du 18 janvier 2018, l'intéressé a été placé en arrêt de travail. Le 20 avril 2018, la ministre des armées a saisi la commission de réforme des militaires afin qu'elle se prononce sur l'aptitude de M. A.... L'avis de cette instance a été rendu le 18 mai 2018. Par un arrêté du 13 juin 2018, la ministre des armées a radié des contrôles M. A... avec effet au 20 juin 2018. Par un arrêté du 4 juin 2019, elle a rejeté les recours administratifs préalables obligatoires présentées par l'intéressé. Par un jugement n° 1802916, 1900040, 1901587 du 24 mars 2020 le tribunal administratif de Caen a rejeté les requêtes déposées par M. A... tendant à l'annulation de ces trois " décisions ". Ce jugement a été annulé par un arrêt de la cour n° 20NT01535 en date du 9 novembre 2021. Aux termes de l'article 1er de cet arrêt, la décision du 4 juin 2019 a été annulée. Aux termes de l'article 2, il a été enjoint à la ministre des armées de prononcer, dans un délai d'un mois, la réintégration juridique de M. A... à la date de prise d'effet de la décision de radiation des contrôles pour inaptitude jusqu'à ce que, après une nouvelle saisine de la commission de réforme, l'autorité compétente prenne une nouvelle décision statuant sur son éventuelle inaptitude à l'exercice de toute fonction dans les armées. L'article 3 de l'arrêt a rejeté le surplus de la requête et l'article 4 a mis la somme de 1 800 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 2. Le 10 février 2022, M. A... a présenté une demande d'exécution de l'arrêt n° 20NT01535 du 9 novembre 2021. Par une ordonnance du 21 avril 2022, le président de la cour a ouvert la phase juridictionnelle de cette instance. 3. En premier lieu, M. A... rappelle que par un jugement n° 1900271, 1901588 du 24 mars 2020, devenu définitif, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 4 juin 2019 de la ministre des armées rejetant sa demande d'ouverture d'une déclaration d'affection présumée imputable au service (DAPIAS) et a enjoint à la ministre d'ouvrir une DAPIAS dans un délai de deux mois. Toutefois, ainsi qu'il a été jugé le 23 décembre 2022 au point 3 de l'arrêt n° 22NT01176, cette injonction ne présente pas le même objet que celle prononcée par la cour dans son arrêt n° 20NT01535 du 9 novembre 2021. Il n'appartient dès lors pas au juge de l'exécution d'en connaître dans le cadre de la présente affaire. En outre, dans le même arrêt n° 22NT01176, la cour a constaté que par une décision du 22 décembre 2021, prise au vu de l'avis de la commission de réforme du 4 février 2020, la ministre des armées avait réintégré juridiquement M. A... en position d'activité du 20 juin 2018 au 9 octobre 2018. Il a été jugé que la ministre devait être regardée comme ayant exécuté l'injonction qui lui était faite. 4. Par ailleurs, si, à la date du 22 décembre 2021, la cour a constaté que le ministre n'avait pas procédé à la reconstitution des droits à pension de retraite de M. A... pour la période du 20 juin 2018 au 9 octobre 2018, par un récent mémoire du 11 mai 2023 produisant la pièce justificative, le ministre des armées justifie de l'émission, le 11 avril 2023, par le service des retraites de l'Etat d'un titre de pension prenant en compte la réintégration juridique de M. A... pour cette période. Ce document atteste de l'exécution complète de l'article 2 de l'arrêt n° 20NT01535 du 9 novembre 2021. 5. En dernier lieu, le ministre des armées justifie du versement à M. A... de la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en exécution de l'article 4 de l'arrêt n° 20NT01535 du 9 novembre 2021. Il justifie en outre du versement de la somme de 1 500 euros, assortie des intérêts, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en exécution de l'arrêt n° 22NT01176 du 23 décembre 2022. 6. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt n° 20NT01535 de la cour du 9 novembre 2021 doit être regardé comme ayant été intégralement exécuté, les autres points évoqués par M. A... ne relevant pas de l'exécution de cet arrêt. Par suite, il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte de 30 euros par jour prononcée le 23 décembre 2022. Les conclusions à fin d'exécution présentées par M. A... sont devenues sans objet. Elles ne peuvent dès lors qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'exécution de l'arrêt n° 20NT01535 de la cour du 9 novembre 2021 présentées par M. A.... Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Une copie en sera adressée au ministère public près la Cour des comptes. Délibéré après l'audience du 30 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juillet 2023. Le rapporteur, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 22NT01176
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 18/07/2023, 21NT00998, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Par un arrêt du 15 novembre 2022, une expertise avant-dire-droit a été ordonnée afin notamment de déterminer l'origine des problèmes hépatiques actuels de M. A... et ses possibles relations tant avec l'hépatite virale qu'il a contractée en 1970 qu'avec le mélanome qu'il a développé au niveau de la cuisse en 2013. Le rapport d'expertise déposé le 7 mars 2023 a été communiqué aux parties qui ont été invitées à produire leurs observations. Par un mémoire enregistré le 26 avril 2023, M. A..., représenté par Me Fleck, sollicite un complément d'expertise auprès d'un dermatologue ou d'un oncologue. Par des mémoires enregistrés les 26 et 28 avril 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que le complément d'expertise sollicité par M. A... ne présente pas d'utilité ; que les lésions hépatiques qu'il présente sont sans relation avec son hépatite virale ancienne et son mélanome, de sorte que le taux d'invalidité résultant de l'infirmité " séquelles de mélanome stade III de la cuisse gauche " ne peut ouvrir droit à un pension militaire d'invalidité. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juillet 2021. Vu les autres pièces du dossier et notamment l'ordonnance du 10 juillet 2023 par laquelle le président de la cour a procédé à la taxation des frais d'expertise. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gélard, - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né en 1948, s'est engagé dans l'armée de terre à compter du 1er octobre 1967. Il a poursuivi sa carrière militaire jusqu'en 1988. En 1981, une pension militaire d'invalidité au taux de 20 % lui a été concédée au titre des séquelles qu'il a conservées d'une hépatite virale contractée au Tchad en 1970. Par ailleurs, en 2013, il a été opéré d'un mélanome à la cuisse gauche, qui a nécessité un curage ganglionnaire au mois de janvier 2014 et un traitement médicamenteux pendant deux ans. Le 7 septembre 2016, l'intéressé a sollicité le renouvellement de sa pension au titre de l'hépatite et l'attribution d'une nouvelle pension militaire d'invalidité au titre du mélanome. Par une décision du 26 septembre 2018, ses demandes ont été rejetées. M. A... a relevé appel du jugement du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision en tant qu'il concerne ses problèmes hépatiques et son mélanome. Par un arrêt du 15 novembre 2022, une expertise avant-dire-droit a été ordonnée afin notamment de déterminer l'origine des problèmes hépatiques actuels de M. A... et ses possibles relations tant avec l'hépatite virale qu'il a contractée en 1970 qu'avec le mélanome qu'il a développé au niveau de la cuisse en 2013. Le rapport d'expertise déposé le 7 mars 2023 a été communiqué aux parties qui ont été invitées à produire leurs observations. Sur les pathologies en litige : 2. M. A... soutient qu'il conserve des troubles et un nodule au niveau hépatique et que cette pathologie implique le renouvellement de sa pension militaire d'invalidité. Il ressort de l'expertise médicale réalisée le 26 mars 2018, confirmée par le médecin chef chargé des pensions militaires d'invalidité le 23 mai 2018, que sa biologie hépatique est normale, que les sérologies anciennes vont dans le sens d'une guérison et que les anticorps anti-HBc n'évoquent pas un portage chronique mais plutôt une guérison ou une vaccination récente. Le premier expert indique cependant que les lésions rapportées sur l'imagerie hépatique ne lui paraissent " pas forcément avoir un lien évident avec l'hépatite virale " mais évoque cependant une possible relation avec le mélanome qu'il présente par ailleurs. Il précise que cette tumeur a été traitée notamment par interféron. L'expert militaire estime pour sa part que les troubles hépatiques de M. A... sont d'origine vasculaire et ne sont pas en relation avec le mélanome découvert en 2013. 3. S'agissant du mélanome, M. A..., qui ne bénéficie pas de la présomption d'imputabilité pour cette nouvelle pathologie, présente une cicatrice importante, des douleurs et des raideurs au niveau de la jambe qui l'empêchent de rester debout de façon prolongée. Il ressort des pièces du dossier qu'il a été affecté durant ses années de service soit en Afrique, soit au Moyen-Orient, et qu'à l'époque il portait en service un short relativement court. Les experts reconnaissent que son mélanome se situe au-dessous de la ligne de short. Lors de l'examen du 26 mars 2018, l'expert a confirmé ces troubles impliquant notamment la nécessité pour l'intéressé de porter en permanence des contentions ainsi que l'accroissement d'un nodule hépatique. Il a estimé " probable " le lien entre cette pathologie et l'exposition prolongée au soleil en l'absence de protection de M. A... et évalué le taux de cette pathologie à 30 %. Le médecin chef chargé des pensions militaires d'invalidité évalue en revanche le taux d'invalidité de cette pathologie à moins de 10 % et écarte, ainsi qu'il a été dit, tout lien entre le nodule hépatique que présente M. A... et son mélanome. 4. Compte tenu du lien possible entre ces deux pathologies et des divergences de conclusions de ces deux experts, tant sur l'origine que sur le taux retenu, une expertise médicale a été ordonnée avant dire droit. Par un rapport du 7 mars 2023, le professeur émérite d'hépato-gastroentérologie à la faculté de médecine de Rennes désigné en qualité d'expert, après avoir examiné M. A... ainsi que son dossier médical, a conclu que l'intéressé ne présente aujourd'hui aucun stigmate hépatique, que l'hépatite virale A qu'il a contractée en 1970 est totalement guérie et que le mélanome opéré en 2013-2014 est considéré comme en rémission. Il précise que les quelques symptômes hépatiques qu'il présente, fréquents et bénins, sont sans lien avec l'hépatite A et la tumeur cutanée. En l'absence d'autres éléments médicaux suffisamment probants, les pathologies invoquées ci-dessus ne sont, par suite, pas de nature à justifier l'attribution d'une pension militaire d'invalidité. 5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner à nouveau un complément d'expertise, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2018 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité au titre des " séquelles d'hépatite virale " et " séquelles de mélanome stade III de la cuisse gauche, œdème chronique et cicatrice ". Sur les frais d'expertise : 6. Les frais de l'expertise ordonnée avant dire droit par la cour par son arrêt du 15 novembre 2022, taxés et liquidés par l'ordonnance du président de la cour en date du 12 juillet 2023, sont mis à la charge de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale dont M. A... est bénéficiaire. DÉCIDE : Article 1er : La requête présentée par M. A... est rejetée. Article 2 : Les frais et honoraires d'expertise liquidés à la somme de 810 euros sont mis à la charge de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 30 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juillet 2023. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT00998
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 7ème chambre, 20/07/2023, 465594, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires de Bordeaux d'annuler la décision du 3 juillet 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté la demande de révision de sa pension présentée au motif de l'aggravation de ses infirmités et de la prise en compte de trois nouvelles infirmités. Par un jugement n° 1700030 du 6 juin 2019, le tribunal des pensions militaires de Bordeaux a, en premier lieu, annulé la décision du 3 juillet 2017 de la ministre des armées en tant qu'elle a refusé la révision de la pension de M. A... pour une " névralgie sciatique dans le territoire du L5 droit ", une " impuissance érectile totale ", un " reflux gastro-oesophagien " et une " névralgie cervico-brachiale sur une hernie cervicale C6-C7 ", en deuxième lieu, reconnu le droit de l'intéressé à la majoration prévue au deuxième alinéa de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en troisième lieu, rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par un arrêt n° 19BX04045 du 13 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur l'appel de la ministre des armées, d'une part, annulé ce jugement en tant qu'il a reconnu comme indemnisables les infirmités " impuissance érectile totale " et " névralgie cervico-brachiale sur hernie cervicale C6-C7 ", d'autre part, rejeté la demande présentée par M. A... devant le tribunal des pensions militaires de Bordeaux en ce qu'elle concerne ces infirmités ainsi que le surplus des conclusions des parties. Par un arrêt n° 21BX02813 du 5 mai 2022, la cour administrative d'appel de Bordeaux, saisie par M. A... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, a enjoint à la ministre des armées d'octroyer à M. A..., à titre définitif, l'allocation prévue au 2ème alinéa de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification de cet arrêt, aux versements correspondants, et a assorti cette injonction d'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai. Procédure devant le Conseil d'Etat Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juillet et 5 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des armées demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler l'arrêt du 5 mai 2022 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions de M. A... tendant à l'exécution de l'arrêt du 13 juillet 2021. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Didier Ribes, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., blessé par balle le 8 avril 1984 alors qu'il effectuait son service militaire, s'est vu concéder par arrêté du 4 novembre 2013 une pension militaire d'invalidité définitive au taux de 95 %. Le 19 mars 2015, il a sollicité, d'une part, la révision de sa pension pour aggravation des infirmités pensionnées et prise en compte de nouvelles infirmités, d'autre part, le bénéfice de l'allocation pour tierce personne prévue à l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par une décision du 3 juillet 2017, la ministre des armées a rejeté l'ensemble de ces demandes. Par un jugement du 6 juin 2019, le tribunal des pensions militaires de Bordeaux a notamment reconnu le droit de M. A... à bénéficier de l'allocation pour tierce personne. Par un arrêt du 13 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a notamment confirmé le jugement sur ce point. Par un arrêt du 5 mai 2022, cette même cour, saisie par M. A... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, a enjoint à la ministre des armées de lui octroyer, à titre définitif, l'allocation pour tierce personne et de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification de cet arrêt, aux versements correspondants, et a assorti cette injonction d'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai. Eu égard aux moyens qu'il invoque, le pourvoi du ministre des armées doit être regardé comme dirigé contre cet arrêt en tant seulement qu'il lui a enjoint de verser à M. A... une allocation pour tierce personne pour la période postérieure au 18 mars 2018. 2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ". 3. En principe, il n'appartient pas au juge saisi d'une demande tendant à l'exécution d'une décision juridictionnelle, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, de l'interpréter. Toutefois, si cette décision est entachée d'une obscurité ou d'une ambiguïté qui, en rendant impossible la détermination de l'étendue des obligations qui incombent aux parties du fait de cette décision, font obstacle à son exécution, il lui revient alors de l'interpréter dans la mesure nécessaire pour en définir les mesures d'exécution. 4. Aux termes de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa version applicable au litige : " Les invalides que leurs infirmités rendent incapables de se mouvoir, de se conduire ou d'accomplir les actes essentiels de la vie ont droit à l'hospitalisation, s'ils la réclament. En ce cas, les frais de cette hospitalisation sont prélevés sur la pension qui leur est concédée. / S'ils ne reçoivent pas ou s'ils cessent de recevoir cette hospitalisation et si, vivant chez eux, ils sont obligés de recourir d'une manière constante aux soins d'une tierce personne, ils ont droit, à titre d'allocation spéciale, à une majoration égale au quart de la pension (...) ". Aux termes de l'article R. 19-1 du même code, alors en vigueur : " Le droit à l'hospitalisation ou à la majoration de pension prévu à l'article L. 18 est constaté par le service désigné par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre au moment où il est statué sur le degré d'invalidité dont l'intéressé est atteint. / Il est révisable tous les trois ans, après examens médicaux, même lorsque la pension ne présente pas ou ne présente plus le caractère temporaire, si l'incapacité à se mouvoir, à se conduire ou à accomplir les actes essentiels à la vie n'a pas été reconnue définitive ". 5. Il ressort des énonciations de l'arrêt du 13 juillet 2021 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, dont l'exécution était demandée, que la cour a jugé que M. A... devait être regardé comme étant obligé de recourir d'une manière constante aux soins d'une tierce personne et était, par suite, fondé à demander le bénéfice de l'allocation pour tierce personne mentionnée au deuxième alinéa de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il ne résulte pas des motifs de cet arrêt que la cour aurait reconnu le caractère définitif de l'incapacité de M. A... à se mouvoir, à se conduire ou à accomplir les actes essentiels de la vie, lequel ne saurait, eu égard aux dispositions du second alinéa de l'article R. 19-1 citées au point 4, se déduire du caractère définitif de la pension militaire d'invalidité accordée à M. A.... Il suit de là que la cour devait être regardée comme ayant prescrit, par son arrêt du 13 juillet 2021, l'attribution à M. A... d'une allocation pour tierce personne à compter du 19 mars 2015, date à laquelle il a sollicité la révision de sa pension, révisable au terme d'un délai de trois ans dans les conditions fixées par l'article R. 19-1. Par suite, le ministre des armées est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit en jugeant que l'exécution de son arrêt du 13 juillet 2021 impliquait l'octroi à M. A..., à titre définitif, de l'allocation pour tierce personne. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, le ministre des armées est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 5 mai 2022 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il lui a enjoint de verser à M. A... une allocation pour tierce personne pour la période postérieure au 18 mars 2018. 6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative. 7. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que, par son arrêt du 13 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a ordonné le versement à M. A... d'une allocation pour tierce personne à compter du 19 mars 2015, révisable au terme d'un délai de trois ans, et non à titre définitif. Par suite, la demande de M. A... tendant au versement de cette allocation pour la période postérieure au 18 mars 2018, qui soulève un litige distinct de celui qui a fait l'objet de l'arrêt du 13 juillet 2021, ne peut qu'être rejetée. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 5 mai 2022 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé en tant qu'il a enjoint au ministre des armées de verser à M. A... une allocation pour tierce personne pour la période postérieure au 18 mars 2018. Article 2 : Les conclusions de M. A... tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre des armées de lui verser une allocation pour tierce personne pour la période postérieure au 18 mars 2018 en exécution de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 13 juillet 2021 sont rejetées. Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre des armées et à M. B... A....ECLI:FR:CECHS:2023:465594.20230720
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 9ème chambre, 31/07/2023, 468914, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, d'annuler la décision du 1er décembre 2017 du ministre de l'éducation nationale prise sur sa demande d'allocation temporaire d'invalidité et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité globale de 520 031,11 euros à titre principal et de 434 271 euros à titre subsidiaire en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi. Par un jugement nos 1801068, 1901070 du 24 juin 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande. Par une ordonnance n° 21BX03434 du 8 novembre 2022, enregistrée le 15 du même mois au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi et la requête, enregistrés au greffe de cette cour le 18 août 2021, formé par M. A... contre ce jugement. Par ce pourvoi et cette requête ainsi que par un mémoire complémentaire enregistré le 6 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ; La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. A... ;Considérant ce qui suit : Sur la requête dirigée contre le jugement attaqué en tant qu'il statue sur la demande n° 1901070 : 1. Il ressort des pièces du dossier que, sous le numéro 1901070, M. A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner l'Etat à lui verser une indemnité globale de 520 031,11 euros, à titre principal, et de 434 271 euros, à titre subsidiaire, en réparation de préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux qu'il imputait à ses conditions de travail, à l'absence de suivi médical au travail, à l'absence de proposition de reclassement et à des faits de discrimination en raison de son état de santé. De telles demandes ne relèvent d'aucune des catégories de litiges sur lesquelles le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort en application de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Par suite, le recours de M. A..., en tant qu'il est dirigé contre le jugement attaqué en tant que ce dernier statue sur la demande n° 1901070, a le caractère d'un appel qui ne ressortit pas à la compétence du Conseil d'Etat, juge de cassation, mais à celle de la cour administrative d'appel de Bordeaux. Il y a lieu dans cette mesure d'en attribuer le jugement à cette cour. Sur le pourvoi dirigé contre le jugement attaqué en tant qu'il statue sur la demande n° 1801068 : 2. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ". 3. Pour demander l'annulation du jugement qu'il attaque, M. A... soutient que le tribunal administratif de La Réunion l'a insuffisamment motivé et a commis une erreur de droit en rejetant sa demande d'allocation temporaire d'invalidité sans rechercher si la maladie dont il souffrait était au nombre des malades d'origine professionnelle qui figurent dans les tableaux mentionnés à l'article L. 461-2 du code de la sécurité sociale. 4. Ces moyens sont de nature à permettre l'admission du pourvoi dirigé contre le jugement attaqué en tant qu'il statue sur la demande n° 1801068. D E C I D E : -------------- Article 1er: Le jugement des conclusions de la requête de M. A... qui sont dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il rejette ses demandes indemnitaires présentées au tribunal administratif de La Réunion sous le numéro 1901070 est attribué à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 2 : Le pourvoi de M. A... dirigé contre le jugement attaqué en tant qu'il statue sur la demande n° 1801068 est admis. Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A.... Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Délibéré à l'issue de la séance du 6 juillet 2023 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur. Rendu le 31 juillet 2023. La présidente : Signé : Mme Anne Egerszegi Le rapporteur : Signé : M. Lionel Ferreira La secrétaire : Signé : Mme Katia Nunes La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :ECLI:FR:CECHS:2023:468914.20230731
Conseil d'Etat
CAA de PARIS, 5ème chambre, 30/06/2023, 22PA02753, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation des décisions du 13 juillet 2020 par lesquelles la maire de Paris a rejeté sa demande de reconnaissance des maladies professionnelles inscrites aux tableaux n° 42, n° 97 et n° 98, ensemble les décisions implicites de rejet nées du silence gardé par la Ville de Paris sur ses recours gracieux du 16 septembre 2020. Par un jugement n° 2019978, n° 2020202 et n° 2020353 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Paris, ayant joint les requêtes, a annulé les décisions du 13 juillet 2020 de la maire de Paris, a enjoint à la Ville de Paris de procéder au réexamen des demandes de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de la Ville de Paris le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les surplus des conclusions des requêtes. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 14 juin 2022, la Ville de Paris, représentée par la SELARL Bazin et associés, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2019978, n° 2020202 et n° 2020353 du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Paris ; 2°) de rejeter les demandes de M. B... devant le tribunal administratif ; 3°) de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a estimé que les décisions étaient entachées d'un vice de procédure tiré de l'absence d'un médecin spécialiste au sein de la commission de réforme ; - aucun des autres moyens soulevés en première instance par M. B... n'est fondé. Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2023, M. B..., représenté par la société civile professionnelle (SCP) d'avocats Cherrier Bodineau, demande à la Cour : 1°) de confirmer le jugement n° 2019978, n° 2020202 et n° 2020353 du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Paris ; 2°) d'enjoindre à l'administration de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ; 3°) de mettre à la charge de la Ville de Paris le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - les décisions sont entachées d'un vice de procédure eu égard à la composition de la commission de réforme où étaient absents un médecin spécialiste et un des deux représentants du personnel ; - les décisions sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que, à titre principal, il remplit les conditions prévues aux tableaux n° 42, 97 et 98 des maladies professionnelles et, à titre subsidiaire, que les pathologies sont liées à l'exercice de ses fonctions et entraînent une incapacité permanente prévisible d'au moins 25 % ; - la décision refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la surdité est entachée d'une erreur de droit tirée de la méconnaissance par la commission de réforme de l'étendue de sa compétence, dans la mesure où il lui appartenait de se prononcer sur l'existence d'un lien direct entre les maladies et les fonctions exercées dès lors qu'elle a estimé qu'il ne remplissait pas les conditions posées par les tableaux. Par une lettre du 30 mai 2023, la cour a informé les parties, qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de de la méconnaissance du champ d'application de la loi, en raison de l'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires à un fonctionnaire dont la pathologie a été diagnostiquée et les droits en matière d'imputabilité au service constitués avant le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019, en vigueur depuis le 12 avril 2019. Par un mémoire enregistré le 2 juin 2023, la Ville de Paris a présenté ses observations sur le moyen d'ordre public. Par des mémoires enregistrés les 5 et 6 juin 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B... a présenté ses observations sur le moyen d'ordre public. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - l'ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique, - et les observations de Me de Soto, pour la ville de Paris. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., éboueur principal de première classe, qui exerce les fonctions d'agent de la propreté et de conducteur d'engins à la direction de la propreté et de l'eau de la ville de Paris depuis le 20 juillet 1987, a été titularisé dans ces fonctions le 24 juillet 1988. Il a souffert successivement d'une hypoacousie bilatérale de perception déclarée le 20 février 2015, puis d'une lombosciatalgie bilatérale déclarée le 23 juin 2017, pathologies pour lesquelles il a sollicité la reconnaissance de leur caractère professionnel. Saisie dans le cadre de ces demandes, la commission de réforme, réunie en séance le 24 juin 2020, a émis des avis défavorables au motif que M. B... ne remplissait pas les critères prévus respectivement aux tableaux n° 42, n° 97 et n° 98. Par trois décisions du 13 juillet 2020, la maire de Paris a rejeté les demandes de reconnaissance de maladie professionnelle de M. B.... Par un jugement n° 2019978, n° 2020202 et n° 2020353 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions, ensemble les décisions implicites de rejet nées du silence gardé sur ses recours gracieux en date du 16 septembre 2020, a enjoint à l'administration de procéder au réexamen de la demande de M. B... dans un délai de deux mois et a mis à la charge de la Ville de Paris le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. La Ville de Paris relève appel de ce jugement. Sur les conclusions à fin d'annulation : Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal : 2. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme prévue par l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 susvisé : / 1. Donne son avis, dans les conditions fixées par le titre II du présent arrêté, sur la mise à la retraite pour invalidité des agents affiliés à la Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales ; / 2. Exerce, à l'égard des agents des collectivités locales relevant de la loi du 26 janvier 1984 susvisée et des agents des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, les attributions prévues respectivement à l'article 57 et aux articles 41 et 41-1 desdites lois ; / 3. Intervient, dans les conditions fixées par le décret du 11 janvier 1960 susvisé, pour apprécier l'invalidité temporaire des agents relevant du régime de sécurité sociale prévu par ce décret ; / 4. Intervient dans l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article L. 417-8 du code des communes, au III de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et à l'article 80 de la loi du 9 janvier 1986 susvisés ; / 5. Est consultée chaque fois que des dispositions législatives et réglementaires le prévoient expressément ". Aux termes de l'article 3 du même arrêté : " Le président de la commission de réforme est désigné par le préfet qui peut choisir soit un fonctionnaire placé sous son autorité, soit une personnalité qualifiée qu'il désigne en raison de ses compétences, soit un membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme. Dans ce cas, un président suppléant, n'appartenant pas à la même collectivité, est désigné pour le cas où serait examinée la situation d'un fonctionnaire appartenant à la collectivité dont est issu le président. Le président dirige les délibérations mais ne participe pas au vote. / Cette commission comprend : / 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ; / 2. Deux représentants de l'administration ; / 3. Deux représentants du personnel. / Chaque titulaire a deux suppléants désignés dans les conditions prévues aux articles 5 et 6 ci-dessous ". Aux termes de l'article 17 : " La commission ne peut délibérer valablement que si au moins quatre de ses membres ayant voix délibérative assistent à la séance (...) ". Enfin, aux termes de l'article 26 de cet arrêté : " Les dispositions des titres Ier, II et III du présent arrêté sont applicables aux personnels des administrations parisiennes sous réserve des dispositions dérogatoires du présent titre ". Il résulte de ces dispositions que, dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 3. Il ressort des pièces du dossier que si, lors de sa séance du 24 juin 2020, la commission de réforme ne s'est pas adjoint de médecins spécialisés dans les pathologies déclarées par M. B..., elle disposait de nombreuses informations sur l'état de santé de celui-ci, notamment, s'agissant de l'hypoacousie bilatérale de perception irréversible, d'un rapport médico-légal d'examen ORL d'un médecin ORL agréé, de plusieurs certificats médicaux et des avis motivés du médecin de la médecine professionnelle et préventive et, s'agissant de la lombosciatalgie bilatérale, de certificats de rhumatologues agréés, de certificats médicaux, de plusieurs IRM et des avis motivés du médecin de la médecine professionnelle et préventive. Dans ces conditions, l'absence au sein de la commission de réforme de médecins spécialisés dans les maladies déclarées par M. B... n'a pas été de nature à priver l'intéressé d'une garantie et ainsi susceptible d'entacher la procédure suivie devant la commission de réforme d'irrégularité. Par suite, la Ville de Paris est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler ses décisions du 13 juillet 2020. 4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission de réforme pour annuler les décisions de la maire de Paris. 5. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif. En ce qui concerne la base légale de la décision contestée : 6. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite (...) ". Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 7. D'autre part, aux termes du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires issu de l'ordonnance du 19 juillet 2017, créé par l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, et abrogé par l'ordonnance du 24 novembre 2021 portant partie législative du code général de la fonction publique : " Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. (...) ". 8. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019. 9. Enfin, les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 10. Pour rejeter les demandes de M. B..., la maire de Paris s'est fondé sur ce que les critères définis aux tableaux n° 42, n° 97 et n° 98 n'étaient pas remplis. Si les décisions attaquées ne sont pas motivées en droit, il ressort des pièces du dossier que la maire de Paris a ce faisant appliqué les dispositions du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, ainsi que M. B... l'a soutenu devant les premiers juges sans être contredit en défense et que la Ville de Paris l'indique expressément dans sa requête devant la Cour. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les maladies qui ont justifiées les demandes de M. B... ont été diagnostiquées au plus tard le 20 février 2015 pour l'hypoacousie bilatérale de perception irréversible et le 23 juin 2017 pour la lombosciatalgie, soit avant l'entrée en vigueur, le 12 avril 2019, du décret du 10 avril 2019. Par suite, ses demandes étaient entièrement régies par les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 énoncées au point 6 du présent arrêt. En conséquence, en faisant application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la maire de Paris a méconnu le champ d'application de la loi. En tout état de cause, à supposer même que la ville de Paris ait entendu appliquer les dispositions citées au point 5 de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ce que l'absence de motivation en droit des décisions attaquées ne permet pas de confirmer, elle aurait, ce faisant, commis une erreur de droit, ainsi que le soutient M. B..., dès lors qu'aucune disposition ne rend applicables aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale, qui demandent le bénéfice des dispositions combinées du 2° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau, et qu'elle ne pouvait dès lors pas légalement se fonder, pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service des pathologies dont M. B... est atteint, sur la seule circonstance que les critères fixés par les tableaux n° 42, n° 97 et n° 98 des maladies professionnelles n'étaient pas réunis. 11. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. 12. Il ressort des pièces du dossier que, dans ses décisions du 13 juillet 2020, la Ville de Paris s'est exclusivement fondée, pour rejeter les demandes d'imputabilité au service des pathologies déclarées par M. B..., sur les avis de la commission de réforme qui s'est bornée à constater l'absence de réunion des critères fixés par le tableau n° 42, n° 97 et n° 98 des maladies professionnelles. Ainsi, d'une part, l'autorité administrative, qui n'a pas recherché l'existence d'un lien entre la maladie et le service a, en l'espèce, fait usage d'un pouvoir d'appréciation différent de celui dont elle disposait sur le fondement de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. D'autre part, dès lors que la commission de réforme ne s'est pas non plus prononcée sur ce lien, M. B... a été privé d'une garantie. Dès lors, il n'y a pas lieu de procéder à une substitution de base légale. 13. Par suite, la Ville de Paris n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions litigieuses. Sur les conclusions à fin d'injonction : 14. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. (...) ". 15. Par des conclusions incidentes, M. B... demande à la cour d'ordonner à la Ville de Paris une nouvelle décision sur ses demandes, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Toutefois, par le jugement attaqué, le tribunal a déjà ordonné cette mesure. Dès lors, il n'y a pas lieu de renouveler une telle injonction. Sur les frais relatifs à l'instance : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la Ville de Paris la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. 17. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la Ville de Paris, par application des mêmes dispositions, à verser à M. B... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. DECIDE : Article 1er : La requête de la Ville de Paris est rejetée. Article 2 : La Ville de Paris versera une somme de 1 500 euros à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B... sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Ville de Paris et à M. A... B.... Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Vinot, présidente de chambre, Mme Cécile Vrignon-Villalba, présidente assesseure, M. Perroy, premier conseiller, Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2023. La rapporteure, C. C... La présidente, H. VINOTLa greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22PA0275302
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 04/07/2023, 21TL02878, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier : 1°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 104 488,60 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité pour faute ; 2°) à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 75 600 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité sans faute ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1903828 du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à verser à Mme A... la somme de 47 000 euros, sous déduction de la provision d'un montant de 47 000 euros accordée par le juge des référés de ce tribunal sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative par ordonnance n°1903768 du 9 septembre 2019, ainsi que la somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2021 sous le n° 21MA02878 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL02878, Mme C... A..., représentée par Me Betrom, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 10 juin 2021 ; 2°) à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 104 488,60 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité pour faute, à titre subsidiaire de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 600 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité sans faute ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée en ce qu'il a méconnu son obligation de protection de la santé de son agent posée par l'article 23 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 et par l'article 2-1 du décret n°85-603 du 10 juin 1985 et en ce qu'elle a subi des faits graves de harcèlement moral, en méconnaissance de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ; - elle est fondée à solliciter, sur le fondement de la responsabilité pour faute, le versement d'une somme de 28 888,60 euros en réparation de son préjudice financier en raison de la perte du bénéfice de ses primes depuis la date de son placement en congé de maladie, ainsi qu'une somme de 60 600 euros en réparation du préjudice correspondant au taux d'incapacité permanente partielle de 30 % qui lui a été reconnu et une somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral ; - à titre subsidiaire, la responsabilité sans faute de l'Etat est engagée : elle est fondée à solliciter le versement d'une somme de 60 600 euros en réparation de ses préjudices extra-patrimoniaux résultant de l'incapacité permanente partielle dont elle reste atteinte. Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2022, la rectrice de région académique Occitanie conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que : - aucune faute ne peut être reprochée à l'Etat sur le fondement du décret n°85-603 du 10 juin 1985 qui est inapplicable aux agents de la fonction publique d'Etat ; l'existence d'une faute relative au manquement à l'obligation de garantir la santé et la sécurité de l'agent n'est pas démontrée ; - aucune faute ne peut davantage être reprochée à l'Etat s'agissant du harcèlement dont la requérante soutient avoir été victime, en l'absence d'éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement ; - la requérante a commis une faute de nature à exonérer l'Etat de toute responsabilité en ce que les problèmes professionnels rencontrés de manière continue de 2006 à 2019 au sein de différents services et qui sont à l'origine des troubles psychiatriques dont elle souffre, résultent de son seul fait ; elle n'a par ailleurs pas alerté sa hiérarchie des difficultés rencontrées en temps utile et a refusé toutes les aides qui lui ont été proposées ; aucune indemnisation ne peut dès lors lui être allouée. Par ordonnance du 14 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 novembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., ingénieure de recherche de deuxième classe en informatique, a été affectée dans l'académie de Montpellier à compter de janvier 2013 dans le cadre d'une convention de mise à disposition signée avec l'académie de Versailles, sa précédente affectation. A compter du 1er juillet 2013, elle a été définitivement affectée dans l'académie de Montpellier sur un poste ministériel délégué au sein des services du rectorat. Elle a été placée en congé de longue durée à compter du 29 mars 2016 jusqu'au 30 novembre 2019. Par une décision du 21 mai 2019, la rectrice de l'académie de Montpellier a reconnu que la pathologie dont souffre Mme A... est imputable au service à compter du 29 mars 2016, et qu'elle est atteinte d'une incapacité permanente partielle au taux de 30 %. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier, à titre principal, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 104 488,60 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité pour faute et, à titre subsidiaire, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 75 600 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité sans faute. Par un jugement du 10 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à verser à Mme A... la somme de 47 000 euros, sous déduction de la provision du même montant versée en application de l'ordonnance du juge des référés du 9 septembre 2019. Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a limité l'indemnisation qui lui a été accordée à la somme de 47 000 euros, et demande de porter l'indemnisation qui lui est due à la somme de 104 488,60 euros sur le fondement de la responsabilité pour faute et, à titre subsidiaire à la somme de 60 600 euros sur le fondement de la responsabilité sans faute. Sur la responsabilité : 2. D'une part, les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci. 3. D'autre part, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version alors en vigueur : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) ". Aux termes de l'article 23 de la même loi : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail. ". Aux termes de l'article 2-1 du décret n°82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité ". 4. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. 5. Mme A... soutient que la pathologie psychiatrique dont elle souffre est directement imputable à des fautes commises par son employeur en raison, d'une part, de manquements à l'obligation de garantir la santé et la sécurité au travail et, d'autre part, de faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime au sein de l'académie de Montpellier. 6. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de difficultés rencontrées au sein de l'académie de Versailles, Mme A... a été affectée à compter du 1er janvier 2013 sur un poste ministériel délégué au sein du rectorat de Montpellier, d'abord par le biais d'une convention de mise à disposition pendant une durée de six mois. Jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité définitive le 1er décembre 2019, Mme A... a effectué 80 % de ses missions pour le compte du ministère et 20 % pour celui de l'académie. Elle a ainsi exercé ses fonctions sous l'autorité hiérarchique de la directrice académique ..., Mme B..., et du chef de bureau d'exploitation du ministère, ..., M. D..., qui était son directeur fonctionnel. 7. Mme A... se plaint d'une importante charge de travail qui aurait participé à la dégradation de son état de santé. Elle soutient ainsi que, contrairement aux préconisations du ministère à la direction académique ..., les missions inscrites dans sa fiche de poste ont été doublées et qu'elle s'est vu attribuer plusieurs fonctions supplémentaires concernant notamment l'application des tableaux de bord des équipes nationales, l'organisation de toutes les réunions du centre national des services et la mise en place de l'annuaire du centre national des services. Toutefois, les échanges de courriels produits ne permettent pas d'établir que les fonctions qui lui ont été attribuées ne correspondaient pas à son grade d'ingénieur de recherche de deuxième classe, ou qu'une charge de travail disproportionnée lui aurait été attribuée. Par ailleurs, si Mme A... soutient que des missions supplémentaires lui ont été assignées ainsi qu'il ressort de sa nouvelle fiche de poste par comparaison avec celles décrites dans sa fiche de poste initiale, elle n'établit pas la réalité de ses allégations en produisant la fiche de poste en date du 18 avril 2008 relative à ses anciennes fonctions de chef de projet informatique lorsqu'elle travaillait à Paris qui a été publiée pour pourvoir à son remplacement durant son congé de longue durée. Si Mme A... soutient ensuite que les missions qui lui ont été assignées n'entraient pas dans son domaine de compétence, le courriel émanant de l'adjoint de la directrice de la direction académique ... se borne à émettre des simples propositions de missions pour la première période de six mois de mise à disposition de l'intéressée au sein des services du rectorat, alors qu'il n'est pas établi que ces attributions ne correspondaient pas au grade détenu par l'intéressée. Elle produit également un courriel du 19 février 2013 du ... indiquant à la directrice académique ... que, dans le cadre de la mission de Mme A... portant à 90 % sur l'accompagnement de la direction des ... dans la mise en place du catalogue de services académiques : " C... doit rester en appui de tes équipes et ne pas endosser de responsabilités locales qui, de surcroît, dépassent ses compétences, comme par exemple l'étude comparative de différentes suites ITIL répondant aux attentes de ta DSL. ". S'il ressort de ce courriel que Mme A... a pu être initialement chargée de certaines tâches excédant son domaine de compétence quant à la partie locale de ses fonctions, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'une telle situation se soit présentée à nouveau depuis l'envoi de ce courriel. Dès lors, aucun élément susceptible de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral au titre de la charge de travail disproportionnée qui aurait été attribuée à Mme A... ne peut dès lors être retenu. 8. Si Mme A... soutient qu'elle effectuait régulièrement jusqu'à six déplacements professionnels par semaine dans des villes très éloignées, elle se borne à produire un planning pour les seuls mois de septembre et d'octobre 2014 couvrant ainsi une courte période. En tout état de cause, la rectrice fait valoir sans être sérieusement contestée que ces déplacements étaient rendus nécessaires par le fait que l'intéressée exerçait des missions à la fois ministérielles et académiques, ajoutant que Mme A... sollicitait elle-même régulièrement de pouvoir se déplacer à destination de Paris où résidait sa fille. 9. La requérante soutient ensuite que les heures supplémentaires qu'elle a effectuées n'ont pas été indemnisées et que certains de ses frais de déplacement ne lui ont pas été remboursés. Il résulte toutefois de l'instruction que l'administration lui a refusé la récupération d'horaires variables et d'heures supplémentaires en se fondant sur les règles posées par la note académique du 12 novembre 2012 relative aux horaires et congés annuels applicables dans les services du rectorat, sans traiter la situation de l'intéressée de manière différente à celle des autres agents. Par ailleurs, la rectrice de l'académie de Montpellier fait valoir sans être contredite que les remboursements des frais de déplacement évoqués par Mme A... dans ses écritures n'ont pu être effectués dès lors, d'une part, qu'aucun ordre de mission concernant la facture d'hôtel pour la nuit du 13 au 14 mai 2014 n'a été produit et, d'autre part, qu'aucune facture d'hébergement concernant la mission du 19 janvier 2015 au 23 janvier 2015 n'a été fournie à l'administration. 10. Mme A... soutient enfin qu'elle a signalé à sa direction dès le mois de juin 2015 qu'en raison de sa charge de travail, son état de santé se dégradait au point qu'elle a été conduite à l'hôpital par les pompiers en raison d'un malaise le 30 juin 2015 et qu'elle envisageait à nouveau de faire une tentative de suicide. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 7, il ne résulte pas de l'instruction que la charge de travail affectée à la requérante aurait été disproportionnée. Les pièces produites au dossier par la rectrice de l'académie de Montpellier démontrent au contraire que ses supérieurs hiérarchiques ont pris en compte la situation de détresse dans laquelle se trouvait la requérante, en contactant régulièrement l'intéressée ainsi que le médecin de prévention, et ont alerté leur propre hiérarchie. Ils ont par ailleurs indiqué avoir été particulièrement vigilants concernant l'équilibre entre missions nationales et académiques confiées à l'intéressée et avoir pris de nouvelles mesures quant à la limitation de ses déplacements. En outre, les conditions de travail de Mme A... ont fait l'objet de différentes adaptations en tenant compte de sa situation particulière, dès lors qu'elle n'encadrait aucun agent, qu'aucune date stricte de fin de réalisation d'objectif ne lui a été imposée, qu'elle a été autorisée, à titre exceptionnel, à commencer son service à 9h15 en lieu et place de 9h comme imposé à l'ensemble des autres agents et qu'elle a été ponctuellement autorisée à télétravailler alors que cette pratique n'était, à ce moment-là, pas répandue. 11. Il résulte de tout ce qui précède qu'aucun manquement à l'obligation de garantir la santé et la sécurité au travail de Mme A... ne peut être retenu et qu'aucun agissement de harcèlement moral subi par la requérante n'est davantage caractérisé en l'espèce. La requérante n'est dès lors pas fondée à invoquer une faute de l'Etat commise à son encontre, qui serait à l'origine de la pathologie dont elle souffre. 12.En revanche, Mme A..., dont la pathologie a été reconnue imputable au service par décision du 21 mai 2019, est fondée à rechercher la responsabilité sans faute de l'Etat pour l'indemnisation des préjudices patrimoniaux d'une nature autre que la perte de revenus et l'incidence professionnelle ou des préjudices personnels qu'elle a subis résultant de cette pathologie. 13. La rectrice de l'académie de Montpellier invoque la faute de la victime pour s'exonérer de toute responsabilité, au regard des difficultés professionnelles récurrentes rencontrées par Mme A... dans ses différents postes de travail au sein de plusieurs académies, et au regard des circonstances qu'elle a attendu le 30 juin 2015 pour alerter sa hiérarchie des difficultés rencontrées sur son dernier poste qu'elle occupait depuis plus de trois ans et qu'elle n'a pas donné suite aux aides qui lui auraient été proposées. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que le développement de la pathologie psychiatrique de l'intéressée lui serait imputable alors même que des mesures spécifiques et exceptionnelles auraient été prises par l'administration afin de prendre en considération ses difficultés rencontrées sur ses précédents postes ayant donné lieu à un premier congé de longue durée et que la requérante n'aurait pas donné suite aux aides proposées par sa hiérarchie et le médecin de prévention. Sur les préjudices : 14. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise établi le 1er mars 2019 par un médecin psychiatre, que Mme A..., dont l'état a été déclaré consolidé le 1er mars 2019, est atteinte d'une incapacité permanente partielle au taux de 30% en rapport avec la pathologie psychiatrique dont elle est atteinte. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 47 000 euros qui lui a été allouée par les premiers juges, lesquels n'étaient pas tenus de faire application du barème Mornet. 15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a limité le montant de l'indemnisation qui lui est due à la somme de 47 000 euros. Sur les frais liés au litige : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme A... tendant à leur application. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée à la rectrice de région académique Occitanie. Délibéré après l'audience du 20 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL02878 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 04/07/2023, 21TL23289, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme F... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la société La Poste à lui verser, à titre principal, la somme de 98 390 euros, à titre subsidiaire celle de 48 390 euros, assortie des intérêts moratoires à compter du 7 février 2019, en réparation des préjudices subis à raison de sa maladie à caractère professionnel et de mettre à la charge de la société La Poste la somme de 750 euros au titre des dépens résultant des frais d'expertise et la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1902056 du 8 juin 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2021 sous le n° 21BX03289 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL23289, et un mémoire enregistré le 10 mars 2023, Mme F... A... née C..., représentée par Me Dalbin, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 8 juin 2021 ; 2°) à titre principal, de condamner la société La Poste à lui verser la somme de 98 390 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité pour faute, à titre subsidiaire de condamner la société La Poste à lui verser la somme de 48 390 euros en réparation des préjudices subis au titre de la responsabilité sans faute, et d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 7 février 2019 et de la capitalisation des intérêts ; 3°) de mettre à la charge de la société La Poste la somme de 750 euros au titre des frais d'expertise ainsi qu'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la responsabilité pour faute de la société La Poste est engagée en ce qu'elle a méconnu son obligation en matière d'évaluation des risques professionnels de son agent et qu'un poste adapté en raison de son état de santé aurait dû lui être proposé ; - la responsabilité sans faute de la société La Poste est également engagée : contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le lien de causalité entre la pathologie imputable au service et les préjudices subis présente un caractère direct et certain au regard de l'expertise et alors que la décision du 23 mai 2016 reconnaissant le caractère professionnel de sa pathologie est définitive ; - elle a droit à l'indemnisation des préjudices concernant la maladie à caractère professionnel du 8 mars 2016, soit une somme de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et de la privation de ses cotisations retraite depuis le 30 mai 2018, une somme de 1 100 euros au titre du déficit temporaire total, une somme de 7 290 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, une somme de 15 000 euros au titre du pretium doloris, une somme de 20 000 euros au titre de l'incapacité permanente partielle au taux de 10% et une somme de 5 000 euros au titre du préjudice d'agrément ; - à titre subsidiaire, une somme de 48 390 euros devrait lui être allouée sur le fondement de la responsabilité sans faute. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 février 2023, la société La Poste, représentée par la SELARL Arcanthe agissant par Me Moretto, conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que : - aucune faute pouvant lui être imputée n'est démontrée ; - la requérante ne justifie pas de l'existence d'une incidence professionnelle et de son lien avec sa maladie à caractère professionnelle, alors que les périodes de disponibilité d'office ont été reprises au titre de la maladie professionnelle ; - sa maladie ne faisant pas partie des maladies présentes au tableau des maladies professionnelles, aucune indemnisation ne peut lui être allouée ; - à titre subsidiaire, les sommes réclamées au titre des préjudices extra-patrimoniaux devront être limitées à hauteur de 858,70 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire total, de 5 690 euros au titre du déficit temporaire partiel, de 4 500 euros au titre du pretium doloris et de 11 250 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, aucune somme ne devant être allouée au titre du préjudice d'agrément. Par ordonnance du 13 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 4 avril 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code du travail ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ; - le décret 82-453 du 28 mai 1982 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique, - et les observations de Me Moretto, représentant la société La Poste. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., fonctionnaire titulaire de La Poste relevant du grade d'agent professionnel qualifié de second niveau, qui exerçait les fonctions de factrice en automobile à ... (Aveyron), s'est vu reconnaître le caractère professionnel de sa maladie rachidienne par décision du 23 mai 2016 prenant effet le 8 mars 2016. Par une décision du 21 juin 2017, la date de consolidation de sa maladie a été fixée au 29 mai 2017 et le taux d'incapacité permanente partielle dont elle reste atteinte a été fixé à 8%. Par décision du 10 novembre 2017, la reconnaissance de l'imputabilité au service de la rechute de sa pathologie lombaire à compter du 10 juillet 2017 a été refusée et ses arrêts de travail ont été pris en compte au titre des congés ordinaires de maladie à compter du 30 mai 2017. Par une décision du 11 décembre 2017, Mme A... s'est vu accorder le bénéfice d'une mise en retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 30 mai 2018. Par une décision du 24 mai 2018, Mme A... a été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé pour une période de six mois du 30 mai 2018 au 29 novembre 2018. Par un jugement n°1800364, 1802778 du 10 février 2020 devenu définitif, le tribunal administratif de Toulouse a annulé les décisions du 11 décembre 2017 et du 24 mai 2018. Par des décisions du 29 octobre 2018 et du 26 avril 2019, la mise en disponibilité d'office de Mme A... a été prolongée du 30 novembre 2018 au 29 mai 2019, puis du 30 mai 2019 au 29 novembre 2019. Ces deux décisions ont également été respectivement annulées par un jugement du tribunal administratif de Toulouse n°1903574,1903575 du 20 octobre 2020 devenu définitif. Par une ordonnance n°1800366, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a ordonné la conduite par le docteur E... d'une expertise aux fins de décrire, notamment, la nature et l'importance des séquelles consécutives à sa maladie à caractère professionnel. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la société La Poste à l'indemniser des préjudices subis à raison du caractère professionnel de sa maladie. Par un jugement du 8 juin 2021 dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Sur la responsabilité : 2. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci. 3. Mme A... soutient à titre principal que la société La Poste a méconnu son obligation en matière d'évaluation des risques professionnels à son encontre et qu'un poste adapté en raison de son état de santé aurait dû lui être proposé, alors que son état de santé était connu de son employeur depuis 2013. Il résulte toutefois de l'instruction que, si les 7 février 2013 et 25 février 2014, l'intéressée a fait inscrire dans son projet d'évolution professionnelle joint à ses dossiers d'appréciation annuelle qu'elle souhaiterait, pour des raisons de santé et sans autres précisions utiles, évoluer d'une tournée de factrice en automobile à une tournée piétonne, elle n'a jamais adressé à son employeur de demande d'aménagement de poste ou d'affectation sur un poste adapté en raison de son état de santé. Par suite, cette seule circonstance ne saurait suffire à établir que la société La Poste aurait commis une faute en ne prenant pas de mesures d'adaptation de ses conditions de travail à son état de santé. Si Mme A... invoque pour la première fois en appel la méconnaissance par la société La Poste de son obligation de réaliser le document unique d'évaluation des risques professionnels entre 2013 et 2017 tel que prescrit par l'article L. 4121-3 du code du travail, le défaut d'établissement de ce document, à le supposer avéré, ne révèle aucune faute à l'encontre de la requérante alors qu'ainsi qu'il a été exposé, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait présenté une demande d'aménagement de son poste de travail. Enfin, Mme A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions prévues à l'article 2 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, selon lequel les locaux et équipements doivent être installés et tenus de manière à garantir la sécurité des agents ainsi que dans un état constant de propreté et présenter les conditions d'hygiène et de salubrité nécessaires à la santé des personnes, dès lors que ce texte n'est pas applicable au personnel de La Poste. 4. Il résulte de ce qui précède qu'aucun manquement à l'obligation de garantir la santé et de prévenir les risques professionnels de Mme A... ne peut être retenu. La requérante n'est dès lors pas fondée à invoquer une faute de la société La Poste commise à son encontre, qui serait à l'origine de la pathologie dont elle est atteinte. 5. Mme A..., dont la pathologie rachidienne a été reconnue imputable au service par décision du 23 mai 2016, invoque ensuite la responsabilité sans faute de La Poste pour l'indemnisation des préjudices d'une nature autre que l'incidence professionnelle qu'elle a subis résultant de cette pathologie. Il résulte toutefois de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise mandatée par le tribunal administratif de Toulouse et conduite par le docteur E..., expert rhumatologue, en date du 21 décembre 2018, que la pathologie lombaire de Mme A... est imputable à un état antérieur très important résultant de discopathies lombaires multi-étagées, d'arthrose articulaire postérieure, de spondylolisthésis dégénératif et d'hernies intraspongieuses qui constitueraient des séquelles, dont l'apparence serait très caractéristique de la maladie de Scheuermann, pathologie dégénérative de l'adolescent entraînant des déformations localisées des corps vertébraux. Alors que cet expert a relevé que la pathologie dont est atteinte la requérante a été reconnue comme ayant un caractère professionnel sans expertise médicale ni dossier médical et que le tableau présenté par l'agent ne correspond pas à celui définissant la maladie professionnelle du tableau 98, à savoir " sciatique par hernie discale de topographie concordante ", la société La Poste avait estimé, dans sa décision du 10 novembre 2017, suivant les conclusions du rapport d'expertise établi le 17 juillet 2017 par le docteur B..., médecin agréé, et de l'expertise complémentaire établie le 13 septembre 2017 par le docteur D..., que la maladie lombaire de Mme A... n'était plus imputable au service mais à un état dégénératif évoluant pour son propre compte. L'expert judiciaire affirme que l'état antérieur très important de Mme A... a déjà été symptomatique et n'est aucunement imputable à l'exercice de ses fonctions. En outre, le rapport du docteur B... relevait déjà que la requérante souffrait de ses douleurs lombaires depuis 2013 et estimait que l'évolution de sa pathologie après le 29 mai 2017 résultait d'une maladie dégénérative, dans un contexte de discopathies dégénératives diffuses préexistantes. Dans ces conditions, alors même que la société La Poste a reconnu le caractère professionnel de la pathologie rachidienne de l'intéressée au titre de la période allant du 8 mai 2016 au 29 mai 2017, le caractère direct et certain du lien de causalité entre la pathologie dont est atteinte Mme A... et les préjudices dont elle demande réparation, ne peut être regardé comme établi. Il s'ensuit que la responsabilité sans faute de l'administration ne saurait davantage être engagée. 6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Sur les frais d'expertise : 7. Il y a lieu de laisser à la charge définitive de Mme A... les frais de l'expertise, taxés et liquidés à hauteur de 750 euros par une ordonnance du vice-président du tribunal administratif de Toulouse du 25 février 2019, en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme A... tendant à leur application. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... A... née C... et à la société La Poste. Délibéré après l'audience du 20 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL23289 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 06/07/2023, 21BX02930, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 20 décembre 2018 par laquelle la ministre des armées a refusé de lui octroyer une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 1905577 du 1er juin 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Dirou, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 1er juin 2021 ; 2°) d'ordonner une expertise et d'annuler la décision ministérielle du 20 décembre 2018 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les " entiers dépens ". Il soutient que : - les huit infirmités pour lesquelles il demande un droit à pension engendrent une gêne fonctionnelle supérieure à 10 % et sont en lien avec ses dix-sept années au sein de l'armée de l'air ; la désignation d'un expert médical est nécessaire pour confirmer que ces infirmités sont dues au service et justifient un droit à pension ; - ses infirmités auditives sont dues aux cinq cent plongées qu'il réalisait chaque année et il s'est d'ailleurs plaint de douleurs lorsqu'il était en service ; - ses infirmités aux genoux ont été révélées pendant le service ; - bien qu'apparue en 2017, après sa radiation des cadres, son infirmité de la main gauche est liée au service ; - sa tendinopathie a été signalée à plusieurs reprises durant son service ; - les séquelles d'une chirurgie au poignet droit sont liées à un accident de sport en opération en 1976 ; - la lombalgie sur discopathie provient du port de charges lourdes et des hélitreuillages quotidiens ; - c'est à tort que le tribunal a refusé l'expertise alors que cette demande est fondée sur une raison légitime. Par un mémoire en défense enregistré le 29 novembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - la perte auditive de 26 décibels n'est pas suffisante pour reconnaître un taux d'infirmité justifiant une pension ; l'otite barotraumatique droite, survenue quinze ans après la radiation des cadres, est dépourvue de lien avec le service ; au demeurant, la fréquence et la profondeur des plongées, qui relèvent des conditions générales de service, ne peuvent permettre de caractériser un lien entre les problèmes auditifs de M. B... et le service ; - la pathologie du genou droit est la suite d'un accident du travail survenu en 2009, dans la vie civile ; l'expert a par ailleurs relevé qu'aucune doléance n'était formulée pour le genou gauche ; - la cellulite infectieuse de la main gauche, survenue en raison d'une plaie faite le 25 avril 2017, dans la vie civile, est dépourvue de lien avec le service ; - l'invalidité occasionnée par la tendinopathie est inférieure à 10 % ; par suite, la circonstance que cette pathologie soit imputable au service est indifférente ; au demeurant, le certificat médical posant une restriction à l'activité sportive n'est pas de nature à remettre en cause le taux d'invalidité retenu par l'expert ; - si l'invalidité résultant des séquelles d'une chirurgie du poignet droit a été évaluée à 10 %, elle est pour moitié due à une opération du canal carpien et à la maladie de Dupuytren, sans lien avec le service ; cette part non imputable a acquis un caractère définitif en raison du fait d'une précédente décision de rejet du 11 janvier 2010, notifiée le 29 janvier 2010 ; - une pension militaire d'invalidité ne peut être attribuée au seul motif des conditions générales de service ; or, les séances d'hélitreuillage sont communes à l'ensemble des personnels exerçant la spécialité de plongeur ; en outre, l'expert a estimé que l'état lombalgique était à l'origine d'une invalidité de 10 %, due pour moitié à des affections dégénératives autonomes ; - il n'y a pas lieu pour la juridiction d'ordonner une expertise médicale lorsqu'elle s'estime suffisamment éclairée sur les circonstances du litige. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Olivier Cotte, - les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Alors âgé de 59 ans, M. B..., ancien adjudant de l'armée de l'air qui a exercé une activité de plongeur avant sa radiation des cadres le 5 avril 1993, a sollicité, le 14 décembre 2016, l'octroi d'une pension militaire d'invalidité au titre de huit infirmités. Par une décision du 20 décembre 2018, la ministre des armées a refusé de faire droit à sa demande. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 1er juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a refusé de lui reconnaître un droit à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; / 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; / 4° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'accidents éprouvés entre le début et la fin d'une mission opérationnelle, y compris les opérations d'expertise ou d'essai, ou d'entraînement ou en escale, sauf faute de la victime détachable du service. ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; / 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; / 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) ". Aux termes de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; / 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse ; / 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples. / En cas d'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'une infirmité étrangère à celui-ci, cette aggravation seule est prise en considération, dans les conditions définies aux alinéas précédents. / Toutefois, si le pourcentage total de l'infirmité aggravée est égal ou supérieur à 60 %, la pension est établie sur ce pourcentage ". 3. En premier lieu, M. B... souffre d'acouphènes à l'oreille droite et d'une perte auditive qui a été évaluée par le médecin l'ayant examiné le 30 juillet 2018, à 26 décibels à droite et 23,7 décibels à gauche. Cette hypoacousie n'est toutefois pas suffisamment importante pour justifier un degré d'invalidité ouvrant droit à pension au regard du guide-barème. En outre, il n'est pas établi que les acouphènes du côté droit soient en lien avec le service et son activité de plongeur, dès lors, d'une part, que les affections auditives constatées en 1988 alors qu'il était en service, concernaient seulement l'oreille gauche et, d'autre part, que M. B... a déclaré avoir été victime, dans le cadre d'une activité sportive, d'un accident ayant occasionné une otite barotraumatique droite, le 12 juillet 2008, soit quinze ans après sa radiation des cadres. 4. En deuxième lieu, si M. B... invoque des gonalgies des deux côtés, il ressort de l'expertise du 11 juin 2018 qu'aucune doléance n'a été formulée pour le genou gauche, dont l'examen physique s'est révélé normal, et que la pathologie du genou droit est une séquelle d'une régularisation méniscale interne et d'une chondropathie patellaire, en lien avec un accident du travail survenu en avril 2009, soit seize ans après la radiation des cadres de M. B.... Dans ces conditions, et alors que M. B..., contrairement à ce qu'il allègue, n'établit pas que cette pathologie se serait révélée durant le service, l'imputabilité de cette infirmité au service ne peut être reconnue. 5. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que la cellulite infectieuse de la main gauche qui s'est compliquée d'un sepsis sévère du bras gauche s'est développée à la suite d'une plaie dont M. B... a été victime le 25 avril 2017, donc également postérieurement à sa radiation des cadres. Dans ces conditions, les conséquences de cette infection, consistant notamment en des douleurs de la main, une diminution de la force de serrage et une amyotrophie de l'éminence thénar, sont sans lien avec le service. 6. En quatrième lieu, si la tendinopathie achilléenne au pied droit est survenue en 1991 alors que M. B... était en service, et qu'elle a évolué vers une chronicisation depuis lors, ainsi qu'il a été constaté lors d'une imagerie par résonance magnétique en octobre 2006, il résulte de l'expertise, qui n'est pas sérieusement contredite par un certificat médical faisant état de restrictions à la pratique sportive, que l'invalidité qui en résulte est inférieure à 10 %. Elle ne peut, pour cette raison, ouvrir un droit à pension. 7. En cinquième lieu, M. B... souffre des séquelles d'une chirurgie au poignet droit ayant consisté en une greffe osseuse, qui fait suite à une blessure survenue lors d'une épreuve sportive le 7 octobre 1975, alors qu'il était en service. Si le taux de cette infirmité a été évalué à 10 % par l'expert, ce dernier a précisé qu'un tel taux était pour moitié imputable à un syndrome du canal carpien et à une maladie de Dupuytren, deux affections dégénératives autonomes pour lesquelles M. B... a subi une intervention chirurgicale en 2005. Ce constat avait déjà été réalisé lors d'une précédente expertise faite le 9 juin 2009 en raison d'une première demande d'attribution d'une pension militaire d'invalidité. M. B... n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause ce partage d'imputabilité, ni le taux retenu, inférieur, dans ces conditions, au degré d'invalidité permettant d'ouvrir droit à une pension. 8. En dernier lieu, il résulte de l'expertise que les lombalgies dont se plaint M. B... entraînent une invalidité évaluée à 10 %, dont la moitié est due aux affections dégénératives autonomes. L'allégation de M. B... selon laquelle cette pathologie est due aux charges des bouteilles de plongée et aux nombreux hélitreuillages, comme en attesterait la douleur au dos qu'il a ressentie le 14 juin 1991 après un tel exercice, ne permet pas à elle seule de douter du bien-fondé du taux reconnu imputable au service pour cette affection. 9. Dans ces conditions, il n'apparaît pas utile de procéder à une expertise médicale, et la demande de pension militaire d'invalidité de M. B... doit être rejetée pour l'ensemble des infirmités, soit en raison d'un taux d'invalidité manifestement insuffisant, soit pour défaut de lien avec le service, sans que l'attribution, par une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du 9 février 2018, de l'allocation aux adultes handicapés pour une incapacité évaluée entre 50 et 80 %, n'ait d'incidence. 10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'attribution d'une pension militaire d'invalidité. Sur les frais liés au litige : 11. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 20 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente assesseure, M. Olivier Cotte, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2023. Le rapporteur, Olivier Cotte La présidente, Catherine Girault Le greffier, Fabrice Benoit La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02930
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 28/06/2023, 21BX02331, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le maire de Vic-en-Bigorre a prononcé son admission à la retraite pour invalidité sans lien avec le service, à compter du 1er novembre 2019, et l'a radiée des cadres à cette même date. Par un jugement n° 1902805 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire (non communiqué) enregistrés le 31 mai 2021 et le 31 mars 2023, Mme A..., représentée par Me Hirtzlin-Pinçon, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 23 mars 2021 ; 2°) d'ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à un expertise médicale afin de déterminer l'origine de sa maladie, et si cette dernière est en lien avec le service ; 3°) d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 par lequel le maire de Vic-en-Bigorre a prononcé son admission à la retraite pour invalidité sans lien avec le service, à compter du 1er novembre 2019, et l'a radiée des cadres à cette même date ; 4°) d'enjoindre à la commune de Vic-en-Bigorre de prendre une nouvelle décision déclarant l'imputabilité au service de sa mise à la retraite pour invalidité et de reconstituer sa carrière, en prenant en compte les arrêts de travail comme imputables au service, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir, et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de la commune de Vic-en-Bigorre les frais d'expertise ; 6°) de mettre à la charge de la commune de Vic-en-Bigorre la somme de 2 500 euros HT en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux dépens. Elle soutient que : - l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence, la signature illisible ne permettant pas d'identifier l'identité de son auteur ; - il n'est pas motivé, faute de reprendre l'avis de la commission de réforme sans le discuter ; - il est entaché d'un vice de procédure dès lors que le maire de Vic-en-Bigorre n'a pas mis en œuvre la procédure permettant que la reconnaissance de l'imputabilité au service de son invalidité soit examinée ; la commission de réforme n'a pas tenu compte du certificat médical de son psychiatre, qui a été produit par courrier du 26 avril 2019 adressé à la commission de réforme ; - son invalidité est imputable au service. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2023, la commune de Vic-en-Bigorre représentée par son maire en exercice et par Me Picard, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraites ; - le code des relations entre l'administration et le public ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Caroline Gaillard, - et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjointe technique principale de deuxième classe, employée par la commune de Vic-en-Bigorre, a été victime d'un accident reconnu imputable au service le 9 septembre 2003, puis a connu une période d'arrêt maladie et de reprise à temps partiel entre le 14 mars 2005 et le 11 février 2012, après que le comité médical départemental l'ait déclarée apte à la reprise du travail. A compter du 8 avril 2013, Mme A... a été placée en arrêts de maladie ordinaire successifs, avec alternance de reprise de poste, jusqu'au 12 janvier 2016. Le comité médical départemental s'est alors prononcé les 19 avril 2016, 8 novembre 2016 et 12 décembre 2017 en défaveur de l'octroi à Mme A... d'un congé de longue maladie, confirmé en ce sens par le comité médical supérieur réuni les 14 juin 2016, 31 janvier 2017 et 3 juillet 2018. Ce même comité départemental, après avoir fait procéder à une expertise supplémentaire le 21 février 2019, s'est prononcé le 22 mars 2019 pour une inaptitude totale et définitive de Mme A... à toutes fonctions et à la saisine de la commission de réforme pour mise à la retraite pour invalidité non imputable au service. Par un avis du 30 avril 2019, cette commission a adopté les mêmes conclusions. Par un arrêté du 8 octobre 2019 le maire de Vic-en-Bigorre a admis Mme A... à la retraite pour invalidité à compter du 1er novembre 2019 et l'a radiée des cadres. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Pau l'annulation de cette décision. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande. 2. En premier lieu, à l'appui de ses moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 8 octobre 2019, Mme A... ne se prévaut, devant la cour, d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation devant les premiers juges. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " En application de ces dispositions, la décision qui, comme l'arrêté contesté, met fin avant son terme normal à la carrière d'un fonctionnaire, est au nombre de celles qui doivent être motivées. 4. L'arrêté portant admission à la retraite pour invalidité de Mme A... vise les textes législatifs et réglementaires applicables à sa situation, en particulier la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ainsi que l'avis du 30 avril 2019 de la commission de réforme départementale, favorable à la mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité non imputable au service, ainsi que l'avis de la CNRACL du 2 octobre 2019, favorable à sa radiation des cadres à compter du 8 octobre 2019, dont l'intéressée a eu connaissance. Cet arrêté rappelle en outre que " Mme A... a épuisé ses droits à congé maladie et qu'elle est reconnue définitivement inapte à l'exercice de toute fonction ". La décision contestée comporte ainsi l'énoncé des motifs de droit et des considérations de fait qui en constituent le fondement et satisfait aux exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté. 5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraites ; " La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande (...) ". Aux termes de l'article 31 du même décret : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. La commission de réforme compétente est celle du département où le fonctionnaire exerce ou a exercé, en dernier lieu, ses fonctions (...) Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (...) ". 6. Mme A... soutient que sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service de sa maladie n'a pas été instruite par son employeur. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A... a été informée de la procédure de mise à la retraite pour invalidité mise en œuvre par son employeur en raison de " l'avis d'inaptitude définitive à toute fonction non imputable au service ", rendu par le comité médical départemental le 22 mars 2019. Il ressort encore des pièces du dossier que la requérante a directement soumis par courrier du 26 avril 2019 adressé directement non à son employeur comme le prévoit les textes, mais aux médecins de la commission de réforme statuant le 30 avril 2019, un certificat médical, établi le même jour par son médecin psychiatre afin que son invalidité soit reconnue imputable à son accident de service du 9 septembre 2003. Si Mme A... fait valoir que la commission n'aurait pas " pris en compte " ce certificat, elle n'allègue pas que cette instance, dont le procès-verbal mentionne qu'elle a pris connaissance des documents fournis par l'intéressée, n'en aurait pas eu communication avant de rendre son avis. Ainsi, la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie ayant conduit à la mise à la retraite pour invalidité de Mme A... a bien été soumise à la commission de réforme qui a émis un avis éclairé sur sa situation. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté serait entaché d'un vice de procédure ne peut qu'être écarté. 7. En dernier lieu, la requérante soutient que son invalidité est imputable à son accident de service survenu le 9 septembre 2003 au cours duquel elle a chuté dans une fosse de vidange après que la grille de protection eut cédé. Toutefois, l'unique certificat médical de son médecin psychiatre, qu'elle produit à l'appui de sa demande, se borne à rappeler son état anxio-dépressif chronique réactionnel et conclut que " le caractère imputable au service n'a pas été suffisamment et correctement analysé sur le fond par les diverses expertises ". Ce document ne permet pas, à défaut d'éléments suffisamment circonstanciés motivant sa position concernant les carences qui seraient contenues dans les expertises déjà réalisées, de remettre en cause les conclusions concordantes du docteur C..., expert psychiatre, et de l'avis de la commission de réforme au sein de laquelle siégeaient deux médecins, qui ont estimé que la pathologie dont elle souffre n'était pas imputable au service. Il s'ensuit qu'aucun élément du dossier ne permet de remettre en cause le bien-fondé de la décision du maire de Vic-en-Bigorre, prise au vu des avis de la commission de réforme, de la CNRACL et du comité médical départemental, tous trois convergents, quant à l'inaptitude définitive de l'intéressée à l'exercice de toute fonction et au caractère non imputable au service de cette inaptitude. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation sera écarté. 8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise médicale, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté contesté du 8 octobre 2019. Sa requête doit, dès lors, être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 1500 euros à verser à la commune de Vic-en-Bigorre au titre des mêmes dispositions. DECIDE : Article 1er : : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : Mme A... versera à la commune de Vic-en-Bigorre la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Vic-en-Bigorre. Délibéré après l'audience du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Florence Demurger, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 juin 2023. La rapporteure, Caroline Gaillard La présidente, Florence Demurger La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02331
Cours administrative d'appel
Bordeaux