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CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 15/04/2025, 24MA00790, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts l'a placée en congé de maladie ordinaire du 5 novembre 2020 au 30 septembre 2021 ainsi que la décision du 15 novembre 2021 rejetant son recours gracieux du 16 septembre 2021, et, d'autre part, d'enjoindre à la commune de Saint-Mitre-les-Remparts de reconnaître l'imputabilité au service de sa rechute du 5 novembre 2020. Par un jugement n° 2200314 du 7 février 2024, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 2 avril 2024, Mme B..., représentée par Me Harutyunyan, demande à la Cour : 1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 2200314 du 7 février 2024 rendu par le tribunal administratif de Marseille, ainsi que l'arrêté n° 2021361 du 7 juillet 2021 et la décision du 15 novembre 2021 portant rejet de son recours gracieux ; 2°) d'enjoindre à la commune de Saint-Mitre-les-Remparts de reconnaître l'imputabilité au service de sa rechute du 5 novembre 2020, avec toutes conséquences de droit, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du quinzième jour suivant la lecture de l'arrêt à intervenir ; 3°) avant dire droit, d'ordonner, sur le fondement des articles R. 621-1 et suivants du code de justice administrative, une expertise judiciaire médicale contradictoire ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts, outre les dépens, la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - c'est à tort que le tribunal administratif considère que l'absence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée lors de la séance de la commission de réforme ne l'a pas privée d'une garantie dès lors que l'ensemble des éléments médicaux concluaient à l'imputabilité au service de la rechute ; - le jugement ne pouvait régulièrement se prononcer sur la présence ou non du taux d'incapacité permanente de 25 % pour rejeter sa demande, sans préalablement se poser la question de savoir si son état était consolidé, et si, de ce fait, il convenait de s'interroger sur la présence d'une rechute ; - la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure tiré de la méconnaissance de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière dès lors qu'aucun médecin spécialiste en psychiatrie n'a participé aux débats de la commission de réforme, ce qui l'a nécessairement privée d'une garantie, ce d'autant que le médecin expert désigné par l'administration avait conclu à l'imputabilité au service de sa rechute ; - en omettant de demander la détermination de son taux d'incapacité permanente partielle et en statuant sur sa demande sans même connaître ce taux, la commune a entaché sa décision d'illégalité ; - cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que l'arrêt de travail du 5 novembre 2020 aurait dû être reconnu comme étant une rechute de l'accident de service dont elle a été victime ; - il apparaît nécessaire d'ordonner une expertise médicale de manière contradictoire, afin de déterminer son taux d'incapacité permanente ainsi que la date de consolidation de son état de santé. La requête a été communiquée à la commune de Saint-Mitre-les-Remparts, qui n'a pas produit d'observations. Un courrier du 17 octobre 2024 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 13 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; - le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ; - le code de justice administrative ; Le président de la Cour a désigné M. Revert, président assesseur, pour présider la formation de jugement de la 4ème chambre, en application des dispositions de l'article R. 222-26 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique, - les observations de Me Harutyunyan, représentant Mme B..., - et les observations de Me Extremet, substituant Me Ladouari, représentant la commune de Saint-Mitre-les-Remparts. Une note en délibéré, présentée pour Mme B..., par Me Harutyunyan, a été enregistrée le 25 mars 2025. Une note en délibéré, présentée pour la commune de Saint-Mitre-les-Remparts, par Me Ladouari, a été enregistrée le 27 mars 2025. Considérant ce qui suit : 1. Par deux jugements définitifs du 8 janvier 2019, le tribunal administratif de Marseille, d'une part, a annulé la décision du 25 octobre 2016 par laquelle le maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts a déclaré non imputable au service l'arrêt de travail de Mme B... du 23 mars 2016 et enjoint à la commune de reconnaître comme imputable au service l'affection en raison de laquelle cet agent a été placée en congé de maladie à partir du 23 mars 2016, et, d'autre part, a annulé la décision du 23 juin 2016 ayant mis fin à son stage à compter du 1er juillet 2016 et l'ayant radiée des cadres de la commune, et enjoint à celle-ci de la réintégrer dans ses effectifs et de reconstituer sa carrière. A l'expiration de son dernier arrêt de maladie, Mme B... a sollicité et obtenu sa réintégration dans les effectifs de la commune à compter du 1er septembre 2020, et a été affectée sur l'emploi de chef du service " Saint Mitre information " à compter de cette date. La reprise effective des fonctions est intervenue le 21 septembre 2020 après un avis favorable du médecin du travail. Le 5 novembre 2020, Mme B... a de nouveau été placée en arrêt de travail, et a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service du congé de maladie correspondant. Après l'avoir placée en congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS) pendant la période nécessaire à l'instruction de cette demande, le maire, par une décision du 7 juillet 2021, a retiré les arrêtés de placement et de prolongation de Mme B... en CITIS et l'a placée en congé de maladie ordinaire entre les 5 novembre 2020 et 1er février 2021 à plein traitement, et entre les 2 février et 30 septembre 2021 à demi-traitement. Et par décision du 15 novembre 2021, le maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts a rejeté le recours gracieux de Mme B... dirigé contre l'arrêté du 7 juillet 2021. Mme B... relève appel du jugement du 7 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2021 et de la décision du 15 novembre 2021. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Il ressort sans ambiguïté des pièces du dossier, notamment du certificat d'arrêt de travail du 5 novembre 2020 ainsi que du courrier adressé le 2 décembre 2020 par Mme B... au maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts, que l'intéressée a sollicité la reconnaissance d'imputabilité au service de ses arrêts maladie à compter du 5 novembre 2020 au titre d'une rechute de la maladie, constatée le 23 mars 2016, qui avait été reconnue imputable au service. 3. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 4. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 21 bis qui prévoit notamment, aux termes de dispositions désormais codifiées à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique que : " (...) II. - Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. / (...) IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions (...) / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. ". 5. Pour l'application de ces dispositions à la fonction publique territoriale, le décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale a inséré les articles 37-1 à 37-20 dans le décret du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux. Aux termes de l'article 37-3 de ce décret : " I. - La déclaration d'accident de service ou de trajet est adressée à l'autorité territoriale dans le délai de quinze jours à compter de la date de l'accident. / (...) II. - La déclaration de maladie professionnelle prévue à l'article 37-2 est adressée à l'autorité territoriale dans le délai de deux ans suivant la date de la première constatation médicale de la maladie ou, le cas échéant, de la date à laquelle le fonctionnaire est informé par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle. / (...) IV. Lorsque les délais prévus aux I et II ne sont pas respectés, la demande de l'agent est rejetée. / Les délais prévus aux I, II et III ne sont pas applicables lorsque le fonctionnaire entre dans le champ de l'article L. 169-1 du code de la sécurité sociale ou s'il justifie d'un cas de force majeure, d'impossibilité absolue ou de motifs légitimes ". Aux termes de l'article 37-17 de ce décret : " Lorsqu'il est guéri ou que les lésions résultant de l'accident de service, de l'accident de trajet ou de la maladie professionnelle sont stabilisées, le fonctionnaire transmet à l'autorité territoriale un certificat médical final de guérison ou de consolidation. / Toute modification de l'état de santé du fonctionnaire constatée médicalement postérieurement à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure qui nécessite un traitement médical peut donner lieu à un nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. / La rechute est déclarée dans le délai d'un mois à compter de sa constatation médicale. La déclaration est transmise dans les formes prévues à l'article 37-2 à l'autorité territoriale dont relève le fonctionnaire à la date de cette déclaration. / L'autorité territoriale apprécie la demande de l'agent dans les conditions prévues au présent titre ". 6. Le même décret du 10 avril 2019, publié au Journal officiel de la République française du 12 avril 2019, comporte, à son article 15, des dispositions transitoires aux termes desquelles : " Le fonctionnaire en congé à la suite d'un accident ou d'une maladie imputable au service continue de bénéficier de ce congé jusqu'à son terme. Toute prolongation de ce congé postérieure à l'entrée en vigueur du présent décret est accordée dans les conditions prévues au chapitre Ier. / Les conditions de forme et de délais prévues aux articles 37-2 à 37-7 du décret du 30 juillet 1987 précité ne sont pas applicables aux fonctionnaires ayant déposé une déclaration d'accident ou de maladie professionnelle avant l'entrée en vigueur du présent décret. / Les délais mentionnés à l'article 37-3 du même décret courent à compter du premier jour du deuxième mois suivant la publication du présent décret lorsqu'un accident ou une maladie n'a pas fait l'objet d'une déclaration avant cette date ". 7. Le droit des agents publics à bénéficier d'une prise en charge par l'administration à raison d'un accident ou d'une maladie reconnus imputables au service est constitué à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée. Ce droit inclut celui de bénéficier à nouveau d'une telle prise en charge en cas de rechute, c'est-à-dire d'une modification de l'état de l'agent constatée médicalement postérieurement à la date de consolidation de la blessure ou de guérison apparente et constituant une conséquence exclusive de l'accident ou de la maladie d'origine. Ainsi, quand un accident survenu avant l'entrée en vigueur de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 ou une maladie diagnostiquée avant cette date est reconnu imputable au service selon les critères prévalant avant cette même date, il convient, si de nouveaux troubles affectent le même agent après cette date, de rechercher si ces troubles proviennent de l'évolution spontanée des séquelles de l'accident ou de la maladie d'origine, en dehors de tout événement extérieur, et constituent ainsi une conséquence exclusive de cet accident ou de cette maladie. Si tel est le cas, ces troubles ouvrent droit, sans autre condition, au bénéfice du congé pour invalidité temporaire imputable au service. Dans toute autre hypothèse, il convient d'apprécier leur imputabilité au service dans les conditions prévues depuis l'entrée en vigueur de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 8. Les dispositions fixant des règles de forme et de délai sont immédiatement applicables aux situations en cours, sous réserve des mesures transitoires qui les accompagnent le cas échéant. Il en va ainsi des conditions de forme et de délai prévues aux articles 37-2 à 37-7 du décret du 30 juillet 1987 mentionné au point 4, sous réserve des mesures transitoires prévues à l'article 15 du décret du 10 avril 2019 cité au point 5. Il en résulte que ces conditions de forme et de délai sont applicables aux demandes initiales de congé pour invalidité temporaire imputable au service motivées par un accident ou une maladie dont la déclaration a été déposée après le 13 avril 2019, date d'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019, les délais impartis par l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987 pour déposer cette déclaration ne commençant toutefois à courir, en application de l'article 15 du premier de ces décrets, qu'à compter du 1er juin 2019. Dès lors que l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987 prévoit que les déclarations de rechute sont transmises dans les formes prévues à l'article 37-2 et examinées dans les mêmes conditions que les demandes initiales de congé pour invalidité temporaire imputable au service, les mêmes conditions de forme trouvent également à s'appliquer aux déclarations de rechute transmises à compter du 13 avril 2019, le délai d'un mois imparti par l'article 37-17 ne commençant toutefois à courir qu'à compter du 1er juin 2019. Pour les mêmes raisons, sont applicables aux demandes présentées au titre d'une rechute à compter du 13 avril 2019 les dispositions du IV de l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987, de sorte que si l'agent ne se prévaut pas de sa qualité de victime d'un acte de terrorisme au sens de l'article L. 169-1 du code de la sécurité sociale ou ne justifie pas d'un cas de force majeure, d'impossibilité absolue ou de motifs légitimes, l'administration est tenue de rejeter sa demande de rattachement au service lorsque celle-ci ne lui est pas remise dans le délai d'un mois à compter de sa constatation médicale, ce délai ne commençant toutefois à courir, ainsi qu'il a été dit, qu'à compter du 1er juin 2019 (Conseil d'Etat, avis, 18 février 2025, M. C..., n° 495725). 9. Ainsi qu'il a été dit au point 2, la demande de Mme B... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail à compter du 5 novembre 2020 a été présentée au titre d'une rechute de la maladie, diagnostiquée le 23 mars 2016, qui a été reconnue imputable au service selon les critères prévalant avant l'entrée en vigueur de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 cité au point 4. Par conséquent, saisie d'une telle demande, il appartenait à la commune, en application des dispositions et principes exposés aux points 3 à 8, de rechercher si les troubles affectant Mme B... à compter du 5 novembre 2020 provenaient de l'évolution spontanée des séquelles de la maladie d'origine, en dehors de tout événement extérieur, et s'ils constituaient, ainsi, une conséquence exclusive de cet accident ou de cette maladie, et, dans la négative, d'apprécier leur imputabilité au service dans les conditions prévues depuis l'entrée en vigueur de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Or, si par son courrier du 15 novembre 2021 portant rejet du recours gracieux de Mme B..., le maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts a dénié tout lien entre la maladie initiale et les arrêts de travail à compter du 5 novembre 2020, il ne s'est toutefois pas prononcé sur l'existence d'une rechute, en dépit de la demande dont il était saisi. De surcroît, il n'a pas davantage apprécié l'imputabilité au service de ces arrêts dans les conditions prévues depuis l'entrée en vigueur de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 en l'absence de démonstration, notamment, de ce que la pathologie en cause, non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale, n'aurait pas entraîné une incapacité permanente inférieure au taux de 25 % prévu par l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. Ce faisant, et ainsi que le soutient Mme B..., le maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts a entaché ses décisions des 7 juillet 2021 et 15 novembre 2021 d'une erreur de droit, aucun autre moyen n'étant mieux à même de régler le litige. 10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par suite, ce jugement doit être annulé, ainsi que l'arrêté du 7 juillet 2021 par lequel le maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts l'a placée en congé de maladie ordinaire du 5 novembre 2020 au 30 septembre 2021, ensemble la décision du 15 novembre 2021 rejetant son recours gracieux du 16 septembre 2021. Sur les conclusions à fin d'injonction : 11. L'annulation prononcée par le présent arrêt n'implique pas nécessairement, compte tenu du motif d'annulation qu'il retient, qu'il soit enjoint à la commune de Saint-Mitre-les-Remparts de placer la requérante en position de congé de maladie imputable au service du 5 novembre 2020 au 30 septembre 2021, mais seulement qu'il procède à un réexamen de sa demande. Il y a donc lieu d'enjoindre au maire de cette commune de procéder à ce réexamen, conformément aux principes exposés aux points 3 à 8 du présent arrêt, et de prendre une nouvelle décision sur la demande d'imputabilité présentée par Mme B..., dans un délai de cinq mois à compter de sa notification. Sur les frais liés au litige : 12. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : Le jugement n° 2200314 du 7 février 2024 du tribunal administratif de Marseille est annulé. Article 2 : L'arrêté du 7 juillet 2021 et la décision du 15 novembre 2021 du maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts sont annulés. Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Saint-Mitre-les-Remparts de procéder au réexamen de la demande de Mme B... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail du 5 novembre 2020 au 30 septembre 2021, dans les conditions exposées au point 11 du présent arrêt, et de prendre une nouvelle décision sur cette demande, dans un délai de cinq mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 4 : La commune de Saint-Mitre-les-Remparts versera une somme de 2 000 euros à Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Saint-Mitre-les-Remparts. Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, où siégeaient : - M. Revert, président, - M. Martin, premier conseiller, - M. Lombart, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 15 avril 2025. 2 N° 24MA00790
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 5ème chambre, 15/04/2025, 23PA04782, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions ministérielles des 18 novembre 2020 et 3 décembre 2020 refusant, pour la première, de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident qu'elle a déclaré le 12 février 2019 et la plaçant, pour la seconde, en congé de maladie ordinaire du 13 février au 31 décembre 2019, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux qu'elle a présenté, le 19 janvier 2021, contre ces décisions. Par un jugement no 2110598 du 26 septembre 2023, le tribunal administratif de Paris a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 décembre 2020 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2023, et un mémoire en réplique, enregistré le 4 février 2025, qui n'a pas été communiqué, Mme B..., représentée par le cabinet d'avocats Athon-Perez, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 18 novembre 2020 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de son accident et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; 3°) d'enjoindre aux ministres des ministères sociaux, à titre principal, de reconnaître l'accident de service qu'elle a déclaré le 12 février 2019 et de la placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 13 février 2019, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance, ainsi que la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en appel. Elle soutient que : - en l'absence de médecin psychiatre, la composition de la commission de réforme n'était pas conforme à l'article 19 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - la décision refusant de reconnaître un accident de service est entachée d'une erreur de droit dès lors que les ministres, qui se sont estimés liés par l'avis émis par la commission de réforme, ont méconnu leur compétence ; - cette décision procède d'une inexacte appréciation de sa situation dès lors que la condition tenant à l'existence d'un fait accidentel survenu dans le temps et sur le lieu du service est remplie, et qu'aucune circonstance particulière ne détache le lien existant entre les troubles qu'elle a présentés suite à cet accident et le service. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2025, la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - la décision du 28 juin 2021 plaçant Mme B... en congé de longue maladie, devenue définitive, s'étant substituée à la décision du 3 décembre 2020 qui la plaçait en congé de maladie ordinaire, les conclusions dirigées contre cette décision sont devenues sans objet ; - les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique du 13 mars 2025 : - le rapport de Mme Milon, - les conclusions de Mme de Phily, rapporteure publique, - et les observations de Me Achard, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... a été détachée en 2006 puis intégrée, en 2007, au sein des ministères sociaux, après avoir exercé plusieurs années au sein de l'entreprise France Telecom. Affectée à la direction de la sécurité sociale, elle a été promue en 2019 secrétaire administrative de classe exceptionnelle. Victime d'un malaise survenu à la suite d'un entretien avec sa supérieure hiérarchique le 12 février 2019, Mme B... a déclaré un accident de service et a été placée en arrêt de travail à compter du 13 février 2019. Par une décision du 18 novembre 2020, sa demande tendant à la reconnaissance d'un accident de service survenu le 12 février 2019 et à son placement en congé d'invalidité temporaire imputable au service à compter du 13 février 2019 a été refusée et, par un arrêté du 3 décembre 2020, elle a été placée en congé de maladie ordinaire du 13 février au 31 décembre 2019. Par un jugement rendu le 26 septembre 2023, le tribunal administratif de Paris a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision du 3 décembre 2020 et a rejeté le surplus de ses conclusions. Mme B... doit être regardée comme faisant appel de ce jugement en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 novembre 2020 et de la décision rejetant implicitement son recours gracieux du 19 janvier 2021. Sur le moyen relatif à la composition de la commission de réforme : 2. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable à la date du 12 février 2019 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. (...) / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. (...) / Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie. (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. (...) ". 3. D'autre part, aux termes de l'article 10 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, qui régit la situation des fonctionnaires de l'Etat, dans sa rédaction applicable à la date du 18 novembre 2020 : " Il est institué auprès de l'administration centrale de chaque département ministériel, une commission de réforme ministérielle (...) composée comme suit : / (...) / 4. Les membres du comité médical prévu à l'article 5 du présent décret. (...) ". Le deuxième alinéa de l'article 5 de ce décret, qui précise la composition du comité médical ministériel, prévoit que celui-ci comprend " deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ". Aux termes de l'article 13 de ce décret : " La commission de réforme est consultée notamment sur : / 1. L'octroi du congé de maladie ou de longue maladie susceptible d'être accordé en application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ; / 2. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 susvisée dans les conditions prévues au titre VI bis ; / (...) / 5. La réalité des infirmités résultant d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle, la preuve de leur imputabilité au service et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, en vue de l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité instituée à l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) ". Enfin, aux termes de l'article 19 de ce même décret, alors applicable : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération. / Les avis sont émis à la majorité des membres présents. / Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote. / (...) ". 4. Il résulte de la combinaison des dispositions citées aux points précédents, alors en vigueur, qu'elles imposaient la présence d'un médecin spécialiste seulement lorsque la commission de réforme était consultée sur l'octroi d'un congé de longue maladie ou de longue durée. En l'espèce, la commission de réforme, qui n'était pas saisie d'une demande tendant au bénéfice d'un tel congé, pouvait ainsi valablement délibérer sans que participe à la délibération un médecin spécialiste de l'affection résultant de l'événement dont Mme B... demandait qu'il soit qualifié d'accident de service. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la procédure préalable à la décision attaquée aurait été irrégulière, faute pour la commission de réforme d'avoir compris un médecin psychiatre parmi ses membres. Sur le moyen d'erreur de droit : 5. Si Mme B... fait valoir que la décision du 18 novembre 2020 s'est appropriée le motif de l'avis défavorable émis par la commission de réforme, tenant à l'absence de fait accidentel, il ne résulte pas de cette seule circonstance que l'autorité compétente se serait crue en situation de compétence liée pour refuser de reconnaître l'existence d'un accident de service et, par suite, l'imputabilité au service de la pathologie dont elle souffre. Le moyen d'erreur de droit doit être écarté. Sur le moyen tiré de l'erreur d'appréciation : 6. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions citées au point 2 du présent arrêt, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien entre un agent et son supérieur hiérarchique ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 7. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a été convoquée à un entretien organisé par sa supérieure hiérarchique, Mme A..., le 12 février 2019 à 15h30 et qu'à la suite de cet entretien, elle s'est rendue à l'infirmerie, en état de stress et en pleurs, ce qui a conduit à solliciter le médecin de prévention et à faire intervenir les équipiers secouristes du ministère, qui l'ont mise en contact avec le médecin régulateur du SAMU, avant qu'elle ne soit autorisée à rentrer à son domicile. 8. D'une part, il ressort des pièces du dossier que cet entretien inopiné a fait suite à l'attitude inadaptée que Mme B... avait elle-même adoptée à l'égard de deux stagiaires placés sous sa responsabilité, dont l'une avait fait un malaise, et que sa supérieure lui a demandé des précisions sur les circonstances de cet incident, qui lui avait été rapporté. Cet entretien avait ainsi un objet qui s'inscrivait dans le cadre de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 9. D'autre part, il ressort du registre des accidents du travail de l'infirmerie que Mme B... a déclaré, le 12 février après-midi, avoir eu " le coup de stress en trop ", sa cheffe lui reprochant d'avoir " parlé violemment aux stagiaires ". Si, dans le courrier joint à sa déclaration d'accident, elle affirme que sa responsable se serait adressée à elle en employant un ton agressif et un regard qu'elle qualifie de " mauvais ", en l'invectivant et en cherchant à la culpabiliser, et si elle produit deux attestations de collègues évoquant un mode de communication brusque avec son équipe et une attestation d'un responsable syndical évoquant des " faits et paroles " constitutifs, à son sens, d'un harcèlement moral de la part de Mme A... à l'égard de plusieurs agents contractuels au sein de la structure qu'elle encadrait à la fin de 2014 et au début de 2015, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que sa responsable aurait adopté, lors de l'entretien du 12 février 2019, un comportement qui aurait excédé l'exercice normal de son pouvoir hiérarchique. De même, en indiquant à Mme B... qu'il n'y aurait plus de stagiaires dans le service, lui précisant ainsi les possibles répercussions de son attitude inadaptée à l'égard des stagiaires placés sous sa responsabilité, sa supérieure ne peut être regardée comme ayant excédé les limites de l'exercice de l'autorité hiérarchique. 10. Certes, il ressort notamment des certificats établis par son médecin traitant et par un médecin psychiatre que Mme B... a présenté, à la suite de l'entretien du 12 février 2019, divers troubles relevant, d'après le second de ces médecins, d'un syndrome post-traumatique. Toutefois, ni l'état réactionnel présenté par Mme B... à la suite de l'entretien, ni son placement en congé de maladie, ne sont de nature à établir que sa supérieure hiérarchique aurait, au cours de cet entretien, adopté un comportement ou tenu des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 11. Il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 10 que Mme B... ne peut être regardée comme ayant été victime, le 12 février 2019, d'un évènement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service. Par suite, les ministres ont pu légalement estimer, par leur décision du 18 novembre 2020 et par la décision rejetant le recours gracieux formé par l'intéressée contre cette décision, que l'événement survenu le 12 février 2019 n'était pas un fait accidentel. Enfin, les décisions attaquées, qui rejettent sa demande de reconnaissance d'un accident de service, étant fondées sur l'absence de fait accidentel, Mme B... ne peut utilement faire valoir qu'en l'absence de circonstance particulière, cette imputabilité devrait être reconnue. 12. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 novembre 2020 refusant de reconnaître l'existence d'un accident de service survenu le 12 février 2019 et de la placer en congé d'invalidité temporaire imputable au service à compter du 13 février 2019, et celle rejetant le recours gracieux présenté contre cette décision. Ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par conséquent, être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. Délibéré après l'audience du 13 mars 2025, à laquelle siégeaient : - Mme Fombeur, présidente de la cour, - M. Barthez, président de chambre, - Mme Milon, présidente assesseure. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 avril 2025. La rapporteure, A. MILONLa présidente, P. FOMBEUR La greffière, E. VERGNOL La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 7 2 N° 23PA04782
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 08/04/2025, 23TL00920, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de reconnaître l'accident de travail dont il a été victime, le 12 janvier 2019, comme étant imputable au service, d'enjoindre à l'Etat de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 12 janvier 2019 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°2106570 du 31 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A.... Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 20 avril 2023, M. B... A..., représenté par Me Betrom, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement n°2106570, rendu le 31 mars 2023 ; 2°) d'annuler, en conséquence, la décision de rejet implicite née du silence gardé par l'administration sur la demande de reconnaissance d'accident de service adressée le 2 septembre 2021 ; 3°) d'enjoindre à l'administration de le placer en accident de service compter du 12 janvier 2019 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal a inversé la charge de la preuve et a remis en cause la présomption d'imputabilité instituée par le législateur ; - les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires lui sont applicables ; - ayant ressenti une vive douleur à la poitrine et un engourdissement de la main gauche sur son lieu de travail, il a bien subi, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, un accident de service. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 10 octobre 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 12 novembre 2024. Par un avis adressé le 13 mars 2025, la cour a informé les parties, qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le champ d'application de la loi a été méconnu, en raison de l'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 à un fonctionnaire dont les droits en matière d'imputabilité au service ont été constitués, le 12 janvier 2019, date à laquelle un infarctus du myocarde lui a été diagnostiqué, soit avant le décret n°2019-122 du 21 février 2019, entré en vigueur le 24 février 2019, et, en conséquence, de ce que la cour était susceptible de substituer d'office aux dispositions précitées, au regard du même pouvoir d'appréciation de l'autorité administrative, celles de l'article 34 de de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 applicables à cette date. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n°2019-122 du 21 février 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., surveillant brigadier au centre pénitentiaire de Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault), a été victime d'un infarctus du myocarde sur son lieu de travail, le 12 janvier 2019. Par un courrier du 2 septembre 2021, il a adressé au garde des sceaux, ministre de la justice, une demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de cet accident, avec placement en congé pour invalidité temporaire imputable au service, demande qui a été implicitement rejetée. M. A... relève appel du jugement du 31 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de cette décision implicite de rejet. Sur la régularité du jugement : 2. Il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels les juges de première instance se sont prononcés sur les moyens qui leur étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, M. A... ne peut utilement soutenir, pour contester la régularité du jugement, que le tribunal aurait inversé la charge de la preuve en matière d'imputabilité au service de l'accident qu'il aurait subi. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne la base légale du refus implicite de rejet opposé à la demande d'imputabilité au service : 3. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. 4. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable avant sa modification par le II de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 5. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, créé par le I de l'article 10 de l'ordonnance précitée du 19 janvier 2017, en vigueur depuis le 21 janvier 2017 et désormais codifié à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article (...) / II.-Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. (...) / VI. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires (...) ". 6. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 étant manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, ces dispositions ne sont donc applicables, s'agissant de la fonction publique de l'Etat, que depuis l'entrée en vigueur, le 24 février 2019, du décret susvisé du 21 février 2019. Il en résulte que les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 21 février 2019, soit le 24 février 2019. 7. Les droits des agents en matière d'accident de service étant constitués à la date à laquelle celui-ci s'est produit, soit en l'espèce le 12 janvier 2019, la demande de reconnaissance d'imputabilité au service de M. A... était exclusivement régie par les dispositions issues de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat citées au point 4. 8. Il ressort des pièces du dossier et notamment des écritures en défense du garde des sceaux, ministre de la justice, que, pour rejeter la demande de M. A..., l'autorité administrative s'est à tort fondée sur les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 non encore entrées en vigueur à la date de l'infarctus du myocarde dont il a été victime. Toutefois, le pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 est le même que celui dont l'investissent les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 et les garanties dont sont assortis ces textes étant similaires. Dans ces conditions, et ainsi qu'en ont été informées les parties, il y a lieu de substituer les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 à celles de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. 9. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 3 à 8, M. A... ne peut utilement solliciter le bénéfice de l'application de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983. En ce qui concerne l'imputabilité au service : 10. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service, pour l'application de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. 11. Il appartient au juge administratif, lorsqu'il est saisi de faits relatifs à un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, de rechercher si l'accident présente un lien direct avec le service. 12. S'il est constant que M. A... a été victime, le 12 janvier 2019, d'un infarctus survenu sur son lieu de travail et pendant ses heures de service, il ne ressort pas des pièces du dossier de première instance comme des pièces produites en appel et il n'est, au demeurant, pas allégué que ce malaise trouverait son origine dans les conditions d'exercice de ses fonctions, que ce soit le jour de l'accident ou de manière plus générale. Dans ces conditions, l'infarctus dont a été victime M. A..., le 12 janvier 2019, ne saurait être regardé comme imputable au service. En conséquence, c'est sans erreur d'appréciation que le garde des sceaux, ministre de la justice a implicitement rejeté la demande de reconnaissance d'imputabilité présentée par l'agent. 13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement contesté, rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite refusant l'imputabilité au service de l'infarctus subi le 12 janvier 2019. Sur les conclusions à fin d'injonction : 14. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... n'appelle aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. En conséquence, les conclusions que ce dernier présente tendant à ce qu'il soit enjoint à l'autorité administrative de le placer en accident de service compter du 12 janvier 2019 ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. A..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure, Mme Dumez-Fauchille, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025. La rapporteure, D. Teuly-Desportes La présidente, A. Geslan-DemaretLa greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°23TL00920 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de NANCY, 5ème chambre, 22/04/2025, 22NC01223, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 20 décembre 2019 par laquelle le préfet des Ardennes a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie ainsi que la décision du 25 mars 2020 par laquelle le préfet a rejeté son recours gracieux. Par un jugement n° 2000925 du 4 mars 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les décisions du 20 décembre 2019 et du 25 mars 2020 par lesquelles le préfet des Ardennes a respectivement refusé de reconnaître la tularémie dont M. B... est atteint comme imputable au service et a rejeté son recours gracieux et a enjoint au préfet des Ardennes de réexaminer la situation de M. B.... Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 12 mai 2022, le ministre de l'intérieur demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; 2°) de rejeter la demande de première instance de M. B.... Il soutient que : - le tribunal a appliqué à tort l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 dès lors que cette disposition n'est entrée en vigueur que le 24 février 2019 ; - il n'existe aucun lien direct entre la tularémie développée par M. B... et l'exercice de ses fonctions ou de ses conditions de travail. Par un mémoire en défense enregistré le 10 août 2022, M. B... conclut au rejet de la requête du ministre de l'intérieur et demande à la Cour de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 2019-122 du 21 février 2019 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Peton, - et les conclusions de Mme Bourguet, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B... est adjoint technique du ministère de l'intérieur et de l'outre-mer. Il a été affecté au sein de la préfecture des Ardennes en 1981 pour exercer les fonctions de jardinier avant d'être affecté à compter de 2014 à un emploi d'agent de maintenance et de manutention. En 2016, M. B... a connu des problèmes de santé successifs avant d'être placé en congé de longue maladie du 15 septembre 2016 au 14 septembre 2019 et qu'une tularémie soit diagnostiquée en février 2018. M. B... a sollicité la reconnaissance de cette pathologie comme maladie professionnelle et, par un arrêté du 20 décembre 2019, le préfet des Ardennes a refusé de reconnaitre cette imputabilité. M. B... a présenté un recours gracieux qui a été rejeté le 25 mars 2020. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 4 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé les décisions des 20 décembre 2019 et 25 mars 2020 et a enjoint au préfet des Ardennes de réexaminer la situation de M. B.... Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable avant sa modification par le II de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ". 3. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, créé par le I de l'article 10 de l'ordonnance précitée du 19 janvier 2017, en vigueur depuis le 21 janvier 2017 et désormais codifié à l'article L. 822-20 du code général de la fonction publique : " I. Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article (...) / II.-Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. (...) / VI. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires (...) ". Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont donc entrées en vigueur, s'agissant de la fonction publique de l'Etat, que depuis l'entrée en vigueur, le 24 février 2019, du décret du 21 février 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique de l'Etat, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 21 février 2019, soit le 24 février 2019. 4. Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 5. En l'espèce, M. B... a sollicité le 5 novembre 2018 une demande de reconnaissance de maladie professionnelle en produisant un certificat médical mentionnant une date de première constatation médicale de la maladie dont il était affecté au 19 septembre 2016. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que la pathologie de M. B... a été diagnostiquée en février 2018. En conséquence, la pathologie a été diagnostiquée à une date antérieure à l'entrée en vigueur des dispositions du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 issu de l'article 10 de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique. Seules les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 citées au point 2 étaient applicables. 6. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un compte-rendu médical établi le 28 février 2018 par un médecin spécialisé en maladies infectieuses et tropicales, qu'en septembre 2016, M. B... a constaté la présence d'écorchures et d'une piqure d'insecte sur son bras droit. A la fin de ce même mois de septembre 2016, M. B... a présenté un syndrome grippal associé à une conjonctivite purulente, des vertiges et malaises à répétition. Sont ensuite apparus une polyarthralgie aux poignets, une polyarthrite localisée aux articulations des mains, genoux et pieds, des sueurs nocturnes, une hypoesthésie au niveau de la cuisse droite et une dysesthésie et paresthésie des deux pieds ainsi qu'une paralysie faciale droite à bascule. En janvier 2017, alors que M. B... était hospitalisé au centre hospitalier universitaire de Reims, une sérologie Francisella Tularensis a révélé des résultats douteux à recontrôler. Par la suite, le point de piqure d'insecte constaté en septembre 2016 a évolué en la constitution d'un nodule induré dont M. B... a extrait une tique de type ixodes ricinus en mai 2017. En janvier 2018, une nouvelle sérologie tularémique s'est révélée positive. La tularémie est une maladie infectieuse due à la bactérie Francisella tularensis qui peut être contractée par l'homme par contact direct avec un animal ou un insecte porteur ou avec un environnement contaminé. Par ailleurs, l'expertise médicale réalisée le 14 février 2019 par le médecin agréé de la commission de réforme a conclu à l'existence d'une symptomatologie pouvant être rattachée directement à la tularémie dont M. B... est atteint et a relevé qu'une contamination extra-professionnelle devait être exclue compte tenu de l'absence de loisirs réguliers de M. B... en forêt. Au demeurant, il est constant que les fonctions de M. B... ont pour effet de le placer en contact direct et régulier avec les jardins et espaces verts. Enfin, la commission de réforme a émis un avis favorable à la reconnaissance de la tularémie de M. B... en maladie professionnelle le 13 septembre 2019. Par conséquent, la maladie dont est affecté M. B... présente un lien direct avec ses conditions de travail et doit être regardée comme imputable au service. 8. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 20 décembre 2019 par laquelle le préfet des Ardennes a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la tularémie dont est atteint M. B... et la décision du 25 mars 2020 par laquelle le préfet des Ardennes a rejeté le recours gracieux de l'agent. Sur les frais liés au litige : 9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " 10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée. Article 2 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. A... B.... Délibéré après l'audience du 18 mars 2025, à laquelle siégeaient : - M. Durup de Baleine, président, - M. Barlerin, premier conseiller, - Mme Peton, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 avril 2025. La rapporteure, Signé : N. PetonLe président, Signé : A. Durup de Baleine Le greffier, Signé : A. Betti La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Le greffier, A. Betti N° 22NC01223 2
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de TOULOUSE, Juge des référés, 30/04/2025, 24TL02206, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 188 000 euros et de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 2402590 du 2 août 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 16 août 2024, M. C..., représenté par Me Charre, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier à lui verser une provision de 188 000 euros ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Montpellier la somme de 3000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'ordonnance attaquée est entachée d'erreurs de droit et de dénaturation des faits ; - elle mentionne à tort l'existence d'une rechute de son accident de service du 1er août 2018 alors qu'une maladie professionnelle (tableau 98) a été reconnue à partir du 23 novembre 2018 dont la date de consolidation a été fixée au 31 mai 2019 ; - le point départ de la prescription quadriennale étant cette date de consolidation, sa demande indemnitaire postée le 29 décembre 2023 n'était pas prescrite, alors même qu'elle n'a été reçue que le 3 janvier 2024, conformément aux dispositions de l'article L. 112-1 du code des relations entre le public et l'administration ; la question de la prescription était donc dépourvue de caractère sérieux ; - le taux d'IPP fixé en dernier lieu à 40% n'a jamais été contesté par le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier ; - sa créance envers le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier au titre de la responsabilité sans faute n'est pas sérieusement contestable ; - il a droit à l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire subi avant la consolidation qui peut être évalué à la somme de 8000 euros et des souffrances endurées qui peuvent être évaluées à la somme de 5000 euros soit une somme totale de 13 000 euros ; - il a droit à l'indemnisation des troubles permanents dans ses conditions d'existence après consolidation ; il s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé et a suivi une formation d'électricien ; toutefois, le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier l'a déclaré inapte à toutes fonctions sans procéder à son reclassement ; le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier l'a informé de sa volonté de le mettre à la retraite d'office le 11 septembre 2023 sans attendre l'avis de la CNRACL mais il est toujours actuellement en congé maladie ; il sollicite l'indemnisation d'une somme de 175 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ; - le lien de causalité entre ses préjudices et la maladie professionnelle est avéré. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2024, le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier, représenté par Me Walgenwitz, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. C... une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - l'ordonnance contestée n'est entachée d'aucune irrégularité ; - la créance au titre de l'accident de service du 1er août 2018 qui est consolidé depuis le 15 octobre 2018 est prescrite au 31 décembre 2022 ; à la supposer prescrite au 31 décembre 2023, sa demande indemnitaire n'a été reçue que le 3 janvier 2024, soit après l'expiration du délai de prescription ; - à titre subsidiaire, en l'absence de toute expertise contradictoire déterminant les préjudices du requérant, sa demande de provision ne peut qu'être rejetée. Par une ordonnance en date du 4 décembre 2024, la date de clôture d'instruction de l'affaire a été fixée au 6 janvier 2025. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. 1. M. C..., ouvrier principal de 2ème classe, en fonction au centre hospitalier régional universitaire de Montpellier a été victime, le 1er août 2018, d'un accident du travail qui a été reconnu imputable au service par une décision du directeur du centre hospitalier en date du 20 novembre 2018 et fixant la date de consolidation au 15 octobre 2018 sans incapacité physique permanente, en se fondant sur une expertise réalisée par le docteur D..., médecin agréé, réalisée le 11 octobre 2018. A la suite de sa déclaration de rechute de cet accident du travail, le 26 novembre 2018, une nouvelle expertise a été réalisée par le même médecin le 21 janvier 2019 et son dossier a été soumis à la commission de réforme qui dans son avis du 15 octobre 2019 a suivi ses conclusions écartant une rechute, mais reconnaissant l'existence d'une maladie professionnelle figurant au tableau n° 98, avec une date de consolidation au 31 mai 2019 et un taux d'incapacité permanente partielle de 15%, ce que le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier a entériné dans une décision du 24 juin 2019. Dans le cadre de l'instruction d'un dossier de mise à la retraite pour invalidité se fondant sur une expertise réalisée par le docteur A..., le 13 janvier 2023, la commission de réforme l'a reconnu, dans sa séance du 29 août 2023, inapte à toutes fonctions avec un taux d'invalidité de 40% imputable au service, en lien avec sa maladie professionnelle. Cet avis lui a été communiqué par un courrier du centre hospitalier du 11 septembre 2023. M. C... a saisi le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier d'une demande indemnitaire préalable en date du 21 décembre 2023, reçu par le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier le 3 janvier 2024, sollicitant sur le terrain de la responsabilité sans faute une somme de 150 000 euros au titre du taux d'invalidité de 40% et une somme de 50 000 euros au titre des troubles dans ses conditions d'existence et du préjudice moral, restée sans réponse. Parallèlement à l'introduction d'une requête au fond, il a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'une demande de provision d'un montant de 188 000 euros qui a été rejetée par une ordonnance du 2 août 2024 dont M. C... relève régulièrement appel. Sur la demande de provision : 2. D'une part, aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant. 3. D'autre part, les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre, au titre des conséquences patrimoniales de l'atteinte à l'intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial, tels que des souffrances physiques ou morales, un préjudice esthétique ou d'agrément ou des troubles dans les conditions d'existence, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait. 4. M. C... soutient qu'eu égard à la date de consolidation de sa maladie professionnelle fixée au 31 mai 2019, sa demande indemnitaire préalable remise aux services postaux le 29 décembre 2023, ainsi qu'en atteste le justificatif du suivi de son courrier qu'il produit, a bien été formée avant l'expiration du délai de prescription, le 31 décembre 2023, alors même que le pli n'a été reçu par son destinataire que le 3 janvier 2024. Il s'en suit que l'exception de prescription doit être écartée, en l'état de l'instruction, contrairement à ce qu'a retenu le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier. 5. Toutefois, si le requérant sollicite l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire subi avant la consolidation qu'il évalue à la somme de 8000 euros et des souffrances endurées qu'il évalue à la somme de 5000 euros, il n'apporte aucun élément de nature à déterminer l'étendue de ces préjudices. S'il se prévaut d'un taux d'incapacité permanente partielle de 40%, il ne verse pas au dossier le rapport d'expertise établi par le docteur A..., le 13 janvier 2023, sur lequel s'est fondée la commission de réforme alors que le taux fixé auparavant n'était que de 15%. Par suite, en l'état de l'instruction seule présente un caractère non sérieusement contestable l'indemnisation de son déficit fonctionnel permanent sur la base de ce taux de 15%. Il sera fait une juste appréciation, eu égard à l'âge de 43 ans qu'avait M. C... à la date de consolidation, en lui allouant à ce titre une provision de 21 000 euros. 6. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance contestée, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de provision. Il y a lieu, par suite, d'annuler cette ordonnance et de condamner le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier à lui verser la somme de 21 000 euros à titre de provision. Sur les frais liés à l'instance : 7. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions du centre hospitalier régional universitaire de Montpellier dirigées contre M. C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Montpellier la somme de 1500 euros en application dudit article. O R D O N N E : Article 1er : L'ordonnance n° 2402590 du 2 août 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est annulée. Article 2 : Le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier est condamné à verser à M. C... une provision de 21 000 euros. Article 3 : Le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier versera à M. C... une somme de 1 500 euros de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté. Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C... et au centre hospitalier régional universitaire de Montpellier. Fait à Toulouse, le 30 avril 2025. La juge d'appel des référés, A. Geslan-Demaret La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. 2 N°24TL02206
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de PARIS, 7ème chambre, 29/04/2025, 23PA01745, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler les décisions du 3 et 13 novembre 2020 par lesquelles la ministre des armées a retiré son nom de la liste des candidats admis à l'examen professionnel de secrétaire administratif de classe supérieure au titre de l'année 2021 et a refusé de la nommer dans le grade de secrétaire administratif de classe supérieure au titre de l'année 2021 et d'enjoindre au ministre des armées de la nommer au grade de secrétaire administratif de classe supérieure au titre de l'année 2021 et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 10 000 euros au titre du préjudice moral qu'elle estime avoir subi. Par un jugement n° 2021514/5-4 du 24 février 2023, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé les décisions attaquées et enjoint au ministre des armées de nommer Mme A... au grade de secrétaire administratif de classe supérieure au titre de l'année 2021 avec reconstitution de sa carrière administrative et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la requête. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée les 25 avril 2023, le ministre des armées, doit être regardé comme demandant à la cour : 1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement du 24 février 2023 du tribunal administratif de Paris ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Paris. Il soutient que Mme A... ne remplit pas la seconde condition relative à l'ancienneté requise pour pouvoir concourir à l'examen professionnel d'accès au second grade de son corps ; ni les services accomplis par Mme A... en qualité de militaire ni le temps de service national actif ne peuvent être pris en considération. La requête a été communiquée à Mme A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code du service national ; - le décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 ; - l'arrêté du 7 août 2012 fixant les modalités d'organisation générale et la nature des épreuves des examens professionnels pour l'accès aux grades de secrétaire administratif de classe supérieure et de secrétaire administratif de classe exceptionnelle du ministère de la défense ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Laforêt, premier conseiller, - et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme C... A..., ancienne sous-officier du service de l'armée, a été intégrée à la fonction publique de l'Etat sur le fondement de l'article L. 4139-3 du code de la défense et, à ce titre, titularisée dans le corps des secrétaires administratifs de classe normale (SACN), à compter du 1er juillet 2019, au 9ème échelon du 1er grade de ce corps. Le 27 octobre 2020, elle a été admise à l'examen professionnel pour l'accès au grade de secrétaire administratif de classe supérieur (SACS) du ministère de la défense, soit le deuxième grade, au titre de l'année 2021. Toutefois, après examen de son dossier, par courriels des 3 et 13 novembre 2020, elle a été informée que sa nomination ne pourrait être prononcée. Par un jugement du 24 février 2020, le tribunal administratif de Paris a notamment, à la demande de Mme A..., annulé les décisions du 3 et 13 novembre 2020 et enjoint au ministre de nommer Mme A... au grade de secrétaire administratif de classe supérieure au titre de l'année 2021 avec reconstitution de sa carrière administrative. Le ministre des armées demande dans cette mesure l'annulation de ce jugement. Sur la légalité du refus du prononcé de la nomination de Mme A... : En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif : 2. Aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense : " Le militaire ou l'ancien militaire peut être nommé à un emploi réservé dans les conditions prévues au titre IV du livre II du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ". Aux termes de l'article L. 241-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Le recrutement par la voie des emplois dits réservés des personnes mentionnées au présent chapitre constitue une obligation nationale à laquelle concourent l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics qui leur sont rattachés et les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. / Les emplois non pourvus sont remis à la disposition des administrations et des collectivités publiques dans les conditions fixées à l'article L. 242-7 ". Ce dernier article dispose : " Lorsque, au poste à pourvoir, ne correspond aucun candidat inscrit sur liste d'aptitude, l'autorité administrative compétente de l'Etat remet l'emploi à la disposition de l'administration ou de l'établissement public hospitalier qui a déclaré le poste vacant. Ceux-ci ne peuvent le pourvoir qu'en satisfaisant à l'une des priorités suivantes (...) ". Aux termes de l'article R. 242-14-1 du même code : " En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire ou de l'ancien militaire mentionnés à l'article L. 241-2 est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emplois d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de sept ans pour l'ancienneté dans le corps ou cadre d'emplois de catégorie A et huit ans pour l'ancienneté dans le corps ou cadre d'emplois de catégorie B ". Ni les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense, ni aucune autre disposition législative ou règlementaire ne prévoit que lorsqu'un militaire est intégré dans la fonction publique selon la procédure prévue par l'article L. 4139-3, l'appréciation de la durée de service exigée pour la promotion à un grade supérieur dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil doit inclure les services qu'il a antérieurement accomplis en tant que militaire. 3. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 7 août 2012 fixant les modalités d'organisation générale et la nature des épreuves des examens professionnels pour l'accès aux grades de secrétaire administratif de classe supérieure et de secrétaire administratif de classe exceptionnelle du ministère de la défense : " Sont autorisés à prendre part aux épreuves des examens professionnels pour l'avancement au grade de secrétaire administratif de classe supérieure (...) les fonctionnaires appartenant au corps des secrétaires administratifs ou qui y sont détachés et qui remplissent respectivement, au plus tard le 31 décembre de l'année au titre de laquelle est établi le tableau d'avancement, les conditions fixées au 1° du I de l'article 25 du décret du 11 novembre 2009 susvisé pour l'accès à la classe supérieure (...) ". L'article 1er du décret du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat dispose que : " Les corps de fonctionnaires classés dans la catégorie B par leurs statuts particuliers et inscrits par eux en annexe au présent décret relèvent des dispositions de celui-ci (...) ", parmi lesquels figure le corps des secrétaires administratifs du ministère de la défense. En vertu de l'article 2 du même décret : " Chaque corps comprend trois grades ou assimilés : / les premier et deuxième grades comportent treize échelons ; / le troisième grade, grade le plus élevé, comporte onze échelons ". Aux termes du I de l'article 25 du même décret, dans sa version applicable au litige : " Peuvent être promus au deuxième grade de l'un des corps régis par le présent décret : / 1° Par la voie d'un examen professionnel, les fonctionnaires ayant au moins atteint le 4e échelon du premier grade et justifiant d'au moins trois années de services effectifs dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau ; (...) ". 4. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les agents appartenant au corps des secrétaires administratifs du ministère de la défense doivent, pour pouvoir être promus au deuxième grade de leur corps par la voie d'un examen professionnel, justifier d'au moins trois ans de services effectifs accomplis en qualité de fonctionnaire dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau. 5. La nomination de Mme A... a été refusée au motif qu'elle ne remplissait pas la condition d'ancienneté requise pour se présenter à l'examen professionnel. Il ressort des pièces du dossier qu'au 31 décembre 2021, Mme A... justifiait de 2 ans et six mois dans ses fonctions depuis son reclassement le 1er juillet 2019. L'état signalétique et des services de Mme A... précise qu'elle a accompli son service national du 1er octobre 1993 au 31 août 1995 dont une période, à compter du 1er août 1994 a été comptabilisée au titre d'un service actif initial et que la durée de ses services au titre de l'armée de terre, service national compris, s'élève à 25 ans et cinq mois au 28 février 2019. Il ressort également que Mme A... était au grade de soldat du 1er octobre 1993 au 1er avril 1994 puis caporal jusqu'au 1er août 1994 enfin caporal-chef pendant le reste de son service national. 6. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 63 du code du service national : " Le temps de service national actif est compté, dans la fonction publique, pour sa durée effective dans le calcul de l'ancienneté de service exigée pour l'avancement et pour la retraite ". Si Mme A... a effectué un service national, elle n'établit ni n'allègue que ce service peut être considéré comme un service effectif accompli en qualité de fonctionnaire dans un corps, cadre d'emplois ou emploi de catégorie B ou de même niveau de sorte qu'il ne peut être pris dans l'appréciation de la durée de service exigée pour la promotion à un grade supérieur dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil. Ainsi, c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur ce motif pour annuler les décisions attaquées. 7. Aucun autre moyen, dont la cour se trouverait saisie par l'effet dévolutif de l'appel, n'a été invoqué par Mme A... devant le tribunal administratif de Paris ou devant la cour. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1 et 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions litigieuses du 3 et 13 novembre 2020 et enjoint au ministre de nommer Mme A... au grade de secrétaire administratif de classe supérieure au titre de l'année 2021 avec reconstitution de sa carrière administrative. DECIDE : Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 24 février 2025 sont annulés. Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à Mme C... A.... Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient : - Mme Chevalier-Aubert, présidente de chambre, - Mme Hamon, présidente assesseure, - M. Laforêt, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025. Le rapporteur, E. Laforêt La présidente, V. Chevalier-Aubert La greffière, C. Buot La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision 2 N° 23PA01745
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de PARIS, 8ème chambre, 29/04/2025, 24PA00696, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 14 juin 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension de victime civile de guerre. Par un jugement n° 2125089/5-4 du 13 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 13 février 2024, M. A..., représenté par Me Bonnin, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 13 octobre 2023 du tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler la décision du 14 juin 2019 de la ministre des armées ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de lui attribuer une pension de victime civile de guerre sous astreinte de 200 euros par jour de retard, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient qu' - il remplit les conditions prévues par les articles L. 113-6 et L. 124-11 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre pour bénéficier d'une pension de victimes civiles de guerre dès lors que ces dispositions ne prévoient pas la condition qu'un fait de guerre doive être à l'origine des blessures et qu'il a subi de graves dommages physiques résultant d'un accident survenu en Algérie en 1958 provoqué par un véhicule de l'armée française conduit par un officier de l'armée française, constitutif d'un acte de violence en relation avec la guerre d'Algérie. Par un mémoire en défense enregistré le 29 août 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête Il soutient que : - les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ; - sa demande de pension de victime civile de guerre déposée le 30 octobre 2018 est tardive et, par suite, irrecevable. Par une décision du 14 décembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Larsonnier, - et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 21 août 1950 à Beni-Ouassine (Algérie), a présenté, le 30 octobre 2018, une demande de pension de victime civile de guerre. Par une décision du 14 juin 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande. Par un jugement du 13 octobre 2023, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article L. 113-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, résultant du I de l'article 49 de la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense : " Les personnes ayant subi en Algérie entre le 31 octobre 1954 et le 29 septembre 1962 des dommages physiques, du fait d'attentats ou de tout autre acte de violence en relation avec la guerre d'Algérie, bénéficient des pensions de victimes civiles de guerre. (...) ". Aux termes de l'article L. 124-11 du même code, dans sa version applicable au litige : " Pour l'application des dispositions de l'article L. 113-6 relatif à la réparation des dommages physiques subis en relation avec la guerre d'Algérie, ouvrent droit à pension les infirmités ou le décès résultant : / 1° De blessures reçues ou d'accidents subis du fait d'attentats ou de tout autre acte de violence en relation avec cette guerre ;(...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 124-20 du même code : " Il appartient aux postulants de faire la preuve de leurs droits à pension en établissant que l'infirmité invoquée a bien son origine dans une blessure ou dans une maladie causée par l'un des faits prévus aux sections 1 et 2 du présent chapitre ". 3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à la personne qui s'estime victime civile de guerre de faire la preuve, par tout moyen, de ses droits à pension en établissant notamment que les infirmités qu'elle invoque ont leur origine dans une blessure ou une maladie causée par l'un des faits de guerre énoncés aux articles L. 124-1 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 4. Il résulte de l'instruction, notamment du courrier du centre administratif de la gendarmerie nationale du 11 juin 1992, de l'attestation non datée de M. D... E..., qui, à la date des faits, exerçait les fonctions de secrétaire général de la commune de Beni-Ouassine, et de l'attestation du 15 février 1992 de M. B..., témoin de l'accident, que M. A..., alors âgé de sept ans, a été renversé par un véhicule militaire appartenant à l'armée française et conduit par un lieutenant rattaché à la section administrative spécialisée de Beni-Ouassine et que ce véhicule militaire, qui se rendait à Beni-Ouassine, transportait des céréales. Le lieutenant conduisant le camion participait ainsi à une mission d'assistance à la population, mission que les sections administratives spécialisées mises en place en Algérie exerçaient concomitamment à leurs missions administrative et militaire. Dans ces conditions, et même si l'accident de circulation à la suite duquel M. A... a été grièvement blessé a été causé par un véhicule militaire de l'armée française et s'est produit à une période où les actions violentes se multipliaient en Algérie, cet accident ne peut être regardé comme un acte de violence en relation avec la guerre d'Algérie au sens des dispositions de l'article L. 113-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. 5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande présentée par M. A... le 30 octobre 2018, que ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées. D É C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 31 mars 2025, à laquelle siégeaient : - Mme Menasseyre, présidente de chambre, - Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure, - Mme Larsonnier, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025. La rapporteure, V. Larsonnier La présidente, A. Menasseyre La greffière, N. Couty La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 24PA00696 2
Cours administrative d'appel
Paris
CAA de LYON, 3ème chambre, 12/03/2025, 23LY02673, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 2 mars 2021 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Rives a refusé de reconnaître sa pathologie de l'épaule droite comme maladie professionnelle, et d'enjoindre au centre hospitalier de Rives de procéder à cette reconnaissance. Par un jugement n° 2102668 du 23 mai 2023, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 2 mars 2021 et enjoint au centre hospitalier de Rives de reconnaître la pathologie de l'épaule droite de Mme A... comme maladie professionnelle, de reconstituer sa carrière et de lui verser le rappel de plein traitement auquel elle a droit à compter du 14 janvier 2020. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 17 août 2023, et un mémoire non communiqué, enregistré le 13 janvier 2025, le centre hospitalier de Rives, représenté par Me Cayla-Destrem, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 mai 2023 ; 2°) de rejeter la demande de Mme A... ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que la pathologie de Mme A... n'est pas imputable au service, dès lors que celle-ci s'est manifestée alors qu'elle était en arrêt de travail depuis un an, qu'elle est débutante et que les caractéristiques médicales pouvant aboutir à la reconnaissance d'une maladie professionnelle ne sont pas remplies. Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2024, Mme A..., représentée par Me Py, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Rives au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 23 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 janvier 2025. Une note en délibéré, enregistrée le 18 février 2025, a été présentée pour Mme A.... Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique, - et les observations de Me Duca, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., agent de service hospitalier durant trente-cinq ans, employée par le centre hospitalier de Rives, a été placée en congé de maladie du 10 janvier 2019 au 9 janvier 2020 en raison d'une arthrodèse " L4-S1 ". Elle a ensuite été placée en disponibilité d'office pour raisons de santé à compter du 10 janvier 2020. Le 6 février 2020, elle a demandé l'octroi d'un congé de longue maladie, au titre duquel la commission de réforme réunie le 2 février 2021 a émis un avis défavorable. Par une décision du 2 mars 2021, le centre hospitalier de Rives a rejeté la demande de reconnaissance de maladie professionnelle de Mme A... au titre de la pathologie de l'épaule dont elle souffre. Le centre hospitalier relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision et lui a enjoint de reconnaître la pathologie de l'épaule droite de Mme A... comme maladie professionnelle, de reconstituer sa carrière et de lui verser le rappel de plein traitement auquel elle avait droit à compter du 14 janvier 2020. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision du 4 février 2020, issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 : " (...) IV. - Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. (...) ". 3. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions des lois du 11 janvier 1984, du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 régissant respectivement la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : " à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4°, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée. ". L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 mai 2020 et, qu'en l'espèce, la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de la requérante, déclarée en 2019, qui a été demandée en février 2020, relèvent ainsi du droit antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai, et selon les sanctions, prévus en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / (...) ". Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 6. Pour annuler la décision en litige, le tribunal a considéré que Mme A... souffrait d'une perforation de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite de 3 cm de diamètre intéressant le supraépineux, établie par l'arthroscanner réalisé le 14 janvier 2020. Il a ensuite retenu que l'expertise réalisée le 5 mars 2020 par le médecin généraliste, qui conclut à l'existence d'une tendinopathie débutante d'origine dégénérative ainsi qu'en attesterait un début de calcification, et à l'absence de lien direct avec l'activité professionnelle de Mme A..., était contredite par le certificat médical du 13 mai 2020 du médecin spécialiste en rhumatologie se prononçant en faveur de la reconnaissance de la maladie professionnelle et que le médecin de prévention, par un certificat médical du 24 juin 2020, a attesté que Mme A... réalisait des travaux comportant des mouvements ou un maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour (aide au nursing, nettoyage, essuyage...) ou avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant plus d'une heure par jour (nettoyage des vitres, miroirs, potence et éclairage des lits, étagères des placards en salle de pause...), travaux qui correspondent à ceux identifiés par le tableau n° 57 A des maladies professionnelles annexé au code de la sécurité sociale dans le cadre d'une rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM ou arthroscanner. Les premiers juges en ont ensuite conclu que, quand bien même Mme A... ne pouvait pas se prévaloir du tableau précité, le centre hospitalier ne contestait pas la nature des travaux effectués par elle, lesquels devaient être regardés, en l'espèce, comme étant directement à l'origine de la pathologie de l'intéressée. 7. Toutefois, d'une part, ainsi que le centre hospitalier de Rives le soutient, la pathologie de Mme A... s'est développée au cours des mois d'octobre ou novembre 2019, son médecin traitant ayant rédigé un certificat médical relatif à cette maladie le 5 décembre 2019. Sur ce point, le seul certificat du médecin rhumatologue du 25 octobre 2021 expliquant que les douleurs de Mme A... se sont aggravées en novembre 2018 n'est corroboré par aucune autre pièce versée au dossier permettant d'établir la survenance des douleurs dont l'intéressée se serait plainte avant novembre 2019 ni même le suivi opéré par ce spécialiste avant cette même année, la première attestation de celui-ci étant datée du 23 janvier 2020. Le compte-rendu d'échographie de l'épaule droite effectué le 24 février 2010, produit en appel, qui se borne à conclure à l'absence de rupture de coiffe et à une " probable périarthrite à un stade de tendinite débutante ", et ne retient pas le diagnostic de la maladie de Mme A... déclarée au cours du dernier trimestre 2019, ne suffit pas davantage à établir que ces douleurs se seraient déclarées avant la cessation des fonctions de Mme A... en janvier 2019. Ainsi, au moment de la manifestation de cette tendinopathie, dont le caractère débutant est d'ailleurs relevé, Mme A... était en congé de maladie depuis près de onze mois au titre d'une autre pathologie et n'exerçait pas ses fonctions. 8. D'autre part, le centre hospitalier de Rives fait encore valoir que Mme A... a occupé à partir du mois d'octobre 2013 un poste de nuit qui n'implique pas d'exercer les tâches que le médecin du travail a décrites, de " nettoyage des vitres, miroirs, potence et éclairage des lits, étagères des placards en salle de pause " ni d'aide au nursing, de nettoyage et d'essuyage pendant au moins deux heures par nuit avec un angle supérieur ou égal à 60°. Sur ce point, les attestations d'une collègue aide-soignante de la requérante des 20 et 21 octobre 2023, qui n'ont au demeurant pas été rédigées dans les formes requises, décrivant les tâches qui incombaient à Mme A... jusqu'en 2016 seulement, consistant en l'entretien des locaux et l'assistance dans les tâches d'aide-soignante, ne permettent pas d'établir que les travaux effectués par Mme A... relèveraient de ceux décrits par le médecin du travail. 9. Il résulte des deux points précédent, alors que le médecin expert a relevé que la pathologie de la rupture de coiffe n'est pas imputable au service dans la mesure où l'arthroscanner " montre un conflit sous acromial net, c'est à dire des lésions dégénératives arthrosiques expliquant la fissuration du susépineux ", et que la commission de réforme a émis un avis défavorable en estimant qu'il ne peut être reconnu de lien direct entre la symptomatologie de l'agent et son activité professionnelle, que la condition de lien direct entre la pathologie dont souffre Mme A... et l'exercice de ses fonctions, au sens des dispositions rappelées au point 4, n'est pas remplie. Il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a retenu qu'en refusant, par la décision attaquée du 2 mars 2021, de reconnaître la pathologie de Mme A... comme maladie professionnelle, le centre hospitalier de Rives a commis une erreur d'appréciation. 10. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A... à l'encontre de la décision contestée. 11. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, la commission de réforme comprend " (...) 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 16 du même arrêté : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. / Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". Il résulte de ces dispositions que, dans les cas où il est manifeste, au vu des éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas lorsque les membres de la commission n'avaient pas déjà été éclairés par un médecin spécialiste, l'absence d'un tel spécialiste doit être regardée comme privant l'intéressé d'une garantie et comme entachant la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 12. Si Mme A... soutient que la décision de refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie serait entachée d'un vice de procédure en ce qu'aucun médecin spécialiste de sa pathologie n'était présent à la séance de la commission de réforme, il ressort des pièces du dossier que les membres de cette commission disposaient d'un rapport d'expertise excluant l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A..., et de deux rapports du spécialiste en rhumatologie susmentionné des 23 janvier 2020 et 13 mai 2020, ce dernier étant rédigé en réponse au rapport d'expertise. Par suite, il n'était pas manifeste que la présence d'un médecin spécialiste aurait été nécessaire pour éclairer l'examen de la situation de l'intéressée. Le moyen tiré du vice de procédure doit donc être écarté. 13. En deuxième lieu, il ne résulte ni des termes de la décision en litige ni des pièces du dossier que le directeur du centre hospitalier de Rives se serait cru lié par l'avis de la commission de réforme dès lors que celui-ci, en indiquant suivre cet avis, doit être regardé comme s'en étant approprié les termes. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être également écarté. 14. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Rives est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 2 mars 2021 par laquelle son directeur a refusé de reconnaître la pathologie de l'épaule droite de Mme A... comme une maladie professionnelle. Sur les frais liés au litige : 15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme A... présentées sur leur fondement et dirigées contre le centre hospitalier de Rives, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions formulées par le centre hospitalier de Rives sur le fondement des mêmes dispositions. D É C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 mai 2023 est annulé. Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Grenoble et ses conclusions d'appel sont rejetées. Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier de Rives présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier de Rives. Délibéré après l'audience du 18 février 2025 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025. La rapporteure, Emilie FelmyLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Péroline Lanoy La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23LY02673
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de LYON, 3ème chambre, 12/03/2025, 23LY02456, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Par deux requêtes distinctes, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une part, d'annuler la décision du 4 février 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais a décidé de la placer en congé de maladie ordinaire à compter du 1er novembre 2019 et d'enjoindre au directeur de ce centre de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie lombaire, d'autre part, d'annuler la décision du 14 décembre 2020, par laquelle le directeur du même centre hospitalier a décidé de la placer en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020. Par un jugement n° 2001358-2100288 du 25 mai 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour Par une requête, enregistrée le 25 juillet 2023, et un mémoire en réplique qui n'a pas été communiqué, enregistré le 17 décembre 2024, Mme A..., représentée par Me Tachon, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 25 mai 2023 ; 2°) d'annuler les décisions des 4 février 2020 et 1er novembre 2020 du directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais ; 3°) d'ordonner une expertise médicale ; 4°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais de la placer en congé de longue durée pour maladie imputable au service à compter du 1er novembre 2019 ; 5°) de mettre à la charge du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais une somme de 4 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - sa maladie doit être prise en charge au titre de la maladie imputable au service et l'administration a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation ; - son état s'est gravement détérioré en 2020, il n'était donc pas consolidé à la date retenue ; - son état anxio-dépressif constitue une " maladie mentale " au sens des dispositions de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - elle n'a pas été informée de la saisine du comité médical ni de ses droits préalablement à la décision de mise en disponibilité d'office ; - dès lors qu'elle ne pouvait être placée en congé de maladie non imputable au service, la décision la plaçant en disponibilité d'office est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2024, le centre hospitalier Cœur du Bourbonnais, représenté par la SELAS Seban Auvergne, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Par une ordonnance du 3 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 décembre 2024. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général de la fonction publique ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - l'ordonnance du 19 janvier 2017 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 2020-566 du 13 mai 2020 ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure, - les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique, - les observations de Me Tachon, représentant Mme A..., et celles de Me Bardy, représentant le centre hospitalier Cœur du Bourbonnais. Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., aide-soignante au centre hospitalier Cœur du Bourbonnais depuis 2010, a été titularisée dans ces fonctions en 2012. A la suite d'une dénonciation de faits de violence prétendus par l'un de ses collègues, qui a donné lieu à des poursuites judiciaires au terme desquelles Mme A... a été relaxée par un jugement du tribunal de grande instance de Cusset le 26 septembre 2017, celle-ci a été placée en congé de maladie imputable au service à compter du 27 mars 2017 et jusqu'au 31 octobre 2019 par deux décisions successives des 18 juin et 20 septembre 2019. A la suite de l'avis de la commission de réforme hospitalière de l'Allier du 22 janvier 2020, son état a été considéré comme consolidé à compter du 30 octobre 2019, et elle a été placée en congé de maladie ordinaire à partir du 1er novembre 2019 par une décision du 4 février 2020 du directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais. Par une seconde décision du 14 décembre 2020, elle a été placée en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 4 février 2020 en tant que le directeur du centre hospitalier a décidé de ne plus prendre en charge les soins au titre de sa maladie à compter du 1er novembre 2019 et de ne pas la placer en congé de maladie imputable au service à compter de cette dernière date, et de la décision du 14 décembre 2020. Sur le bien-fondé du jugement : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision du 4 février 2020, issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 : " (...) IV. -Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. (...) ". 3. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions des lois du 11 janvier 1984, du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 régissant respectivement la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : "à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée. ". L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 mai 2020 et, qu'en l'espèce, la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de la requérante, déclarée le 27 mars 2017, relèvent ainsi du droit antérieur à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai, et selon les sanctions, prévus en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / (...) / 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. / (...) ". Les droits des agents publics en matière d'accident de service et de maladie professionnelle sont constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. 5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. En outre, en cas de maladie imputable au service, le fonctionnaire a droit au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie, y compris, le cas échéant, s'ils sont exposés postérieurement à la date de consolidation constatée par l'autorité compétente. La date de consolidation correspond au moment où les lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent, permettant d'apprécier un taux d'incapacité permanente partielle qui a résulté d'une pathologie ou d'un accident. La consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cette pathologie ou cet accident. 6. D'une part, l'avis de la commission de réforme hospitalière de l'Allier du 22 janvier 2020 précise que " la date de la consolidation de la maladie imputable au service du 27/03/2017 est fixée au 30/10/2019 sans IPP. Il n'y a pas nécessité de soins post-consolidation. L'agent est inapte à son poste dans l'établissement ". Il ressort en outre des conclusions du rapport d'examen médical effectué par l'expert en psychiatrie à la demande du comité médical départemental de l'Allier, du 25 novembre 2019, que ce praticien a considéré que Mme A... souffrait d'une névropathie secondaire à un stress post-traumatique professionnel, et que son état était consolidé à la date du 8 juillet 2019. Contrairement à ce que le tribunal a retenu, la consolidation de l'état de santé de Mme A..., qui résulte seulement du constat de l'absence d'aggravation de cet état de santé à compter de la date déterminée, impliquant que les préjudices résultant de la maladie sont susceptibles d'être, à cette date, évalués et réparés y compris pour l'avenir, n'implique ni la disparition du lien entre la maladie et le service, ni le refus de reconnaissance de son imputabilité au service. Il ressort en revanche de ces mêmes conclusions expertales que la névropathie exprimée par Mme A... est liée au stress que celle-ci a subi dans le contexte professionnel. Ainsi, le lien direct entre la maladie et le service doit être retenu, l'administration ne faisant valoir par ailleurs aucune autre circonstance de nature à détacher la maladie du service. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens invoqués à l'encontre de la décision du 4 février 2020 ni d'ordonner une expertise, Mme A... est fondée à soutenir que le directeur du centre hospitalier a commis une erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité de sa pathologie au service à compter du 1er novembre 2019. 7. D'autre part, si Mme A... soutient que l'administration a commis une erreur d'appréciation de la date de consolidation de son état de santé, elle n'apporte au soutien de cette contestation aucun document ni élément, notamment de nature médicale, permettant d'apprécier l'erreur que le centre hospitalier aurait commise, alors qu'il résulte de l'avis de la commission de réforme et des conclusions de l'expert médical que cette date a été fixée au plus tard le 30 octobre 2019. La circonstance que, postérieurement à la décision attaquée, Mme A... a été admise à l'hôpital au cours des mois de mars et avril 2020 en raison d'une dégradation de son état, ne saurait révéler une erreur d'appréciation de la situation de celle-ci à la date de la décision attaquée. 8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière : " La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus au 2°) ...de l'article 41 (...) ". Aux termes de l'article 17 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction issue du décret du 27 novembre 2006, en vigueur jusqu'à l'intervention du décret du 5 octobre 2011 : " (...) Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service qu'après l'avis favorable du comité médical. / Si l'avis du comité médical est défavorable, le fonctionnaire est soit mis en disponibilité, soit, s'il le demande, reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme des agents des collectivités locales. 9. Il résulte des motifs retenus au point 6 que la décision refusant de reconnaître l'imputabilité de la maladie de Mme A... au service après la date de consolidation fixée au 30 octobre 2019 devant être annulée du fait de l'erreur d'appréciation commise par l'administration, la décision prononçant sa disponibilité d'office à compter du 1er novembre 2020 est, par voie de conséquence et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens invoqués à l'encontre de cette décision, également entachée d'erreur d'appréciation. 10. En troisième lieu, si la requérante soutient que l'administration a commis une erreur en ne retenant aucun taux d'incapacité permanente partielle l'affectant, elle se borne à évoquer la carence de l'expert sur ce point et n'articule aucun moyen au soutien de cette décision. 11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que la décision du 4 février 2020, en tant qu'elle décide de la placer en congé de maladie ordinaire et oppose un refus de prise en charge des soins au titre de sa maladie à compter du 1er novembre 2019 ainsi que celle prononçant sa disponibilité d'office à compter du 1er novembre 2020, sont entachées d'illégalité et doivent être annulées, et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dans cette mesure. Sur les conclusions à fin d'injonction : 12. L'annulation, par le présent arrêt, de la décision du 4 février 2020 par laquelle le directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais a décidé de placer Mme A... en congé de maladie ordinaire à compter du 1er novembre 2019 et de la décision du 14 décembre 2020 par laquelle cette même autorité a décidé de la placer en disponibilité d'office pour une durée de six mois à compter du 1er novembre 2020, implique nécessairement qu'il soit enjoint au directeur du centre hospitalier de placer la requérante en congé de maladie imputable au service à compter du 1er novembre 2019 et jusqu'à la date qui sera déterminée, le cas échéant, après avis de la commission départementale de réforme de l'Allier. Sur les frais liés au litige : 13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais présentées sur leur fondement et dirigées contre la requérante, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions formulées par cette dernière sur le fondement des mêmes dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais une somme de 2 000 euros. D É C I D E : Article 1er : La décision du directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais du 4 février 2020, en tant qu'elle oppose un refus de prise en charge des soins de Mme A... au titre de sa maladie à compter du 1er novembre 2019 et son placement en congé de maladie imputable au service à compter de cette dernière date, ainsi que la décision de cette même autorité du 14 décembre 2020 sont annulées. Article 2 : Il est enjoint au directeur du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de Mme A... postérieurement à la date de consolidation de son état de santé le 30 octobre 2019, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 25 mai 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2. Article 4 : Le centre hospitalier Cœur du Bourbonnais versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions du centre hospitalier Cœur du Bourbonnais présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier Cœur du Bourbonnais. Délibéré après l'audience du 18 février 2025 à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025. La rapporteure, Emilie FelmyLe président, Jean-Yves TallecLa greffière, Péroline Lanoy La République mande et ordonne au préfet de l'Allier en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière, 2 N° 23LY02456
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 18/03/2025, 24NT01440, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 13 juin 2022 par laquelle la rectrice de la région académique Normandie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie pour les périodes du 7 au 22 novembre 2019, du 3 au 30 novembre 2020, du 1er au 25 juin 2021 et du 7 mars au 31 août 2022. Par un jugement n°2201553 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 16 mai 2024 et un mémoire enregistré le 19 février 2025 qui n'a pas été communiqué, Mme B..., représentée par Me Cavelier, demande à la cour : 1°) l'annulation du jugement du 15 mars 2024 du tribunal administratif de Caen ; 2°) l'annulation de la décision du 13 juin 2022 par laquelle la rectrice de la région académique Normandie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie pour les périodes du 7 au 22 novembre 2019, du 3 au 30 novembre 2020, du 1er au 25 juin 2021 et du 7 mars au 31 août 2022 ; 3°) d'enjoindre à la rectrice de la région académique Normandie de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision en litige est insuffisamment motivée ; - c'est à tort que le tribunal a estimé, en se fondant sur deux enquêtes administratives, qu'elle aurait eu un rôle majeur dans le contexte conflictuel à l'origine de son syndrome anxiodépressif : * l'enquête administrative initiale était partiale et mensongère ; * l'enquête administrative complémentaire a confirmé les conclusions de la première et aucun fait dénoncé dans l'enquête initiale n'a finalement été vérifié ; * elles sont critiquables sur la méthodologie, sur les accusations non vérifiées relevées à son encontre et au regard du choix délibéré des parents d'élèves ayant témoigné ; * les accusations de maltraitances venaient de ses collègues et il ne saurait lui être reproché de se défendre face à de telles accusations ; - elle est entachée d'un détournement de pouvoir. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2025, la rectrice de la région académique Normandie conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - le code général de la fonction publique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Pons, - les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique, - et les observations de Me Cavelier pour Mme B.... Une note en délibéré, enregistrée le 03 mars 2025, a été produite pour Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., professeure des écoles depuis 2002, a été affectée au mois de septembre 2015 à l'école maternelle de C..., qui comporte trois classes et où elle était chargée de la classe moyenne section/grande section. Elle a été placée en congé maladie du 7 au 22 novembre 2019, du 3 au 30 novembre 2020, du 8 mars au 22 avril 2021, du 1er au 25 juin 2021 et du 7 mars au 31 août 2022. Par une déclaration du 23 avril 2021, l'intéressée a demandé la reconnaissance comme maladie professionnelle du syndrome anxiodépressif dont elle est victime et qui a justifié ses arrêts de travail. Par une décision du 13 juin 2022, la rectrice de la région académique Normandie a rejeté la demande d'imputabilité au service de la maladie de la requérante. Mme B... a alors demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation de cette décision. Par un jugement du 15 mars 2024, dont Mme B... relève appel, le tribunal a rejeté sa demande. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen selon lequel la décision du 13 juin 2022 est insuffisamment motivée, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal dans les points 3 à 6 du jugement attaqué. 3. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 822-21 du code général de la fonction publique : " Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à : / 3° Une maladie contractée en service telle qu'elle est définie à l'article L. 822-20 ". Aux termes de l'article L. 822-20 du même code : " (...) Peut (...) être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". ". 4. D'autre part, aux termes de l'article 47-8 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, alors en vigueur : " Le taux d'incapacité permanente servant de seuil pour l'application du troisième alinéa du même IV est celui prévu à l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale. / Ce taux correspond à l'incapacité que la maladie est susceptible d'entraîner... Il est déterminé par le conseil médical compte tenu du barème indicatif d'invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ". Aux termes de l'article R. 461-8 du code de la sécurité sociale : " Le taux d'incapacité mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 est fixé à 25 % ". 5. Le syndrome anxiodépressif réactionnel à l'origine des arrêts de travail prescrits à Mme B... n'est pas mentionné par les tableaux de maladies professionnelles mentionnées aux articles L.461-1 et suivants du code de la sécurité sociale. Par suite, pour être reconnu imputable au service, il doit être susceptible d'entraîner un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) d'au moins 25% et présenter un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 6. Il ressort des pièces du dossier que le climat relationnel au sein de l'équipe pédagogique de l'école maternelle où était affectée Mme B... s'est progressivement dégradé au cours de l'année scolaire 2019-2020 et a conduit à l'organisation de réunions entre les enseignants et leur hiérarchie. Une première enquête administrative a été menée le 7 septembre 2020 par l'inspecteur départemental de la circonscription et par la déléguée aux ressources humaines de la direction académique des services de l'éducation nationale (DASEN) du Calvados puis, compte tenu d'éléments nouveaux portés à la connaissance de l'adjoint au DASEN, un complément d'enquête confié à deux inspecteurs ne relevant pas de la circonscription de C... a été organisé les 7 et 8 décembre 2020. Ainsi, à compter de l'année 2019, Mme B... a été confrontée à un contexte professionnel très tendu, marqué par des relations conflictuelles avec les autres enseignantes de l'établissement, qui se sont notamment traduites par une remise en cause de ses méthodes et pratiques professionnelles et ont conduit à l'engagement d'une procédure administrative au sein de l'établissement. Mme B... a produit un rapport d'expertise établi par un médecin psychiatre le 5 novembre 2021 qui indique qu'elle " a présenté un état anxiodépressif réactionnel sévère en lien avec le service ", que "la maladie est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions ". Le médecin psychiatre a également évalué le taux d'incapacité partielle susceptible d'être causé par la maladie à 25%. Ce rapport d'expertise est corroboré par un avis du médecin de prévention du 24 février 2022 qui relève que Mme B... ne présente aucun antécédent médical particulier notamment psychiatrique, qu'elle bénéficie d'un bon soutien familial, qu'au cours des consultations, son état de santé a été jugé " fortement dégradé" et que celui-ci " paraît essentiellement et directement en lien avec l'exercice de ses fonctions ", " en l'absence d'état antérieur et d'évènement de vie personnelle signalés ". Enfin, le 30 mars 2022, la commission de réforme a rendu un avis favorable à la reconnaissance de la maladie contractée dans l'exercice des fonctions. Dans ces conditions, eu égard à l'absence d'état anxiodépressif antérieur de l'intéressée, à la situation conflictuelle qu'elle a connue au sein de l'établissement, et en l'état des avis médicaux étayant l'existence d'un lien direct entre l'activité professionnelle et le syndrome anxiodépressif dont elle est atteinte, la pathologie dont souffre Mme B... peut être regardée comme présentant un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. 7. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un compte rendu de la réunion du 20 novembre 2020 qui s'est tenue à la suite d'une alerte du maire de C... sur le contexte professionnel dégradé au sein de l'école maternelle de C..., à l'initiative de l'adjoint au directeur académique des services de l'éducation nationale chargé du premier degré, que : " Mme B... fait cavalier seul et fait en sorte que toute situation se termine en blocage (...) ", selon l'adjoint au maire de la commune. Une parente d'élève confirme : " (...) il y a moins de tension lorsque Mme B... est absente. L'ambiance est plus détendue, son absence soulage les autres ". Les relations difficiles de l'intéressée avec trois enseignantes de l'établissement ont contribué au climat général de tension au sein de l'école maternelle et plusieurs signalements portés sur le registre santé et sécurité au travail évoquent des mises en cause répétées concernant le travail de la directrice de l'école maternelle : " de la part d'une enseignante de l'école ". Si l'intéressée produit des attestations favorables établies par l'ancienne directrice de l'établissement, deux anciennes collègues et des parents d'élèves, il ressort du rapport de l'enquête administrative conduite le 7 septembre 2020 par l'inspecteur départemental de la circonscription et par la déléguée aux ressources humaines de la direction académique des services de l'éducation nationale du Calvados ainsi que du complément d'enquête confié à deux inspecteurs ne relevant pas de la circonscription de C... les 7 et 8 décembre 2020, lesquels ont été établis sur la base des témoignages des représentants de parents d'élèves, que Mme B... a, par son comportement, eu un rôle déterminant dans le contexte conflictuel qu'a connu l'établissement, notamment dans les tensions constatées avec certains parents d'élèves, le rapport complémentaire relevant que " la majorité des témoignages indique que Mme B... est le dénominateur commun " des difficultés constatées. Enfin, contrairement à ce qui est allégué par la requérante, aucun élément au dossier ne permet d'affirmer que les enquêtes administratives diligentées par l'administration auraient été partiales et mensongères. Dans ces conditions, si le syndrome anxiodépressif de Mme B... présente un lien direct avec son activité professionnelle, son comportement a participé à la création puis au maintien de tensions prolongées au sein de l'établissement dans lequel elle travaillait et a joué un rôle déterminant dans les conditions de travail dégradées dont elle a été victime à l'origine du syndrome anxiodépressif dont elle souffre, constitutif d'un fait personnel de nature à détacher la maladie du service. 8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Une copie en sera adressée à la rectrice de la région académique Normandie. Délibéré après l'audience du 28 février 2025, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. Pons, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2025. Le rapporteur, F. PONS Le président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 24NT01440
Cours administrative d'appel
Nantes