Jurisprudence
La jurisprudence est l'ensemble des décisions rendues par les juridictions administratives, pendant une certaine période dans une matière, dans une branche ou dans l'ensemble du droit.
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CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 24/02/2020, 17BX03270, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédures contentieuses antérieures : M. E... H... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, par deux requêtes distinctes, d'une part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles La Poste a rejeté ses demandes d'allocation temporaire d'invalidité et de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 10 000 euros en réparation des préjudices causés par ces décisions et, d'autre part, de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 28 350 euros en réparation des préjudices causés par son accident de service du 30 août 2001. Par un jugement commun n° 1501880-1502478 du 20 septembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a condamné La Poste à verser à M. H... la somme de 16 000 euros en réparation des préjudices causés par l'accident de service du 30 août 2001 et a rejeté le surplus de ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés le 9 octobre 2017, le 19 avril 2018, le 18 mai 2018 et le 7 juin 2018, M. E... H..., représenté par Me G..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 20 septembre 2017 ; 2°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles par lesquelles La Poste a rejeté ses demandes d'allocation temporaire d'invalidité des 4 août 2012, 23 mai 2014 et 15 octobre 2014 ; 3°) d'enjoindre à La Poste de mettre en oeuvre la procédure d'obtention de l'allocation temporaire d'invalidité dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ; 4°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 10 000 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices causés par les refus d'octroi de l'allocation temporaire d'invalidité ; 5°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 28 350 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices causés par l'accident de service du 30 août 2001 ; 6°) de mettre à la charge de La Poste les frais d'expertise d'un montant de 775 euros et la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - s'agissant de l'allocation temporaire d'invalidité sa demande ne tend pas à la détermination de son montant et à son versement mais à la mise en oeuvre de la procédure de sorte que l'avis du Conseil d'Etat du 23 octobre 2017 n'est pas applicable. En tout état de cause, cet avis constitue un revirement de jurisprudence qui n'était pas applicable à la date à laquelle l'appel a été interjeté ; - son affectation au site de Melle est purement administrative, il n'a jamais repris ses fonctions de sorte que le délai pour présenter sa demande d'allocation temporaire n'a pas commencé à courir comme le prévoit l'article 1er du décret du 6 octobre 1960. La demande d'allocation a été formulée pour la première fois dans le courrier du 4 août 2012. En tout état de cause, en raison du référé qui a interrompu ce délai, même la demande formulée le 23 mai 2014 n'était pas tardive ; - son taux d'incapacité étant supérieur à 10 %, il remplit les conditions lui permettant de bénéficier de l'allocation temporaire d'invalidité . Les taux ont été calculés par l'expert conformément au barème des pensions civiles et militaires ; - les refus opposés par La Poste lui ont causé un préjudice économique évalué à 400 euros par mois auquel s'ajoute un préjudice moral important ; - s'agissant des préjudices liés à l'accident de service survenu le 30 août 2001, les troubles temporaires dans les conditions d'existence doivent être évalués à la somme de 9 000 euros ; - les troubles permanents dans les conditions d'existence liés à un déficit fonctionnel permanent de 5 % doivent être évalués à la somme de 6 350 euros ; - les souffrances endurées, évaluées à 2/7 par l'expert, doivent être évaluées à 3 000 euros ; - la limitation de la flexion du genou rend impossible la pratique du vélo ou de la marche sur de longues distances. Or il résulte des attestations produites qu'il pratiquait régulièrement de telles activités. Le préjudice d'agrément doit dès lors être évalué à la somme de 10 000 euros. Par deux mémoires en défense, enregistrés le 29 mars 2018 et le 30 avril 2018, La Poste, représentée par Me F..., conclut : - à titre principal, au rejet de la requête ; - à titre subsidiaire, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. H... la somme de 16 000 euros assortie des intérêts capitalisés ; - à mettre à la charge de M. H... les dépens et la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - s'agissant de la requête de première instance n° 1501880 relative à l'allocation temporaire d'invalidité, l'appel est irrecevable car le jugement est insusceptible d'appel ; - la demande de confirmation de l'ordonnance du juge des référés est irrecevable ; - les moyens invoqués par M. H... ne sont pas fondés ; - le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en indemnisant la gêne temporaire, les souffrances endurées, le préjudice d'agrément et le déficit fonctionnel alors qu'ils se rattachent à l'atteinte à l'intégrité physique qui n'est pas indemnisable dans le cadre de la présente action ; - en tout état de cause l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire, consistant au port de béquilles, ne saurait excéder la somme de 6 000 euros ; - en tout état de cause l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent ne pourrait, selon le référentiel de la cour d'appel de Bordeaux, excéder 5 500 euros ; - l'indemnisation du pretium doloris ne saurait excéder 1 500 euros. Par ordonnance du 13 septembre 2018, le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat le dossier d'appel du jugement du 20 septembre 2017 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté la demande enregistrée sous le n° 1501880. Par un courrier en date du 15 janvier 2020, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour méconnaissance de l'obligation pour le juge d'épuiser son pouvoir juridictionnel en s'abstenant de se prononcer sur la charge des frais d'expertise. En réponse à la communication de ce moyen d'ordre public, M. H... a présenté des observations par un mémoire enregistré le 22 janvier 2020. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires ; - le code civil ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. I... A..., - les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public, - et les observations de Me D..., représentant La Poste. Considérant ce qui suit : 1. M. H..., qui exerce la profession de facteur, a été victime de deux accidents de service le 30 août 2001 et le 28 avril 2007. Par une décision du 6 avril 2012, La Poste a déclaré que l'état de santé de M. H... est consolidé à la date du 25 janvier 2012. Après le dépôt du rapport de l'expertise ordonnée à sa demande par le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers pour déterminer le taux d'incapacité global imputable à ces accidents de service, M. H... a, par un courrier du 23 mai 2014 puis par un courrier du 15 octobre 2014, sollicité l'octroi d'une allocation temporaire d'invalidité. Par une requête enregistrée sous le n° 1501880, M. H... a sollicité devant le tribunal administratif de Poitiers l'annulation des décisions implicites par lesquelles La Poste a rejeté ses demandes d'octroi d'une allocation temporaire d'invalidité. Parallèlement, et à la suite du rejet implicite de sa réclamation préalable, M. H... a sollicité devant le tribunal administratif de Poitiers le versement d'une somme de 25 000 euros, à titre de provision, en réparation des préjudices causés par l'accident de service dont il a été victime le 30 août 2001. Après avoir obtenu le versement d'une provision de 14 502 euros par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers du 18 février 2015, M. H... a sollicité devant cette même juridiction la condamnation de La Poste à lui verser une indemnité de 28 350 euros en réparation des préjudices causés par cet accident par une requête enregistrée sous le n° 1502478. Par un jugement commun du 20 septembre 2017, le tribunal administratif de Poitiers a condamné La Poste à verser à M. H... une indemnité de 16 000 euros en réparation du préjudice causés par l'accident de service du 30 août 2001 et a rejeté le surplus des demandes. M. H... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas accueilli intégralement ses demandes. Par la voie de l'appel incident, La Poste sollicite la réformation de ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser une indemnité de 16 000 euros à M. H.... En application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le président de la cour de céans a, par une ordonnance du 13 septembre 2018, transmis au Conseil d'Etat les conclusions de la requête de M. H... dirigées contre le jugement du 20 septembre 2017 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a rejeté sa demande enregistrée sous le n° 1501880. Sur la recevabilité : 2. Contrairement à ce que soutient La Poste, M. H... ne demande pas la confirmation de l'ordonnance du juge des référés. Dès lors, la fin de non-recevoir dirigée contre cette demande ne peut qu'être rejetée. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Il résulte de l'instruction que les frais d'expertise, d'un montant de 775 euros, ont été mis à la charge de M. H... par l'ordonnance de liquidation et de taxation des frais d'expertise du président du tribunal administratif de Poitiers en date du 22 mai 2014. Puis ces frais ont ensuite été mis à la charge de La Poste par l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers du 18 février 2015. Cependant, les premiers juges ont omis de statuer sur la charge définitive de ces frais et ont ainsi méconnu la règle applicable même sans texte à toute juridiction administrative, qui lui impartit, sauf dans le cas où un incident de procédure y ferait obstacle, d'épuiser son pouvoir juridictionnel. 4. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur la dévolution des frais d'expertise. Il y a donc lieu de se prononcer sur les conclusions de M. H... et de La Poste afférente aux dépens par la voie de l'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : 5. Les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre au titre des pertes de revenus et de l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causé par un accident de service ou une maladie professionnelle, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire, qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait. 6. En premier lieu, La Poste soutient que les préjudices dont il est demandé réparation ne peuvent être indemnisés dans le cadre de la présente instance au motif qu'il s'agit de dommages patrimoniaux se rattachant à l'atteinte à l'intégrité physique. Il résulte cependant de ce qui est énoncé au point précédent, que les déficits fonctionnels permanents et temporaires, le préjudice d'agrément et le préjudice lié aux souffrances physiques invoqués par M. H..., sont des préjudices extra patrimoniaux indemnisables dans le cas d'une action tendant à l'engagement de la responsabilité sans faute de l'employeur à raison des dommages résultant d'un accident de service. 7. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 4 avril 2014, que l'accident de service survenu le 30 août 2001 a occasionné un traumatisme du genou droit à l'origine d'un déficit fonctionnel temporaire total les 25 et 26 septembre 2001, puis d'un déficit fonctionnel temporaire de classe III du 27 septembre au 18 octobre 2001 en raison d'une déambulation avec deux cannes anglaises, puis d'un déficit fonctionnel temporaire de classe II du 19 octobre au 9 novembre 2001 en raison d'une déambulation avec une canne anglaise, puis du 10 novembre 2001 au 25 janvier 2012, date de la consolidation, d'un déficit fonctionnel temporaire de classe I en raison d'une gêne modérée due à la persistance de douleurs et à la limitation de la flexion. Contrairement à ce que soutient La Poste, en accordant une indemnité de 9 000 euros, les premiers juges n'ont pas procédé, eu égard à la durée et à la gravité, à une inexacte appréciation du préjudice subi par M. H... au titre du déficit fonctionnel temporaire. 8. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 4 avril 2014, que ce traumatisme du genou droit est à l'origine d'un déficit fonctionnel permanent évalué à 5% . Dès lors, eu égard à l'importance de ce déficit et à l'âge de M. H... à la date de consolidation, 59 ans, les premiers juges n'ont pas, contrairement à ce que soutiennent M. H... et La Poste, procédé à une inexacte appréciation du préjudice subi au titre du déficit fonctionnel permanent en accordant une indemnité de 5 000 euros. 9. En quatrième lieu, il résulte également du rapport d'expertise que les souffrances endurées par M. H... ont été évaluées à 2/7 en raison d'une intervention chirurgicale par arthroscopie du genou droit. Dès lors, La Poste et M. H... ne sont pas davantage fondés à soutenir que c'est par une inexacte appréciation de ce chef de préjudice que les premiers juges ont accordé à ce titre une indemnité de 2 000 euros. 10. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise que M. H... ne pourra plus pratiquer du vélo sur de longues distances ni faire de randonnées en raison de la limitation de la flexion de son genou droit. Pour établir qu'il pratiquait ces activités avant son accident, M. H... se borne, comme en première instance, à produire deux attestations peu circonstanciées de ses fils alors que La Poste conteste expressément l'existence d'un préjudice à ce titre. En l'espèce, ces attestations, ne permettent pas, à elles seules, d'établir que M. H... pratiquait le vélo et la randonnée avant son accident. Dès lors, le préjudice d'agrément invoqué ne peut être regardé comme étant établi. 11. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que M. H..., n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a limité la condamnation de La Poste au versement d'une indemnité de 16 000 euros et, d'autre part que La Poste n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à verser cette indemnité à M. H.... Sur les dépens : 12. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ". 13. Il résulte des dispositions précitées de l'article R. 761-1 du code de justice administrative qu'en l'absence de dispositions particulières et de circonstances particulières, les frais d'expertise, d'un montant de 775 euros, doivent être mis à la charge de La Poste. Sur les frais exposés et non compris dans les dépens : 14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de La Poste la somme que M. H... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en outre obstacle à ce que soit mise à la charge de M. H..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que La Poste demande au même titre. DECIDE : Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers n° 1501880-1502478 du 20 septembre 2017 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur la dévolution définitive des frais d'expertise. Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 775 euros, sont mis à la charge de La Poste. Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... H..., à La Poste et à la MGPTT. Délibéré après l'audience du 27 janvier 2020, à laquelle siégeaient : M. Pierre Larroumec, président, Mme C... B..., présidente-assesseure, M. I... A..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 24 février 2020. Le rapporteur, Paul-André A... Le président, Pierre LarroumecLe greffier, Cindy Virin La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. 2 N° 17BX03270
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 27/02/2020, 17DA01251, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la caisse de crédit municipal de Roubaix à lui verser la somme de 83 640 euros en réparation de son préjudice, cette somme portant intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, avec capitalisation. Par un jugement n° 1303545 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Lille a condamné la caisse de crédit municipal de Roubaix à verser à M. C... une indemnité de 1 500 euros et a rejeté le surplus de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 27 juin 2017, M. C..., représenté par Me F... B..., demande à la cour : 1°) de réformer le jugement du 25 avril 2017 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a limité à la somme de 1 500 euros le montant de l'indemnité que la caisse de crédit municipal de Roubaix a été condamnée à lui verser ; 2°) de condamner la caisse de crédit municipal de Roubaix à lui verser la somme de 83 640 euros en réparation des fautes nées du refus de reconnaissance d'imputabilité au service de son affection, cette somme portant intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, avec capitalisation ; 3°) de mettre à la charge de la caisse de crédit municipal de Roubaix la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et une somme de 35 euros au titre de l'article R. 761-1 de ce code. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code civil ; - le code monétaire et financier ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 57-348 du 28 mars 1957 fixant le statut des agents comptables des caisses de crédit municipal ; - le décret n° 81-389 du 24 avril 1981 relatif au statut du personnel des caisses de crédit communal ; -le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; - le décret n° 2013-1280 du 29 décembre 2013 relatif à la suppression de la contribution pour l'aide juridique et à diverses dispositions relatives à l'aide juridique ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller, - les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public, - les observations de Me A... E..., substituant Me F... B..., représentant M. C.... Considérant ce qui suit : 1. M. D... C..., qui est né le 19 avril 1957, est entré en 1975 à la caisse de crédit municipal de Roubaix. Il a été mis à la retraite pour invalidité par un arrêté du 12 septembre 2011 du directeur de cette caisse à compter du 1er octobre 2011, avec un taux d'invalidité de 40 %, alors qu'il était adjoint administratif territorial principal de 1ère classe. Par un arrêté du 7 mai 1992, le préfet du Nord l'avait nommé, à compter du 10 mars 1992, en qualité de comptable intérimaire de la caisse de crédit municipal de Roubaix. Son dernier indice dans cet emploi, l'indice nouveau majoré 488, avait été fixé par un arrêté du 1er juin 2003 du directeur de cette caisse. M. C... a été placé en congé maladie à compter du 9 janvier 2006, puis en congé de longue maladie par un arrêté du 1er décembre 2006. Un arrêté du 15 mai 2006 du directeur de cette caisse l'a réintégré au 3ème échelon de son grade statutaire d'adjoint administratif principal de 1ère classe, à l'indice nouveau majoré 393, à compter du 15 mai 2006. Par un jugement du 2 juin 2009, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande d'annulation pour excès de pouvoir de M. C... dirigée contre cet arrêté du 15 mai 2006, au motif que le directeur de la caisse de crédit municipal était en situation de compétence liée du fait du procès-verbal de remise de service du 15 mai 2006 établi par le trésorier-payeur général du Nord. Un jugement du 5 avril 2011 du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 1er décembre 2008 du directeur de la caisse de crédit municipal de Roubaix refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'affection de M. C.... Un arrêté du 13 mai 2011 a, ensuite, reconnu cette imputabilité. M. C... a présenté, le 26 juillet 2012, une demande préalable tendant à l'indemnisation des préjudices nés de ce refus d'imputabilité pour un total de 83 640 euros. M. C... relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a limité à la somme de 1 500 euros le montant de l'indemnité que la caisse de crédit municipal de Roubaix a été condamnée à lui verser, en rejetant le surplus de ses conclusions. Sur la responsabilité : 2. Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait. En ce qui concerne la responsabilité pour faute : 3. Aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ". 4. Aux termes de l'article 5 du décret n° 57-348 du 28 mars 1957 fixant le statut des agents comptables des caisses de crédit municipal : " (...) La désignation d'un comptable intérimaire, lorsqu'elle est nécessaire, est faite par le préfet, sur proposition du directeur de l'établissement et avis du trésorier-payeur général ". Il est constant que M. C... a exercé les fonctions de comptable intérimaire de la caisse de crédit municipal de Roubaix de 1992 à 2006. A la suite à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son affection, M. C... a touché son traitement sur la base de l'indice du 7ème échelon de l'emploi d'agent comptable à l'indice nouveau majoré 488 pour la période du 9 janvier 2006, date du début de son congé maladie, au 15 mai 2006. Toutefois, à cette date, M. C... n'exerçait plus effectivement les fonctions d'agent comptable intérimaire et une remise de service avait eu lieu. L'administration était, dès lors, tenue, d'une part, de mettre fin à ses fonctions d'agent comptable intérimaire, ainsi que l'a jugé le 2 juin 2009 le tribunal administratif de Lille dans un jugement passé en force de chose jugée, d'autre part, de placer M. C... dans une situation régulière. Elle était également tenue de le réintégrer au 3ème échelon de son grade statutaire d'adjoint administratif principal de 1ère classe à l'indice nouveau majoré 393, à compter du 15 mai 2006, sans qu'il puisse utilement se prévaloir, en tout état de cause, de la méconnaissance des dispositions de l'article 63 du décret n° 81-389 du 24 avril 1981 relatif au statut du personnel des caisses de crédit communal qui prévoit la conservation de ses émoluments pendant un congé de maladie pour une affection imputable au service, dès lors qu'il a pu conserver les émoluments afférents à ce grade pendant qu'il était en congé de maladie. 5. En outre, en application des dispositions de l'article 57 précité de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, M. C... a conservé l'intégralité de son traitement afférant à ce grade jusqu'à sa mise à la retraite, sans qu'il puisse soutenir qu'il aurait dû bénéficier de l'indice attaché à l'emploi d'agent comptable intérimaire jusqu'à sa date de mise à la retraite. Par suite, le moyen tiré de la faute commise par la caisse de crédit municipal de Roubaix en lui versant un traitement sur la base de l'indice nouveau majoré 393 du 15 mai 2006 au 1er octobre 2011 doit être écarté et les conclusions de M. C... tendant au paiement de la somme de 38 640 euros au titre de la perte de rémunération durant son congé de maladie doivent être rejetées. 6. Enfin, s'il est constant que le successeur de M. C... dans les fonctions de comptable de la caisse de crédit municipal de Roubaix a été titularisé dans le grade de rédacteur territorial au bout de trois ans, alors que M. C... ne l'a pas été, en ayant exercé ces fonctions à titre intérimaire durant quatorze ans, il résulte de l'instruction que le successeur de M. C... avait réussi, en 2006, l'examen professionnel de rédacteur, préalable à l'inscription sur la liste d'aptitude, alors que M. C... avait échoué en 2005 à cet examen. Par suite, le moyen tiré de la faute née du refus de titularisation de M. C... dans le cadre d'emploi des rédacteurs territoriaux doit être écarté. 7. Il résulte toutefois de l'instruction que M. C... est resté durant quatorze ans dans des fonctions intérimaires. Les expertises produites dans le cadre de sa mise à la retraite pour invalidité établissent que celui-ci souffre de troubles anxio-dépressifs et névrotiques sévères, liés à sa situation professionnelle, et sont notamment consécutifs à un grave incident intervenu le 9 janvier 2006 avec le directeur de la caisse de crédit municipal de Roubaix. L'imputabilité au service de ces troubles n'a été reconnue qu'à la suite du recours de M. C... devant le tribunal administratif de Lille. La souffrance morale et le sentiment de dévalorisation ressentis sont à l'origine d'un préjudice dont il sera fait une juste appréciation en portant la somme de 1 500 euros, au paiement de laquelle la caisse de crédit municipal de Roubaix a été condamnée par le tribunal administratif de Lille, à la somme de 3 000 euros. En ce qui concerne la responsabilité sans faute : 8. Si M. C... invoque sur ce fondement des troubles dans les conditions d'existence qui ne seraient pas réparés par la pension d'invalidité, troubles constitués par le recours à des crédits à la consommation pour faire face aux dépenses courantes, par la vente d'un appartement dont son épouse et lui étaient propriétaires à Bray-Dunes, ce qui aurait entraîné une dépression de son épouse et l'échec de leur fille à ses examens universitaires, le demandeur ne produit aucun élément de nature à établir leur caractère direct et certain. Par suite, ses conclusions indemnitaires tendant au paiement de la somme de 30 000 euros à ce titre ne peuvent qu'être rejetées. Sur les intérêts et leur capitalisation : 9. Les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue à l'administration ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. Il résulte de l'instruction que M. C... a demandé les intérêts sur les sommes dues au titre de la réparation de son préjudice dans sa demande préalable reçue par la caisse de crédit municipal de Roubaix le 30 juillet 2012. Par suite, le requérant a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 3 000 euros à compter de cette date. 10. Aux termes de l'article 1154 du code civil, " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ". Pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond. Cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande. M. C... a sollicité la capitalisation des intérêts par requête enregistrée le 10 juin 2013. Il est ainsi fondé à demander que les intérêts précédemment déterminés soient capitalisés au même taux à compter du 30 juillet 2013, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : 11. M. C... doit être regardé comme relevant appel de l'article 4 du jugement attaqué rejetant le surplus de ses conclusions de première instance, en tant qu'il a rejeté ses conclusions relatives au versement de la somme de 35 euros au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Sa demande de première instance ayant été introduite le 10 juin 2013, donc antérieurement au 1er janvier 2014, date d'entrée en vigueur du décret n° 2013-1280 du 29 décembre 2013 relatif à la suppression de la contribution pour l'aide juridique et à diverses dispositions relatives à l'aide juridique, et M. C... étant gagnant en première instance, il y a lieu de mettre la somme de 35 euros à la charge de la caisse de crédit municipal de Roubaix sur le fondement de ces dispositions alors applicables au titre des dépens exposés par M. C... en première instance. 12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Lille a limité à la somme de 1 500 euros le montant de l'indemnité que la caisse de crédit municipal de Roubaix a été condamnée à lui verser. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions de la caisse de crédit municipal de Roubaix présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à sa charge le versement à M. C..., partie gagnante, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de cet article. DÉCIDE : Article 1er : Le montant de l'indemnité que la caisse de crédit municipal de Roubaix a été condamnée à verser à M. C... est porté de la somme de 1 500 euros à la somme de 3 000 euros. Article 2 : Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 30 juillet 2012. Les intérêts seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter du 30 juillet 2013, puis à chaque échéance annuelle ultérieure. Article 3 : La caisse de crédit municipal de Roubaix versera une somme de 35 euros en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La caisse de crédit municipal de Roubaix versera une somme de 1 500 euros à M. C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le jugement du 27 avril 2017 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté. Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et à la caisse de crédit municipal de Roubaix. Copie en sera transmise, pour information, au maire de Roubaix. 1 4 N°17DA01251 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de NANTES, 6ème chambre, 18/02/2020, 18NT02675, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel la ministre de la justice a prononcé sa titularisation à compter du 15 septembre 2015 en qualité de secrétaire administratif de 1er grade, en tant que cet arrêté la classe au 4ème échelon de ce grade sans conservation de son ancienneté, ainsi que la décision du 30 décembre 2015 rejetant son recours gracieux. Par un jugement n° 1600565 du 18 avril 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 juillet et 1er octobre 2018, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 avril 2018 ; 2°) d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel la ministre de la justice a prononcé sa titularisation à compter du 15 septembre 2015 en qualité de secrétaire administratif de 1er grade, en tant que cet arrêté la classe au 4ème échelon de ce grade sans conservation de son ancienneté, ainsi que la décision du 30 décembre 2015 rejetant son recours gracieux ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens. Elle soutient que : - le jugement est irrégulier : * le rapporteur public du tribunal administratif a uniquement indiqué le sens synthétique des conclusions mais n'a pas complété la rubrique " sens des conclusions et moyens ou causes retenus " dans l'application " Sagace ", en méconnaissance de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ; * la minute du jugement ne comporte pas les signatures prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; * l'ensemble des moyens et des éléments de son mémoire complémentaire enregistré au greffe du tribunal le 13 octobre 2016 et de son mémoire en réplique enregistré le 17 juillet 2017, n'ont pas été analysés et le jugement, en écartant le moyen relatif à l'illégalité de traitement sans le développer, est entaché d'une omission à statuer ; - les décisions attaquées ne sont pas suffisamment motivées, en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; - le tribunal a commis une erreur de droit dès lors qu'elle avait le droit d'être reclassée dans son corps d'accueil conformément aux dispositions des articles R. 4139-20 et R. 4139-20-1 du code de la défense, à un grade et un échelon doté d'un indice égal ou à défaut immédiatement supérieur à celui dont elle bénéficiait en qualité de militaire et de conserver, à titre personnel, l'indice détenu dans son grade militaire dans l'hypothèse où l'indice afférent à l'échelon sommital de son grade d'accueil serait inférieur à celui qu'elle détenait dans son grade d'origine ; - en estimant que les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense déterminaient à elles-seules les conditions dans lesquelles les militaires ayant eu accès à un emploi réservé devaient être intégrés, le tribunal a méconnu le principe issu de l'article L. 4123-1 du code de la défense selon lequel toute mesure de portée générale affectant la rémunération des fonctionnaires civils de l'Etat est, sous réserve des mesures d'adaptation nécessaires, appliquée avec effet simultané aux militaires. - l'article L. 4123-1 du code de la défense implique que les agents publics doivent être regardés dans leur globalité, sans distinguer les militaires des fonctionnaires ; - son reclassement est une atteinte au prince d'égalité entre fonctionnaires, elle a subi un traitement différencié par rapport à d'autres agents placés dans la même situation. L'instruction a été close au 18 juillet 2019, date d'émission d'une ordonnance prise en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Un mémoire en défense a été enregistré pour la garde des sceaux, ministre de la justice, le 27 janvier 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public, - les observations de Me D..., représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., militaire de la marine nationale depuis 1993 et classée dans l'échelle 4 de rémunération au 5ème échelon correspondant à un indice brut (IB) 512 et à un indice majoré (IM) 440, a été recrutée dans le cadre des emplois réservés du ministère de la justice comme secrétaire administrative de 1er grade. Par un arrêté du ministre de la justice du 25 juillet 2014, modifié le 23 avril 2015, Mme B... a été nommée stagiaire au 11ème échelon de ce grade correspondant à l'indice brut 516 et à l'indice majoré 443 sans ancienneté conservée, affectée à la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse Grand Ouest et placée en position de détachement par son administration durant ce stage. Par un arrêté du 27 octobre 2015, l'intéressée a été titularisée dans ses fonctions à compter du 15 septembre 2015 et classée au 4ème échelon de son grade correspondant à un IB 360 et à un IM 335. Son recours gracieux contre cet arrêté a été rejeté le 30 décembre 2015. Par sa présente requête, Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 avril 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 octobre 2015 ainsi que la décision du 30 décembre 2015 rejetant son recours gracieux. Sur la régularité du jugement attaqué : 2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne ". La communication aux parties du sens des conclusions, prévue par ces dispositions, a pour objet de mettre les parties en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter après les conclusions du rapporteur public à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré. En conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public. En outre, le rapporteur public qui, après avoir communiqué le sens de ses conclusions, envisage de modifier sa position doit, à peine d'irrégularité de la décision, mettre les parties à même de connaître ce changement. Par ailleurs, il appartient au rapporteur public de préciser, en fonction de l'appréciation qu'il porte sur les caractéristiques de chaque dossier, les raisons qui déterminent la solution qu'appelle, selon lui, le litige, et notamment d'indiquer, lorsqu'il propose le rejet de la requête, s'il se fonde sur un motif de recevabilité ou sur une raison de fond, et de mentionner, lorsqu'il conclut à l'annulation d'une décision, les moyens qu'il propose d'accueillir, la communication de ces informations n'étant toutefois pas prescrite à peine d'irrégularité de la décision. 3. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Rennes que le sens des conclusions du rapporteur public, tendant au rejet au fond de la demande, a été mis en ligne le 20 mars 2018 à 18H00. Le rapporteur public a ainsi indiqué aux parties le sens de ses conclusions, en indiquant les éléments du dispositif de la décision qu'il comptait proposer à la formation de jugement d'adopter. Le rapporteur public n'était pas tenu de compléter la rubrique " sens des conclusions et moyens ou causes retenus " dans l'application " Sagace ", dès lors qu'un rejet au fond de la demande était proposé. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement qu'elle critique serait irrégulier sur ce point. 4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement comporte les signatures prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait irrégulier sur ce point. 5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des moyens de la requête de Mme B... et de ses mémoires complémentaires enregistrés au greffe du tribunal le 13 octobre 2016 et le 17 juillet 2017 ont été analysés par le tribunal. Aucune exception d'illégalité n'ayant été soulevée par la requérante, le tribunal n'était pas tenu d'y répondre. Par suite, le jugement en cause n'est pas entaché d'une omission de répondre à un moyen et Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement aurait été rendu au terme d'une procédure irrégulière. Sur le bien-fondé du jugement : 6. En premier lieu, les décisions en cause ne sont pas au nombre de celles qui doivent être obligatoirement motivées en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Une décision de titularisation prononçant le reclassement de l'intéressé n'est pas, par elle-même, une décision qui retire ou abroge une décision créatrice de droits ou une décision défavorable au sens de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions doit donc être écarté. 7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4139-3 du code de la défense : " Le militaire, à l'exception de l'officier de carrière et du militaire commissionné, peut se porter candidat pour l'accès aux emplois réservés, sur demande agréée, dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. En cas d'intégration ou de titularisation, la durée des services effectifs du militaire est reprise en totalité dans la limite de dix ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil de catégorie C. Elle est reprise pour la moitié de la durée des services effectifs dans la limite de cinq ans pour l'ancienneté dans le corps ou le cadre d'emploi de catégorie B. ". Aux termes de l'article L. 4139-4 de ce code : " Durant le détachement prévu aux articles L. 4139-1 à L. 4139-3, le militaire perçoit une rémunération au moins égale à celle qu'il aurait perçue s'il était resté en position d'activité au sein des armées, dans des conditions fixées par décret. Aucune promotion n'est prononcée durant ce détachement et le militaire est radié des cadres ou rayé des contrôles de l'armée active à la date de son intégration ou de sa titularisation dans le corps ou le cadre d'emploi d'accueil. (...) ". 8. Contrairement à ce qui est allégué, Mme B... ne peut tirer des dispositions citées un droit à être reclassée dans son corps d'accueil à un grade et un échelon doté d'un indice égal ou à défaut immédiatement supérieur à celui dont elle bénéficiait en qualité de militaire et conserver, à titre personnel, l'indice détenu dans son grade militaire dans l'hypothèse où l'indice afférent à l'échelon sommital de son grade d'accueil serait inférieur à celui qu'elle détenait dans son grade d'origine. En effet, les dispositions de l'article L. 4139-3 du code de la défense fixent les modalités selon lesquelles la carrière antérieure du militaire qui devient fonctionnaire en étant recruté sur un emploi réservé est prise en considération pour déterminer l'ancienneté dont il bénéficie dans le corps qu'il rejoint lors de sa titularisation. Cette reprise d'ancienneté permet de déterminer, au regard des dispositions statutaires propres à chaque corps, l'échelon auquel il doit être reclassé et, par suite, l'indice qui en résulte. Ces dispositions ne prévoient pas que le reclassement dans la fonction publique d'un ancien militaire, recruté au titre de la législation sur les emplois réservés, tienne compte de l'indice détenu par l'intéressé lorsqu'il était militaire, alors même que cela est le cas pour d'autres modes d'intégration de militaires dans un emploi civil, notamment en application des articles L. 4139-2 et R. 4139-20 du code de la défense. Dans ces conditions, l'intéressée ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 4139-3 du code de la défense, relatives au détachement ou au reclassement des militaires lauréats de la fonction publique ou de la magistrature, qui ne sont pas applicables à sa situation. Par suite, même si les conditions de titularisation de Mme B... sont moins favorables que celles dans lesquelles elle a effectué sa période de détachement et de stage, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que le ministre de la justice avait fait une exacte application, pour procéder au reclassement de l'intéressée, des dispositions citées de l'article L. 4139-3 du code de la défense, qui prévoient uniquement, dans le cas de Mme B... une reprise d'ancienneté dans la limite de cinq ans. 9. En troisième et dernier lieu, la circonstance alléguée que des collègues de Mme B..., placés dans la même situation qu'elle, auraient bénéficié d'une situation plus favorable lors de leur intégration, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée qui a été prise conformément aux dispositions légales citées. Dès lors, le moyen tiré du manquement au principe d'égalité entre les fonctionnaires ne peut qu'être écarté. 10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sur les frais liés au litige : 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par Mme B... au titre des frais liés au litige. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et à la garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 31 janvier 2020, à laquelle siégeaient : - M. Lenoir, président de chambre, - M. Coiffet, président assesseur, - M. A..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 18 février 2020. Le rapporteur, F. A...Le président, H. LENOIR La greffière, E. HAUBOIS La République mande et ordonne à la garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 18NT02675
Cours administrative d'appel
Nantes
Conseil d'État, 7ème chambre, 10/02/2020, 428103, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 17 février 2015 par lequel le maire de Daoulas l'a placé en congé de maladie ordinaire à compter du 28 novembre 2014 à titre conservatoire, l'arrêté du 11 mai 2015 par lequel le maire de Daoulas l'a placé en congé de maladie non imputable au service à compter du 28 novembre 2014 ainsi que l'arrêté du 26 janvier 2016 par lequel le maire de Daoulas l'a placé en congé de longue maladie non imputable au service à compter du 28 novembre 2014. Par un jugement n°s 1501431, 1502618, 1600855 du 9 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé les arrêtés des 11 mai 2015 et 26 janvier 2016. Par un arrêt n° 17NT01200 du 17 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la commune de Daoulas, annulé ce jugement en tant qu'il a annulé les arrêtés municipaux des 11 mai 2015 et 26 janvier 2016 et rejeté les conclusions de première instance et d'appel de M. A.... Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 février, 14 mai et 14 octobre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Daoulas la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean Sirinelli, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. A... et à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la commune de Daoulas et du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Finistère ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., employé par la commune de Daoulas comme adjoint technique territorial de 2ème classe, a été placé en congé de maladie à compter du 27 novembre 2014. Le 19 décembre 2014, il a sollicité la prise en charge de ces congés comme imputables au service. Après avoir recueilli l'avis, émis dans sa séance du 23 avril 2015, de la commission départementale de réforme, et par arrêté du 11 mai 2015, le maire a refusé de prendre en charge au titre du service ces arrêts de travail et a placé M. A... en congé de maladie ordinaire du 28 novembre 2014 au 29 mai 2015. Le 17 novembre 2015, M. A... a sollicité son placement en congé de longue maladie. Par un arrêté du 26 janvier 2016, le maire de Daoulas l'a placé en congé de longue maladie non imputable au service, à plein traitement du 28 novembre 2014 au 28 novembre 2015, puis à demi-traitement à compter de cette date. Par un jugement du 9 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 11 mai 2015 ainsi que celui du 26 janvier 2016 en tant qu'il ne reconnaît pas l'imputabilité au service du congé de longue maladie de M. A.... Ce dernier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 17 décembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la commune de Daoulas, annulé ce jugement et rejeté la demande de M. A... dirigée contre ces arrêtés. Sur l'intervention du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Finistère : 2. Le centre de gestion de la fonction publique territoriale du Finistère justifie d'un intérêt suffisant au maintien de l'arrêt attaqué. Son intervention est ainsi recevable. Sur le pourvoi : 3. En premier lieu, aux termes de l'article 31 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. (...) La composition et le fonctionnement des commissions de réforme sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, des collectivités territoriales, de la santé et du budget, pris après avis du conseil supérieur compétent ". Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Dix jours au moins avant la réunion de la commission, le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de son dossier, dont la partie médicale peut lui être communiquée, sur sa demande, ou par l'intermédiaire d'un médecin ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. La commission entend le fonctionnaire, qui peut se faire assister d'un médecin de son choix. Il peut aussi se faire assister par un conseiller ". En vertu des dispositions de l'article 3 du même arrêté, la commission de réforme comprend " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes [...] ". 4. Il résulte des dispositions citées au point précédent que, dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par un agent est nécessaire pour éclairer l'examen de son cas, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision attaquée. 5. D'une part, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour estimer que la commission départementale de réforme avait pu régulièrement émettre son avis sur la situation de M. A... sans s'adjoindre un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par l'intéressé, la cour administrative d'appel de Nantes a recherché si les éléments d'information dont disposait la commission étaient suffisants pour éclairer l'examen du cas de M. A..., et a notamment relevé que la commission disposait, en plus des pièces produites par l'agent, d'une expertise et de deux rapports sur le cas de M. A..., dont un, circonstancié, établi le 23 mars 2015 par le Dr Baranger, médecin spécialiste de la pathologie invoquée. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en estimant, dans ces conditions, que l'absence d'un médecin spécialiste n'avait pas été de nature à priver M. A... d'une garantie et ainsi susceptible d'entacher la procédure suivie devant la commission de réforme d'irrégularité. 6. D'autre part, contrairement à ce qui est soutenu, la cour administrative d'appel de Nantes ne s'est pas abstenue de rechercher, pour écarter le moyen tiré de l'existence d'un vice de procédure, si les éléments soumis à la commission de réforme étaient suffisants pour rendre inutile la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée par M. A... lors de la séance du 23 avril 2015. Par suite, elle n'a pas commis d'erreur de droit dans l'exercice de son office. Elle n'a pas non plus dénaturé les pièces du dossier en estimant, par un arrêt qui est suffisamment motivé, qu'eu égard aux informations dont disposait la commission de réforme sur l'état de santé de M. A... et aux circonstances de sa demande, la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée n'était pas nécessaire. 7. En second lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ". 8. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. 9. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment du rapport du médecin psychiatre du 23 mars 2015 qui conclut que les arrêts de travail de M. A... consécutifs à son état psychologique " ne peuvent être considérés comme en rapport direct et certain avec une maladie professionnelle ou un accident de travail " ainsi que de l'absence d'éléments suffisamment circonstanciés apportés par l'intéressé permettant d'établir que son état psychologique serait directement lié à l'exercice de ses fonctions ou à ses conditions de travail, que la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce en estimant qu'à la date des décisions attaquées, la pathologie dont souffrait M. A... ne pouvait être regardée comme étant imputable au service. 10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Daoulas qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Daoulas au titre des mêmes dispositions.D E C I D E : -------------- Article 1er : L'intervention du centre de gestion de la fonction publique territoriale du Finistère est admise. Article 2 : Le pourvoi de M. A... est rejeté. Article 3 : Les conclusions de la commune de Daoulas présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., à la commune de Daoulas et au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Finistère.ECLI:FR:CECHS:2020:428103.20200210
Conseil d'Etat
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 27/02/2020, 17DA01252, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le crédit municipal de Roubaix à lui verser la somme de 92 324,82 euros en réparation des préjudices nés des erreurs dans le calcul de sa pension de retraite et de sa rente invalidité, cette somme portant intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, avec capitalisation. Par un jugement n° 1404325 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 27 juin 2017, M. C..., représenté par Me F... B..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du 25 avril 2017 du tribunal administratif de Lille ; 2°) de condamner le crédit municipal de Roubaix à lui verser la somme de 92 324,82 euros en réparation des préjudices nés des erreurs dans le calcul de sa pension et de sa rente invalidité, cette somme portant intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable, avec capitalisation ; 3°) de mettre à la charge du crédit municipal de Roubaix la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et une somme de 35 euros au titre de l'article R. 761-1 de ce code. --------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code monétaire et financier ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 81-389 du 24 avril 1981 relatif au statut du personnel des caisses de crédit communal ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller, - les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public, - les observations de Me A... E..., substituant Me F... B..., représentant M. C.... Considérant ce qui suit : 1. M. D... C..., qui est né le 19 avril 1957, est entré en 1975 à la caisse de crédit municipal de Roubaix. Il a été mis à la retraite pour invalidité par un arrêté du 12 septembre 2011 du directeur de cette caisse à compter du 1er octobre 2011, avec un taux d'invalidité de 40 %, alors qu'il était adjoint administratif territorial principal de 1ère classe. Par un arrêté du 7 mai 1992, le préfet du Nord l'avait nommé à compter du 10 mars 1992 en qualité de comptable intérimaire du crédit municipal de Roubaix. Son dernier indice dans cet emploi, l'indice nouveau majoré 488, avait été fixé par un arrêté du 1er juin 2003 du directeur de cette caisse. M. C... a été placé en congé maladie à compter du 9 janvier 2006 puis en congé de longue maladie par un arrêté du 1er décembre 2006. Un arrêté du 15 mai 2006 du directeur de cette caisse l'a réintégré au 3ème échelon de son grade statutaire d'adjoint administratif principal de 1ère classe, à l'indice nouveau majoré 393 à compter du 15 mai 2006. Par un jugement du 2 juin 2009, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande d'annulation pour excès de pouvoir de M. C... dirigée contre cet arrêté du 15 mai 2006 au motif que le directeur de la caisse de crédit municipal était en situation de compétence liée du fait du procès-verbal de remise de service du 15 mai 2006 établi par le trésorier-payeur général du Nord. Un jugement du 5 avril 2011 du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 1er décembre 2008 du directeur du crédit municipal de Roubaix refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'affection de M. C.... Un arrêté du 13 mai 2011 a ensuite reconnu cette imputabilité. M. C... a présenté le 23 janvier 2014 une demande préalable d'un montant de 92 324,82 euros en réparation des préjudices nés des erreurs dans le calcul de sa pension de retraite et de sa rente d'invalidité. M. C... relève appel du jugement du 25 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du crédit municipal de Roubaix à lui verser la somme de 92 324,82 euros. 2. Aux termes de l'article 17 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " I. - Aux fins de sa liquidation, le montant de la pension est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation tel qu'il résulte de l'application de l'article 16 par le traitement soumis à retenue afférent à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite ou, à défaut, par le traitement soumis à retenue afférent à l'emploi, grade, classe et échelon antérieurement occupés d'une manière effective, sauf s'il y a eu rétrogradation par mesure disciplinaire.(...).". 3. Aux termes de l'article 5 du décret n° 57-348 du 28 mars 1957 fixant le statut des agents comptables des caisses de crédit municipal : " (...) La désignation d'un comptable intérimaire, lorsqu'elle est nécessaire, est faite par le préfet, sur proposition du directeur de l'établissement et avis du trésorier-payeur général ". Il est constant que M. C... a exercé les fonctions de comptable intérimaire du crédit municipal de Roubaix de 1992 à 2006. A la suite à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son affection, M. C... a touché son traitement sur la base de l'indice du 7ème échelon de l'emploi d'agent comptable à l'indice nouveau majoré 488 pour la période du 9 janvier 2006, date du début de son congé maladie, au 15 mai 2006. Toutefois, à cette date, M. C... n'exerçait plus effectivement les fonctions d'agent comptable intérimaire et une remise de service avait eu lieu. L'administration était, dès lors tenue, d'une part, de mettre fin à ses fonctions d'agent comptable intérimaire, ainsi que l'a jugé le 2 juin 2009 le tribunal administratif de Lille dans un jugement passé en force de chose jugée et, d'autre part, de placer M. C... dans une situation régulière. Elle était également tenue de le réintégrer au 3ème échelon de son grade statutaire d'adjoint administratif principal de 1ère classe à l'indice nouveau majoré 393, à compter du 15 mai 2006, sans qu'il puisse utilement se prévaloir des dispositions de l'article 63 du décret n° 81-389 du 24 avril 1981 relatif au statut du personnel des caisses de crédit communal. Par suite, le moyen tiré de la faute commise par le crédit municipal de Roubaix en rémunérant M. C... jusqu'à sa retraite sur la base de l'indice nouveau majoré 393 puis en calculant sa pension de retraite sur la base de cet indice effectivement détenu depuis six mois doit être écarté, sans que le requérant puisse soutenir qu'il aurait dû bénéficier de l'indice attaché à l'emploi d'agent comptable intérimaire jusqu'à sa date de mise à la retraite et d'un calcul de sa pension de retraite et de sa rente d'invalidité sur cet indice. 4. Si M. C... soutient que la diminution du montant de sa pension de retraite a pour origine une altercation intervenue le 9 janvier 2006 ayant entraîné sa mise en congé maladie, cette pathologie ayant été reconnue comme imputable au service, ainsi qu'il vient d'être dit, cette pension ne pouvait être calculée que sur l'indice effectivement détenu depuis six mois au moment de la cessation des services et non sur celui des fonctions qu'il n'exerçait plus depuis le 15 mai 2006. Le moyen tiré de la faute constituée par l'absence de titularisation dans le cadre d'emploi des rédacteurs territoriaux qui lui aurait permis de toucher une pension et une rente d'invalidité plus élevée doit être écarté. 5. S'il est constant que le successeur de M. C... dans les fonctions de comptable du crédit municipal de Roubaix a été titularisé dans le grade de rédacteur territorial au bout de trois ans alors que M. C... ne l'a pas été en ayant exercé ces fonctions à titre intérimaire durant quatorze ans, il résulte de l'instruction que le successeur de M. C... avait réussi en 2006 l'examen professionnel de rédacteur préalable à l'inscription sur la liste d'aptitude alors que M. C... avait échoué en 2005 à cet examen. Par suite, le moyen tiré de la faute née du refus de titularisation de M. C... dans le cadre d'emploi des rédacteurs territoriaux qui lui aurait ainsi permis de bénéficier d'une pension de retraite et d'une rente d'invalidité plus élevée doit être écarté. 6. En l'absence de toute faute du crédit municipal de Roubaix, les conclusions indemnitaires de M. C... ne peuvent qu'être rejetées. 7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative doivent, en tout état de cause, être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du crédit municipal de Roubaix présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 de ce code. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. C... est rejetée. Article 2 : Les conclusions du crédit municipal de Roubaix présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au crédit municipal de Roubaix. Copie en sera transmise, pour information, au maire de Roubaix. 1 4 N°17DA01252 1 3 N°"Numéro"
Cours administrative d'appel
Douai
Conseil d'État, 8ème chambre, 13/02/2020, 419329, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A... B... a demandé au tribunal départemental des pensions de Lyon de reconnaître l'imputabilité au service des manifestations fonctionnelles de la myofasciite à macrophages qu'elle soutient avoir contractée à la suite des injections vaccinales subies à l'occasion du service et de lui accorder le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité. Par un jugement n° 11/00019 du 23 septembre 2014, ce tribunal a fait droit à sa demande et fixé le taux d'invalidité à 80 %. Par un arrêt n° 14/00008 du 30 janvier 2018, la cour régionale des pensions de Lyon a, sur appel de la ministre des armées, annulé ce jugement et rejeté la demande de Mme B.... Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 28 mars 2018, 19 juin 2018 et 10 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la ministre des armées ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Charles-Emmanuel Airy, auditeur, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lévis, avocat de Mme B... ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., intégrée dans l'armée en 1981, a été soumise à plusieurs injections de vaccin contre l'hépatite B les 28 avril et 27 mai 1988. Elle a développé, à partir de 1995, une asthénie, physique et cognitive, associée à des douleurs musculo-articulaires diffuses, une intolérance aux efforts et au froid ainsi que des troubles du sommeil. Une biopsie, effectuée sur le muscle deltoïde gauche dans lequel avaient été pratiquées les injections vaccinales, a mis en évidence la présence de lésions histologiques identiques à celles que l'on peut observer en cas de myofasciites à macrophages. Le 22 juillet 2009, Mme B... a sollicité du ministre de la défense le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour séquelles de myofasciite à macrophages se caractérisant par une fatigabilité permanente, des troubles de la vision et des troubles psychologiques. Après son examen par le médecin expert de l'administration, puis par le chef de service de la clinique psychiatrique à l'hôpital d'instruction des armées Desgenettes de Lyon, la commission consultative médicale a émis un avis défavorable à l'octroi à Mme B... d'une pension militaire d'invalidité. Par décision du 27 juin 2011, le ministre de la défense a, sur la base de cet avis, rejeté sa demande. Mme B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 30 janvier 2018 par lequel la cour régionale des pensions de Lyon, après avoir annulé le jugement du 23 septembre 2014 par lequel le tribunal départemental des pensions de Lyon avait reconnu l'imputabilité au service des manifestations fonctionnelles de la myofasciite à macrophages dont elle souffre et lui avait accordé le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux de 80 %, a rejeté sa demande. 2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version applicable au litige : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service (...) ". Aux termes de l'article L. 4 de ce code, dans sa version applicable au litige : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. / (...) Il est concédé une pension : (...) 3° Au titre d'infirmité résultant exclusivement de maladie, si le degré d'invalidité qu'elles entraînent atteint ou dépasse : 30 % en cas d'infirmité unique ; 40 % en cas d'infirmités multiples. (...) ". 3. Dans le dernier état des connaissances scientifiques, l'existence d'un lien de causalité entre une vaccination contenant un adjuvant aluminique et la combinaison de symptômes constitués notamment par une fatigue chronique, des douleurs articulaires et musculaires et des troubles cognitifs n'est pas exclue et revêt une probabilité suffisante pour que ce lien puisse, sous certaines conditions, être regardé comme établi. Tel est le cas lorsque la personne vaccinée, présentant des lésions musculaires de myofasciite à macrophages à l'emplacement des injections, est atteinte de tels symptômes, soit que ces symptômes sont apparus postérieurement à la vaccination, dans un délai normal pour ce type d'affection, soit, si certains de ces symptômes préexistaient, qu'ils se sont aggravés à un rythme et avec une ampleur qui n'étaient pas prévisibles au vu de l'état de santé antérieur à la vaccination, et qu'il ne ressort pas des expertises versées au dossier que les symptômes pourraient résulter d'une autre cause que la vaccination. 4. Pour rejeter la demande de Mme B..., la cour régionale des pensions de Lyon s'est fondée sur ce qu'il ressortait de la dernière expertise médicale effectuée en 2016 par le docteur Mifsud, après avis du professeur Vighetto, sapiteur neurologue, qu'en l'état actuel des connaissances scientifiques, il n'était pas possible d'établir un lien de causalité direct et certain entre la vaccination contre l'hépatite B et une myofasciite à macrophages diffuse, ni entre la lésion histologique que présentait Mme B... à l'emplacement des injections et les signes cliniques dont elle était atteinte. En statuant ainsi, alors que ces rapports d'expertise n'établissaient pas que les symptômes dont souffrait la requérante pouvaient résulter d'une autre cause que la vaccination, sans rechercher si ces symptômes étaient apparus postérieurement à la vaccination, dans un délai normal pour ce type d'affection ou, dans l'hypothèse où certains symptômes préexistaient, s'ils s'étaient aggravés à un rythme et avec une ampleur qui n'étaient pas prévisibles au vu de son état de santé antérieur, la cour régionale des pensions de Lyon a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé. 5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Lyon du 30 janvier 2018 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon. Article 3 : L'Etat versera à Mme B... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à la ministre des armées. ECLI:FR:CECHS:2020:419329.20200213
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème chambre, 13/02/2020, 421929, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A... B... a demandé au tribunal des pensions de Saint-Denis de La Réunion, de juger qu'il a droit au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité déterminée sur l'indice 1216,40, comprenant l'indice de base de 460,40, l'indice de l'article L. 31 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre de 256 et l'indice d'allocation supplémentaire de l'article L. 38 de ce même code de 500. Par jugement n° 12/00004 du 13 décembre 2016, le tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 17/00107 du 25 avril 2018, la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement, jugé qu'il était fondé à réclamer le bénéfice de l'allocation à l'indice 500 prévue par les articles L. 8 bis, L. 37 et L. 38 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et rejeté le surplus de ses demandes. Par un pourvoi, enregistré le 3 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B.... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, notamment ses articles L. 36 à L. 38 ; - la loi n° 55-1074 du 6 août 1955 ; - le code de justice administrative. Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Charles-Emmanuel Airy, auditeur, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par un arrêté du 5 avril 1988, M. A... B... a été admis au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité au taux global de 100 % à raison notamment d'une hypoacousie bilatérale, correspondant à un taux d'invalidité de 70%, et d'acouphènes importants, correspondant à un taux d'invalidité de 10%. M. B... a demandé au tribunal des pensions de Saint-Denis de La Réunion de rehausser l'indice sur la base duquel est calculé sa pension, en y ajoutant l'indice d'allocation supplémentaire prévu à l'article L. 38 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et fixé à 500 pour les pensionnés au taux de 100%. La ministre des armées se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 avril 2018 par lequel la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion, après avoir annulé le jugement du 13 décembre 2016 du tribunal des pensions de Saint-Denis de La Réunion rejetant la demande de M. B..., a jugé que celui-ci était fondé à obtenir le bénéfice de l'allocation à l'indice 500 qu'il sollicitait. 2. Aux termes de l'article L. 36 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa version applicable au litige : " Sont, au regard des dispositions du présent chapitre, qualifiés grands mutilés de guerre, les pensionnés titulaires de la carte du combattant qui, par suite de blessures de guerre ou de blessures en service commandé, sont amputés, aveugles, paraplégiques, blessés crâniens avec épilepsie, équivalents épileptiques ou aliénation mentale ou qui, par blessures de guerre ou blessures en service commandé, sont atteints : / Soit d'une infirmité entraînant à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 85 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les deux premières entraînent globalement un degré d'invalidité d'au moins 85 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les trois premières entraînent globalement un degré d'invalidité d'au moins 90 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les quatre premières entraînent globalement un degré d'invalidité d'au moins 95 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ; / Soit d'infirmités multiples dont les cinq premières entraînent globalement un degré d'invalidité de 100 %, mais dont l'une détermine à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 60 % ". Aux termes de l'article L. 37 du même code, dans sa version applicable au litige : " Sont admis au bénéfice des majorations de pensions et des allocations spéciales prévues par les articles L. 17 et L. 38, les grands invalides : (...) b) Titulaires de la carte du combattant, pensionnés pour une infirmité entraînant à elle seule un degré d'invalidité d'au moins 85 % ou pour infirmités multiples entraînant globalement un degré d'invalidité égal ou supérieur à 85 % calculé dans les conditions ci-dessus définies par l'article L. 36 et résultant ou bien de blessures reçues par le fait ou à l'occasion du service, ou bien de maladie contractée par le fait ou à l'occasion du service, à charge par les intéressés de rapporter la preuve que celle-ci a été contractée dans une unité combattante (...) ". Aux termes de l'article L. 38 du même code, dans sa version applicable au litige : " Il est attribué aux grands mutilés de guerre définis par l'article L. 36 et aux grands invalides définis par l'article L. 37 des allocations en sus de la pension et des majorations et allocations qu'ils perçoivent en vertu des dispositions du titre premier et du chapitre premier du présent titre, à l'exclusion des allocations 4 bis et 7 prévues aux articles L. 33 et L. 34, et de l'indemnité temporaire prévue à l'article L. 41. / Ces allocations ne se cumulent pas entre elles. / Le montant en est fixé par référence à la nature de l'infirmité ou au degré d'invalidité. Les intéressés bénéficient, dans chaque cas particulier, du système le plus favorable. / Le taux de ces allocations est fixé comme suit : (...) NUMERO 20 / DIAGNOSTIC OU POURCENTAGE : 100 % / INDICE (Art. L. 8 bis) : 500 (...) ". 3. Il résulte de ces dispositions, qui ont pour objet d'attribuer des avantages supplémentaires aux pensionnés remplissant certaines conditions relatives tant à l'imputabilité de leurs infirmités qu'au degré d'invalidité en résultant, qu'elles ne sauraient s'appliquer à des infirmités qui ont une origine étrangère au service et qui ont été aggravées par une blessure ou une maladie imputable à celui-ci. 4. Il résulte de ce qui précède qu'en se fondant, pour juger que l'hypoacousie bilatérale et les acouphènes devaient être pris en compte pour l'application des dispositions du b) de l'article L. 37 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, sur la seule circonstance que ces infirmités avaient été aggravées par des blessures reçues par le fait du service le 9 août 1982, sans rechercher si elles trouvaient elles-mêmes leur origine dans ce même service, la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion a commis une erreur de droit. Par suite, la ministre des armées est fondée à demander l'annulation des articles 1er et 2 de son arrêt. D E C I D E : -------------- Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt de la cour régionale des pensions de Saint-Denis de La Réunion du 25 avril 2018 sont annulés. Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées et à M. A... B.... ECLI:FR:CECHS:2020:421929.20200213
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème chambre, 12/02/2020, 425304, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A... B..., épouse C..., a demandé au tribunal des pensions de Nancy la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de ses infirmités. Par un jugement n° 13/00003 du 17 août 2017, le tribunal des pensions a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 17/00008 du 13 septembre 2018, la cour régionale des pensions de Nancy a rejeté l'appel formé par Mme C... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 novembre 2018 et 8 février 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Sébastien Gauthier, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public, La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme B... ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme C... bénéficie depuis le 12 avril 1994 d'une pension militaire d'invalidité en qualité de victime civile de guerre au taux de 80 % pour plusieurs infirmités. Mme C... a demandé au tribunal des pensions de Nancy la révision de sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de ses infirmités. Mme C... se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour régionale des pensions de Nancy qui a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement rejetant sa demande. 2. Aux termes de l'article L. 6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, dans sa rédaction applicable à la date du litige : " La pension prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande ". Il résulte de ces dispositions que lorsque le titulaire d'une pension militaire d'invalidité pour infirmité sollicite sa révision du fait de l'aggravation de ses infirmités, l'évolution du degré d'invalidité s'apprécie à la date du dépôt de la demande de révision de la pension. 3. Pour confirmer le jugement par lequel le tribunal des pensions de Nancy a refusé de faire droit à la demande de révision de la pension de Mme C... pour aggravation, la cour régionale des pensions de Nancy a jugé que les documents fournis par Mme C... ne permettent pas d'évaluer l'évolution de l'infirmité n° 4033 entre le 7 mai 2010 et le 11 mars 2016. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait d'apprécier cette évolution sur la période comprise entre l'octroi de sa pension, le 12 avril 1994, et la date de dépôt de sa demande de révision, le 7 mai 2010, la cour régionale des pensions de Nancy a commis une erreur de droit. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, Mme C... est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. 4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Mme C..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrativeD E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 13 septembre 2018 de la cour régionale des pensions de Nancy est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy. Article 3 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... épouse C... et à la ministre des armées. ECLI:FR:CECHS:2020:425304.20200212
Conseil d'Etat
CAA de DOUAI, 2ème chambre, 04/02/2020, 17DA01165, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme H... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser une somme totale de 316 579,49 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation de ceux-ci, en indemnisation des préjudices résultant de l'infection nosocomiale dont elle a été victime. Par un jugement n° 1500081 du 18 mai 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande, ainsi que les conclusions de la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, demandant le versement d'une somme de 186 548,84 euros correspondant au montant capitalisé, actualisé au 1er mars 2015, de la pension anticipée et de la rente viagère d'invalidité versées à l'intéressée. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 juin et le 21 juin 2017, Mme E..., représentée par Me G... B..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser une somme totale de 316 579,49 euros en indemnisation de l'ensemble des préjudices subis, avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2014, date d'envoi de sa demande préalable, et capitalisation de ceux-ci ; 3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen les entiers dépens dont les frais d'expertise ; 4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité sociale ; - le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller, - les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public, - et les observations de Me D... A..., représentant Mme E..., et de Me F... C..., représentant la caisse des dépôts et consignations. Considérant ce qui suit : 1. Le 15 septembre 2009, Mme E..., alors âgée de quarante-huit ans, qui avait été victime le 13 mars 2002 d'un accident du travail ayant entraîné un traumatisme du genou gauche avec une lésion méniscale, a été admise au centre hospitalier universitaire de Rouen pour la pose, sur ce même genou, d'une prothèse totale. Après la survenue d'un écoulement purulent avec fistulisation profonde au niveau de la cicatrice de la prothèse le 23 décembre 2009, Mme E... a fait l'objet d'une reprise chirurgicale le 28 décembre 2009 consistant notamment en l'ablation de cette prothèse, en un nettoyage au sérum physiologique et en la réalisation de prélèvements. Les prélèvements profonds effectués ont révélé la présence d'un staphylocoque aureus multisensible. A la suite de l'infection dont elle a été victime, Mme E... a recherché la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen et saisi, le 20 avril 2012, la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Haute-Normandie, qui, après avoir prescrit une expertise le 21 février 2013, a conclu, par une décision du 7 novembre 2013, au caractère nosocomial de l'infection contractée et à la mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen de l'indemnisation des préjudices subis par Mme E.... La société hospitalière d'assurances mutuelles, assureur du centre hospitalier universitaire de Rouen, ayant contesté, par un courrier du 28 mars 2014, ces conclusions, Mme E... a saisi, le 27 juin 2014, le centre hospitalier d'une demande préalable d'indemnisation. Mme E... relève appel du jugement du 18 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de ses préjudices. La caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, demande également la condamnation du centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser une somme de 213 057,71 euros, correspondant au montant capitalisé, actualisé au 1er août 2017, de la pension anticipée et de la rente d'invalidité versées à Mme E.... Sur la responsabilité : 2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère (...) ". Doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge. 3. Mme E... soutient qu'elle a contracté une infection nosocomiale à la suite de la pose d'une prothèse au genou gauche réalisée le 16 septembre 2009 et qu'il ne s'agit pas d'une infection autonome superficielle apparue tardivement à compter du 1er décembre 2009. 4. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport des experts désignés par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Haute Normandie du 21 mai 2013, que Mme E... s'est vu poser une prothèse totale du genou gauche le 16 septembre 2009 et que les soins dispensés ont été conformes aux données acquises de la science. Cependant, après plusieurs pics fébriles survenus dès les 18 et 21 septembre 2009, une " désunion " avec une " large plaie sur la moitié de la cicatrice, bourgeonnante et fibrineuse " a pu être constatée au cours d'une consultation tenue le 3 novembre 2009 avec le praticien qui a opéré Mme E.... Bien qu'au cours de deux consultations ultérieures des 17 novembre et 1er décembre 2009, il a pu être constaté une évolution favorable de cette désunion des sutures, celle-ci, relevée par l'infirmière dès le 24 septembre 2009, constituait un signe annonciateur d'une infection profonde dont, selon les experts, les premiers signes manifestes (un écoulement purulent avec fistulisation profonde de la cicatrice de prothèse) ont été constatés le 23 décembre 2009. Un prélèvement bactériologique effectué le 24 décembre 2009 a révélé la présence d'un staphylocoque doré sensible à la méthicilline. Il résulte ainsi de ces éléments que cette infection, si elle a été formellement identifiée trois mois après la pose de la prothèse du genou, a commencé d'agir très peu de temps après cet acte de soins. Si le rapport critique établi le 15 mars 2014 par le docteur Tissot-Guérraz, expert près la cour d'appel de Lyon, et expert agréé par la Cour de cassation en infectiologie nosocomiale, établi à la demande de l'assureur des centres hospitaliers et soumis au débat contradictoire, évoque la possibilité d'une auto-contamination par l'intéressée qui aurait inoculé son propre staphylocoque aureus dans la plaie dès lors que le chirurgien aurait constaté lors de la consultation du 3 novembre 2009 que " Mme E... touche en permanence sa plaie pendant le pansement ", cette constatation ne présentait qu'un caractère ponctuel et selon les dires des experts de la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de Haute Normandie, l'infection profonde dont a été victime Mme E... ne serait pas survenue en dehors de son hospitalisation et aucune cause étrangère à cette infection n'a été retrouvée. Il résulte de l'ensemble de ces éléments, et quand bien même l'intéressée présentait un état antérieur important au niveau de son genou gauche en raison des quatre arthroscopies qu'elle a subies entre 2002 et 2008 et de nombreuses infiltrations, que l'infection dont a été victime Mme E..., identifiée le 23 décembre 2009, est en rapport direct avec la prise en charge médicale dont elle a fait l'objet au centre hospitalier universitaire de Rouen. Cette infection n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci et n'a pas une autre origine que cette prise en charge. Par suite, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle présente un caractère nosocomial et est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen. Sur l'évaluation des préjudices de Mme E... : 5. Mme E..., adjoint titulaire de 2ème classe de la fonction publique territoriale exerçant ses fonctions au sein des cuisines de la restauration scolaire d'une commune, a présenté une incapacité temporaire totale de travail en lien avec l'infection du 23 décembre 2009 au 22 janvier 2010 et du 20 avril 2010 au 11 mai 2010, puis un déficit fonctionnel temporaire partiel en classe III du 23 janvier 2010 au 19 avril 2010 et du 12 mai 2010 au 21 avril 2011, date de consolidation de son état de santé. Elle a été mise en retraite pour invalidité à compter du 15 mai 2013. En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial : S'agissant des dépenses d'assistance par une tierce personne : Quant à la période avant consolidation : 6. Il ressort du rapport d'expertise judiciaire que Mme E... a eu besoin de l'assistance d'une tierce personne à raison d'une heure par jour entre le 17 mars 2010 et le 21 avril 2011, date de sa consolidation. De cette période, il convient d'exclure la période d'hospitalisation de Mme E... du 20 avril 2010 au 11 mai 2010, soit une période de 21 jours. En se fondant sur un taux horaire de 13 euros correspondant au coût de l'aide non médicalisée que nécessitait l'état de santé de Mme E... du 17 mars 2010 au 21 avril 2011, période d'hospitalisation exclue, soit trois cent soixante-quinze jours, et tenant compte de la valeur moyenne actualisée du salaire minimum interprofessionnel de croissance sur la période considérée, augmentée des charges sociales incombant à l'employeur, du coût des congés payés et de la majoration pour dimanche et jours fériés, à raison d'une heure par jour jusqu'à la date de consolidation de son état de santé, fixée au 21 avril 2011, et sur une base annuelle de quatre cent douze jours, le coût de l'assistance par une tierce personne pour la période concernée peut être évalué à la somme de 5 503,875 euros. Il y a lieu, par suite, d'allouer à Mme E... la somme de 5 503,88 euros au titre du préjudice lié aux besoins temporaires d'assistance par une tierce personne. Quant à la période après consolidation : 7. Il ressort du même rapport d'expertise que l'intéressée, atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 30 %, a besoin de l'assistance d'une tierce personne à raison de trois heures et demie par semaine pour les courses et le ménage depuis le 21 avril 2011, date de la consolidation de son état de santé. Cependant, l'infection nosocomiale étant responsable à hauteur de 20 % seulement du déficit fonctionnel permanent dont Mme E... est atteinte, les 10 % restants provenant de la limitation de la flexion du genou gauche et de son instabilité, le besoin en assistance par une tierce personne relevant de la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen s'élève à deux heures et demie par semaine. Compte tenu du taux horaire moyen de rémunération sus-évoqué fixé à 13 euros, et sur la base annuelle de quatre cent douze jours incluant les congés payés, soit cinquante-huit semaines, il sera fait une juste appréciation du coût de l'assistance par une tierce personne pour la période allant de la consolidation à la date du présent arrêt, en la fixant à la somme de 16 475,87 euros. Quant aux besoins futurs : 8. L'expert a estimé le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation et à titre permanent à trois heures et demie par semaine. Cependant, compte-tenu de ce qui a été dit au point 7, le centre hospitalier universitaire de Rouen devra verser à Mme E..., à compter de la date de lecture du présent arrêt, une rente annuelle indemnisant l'aide d'une tierce personne pour les gestes de la vie quotidienne à raison de deux heures et demie par semaine, dont le montant payable à terme échu, fixé à 1 885 euros à cette même date, sera revalorisé par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. S'agissant de l'incidence professionnelle : 9. Il résulte de l'instruction que si l'intéressée, qui reste atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 30 %, ne pouvait plus exercer ses fonctions à la restauration scolaire qui nécessitent une station debout prolongée et le port de charges lourdes, elle aurait pu cependant reprendre une activité professionnelle sur un poste aménagé à compter du 21 avril 2011, date de la consolidation de son état de santé. Au vu de l'ensemble de ces éléments, Mme E... n'était pas définitivement inapte à l'exercice de toute activité professionnelle. En outre, elle était proche de l'âge de la retraite et ne justifie ni d'une perte de chance professionnelle, ni d'une dévalorisation sur le marché du travail. Elle ne peut par suite prétendre à aucune indemnisation au titre de l'incidence professionnelle. En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux : S'agissant des préjudices temporaires : Quant au déficit fonctionnel temporaire : 10. Comme il a été dit au point 5, Mme E... a subi une incapacité temporaire totale de travail en lien avec l'infection du 23 décembre 2009 au 22 janvier 2010 et du 20 avril 2010 au 11 mai 2010, puis un déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % du 23 janvier 2010 au 19 avril 2010 et du 12 mai 2010 au 21 avril 2011, date de consolidation de son état de santé. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'évaluant à la somme de 3 500 euros. Quant aux souffrances endurées : 11. Les douleurs éprouvées par Mme E... ont été estimées par le rapport d'expertise à 3,5 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en allouant à Mme E... à ce titre une somme de 5 000 euros. Quant au préjudice esthétique temporaire : 12. Mme E... a subi un préjudice esthétique temporaire en raison de ses cicatrices, du port d'une attelle et de la nécessité de recourir à l'usage de béquilles qui a été estimé par le rapport d'expertise à 3 sur une échelle de 7. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en allouant à Mme E... à ce titre une somme de 3 500 euros. S'agissant des préjudices permanents : Quant au déficit fonctionnel permanent : 13. Il ressort du rapport d'expertise, que Mme E... conserve, depuis la consolidation de son état de santé intervenue le 21 avril 2011, un déficit fonctionnel permanent de 30 % dont 10 % résultent de la limitation de la flexion du genou et de son instabilité, et 20 % de l'infection nosocomiale contractée. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à Mme E... la somme de 25 000 euros qu'elle demande à ce titre. Quant au préjudice esthétique permanent : 14. Ce préjudice a été estimé par le rapport d'expertise à 3 sur une échelle de 7 compte tenu des cicatrices survenues après une greffe de peau, de la genouillère et des béquilles. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en allouant à Mme E... une somme de 3 500 euros. Quant aux frais de véhicule adapté : 15. L'expert judiciaire précise que Mme E... a besoin d'une boîte automatique pour son véhicule. Mme E... demande une somme de 14 067,65 euros et produit un devis évaluant à 4 592,81 euros la pose d'une telle boîte. Compte tenu du déficit fonctionnel permanent de 30 %, dont seulement 20 % sont imputables à l'infection nosocomiale, dont Mme E... est atteinte, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en allouant à Mme E... une somme de 3 061,87 euros. Il n'y a pas lieu d'accorder à Mme E... une indemnisation au titre des frais futurs de remplacement de son véhicule, ces frais ne présentant pas un caractère certain, l'acquisition d'un véhicule neuf équipé d'une boîte de vitesse automatique ne présentant pas systématiquement un coût supérieur à celui d'un véhicule équipé d'une boîte de vitesse manuelle. Sur les conclusions présentées par la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : 16. Aux termes de l'article 36 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui a été mis dans l'impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées, soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes, peut être mis à la retraite par anticipation soit sur sa demande, soit d'office, à l'expiration des délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 et a droit à la pension rémunérant les services prévue au 2° de l'article 7 et au 2° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par dérogation à l'article 19, cette pension est revalorisée dans les conditions fixées à l'article L. 341-6 du code de la sécurité sociale ". Aux termes de l'article 37 du même décret : " I. - Les fonctionnaires qui ont été mis à la retraite dans les conditions prévues à l'article 36 ci-dessus bénéficient d'une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies au troisième alinéa du I de l'article 34, avec la pension rémunérant les services prévus à l'article précédent. / Le bénéfice de cette rente viagère d'invalidité est attribuable si la radiation des cadres ou le décès en activité interviennent avant que le fonctionnaire ait atteint la limite d'âge sous réserve de l'application des articles 1er-1 à 1er-3 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée et sont imputables à des blessures ou des maladies survenues dans l'exercice des fonctions ou à l'occasion de l'exercice des fonctions, ou résultant de l'une des autres circonstances énumérées à l'article 36 ci-dessus (...) ". Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la pension de retraite anticipée pour invalidité et la rente viagère d'invalidité, prévues par ces dispositions doivent être regardées comme ayant pour objet exclusif de réparer, sur une base forfaitaire, les préjudices subis par la victime dans sa vie professionnelle en conséquence de l'accident, c'est-à-dire ses pertes de revenus professionnels et l'incidence professionnelle de son incapacité. 17. En l'espèce, il résulte de l'instruction, d'une part, que Mme E... a été admise à la retraite pour invalidité en lien avec l'accident de service survenu le 13 mars 2002 à compter du 1er mai 2013, et, d'autre part, qu'elle aurait été normalement admise à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 16 mai 2016. Par ailleurs, il ressort des écritures non contestées de la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, que la pension de Mme E..., qui avait droit à une retraite à taux plein, a été liquidée, dès le 1er mai 2013, à hauteur de 9 000 euros par an. Il résulte également de l'instruction qu'elle percevait avant sa mise à la retraite un revenu annuel imposable de 17 600 euros, subissant ainsi un préjudice financier annuel de 8 600 euros. Durant les trois années au cours desquelles Mme E... a été placée en retraite anticipée, elle a ainsi subi un préjudice de perte de revenus s'élevant à la somme de 25 800 euros. Il ne résulte en revanche pas de l'instruction qu'elle ait subi un quelconque préjudice de retraite que les prestations versées par la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, en application des dispositions précitées des articles 36 et 37 du décret du 26 décembre 2003 (pension anticipée et rente viagère d'indemnité), auraient eu pour objet d'indemniser. La caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, est par suite subrogée dans les droits de Mme E... à hauteur de 25 800 euros. Par ailleurs, et ainsi qu'il a été dit, si l'état de santé de l'intéressée s'est aggravé en 2009 à la suite de l'infection nosocomiale qu'elle a contractée et si elle demeure atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 30 %, seuls 20 % sont imputables à cette infection, soit les deux tiers. Par suite, la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, est seulement fondée à demander la condamnation du centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser une somme de 17 200 euros. Il n'y a, dans ces conditions, pas lieu de statuer sur la fin de non-recevoir tirée par le centre hospitalier universitaire de Rouen de l'irrecevabilité des conclusions d'appel de la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, portant à la somme de 213 057,71 euros la somme de 186 548,84 euros demandée à ce titre en première instance. 18. Il résulte des points 6 à 15 que l'indemnité due par le centre hospitalier universitaire de Rouen à Mme E... s'élève à la somme totale de 65 541,62 euros, à laquelle doit s'ajouter la rente annuelle de 1 885 euros prévue au point 8 ci-dessus. Il résulte également du point précédent que le centre hospitalier universitaire de Rouen doit être condamné à verser à la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, une somme de 17 200 euros. 19. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... et la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes. Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts : 20. La requérante a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 65 541,62 euros allouée à compter du 27 juin 2014, date de sa demande préalable d'indemnisation. 21. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée par le mémoire introductif d'instance du 6 janvier 2015. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 27 juin 2015, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date. Sur les frais liés à l'instance : 22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen le versement à Mme E... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le centre hospitalier universitaire de Rouen versera également à la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, la somme de 500 euros qu'elle demande au même titre. DÉCIDE : Article 1er : Le jugement n° 1500081 du 18 mai 2017 du tribunal administratif de Rouen est annulé. Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Rouen est condamné à verser à Mme E... une somme de 65 541,62 euros, à laquelle s'ajoute le versement d'une rente annuelle de 1 885 euros revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2014. Les intérêts échus à la date du 27 juin 2015, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes des intérêts. Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Rouen est condamné à verser à la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, une somme de 17 200 euros. Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Rouen versera à Mme E... une somme de 1 500 euros et à la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... E..., au centre hospitalier universitaire de Rouen et à la caisse des dépôts et consignations, agissant pour le compte de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. Copie sera adressée à la commune de Rouen, à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine Maritime et à Mutame. 2 N°17DA01165
Cours administrative d'appel
Douai
CAA de NANTES, 3ème chambre, 07/02/2020, 18NT00775, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme G... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le centre hospitalier universitaire de Nantes à lui verser la somme totale de 887 491,19 euros en réparation des préjudices résultant de l'accident de service dont elle a été victime le 8 avril 2004. Par un jugement n° 1402787 du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Nantes a partiellement fait droit à sa demande en lui accordant une indemnisation d'un montant de 302 800 euros. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 février 2018 et 30 août 2019 le centre hospitalier universitaire de Nantes, représenté par Me E..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du 20 décembre 2017 ou, subsidiairement, de le réformer en ramenant à de plus justes proportions l'indemnisation accordée à Mme G... au titre de ses préjudices extra-patrimoniaux, au besoin après avoir ordonné une nouvelle expertise médicale ; 2°) de rejeter la demande présentée par Mme G... devant le tribunal administratif de Nantes ; 3°) de mettre à la charge de Mme G... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l'expertise judiciaire sur laquelle s'est basé le tribunal administratif est irrégulière car elle a été menée de manière non contradictoire ; en effet il n'a pas été mis en situation de pouvoir présenter ses propres observations au sujet des différents documents médicaux communiqués à l'expert par Mme G... ; cette irrégularité entraîne celle du jugement attaqué dès lors que le tribunal a utilisé les conclusions de cette expertise ; - les demandes formulées le 13 novembre 2013 par Mme G... étaient prescrites, le point de départ du délai de prescription étant le 1er janvier de l'année suivant la consolidation soit le 1er janvier 2009 ; à cet égard la date de consolidation retenue par l'expert judiciaire est erronée ; l'avis de la CNRACL du 24 octobre 2011 et la décision du 25 octobre 2011 du directeur du CHU relatifs à la rente d'invalidité accordée à Mme G... n'ont pas interrompu le délai de prescription, qui a expiré le 1er janvier 2013 ; - les demandes indemnitaires présentées par Mme G... sont excessives et le montant d'indemnisation accordé par le tribunal administratif doit être ramené à de plus justes proportions ; le taux d'incapacité retenu par l'expert judicaire est erroné et non conforme au barème national d'évaluation médico-légale ; l'évaluation des souffrances endurées est également erronée et le montant accordé à ce titre est excessif ; il en va de même en ce qui concerne le préjudice esthétique ; aucune preuve sérieuse n'est apportée de ce que Mme G... pratiquait régulièrement des activités sportives et de loisirs spécifiques ; les prétentions indemnitaires de la requérante relatives au besoin d'assistance par tierce personne ne sont pas fondées dans leur étendue ; - en outre les différentes expertises menées sont contradictoires en ce qui concerne l'étendue des préjudices et n'ont pas tenu compte de l'état antérieur de l'intéressée ; - il ne pouvait être accordé par le tribunal au titre des préjudices extra-patrimoniaux davantage que ce réclamait la requérante ; - les préjudices patrimoniaux dont fait état Mme G... ne peuvent donner lieu à indemnisation en dehors de toute faute de sa part ; - Mme G... n'a pas invoqué la responsabilité fautive dans le délai de recours contentieux et ses conclusions présentées à ce titre sont irrecevables. Par un mémoire enregistré le 5 avril 2018 Mme G..., représentée par Me F... puis Me D..., conclut : 1°) au rejet de la requête ; 2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de ses conclusions ; 3°) à la condamnation du CHU de Nantes à lui verser la somme totale de 677 767,87 euros ; 4°) à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge du CHU au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que : - le montant d'indemnisation qui lui a été accordé au titre de son incapacité permanente doit être porté à 179 075 euros en raison de l'importance de son déficit fonctionnel permanent et de son espérance de vie, le montant de l'indemnisation pour les souffrances endurées doit être porté à 8 000 euros, le montant de l'indemnisation de son préjudice esthétique doit être porté à 7 000 euros, elle doit être indemnisée d'un préjudice d'agrément ; - elle est en droit de prétendre à une assistance par tierce personne jusqu'en 2028 et l'indemnisation qui doit lui être accordée à ce titre doit être portée à 473 842,87 euros ; - le coût de l'expertise réalisée par le Dr Kalfon doit être mis à la charge du centre hospitalier ; - les moyens invoqués par le CHU de Nantes ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public, - les observations de Me C..., représentant le CHU de Nantes, et de Me B..., représentant Mme G.... Considérant ce qui suit : 1. Mme G..., aide-soignante au CHU de Nantes, a été victime le 8 avril 2004 d'un accident dont l'imputabilité au servie a été reconnue. Elle a été admise, à sa demande, à la retraite pour invalidité à compter du 1er janvier 2012. Elle a adressé le 13 novembre 2013 une demande préalable à son employeur en vue de l'indemnisation des différents préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'accident dont elle a été victime. Elle a formé, après le rejet implicite de cette demande, un recours indemnitaire devant le tribunal administratif de Nantes. Cette juridiction, par un jugement avant dire droit du 9 novembre 2016, a ordonné une expertise judicaire. L'expert a remis son rapport le 23 juin 2017. Par un jugement du 20 décembre 2017, le tribunal administratif a condamné le CHU de Nantes à indemniser Mme G... à hauteur de 302 800 euros. Le CHU de Nantes relève appel de ce jugement. Mme G..., par la voie de l'appel incident, demande la réformation de ce jugement en ce que les montants qui lui ont été accordés sont insuffisamment élevés. Sur l'exception de prescription quadriennale : 2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 modifiée : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence ou au paiement de la créance alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; (...) ". 3. Le fait générateur de la créance dont se prévaut Mme G... est constitué par l'accident de service dont elle a été victime le 8 avril 2004. La date de consolidation de son état de santé a été fixée au 13 février 2008 par l'expert désigné par l'administration dans le cadre de la demande de la requérante tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail du 29 mars 2007 au 13 février 2008, par la commission de réforme dans son avis du 10 avril 2008 et par la Caisse des dépôts et consignations dans une décision du 12 février 2009. Si elle a été ultérieurement fixée au 1er janvier 2012, date à laquelle a pris effet la décision admettant Mme G... à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité, par l'expert auquel elle a demandé d'établir un rapport sur son état de santé puis par l'expert désigné par le tribunal, la détermination de cette seconde date, qui n'est pas assortie de précisions relatives à une évolution de l'état de santé de Mme G... permettant d'estimer que son état n'était pas consolidé à la date du 13 février 2008 initialement retenue, est dépourvue de fondement. Il suit de là que le délai de prescription a commencé à courir le 1er janvier 2009. 4. Toutefois, Mme G... a été admise à faire valoir ses droits à la retraite pour invalidité par une décision du directeur du CHU de Nantes du 25 octobre 2011, sur la base de l'avis favorable émis par la caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) le 24 octobre 2011, qui précise que la pension de retraite sera assortie d'une rente d'invalidité au taux de 45 %, sans majoration pour tierce personne. L'attribution de cette rente a une incidence sur la nature des préjudices dont l'agent peut demander l'indemnisation à la personne publique responsable de l'accident dont il a été victime. Par suite, l'avis de la CNRACL du 24 octobre 2011 et la décision du directeur du CHU de Nantes du 25 octobre 2011 ont constitué, au sens de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968, des communications écrites d'une administration intéressée, ayant trait au montant de la créance, de nature à interrompre le délai de prescription quadriennale. Ainsi, le nouveau délai de quatre ans, qui avait commencé à courir le 1er janvier 2012, n'était pas venu à expiration lorsque Mme G... a adressé au CHU de Nantes, le 13 novembre 2013, une réclamation préalable tendant à l'indemnisation du préjudice causé par l'accident du travail dont elle avait été victime en 2004. L'exception de prescription opposée en défense doit, dès lors, être écartée. Sur la régularité de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif : 5. Le CHU de Nantes soutient que les opérations d'expertise n'ont pas été contradictoires, en ce que les pièces médicales communiquées à l'expert par Mme G... ne lui auraient pas été transmises, et qu'il a ainsi été privé de la possibilité de présenter à l'expert des observations. 6. Il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que le centre hospitalier dument convoqué n'a pas envoyé de représentant aux opérations d'expertise, d'autre part, que les documents apportés le jour de l'expertise par Mme G... étaient déjà connus de lui ou auraient pu l'être par le recours à un médecin conseil susceptible de les consulter sans que lui soit opposé le secret médical. Par ailleurs le centre hospitalier, qui au demeurant a disposé de tous les éléments en discussion dans le cadre du débat contradictoire devant les premiers juges, ne fournit aucun élément permettant d'établir qu'il n'aurait pas été en mesure de faire valoir auprès de l'expert, avant que ce dernier ne remette son rapport, d'éventuelles observations relatives à l'état de santé de Mme G.... Il suit de là que l'irrégularité des opérations d'expertise invoquée par le CHU de Nantes n'est pas établie. Sur le fond : 7. Si la cour dispose déjà de deux rapports d'expertise, l'un établi à titre privé par un médecin pour le compte de Mme G..., l'autre établi par l'expert désigné par le tribunal administratif de Nantes, il résulte de l'instruction qu'aucun de ces rapports ne se prononce explicitement sur l'éventuelle incidence, sur les séquelles dont souffre Mme G..., de son état de santé antérieur à l'accident de service alors même qu'il est établi que l'intéressée a subi une fracture au niveau de l'épiphyse cubitale gauche, zone aujourd'hui atteinte de neuro-algodystrophie. Par ailleurs, il subsiste en l'état actuel de l'instruction des incertitudes sur le taux d'incapacité permanente réel dont reste atteinte l'intéressée tant en ce qui concerne les difficultés de préhension de la main gauche que les difficultés de locomotion. Enfin la détermination du besoin d'assistance par tierce personne avant et après que les enfants de Mme G... auront atteint leur majorité est en l'état actuel dépourvue de précisions suffisantes. Dans ces conditions, la cour n'étant pas en mesure de se prononcer de manière éclairée sur l'étendue des préjudices de l'intéressée, il y a lieu d'ordonner une nouvelle expertise sur les points précisés ci-dessous. D E C I D E : Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête, procédé à une nouvelle expertise médicale de l'état de Mme G..., avec mission pour l'expert : 1°) se faire communiquer l'ensemble des documents médicaux utiles à sa mission, notamment tous ceux relatifs aux examens et soins réalisés sur l'intéressée, examiner Mme G..., en présence du CHU de Nantes, et décrire son état de santé actuel ; 2°) indiquer précisément les séquelles dont souffre aujourd'hui l'intéressée qui sont en relation directe et certaine avec l'accident survenu le 8 avril 2004 et dire en particulier si les antécédents caractérisant l'état de santé de Mme G... antérieur au 8 avril 2004 ont pu concourir à l'apparition de ces séquelles ; 3°) fixer le taux du déficit fonctionnel permanent résultant de l'accident de service du 8 avril 2004 subsistant après consolidation, en détaillant précisément chacune des incapacités dont souffre l'intéressée, et en indiquant le ou les référentiels utilisés pour déterminer ce taux ; 4°) indiquer si l'état de santé nécessite des aménagements particuliers de son véhicule automobile et, si oui, lesquels ; 5°) indiquer si l'état de santé nécessite de recourir à l'assistance d'une tierce personne, en précisant, le cas échéant, la qualification requise, la quotité de temps nécessaire (nombre d'heures hebdomadaires) et la durée prévisible dans le temps de ce besoin d'assistance (nombre d'années), en la détaillant en fonction de la composition familiale ; 6°) se prononcer sur l'intensité des souffrances physiques et morales endurées par Mme G... et de son préjudice esthétique, en les évaluant chacun sur une échelle de 1 à 7 ; 7°) se prononcer sur l'existence ou pas d'un préjudice d'agrément et, le cas échéant, d'en évaluer, après l'avoir décrit, l'importance, sur une échelle de 1 à 7 ; 8°) donner son avis sur les incidences de la pathologie consécutive à l'accident de service de Mme G... sur la vie personnelle, familiale et sociale de l'intéressée (à cet égard l'expert pourra procéder à la description d'une journée-type de l'intéressée). Article 2 : L'expert, qui pourra, selon les modalités requises par l'article R. 621-2, s'adjoindre des sapiteurs, accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la cour. L'expert déposera son rapport au greffe en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai de trois mois. Article 3 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance. Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier universitaire de Nantes et à Mme I.... Délibéré après l'audience du 23 janvier 2020, à laquelle siégeaient : - Mme Perrot, président, - Mme H..., présidente assesseure, - M. A..., premier conseiller. Lu en audience publique le 7 février 2020. Le rapporteur A. A...Le président I. Perrot Le greffier M. C... La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. N° 18NT00775 2
Cours administrative d'appel
Nantes