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CAA de DOUAI, 2ème chambre, 27/06/2023, 22DA00753, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler le certificat de suspension du 27 janvier 2020 par lequel le ministre de l'action et des comptes publics a suspendu en totalité, à compter du 1er janvier 2019, le paiement de l'allocation n° 9 dont est assortie sa pension militaire d'invalidité n° 17-001.601 F et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance n° 2000609 du 24 février 2022, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 juin 2022 et 4 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Hélène Detrez Cambrai, demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance ; 2°) d'annuler le certificat de suspension du ministre de l'action et des comptes publics du 27 janvier 2020 ; 3°) d'enjoindre à l'autorité compétente de procéder à l'édiction d'une décision administrative tendant à l'attribution de l'allocation spéciale n°9 sans que le montant à percevoir puisse être inférieur à celui afférent à l'indice de pension, avec effet rétroactif, dans un délai de sept jours à compter de l'arrêt à intervenir ; 4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 48 480 euros en réparation de son préjudice financier ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son avocat, d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle. Il soutient que : - l'ordonnance est irrégulière dès lors que, d'une part, la décision litigieuse du 27 janvier 2020, qui ne constitue pas une simple lettre d'information, ne comportait aucune mention s'agissant du recours administratif préalable obligatoire prévu à l'article L. 711-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, d'autre part, le tribunal s'est trompé en prenant la décision de la commission de recours d'invalidité du 16 octobre 2018 comme une réponse à sa demande de régularisation alors que cette pièce a été produite dans une autre instance et que la demande de régularisation concernait uniquement la production d'une demande indemnitaire préalable ; - l'ordonnance ayant été prise plus de deux ans après l'introduction de sa requête, il pouvait légitiment croire que sa requête serait examinée sur le fond ; - le tribunal aurait dû réinterpréter ses conclusions comme tendant, non seulement à la reprise du versement de l'allocation spéciale n°9, mais également à l'indemnisation de sa perte de revenus ; - la décision litigieuse du 27 janvier 2020 est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il remplissait les conditions d'attribution de l'allocation n°9, ses ressources à compter du 1er janvier 2019 étant inférieures au montant correspondant à 900 points d'indice. - il est en droit de solliciter la somme de 48 480 euros sur le fondement de la responsabilité sans faute de l'Etat en réparation du préjudice résultant de la perte de revenus générée par son invalidité imputable au service. Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 octobre 2022 et 9 février 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête de M. B.... Il soutient que : - la demande indemnitaire de M. B... est irrecevable en ce qu'elle constitue une demande nouvelle en appel ; - les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2022. Par une ordonnance du 10 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 février 2023 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : -le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère, - et les conclusions de M. Guillaume Toutias, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. A... B... est titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 55% qui lui a été concédée par arrêté du ministre des armées du 17 juillet 2017 à la suite d'une fracture du scaphoïde carpien droit résultant d'un accident survenu le 28 juillet 1970 lors de son service militaire et reconnu imputable au service. Il perçoit également l'allocation spéciale n°9 prévue par l'article L. 131-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par courrier du 27 janvier 2020, le ministre de l'action et des comptes publics l'a informé que le paiement de cette allocation faisait l'objet d'une suspension totale à compter du 1er janvier 2019 dès lors que ses services avaient constaté que le montant total des sommes perçues au titre de ses retraites servies par la caisse d'assurance retraite et santé au travail (CARSAT) Nord-Picardie, l'association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) et l'association des régimes de retraite complémentaire (ARRCO), était supérieur à celui correspondant à 900 points d'indice pour l'année 2019. Par une décision du même jour, il a certifié qu'il y avait lieu de suspendre en totalité, à compter du 1er janvier 2019, le paiement de l'allocation n° 9 dont était assortie la pension militaire d'invalidité de l'intéressé, sans que le montant à percevoir puisse être inférieur à celui afférent à l'indice de pension 269,20. M. B... relève appel de l'ordonnance du 24 février 2022 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif d'Amiens a, en application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat de suspension du 27 janvier 2020 et demande à la cour de condamner l'Etat à lui verser une somme de 48 480 euros au titre de son préjudice financier. Sur la fin de non-recevoir soulevée à l'encontre des conclusions indemnitaires : 2. M. B... demande à la cour de condamner l'Etat, sur le fondement de la responsabilité sans faute, à lui verser la somme de 48 480 euros en réparation du préjudice financier résultant de la perte de revenus générée par son invalidité imputable au service. Toutefois, de telles conclusions, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables. La circonstance que M. B... ait, d'une part, indiqué dans un courrier du 30 janvier 2019 adressé au ministre des armées qu'il souhaitait que l'allocation spéciale n°9 prévue par l'article L. 131-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre lui soit à nouveau versée à hauteur de 300 euros mensuels " ou qu'une autre solution soit trouvée " et, d'autre part, précisé à la cour dans sa requête du 31 mars 2022 que la saisine du tribunal avait pour objet de faire revenir l'administration sur sa décision de suspension de versement de l'allocation spéciale n°9 et " de lui demander de bien vouloir étudier la possibilité " de l'indemniser, n'a pas pour effet de pallier l'absence de conclusions indemnitaires figurant dans sa demande présentée devant le tribunal. Par suite, il y a lieu d'accueillir la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et de rejeter les conclusions indemnitaires présentées par M. B.... Sur la régularité de l'ordonnance attaquée : 3. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les (...) présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...). " 4. D'autre part, aux termes de l'article L. 711-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Les recours contentieux contre les décisions individuelles prises en application du livre Ier et des titres Ier à III du livre II sont précédés d'un recours administratif préalable exercé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 711-1 de ce code : " Tout recours contentieux formé à l'encontre des décisions individuelles prises en application des dispositions du livre Ier et des titres Ier à III du livre II du présent code est précédé, à peine d'irrecevabilité, d'un recours administratif préalable obligatoire examiné par la commission de recours de l'invalidité, placée conjointement auprès du ministre de la défense et du ministre chargé du budget. (...). / Le recours administratif formé auprès de la commission conserve le délai de recours contentieux jusqu'à la notification de la décision prévue à l'article R.711-15. (...) ". 5. L'institution, par les dispositions ci-dessus rappelées, d'un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite de ce recours se substitue en principe à la décision initiale et qu'elle est seule susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux. 6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... n'a pas justifié de l'exercice d'un recours administratif préalable obligatoire devant la commission de recours de l'invalidité avant de saisir le tribunal administratif d'Amiens de sa demande tendant à l'annulation du certificat du ministre de l'action et des comptes publics du 27 janvier 2020 suspendant en totalité, à compter du 1er janvier 2019, le paiement de l'allocation n° 9 dont était assortie sa pension militaire d'invalidité alors que, d'une part, une telle allocation avait été prise en application du livre 1er du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et, d'autre part, ce certificat, dont il n'est pas contesté que l'intéressé en a eu notification, comportait la mention d'un tel recours. L'intéressé ne peut utilement se prévaloir de ce que le courrier du 27 janvier 2020 par lequel le ministre de l'action et des comptes publics l'a informé que le paiement de cette allocation faisait l'objet d'une suspension totale à compter du 1er janvier 2019, ne comportait pas l'indication du recours administratif préalable obligatoire exigé par les dispositions précitées de l'article R. 711-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dès lors que ce courrier d'information ne présente aucun caractère décisoire. Il suit de là que le président de la première chambre du tribunal administratif d'Amiens, qui n'était pas tenu d'inviter M. B... à régulariser ses écritures, a pu, sans irrégularité, rejeter la demande de l'intéressé au motif qu'elle était manifestement irrecevable sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le tribunal lui avait adressé le 12 mars 2020 une demande de régularisation portant sur la production de la preuve de l'envoi et de la réception par l'administration d'une demande indemnitaire préalable et qu'il avait considéré à tort que la décision de la commission de recours d'invalidité du 16 octobre 2018 portant sur sa demande de révision de sa pension militaire d'invalidité, qui avait été produite dans le cadre d'une autre instance, était une réponse à cette demande de régularisation. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la première chambre du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Sur les frais liés à l'instance : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à Me Hélène Detrez-Cambrai. Délibéré après l'audience publique du 13 juin 2023 à laquelle siégeaient : - Mme Anne Seulin, présidente de chambre, - M. Marc Baronnet, président-assesseur, - Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023. La rapporteure, Signé : S. StefanczykLa présidente de chambre, Signé : A. Seulin La greffière, Signé : A.S. Villette La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme, La greffière Anne-Sophie Villette 2 N°22DA00753
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 28/06/2023, 21BX02335, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision du 23 octobre 2019 par laquelle le directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales lui a attribué le bénéfice d'une pension d'invalidité non imputable au service. Par un jugement n° 1902872 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mai 2021 et le 6 juillet 2021, Mme A..., représentée par Me Hirtzlin-Pinçon, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 23 mars 2021 ; 2°) d'ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à un expertise médicale afin de déterminer l'origine de sa maladie, et si cette dernière est en lien avec le service ; 3°) d'annuler la décision du 23 octobre 2019 du directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales précitée ; 4°) d'enjoindre au directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales de prendre une nouvelle décision tenant compte de l'imputabilité au service de la retraite pour invalidité et de ses accessoires dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales les frais d'expertise ; 6°) de mettre à la charge de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales la somme de 2 500 euros HT en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens. Elle soutient que : - la décision attaquée est entachée d'incompétence, la signature illisible ne permettant pas d'identifier l'identité de son auteur ; - la décision de mise en retraite est mal fondée en ce qu'elle n'a pas examiné l'imputabilité au service de l'invalidité dont elle est atteinte. Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2021, le directeur des retraites et de la solidarité de la caisse des dépôts et consignations conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête et subsidiairement à son rejet au fond. Il soutient que le jugement attaqué a été rendu en premier et dernier ressort par le tribunal administratif de Pau et qu'il ne peut faire l'objet que d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat ; subsidiairement, il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraites ; - le code de justice administrative. - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Caroline Gaillard, - et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., adjointe technique principale de deuxième classe, employée par la commune de Vic-en-Bigorre, a été victime d'un accident reconnu imputable au service le 9 septembre 2003, puis a connu une période d'arrêt maladie et de reprise à temps partiel entre le 14 mars 2005 et le 11 février 2012, après que le comité médical départemental l'eut déclarée apte à la reprise du travail. A compter du 8 avril 2013, Mme A... a été placée en arrêts de maladie ordinaire successifs, avec alternance de reprise de poste, jusqu'au 12 janvier 2016. Le comité médical départemental s'est prononcé le 22 mars 2019 en faveur de l'inaptitude totale et définitive de Mme A... à toutes fonctions avec saisine de la commission de réforme pour mise à la retraite pour invalidité non imputable au service. Par un avis du 30 avril 2019, cette dernière a adopté les mêmes conclusions. Par un arrêté du 8 octobre 2019, le maire de Vic-en-Bigorre a admis Mme A... à la retraite pour invalidité à compter du 1er novembre 2019 et l'a radiée des cadres. Par décision du 23 octobre 2019, le directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales (CNRACL) a attribué à l'intéressée le bénéfice d'une pension d'invalidité sans la cumuler avec une rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Pau l'annulation de cette décision en tant qu'elle ne lui reconnaît pas un droit à pension pour invalidité imputable au service et ne prévoit pas le versement d'une rente viagère d'invalidité. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article R. 351-2 du code de justice administrative : " Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire. ". 3. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions ". 4. Les conclusions dont est saisie la cour par Mme A... tendent à l'annulation de la décision du 23 octobre 2019 en tant qu'elle ne prévoit pas le versement d'une rente viagère d'invalidité et relèvent d'un litige en matière de pensions de retraite au sens des dispositions précitées de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Il en va de même des conclusions accessoires tendant à ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à un expertise médicale afin de déterminer l'origine de sa maladie et, si cette dernière est en lien avec le service, que le directeur général de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) prenne une nouvelle décision tenant compte de l'imputabilité au service de la retraite pour invalidité et de ses accessoires. Le Conseil d'État est, par suite, seul compétent pour en connaître. 5. Il résulte de ce qui précède, que le litige dont Mme A... a saisi le tribunal administratif de Pau relève du seul pourvoi en cassation. Il y a lieu, par suite, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, de transmettre l'ensemble des conclusions présentées par Mme A... au Conseil d'Etat. DECIDE : Article 1er : : La requête n° 21BX02335 présentée par Mme A... est transmise au Conseil d'Etat. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au directeur des retraites et de la solidarité de la caisse des dépôts et consignations. Délibéré après l'audience du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Florence Demurger, présidente, M. Frédéric Faïck, président-assesseur, Mme Caroline Gaillard, première conseillère, Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 juin 2023. La rapporteure, Caroline Gaillard La présidente, Florence Demurger La greffière, Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21BX02335
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 20/06/2023, 21TL02327, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier : - de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 146 800 euros, ou au minimum 51 800 euros, au titre de son déficit fonctionnel permanent, 6 231,66 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, 3 240,32 euros au titre de l'aide par tierce personne, 20 000 euros pour le pretium doloris, 4 000 euros pour le préjudice esthétique de 2 %, 2 000 euros au titre du déficit esthétique temporaire, 5 368 euros au titre des pertes de 20% de salaire sur 22 mois, 7 286,60 euros au titre des salaires dus à compter de sa démission jusqu'à la fin du contrat, 1 304,46 euros et 2 184,13 euros au titre de prélèvements indus sur ses comptes, 7 200 euros de perte de salaire du fait de la mention communiquée au jury du concours de gardien de la paix, le privant de réussite ou de chance sérieuse de réussite, 17 611 euros au titre de son contrat non honoré d'enseignant de piano, 17 737 euros pour son entreprise de facteur de piano qu'il a dû fermer, 10 000 euros au titre du préjudice psychologique et moral et du harcèlement subis du fait de l'accident et des fautes de l'Etat, 5 000 euros au titre du préjudice subi du fait du refus de l'administration de considérer l'expertise judiciaire, 50 000 euros du fait des incidences professionnelles, 24 000 euros de perte de deux années universitaires, 72 000 euros pour l'obligation de suivre un master, 2 184,13 euros de prélèvements sur salaire indus, 10 000 euros de préjudice d'agrément ainsi que 60 000 euros de préjudice sexuel et d'établissement, avec intérêts à compter de la demande préalable ; - d'ordonner la communication du bulletin de salaire de février 2015, de lui accorder une provision de 30 000 euros, d'ordonner une deuxième expertise, et de réserver les postes de véhicule et de réfection de salle d'eau adaptée, de lui verser les sommes de 21 464,36 euros et 10 244 euros, son état pouvant s'aggraver, d'enjoindre à l'Etat de régler une pension d'invalidité sur le fondement de l'évaluation fonction publique ou sécurité sociale ; - de mettre à la charge de l'Etat les dépens, la somme de 2 460 euros pour les deux expertises, et une somme de 3 000 euros au titre de l'article L761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 2004520 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à payer à M. B... une somme de 34 850 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017, mis à la charge définitive de l'Etat les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960 euros, mis également à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête. Procédure devant la cour : Par une requête et un dépôt de pièces, enregistrés les 16 juin et 12 décembre 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°21MA02327 puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02327, M. B..., représenté par Me Delort, demande à la cour : 1°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 6 231,60 euros au titre de son déficit fonctionnel temporaire, de 3 240,32 euros au titre de l'aide par tierce personne, de 20 000 ou 8 000 euros au titre des souffrances endurées, de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, de 5 368 euros au titre des pertes de 20% de salaires sur 22 mois, de 7 286,60 euros au titre des salaires dus de la date de sa démission jusqu'à la fin du contrat, de 1 304,46 euros au titre de prélèvements indus sur ses comptes, de 7 200 euros au titre de pertes de salaires du fait de la mention communiquée au jury du concours de gardien de la paix, le privant de réussite à l'oral ou de chance sérieuse de réussite à ce concours, de 17 611 euros au titre de son contrat non honoré d'enseignant de piano, de 17 737 euros au titre de son entreprise de facteur de piano, de 146 800 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ou, au moins de 51 800 euros, de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, de 72 000 euros au titre de l'obligation de formation universitaire, de 4 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, de 10 000 euros au titre du préjudice d'agrément, de 60 000 euros au titre du préjudice sexuel et d'établissement, de 10 000 euros au titre du préjudice moral, de 5 000 euros au titre du préjudice subi du fait du refus de l'administration de considérer l'expertise judiciaire et de 2 184,13 euros, somme indûment prélevée, avec intérêts de droit à compter de la demande préalable ; 2°) d'ordonner la communication du bulletin de salaire de février 2015 et d'enjoindre à l'Etat de régler une pension d'invalidité sur le fondement de l'évaluation fonction publique ; 3°) très subsidiairement, d'ordonner une seconde expertise et une provision de 5 000 euros à valoir sur l'aggravation des préjudices subis ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat les frais d'expertise et d'assistance à victime par expert privé, de réserver les postes de véhicule et de réfection de salle d'eau adaptée, à hauteur de 21 464,36 euros et 10 244 euros, de porter à 10 000 euros la somme mise à la charge de l'Etat en première instance au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'instance d'appel, les dépens et une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - les juridictions administratives sont compétentes pour juger des incidences de son accident de service ; - la faute de l'administration est présumée du fait de la vétusté de la poutre et de l'absence de précision quant aux matelas ; - l'administration a commis une faute dans l'organisation de l'entraînement ; il a subi un retard et un défaut de prise en charge adéquate ; les actes de l'administration, qui a retardé le paiement de frais médicaux, a refusé des soins prescrits sans justification, lui a opposé des refus de formation infondés, ne lui a pas communiqué, malgré ses demandes, le bulletin de salaire de février 2015, a laissé un courrier dans sa boîte aux lettres, a effectué des prélèvements indus sur salaires alors qu'elle reconnaît qu'une somme de 2 184,13 euros doit lui être reversée et émis des titres de perception indus, doivent être qualifiés de harcèlement moral ; - l'expert désigné a grandement minimisé son préjudice psychologique ; la date de consolidation qu'il a fixée ne saurait être retenue et se situe au 24 octobre 2016 ; il a estimé des déficits fonctionnels temporaires trop réduits et a minimisé l'aide par tierce personne ; le taux de déficit permanent retenu est insuffisant, l'expert précisant lui-même que celui de 10 % retenu correspond à un taux de 20% dans la fonction publique ; il convient de relever les taux des préjudices subis, notamment celui du déficit fonctionnel permanent et de retenir un préjudice sexuel et d'établissement ainsi que l'incidence professionnelle ; - au titre des préjudices temporaires, il doit se voir allouer une somme de 6 231,60 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, une somme de 3 240,32 euros au titre de l'aide par tierce personne, une somme de 20 000 euros au titre des souffrances endurées et de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; ses pertes de salaires d'adjoint de sécurité de la date de l'accident jusqu'à sa démission s'élèvent à 5 368 euros et sa perte de salaires jusqu'au terme de son contrat à 7 287,60 euros ; ses pertes de salaires en qualité de professeur de piano s'établissent à 17 400 euros et les pertes financières de son entreprise de facteur et d'accordeur de piano à 17 637 euros ; - son déficit fonctionnel permanent s'établit à la somme de 146 800 euros ou, au moins, à celle de 51 800 euros ; il a subi une incidence sur sa carrière professionnelle qui peut être évaluée à la somme de 50 000 euros ; son obligation de formation peut être fixée à la somme de 72 000 euros ; son préjudice esthétique permanent peut être fixé à 4 000 euros ; il a subi un préjudice d'agrément qui sera fixé à la somme de 10 000 euros, un préjudice sexuel et d'établissement qui peut être évalué à celle de 30 000 euros et un préjudice moral fixé à la somme de 10 000 euros. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de M. B.... Il fait valoir que la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur les conclusions tendant à indemniser les conséquences de l'accident au titre de la responsabilité sans faute de l'Etat, ni pour statuer sur la demande d'injonction de verser à l'intéressé une pension d'invalidité, que les conditions d'engagement de la responsabilité pour faute de l'Etat ne sont pas satisfaites en se référant aux écritures de première instance et à celles produites devant la cour administrative d'appel de Marseille et que M. B... ne produit pas d'éléments susceptibles de remettre en cause le bien-fondé des conclusions de l'expert. Par une ordonnance du 17 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 novembre 2022. Par une lettre du 30 mai 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en raison de l'incompétence de la juridiction administrative pour statuer sur la responsabilité sans faute de l'Etat, dans la mesure où un agent non titulaire de droit public, dès lors qu'il ne se prévaut pas d'une faute intentionnelle de son employeur ou de l'un des préposés de celui-ci, ne peut exercer contre cet employeur une action en réparation devant les juridictions administratives, conformément aux règles du droit commun, à la suite d'un accident de travail dont il a été victime (CE, 22 juin 2011, Mme C..., n°320744). M. B... a présenté des observations en réponse le 5 juin 2023. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., alors adjoint de sécurité de la police nationale, a chuté d'une poutre, le 26 mars 2013, lors d'une séance d'entraînement à l'école nationale de police de Nîmes. Cette chute a entraîné une rupture du ligament croisé antérieur de son genou gauche. L'accident a été reconnu imputable au service. Il relève appel du jugement du 16 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a notamment condamné l'Etat, sur le fondement de la responsabilité sans faute, à lui verser une somme de 34 850 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017, en réparation des préjudices personnels résultant de cet accident. Sur le bien-fondé du jugement : En ce qui concerne les conclusions indemnitaires : S'agissant de la responsabilité sans faute de l'Etat : 2. Il résulte des dispositions des articles L. 451-1, L. 452-1, L. 452-3 tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, L. 452-5 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale qu'un agent contractuel de droit public peut demander au juge administratif la réparation par son employeur du préjudice que lui a causé l'accident du travail dont il a été victime, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du code de la sécurité sociale, lorsque cet accident est dû à la faute intentionnelle de cet employeur ou de l'un de ses préposés. Il peut également exercer une action en réparation de l'ensemble des préjudices résultant de cet accident non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, contre son employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de ce dernier, ou contre une personne autre que l'employeur ou ses préposés, conformément aux règles du droit commun, lorsque la lésion dont il a été la victime est imputable à ce tiers. 3. Il résulte, en revanche, des mêmes dispositions qu'en dehors des hypothèses dans lesquelles le législateur a entendu instituer un régime de responsabilité particulier, un agent contractuel de droit public, dès lors qu'il ne se prévaut pas d'une faute intentionnelle de son employeur ou de l'un des préposés de celui-ci, ne peut exercer contre cet employeur une action en réparation devant les juridictions administratives, conformément aux règles du droit commun, à la suite d'un accident du travail dont il a été la victime. 4. Les dispositions du 2° de l'article 2 du décret susvisé n°86-83 du 17 janvier 1986 qui prévoient que les prestations dues au titre de la législation sur les accidents du travail et maladies professionnelles aux agents non titulaires, qui n'ont pas été recrutés ou employés à temps incomplet ou sur des contrats à durée déterminée d'une durée inférieure à un an, sont servies par l'administration employeur, ne peuvent être utilement invoquées par M. B..., lequel ne conteste pas que la réglementation du régime général de sécurité sociale ainsi que celle relative aux accidents du travail et maladies professionnelles sont applicables à ces mêmes agents, en vertu du premier alinéa du même article. 5. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que c'est à tort que le tribunal administratif a, sur le fondement des principes applicables aux fonctionnaires issus des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires, jugé que la responsabilité sans faute de l'Etat était engagée. 6. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B.... S'agissant de la responsabilité de l'Etat du fait du défaut d'entretien de l'ouvrage public : 7. En invoquant la responsabilité présumée de l'administration, en particulier, en raison de l'état vétuste de la poutre depuis laquelle il a chuté le jour de son accident, M. B... invoque le défaut d'entretien normal d'un ouvrage public. Toutefois, le document d'une agence de détectives privés versé au dossier, qui serait fondé sur l'audition de personnels participants à la préparation sportive souhaitant conserver l'anonymat, est insuffisamment probant et ne permet pas, à lui seul, de tenir pour établi un tel état de vétusté de la poutre. En tout état de cause, ce bien meuble, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait été fixé au sol, ne peut être regardé, en l'absence de tout aménagement particulier, comme un élément de l'ouvrage public. Par suite, l'accident dont M. B... a été victime n'est pas imputable à un ouvrage public. S'agissant de la responsabilité pour faute de l'Etat : 8. En premier lieu, M. B... n'établit pas, par les éléments produits, notamment le rapport susmentionné d'enquête établi par un détective privé le 26 mars 2021, qui n'éclairent pas suffisamment les circonstances de l'accident ou bien qui se limitent à reproduire ses dires, l'absence alléguée d'équipement de sécurité ou de protection autour de la poutre à hauteur d'homme lors de l'entraînement du 26 mars 2013 alors que l'administration soutient au contraire en défense que des tapis et tatamis étaient installés au sol dans le gymnase afin de prémunir un risque de blessure. M. B... n'établit pas davantage le caractère défectueux ou non conforme du matériel utilisé ou la vétusté de la poutre. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que l'accident de M. B... serait imputable à une défaillance ou une négligence de l'administration dans l'organisation de l'entraînement ou que cette dernière aurait manqué à ce titre à son obligation de sécurité et de protection. 9. En deuxième lieu, si M. B... se plaint d'un retard de prise en charge et d'une prise en charge inadéquate après l'accident en l'absence d'appel au service d'aide médicale urgente, il résulte de l'instruction qu'après sa chute, il a été vu par un moniteur puis conduit à l'infirmerie de l'école où l'infirmière qui l'a reçu lui a conseillé la consultation d'un médecin généraliste. Ce dernier, après examen le même jour, a établi un certificat médical indiquant un traumatisme du genou gauche en cours d'exploration. Il n'est pas contesté que ce médecin ne l'a pas orienté vers une prise en charge médicale urgente et il ressort en revanche des écritures de M. B... que le soir de l'accident, le commandant du service de police aux frontières a demandé qu'il soit escorté à la clinique la plus proche. Dans ces circonstances et alors que le référentiel national de compétences de sécurité civile invoqué par le requérant se borne à définir de simples recommandations sur des conduites à tenir, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait commis un manquement dans la prise en charge du requérant après sa blessure. 10. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires applicable au litige, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 133-2 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (...) ". Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. 11. L'administration ne peut être tenue pour responsable des difficultés de prise en charge liées à la présentation de documents du ministère de l'intérieur, dénommés triptyques permettant la prise en charge des frais médicaux sans que l'agent ait besoin d'en faire l'avance dans la mesure où les professionnels de santé sont libres de refuser ce système plus favorable aux agents que ce que prévoit la législation. Par ailleurs, M. B... n'établit pas le caractère injustifié du refus de prise en charge d'un électro-stimulateur. L'administration n'a, en outre, commis aucune faute en ne donnant pas suite aux deux demandes de formation présentées par le requérant dès lors qu'il n'est pas contesté que la formation sollicitée n'était pas programmée sur la période considérée. Enfin, la cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt n°17MA03596 du 17 septembre 2019, a relevé l'absence de faute de l'Etat dans la mise en œuvre des titres de perception opposés à l'intéressé estimant que ce dernier n'établissait pas le caractère indu des sommes ainsi mises à sa charge. 12. Les éléments invoqués par M. B... tels que les retards de paiement de frais médicaux, refus de soins prescrits sans justification, refus de formation infondés, la proposition de reclassement inadaptée, le courrier laissé dans sa boite à lettres, l'absence de communication du bulletin de salaire de février 2015 malgré ses demandes, les prélèvements indus sur salaires et l'émission de titres de perception indus, pris dans leur ensemble, ne sont pas susceptibles, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, de faire présumer l'existence d'agissements de harcèlement moral de la part de l'administration. 13. En revanche, l'administration a admis, dès la première instance qu'une somme de 2 184,13 euros doit être reversée à M. B..., au titre des prélèvements sur salaires qu'elle a effectués. Ce point n'est pas contesté en appel. 14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise, que l'Etat est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamné à indemniser M. B... au titre de sa responsabilité sans faute. Ainsi, l'article 1er du jugement attaqué doit être annulé. L'Etat doit cependant être condamné à verser à M. B... une somme de 2 184,13 euros, assortie des intérêts à compter du 23 mars 2017, date de réception de sa demande préalable. En ce qui concerne les demandes d'injonction : 15. L'Etat étant seulement condamné à reverser un excédent de prélèvement sur les salaires de M. B..., l'exécution du présent arrêt n'implique, par voie de conséquence, ni d'ordonner la communication du bulletin de salaire du requérant pour le mois de février 2015, ni d'enjoindre à l'administration de lui régler une pension d'invalidité, ni d'accorder une provision à M. B... ou encore de réserver l'examen des postes de véhicule et de réfection de salle d'eau adaptée. Au demeurant, par l'arrêt précité du 17 septembre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a déjà rejeté les conclusions de M. B... tendant à la communication de son bulletin de salaire de février 2015 et par un arrêt n°20MA02792 du 20 juillet 2021, elle a également rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de lui verser une rente d'accident de travail. Sur les frais liés aux litiges : 16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960 euros, à la charge définitive de l'Etat. 17. Les frais engagés par M. B... pour se faire assister par un médecin expert ne font pas partie des dépens de la présente instance. La demande de M. B... sur ce point, présentée sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ne peut donc qu'être rejetée. 18. Le tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante appréciation des frais exposés par M. B... en première instance en limitant à 1 500 euros la somme qu'il lui a allouée à ce titre. 19. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme que demande M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : L'article 1er du jugement n° 2004520 du 16 avril 2021 du tribunal administratif de Montpellier est annulé. Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. B... une somme de 2 184,13 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017. Article 3 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 960 euros, sont laissés à la charge définitive de l'Etat. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la caisse primaire d'assurance maladie des Pyrénées-Orientales. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023 à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, T. Teulière La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N°21TL02327
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 20/06/2023, 21TL02308, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2019 qui lui concède une pension militaire d'invalidité, en tant qu'il ne lui accorde qu'un taux de 15% au titre de l'infirmité de la cheville gauche et ne lui accorde pas de pension au titre des acouphènes et de la baisse d'audition de l'oreille gauche, d'ordonner une expertise médicale et de mettre à la charge de l'Etat les dépens et une somme de 4 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par un jugement n° 1905782 du 16 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 juin 2021 sous le n° 21MA02308 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL02308, et un mémoire enregistré le 19 mai 2022, M. B... A..., représenté par la SELARL MDMH agissant par Me Moumni, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 16 avril 2021 ; 2°) d'ordonner avant-dire droit une expertise judiciaire aux fins de se prononcer sur le lien d'imputabilité au service des affections auditives et déterminer le taux d'invalidité subi, et sur l'aggravation de son infirmité concernant la blessure à la cheville et corriger le taux d'invalidité ; 3°) d'annuler l'arrêté n° A016 du 28 janvier 2019 ; 4°) de réformer la décision du 19 février 2019 en tant qu'elle ne lui accorde qu'un taux de 15% au titre de l'infirmité de la cheville gauche et qu'elle rejette sa demande de pension au titre des acouphènes et de la baisse d'audition de l'oreille gauche ; 5°) de lui attribuer une pension au taux de 35% ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ainsi que la somme de 3 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Il soutient que : - c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il n'apportait pas de preuves suffisantes s'agissant d'une part, du taux pour l'invalidité relative à sa cheville gauche et, d'autre part, de l'imputabilité concernant l'invalidité relative aux acouphènes et à la surdité ; - le jugement est entaché d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation s'agissant de l'infirmité relative aux entorses récidivantes de la cheville gauche au regard des importantes séquelles dont il reste atteint à la suite de sauts en parachute ; il apporte la preuve de la gravité de l'aggravation des entorses ; il a été contraint d'arrêter la course, la randonnée et la natation compte-tenu de ses souffrances quotidiennes ; le taux de 15% attribué est sous-évalué ; l'expertise menée n'était pas adéquate ; - le jugement est également entaché d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation s'agissant de l'imputabilité au service des acouphènes et de l'atteinte auditive qui doit être reconnue dès lors qu'il a été exposé à de nombreux et violents bruits sonores d'une extrême intensité, lui occasionnant nécessairement des séquelles auditives : il a participé quotidiennement à des entraînements et exercices de tirs de munition puissants ainsi que des manipulations d'explosifs et de nombreuses missions effectuées dans des conditions extrêmes ; l'administration n'établit pas la preuve contraire à l'imputabilité des affections dont il souffre ; ces deux infirmités étant liées, un taux d'invalidité de 35% aurait dû lui être accordé ; - une expertise avant-dire droit permettrait d'évaluer de manière fiable et certaine, contradictoire et impartiale les infirmités dont il reste atteint, leur taux et leur imputabilité. Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 avril 2022 et le 12 juillet 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - concernant l'infirmité " Entorses récidivantes de la cheville gauche. Raideur de la cheville gauche avec pied équin ", les certificats médicaux établis par le médecin généraliste du requérant, qui n'a effectué aucun examen médical contrairement à l'expert désigné, ne sont pas de nature à démontrer que le taux déterminé par ce dernier serait sous-estimé et à remettre en cause le jugement contesté ; - concernant les affections auditives, aucune pièce médico-administrative ne démontre que M. A... aurait subi des traumatismes sonores entre 2005 et 2010 ; en vertu des articles L. 9 et L. 14 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre applicables à l'espèce, la demande du requérant relative au regroupement de ses acouphènes et de sa surdité doit être rejetée ; en tout état de cause, le certificat médical du 7 juin 2012 fait état d'une " surdité brusque gauche type hydrops " susceptible de correspondre à une maladie de Ménière et par nature étrangère au service ; ainsi, les troubles auditifs du requérant sont sans relation avec un fait précis de son service mais résultent d'une maladie sans lien avec celui-ci. Par ordonnance du 20 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 septembre 2022. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. A..., né le 11 novembre 1973, qui a servi dans l'armée de terre du 1er octobre 1997 au 31 décembre 2012, est titulaire d'une pension militaire d'invalidité concédée par arrêté n° A016 du 28 janvier 2019 au taux de 15% prenant effet au 28 mars 2014, au titre de l'infirmité " Entorses récidivantes de la cheville gauche. Raideur de la cheville gauche avec pied équin ". En revanche, ses autres infirmités concernant des acouphènes permanents et une baisse de l'audition de l'oreille gauche, dont il a demandé la prise en compte dans sa demande de pension du 28 mars 2014, ont été estimées comme n'étant pas imputables au service par défaut de preuve et de présomption. M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2019 qui lui concède une pension militaire d'invalidité, en tant qu'il ne lui accorde qu'un taux de 15% au titre de l'infirmité de la cheville gauche et ne lui accorde pas de pension au titre des acouphènes et de la baisse d'audition de l'oreille gauche et d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement du 16 avril 2021 dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Il demande que lui soit attribuée une pension militaire d'invalidité au taux de 35%. Sur le bien-fondé du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, applicable à la date de la demande de pension, la pension militaire d'invalidité est attribuée sur demande de l'intéressé et son entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. Aux termes de l'article L. 2 du même code : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service ; (...) ". Aux termes de l'article L. 4 du même code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. (...) ". L'article L. 9 de ce code renvoie à un décret le soin de fixer " les règles et barèmes pour la classification des infirmités d'après leur gravité ". Aux termes de l'article L. 26 de ce code : " Toute décision administrative ou judiciaire relative à l'évaluation de l'invalidité doit être motivée par des raisons médicales et comporter, avec le diagnostic de l'infirmité, une description complète faisant ressortir la gêne fonctionnelle et, s'il y a lieu, l'atteinte de l'état général qui justifient le pourcentage attribué ". Pour l'application de ces dispositions, une infirmité doit être regardée comme résultant d'une blessure lorsqu'elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. Dans le cas contraire, elle doit être regardée comme résultant d'une maladie. 3. En outre, l'article L. 3 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : (...) 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. (...) La présomption définie au présent article s'applique exclusivement aux constatations faites, (...) soit pendant le service accompli par les militaires pendant la durée légale compte tenu des délais prévus aux précédents alinéas (...) ". En application de ces dispositions, la présomption d'imputabilité peut bénéficier à l'intéressé à condition que la preuve d'une filiation médicale soit apportée. Cette filiation médicale, qui suppose une identité de nature entre l'infirmité pensionnée et l'infirmité invoquée, peut être établie soit par la preuve de la réalité des soins reçus de façon continue pour l'affection pensionnée soit par l'étiologie même de l'infirmité en cause. En ce qui concerne les entorses récidivantes de la cheville gauche : 4. Il résulte de l'instruction que M. A... a été victime d'un accident, le 20 mai 2003, à l'occasion d'une séance de sport. Il s'est sévèrement blessé à la cheville gauche en glissant sur un caillou. Un diagnostic d'entorse de la cheville a été posé le lendemain, nécessitant son immobilisation, sans pose de plâtre ni opération chirurgicale. Il a ensuite bénéficié de soins de kinésithérapie et devant la persistance des douleurs, il a subi une intervention chirurgicale, le 10 mai 2010, par arthroscopie associée à une ligamentoplastie. L'état de sa cheville a ensuite évolué vers de l'arthrose. Selon l'expert qui l'a examiné le 20 février 2018, M. A... présente des séquelles d'arthrose avec limitation des amplitudes articulaires, le pied ne dépassant pas l'angle droit en flexion dorsale et limité de -10° en flexion plantaire par rapport au côté droit. L'expert a estimé qu'un taux d'invalidité de 15% pouvait lui être attribué au regard du guide barème des invalidités de février 2003. M. A... expose qu'il souffre d'importantes séquelles compte-tenu des nombreuses entorses qu'il a subies à la suite de sauts en parachute et qu'il a été contraint d'arrêter la course, la randonnée et la natation compte-tenu de ses souffrances quotidiennes. Toutefois, les certificats médicaux établis par son médecin généraliste les 16 juillet 2018 et 28 août 2022, selon lesquels il a pu constater une aggravation de son état clinique justifiant une réévaluation du degré d'invalidité, ajoutant qu'une arthrodèse de cheville ou une prothèse a été proposée par son chirurgien orthopédique, ne permettent pas de considérer que le taux d'invalidité tel que défini par l'expert serait sous-évalué. En ce qui concerne les acouphènes permanents et la baisse de l'audition de l'oreille gauche : 5. M. A..., qui a servi dans l'armée de terre jusqu'au 31 décembre 2012, notamment au centre parachutiste d'instruction spécialisée du service action de la direction générale des services extérieurs en tant qu'opérationnel, soutient avoir été exposé à de nombreux et violents bruits sonores dès lors qu'il a participé quotidiennement à des entraînements et exercices de tirs de munition puissants, ainsi qu'à des manipulations d'explosifs et a effectué de nombreuses missions dans des conditions extrêmes en Irak en 2005, au Liban en 2007, 2008 et 2010, et en Afghanistan à six reprises entre 2002 et 2011. Selon les conclusions de l'expert médical qui a remis son rapport le 7 février 2018, M. A... est atteint d'une surdité gauche dont le taux d'invalidité est évalué à 15% et d'acouphènes au taux de 20%. La perte d'audition subie par l'intéressé a pu être mesurée auprès d'un médecin oto-rhino-laryngologiste entre 2010 et 2012. Alors que cette aggravation a été considérée comme relevant d'une surdité brusque par ce médecin, et stabilisée en 2017, aucune pièce médicale ne permet cependant de justifier d'un lien de causalité entre la pathologie dont il souffre et le service. Si selon deux attestations émanant de son supérieur hiérarchique et d'un témoin des faits, M. A... a été victime en juin 2010 d'un traumatisme sonore malgré le port de ses protections auditives lors d'une séance d'entraînement au cours de laquelle il a eu pour mission d'effectuer l'effraction d'une porte avec une charge d'explosif, et a consulté le service de santé, aucune pièce médicale ne permet cependant de justifier des conséquences de ce traumatisme, lequel n'a pas été mentionné dans le livret médical de l'intéressé. Il résulte par ailleurs d'un courrier médical du 11 octobre 2010 que M. A... souffre d'acouphènes depuis environ un an à la date dudit courrier, soit antérieurement au traumatisme sonore dont il a été victime en juin 2010. Selon son livret médical, des acouphènes importants sont mentionnés ainsi qu'une aggravation de l'hypoacousie en novembre 2012. Toutefois, s'il se prévaut des conditions extrêmes auxquelles il aurait été exposé lors des nombreuses opérations extérieures auxquelles il a participé, il ne résulte d'aucune pièce qu'il aurait été victime d'un incident particulier à l'origine des pathologies en cause. En outre, alors que sa surdité gauche est apparue de manière brusque dans le courant de l'année 2012, il résulte de l'instruction que M. A... n'a effectué aucune mission en opération extérieure après le 13 janvier 2010, en raison d'une inaptitude temporaire à compter du 10 novembre 2010, et a effectué sa dernière mission en Afghanistan du 18 janvier au 18 avril 2011 avant d'être déclaré inapte de manière définitive le 3 janvier 2012. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que les infirmités dont souffre M. A... concernant sa surdité gauche et ses acouphènes soient imputables au service. 6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale laquelle ne revêtirait pas de caractère utile, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Ses conclusions demandant de statuer sur les dépens doivent dès lors en tout état de cause être également rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL02308 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/06/2023, 22NT00780, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler la décision du 24 janvier 2019 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une pension militaire d'invalidité, d'autre part, de fixer le taux de son invalidité à 30 pour cent et enfin, d'ordonner une expertise. Par un jugement n° 1905868 du 17 janvier 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 14 mars 2022, M. B..., représenté par Me Munos, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 17 janvier 2022 ; 2°) de fixer l'invalidité au taux de 30 % et juger que sa pension militaire d'invalidité ainsi calculée doit prendre effet au 15 novembre 2016 ; 3°) d'ordonner une expertise afin de déterminer son taux d'invalidité ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1200 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que : - c'est à tort que la ministre des armées a retenu un taux d'invalidité inférieur à 10% ; - il a développé un intense syndrome anxiodépressif en lien avec le service, ainsi que le tribunal administratif de Rennes l'a été retenu dans son jugement définitif du 26 mai 2016. Il avait, en effet, fait état d'une situation de souffrance au travail, sur plusieurs années, avec dégradation de son état de santé, et installation d'un syndrome anxiodépressif réactionnel important ; durant l'année 2012, et jusqu'à son admission en congé de longue durée pour maladie, le médecin Chef du GBD de Brest Lorient a constaté après consultations - janvier 2012/février 2013 - un état dépressif et une souffrance en lien avec le travail, puis son aggravation, la mise en place d'un traitement médicamenteux et a émis un avis favorable pour la mise en place d'un CLD ; le taux qui lui est attribué, inférieur à 10%, correspond sur l'échelle du Guide barème à " une absence de troubles décelables ". Or, cette appréciation est erronée si l'on tient compte de l'ancienneté de la pathologie (depuis 2011), de la chronicisation des symptômes, toujours actuels à ce jour ; -si le tribunal a retenu que l'intensité ou la chronicisation des troubles décrit par l'intéressé ne seraient pas documentés, ou corroborés par des pièces médicales, il produit afin de pouvoir éclairer la cour sur les points faisant difficultés, l'expertise psychiatrique du docteur C... en date du 2 août 2021, ordonnée par le tribunal administratif de Rennes par une ordonnance du 20 octobre 2020. Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2023, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés et fait valoir que les conclusions de l'expertise psychiatrique du 2 août 2021 ne peuvent être utilement invoquées car les constatations faites sont postérieures de 5 ans à la date de la demande de pension militaire d'invalidité. Un nouveau mémoire pour M. B... a été enregistré le 10 mai 2023 et n'a pas été communiqué. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pension militaire d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Coiffet, - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique, - et les observations de Me Munos, représentant M. B.... Considérant ce qui suit : 1. M. A... B..., capitaine de gendarmerie né le 31 mars 1956, a été rayé des contrôles le 1er juin 2014. Il a sollicité, le 15 novembre 2016, le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour une dépression grave réactionnelle à une souffrance au travail. Par une décision du 24 janvier 2019, la ministre des armées a rejeté sa demande au motif que l'infirmité " Séquelles d'un épisode dépressif réactionnel : quelques troubles du sommeil, ruminations " était inférieure au minimum indemnisable de 10 % requis pour l'ouverture du droit à pension. M. B... a saisi le tribunal des pensions militaires d'invalidité de Rennes, qui a transféré sa requête au tribunal administratif de Rennes devenu compétent par l'effet de la loi. L'intéressé relève appel du jugement du 17 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article L. 4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre dans sa rédaction en vigueur à la date de la demande présentée par M. B... : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / Sont prises en considération les infirmités entraînant une invalidité égale ou supérieure à 10 %. / Il est concédé une pension : (...) 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; / 40 % en cas d'infirmités multiples. ". Aux termes de l'article L. 10 de ce code dans sa rédaction alors applicable : " Les degrés de pourcentage d'invalidité figurant aux barèmes prévus par le quatrième alinéa de l'article L. 9 sont : / a) Impératifs, en ce qui concerne les amputations et les exérèses d'organe ; / b) Indicatifs dans les autres cas. Ils correspondent à l'ensemble des troubles fonctionnels et tiennent compte, quand il y a lieu, de l'atteinte de l'état général. ". Aux termes du guide barème, s'agissant des troubles psychiques de guerre : " Dans cette échelle, en pratique expertale, on peut distinguer six niveaux de troubles de fonctionnement décelables, qui seront évalués comme suit : / - absence de troubles décelables 0 p. 100 ; / - troubles légers : 20 p. 100 ; / - troubles modérés : 40 p. 100 ; (...) En pratique expertale, les critères constitutifs de l'évaluation de l'invalidité comprendront : / 1. La souffrance psychique : l'expert l'appréciera à partir de l'importance des troubles, de leur intensité et de leur richesse symptomatique. Cette souffrance est éprouvée consciemment ou non par le sujet et/ou perçue par l'entourage ; / 2. La répétition : elle s'exprime, au sens psychopathologique, par des troubles au long cours ou rémittents ; (...) ". 3. M. B... soutient que son état psychique, au moment du dépôt de sa demande, va bien au-delà des quelques troubles de sommeil et de ruminations relatives à sa carrière professionnelle et que sa symptomatologie est particulièrement importante et provoque un retentissement majeur dans la conduite de sa vie, de sorte que le taux initialement fixé par l'expert de 30% apparaitrait particulièrement adapté. 4. Il résulte de l'instruction que l'expert ayant examiné M. B..., le 4 juillet 2018, a, après avoir conclu à un épisode dépressif réactionnel, fixé le taux de l'invalidité à 30% correspondant à " des troubles légers à modérés ". L'administration, après avoir recueilli l'avis émis le 1er octobre 2018 par la commission consultative médicale, a toutefois estimé, par la décision contestée du 24 janvier 2019, que ces troubles n'avaient pas le caractère de " troubles légers " et a fixé le taux de l'invalidité à moins de 10%. Il résulte de l'instruction que si l'expert avait constaté que l'intéressé avait subi un épisode dépressif en 2011, traité en 2013 par antidépresseur, hypnotique et anxiolytique, et qu'il avait à cette époque bénéficié d'un suivi psychiatrique et psychothérapeutique, sans recours à l'hospitalisation, il avait également relevé, à la date de l'expertise, que M. B... ne prend plus de traitement mais conserve quelques troubles du sommeil et ressasse régulièrement un sentiment de " gâchis " de sa fin de carrière. Ces seules constatations ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation de l'état de santé de M. B... retenu par le ministre dans la décision litigieuse. 5. Pour établir l'intensité des troubles qui persistent, M. B... a versé aux débats, d'une part, plusieurs certificats médicaux établis par le psychanalyste qui le suit : le premier, du mois d'août 2017, mentionnant " de sérieuses angoisses et des troubles du sommeil " nécessitant une consultation mensuelle, le second, du mois de mai 2018, mentionnant " une à deux consultations tous les deux mois " dont l'intéressé n'avait pas fait mention lors de l'expertise et, enfin, un certificat du mois de décembre 2019. Ce dernier certificat, qui relate en des termes peu circonstanciés la situation de M. B... à cette date, ne peut être retenu pour décrire son état à l'automne 2016. Quant aux constatations faites au mois d'août 2017 puis au mois de mai 2018, soit antérieurement à l'expertise évoquée au point précédent, il n'est pas soutenu qu'elles n'auraient pas été prises en compte par l'expert. Il résulte au contraire de l'instruction que l'intéressé n'est plus dans son milieu professionnel depuis son placement en congé de longue durée en avril 2013 suivi de sa mise en retraite en 2014, et qu'il avait arrêté son suivi médical à la date de la demande de pension. Enfin, l'intensité des troubles décrits ne correspond pas non plus, comme l'ont rappelé les premiers juges, aux déclarations de l'intéressé devant l'expert et l'intensité des troubles du sommeil et d'angoisse n'est pas caractérisée par le psychanalyste. 6. Devant la cour, M. B... a d'autre part, versé aux débats une expertise psychiatrique du 2 août 2021 ordonnée par le tribunal administratif de Rennes le 20 octobre 2020 pour éclairer un litige relatif à une demande complémentaire d'indemnisation des préjudices à caractère personnel non couverts par l'octroi d'une pension militaire d'invalidité. Cet expert rappelle, après examen de M. B... et avoir pris connaissance de l'ensemble des éléments médicaux, que " l'intéressé a présenté à compter du 7 janvier 2011 des troubles anxieux et dépressifs réactionnels, directement liés au ressenti traumatique précisément attribué à une situation significative remettant en cause son identité et ses engagements professionnels " (...), qu'" il a été atteint par le déclenchement d'une symptomatologie majeure à la suite d'évènements traumatiques vécus dans son entourage professionnel (...) " et que " ces données cliniques d'un vécu hostile ne relèvent pas d'une construction pathologique d'un registre psychotique ". Toutefois, seules les constatations qui permettent d'apprécier l'état de santé de M. B... à la date à laquelle ce dernier a présenté sa demande d'allocation de pension militaire d'invalidité doivent être prise en compte. A cet égard, on doit relever que l'expert psychiatre, au titre de ses conclusions, indique, d'une part, que " le syndrome dépressif majeur dont a souffert M. B... (...) a justifié des médications spécifiques et la prise en charge ambulatoire assurée de façon continue jusqu'à début 2015 puis ponctuellement " et d'autre part, que " de fait, à compter de mai 2016, où son état peut être désigné comme stabilisé, il a, des éléments de sa personnalité apparaissant également modifiés, souffert des troubles résiduels, difficultés de sommeil, avec cauchemars, réviviscences anxieuses en situation, qui peuvent être qualifiés de traumatiques ". L'expert a également relevé des envies et investissements moindres dans sa vie quotidienne ainsi que des changements dans sa vie sexuelle et l'interruption de toutes les activités sportives qui occupaient pourtant une place importante dans sa vie. Sur la base de ces différents éléments et constatations qui rendent compte de l'état de santé, au demeurant stabilisé, de M. B... à une époque contemporaine de sa demande de pension militaire et établissent l'existence des troubles chroniques " légers à modérés " dont souffre l'intéressé, il y a lieu, d'une part, de considérer que c'est par une inexacte appréciation que la ministre des armées a estimé, par la décision contestée du 24 janvier 2019, que l'infirmité résultant des séquelles de dépression qu'il présentait ne permettait pas l'ouverture du droit à pension. D'autre part, il y a lieu de fixer à un taux de 30%, l'infirmité dont est atteint M. B.... 7. Il résulte de tout ce qui précède, tout d'abord, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 24 janvier 2019 rejetant sa demande de pension militaire, ensuite, que cette décision est illégale et, enfin, que le taux de son infirmité doit être fixé à 30% au 15 novembre 2016. Sur les frais liés au litige : 8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme de 1200 euros au conseil de M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1905868 du 17 janvier 2022 du tribunal administratif de Rennes et la décision du 24 janvier 2019 de la ministre des armées rejetant la demande de pension militaire d'invalidité sont annulés. Article 2 : Le taux de l'infirmité de M. B... est fixé à 30% au 15 novembre 2016. Article 3 : Il est alloué à M. B... une pension militaire d'invalidité à titre provisoire au taux de 30% pour une durée de trois ans, à compter du 15 novembre 2016, au titre des séquelles d'un épisode dépressif réactionnel. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : L'Etat versera une somme de 1200 euros au conseil de M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 2 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2023. Le rapporteur, O. COIFFETLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 22NT00780 2
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/06/2023, 21NT01613, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2019 par lequel le maire de C... a refusé de reconnaître le caractère professionnel de sa maladie. Par un jugement n° 2000031 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Caen a annulé cet arrêté, a enjoint à la commune de C... de reconnaître la maladie de Mme A... comme étant imputable au service et de régulariser sa situation dans un délai de deux mois. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 juin 2021, 4 avril 2022 et 26 janvier 2023, la commune de C... représentée par Me Cavelier, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 15 avril 2021 ; 2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Caen par Mme A... ; 3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A..., le maire n'a commis aucune faute et n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ; il appartient à l'intéressée d'établir le lien de causalité entre sa pathologie et le service, or elle ne démontre à aucun moment l'existence d'un évènement précis à l'origine de sa maladie ; au contraire, elle a été affectée sur un poste conforme à ses compétences et a bénéficié du soutien de sa hiérarchie et des équipes qu'elle encadrait. Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2021, Mme A..., représentée par Me Boucher, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune de C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gélard, - les conclusions de Mme Malingue, - et les observations de Me Boucher, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme A..., recrutée par la commune de C... à compter du 1er mars 1996, exerçait depuis le 1er février 2015, les fonctions de responsable du bureau " études-travaux ". Elle a en outre été chargée d'assurer l'intérim du directeur des services techniques lors de l'admission de celui-ci à la retraite au 1er mars 2016. Mme A... a été placée en congé de maladie à compter du 24 octobre 2016. Ses arrêts de travail ont été prolongés sans discontinuité jusqu'au 23 janvier 2019. Le 17 janvier 2019, l'intéressée a demandé à ce que sa maladie soit reconnue imputable au service. Par un arrêté du 8 novembre 2019, le maire de C... a rejeté sa demande. La commune relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé cet arrêté. Sur les conclusions à fin d'annulation : 2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version applicable à la date de la décision en litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". 3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 4. La commune fait valoir que Mme A... a été affectée sur un poste conforme à ses compétences et qu'elle a bénéficié du soutien de sa hiérarchie et des équipes qu'elle encadrait. S'il est constant que Mme A... est titulaire d'un diplôme d'architecture obtenu en 1982, elle n'a exercé en cette qualité que durant deux années avant de reprendre ses études. Il n'est pas contesté que par la suite, et notamment depuis son recrutement par la commune de C... en 1996, elle n'a occupé que des fonctions administratives. Par ailleurs, si l'intéressée, alors directrice du service éducation, avait exprimé la volonté de changer de fonctions, elle a émis des réserves sur sa capacité à occuper le poste de chef de bureau " études-travaux " (BET) pour lesquels sa candidature n'avait initialement pas été retenue et auquel elle a été finalement nommée le 1er février 2015. Lors de son entretien professionnel d'évaluation qui s'est tenu le 22 décembre 2015, Mme A... a clairement exprimé les difficultés qu'elle rencontrait à encadrer des agents exerçant des fonctions techniques qu'ils maîtrisaient et qui remettaient en cause ses propres compétences. La collectivité a reconnu, dans le compte-rendu d'entretien professionnel, qu'en dépit des stages qu'elle avait suivis, l'intéressée n'avait ni la formation, ni l'expérience pour de telles fonctions, en ajoutant sans ménagement qu'il était " illusoire de penser que Mme A... puisse les acquérir dans un délai raisonnable et compatible avec la prise en charge du BET ". Au cours de cet entretien, Mme A... a exprimé ses craintes quant à l'exercice, alors envisagé, des fonctions de directeur des services techniques (DST) par intérim. Toutefois, en dépit du constat posé au cours de cet entretien professionnel annuel, quelques mois plus tard seulement, elle était désignée pour assurer cet interim, le processus de sélection du nouveau DST n'ayant pas abouti. Mme A... s'est ainsi trouvée dans l'incapacité d'effectuer correctement avec la confiance de son équipe les missions dont elle avait la charge. Si la commune indique que l'intéressée était épaulée par le directeur général des services dans le cadre de la mission d'intérim, notamment lors de réunions, elle ne l'établit pas, pas plus qu'elle n'établit que Mme A..., dont l'investissement ou les capacités managériales n'ont à aucun moment été remis en cause, n'aurait pas eu, durant cette période, une charge de travail accrue. 5. Si la commune de C... souligne par ailleurs que le certificat médical établi le 24 octobre 2016 par le psychiatre qui suivait Mme A... s'est borné à mentionner qu'elle souffrait d'un " burn out ++ ", sans relever le caractère professionnel de sa pathologie, il n'incombait pas à ce médecin de préciser l'origine de sa maladie et encore moins sa qualification juridique, pas plus d'ailleurs qu'à la commission de réforme lors de sa séance du 20 décembre 2019 au cours de laquelle elle devait rendre un avis sur la mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité. En revanche, dans son rapport du 24 juin 2019 l'expert désigné à cet effet a reconnu que la pathologie de l'intéressée était la conséquence d'une surcharge de travail et présentait un lien avec le service. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la pathologie dont souffre Mme A... serait liée à un évènement d'ordre privé et personnel dépourvu de tout lien avec le service. Enfin, si la commission de réforme lors de sa séance du 13 septembre 2019, en l'absence de l'intéressée, du médecin de prévention et de tout spécialiste, s'est écartée des conclusions de l'expert, en soulignant l'" impossibilité d'établir le lien de causalité entre le service et la maladie ", les éléments rappelés au point 4 suffisent à établir, indépendamment de toute faute de son employeur, que la maladie de Mme A... présentait un lien direct avec l'exercice de ses fonctions. 6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé l'arrêté du 8 novembre 2019 par lequel le maire a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A... à compter du 24 octobre 2016. Sur les frais liés au litige : 7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement à la commune de C... d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par la commune de C... ne peuvent dès lors être accueillies. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cette dernière le versement à Mme A... de la somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature qu'elle a supportés. DECIDE : Article 1er : La requête de la commune de C... est rejetée. Article 2 : La commune de C... versera à Mme A... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de C... et à Mme B... A.... Délibéré après l'audience du 2 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, V. GELARD Le président, O. GASPON La greffière, I.PETTON La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT01613
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/06/2023, 21NT01972, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler le titre de perception du 21 novembre 2018 émis par la direction régionale des finances publiques de Bretagne pour le compte de l'académie de Rennes afin de recouvrer un indu de rémunération de 36 464,43 euros ainsi que la décision implicite ayant rejeté sa réclamation préalable, ensuite, de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 36 464,43 euros, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n°1904790 du 19 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a, en premier lieu, annulé le titre de perception émis le 21 juin 2018 ainsi que la décision implicite par laquelle le recteur de l'académie de Rennes a rejeté la réclamation préalable de Mme A..., en deuxième lieu, accordé à Mme A... la décharge de l'obligation de payer la somme de 36 464,43 euros mise à sa charge par le titre de perception, et, enfin, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juillet 2021 et 27 juin 2022, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 19 mai 2021 ; 2°) de rejeter les demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif ; Il soutient que : - le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit ; si le demi-traitement versé à un agent, qui a épuisé ses droits à congé maladie ordinaire ou de longue maladie, dans l'attente de la décision du comité médical, ne présente pas un caractère provisoire et reste acquis à l'agent alors même que celui-ci a, par la suite, été placé rétroactivement dans une position statutaire n'ouvrant pas par elle-même droit au versement d'un demi-traitement, ce principe ne trouve pas toutefois à s'appliquer dans l'hypothèse de l'admission rétroactive de l'agent à la retraite qui ne peut cumuler sur une même période le versement de son traitement et la mise en paiement de la pension de retraite qui lui est servie rétroactivement ; - à titre subsidiaire, le tribunal a commis une erreur de droit en déchargeant Mme A... de la totalité de l'obligation de payer la somme de 36 464,43 euros mise à sa charge par le titre de perception du 21 novembre 2018. Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2022, Mme A..., représentée par Me Collet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens présentés par le ministre ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu le code des relations entre le public et l'administration ; Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ; Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; Vu le décret n°86-442 du 14 mars 1986 ; Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ; Vu le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Coiffet, - les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique, - et les observations de Me Leduc, substituant Me Collet, représentant Mme A.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A..., qui était professeure certifiée d'espagnol, affectée en dernier lieu au lycée polyvalent C... à ..., a été placée en congé de longue maladie à compter du 19 avril 2013. Le 16 novembre 2015, elle a sollicité son admission à la retraite pour invalidité. Ses droits au congé de longue maladie parvenant à épuisement le 19 avril 2016, elle a alors été placée, à compter de cette date, en disponibilité dans l'attente de l'avis des instances médicales et son droit à la perception d'un demi-traitement a été maintenu. Le 27 août 2018, Mme A... a été admise à la retraite pour invalidité avec effet au 19 avril 2016. Par un courrier du 25 septembre 2018, le recteur de l'académie de Rennes a informé l'intéressée qu'elle allait être destinataire d'un titre de perception lui réclamant le remboursement des sommes perçues, à titre de demi-traitement, durant la période allant du 19 avril 2016 au 31 août 2018. Ce titre de perception, d'un montant de 36 464,43 euros, a été émis le 21 novembre 2018. Mme A... l'a contesté par une réclamation du 22 janvier 2019, dont le directeur régional des finances publiques de Bretagne a accusé réception le 24 janvier 2019 et qui a été transmise au rectorat de Rennes. 2. Constatant, au terme du délai de six mois, accordé à l'ordonnateur, par le troisième aliéna de l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, pour statuer sur une telle réclamation, que sa contestation avait été implicitement rejetée, Mme A... a alors, le 24 septembre 2019, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de ce titre de perception et à la décharge de l'obligation de payer la somme de 36 464,43 euros. Le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports relève appel du jugement par lequel cette juridiction a fait droit aux demandes de Mme A.... Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 3. Pour annuler le titre de perception émis le 21 novembre 2018 et prononcer la décharge totale de la somme mise sur ce fondement à la charge de Mme A..., le tribunal a estimé, après avoir rappelé les dispositions de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, que le fait de lui avoir accordé, dans l'attente de la décision des instances médicales, un demi-traitement du 19 avril 2016 au mois d'août 2018 - lequel restait acquis à l'agent - était une décision créatrice de droit qui ne pouvait pas être retirée au-delà du délai de quatre mois, prévu par l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration. 4. Aux termes de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, dans sa rédaction résultant du décret du 5 octobre 2011 relatif à l'extension du bénéfice du maintien du demi-traitement à l'expiration des droits statutaires à congé de maladie, de longue maladie ou de longue durée des agents de la fonction publique de l'Etat, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. (...) ". 5. Aux termes de l'article 47 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi (...) soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. / Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ". 6. Il résulte des dispositions citées aux points 4 et 5, que, lorsque l'agent a épuisé ses droits à un congé de maladie ordinaire ou de longue maladie, il appartient à la collectivité qui l'emploie, d'une part, de saisir le comité médical, qui doit se prononcer sur son éventuelle reprise de fonctions ou sur sa mise en disponibilité, son reclassement dans un autre emploi ou son admission à la retraite et, d'autre part, de verser à l'agent un demi-traitement dans l'attente de la décision du comité médical. Par ailleurs, la circonstance que la décision prononçant la reprise d'activité, le reclassement, la mise en disponibilité ou l'admission à la retraite emporte effet rétroactif à la date de fin des congés de maladie n'a pas pour effet de retirer le caractère créateur de droits du maintien du demi-traitement prévu par ces dispositions. Ainsi le demi traitement versé au titre de ces dispositions, qui ne présente pas un caractère provisoire, reste acquis à l'agent alors même que celui-ci a, par la suite, été admis rétroactivement à la retraite. 7. Il résulte de ce qui vient d'être dit, d'une part, que Mme A... avait droit au maintien de son demi-traitement qui lui restait acquis après son admission rétroactive à la retraite. Le ministre de l'éducation nationale, ordonnateur de ce demi-traitement entre le 19 avril 2016 et le 31 août 2018, ne pouvait, en conséquence, légalement répéter, par le titre exécutoire litigieux, cette somme qui ne constituait pas un indu de rémunération. 8. D'autre part, si Mme A... ne tenait d'aucune disposition statutaire ou du code des pensions civiles et militaires de retraites - sa situation ne relevant pas des cas dérogatoires de cumul légal prévus par les articles L.84 et L.86 du code des pensions civiles de retraites- le droit de cumuler les sommes versées au titre de son demi-traitement et sa pension de retraite perçue rétroactivement pour la même période, il n'appartenait pas cependant au ministre de l'éducation nationale, ordonnateur de la rémunération, de procéder à la répétition d'un éventuel trop perçu de pension civile. 9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal estimant le titre de perception du 21 novembre 2018 entaché d'illégalité, a prononcé la décharge totale de l'obligation de payer la somme de 36 464,43 euros mise à la charge de Mme A.... Sur les frais liés au litige : 10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. DECIDE : Article 1er : La requête du Ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports est rejetée. Article 2 : l'Etat versera à Mme A... la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et à Mme B... A.... Délibéré après l'audience du 2 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. Le rapporteur, O. COIFFETLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au Ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 1 N° 21NT01972 2 1
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 20/06/2023, 21TL01812, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... veuve D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 10 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité en qualité de conjointe survivante et de lui allouer le bénéfice d'une telle pension. Par un jugement n° 1903721 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 16 mai 2021 sous le n° 21MA01812 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL01812, et un mémoire enregistré le 3 août 2022, Mme C... B... veuve D..., représentée par Me El Kolli, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 10 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de révision de pension militaire d'invalidité en qualité de conjointe survivante ; 3°) d'enjoindre au ministre des armées de lui allouer le bénéfice d'une telle pension ou, à défaut, de procéder à une nouvelle instruction de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de sa renonciation et de celle de son conseil au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Elle soutient que : - elle avait produit toutes les pièces et documents justificatifs à sa demande devant le tribunal, en particulier la copie intégrale de l'acte de mariage célébré le 1er février 1949 dont elle n'était pas en possession lors de sa première demande ; elle satisfait ainsi à toutes les conditions requises par les articles L. 141-1 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la deuxième épouse et veuve de M. D... perçoit déjà la pension de réversion ; - il y a lieu de partager la pension de réversion entre elle et Mme E.... Par des mémoires en défense, enregistrés le 24 mars 2022 et le 7 septembre 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que : - l'acte recognitif établi le 2 juin 2011 est postérieur à la date du décès de M. D... : le jugement est conforme avec la législation en matière de pensions militaires d'invalidité ; - les documents d'état civil produits présentent des incohérences : la preuve de la date certaine du mariage n'est dès lors apportée ni au titre de l'article 47 du code civil ni au titre de l'article L. 141-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Par ordonnance du 8 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 octobre 2022. Mme B... veuve D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille du 3 septembre 2021. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, - et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., née le 1er juillet 1930, se déclarant veuve de M. A... D... né le 1er janvier 1920, ancien soldat de l'armée française de 1943 à 1945 décédé le 3 février 2008, a demandé une nouvelle fois l'attribution d'une pension militaire d'invalidité en qualité de conjointe survivante par lettre du 16 octobre 2017. Par une décision du 10 octobre 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande au motif que sa précédente demande avait fait l'objet d'un rejet confirmé par décision du Conseil d'Etat n° 405756 rendue le 23 août 2017. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler cette décision. Par un jugement du 15 avril 2021 dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Sur le bien-fondé du jugement : 2. Aux termes de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. (...) ". Aux termes de l'article L. 141-1 du même code : " Au décès du militaire, le conjoint survivant ou le partenaire d'un pacte civil de solidarité bénéficie d'un droit à pension dans les conditions prévues au présent titre ". Aux termes de l'article L. 141-2 de ce code : " Le droit à pension est ouvert au conjoint ou partenaire survivant mentionnés à l'article L. 141-1 : 1° Lorsque le militaire est décédé en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension ; (...) ". L'article L. 141-3 du même code dispose que : " Le droit à pension est ouvert si le mariage (...) est antérieur soit à l'origine, soit à l'aggravation de la blessure ou de la maladie (...) ". Aux termes de son article L. 141-5 : " (...) / La preuve du mariage (...) est faite par la production d'actes régulièrement inscrits suivant les prescriptions des textes régissant, à la date de l'acte, l'état civil du pays concerné. A défaut, cette preuve peut être produite au moyen d'un acte établi selon la coutume locale et ayant date certaine. (...) ". 3. Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". 4. Par une décision du 15 février 2012, le ministre des armées a rejeté la première demande présentée par Mme B..., le 12 juillet 2011, en vue d'obtenir le bénéfice d'une pension de réversion au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, au motif qu'elle ne justifiait pas de son mariage contracté en 1948 avec le soldat F... par la seule production d'un acte recognitif établi le 2 juin 2011, soit postérieurement au décès de son conjoint. Sa requête a été rejetée par le tribunal des pensions de Nîmes par jugement du 8 octobre 2013 qui a relevé l'impossibilité d'établir la réalité du mariage au regard des contradictions existant entre les pièces produites sur la date dudit mariage. La cour régionale des pensions de Nîmes a déclaré l'appel irrecevable par arrêt rendu le 29 septembre 2016. Le pourvoi présenté par Mme B... devant le Conseil d'Etat n'a pas été admis par décision n° 405756 rendue le 23 août 2017, faute pour l'intéressée d'avoir régularisé son pourvoi dans le délai de recours. Par sa nouvelle demande présentée le 16 octobre 2017 auprès du service des pensions des armées, Mme B... n'a fait état d'aucune circonstance de droit ou de fait nouvelle. Si l'intéressée a produit devant le tribunal administratif de Nîmes la copie intégrale de son acte de mariage célébré le 1er février 1949, portant le n° 57, transcrit le 9 octobre 1950, copie établie le 18 mars 2020 par les services de l'état civil de la commune de El Ogla, elle ne justifie pas de l'impossibilité de produire ce document lors de sa précédente demande, en se bornant à indiquer que celui-ci a été établi après l'opération d'informatisation du système d'état civil, sans justifier ses dires. Dans ces conditions, en l'absence de tout élément de droit et de fait nouveau, la demande d'annulation de la décision du 10 octobre 2018 se heurte à l'autorité de la chose jugée par le tribunal des pensions de Nîmes le 8 octobre 2013. En outre et en toute hypothèse, les différentes pièces produites par Mme B... révèlent des contradictions concernant la date de son mariage. Ainsi, selon l'extrait des registres des actes de mariage établi le 2 juin 2011, M. D... et Mme B... ont déclaré avoir fait contrat de mariage en 1948, alors que selon l'extrait des jugements collectifs des naissances de l'intéressée, établi le 7 mars 2012, celle-ci aurait été mariée à F... le 1er février 1945, soit à une date à laquelle ce dernier était hospitalisé suite aux blessures contractées en service le 16 décembre 1944 et alors qu'il avait déclaré être célibataire le 4 avril 1945. Ce dernier document comporte par ailleurs de nombreuses fautes d'orthographe. La copie conforme de l'acte de mariage n° 57/402, qui mentionne des textes postérieurs à la transcription du mariage, fait quant à lui mention d'une date de mariage le 1er février 1949. Enfin, Mme B... ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que la deuxième épouse de M. D... percevrait une pension de réversion en qualité de veuve de ce dernier depuis de nombreuses années. 5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D E C I D E : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... veuve D... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient : Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre, Mme Blin, présidente assesseure, M. Teulière, premier conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2023. La rapporteure, A. Blin La présidente, A. Geslan-Demaret La greffière, M-M. Maillat La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N°21TL01812 2
Cours administrative d'appel
Toulouse
CAA de NANTES, 6ème chambre, 20/06/2023, 21NT01849, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions militaires d'invalidité, puis au tribunal administratif de Rennes devenu compétent par détermination de la loi, d'annuler la décision du 30 juillet 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande tendant à la révision pour aggravation de sa pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 1905810 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 juillet 2021 et 14 juin 2022, M. B..., représenté par Me Uzan-Kauffmann, demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 mai 2021 ; 2°) d'annuler la décision du 30 juillet 2018 ; 3°) de fixer à 30 % le taux d'invalidité de l'infirmité " séquelles de traumatisme de l'épaule droite. Amyotrophie significative du moignon de l'épaule. Limitation importante des mouvements. Périarthrite scapulohumérale " ; 4°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale afin de déterminer son taux d'invalidité ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que l'infirmité en litige est une périarthrite scapulo-huméral limitant ses mouvements de l'épaule et non une limitation des mouvements du bras en lien avec une cicatrice de l'aisselle ; la comparaison des expertises des 25 janvier 2018 et 22 mars 2010 permet de constater une aggravation de cette infirmité ; le taux de 25 % est insuffisant compte tenu de l'atrophie significative dont il souffre. Par des mémoires, enregistrés les 16 mai et 29 juin 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pension militaire d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Gélard, - et les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique. Considérant ce qui suit : 1. M. B..., caporal-chef dans l'armée de terre à la retraite, perçoit une pension militaire d'invalidité au taux de 25 % pour les séquelles qu'il conserve de blessures à la jambe et à la cheville droite ainsi qu'une seconde pension au taux de 40 % au titre d'un stress post-traumatique. L'intéressé bénéficie d'une troisième pension militaire d'invalidité pour un traumatisme au niveau de l'épaule droite survenu le 23 octobre 1978 alors qu'il était en mission au Liban. Le taux d'invalidité de cette dernière infirmité, initialement fixé à 10 %, a été porté à " 20 % + 5 " au 23 février 2010. Le 22 juin 2017, M. B... a sollicité la révision pour aggravation de la pension militaire d'invalidité accordée au titre de cette dernière infirmité. Par une décision du 30 juillet 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. L'intéressé relève appel du jugement du 25 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes, devenu compétent par détermination de la loi, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'octroi d'une pension pour cette infirmité au taux de 30 %. Sur le taux d'invalidité de l'infirmité en litige : 2. Aux termes de l'article L. 154-1 du code des pension militaire d'invalidité et des victimes de guerre : " Le titulaire d'une pension d'invalidité concédée à titre définitif peut en demander la révision en invoquant l'aggravation d'une ou plusieurs des infirmités en raison desquelles cette pension a été accordée. / Cette demande est recevable sans condition de délai. / La pension ayant fait l'objet de la demande est révisée lorsque le pourcentage d'invalidité résultant de l'infirmité ou de l'ensemble des infirmités est reconnu supérieur de 10 points par rapport au pourcentage antérieur. / Toutefois, l'aggravation ne peut être prise en considération que si le supplément d'invalidité est exclusivement imputable aux blessures et aux maladies constitutives des infirmités pour lesquelles la pension a été accordée. / La pension définitive révisée est concédée à titre définitif. ". 3. Il ressort des pièces du dossier que l'infirmité pour laquelle M. B... était pensionné au taux 10 % au 1er janvier 2003 correspondait à une légère amyotrophie du moignon de l'épaule droite, à une limitation des mouvements en abduction à 80°, en élévation antérieure du bras à 90 ° et en rétropulsion. A compter du 23 février 2010, un taux de 20 % + 5 lui a été accordé pour une légère amyotrophie du moignon de l'épaule avec limitation des mouvements et une périarthrite scapulo-humérale. Le requérant se prévaut cependant des constatations de l'expert qui l'a examiné le 25 janvier 2018, pour solliciter une majoration à hauteur de 30 % du taux qui lui a été accordé. Si l'expert a constaté une aggravation de la limitation de ses mouvements en élévation antérieure et en abduction et a proposé de retenir une aggravation de l'affection dont souffre M. B..., il ressort des pièces du dossier que cet expert a également constaté une amélioration de la rotation externe du coude au corps chez cet ancien militaire, qui passe de 15° à 40°. Sur la base de ces constatations, la commission de réforme a, lors de sa séance du 26 juillet 2018, écarté toute aggravation de l'infirmité de M. B... en précisant qu'à cette date il ne présentait aucune aggravation fonctionnelle. Aucun justificatif médical ne permet d'infirmer cette analyse. En outre, selon le guide-barème des pensions militaires d'invalidité une périarthrite chronique douloureuse justifie un taux entre 5 et 25 % en cas de limitation des mouvements et un taux de 35 % en cas d'abolition des mouvements et d'atrophie marquée. Or, M. B... admet qu'il ne présente pas d'abolition totale de ses mouvements, qui seule justifierait de porter son taux d'invalidité à 35 %. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, en rejetant la demande de révision pour aggravation de l'infirmité concernant l'épaule droite de l'intéressé, la ministre des armées n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 154-1 du code des pension militaire d'invalidité et des victimes de guerre. 4. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées. Délibéré après l'audience du 2 juin 2023, à laquelle siégeaient : - M. Gaspon, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - Mme Gélard, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 juin 2023. La rapporteure, V. GELARDLe président, O. GASPON La greffière, I. PETTON La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 21NT01849
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 19/06/2023, 472318, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par un jugement n° 2125251/5-3 du 15 mars 2023, enregistré le 21 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Paris, avant de statuer sur la demande de Mme K... C... tendant à : 1°) annuler la décision de la commission de recours de l'invalidité du 7 juillet 2021 ; 2°) annuler l'arrêté du 22 février 2021, en tant qu'il prend en compte le grade d'ingénieur en chef de 1ère classe ; 3°) annuler la fiche descriptive des infirmités constatées du 4 mars 2021, en tant qu'elle prend en compte le grade d'ingénieur en chef de 1ère classe ; 4°) mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ; a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes : 1°) Les officiers généraux atteints par la limite d'âge ou par la limite de durée de service pour l'admission obligatoire à la retraite, dont l'état militaire cesse d'office conformément à l'article L. 4139-14 du code de la défense, doivent-ils être regardés comme étant radiés des cadres à cette date au sens de l'article L. 125-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ' 2°) Les officiers généraux répartis dans la deuxième section prévue par l'article L. 4141-1 du code de la défense par limite d'âge doivent-ils être regardés comme étant radiés des cadres à la date de cette répartition au sens de l'article L. 125-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ' 3°) En cas de réponse affirmative aux deux premières questions, la nomination d'un officier général dans un nouveau grade pour prendre rang à compter d'une date postérieure à l'aggravation de l'infirmité pensionnée, à l'atteinte par la limite d'âge et à la répartition dans la deuxième section des officiers généraux, doit-elle être prise en compte par l'administration comme base de calcul de sa pension ' 4°) En cas de réponse négative aux deux premières questions, le calcul de la pension militaire d'invalidité doit-il tenir compte du grade obtenu au moment de la répartition en deuxième section, malgré la cessation de l'état militaire ' Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code de la défense ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative, notamment l'article L. 113 1 ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Julien Eche, maître des requêtes, - les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public, La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Occhipinti, avocat de Mme C... ; Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 mai 2023, présentée par Mme C... ; REND L'AVIS SUIVANT : 1. Aux termes de l'article L.125-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " La pension est calculée sur la base du grade détenu par le militaire à la date de la radiation des cadres (...) Le militaire atteint d'une invalidité ouvrant droit à pension qui est admis à rester en service cumule sa solde d'activité avec sa pension. Dans ce cas, sa pension est versée au taux prévu pour le soldat jusqu'à sa radiation des cadres... ". 2. L'article L. 4141-1 du code de la défense dispose que : " Les officiers généraux sont répartis en deux sections : 1° La première section comprend les officiers généraux en activité (...) 2° La deuxième section comprend les officiers généraux qui, n'appartenant pas à la première section, sont maintenus à la disposition du ministre de la défense ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 4141-6 de ce code : " (...) le colonel ou l'officier d'un grade correspondant ayant été jugé apte à tenir un emploi du grade supérieur peut être promu au titre de la deuxième section soit à la date de son passage dans cette section ou de sa radiation des cadres, soit dans les six mois qui suivent cette date (...) ". L'article L. 4141-1 de ce même code dispose que : " Les officiers généraux peuvent être radiés des cadres ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 4141-4 de ce code : " Les dispositions de l'article L. 4121-2, du troisième alinéa de l'article L. 4123-2, de l'article L. 4123-10 et du b du 3° de l'article L. 4137 2 sont applicables à l'officier général de la deuxième section... ". En outre, en vertu des articles R. 4141-6 et 7 de ce code, un officier général admis en deuxième section peut demander sa radiation des cadres au terme d'un replacement en première section. 3. Il résulte de ces dispositions que l'admission dans la deuxième section peut résulter d'une promotion. Il en résulte également que certaines des dispositions relatives aux droits, obligations et sanctions figurant dans le statut général des militaires sont applicables aux officiers qui y sont admis. Par ailleurs, la radiation des cadres d'un officier général en deuxième section ne peut résulter que d'une sanction disciplinaire ou intervenir, sur sa demande, au terme d'un replacement en première section. Dès lors, le placement dans la deuxième section des officiers généraux ne peut pas être regardé comme une radiation des cadres, y compris pour un officier promu à ce titre, pour l'application des dispositions de l'article L. 125-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre relatives au calcul d'une pension militaire d'invalidité. En l'absence de radiation des cadres, la pension militaire d'invalidité d'un officier promu au titre de la deuxième section doit être calculée sur la base du grade atteint à la fin de la période d'activité précédant sa promotion. Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Paris et à Mme C.... Il sera publié au Journal officiel de la République française. Délibéré à l'issue de la séance du 24 mai 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Nicolas Boulouis, M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. Olivier Rousselle, M. Benoît Bohnert, Mme Anne Courrèges, M. Gilles Pellissier, M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Julien Eche, maître des requêtes-rapporteur. Rendu le 19 juin 2023. La présidente : Signé : Mme Christine Maugüé Le rapporteur : Signé : M. Julien Eche La secrétaire : Signé : Mme Eliane EvrardECLI:FR:CECHR:2023:472318.20230619
Conseil d'Etat