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CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 30/05/2023, 22MA02339, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision implicite par laquelle la commune de Gardanne a rejeté son recours du 17 octobre 2019 tendant au retrait de plusieurs arrêtés la plaçant en position de congé de maladie ordinaire pour la période du 27 novembre 2015 au 25 août 2016 ainsi qu'à l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de ces arrêtés, et, d'autre part, de condamner la commune de Gardanne à lui verser la somme de 6 188,50 euros en réparation du préjudice financier résultant de son placement en congé de maladie ordinaire à demi-traitement pendant la période concernée par les arrêtés dont l'annulation est demandée, ainsi que la somme de 18 051,31 euros au titre du préjudice financier qu'elle estime avoir subi à la suite de la reconstitution erronée de sa carrière pour la période du 1er janvier 2012 au 1er avril 2019, et enfin, la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence. Par un jugement n° 1911099 du 20 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les demandes de Mme B.... Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 23 août 2022, Mme B..., représentée par Me Hequet, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1911099 du 20 juin 2022 ainsi que la décision implicite de rejet née le 22 décembre 2019 du silence gardé pendant deux mois par la commune de Gardanne sur ses demandes formulées par courrier du 17 octobre 2019, réceptionné le 22 octobre 2019 ; 2°) d'annuler les arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016 par lesquels la commune de Gardanne a décidé de la placer en congés de maladie ordinaire rémunérés à demi-traitement ; 3°) de condamner la commune de Gardanne à lui verser la somme de 6 188,50 euros en réparation du préjudice financier qu'elle estime avoir subi du fait de son placement en congé de maladie ordinaire à demi-traitement pendant la période concernée par les arrêtés dont l'annulation est demandée, ainsi que la somme de 18 051,31 euros au titre du préjudice financier qu'elle estime avoir également subi à la suite de la reconstitution erronée de sa carrière pour la période du 1er janvier 2012 au 1er avril 2019, soit une somme d'un montant global de 24 239,81 euros, et la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence, l'ensemble de ces sommes devant être assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable avec capitalisation ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Gardanne la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la reconnaissance, par arrêté du 21 février 2019, de l'imputabilité au service de sa maladie pour la période du 31 mars 2008 au 31 décembre 2011, a pour conséquence de lui ouvrir droit à un plein traitement pour tous les arrêts maladie postérieurs à cette date dès lors que la pathologie qui est à l'origine de ces congés de maladie est la même que celle résultant de conflits relationnels dont elle a été victime dans son milieu professionnel et qui a été reconnue imputable au service ; il en est résulté un préjudice financier qu'il convient de fixer à 6 188,50 euros ; - la reconstitution de carrière opérée par la commune de Gardanne par arrêté du 23 juin 2020 met en évidence une perte de revenus résultant d'erreurs commises dans le cadre de cette reconstitution ; il en est résulté un préjudice financier qu'il convient de fixer à 18 051,31 euros ; - la situation dans laquelle l'a placée l'administration du fait de sa rémunération à demi-traitement et de l'absence de revalorisation de son traitement lorsqu'elle a repris son activité professionnelle est à l'origine de la dégradation de ses conditions d'existence et d'un préjudice moral qu'il y a lieu d'indemniser à hauteur d'un montant de 10 000 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2023, la commune de Gardanne, représentée par Me Sindres, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Un courrier du 28 février 2023, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code. Par une ordonnance du 17 mars 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Un mémoire, présenté pour la commune de Gardanne par Me Sindres, enregistré le 14 mai 2023 après clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative ; Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Martin, - les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public, - et les observations de Me Chavalarias, substituant Me Sindres, représentant la commune de Gardanne. Considérant ce qui suit : 1. Agent administratif recrutée en 1994 par la commune de Gardanne et titularisée au cours de l'année 1997, Mme B... a été placée en arrêt de travail à compter du 31 mars 2008. Elle a demandé la reconnaissance d'imputabilité au service de sa pathologie, plusieurs fois rejetée par son employeur. Par un arrêt n° 15MA02355 du 4 décembre 2018, la Cour, statuant sur une requête indemnitaire portant sur la période du 26 juin 2008 au 31 décembre 2011, a considéré que les troubles psychiques de la requérante étaient imputables à ses difficultés professionnelles depuis le 31 mars 2008 et a condamné la commune à lui verser une somme correspondant à son préjudice financier du fait de son placement en congé de maladie à demi-traitement pour cette période. A la suite de cet arrêt, le maire de la commune de Gardanne a finalement reconnu l'imputabilité au service de la maladie de Mme B..., par un arrêté du 21 février 2019, par lequel l'intéressée a en outre été placée en position de congé de maladie imputable au service, lui ouvrant droit au bénéfice d'un plein traitement, pour la période du 31 mars 2008 au 31 décembre 2011. Mais entre-temps, alors que Mme B... avait repris le travail à compter du 1er janvier 2012, pendant plus d'un an et demi, elle a de nouveau été placée à plusieurs reprises en congé de maladie entre le 16 octobre 2014 et le 25 août 2016. A cette occasion, la commune de Gardanne l'a placée en position de congé de maladie ordinaire et l'a rémunérée à demi-traitement par des arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016, pour l'ensemble des arrêts de travail compris entre le 27 novembre 2015 et le 25 août 2016. 2. Estimant que tous les arrêts de travail compris dans la période du 16 novembre 2015 au 25 août 2016 étaient justifiés par la même maladie que celle initialement reconnue imputable au service pour la période du 31 mars 2008 au 31 décembre 2011, Mme B... a saisi le maire de la commune de Gardanne, par courrier du 17 octobre 2019 réceptionné le 22 octobre 2019, de demandes tendant, pour la première d'entre elles, à ce que soient retirés les arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016, et, pour la seconde d'entre elles, à ce que la commune lui verse la somme globale de 24 239,81 euros en réparation de ses préjudices financiers et la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence. Une décision implicite de rejet de ces demandes est née le 22 décembre 2019 par l'effet du silence gardé par la commune de Gardanne pendant un délai de deux mois. 3. Par un jugement du 20 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille, d'une part, a fait droit à la fin de non-recevoir opposée par la commune de Gardanne en rejetant, du fait de leur irrecevabilité, les conclusions indemnitaires de Mme B... portant sur la réparation, à hauteur d'un montant de 18 051,31 euros, du préjudice financier résultant des erreurs commises par la commune dans la reconstitution de sa carrière, réalisée par arrêté du 23 juin 2020, pour la période du 1er janvier 2012 au 1er avril 2019, d'autre part, a rejeté au fond les conclusions de l'intéressée tendant à l'annulation des arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016, et, enfin, a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires au motif qu'aucune faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Gardanne n'avait été commise. Mme B... relève appel de ce jugement. Sur les conclusions aux fins d'annulation : 4. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) ". 5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 6. Il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement du rapport d'expertise médicale du 4 octobre 2018, établi postérieurement aux périodes de congés maladie en litige, que Mme B... souffre d'un état dépressif majeur en relation directe et certaine, bien que non exclusive, avec les difficultés professionnelles qu'elle a rencontrées à compter de l'année 2006, et que sa pathologie psychologique est imputable au service. A cet égard, l'expert précise que les troubles dont est atteint l'agent ainsi que ses trois tentatives de suicide sont imputables à ces mêmes difficultés professionnelles, la dernière de ces tentatives ayant donné lieu à une hospitalisation en clinique psychiatrique du 23 novembre au 16 décembre 2015, date de consolidation de son état de santé. Il n'est par ailleurs pas contesté, en dépit de cette consolidation, que les congés de maladie de Mme B... à compter du 17 décembre 2015 sont justifiés par cette même pathologie. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la relative fragilité préexistante de Mme B... aurait suffi à la placer dans l'incapacité d'exercer ses fonctions au cours la période en cause. Dans ces conditions, Mme B... est fondée à soutenir que la maladie à l'origine de ses arrêts de travail pour la période qui s'est écoulée entre le 27 novembre 2015 et le 25 août 2016 est imputable au service. Par suite, les arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016, par lesquels l'administration l'a placée en position de congé de maladie ordinaire à demi-traitement doivent être annulés. Sur les conclusions à fin d'indemnisation : En ce qui concerne la responsabilité : 7. Il résulte de ce qui précède qu'en plaçant Mme B... en position de congé de maladie ordinaire à demi-traitement entre le 27 novembre 2015 et le 25 août 2016, la commune de Gardanne a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Si la commune fait néanmoins valoir qu'en plaçant l'intéressée en position de congé de maladie ordinaire à demi-traitement, au cours de cette période, elle n'a commis aucune faute dès lors que l'agent ne lui a pas transmis un certificat final de guérison ou de consolidation, en méconnaissance des dispositions de l'article 37-17 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, pas plus qu'une demande de prise en charge d'une rechute postérieure à la consolidation de son état de santé, en méconnaissance des dispositions de l'article 47-18 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, de telles dispositions, relatives aux modalités d'application du congé pour invalidité temporaire imputable au service instauré par le premier alinéa du I de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, lui-même issu de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, n'étaient pas opposables à Mme B... dès lors qu'elles sont entrées en vigueur postérieurement à la période de responsabilité en litige. Dans ces conditions, en plaçant Mme B... en position de congé de maladie ordinaire à demi-traitement entre le 27 novembre 2015 et le 25 août 2016, la commune de Gardanne a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. En ce qui concerne les préjudices : 8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été précédemment exposé que la requérante avait droit au versement de l'intégralité de son traitement pour la période du 27 novembre 2015 au 25 août 2016. Au cours de cette période, Mme B..., qui soutient que son plein traitement était d'un montant mensuel de 1 524,25 euros entre le 1er novembre 2015 et le 30 juin 2016, puis de 1 890,07 euros à compter du 1er juillet 2016, évalue son préjudice à la somme, non contestée, de 6 188,50 euros. Par suite, il y a lieu de condamner la commune à lui verser cette somme en réparation de son préjudice financier. 9. En second lieu, l'appelante établit que la privation de son plein-traitement est la cause d'un préjudice moral et de troubles dans ses conditions d'existence. Il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en les fixant à un montant global de 3 000 euros. 10. Il résulte de ce qui précède que la commune de Gardanne doit être condamnée à verser une somme de 9 188,50 euros à Mme B.... Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2019, date de réception de la demande préalable par la commune, ces intérêts portant eux-mêmes intérêts un an après cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette même date. Sur les conclusions indemnitaires tendant à la réparation d'un préjudice financier d'un montant de 18 051,31 euros résultant d'erreurs commises par la commune de Gardanne dans la reconstitution de la carrière de Mme B... pour la période du 1er janvier 2012 au 1er avril 2019 : 11. Ainsi qu'il a été dit au point 3, le tribunal administratif de Marseille a rejeté pour irrecevabilité les conclusions indemnitaires dont il s'agit, au motif qu'étant fondées sur la reconnaissance de l'imputabilité de la pathologie au service de Mme B... au titre de la période du 31 mars 2008 au 31 décembre 2011, elles constituent un litige distinct de celles tendant à l'annulation des arrêtés plaçant l'intéressée à demi-traitement du 16 octobre 2014 au 25 août 2016 et à la réparation des éventuels préjudices en découlant. Si, en cause d'appel, Mme B... renouvèle, dans les mêmes termes et à concurrence du même montant qu'en première instance, sa demande de condamnation de la commune à l'indemniser du préjudice financier résultant d'erreurs qui auraient été commises à l'occasion de sa reconstitution de carrière telle qu'opérée par arrêté du 23 juin 2020, elle se borne à réitérer ses écritures de première instance sans contester les motifs retenus par les premiers juges pour rejeter sa demande comme étant irrecevable. Il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'indemnisation de ce préjudice financier. 12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1911099 du 20 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions à fin d'annulation ainsi que ses conclusions tendant à l'indemnisation de ses préjudices financier et moral résultant de son placement en position de congé de maladie ordinaire à demi-traitement du 27 octobre 2015 au 30 août 2016. Par suite, il y a lieu, d'une part, d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ces conclusions, d'autre part, d'annuler les arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016, par lesquels l'administration a placé Mme B... en position de congé de maladie ordinaire à demi-traitement, et, enfin, de condamner la commune de Gardanne à verser une somme de 9 188,50 euros à Mme B... en réparation de ses préjudices. Sur les frais d'instance : 13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". 14. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge de chaque partie les frais exposés pour la présente instance et non compris dans les dépens. D É C I D E : Article 1er : Les arrêtés des 16 novembre 2015, 2 décembre 2015, 14 janvier 2016, 18 février 2016, 17 mars 2016, 7 avril 2016, 11 mai 2016, 13 juin 2016, 3 août 2016 et 14 août 2016 de la commune de Gardanne sont annulés. Article 2 : La commune de Gardanne est condamnée à verser une somme de 9 188,50 euros à Mme B..., assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2019. Les intérêts échus au 22 octobre 2020, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 et 2. Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Gardanne. Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition du greffe, le 30 mai 2023. N° 22MA02339 2
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de LYON, 3ème chambre, 31/05/2023, 20LY02654, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon : 1°) d'annuler la décision du 14 mai 2019 par laquelle le maire de la commune du Creusot a rejeté sa demande d'imputabilité au service de son affection pour la période postérieure au 17 décembre 2017 ; 2°) d'enjoindre à la commune du Creusot de reconnaître l'imputabilité au service de ses arrêts de maladie à compter du 6 février 2017 dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir ; 3°) de condamner la commune du Creusot à le rétablir dans l'intégralité de ses droits et traitements rétroactivement au 6 février 2017 ; 4°) d'enjoindre à la commune du Creusot de produire un tableau comprenant, sur toute la période précitée, les informations relatives à la rémunération nette qui aurait dû lui être versée et la rémunération nette effectivement versée et réserver en conséquence sa demande indemnitaire au titre du préjudice financier ; 5°) de condamner la commune du Creusot à lui verser la somme de 30 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il estime avoir subis, avec intérêts au taux légal et capitalisation ; 6°) d'enjoindre à la commune du Creusot de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et la condamner à ce titre, à prendre intégralement en charge ses frais de procédure sur présentation des justificatifs ; 7°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise judiciaire avec mission habituelle en pareille matière et évaluation du préjudice moral ; 8°) de mettre à la charge de la commune du Creusot une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1901958 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête et trois mémoires, enregistrés les 11 septembre 2020, 11 janvier 2022, 17 mai 2022 et 22 mars 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Walgenwitz, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 30 juin 2020 ; 2°) d'annuler la décision du 14 mai 2019 par laquelle le maire de la commune du Creusot a rejeté sa demande d'imputabilité au service de son affection pour la période postérieure au 17 décembre 2017 ; 3°) d'enjoindre à la commune du Creusot de reconnaître l'imputabilité au service de ses arrêts de maladie à compter du 12 septembre 2018 et ainsi de procéder à son placement en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 12 septembre 2018 ; 4°) de mettre à la charge de la commune du Creusot la somme de 3 636 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les dispositions appliquées par le tribunal administratif de Dijon n'étaient pas en vigueur lors de la réunion de la commission de réforme ; - la commune du Creusot a, suite à la demande de substitution de motifs, entaché l'arrêté contesté d'une erreur de droit ; - l'arrêté est entaché d'erreur de droit dès lors que sa pathologie trouve sa cause dans les conditions de travail de sa nouvelle affectation et notamment les conditions récentes de logement, comme le précise le rapport du médecin agréé et le confirme l'avis favorable de la commission de réforme. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 30 novembre 2020 et le 6 mai 2022, la commune du Creusot, représentée par Me Tronche : 1°) conclut au rejet de la requête ; 2°) demande, en tout état de cause, de substituer aux motifs fondant la décision attaquée, pour la période d'arrêts de travail ayant couru du 12 septembre 2018 au 11 avril 2019, les motifs de fait et de droit suivants : s'agissant des motifs de droit, les dispositions de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, en particulier du 2° ; s'agissant des motifs de fait, l'absence de lien direct entre la pathologie à l'origine des arrêts de travail prescrits à M. A... à compter du 12 septembre 2018 et l'exercice de ses fonctions ou ses conditions de travail, cette pathologie ne trouvant pas sa cause dans les fonctions exercées ou les conditions de travail de l'intéressé au sens de la jurisprudence administrative, puisqu'aucun élément du dossier ne fait apparaitre des circonstances particulières ou des conditions de travail de nature à en susciter le développement et en tout état de cause, le caractère détachable de la survenance de la maladie du service, du fait de la personnalité et du comportement adopté par M. A..., lequel n'a cessé d'émettre des plaintes, doléances et revendications à l'égard de sa collectivité employeur et a donc adopté une attitude d'opposition ; 3°) demande de rejeter les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du maire du Creusot du 14 mai 2019, comme infondées ; 4°) demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés. Par ordonnance du 6 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 20 mai 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Fédi, président-assesseur, - les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public, - et les observations de Me Walgenwitz, représentant M. A..., et celles de Me Lutz, représentant la commune du Creusot ; Considérant ce qui suit : 1. M. A..., adjoint technique de 2ème classe de la commune du Creusot, en Saône-et-Loire, était affecté au château de la Verrerie pour y occuper les fonctions de concierge. Le 6 février 2017, l'agent a été placé en arrêt de travail, lequel a été prolongé à plusieurs reprises. Par arrêté du 7 décembre 2017, le maire du Creusot a reconnu l'imputabilité de sa maladie au service pour la période du 6 février 2017 au 17 décembre 2017 et a admis la prise en charge de ses frais de santé au titre de cette période. Le 3 juillet 2018, M. A... a été affecté sur les fonctions de concierge du stade Jean Garnier, dans le cadre d'un temps partiel thérapeutique. M. A... a ensuite été placé de nouveau en arrêt de travail à compter du 12 septembre 2018. Saisi par l'intéressé d'une demande de congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter de cette date, le maire du Creusot a, par un arrêté et une lettre d'accompagnement du 14 mai 2019, dont M. A... a demandé l'annulation, rejeté la demande de l'agent et l'a placé en congé de maladie ordinaire à compter du 12 septembre 2018. M. A... fait appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. L'application des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issues de l'ordonnance du 19 janvier 2017, était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. En conséquence, ces dispositions ne sont entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique territoriale, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale. Par suite, ces dispositions n'étant pas applicables au présent litige, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de motifs de droit présentée par la commune du Creusot. 3. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à l'espèce et au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : /.../ 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. /.../ Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ". Il résulte de ces dispositions qu'un fonctionnaire qui souffre d'une maladie contractée ou aggravée en service a droit à un congé de maladie à plein traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite, sauf s'il entre dans les cas prévus pour l'octroi d'un congé de longue maladie ou de longue durée limitant la période de maintien de cette rémunération. L'imputabilité au service de cette maladie est appréciée par la commission de réforme qui rend un avis ne liant pas l'autorité territoriale. 4. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée. 5. Il ressort des pièces du dossier que le maire du Creusot a, par arrêté du 7 décembre 2017, reconnu l'imputabilité au service des troubles psychiques de M. A... déclarés entre le 6 février 2017 et le 17 décembre 2017, alors que l'agent occupait les fonctions de concierge du château de la Verrerie. Aux termes des conclusions du rapport d'expertise médicale établi le 12 janvier 2019, le médecin psychiatre agréé a constaté d'une part, que " M. A... souffre au moins d'un trouble dépressif sévère... associé à des manifestations anxieuses, altérant gravement sa capacité à agir avec discernement et s'accompagnant d'une symptomatologie somatique invalidante, qui est une aggravation du tableau clinique déjà constaté au mois d'octobre 2017 ", d'autre part, que cette " symptomatologie actuelle constitue effectivement une rechute du tableau antérieur en lien direct avec la maladie contractée en service. A l'évidence, le tableau n'est pas consolidé, et nécessite encore des soins actifs qui devraient être renforcés. La prise en charge des arrêts de travail et des soins à compter du 10 septembre 2018 doit être pris en charge dans le cadre de la maladie contractée en service le 6 février 2017 (...) les symptômes restent à peu près identiques à ceux que nous avions constaté en octobre 2017 (...) ". En outre, le même rapport d'expertise précise que les conditions de relogement, nécessitées par les nouvelles fonctions d'accueil et de gardiennage occupées par M. A... à compter de juillet 2018 au stade Jean Garnier, ont aggravé son état de santé. Lors de sa séance du 2 avril 2019, la commission de réforme a émis un avis favorable à la prise en charge de la rechute de la maladie contractée en service au 12 septembre 2018 et à l'imputabilité au service de la période d'arrêt de travail allant du 12 septembre 2018 au 9 avril 2019. Si la commune du Creusot invoque, dans ses écritures en défense, la personnalité et l'attitude d'opposition adoptée par l'intéressé, lequel n'aurait cessé d'émettre des plaintes, doléances et revendications à l'égard de son employeur, toutefois, la collectivité n'établit pas l'existence de faits personnels de l'agent ou de circonstances particulières conduisant à détacher du service la maladie de M. A.... 6. En outre, la commune du Creusot ne peut utilement soutenir que le changement d'affectation de l'agent a été opéré à sa demande et qu'il a accepté les conditions de son nouvel emploi et de son logement. Dans ces conditions, M. A..., qui démontre le lien direct entre sa maladie et l'exercice de ses fonctions, est fondé à soutenir qu'en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie, pour la période du 12 septembre 2018 au 14 mai 2019, au motif que son changement d'affectation avait mis fin à sa pathologie, le maire du Creusot a méconnu les dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. 7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. L'appelant est, dès lors, fondé à demander l'annulation dudit jugement, ainsi que celle de la décision du 14 mai 2019. Sur les conclusions à fin d'injonction : 8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". L'annulation de l'arrêté du 14 mai 2019 ainsi prononcé implique nécessairement qu'il soit enjoint au maire de la commune du Creusot de placer l'appelant en position de congé de maladie imputable au service, pour la période du 12 septembre 2018 au 14 mai 2019, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. 9. Les droits des agents en matière d'accident de service et de maladie professionnelle étant réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, la demande M. A..., tendant à enjoindre à la collectivité territoriale de le placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service, à compter du 12 septembre 2018, doit être rejetée dès lors que sa demande de reconnaissance d'imputabilité au service, ayant été présentée le 26 février 2019, la situation de l'agent est exclusivement régie par les conditions de forme et de fond prévues avant l'entrée en vigueur des règles relatives au nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service, désormais codifié à l'article L. 822-21 du code général de la fonction publique, qui ne sont entrées en vigueur que le 13 avril 2019. Sur les frais liés au litige : 10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune du Creusot. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 2 000 euros à verser à M. A..., au titre de ces mêmes dispositions. D E C I D E : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Dijon en date du 30 juin 2020 et la décision du 14 mai 2019 du maire du Creusot sont annulés. Article 2 : Il est enjoint au maire du Creusot de placer M. A... en position de congé de maladie imputable au service, pour la période du 12 septembre 2018 au 14 mai 2019, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : La commune du Creusot versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Les conclusions de la commune du Creusot présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Les conclusions de la requête sont rejetées pour le surplus. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune du Creusot. Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023. Le rapporteur, Gilles FédiLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au préfet de Saône-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02654
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 01/06/2023, 21BX02304, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... D... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 26 avril 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Saintonge a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident du 11 juin 2018 et d'enjoindre au centre hospitalier de la placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 11 juin 2018, ainsi que de procéder à la reconstitution de sa carrière et au versement des rappels indemnitaires dus, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Par un jugement n° 1901546 du 30 mars 2021, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 29 mai 2021, Mme C..., représentée par Me Sutre, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du directeur du centre hospitalier de Saintonge du 26 avril 2019 ; 3°) d'enjoindre au centre hospitalier de Saintonge de la placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 11 juin 2018 et de procéder à la reconstitution de sa carrière et au versement des rappels indemnitaires dus ; 4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Saintonge une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a déposé sa déclaration d'accident du travail dans le délai de quinze jours prévu à l'article 47-3 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la mention ou non d'un tiers responsable sur l'arrêt de travail est sans incidence sur l'imputabilité au service de l'accident, et au demeurant, le certificat du 4 juillet 2018 précise qu'elle était complètement anéantie, avec une phobie de retourner au travail, une énorme fragilité émotionnelle et une perte de confiance complète ; - la déclaration d'accident du travail fait référence à un choc psychologique subi pendant et à l'issue d'un entretien professionnel, un médecin a constaté que son état nécessitait un arrêt de travail, l'expert désigné par l'administration a conclu à une relation directe et exclusive de sa pathologie avec les faits en cause, et la commission départementale de réforme, qui a en outre tenu compte d'un rapport du médecin de prévention du 29 octobre 2018, a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service ; - contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le choc qu'elle a subi n'était pas en lien avec la baisse de notation, notifiée postérieurement à l'entretien et par écrit, mais avec les propos tenus par le cadre de santé ; alors qu'il appartenait à l'administration d'apporter la preuve de circonstances particulières permettant de faire échec à la présomption d'imputabilité de l'accident survenu dans le temps et sur le lieu du service, le tribunal a " inversé la charge de la preuve " en jugeant qu'il ne ressortait d'aucun élément que les propos tenus par le cadre de santé auraient été caractérisés par leur violence ou leur agressivité, ou qu'ils auraient revêtu un caractère insultant ou humiliant ; - les conditions d'agressivité dans lesquelles l'entretien a eu lieu montrent une volonté délibérée de la placer dans une position lui interdisant tout commentaire et toute défense ; elle a été verbalement agressée, aucune des observations défavorables ne lui avait été antérieurement opposée, et les griefs étaient préparés avant l'entretien, lequel a été mené à charge ; des reproches infondés lui ont été faits pour lui indiquer qu'un autre poste devrait être envisagé ; il lui a en outre été reproché sa voix, son attitude et l'éducation donnée à ses enfants ; son état de choc à l'issue de l'entretien est attesté par plusieurs témoignages ; le centre hospitalier ne peut s'appuyer sur un rapport de juillet 2018, postérieur aux faits, pour soutenir qu'elle aurait fait l'objet de remarques antérieurement à l'entretien d'évaluation ; une psychologue du centre hospitalier atteste que le cadre de santé pratique un management par la peur et l'insécurité ; ainsi, il doit être fait droit à l'ensemble de ses demandes. Par des mémoires en défense enregistrés le 21 décembre 2021 et le 14 octobre 2022, le centre hospitalier de Saintonge, représenté par la société SHBK Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - la requête d'appel est insuffisamment motivée ; - les moyens invoqués par Mme C... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme B..., - les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique, - et les observations de Me Bousquet, représentant Mme C.... Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., infirmière titulaire affectée au centre médico-psychologique (CMP) de Saintes relevant du centre hospitalier de Saintonge, placée en arrêt de travail à compter du 11 juin 2018, a déposé une déclaration d'accident du travail pour un syndrome anxio-dépressif consécutif à des violences psychologiques subies le même jour lors de son entretien annuel d'évaluation. Par une décision du 26 avril 2019, le directeur du centre hospitalier a refusé de reconnaître un accident imputable au service et l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 11 juin 2018. Mme C... relève appel du jugement du 30 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / (...)." 3. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service un évènement, quelle que soit sa nature, survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien, notamment d'évaluation, entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 4. Il ressort des pièces du dossier que la fermeture de lits d'hospitalisation en psychiatrie a conduit le centre hospitalier de Saintonge à développer les soins ambulatoires, notamment par un renforcement du personnel et une réorganisation du travail dans les CMP, afin d'améliorer l'accueil du public en proposant rapidement un premier rendez-vous. La nouvelle organisation du travail au CMP de Saintes comportait la mise en place systématique, à partir de juillet 2017, d'un entretien d'accueil infirmier, dit entretien de première intention, pour toute nouvelle personne demandant à consulter, destiné à évaluer la demande et la nature de la réponse devant être apportée. La répartition des entretiens entre les infirmiers était assurée au moyen d'un agenda informatique partagé sur lequel chacun devait proposer des plages horaires, permettant ainsi à l'agent chargé de l'accueil téléphonique d'attribuer les rendez-vous. L'évaluation de l'année 2017 fait apparaître que Mme C... a participé au groupe de travail relatif à la mise en place des entretiens de première intention. Toutefois, un rapport de son supérieur hiérarchique du 4 juillet 2018 fait état de son opposition à l'organisation mise en place, et relève qu'elle n'a effectué que 32 entretiens de première intention entre le 1er juillet 2017 et le 30 juin 2018. Si Mme C... fait valoir que ce rapport est postérieur à l'entretien d'évaluation, elle ne conteste pas le nombre d'entretiens de première intention effectués dans l'année qui l'a précédé. En outre, le même rapport fait état d'un comportement insolent envers la hiérarchie et le corps médical ainsi que d'un manque de respect, ce qui est corroboré par une convocation de l'intéressée par le cadre supérieur de santé à un entretien, le 3 octobre 2016, au sujet de sa tenue dans son exercice professionnel et de sa réaction à l'égard de ce cadre lors d'une réunion. L'appréciation portée sur la fiche de notation de 2017 par une nouvelle cadre supérieure de santé confirme la persistance d'une attitude irrespectueuse, notamment en réunion, et il ressort du rapport du 4 juillet 2018 que Mme C..., reçue à sa demande le 4 décembre 2017 par cette supérieure hiérarchique pour lui faire part de son désaccord sur cette appréciation, a fait l'objet d'un " recadrage " au sujet de ses devoirs professionnels, après lequel elle a rempli pour la première fois l'agenda partagé. 5. L'entretien professionnel a été réalisé le 11 avril 2018 dans le contexte exposé au point précédent, alors que, contrairement à ce qu'elle soutient, Mme C... avait été avertie à plusieurs reprises de ce que son comportement et son implication dans son travail n'apparaissaient pas satisfaisants. Il ressort du compte-rendu de cet entretien qu'il lui a été reproché d'avoir commencé à utiliser l'agenda partagé seulement en décembre 2017, de ne pas le remplir toutes les semaines, de ne pas avoir proposé suffisamment de créneaux de rendez-vous pour les entretiens de première intention, de montrer, par ses attitudes en réunion, qu'elle ne parvenait pas à s'adapter au changement, et de conserver, malgré des efforts pour modérer la virulence de ses propos, un comportement irrespectueux, notamment envers une collègue infirmière arrivée l'été précédent. L'évaluateur a conclu que Mme C... avait rencontré des difficultés dans les missions confiées (entretiens de première intention), qu'elle n'était pas en total accord avec le nouveau projet médico-soignant, ce qu'elle avait su " réajuster " au bout de six mois, mais que si cette dynamique ne perdurait pas, elle devrait réfléchir à un nouveau projet professionnel qui lui permettrait de s'épanouir davantage dans son travail. Si l'entretien a été conduit, comme il est d'usage, sur la base d'un document préparé par l'évaluateur, il ne peut en être déduit que Mme C... aurait été placée " dans une position lui interdisant tout commentaire et toute défense ", alors qu'elle a porté des observations dans l'espace réservé aux commentaires de l'évalué sur le bilan réalisé. Ce bilan, tel que présenté par l'évaluateur, n'est pas contredit par les pièces produites par Mme C..., lesquelles se bornent à rapporter qu'elle a été très affectée par l'entretien et à énoncer, en ce qui concerne le comportement de l'évaluateur, des généralités caractérisant davantage une incompréhension du rôle de l'encadrement de la part des auteurs des attestations qu'une attitude inappropriée du cadre de santé. Les reproches figurant dans le compte-rendu d'entretien n'apparaissent pas infondés, et la circonstance que Mme C... les a ressentis comme une agression n'est pas de nature à caractériser un comportement ou des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lesquels ne ressortent pas des pièces du dossier. Par suite, et alors même que la commission de réforme a émis un avis favorable, cet entretien ne peut être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. 7. Mme C..., qui est la partie perdante, n'est pas fondée à demander l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à sa charge au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Saintonge à l'occasion du présent litige. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Saintonge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... épouse C... et au centre hospitalier de Saintonge. Délibéré après l'audience du 9 mai 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023. La rapporteure, A... B... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02304
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 01/06/2023, 21BX02303, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... D... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 26 avril 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Saintonge a rejeté sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident du 13 juin 2018 et d'enjoindre au centre hospitalier de la placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 13 juin 2018, ainsi que de procéder à la reconstitution de sa carrière et au versement des rappels indemnitaires dus, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Par un jugement n° 1901545 du 30 mars 2021, le tribunal a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 29 mai 2021, Mme B..., représentée par Me Sutre, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du directeur du centre hospitalier de Saintonge du 26 avril 2019 ; 3°) d'enjoindre au centre hospitalier de Saintonge de la placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 13 juin 2018 et de procéder à la reconstitution de sa carrière et au versement des rappels indemnitaires dus ; 4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Saintonge une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - elle a déposé sa déclaration d'accident du travail dans le délai de quinze jours prévu à l'article 47-3 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la mention ou non d'un tiers responsable sur l'arrêt de travail est sans incidence sur l'imputabilité au service de l'accident, et au demeurant, le certificat médical du 19 décembre 2018 précise qu'elle présentait un état de sidération morale ; - la déclaration d'accident du travail fait référence à un choc psychologique subi pendant et à l'issue d'un entretien professionnel, un médecin a constaté que son état nécessitait un arrêt de travail, l'expert désigné par l'administration a conclu à une relation directe et exclusive de sa pathologie avec les faits en cause, et la commission départementale de réforme, qui a en outre tenu compte d'un rapport du médecin de prévention du 29 octobre 2018, a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service ; - contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le choc qu'elle a subi n'était pas en lien avec la baisse de notation, notifiée postérieurement à l'entretien et par écrit, mais avec les propos tenus par le cadre de santé ; alors qu'il appartenait à l'administration d'apporter la preuve de circonstances particulières permettant de faire échec à la présomption d'imputabilité de l'accident survenu dans le temps et sur le lieu du service, le tribunal a " inversé la charge de la preuve " en jugeant qu'il ne ressortait d'aucun élément que les propos tenus par le cadre de santé auraient été caractérisés par leur violence ou leur agressivité, ou qu'ils auraient revêtu un caractère insultant ou humiliant ; - les conditions d'agressivité dans lesquelles l'entretien a eu lieu montrent une volonté délibérée de la placer dans une position lui interdisant tout commentaire et toute défense ; elle a été verbalement agressée, aucune des observations défavorables ne lui avait été antérieurement opposée, et les griefs étaient préparés avant l'entretien, lequel a été mené à charge ; des reproches infondés lui ont été faits pour lui indiquer qu'un autre poste devrait être envisagé ; son état de choc à l'issue de l'entretien est attesté par plusieurs témoignages, et elle n'a pas été seule à faire l'objet d'un tel traitement inacceptable par le même cadre de santé ; une psychologue du centre hospitalier atteste que le cadre de santé pratique un management par la peur et l'insécurité ; ainsi, il doit être fait droit à l'ensemble de ses demandes. Par des mémoires en défense enregistrés le 22 décembre 2021 et le 14 octobre 2022, le centre hospitalier de Saintonge, représenté par la société SHBK Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - la requête d'appel est insuffisamment motivée ; - dès lors que l'intitulé des pièces ne correspond pas aux pièces versées, celles-ci doivent être écartées des débats ; - les moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique, - et les observations de Me Bousquet, représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., infirmière titulaire affectée au centre médico-psychologique (CMP) de Saintes relevant du centre hospitalier de Saintonge, placée en arrêt de travail à compter du 14 juin 2018, a déposé une déclaration d'accident du travail pour un syndrome anxio-dépressif consécutif à des violences psychologiques subies le 13 juin 2018 lors de son entretien annuel d'évaluation. Par une décision du 26 avril 2019, le directeur du centre hospitalier a refusé de reconnaître un accident imputable au service et l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 14 juin 2018. Mme B... relève appel du jugement du 30 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de cette décision. 2. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 42. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / (...)." 3. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service un évènement, quelle que soit sa nature, survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien, notamment d'évaluation, entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 4. Il ressort des pièces du dossier que la fermeture de lits d'hospitalisation en psychiatrie a conduit le centre hospitalier de Saintonge à développer les soins ambulatoires, notamment par un renforcement du personnel et une réorganisation du travail dans les CMP, afin d'améliorer l'accueil du public en proposant rapidement un premier rendez-vous. La nouvelle organisation du travail au CMP de Saintes comportait la mise en place systématique, à partir de juillet 2017, d'un entretien d'accueil infirmier, dit entretien de première intention, pour toute nouvelle personne demandant à consulter, destiné à évaluer la demande et la nature de la réponse devant être apportée. La répartition des entretiens entre les infirmiers était assurée au moyen d'un agenda informatique partagé sur lequel chacun devait proposer des plages horaires, permettant ainsi à l'agent chargé de l'accueil téléphonique d'attribuer les rendez-vous. Le 9 février 2018, le cadre de santé dont relevait Mme B... lui a demandé pourquoi elle n'avait pas renseigné l'agenda partagé depuis quatre semaines, et elle lui a répondu qu'il lui fallait du temps pour s'adapter au changement et qu'elle trouvait l'outil informatique compliqué, tout en refusant l'aide proposée par son supérieur hiérarchique. Ce dernier l'a avertie que si elle n'utilisait pas cet outil et ne réalisait pas d'entretiens de première intention, elle devrait revoir son projet professionnel et quitter le CMP, et lui a en outre demandé d'organiser plus efficacement son temps de travail en commençant ses entretiens à 9 heures 30, afin de recevoir au moins deux patients le matin et autant l'après-midi. Le 10 avril 2018, alors que deux de ses collègues étaient absentes pour maladie, Mme B... s'étant plainte d'un doublement de sa charge de travail l'ayant conduite à recevoir quatre patients dans la journée, le cadre de santé lui a fait observer qu'il s'agissait du minimum réalisé par ses collègues, et qu'il souhaitait s'entretenir avec elle à ce sujet. 5. L'entretien professionnel a été réalisé le 13 avril 2018 dans le contexte exposé au point précédent, alors que, contrairement à ce qu'elle soutient, Mme B... avait été avertie à deux reprises de ce que son implication dans son travail n'apparaissait pas satisfaisante. Il ressort du compte-rendu de cet entretien, produit en première instance, qu'il a été reproché à Mme B... de ne pas avoir renseigné les agendas partagés, d'avoir réalisé trop peu d'entretiens infirmiers de première intention (11 en 11 mois), et de ne pas avoir tenu compte des remarques concernant une organisation plus optimale de ses missions. L'évaluateur a conclu en lui conseillant de changer de service, dès lors qu'elle ne parvenait pas à s'adapter au changement d'organisation au CMP et que son expérience lui permettrait d'encadrer de nouveaux professionnels dans les unités intra-hospitalières. Si l'entretien a été conduit, comme il est d'usage, sur la base d'un document préparé par l'évaluateur, il ne peut en être déduit que Mme B... aurait été placée " dans une position lui interdisant tout commentaire et toute défense ", alors qu'elle a quitté l'entretien de sa propre initiative sans signer le compte-rendu, et sans porter d'observations dans l'espace réservé à cet effet. Ce bilan, tel que présenté par l'évaluateur, n'est pas contredit par les pièces produites en première instance par Mme B..., lesquelles se bornent à rapporter qu'elle a été très affectée par l'entretien et à énoncer, en ce qui concerne le comportement de l'évaluateur, des généralités caractérisant davantage une incompréhension du rôle de l'encadrement de la part des auteurs des attestations qu'une attitude inappropriée du cadre de santé. Les reproches figurant dans le compte-rendu d'entretien n'apparaissent pas infondés, et la circonstance que Mme B... les a ressentis comme une agression n'est pas de nature à caractériser un comportement ou des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lesquels ne ressortent pas des pièces du dossier. Par suite, et alors même que la commission de réforme a émis un avis favorable, cet entretien ne peut être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. 7. Mme B..., qui est la partie perdante, n'est pas fondée à demander l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à sa charge au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Saintonge à l'occasion du présent litige. DÉCIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Saintonge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... épouse B... et au centre hospitalier de Saintonge. Délibéré après l'audience du 9 mai 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02303
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de LYON, 3ème chambre, 31/05/2023, 20LY02618, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) de condamner la commune de Saint-Etienne à lui verser la somme de 38 031,60 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de son accident de travail du 6 mars 2017 ; 2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens. Par un jugement n° 1903789 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Procédure devant la cour Par une requête enregistrée le 8 septembre 2020, M. B..., représenté par Me Villand, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 juillet 2020 ; 2°) de juger que l'accident survenu le 6 mars 2017 est un accident de service imputable au service et procède d'une faute de la commune de Saint-Etienne et de condamner cette dernière à lui verser les sommes suivantes : ' 15 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, ' 288 euros au titre du DFTT (déficit fonctionnel temporaire total), ' 1 026 euros au titre du DFTP (déficit fonctionnel temporaire partiel) de classe II, ' 417,60 euros au titre du DFTP de classe I, ' 2 500 euros au titre des souffrances endurées, ' 8 800 euros au titre du DFP (déficit fonctionnel permanent), ' 10 000 euros au titre du préjudice d'agrément ; 3°) de condamner la commune de Saint-Etienne aux dépens y compris les frais d'expertise ; 4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le tribunal administratif a fait une analyse erronée de la situation de fait, dès lors que la commune de Saint-Etienne a reconnu que son malaise cardiaque était un accident de service, directement imputable au service et procède directement de la faute de son employeur ; - la commune de Saint-Etienne a commis une faute en ne respectant pas son obligation générale de santé et de sécurité au travail, et en particulier en ne l'ayant pas soumis à une surveillance médicale adéquate, dès lors qu'il rentre dans le cadre des " agents à risque ". Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2021, la commune de Saint-Etienne, représentée par Me Saban : 1°) conclut au rejet de la requête ; 2°) demande, à titre très subsidiaire, si sa responsabilité était retenue, de réduire les sommes demandées à de plus justes proportions ; 3°) demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens présentés par M. B... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 6 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 10 janvier 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative. Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience. Après avoir entendu au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Fédi, président-assesseur, - les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public, - et les observations de Me Garaudet, représentant la commune de Saint-Etienne ; Considérant ce qui suit : 1. Brigadier-chef principal au sein de la police municipale de Saint-Etienne, M. B..., qui a été victime, le 6 mars 2017 et dans l'exercice de ses fonctions, d'un accident cardiaque, relève appel du jugement rendu le 16 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de son employeur à réparer les préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cet accident. Sur les conclusions à fin d'indemnisation : 2. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965, qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne. Toutefois, la circonstance que le fonctionnaire victime d'un accident de service ou d'une maladie professionnelle ne remplit pas les conditions auxquelles les dispositions mentionnées ci-dessus subordonnent l'obtention d'une rente ou d'une allocation temporaire d'invalidité fait obstacle à ce qu'il prétende, au titre de l'obligation de la collectivité qui l'emploie de le garantir contre les risques courus dans l'exercice de ses fonctions, à une indemnité réparant des pertes de revenus ou une incidence professionnelle. En revanche, elle ne saurait le priver de la possibilité d'obtenir de cette collectivité la réparation de préjudices d'une autre nature, dès lors qu'ils sont directement liés à l'accident ou à la maladie. En ce qui concerne la responsabilité sans faute : 3. Il est constant que M. B... a été victime d'un accident cardiaque le 6 mars 2017, reconnu imputable au service, alors qu'il participait à un entrainement à la pratique du pistolet à impulsion électrique dans le cadre de son activité professionnelle. Il résulte toutefois de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise du Professeur A...... du 22 décembre 2018 qui précise, que l'appelant, pratiquant régulier d'une activité physique, présentait " avant l'accident du 6 mars 2017 deux types de pathologie : une pathologie dépressive prise en charge depuis 2011 et une sténose de l'artère inter-ventriculaire antérieure qui n'avait pas entrainé de signes cliniques et qui était ignorée par l'intéressé. Il est en effet certain que ce n'est pas l'exercice du 06.03.2017 qui a provoqué cette sténose mais que celle-ci a été révélée par l'apparition d'une thrombose survenue à son niveau pendant la période de l'exercice professionnel ". L'expert, après avoir mentionné les conclusions des trois expertises précédemment menées, précisait d'une part, que " c'est sur cette sténose que s'est produit, le 06.03.2017, une thrombose responsable de la survenue de l'infarctus du myocarde " d'autre part, que " cette thrombose aurait pu survenir quelques heures plus tôt ou quelques jours plus tard et rien ne permet d'affirmer que ce sont les quelques exercices réalisés le 06.03.2017 qui ont fait que la thrombose soit survenue à cette date, sur cette sténose préexistante ". En outre, contrairement à ce qui est soutenu, il ne résulte pas de l'instruction, que M. B... aurait subi, lors des exercices et de la mise en situation pratiqués le jour de l'accident, une " pression ou une intensité " de nature à troubler son discernement. Dans ces conditions, si M. B... se prévaut de divers préjudices patrimoniaux ou personnels au titre de l'incidence professionnelle ou du préjudice d'agrément, dont il sollicite la réparation, il ne démontre pas en quoi ces préjudices, qui résultent de la seule sténose de l'artère inter-ventriculaire antérieure préexistante, présenteraient un lien direct avec l'accident de service du 6 mars 2017. Par suite, M. B... n'est pas fondé à demander une indemnisation à ce titre. En ce qui concerne la responsabilité pour faute : 4. Aux termes de l'article 20 du décret du 10 juin 1985 visé ci-dessus, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les agents des collectivités et établissements mentionnés à l'article 1er bénéficient d'un examen médical périodique au minimum tous les deux ans. Dans cet intervalle, les agents qui le demandent bénéficient d'un examen médical supplémentaire (...) ". Aux termes de l'article 21 du même décret : " En sus de l'examen médical prévu à l'article 20, le médecin du service de médecine professionnelle et préventive exerce une surveillance médicale particulière à l'égard : / (...) - des agents occupant des postes dans des services comportant des risques spéciaux ; / (...) Le médecin du service de médecine préventive définit la fréquence et la nature des visites médicales que comporte cette surveillance médicale. Ces visites présentent un caractère obligatoire ". Il résulte de ces dispositions que les autorités administratives ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents. 5. Il est constant que M. B... a bénéficié d'un examen médical périodique, le 14 août 2015, moins de deux ans avant l'accident survenu le 6 mars 2017. Si l'agent soutient qu'il aurait dû faire l'objet d'une surveillance particulière en application de l'article 21 du décret du 10 juin 1985, il ne résulte pas de l'instruction que son poste comportait des risques spéciaux au sens de ces dispositions, ni que le médecin du service de médecine préventive aurait indiqué qu'une surveillance médicale était requise au regard de l'état de santé de l'intéressé, alors que la pathologie cardiaque de l'agent était également inconnue de son employeur. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la commune de Saint-Etienne aurait commis une faute, en méconnaissant ses obligations en matière de santé et de sécurité au travail, résultant pour elle des dispositions des article 20 et 21 du décret du 10 juin 1985. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sur les dépens : 7. Il y a lieu de maintenir les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Lyon, liquidés et taxés à la somme de 700 euros par ordonnance du juge des référés n°1805890 du 14 avril 2020, à la charge définitive de M. B.... Sur les frais liés au litige : 8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Etienne présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune de Saint-Etienne. Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient : M. Jean-Yves Tallec, président de chambre, M. Gilles Fédi, président-assesseur, Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023. Le rapporteur, Gilles FédiLe président, Jean-Yves Tallec La greffière, Sandra Bertrand La République mande et ordonne au préfet de la Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition, La greffière, 2 N° 20LY02618
Cours administrative d'appel
Lyon
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 30/05/2023, 21MA04180, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille, qui a transmis sa demande au tribunal administratif de Marseille, d'annuler la décision du 21 janvier 2019 par laquelle la ministre des armées lui a attribué une pension militaire d'invalidité, en tant qu'elle fixe le taux d'invalidité à seulement 30 %, d'enjoindre à la ministre des armées de fixer le taux d'invalidité à 75 % et d'ouvrir ses nouveaux droits à pension à compter du 9 septembre 2014, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale avant dire droit et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Par un jugement n° 1911506 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé la décision du 21 janvier 2019 en tant qu'elle fixe le taux d'invalidité global de la pension militaire d'invalidité de M. B... à 30 % et fixé ce taux à 50 % à compter du 9 septembre 2014, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et enfin, rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 21 octobre 2021 et les 22 septembre, 24 novembre et 1er décembre 2022, M. B..., représenté par Me Paolantonacci, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 octobre 2021 en tant qu'il a fixé le taux d'invalidité de l'infirmité dite " réaction anxio-dépressive " à seulement 10 % et, par conséquent, le taux global d'invalidité à seulement 50 % ; 2°) de fixer le taux d'invalidité de cette infirmité à 30 % à compter du 9 septembre 2014, le taux global d'invalidité à 60 % à compter de la même date ; 3°) de déclarer l'ensemble des infirmités éligibles à pension, définitives à compter du 9 septembre 2017 ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - en déduisant du taux d'invalidité attaché à la réaction mixte anxio-dépressive de 30 %, un état antérieur lié à une personnalité névrotique, étrangère au service, dont le taux d'invalidité a été évalué à 20 %, alors qu'il s'agit de deux infirmités distinctes, le tribunal a méconnu les dispositions des articles L. 2, L. 9, L. 10, L. 25 et L. 26 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et a dénaturé le rapport d'expertise médicale du 27 mai 2018, la décision en litige méconnaissant elle-même ces dispositions ; - pour s'écarter du rapport d'expertise médicale, le ministre aurait dû motiver sa décision ; - l'avis de la commission consultative médicale indique à tort confirmer le taux global de 30 % attribué au syndrome anxio-dépressif. Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 septembre, 4 et 30 novembre et 7 décembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens de l'appelant ne sont pas fondés. Par une lettre du 9 mai 2023, la Cour a informé les parties, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce qu'elle était susceptible de fonder son arrêt sur le moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens tirés de l'irrégularité de la décision en litige, tenant à l'insuffisance de motivation de l'avis de la commission consultative médicale et de la décision en litige, faute pour le requérant d'avoir développé en première instance des moyens relevant de cette cause juridique. Par des observations enregistrées le 11 mai 2023, M. B... affirme ne pas avoir soulevé de moyens remettant en cause la régularité de la décision en litige, mais indique avoir contesté la motivation du jugement attaqué. Par des observations enregistrées le 15 mai 2023, le ministre des armées relève que l'appelant n'a pas présenté de moyens ayant trait à la régularité de la décision en litige et qu'en tout état de cause, de tels moyens seraient irrecevables, comme relevant d'une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Revert, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., caporal-chef de la légion étrangère, radié des cadres le 5 avril 2014, a présenté le 5 septembre 2014 une demande de pension militaire d'invalidité reçue le 9 septembre, au titre, d'une part, de séquelles apparues le 12 septembre 2013 à la suite d'un traumatisme de l'épaule droite à type de lésion acromio-claviculaire, d'autre part, d'une lombosciatalgie chronique aggravée par blessure survenue le 17 février 2012 et, enfin, d'un syndrome anxio-dépressif. Par une décision du 21 janvier 2019, la ministre des armées a fait droit à cette demande de pension au taux d'invalidité de 30 %, dont 10 % attribué au titre de la réaction mixte anxio-dépressive d'intensité modérée sur personnalité névrotique. Par un jugement du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision en tant qu'elle a limité le taux d'invalidité attribué pour les séquelles de traumatisme de l'épaule droite à 10 %, a porté ce taux à 20 %, a consécutivement annulé cette décision en tant qu'elle a fixé le taux global d'invalidité à 30 % et a porté ce taux à 50 % à compter du 9 septembre 2014, a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de la demande de M. B.... Celui-ci relève appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à la revalorisation du taux d'invalidité attribué pour l'infirmité dite " réaction mixte anxio-dépressive d'intensité modérée sur personnalité névrotique ". Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la régularité de la décision en litige : 2. Certes, lorsqu'il est saisi d'un litige en matière de pensions militaires d'invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l'intéressé en tenant compte de l'ensemble des circonstances de fait qui résultent de l'instruction, et aussi, le cas échéant, d'apprécier, s'il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d'ordre public, la régularité de la décision en litige. 3. Toutefois, à l'appui de sa demande dirigée contre la décision de la ministre des armées du 21 janvier 2019, en ce qu'elle attribue à l'infirmité dite " réaction mixte anxio-dépressive d'intensité modérée sur personnalité névrotique " seulement le taux d'invalidité de 10 %, M. B... n'a présenté devant le tribunal que des moyens tendant à remettre en cause le bien-fondé de cette décision. Il suit de là que, à les supposer articulés, les moyens de l'intéressé, présentés pour la première fois en appel, tirés de l'irrégularité de l'avis de la commission consultative médicale du 6 décembre 2018 et de l'insuffisance de motivation de la décision en litige sont irrecevables et doivent être écartés comme tels. En ce qui concerne les droits à pension de M. B... au titre d'un syndrome anxio-dépressif : 4. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction en vigueur au jour de la demande de pension de M. B... : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité./ Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %./ Il est concédé une pension : 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; 2° Au titre d'infirmités résultant de maladies associées à des infirmités résultant de blessures, si le degré total d'invalidité atteint ou dépasse 30 % ; 3° Au titre d'infirmités résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples (...) ". 5. Il résulte de l'instruction, et plus particulièrement du rapport du médecin expert du 27 mai 2018, et il est du reste constant, que le trouble anxio-dépressif post-traumatique dont souffre M. B... depuis la fin de l'année 2013 est consécutif aux blessures physiques affectant sa colonne vertébrale et son épaule droite, qui non seulement lui ont causé des douleurs chroniques et persistantes, mais encore l'ont mis dans l'impossibilité d'exercer des fonctions de militaire actif, l'ont contraint à occuper un emploi sédentaire et enfin, à la réforme et à la radiation des contrôles. Ce même rapport, qui s'appuie sur les pièces du dossier médical de l'intéressé ainsi que sur trois entretiens avec celui-ci, fait également état de troubles de la personnalité qui sont étrangers au service, qui préexistaient au syndrome anxio-dépressif à l'état compensé, mais qui, par décompensation, ont joué un rôle dans l'apparition de ce syndrome, prenant ainsi la forme d'une réaction mixte anxio-dépressive. S'il résulte de ce même document, corroborant les éléments d'appréciation du guide-barème, que ces deux affections psychiatriques constituent des infirmités distinctes, et si l'expert psychiatre n'a pas proposé, dans ses conclusions, de déduire du taux d'invalidité de 30 % qu'il a recommandé d'attribuer au titre de la réaction mixte anxio-dépressive, le degré d'invalidité de 20 % correspondant selon lui à la personnalité névrotique, l'ensemble de son analyse et de ses motifs, appuyé sur l'avis du médecin psychiatre, chef de service à l'hôpital d'instruction des armées de Laveran, du 22 janvier 2014, démontre l'aggravation de la première infirmité sous l'effet de la seconde. Dans ces conditions, qui ne sont démenties par aucun autre élément de l'instruction, afin de déterminer le degré d'invalidité entraîné par la réaction mixte anxio-dépressive dont souffre M. B..., il y a lieu, ainsi que l'a considéré la ministre des armées, après avis du médecin chargé des pensions militaires d'invalidité du 18 septembre 2018 et de la commission consultative médicale du 6 septembre 2018, de tenir compte du taux d'invalidité susceptible d'être attribué aux troubles de la personnalité névrotique dont il est également atteint. Dans la mesure où M. B... ne conteste ni le taux d'invalidité attribué en propre à l'infirmité de réaction mixte anxio-dépressive, ni le degré d'invalidité entraîné par les troubles de personnalité névrotique, non plus que le caractère non-imputable au service de ces derniers, et où le taux d'invalidité finalement retenu au titre de cette infirmité est inférieur au taux de 30 % susceptible d'ouvrir droit à une pension en cas de maladie, il n'est pas fondé à solliciter le bénéfice d'une pension au titre de cette affection, au regard des dispositions des articles L. 2, L. 4, L. 9 et L. 10 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. 6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise avant dire droit, que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 janvier 2019 en tant qu'elle a rejeté sa demande de pension au titre de la réaction mixte anxio-dépressive et au bénéfice d'une pension à ce titre. Le présent arrêt ne procédant pas à une revalorisation du taux d'invalidité attribué au titre de cette infirmité, les conclusions d'appel de M. B... tendant à " déclarer l'ensemble des infirmités éligibles à pension, définitives à compter du 9 septembre 2017 ", ne peuvent, elles aussi, qu'être rejetées. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens. Ses conclusions présentées à ce titre ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2023. N° 21MA041802
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de NANTES, 3ème chambre, 26/05/2023, 21NT01663, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 19 juillet 2018 par laquelle le maire de ... a refusé de reconnaître le caractère d'accident de service aux faits survenus le 10 février 2017 ainsi que l'arrêté du 19 juillet 2018 par lequel le maire de ... a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de ses arrêts de travail à compter du 10 février 2017. Par un jugement n° 1804408 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 juin 2021 et 28 avril 2022, Mme C..., représentée par Me Baron, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2021 ; 2°) d'annuler ces décisions du 19 juillet 2018 ; 3°) de mettre à la charge de la commune de ... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le tribunal a renversé la charge de la preuve en estimant que les éléments produits par le demandeur ne suffisent pas à établir un lien suffisant entre son état de santé et l'altercation du 9 février 2017 ; - la situation de souffrance est en lien direct avec l'altercation ; ce fait a présenté un caractère soudain à l'occasion du service et dont il est résulté une lésion ; - la commune aurait dû l'informer que sa demande relevait de la maladie professionnelle si elle considérait qu'un accident de service ne pouvait être observé ; - l'autorité hiérarchique a eu un comportement excédant son exercice normal. Par un mémoire en défense enregistré le 22 février 2022, la commune de ..., représentée par Me Saulnier, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme C... le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Brisson, - les conclusions de M. Berthon, rapporteur public, - les observations de Me Saulnier, représentant la commune de .... Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., ingénieure territoriale, exerce des fonctions de responsable du service accessibilité et sécurité des établissements recevant du public, rattaché à la direction générale technique de la ville de ... dont Mme A... était alors la directrice. Cette dernière ayant constaté, le 9 février 2017, l'absence de la requérante et des agents de son service à une réunion à laquelle ils avaient été conviés le 7 février précédent, une altercation s'est produite entre la requérante et Mme A.... Le lendemain, Mme C... était placée en arrêt de maladie. Le 8 août 2017, elle a établi une déclaration d'accident du travail. Après avoir consulté la commission de réforme, le maire de la commune de ..., par un arrêté du 19 juillet 2018, notifié à l'intéressée par un courrier du même jour, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'évènement survenu le 9 février 2017. Mme C... relève appel du jugement du 15 avril 2021par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. ". Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, entrée en vigueur le 21 janvier 2017 : " (...) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions (...)". 3. Les droits des agents publics en matière d'accident de service sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est survenu, soit en l'espèce le 9 février 2017. Toutefois, les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont pas applicables aux situations constituées avant l'entrée en vigueur du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale pris pour son application. Il s'ensuit que Mme C... ne peut utilement se prévaloir de leur méconnaissance et sa situation relève uniquement du régime fixé par les dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. 4. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 5. En premier lieu, il ressort des termes de sa déclaration du 8 août 2017 que Mme C... a fait état d'une altercation survenue le 9 février 2017 lors de la communication téléphonique au cours de laquelle la directrice de la direction générale technique a demandé à la requérante des explications sur son absence à la réunion qui était organisée et à laquelle elle devait participer, accompagnée des agents de son service. L'intéressée indique s'être alors emportée en raison d'une attitude négative de sa supérieure à l'égard de son service et fait état d'un état dépressif, d'un burn-out et de la nécessité pour elle d'un suivi médical et psychologique. 6. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'au cours de l'entretien téléphonique à l'origine de l'évènement en cause, la directrice aurait tenu des propos ou adopté un comportement qui auraient excédé l'exercice normal du pouvoir hiérarchique en demandant à l'intéressée des explications sur son refus de participer à la réunion à laquelle elle était, tout comme les agents de son service, conviée. L'intéressée reconnaît d'ailleurs s'être emportée lors de cet entretien et aucun des témoignages produits par ses collègues présents au moment de cette altercation ne permet de constater que le comportement de Mme A... aurait constitué à lui seul un évènement traumatisant. Alors même que la commission de réforme a, le 21 juin 2018, émis un avis favorable à la reconnaissance d'un accident de service et que le Dr B..., le 13 mars 2018, a émis l'avis que l'arrêt de travail de Mme C... est en lien avec une situation professionnelle vécue difficilement en lien notamment avec une charge de travail importante, ces circonstances ne peuvent être regardées comme caractérisant un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. 7. Dès lors, en refusant de regarder comme imputable au service l'évènement survenu le 9 février 2017, l'administration n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées. 8. En deuxième lieu, en l'absence de demande présentée en ce sens par Mme C..., l'administration n'était pas tenue d'examiner d'office si la pathologie présentée par l'intéressée était susceptible d'être qualifiée de maladie professionnelle. 9. En dernier lieu, à supposer même que la commune de ... aurait dû informer son agente sur la possibilité pour cette dernière de présenter une demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie dont elle souffre, une telle circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée relative à une reconnaissance au titre d'un accident de service de ses arrêts et soins. 10. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais du litige : 11. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de ... les frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens. Dans les circonstances particulières de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de .... DECIDE : Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de ... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et à la commune de .... Délibéré après l'audience du 4 mai 2023, à laquelle siégeaient : - M. Salvi président, - Mme Brisson, présidente-assesseure, - Mme Lellouch, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mai 2023. La rapporteure, C. BRISSON Le président, D. SALVI La greffière, A. MARTIN La République mande et ordonne au préfet des Côtes d'Armor, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT01663
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 30/05/2023, 22MA01011, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille qui, après jugement rendu avant dire droit le 29 août 2019, a transmis sa demande au tribunal administratif de Marseille, d'annuler la décision du 24 avril 2015 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 2003797 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 avril et 29 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Jullien, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 8 février 2022 ; 2°) d'ordonner au ministre des armées de produire son livret militaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ; 3°) d'ordonner une expertise médicale aux fins de déterminer le taux d'invalidité ophtalmique due selon lui à des éclats d'obus, le taux de l'invalidité aux oreilles et au pied causée selon lui par les souffles d'obus, le taux d'invalidité corporelle provoquée selon lui par des éclats multiples et le taux de l'invalidité causée aux pieds par des pièges multiples, et de dire la date à laquelle ces taux doivent être retenus ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Il soutient que : - durant la campagne militaire d'Indochine, il a été blessé aux yeux et au corps par éclats d'obus, à l'oreille gauche irradiée par souffle d'obus, et aux pieds par pièges métalliques ; - il souffre de séquelles de ces différentes blessures ; - l'administration lui a toujours refusé la communication de son livret militaire, malgré sa demande de pension militaire présentée en 2002 ; - c'est à tort que pour rejeter sa demande, le tribunal a statué sans demander au ministre la production de son livret militaire, seul document de nature à lui permettre de prouver la relation causale, directe et certaine, entre l'infirmité et le service ; - ce n'est qu'une fois ce document produit que sera ordonnée une expertise pour déterminer le taux d'invalidité correspondant à la baisse d'acuité visuelle bilatérale, le taux d'invalidité de l'œil droit blessé lors d'un exercice en Algérie en 1958 et le taux des séquelles de blessures au pied gauche. Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que l'appelant se borne, en appel, à réitérer une demande de production de document déjà satisfaite et subsidiairement, que le jugement attaqué doit être confirmé. Par une ordonnance du 9 mars 2023 la clôture d'instruction a été fixée au 30 mars 2023, à 12 heures, puis reportée au 9 mai 2023 à 12 heures par une ordonnance du 30 mars 2023. M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 septembre 2022 près le tribunal judiciaire de Marseille. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Revert, - et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 24 juillet 1932, a présenté le 31 mai 2012 une demande de pension militaire d'invalidité au titre de sept infirmités distinctes (baisse d'acuité visuelle bilatérale, hypoacousie bilatérale, vertiges rotatoires d'évolution chronique, acouphènes bilatéraux, gonalgies droites, gonalgies gauches et séquelles de blessure du pied gauche) que le ministre de la défense a rejetée par décision du 24 avril 2015. Saisi par M. A... d'une demande tendant à l'annulation de cette décision, le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Marseille a, par jugement rendu avant dire le droit le 29 août 2019, sursis à statuer dans l'attente de la production par la ministre des armées du livret médical militaire de M. A..., et a transmis la demande de celui-ci au tribunal administratif de Marseille. Par un jugement du 8 février 2022, dont M. A... relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande. Sur le cadre juridique applicable : 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et de victimes de la guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'évènements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 3 du même code : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2 ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition :/ (...) 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyer ;/ 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) / La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, soit pendant le service accompli au cours de la guerre 1939-1945, soit au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre, soit pendant le service accompli par les militaires durant la durée légale compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas (...) ". 3. En application des dispositions de cet article L. 3, la présomption d'imputabilité peut bénéficier à l'intéressé à condition que la preuve d'une filiation médicale soit apportée. Cette filiation médicale, qui suppose une identité de nature entre la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée, peut être établie soit par la preuve de la réalité des soins reçus de façon continue pour cette affection soit par l'étiologie même de l'infirmité en cause. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 4. En premier lieu, M. A... rattache la baisse d'acuité visuelle bilatérale dont il dit souffrir depuis le 19 février 2013, à la blessure à l'œil causée par des éclats d'obus le 24 mai 1953, alors qu'il participait à la campagne militaire d'Indochine, et à la blessure à l'œil droit causée le 2 août 1958 par l'explosion d'une vitre de protection, alors qu'il encadrait en Algérie un exercice de tirs par des jeunes recrues. S'il résulte du registre des constatations des blessures, en ce qui concerne le premier fait de service, et d'un procès-verbal d'accident, en ce qui concerne le second, confirmés par le livret médical militaire de M. A..., produit par la ministre des armées en première instance, que lors de ces deux campagnes de guerre, le militaire a été victime, respectivement, d'un léger hématome sous-conjonctival, et d'une blessure au globe de l'œil droit, aucune des pièces du dossier ne fait état, à ces deux dates, non plus que postérieurement à ces faits de service, d'une altération de l'acuité visuelle bilatérale de l'intéressé, ni de douleurs oculaires, ni de soins qu'il aurait reçus en lien avec ces affections. Ainsi, alors que le certificat médical du 30 mai 1953 mentionne une guérison du militaire et que dans son avis du 9 mars 2015, le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité considère que la baisse d'acuité visuelle bilatérale est due à une cataracte bilatérale dont souffre l'intéressé, celui-ci, qui ne conteste pas ce dernier diagnostic, n'est pas fondé à soutenir que l'infirmité visuelle au titre de laquelle il sollicite une pension serait liée au service de manière directe et certaine. 5. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'hypoacousie bilatérale et les acouphènes bilatéraux dont souffre M. A... seraient liés à la blessure par éclats d'obus dont il a été victime le 24 mai 1953 et qui lui ont causé, à cette date, ainsi que le montre le registre des constatations des blessures, des " douleurs temporales irradiées par souffle ", dès lors, d'une part, que le certificat médical du 30 mai 1953 fait état de la guérison de l'intéressé, d'autre part, que celui-ci ne s'est plaint, avant 2013, soit soixante ans après ce fait précis de service, d'aucun trouble de l'audition ni ne soutient avoir reçu des soins en lien avec un tel trouble, et enfin que le médecin chargé des pensions militaires d'invalidité affirme, dans son avis du 9 mars 2015, pas davantage contredit sur ce point, que les deux affections auditives relèvent d'une maladie dégénérative. 6. En troisième lieu, si en affirmant devant la Cour avoir été blessé au corps au cours de son engagement militaire, M. A... évoque les vertiges rotatoires d'évolution chronique, et les gonalgies bilatérales dont il s'est plaint au soutien de sa demande de pension, il ne rattache ces affections à aucun fait précis de service ni à aucune campagne militaire précise. 7. En dernier lieu, il résulte de l'instruction, et plus spécialement du rapport médical du 12 avril 2013, que la cicatrice de trois centimètres au pied droit de M. A..., qui n'est pas douloureuse à la palpation et qui ne limite pas les mouvements de sa cheville, ne lui procure aucune gêne fonctionnelle. Par suite, malgré la proposition du médecin expert d'attribuer au titre de cette cicatrice un taux d'invalidité de 10 %, M. A..., qui d'ailleurs invoque une blessure au pied gauche qui, bien que susceptible d'être rattachée à une blessure infligée par un piège mécanique le 9 juin 1954 et constatée le 10 juin de la même année, ne présente pas de cicatrice, d'après le même rapport médical du 12 avril 2013, ne peut être regardé comme se prévalant d'une infirmité susceptible de lui ouvrir droit à une pension. 8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, et sans qu'il ait été besoin aux premiers juges et à la Cour d'obtenir la production par le ministre des armées du livret militaire de M. A..., que celui-ci n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. Ses conclusions présentées à ce titre ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, où siégeaient : - M. Marcovici, président, - M. Revert, président assesseur, - M. Martin, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2023. N° 21MA010112
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, 2ème chambre, 01/06/2023, 23BX00361, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme B... C... a demandé au tribunal des pensions de Pau d'annuler la décision du 26 janvier 2017 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité pour les infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques post-traumatiques. Par un jugement du 21 février 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19BX04062 du 29 décembre 2021, la cour a annulé ce jugement ainsi que la décision du ministre de la défense du 26 janvier 2017, et a enjoint à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de Mme C... en tenant compte des infirmités de lombalgies chroniques et de cervicalgies chroniques au taux de 10 % chacune, avec effet à compter du 29 janvier 2015. Par un courrier enregistré le 13 septembre 2022, Mme C..., représentée par Me Marbot, a saisi la cour d'une demande d'exécution de cet arrêt. Par une ordonnance n° 23BX00361 du 8 février 2023, le président de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle. Par un mémoire enregistré le 25 avril 2023, Mme C..., représentée par Me Marbot, demande à la cour : 1°) en exécution de l'arrêt n° 19BX04062 du 29 décembre 2021, de liquider ses droits à pension en tenant compte des infirmités de lombalgies chroniques et de cervicalgies chroniques au taux de 10 % chacune, avec effet à compter du 29 janvier 2015 à titre définitif ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que le caractère incurable et définitif de son infirmité est établi, ce que l'administration ne peut ignorer. Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2023, le ministre des armées conclut au rejet de la demande. Il fait valoir que : - dès lors que la cour ne s'est pas prononcée sur le caractère curable ou non des infirmités, la pension a été liquidée à juste titre pour une première période de trois ans ; - Mme C... sera prochainement convoquée aux fins d'expertise dans le cadre du renouvellement de son droit à pension. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A..., - et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme C..., caporale-cheffe de l'armée de terre, titulaire d'une pension militaire d'invalidité définitive concédée au taux de 10 % par arrêté du 21 février 2005 pour l'infirmité de séquelles de traumatisme du genou gauche, en a sollicité la révision le 29 janvier 2015 pour la prise en compte des infirmités nouvelles de lombalgies et de cervicalgies chroniques post-traumatiques, qu'elle attribuait à un accident de la circulation survenu en service le 5 août 2002. Elle a contesté la décision de rejet du ministre de la défense du 26 janvier 2017 devant le tribunal des pensions de Pau, lequel a rejeté sa demande par un jugement du 21 février 2019. Par un arrêt du 29 décembre 2021, la cour a annulé ce jugement et la décision du 26 janvier 2017 au motif que la filiation entre l'accident du 5 août 2002 et les infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques devait être regardée comme établie, et a enjoint à la ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension de Mme C... en tenant compte de ces infirmités au taux de 10 % chacune, avec effet à compter du 29 janvier 2015. Par une décision du 20 mai 2022, le ministre des armées a concédé à l'intéressée, au titre de chacune de ces infirmités, une pension au taux de 10 % avec effet temporaire, du 29 janvier 2015 au 28 janvier 2018. Mme C..., estimant que l'injonction prononcée impliquait qu'il lui soit concédé une pension définitive, a saisi la cour d'une demande d'exécution de l'arrêt du 29 décembre 2021. 2. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. " Aux termes de l'article L. 911-4 du même code : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. " Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement ou l'arrêt dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision. Si la décision faisant l'objet de la demande d'exécution prescrit déjà de telles mesures en application de l'article L. 911-1 du même code, il peut, dans l'hypothèse où elles seraient entachées d'une obscurité ou d'une ambigüité, en préciser la portée. 3. Aux termes de l'article L. 7 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension : " Il y a droit à pension définitive quand l'infirmité causée par la blessure ou la maladie est reconnue incurable. Il y a droit à pension temporaire si elle n'est pas reconnue incurable. / (...). " 4. L'arrêt de la cour du 29 décembre 2021 détaille en son point 3 les éléments du dossier de Mme C... établissant la filiation entre les cervico-dorso-lombalgies causées par l'accident du 5 août 2002 et les lombalgies et cervicalgies chroniques documentées depuis lors, c'est-à-dire depuis plus de douze ans lorsque la demande de pension a été présentée le 29 janvier 2015. Les infirmités de lombalgies et de cervicalgies chroniques étaient ainsi incurables à la date de la demande, de sorte que l'injonction prononcée par la cour se rapportait nécessairement à une pension définitive. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension définitive de Mme C... en tenant compte des infirmités de lombalgies chroniques au taux de 10 % et de cervicalgies chroniques au taux de 10 %, avec effet à compter du 29 janvier 2015, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. 5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DÉCIDE : Article 1er : Il est enjoint au ministre des armées de procéder à la liquidation des droits à pension définitive de Mme C... en tenant compte des infirmités de lombalgies chroniques au taux de 10 % et de cervicalgies chroniques au taux de 10 %, avec effet à compter du 29 janvier 2015, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 2 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 9 mai 2023 à laquelle siégeaient : Mme Catherine Girault, présidente, Mme Anne Meyer, présidente-assesseure, Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023. La rapporteure, Anne A... La présidente, Catherine GiraultLa greffière, Virginie Guillout La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 23BX00361
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de VERSAILLES, 6ème chambre, 12/05/2023, 20VE00367, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 195 536,50 euros en réparation de préjudices subis lors de son déroulement de carrière et à raison de la maladie contractée en service, augmentés des intérêts et avec capitalisation. Par un jugement n° 1606924 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. E... la somme de 31 000 euros, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2016, avec capitalisation de ces intérêts le 30 décembre 2016 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date Procédure devant la cour : Par une ordonnance du 24 janvier 2020, enregistrée le 3 février 2020 au greffe de la cour, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a transmis à la cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée par M. E.... Par une requête et des mémoires enregistrée au greffe de la cour administrative de Paris les 15 mai 2019 et 8 novembre 2019, M. B... E..., représenté par Me Weiss, avocat, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 164 536,50 euros, assortis des intérêts au taux légal à compter des 10 septembre 2012 et 30 décembre 2015 selon la nature des sommes réclamées, avec capitalisation de ces intérêts ; 3°) de rejeter l'appel incident du ministre de la justice ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. E... soutient que : - le jugement serait irrégulier, faute pour celui-ci d'avoir statué sur les droits de la caisse primaire d'assurances maladie de l'Hérault et de la MCF ; - le régime d'indemnisation forfaitaire applicable aux fonctionnaires victimes d'une maladie imputable méconnaît l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le principe d'égalité et le principe de réparation intégrale du préjudice ; - sa maladie professionnelle trouve son origine dans les faits de harcèlement moral dont il a été victime au tribunal administratif de Montpellier et dans une méconnaissance par son employeur et son supérieur hiérarchique de son obligation de sécurité ; - ses préjudices liés à cette maladie tiennent à la perte de son régime indemnitaire, à des prélèvements indus réalisés entre octobre 2009 et février 2010, à un préjudice de carrière, à des troubles dans les conditions d'existence, des souffrances endurées, un préjudice moral ; - l'Etat a commis une faute en procédant à son reclassement un an et demi après sa réintégration ; - cette faute lui a causé une perte de revenu, un préjudice moral, des troubles dans les conditions d'existence et un préjudice de carrière ; - l'Etat a commis une faute en permettant la publication d'une décision du Conseil d'Etat non anonymisée le concernant, entraînant une perte de réputation ; - il a droit à l'indemnisation de la charge fiscale induite par le versement des indemnités réparant les préjudices précités ; - il a engagé des frais d'avocats. Par un mémoire en défense, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 10 octobre 2019, le garde des Sceaux, ministre de la justice, représenté par la SCP Piwnica, Molinié conclut au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Paris du 14 mars 2019 et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il fait valoir que : - le requérant ne peut, dans le cadre de sa requête d'appel, critiquer la constitutionnalité de la loi du 11 janvier 1984 ; - les autres moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés ; - il n'a commis aucune faute en ne procédant pas au reclassement immédiat du requérant ; - les souffrances endurées indemnisées par le tribunal ne sont pas établies ; - les troubles dans les conditions d'existences invoqués par le requérant ne présentent pas de lien de causalité avec sa maladie professionnelle ; - il n'a perdu aucune chance d'être promu premier conseiller en 2007 du seul fait de sa maladie ; - en tout état de cause, il conviendra de ramener les indemnités allouées par les premiers juges à de plus justes proportions. Par ordonnance du président de la 6ème chambre du 20 décembre 2012, la clôture d'instruction a été fixée au 16 janvier 2023 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative. Un mémoire présenté pour M. E... a été enregistré le 3 avril 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la Constitution, et notamment son Préambule ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ; - le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ; - le décret n° 2007-1762 du 14 décembre 2007 ; - le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme C..., - les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique, - et les observations de Me Maujeul pour M. E..., de M. E... et de Me Croizier pour le ministre de la justice. Une note en délibéré présentée par Me Maujeul pour M. E... a été enregistrée le 6 avril 2023. Considérant ce qui suit : 1. M. E... a été nommé, à sa sortie de l'Ecole nationale d'administration, dans le corps des conseillers de tribunal administratif et de cour administrative d'appel le 1er avril 2002 et affecté au tribunal administratif de Montpellier à compter du 1er octobre 2002. Nommé commissaire du gouvernement le 1er septembre 2003, il été placé en congé de longue durée du 22 août 2006 au 21 août 2011. Par arrêté du 10 septembre 2012, le vice-président du Conseil d'Etat a reconnu sa maladie imputable au service à compter du 22 août 2006 et a prononcé sa réintégration à compter du 21 août 2011. Par un avis du 20 juillet 2011, le comité médical l'a déclaré définitivement inapte à l'exercice des fonctions de magistrat administratif mais apte pour un reclassement à compter du terme de son congé le 21 août 2011. L'intéressé, resté sans affectation, a été reclassé sur un poste de chargé de mission à la Cour nationale du droit d'asile le 1er juin 2013. Après avoir été promu au grade de premier conseiller des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel par décret du 23 octobre 2013, il a été placé en position de détachement dans le corps des administrateurs civils auprès du ministre de la justice pour une durée de deux ans, à compter du 1 er février 2014. Par une demande indemnitaire du 30 décembre 2015, M. E... a sollicité le versement de la somme de 1 195 536,50 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa maladie imputable au service et de ses reclassement et réintégration tardifs. Par un jugement du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. E... la somme de 31 000 euros à ces titres. M. E... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions. Par la voie de l'appel incident, le ministre de la justice demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il l'a condamné à indemniser M. E.... Sur la régularité du jugement : 2. M. E... reproche aux premiers juges de ne pas avoir statué sur les droits de la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Hérault et de la Mutuelle centrale des finances, lesquelles lui ont versés des prestations à raison de son état de santé depuis le 22 août 2006. Néanmoins, postérieurement à la communication de la procédure à ces deux acteurs, ceux-ci n'ont formé aucune demande tendant au remboursement de leurs débours. Dès lors, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier faute pour les premiers juges d'avoir statué sur leurs droits. Sur le droit à plein traitement entre le 22 avril 2006 et le 22 avril 2011 : 3. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie. (...) 4°) A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence ". Aux termes de l'article 63 de la même loi : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. (...). Le reclassement (...) est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". 4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie proviennent d'un accident de service, d'une maladie contractée ou aggravée en service ou de l'une des autres causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d'un congé de longue maladie ou d'un congé de longue durée, doit bénéficier de l'adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n'est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d'un autre corps ou cadre d'emplois, s'il a été déclaré en mesure d'occuper les fonctions correspondantes. Toutefois, que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui en remplit les conditions soit placé en congé de longue maladie ou en congé de longue durée, le cas échéant à l'initiative de l'administration. Il a alors droit, dans le premier cas, au maintien de son plein traitement pendant trois ans et, dans le second, au maintien de son plein traitement pendant cinq ans et à un demi-traitement pendant trois ans. 5. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 26 août 2010 : " 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, aux magistrats de l'ordre judiciaire et, le cas échéant, aux agents non titulaires relevant du décret du 17 janvier 1986 susvisé est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et des articles 10, 12, 14 et 15 du décret du 17 janvier 1986 susvisé ; ". Ce décret, qui ne pouvait avoir de portée rétroactive, est entré en vigueur le 30 août 2010. Aux termes de l'article 37 du décret du 14 mars 1986 : " A l'issue de chaque période de congé de longue maladie ou de longue durée, le traitement intégral ou le demi-traitement ne peut être payé au fonctionnaire qui ne reprend pas son service qu'autant que celui-ci a demandé et obtenu le renouvellement de ce congé. Au traitement ou au demi-traitement s'ajoutent les avantages familiaux et la totalité ou la moitié des indemnités accessoires, à l'exclusion de celles qui sont attachées à l'exercice des fonctions ou qui ont le caractère de remboursement de frais. " 6. Par une décision du 10 septembre 2012, le vice-président du Conseil d'Etat a reconnu la maladie de M. E... imputable au service et a requalifié les congés de longue maladie et de longue durée intervenus entre le 22 août 2006 et 21 août 2011 en congé pour maladie contractée dans l'exercice des fonctions. De ce fait, M. E... a bénéficié du reversement des sommes qu'il aurait dû percevoir à plein traitement du 22 août 2009 au 21 août 2011. Ces versements n'incluaient pas les parts individuelle et fonctionnelle de son indemnité de fonctions. M. E... demande à la cour de condamner l'Etat à lui verser les sommes correspondant à ce régime indemnitaire. 7. Cependant, le requérant n'est pas fondé à demander l'application de l'article 1er du décret du 26 août 2006 pour la période courant du 22 août 2006 au 29 août 2010, antérieure à son entrée en vigueur. Pour la période du 30 aout 2010 au 21 août 2011, la requalification des congés de M. E... en congés pour maladie contractée dans l'exercice des fonctions n'a pas modifié la nature de longue durée du congé qui lui avait été alors octroyé. Or un tel congé n'est pas au nombre de ceux visés par le décret du 26 août 2010 relatif au maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat dans certaines situations de congés. L'indemnité de fonction prévue par le décret du 14 décembre 2007 susvisée est une indemnité attachée à l'exercice effectif des fonctions par l'agent, dont le versement est exclu en cas de congé de longue durée. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à demander le versement de la somme de 81 502,98 euros au titre d'une indemnité dont il aurait été illégalement privé. 8. En second lieu, une somme totale de 1 848,19 euros a été prélevée sur les traitements de M. E... entre les mois d'octobre 2009 et de février 2010 au titre de " précomptes pour trop perçu ". Néanmoins il résulte de l'instruction et des calculs mêmes du requérant que, malgré l'absence plus que regrettable d'explicitation par l'administration devant les premiers juges comme en appel du détail des mesures de régularisation opérées en août et octobre 2012, ces prélèvements étaient justifiés par le retard pris par l'administration pour tenir compte du placement à demi-traitement du requérant à compter du 22 août 2009 et que leur restitution était incluse dans les régularisations de rémunérations opérées en 2012. Dès lors, M. E... n'est pas fondé à demander le paiement d'une somme à ce titre. Sur le régime d'indemnisation des agents victimes d'une maladie contractée en service : 9. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente viagère d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité doivent être regardées, compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leurs modes de calcul, comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre cette personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. 10. M. E... soutient que le régime d'indemnisation ainsi détaillé méconnaît l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et les principes constitutionnels d'égalité et de réparation intégrale du préjudice. Néanmoins, faute d'avoir été présentés dans un mémoire distinct, conformément aux dispositions de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, ces moyens doivent être écartés comme irrecevables. En ce qui concerne l'existence d'une faute de l'Etat : 11. En premier lieu, M. E... reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance et tiré de l'existence d'un harcèlement moral commis à son encontre par la présidente du tribunal administratif de Montpellier entre 2002 et 2006. Il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Paris aux points 5 à 10 du jugement. 12. En second lieu, aux termes de l'article 2-1 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité ". Aux termes de l'article 3 de ce décret, dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans les administrations et établissements visés à l'article 1er, les règles applicables en matière d'hygiène et de sécurité sont, sous réserve des dispositions du présent décret, celles définies au titre III du livre II du Code de travail et par les décrets pris pour son application ". Enfin, aux termes de l'article L. 230-2 du code du travail alors en vigueur : " Le chef d'établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l'établissement, y compris les travailleurs temporaires. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation ainsi que la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. Il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. ". 13. D'une part, il résulte de l'instruction qu'ont été mises en place au sein du tribunal administratif de Montpellier des méthodes volontaristes de traitement des dossiers en vue de la résorption d'un délai de jugement pouvant atteindre sept ans. Si ces méthodes ont conduit à un alourdissement de la charge de travail des magistrats et à une opposition syndicale, il ne résulte pas de l'instruction que cette charge aurait manifestement dépassé les capacités des magistrats de telle sorte que leur santé aurait été mise en jeu. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... aurait eu une attitude inutilement dévalorisante à l'égard du requérant, les reproches qui lui ont été formulés trouvant leur cause dans son comportement, notamment lors de l'audience du 17 décembre 2003 ou de ses permanences d'urgence. 14. D'autre part, le courrier de M. E... du 15 juin 2005 adressé au chef de la mission d'inspection des juridictions administratives, s'il remettait en cause, au demeurant de manière partiellement infondée, certaines pratiques au sein du tribunal administratif de Montpellier, ne comportaient aucune alerte sur les conséquences du fonctionnement de cette juridiction sur l'état de santé du requérant ou des magistrats qui la composent. Dès lors, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le Conseil d'Etat aurait, en qualité de gestionnaire, méconnu son obligation de sécurité en n'ordonnant pas une inspection au sein de ce tribunal. De la même manière, la seule absence d'adoption, à la date des faits, d'un protocole formel de prévention des risques psycho-sociaux, ne saurait caractériser une méconnaissance de cette obligation eu égard à l'existence de la mission d'inspection évoquée ci-dessus et des mécanismes d'alerte déjà admis au sein de la juridiction administrative. 15. Dès lors, M. E... n'est pas fondé à soutenir que son employeur ou la présidente du tribunal administratif de Montpellier auraient manqué à leur obligation de veiller à sa sécurité physique et mentale. 16. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que la maladie contractée dans l'exercice de ses fonctions trouve sa cause dans une faute commise par l'administration. En ce qui concerne les préjudices invoqués : 17. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 9 et 16 du présent arrêt que M. E... n'est pas fondé à demander l'indemnisation de la perte de son régime indemnitaire et d'un préjudice d'incidence professionnelle. 18. En second lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, rien ne faisait obstacle à ce que les premiers juges fassent une juste et globale évaluation globale des préjudices extrapatrimoniaux subis par lui à raison de sa maladie professionnelle. Il résulte de l'instruction que M. E... a été victime pendant plusieurs années d'un syndrome dépressif anxieux entraînant des troubles de l'attention, de la fatigue et des céphalées. Son état de santé a conduit son épouse à prendre un emploi à plein temps et a conduit M. E... à devoir renoncer à la carrière de magistrat, fonctions auxquelles il a été déclaré inapte. Si à raison de son attitude au sein du tribunal administratif de Montpellier, M. E... ne disposait pas d'une chance sérieuse d'être nommé premier conseiller dès 2007, il n'est pas contestable que son placement en congé a participé à un report inédit de sept ans de cet avancement. A cet égard, le garde des Sceaux, ministre de la justice ne saurait pour justifier ce délai se prévaloir des mérites de l'intéressé et de l'existence d'une promotion " au choix " eu égard au faible délai ayant séparé son affectation à la Cour nationale du droit d'asile et sa proposition d'avancement. En revanche, si M. E... fait état, au titre de ses troubles dans les conditions d'existence, de frais bancaires et de la souscription d'un crédit, il ne résulte pas de l'instruction que ces frais, pour certains engagés lors de la période de rémunération à plein traitement du requérant, présenteraient dans leur intégralité, eu égard aux charges et aux ressources du couple, un lien de causalité direct avec sa maladie et ses conséquences pécuniaires. De la même manière, M. E... ne justifie ni de la nécessité de vendre un appartement dont il était propriétaire en raison de son placement en congé ni des revenus qu'il tirait de ce bien. Il résulte de tout ce qui précède qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances, des troubles dans les conditions d'existences et du préjudice moral subis par M. E... en lui allouant à ces titres une somme globale de 20 000 euros. Sur le reclassement : En ce qui concerne l'existence d'une faute : 19. Aux termes de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 alors en vigueur : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. (...) Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le reclassement, qui est subordonné à la présentation d'une demande de l'intéressé, peut intervenir ". Aux termes de l'article 2 du décret du 30 novembre 1984, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un autre corps doit se voir proposer par l'administration plusieurs emplois pouvant être pourvus par la voie du détachement. L'impossibilité, pour l'administration, de proposer de tels emplois doit faire l'objet d'une décision motivée. / Les dispositions statuaires qui subordonnent ce détachement à l'appartenance à certains corps ou à certaines administrations, de même que celles qui fixent des limites d'âge supérieures en matière de détachement, ne peuvent être opposées à l'intéressé. (...) La procédure de reclassement telle qu'elle résulte du présent article doit être conduite au cours d'une période d'une durée maximum de trois mois à compter de la demande de l'agent. ". 20. Aux termes de l'article R. 231-1 du code de justice administrative : " Les magistrats des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel exercent leurs fonctions de magistrats administratifs au sein de ces juridictions ou à la Cour nationale du droit d'asile ". Aux termes de l'article R. 231-2 du même code : " Les premiers conseillers et les conseillers peuvent occuper les fonctions de rapporteur ou de rapporteur public dans les tribunaux administratifs ou dans les cours administratives d'appel ". 21. M. E... a été déclaré inapte aux fonctions de magistrat, soit à tout emploi de son grade, par le comité médical le 20 juillet 2011, avant l'expiration de son congé de longue durée. Si le requérant avait dans un premier temps sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et à défaut son reclassement, le ministre ne saurait lui opposer le retard pris dans cette reconnaissance, eu égard à l'indépendance de ces procédures, a fortiori après que M. E... ait indiqué qu'à défaut de reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie avant le 21 août 2011, il demandait un reclassement à cette date. A cet égard, la demande formulée par M. E... quelques jours avant la réunion du comité médical doit être regardée comme une demande de reclassement au sens de l'article 3 du décret du 30 novembre 1984 précité. De la même manière, le garde des Sceaux, ministre de la justice ne saurait reprocher à M. E... l'envoi de son curriculum vitae en mai 2012 seulement, eu égard à l'absence de prise en charge de sa demande de reclassement par l'administration avant cette date. Il ne résulte pas de l'instruction qu'une fois la réintégration de M. E... décidée, son reclassement au sein de la Cour nationale du droit d'asile ait nécessité un aménagement complexe de cette juridiction. Dès lors, le délai d'un an et demi pris pour reclasser M E... constitue une faute engageant la responsabilité de l'Etat. En ce qui concerne les préjudices : 22. En premier lieu, M. E... demande l'indemnisation de la perte de revenus résultant du retard pris dans son reclassement et tenant à l'absence de régularisation d'un demi-traitement perçu en juillet 2012 et au non-versement de son indemnité de fonctions. Néanmoins, le requérant, qui a bénéficié d'un rappel d'indemnité de 13 500 euros en novembre 2013, ne justifie pas des primes et indemnités dont il bénéficie en qualité d'administrateur civil et ainsi de la différence entre la rémunération effectivement perçue et celle à laquelle il aurait pu prétendre en l'absence de retard dans son reclassement. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, il résulte du courriel de M. D... du 16 juillet 2012 et de ses calculs mêmes, que sa rémunération pour le mois de juillet 2012 a été assurée à plein traitement, à la suite de la régularisation intervenue en octobre 2012 de la retenue opérée en août 2012. Dès lors, les préjudices invoqués par M. E... ne peuvent être regardés comme établis. 23. En deuxième lieu, si M. E... soutient qu'il a été privé d'une chance de faire la preuve de sa valeur professionnelle et ainsi d'être promu au grade de premier conseiller avant 2013, cet avancement constitue une procédure indépendante du reclassement par la voie du détachement, lequel permet un avancement distinct dans les deux corps. Dès lors, le lien de causalité entre la faute évoquée au point 21 du présent arrêt et le préjudice invoqué ne peut être regardé comme établi. 24. En troisième lieu, le retard pris par l'administration pour reclasser M. E... a prolongé la situation de précarité et de fragilité psychologique dans laquelle il se trouvait et a conduit au prolongement de sa rémunération à demi-traitement pendant un an et à l'absence de placement de M. E... dans une position régulière pendant de nombreux mois. Dès lors, les premiers juges ont fait une correcte évaluation des préjudices ainsi subis par le requérant en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 6 000 euros. Sur la publication de la décision du Conseil d'Etat n° 275070 du 25 janvier 2006 25. Il est constant que cette décision, concernant la contestation par M. E... du courrier du 23 décembre 2003 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Montpellier lui a reproché ses propos lors de l'audience du 17 décembre 2003, de la décision du même auteur du 7 décembre 2004 lui confiant des fonctions de rapporteur et de sa notation pour l'année 2004, a fait l'objet d'une publication intégrale et non anonymisée dans le recueil Lebon et sur Légifrance et, de ce fait, dans de nombreuses revues juridiques. Néanmoins, elle ne comporte aucun élément circonstancié de nature à porter atteinte à la réputation de M. E.... Dès lors, celui-ci n'établit pas de ce seul fait avoir subi un tel préjudice de réputation et ses conclusions indemnitaires présentées à ce titre doivent être rejetées. Sur les autres sommes demandées : 26. En premier lieu, les majorations d'imposition auxquelles serait exposé M. E... du fait du versement des indemnités précitées, au demeurant non établies, trouvent leur origine dans la règlementation fiscale et son évolution et ne saurait être regardées comme procédant directement de sa maladie professionnelle ou du retard pris par l'administration à le reclasser. Les conclusions du requérant présentées à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées. 27. En second lieu, M. E... n'est pas fondé à demander, sur le terrain indemnitaire, la prise en charge des frais d'avocat induits par la présente instance, lesquels ont vocation à être régis par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Sur les intérêts et la capitalisation : 28. D'une part, M. E... a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 26 000 euros à compter du 30 décembre 2015, date de réception de sa demande préalable par le vice-président du Conseil d'Etat. 30. D'autre part, M. E... a demandé la capitalisation des intérêts dans sa requête, le 2 mai 2016. A cette date les intérêts n'étaient pas dus pour au moins une année entière. Dès lors, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 30 décembre 2016, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière. 29. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a limité la condamnation de l'Etat à la somme de 31 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2015 et avec capitalisation à compter du 30 décembre 2016 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date. En revanche, le ministre de la justice est fondé à demander à ce que cette indemnité soit ramenée à la somme de 26 000 euros et à demander la réformation du jugement en ce sens. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. E... demande à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... le versement de la somme que l'Etat demande sur le fondement des mêmes dispositions. DÉCIDE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. E... la somme de 26 000 (vingt-six mille) euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2015. Les intérêts échus à la date du 30 décembre 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 2 : Le jugement n° 1606924 du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié M. B... E... et au garde des Sceaux, ministre de la justice. Copie en sera adressée au secrétaire général du Conseil d'Etat. Délibéré après l'audience du 6 avril 2023, à laquelle siégeaient : M. Albertini, président M. Mauny, président assesseur, Mme Villette, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mai 2023. La rapporteure, A. C...Le président, P.-L. ALBERTINILa greffière, F. PETIT-GALLAND La République mande et ordonne au garde des Sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme La greffière, 2 N° 20VE00367
Cours administrative d'appel
Versailles