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CAA de NANTES, 6ème chambre, 05/11/2019, 18NT01796, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 29 juin 2016 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande indemnitaire tendant à la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi suite au refus de lui accorder soixante-dix-sept jours de congés de fin de campagne avant son départ à la retraite. Par un jugement n° 1602622 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 avril 2018 et le 8 janvier 2019, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 1er mars 2018 ; 2°) d'annuler, d'une part, la décision implicite de rejet, née le 8 juin 2016, du silence gardé par le ministre de la défense sur sa demande indemnitaire préalable ainsi que, d'autre part, la décision expresse du 29 juin 2016 du ministre de la défense rejetant sa demande indemnitaire préalable ; 3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 16 343,52 euros au titre des jours de congé de fin de campagne non pris, une somme de 1 396,98 euros au titre des jours de congés annuels non pris résultant de congés de fin de campagne et une somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il a subis ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, sa requête est recevable : * dès lors que la commission des recours des militaires n'était pas compétente pour examiner sa demande, le litige dont il a saisi le tribunal ne portait pas sur les préjudices subis alors qu'il était militaire, mais sur les préjudices subis en tant que fonctionnaire civil du ministère de la défense ; * l'article R. 4125-1 du code de la défense limite la saisine préalable de la commission des recours des militaires aux " contentieux formé par un militaire " ; * il a formé, après l'introduction de l'instance, un recours administratif préalable devant la commission des recours des militaires contre la décision expresse du ministre du 29 juin 2016 qui a été rejetée par une décision de la ministre des armées du 13 décembre 2018 ; - la décision expresse de rejet qui lui a été opposée a été prise par une autorité incompétente ; - le refus qui a été opposé à sa demande est illégal ; - il est fondé demander l'indemnisation des préjudices résultant de ce refus illégal. Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2019, la ministre des armées conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés. L'instruction a été close au 1er mars 2019, date d'émission d'une ordonnance prise en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative. Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête dirigées contre la décision de la ministre des armées du 13 décembre 2018. Une réponse au moyen relevé d'office a été présentée pour M. D..., enregistrée le 4 octobre 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code de la défense ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A..., - les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public, - et les observations de Me Pigny, avocat de M. D.... Considérant ce qui suit : 1. M. D..., entré en service dans la marine nationale le 1er décembre 1966, a été rayé des contrôles de l'armée le 1er décembre 1996. A cette date il justifiait d'un reliquat de soixante-dix-sept jours de congés de fin de campagne. M. D... a poursuivi sa carrière en qualité de fonctionnaire civil de l'Etat, au ministère de la défense. Par courrier du 3 février 2015, il a demandé au ministre de la défense de reporter la date d'effet de son départ à la retraite, afin de lui permettre de bénéficier des jours de congés de fin de campagne non pris. Sa demande a donné lieu à une décision implicite de rejet. M. D... a été admis à la retraite à compter du 19 janvier 2016. Il a alors adressé au ministre de la défense une demande tendant à la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi suite au refus de lui accorder soixante-dix-sept jours de congés de fin de campagne avant son départ à la retraite. Cette demande a été rejetée le 29 juin 2016 par une décision expresse de rejet. Par sa requête visée ci-dessus, M. D... relève appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 1er mars 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices allégués. Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre la décision du 13 décembre 2018 : 2. Il ressort des pièces du dossier que les conclusions de M. D... tendant à l'annulation de la décision de la ministre des armées du 13 décembre 2018 sont dirigées contre une décision intervenue après que le premier juge a statué. Par suite, elles sont nouvelles en appel et, en conséquence, doivent être rejetées comme irrecevables. Sur la régularité du jugement attaqué : 3. Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I.-Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. / II.- Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables aux recours contentieux formés à l'encontre d'actes ou de décisions : 1° Concernant le recrutement du militaire ou l'exercice du pouvoir disciplinaire ; 2° Pris en application du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que ceux qui relèvent de la procédure organisée par les articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. " ; 4. Il résulte de ces dispositions qu'à l'exception des matières qu'elles ont entendu écarter expressément de la procédure du recours préalable obligatoire, la saisine de la commission des recours des militaires s'impose à peine d'irrecevabilité d'un recours contentieux, formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle que ce recours tende à l'annulation d'une décision ou à l'octroi d'une indemnité à la suite d'une décision préalable ayant lié le contentieux. 5. La demande de M. D... tend à l'indemnisation du préjudice résultant du refus de l'administration de lui accorder le bénéfice des jours de congés de fin de campagne qu'il a acquis alors qu'il servait en qualité de militaire dans la marine nationale. Ce refus, relatif à sa situation personnelle et aux conditions d'utilisation d'un droit que M. D... a acquis en qualité de militaire, devait donc faire l'objet d'un recours administratif préalable obligatoire auprès de la commission des recours des militaires, alors même que le requérant n'a demandé à bénéficier de ces jours qu'après avoir quitté l'état militaire pour devenir fonctionnaire civil du ministère de la défense. Il est constant que la décision du 29 juin 2016 adressée au requérant comportait une mention des voies et délais de recours erronée et ne faisait pas davantage état de l'obligation pour le requérant de saisir préalablement à tout recours contentieux la commission des recours des militaires. Ces omissions ont été de nature à empêcher que la notification de la décision du 29 juin 2016 rejetant la demande indemnitaire du requérant fasse courir les délais de recours. 6. Toutefois, si M. D... a lié le contentieux en adressant à l'autorité administrative une demande indemnitaire préalable, il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait, préalablement à l'introduction de sa requête, saisi la commission des recours des militaires du refus opposé à sa demande indemnitaire. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que sa demande était irrecevable faute d'avoir été précédée de la saisine de cette commission. 7. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif de Rennes. Sur les frais liés au litige : 8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. D... au titre des frais liés au litige. DECIDE : Article 1er : La requête de M. D... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et à la ministre des armées. Délibéré après l'audience du 11 octobre 2019, à laquelle siégeaient : - M. Lenoir, président de chambre, - M. Coiffet, président-assesseur, - M. A..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 5 novembre 2019. Le rapporteur, F. A...Le président, H. LENOIR La greffière, E. HAUBOIS La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 18NT01796
Cours administrative d'appel
Nantes
CAA de DOUAI, 3ème chambre, 24/10/2019, 18DA01099, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... G... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 7 mai 2015 par laquelle la directrice des services partagés France de la société Orange a refusé de reconnaître comme imputable au service la maladie déclarée le 7 octobre 2014, de le renvoyer devant l'organisme compétent pour la liquidation de ses droits et de condamner la société Orange au paiement des intérêts au taux légal sur le montant des prestations dues à compter du 7 juillet 2015. Par un jugement n° 1505639 du 27 mars 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 30 mai 2018, M. A... G..., représenté par Me C... B..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) d'annuler la décision du 7 mai 2015 par laquelle la directrice des services partagés France de la société Orange a refusé de reconnaître comme imputable au service la maladie déclarée le 7 octobre 2014 ; 3°) de le renvoyer devant l'organisme compétent pour la liquidation de ses droits ; 4°) de condamner la société Orange au paiement des intérêts au taux légal sur le montant des prestations dues à compter du 7 juillet 2015 ; 5°) de mettre à la charge de la société Orange la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions civiles et militaires ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, - les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public, - les observations de Me F... D..., représentant M. G... et Me E... H..., représentant la société Orange. Considérant ce qui suit : 1. M. G..., ancien chef technicien de France Télécom, aux droits desquels intervient désormais la société Orange, a été exposé, au cours de sa carrière, à l'inhalation de poussières d'amiante. Le 7 mai 1993, une asbestose pulmonaire lui a été diagnostiquée. Après un avis favorable émis par la commission de réforme le 18 novembre 1994, France Télécom a reconnu, le 14 mars 1996, cette pathologie imputable au service, en fixant un taux d'incapacité permanente partielle de 10 %. Admis en préretraite le 6 mars 2017, M. G... a bénéficié d'une allocation temporaire d'invalidité au taux de 10%, qui a ensuite été revalorisée à 15% à compter du 24 septembre 1998. Il a ensuite été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er mai 2002. Le 7 octobre 2014, son état de santé s'étant aggravé, il a demandé que sa pathologie soit reconnue imputable au service au titre de l'article 30A du tableau des maladies professionnelles. Le 3 décembre 2014, l'expertise médicale diligentée à la demande de la société Orange, a conclu que M. G... était atteint d'une pathologie professionnelle, inscrite au tableau 30A des maladies professionnelles. Le 23 avril 2015, la commission de réforme a ensuite émis un avis défavorable à l'imputabilité au service de cette pathologie. Par une décision du 7 mai 2015, la directrice des services partagés France d'Orange a refusé de faire droit à la demande de M. G... présentée le 7 octobre 2014. M. G... relève appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 7 mai 2015. 2. Aux terme de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies à l'article L. 30 ter, avec la pension rémunérant les services. / Le droit à cette rente est également ouvert au fonctionnaire retraité qui est atteint d'une maladie professionnelle dont l'imputabilité au service est reconnue par la commission de réforme postérieurement à la date de la radiation des cadres, dans les conditions définies à l'article L. 31. (...). " et aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : " (...) Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau (...) ". 3. Aucune disposition, à la date de la décision contestée, ne rend applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique de l'Etat, qui demandent le bénéfice des dispositions de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau. 4. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. G... a présenté, postérieurement à sa mise à la retraite, une demande de reconnaissance de sa pathologie asbestosique comme imputable au service, en vue de pouvoir ensuite bénéficier de la rente viagère d'invalidité prévue à l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires. Pour les motifs cités au point précédent, M. G... n'est pas fondé à se prévaloir du tableau des maladies professionnelles annexé à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. 5. D'autre part, M. G... soutient que la pathologie pour laquelle il a obtenu, en 1996, la reconnaissance d'imputabilité au service n'est pas une asbestose mais uniquement des lésions pour plaques pleurales. Nonobstant les termes ambigus contenus dans certaines expertises médicales faisant état du constat de " plaques pleurales calcifiées " et de la référence au 30 B du tableau des maladies professionnelles afférente à cette maladie, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la décision de France Télécom du 14 mars 1996, qui a suivi l'avis de la commission de réforme du 18 novembre 1994, que M. G... a été regardé comme atteint d'une asbestose pulmonaire. Ni le certificat médical établi le 30 septembre 2014, mentionnant que le requérant présente des signes évocateurs d'asbestose, ni même l'expertise médicale du 18 décembre 2014 diligentée à la demande de la société Orange, selon laquelle il est atteint d'une fibrose asbestosique, pathologie professionnelle au tableau 30A, ne permettent d'établir que la société Orange aurait commis une erreur d'appréciation en refusant de regarder cette pathologie comme différente de celle déjà reconnue et donc comme imputable au service. Par suite, le moyen doit être écarté. 6. Il résulte de ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et indemnitaires doivent être rejetées. Ses conclusions présentées également au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être, par voie de conséquence, rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. G... la somme demandée par la société Orange au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. G... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par la société Orange au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G... et à la société anonyme Orange. 1 2 N°18DA01099 1 3 N°"Numéro"
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Douai
Conseil d'État, 3ème chambre, 24/10/2019, 420036, Inédit au recueil Lebon
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 avril et 20 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la circulaire du 15 février 2018 relative au non-versement de la rémunération au titre du premier jour de congé de maladie des agents publics civils et militaires; 2°) d'enjoindre au ministre de l'action et des comptes publics d'abroger cette circulaire dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard; 3°) de mettre à la charge de l'Etat, d'une part, la somme de 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, les entiers frais et dépens de la procédure. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - le code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle; - le code du travail ; - la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ; Considérant ce qui suit : 1. Mme B... A... demande l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire du 15 février 2018 du ministre de l'action et des comptes publics et du secrétaire d'Etat auprès de ce ministre relative au non-versement de la rémunération au titre du premier jour de congé de maladie des agents publics civils et militaires. Cette circulaire commente l'application de l'article 115 de la loi du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 qui a réintroduit un jour de carence pour le versement de la rémunération au titre du congé de maladie des agents publics civils et militaires. 2. En premier lieu, si Mme A... demande au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions figurant à l'article 115 de la loi de finances pour 2018 et à l'article L. 1226-23 du code du travail, cette question est irrecevable faute d'avoir été introduite par mémoire distinct dans les formes prescrites par l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel et par l'article R. 771-13 du code de justice administrative. 3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 115 de la loi du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 : " I. - Les agents publics civils et les militaires en congé de maladie et les salariés en congé de maladie pour lesquels l'indemnisation de ce congé n'est pas assurée par un régime obligatoire de sécurité sociale ou est assurée par un régime spécial de sécurité sociale mentionné à l'article L. 711-1 du code de la sécurité sociale ne bénéficient du maintien de leur traitement ou de leur rémunération, ou du versement de prestations en espèces par l'employeur qu'à compter du deuxième jour de ce congé. / II. - Le I du présent article ne s'applique pas : / 1° Lorsque la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues aux articles L. 27 et L. 35 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; / 2° Au deuxième congé de maladie, lorsque la reprise du travail entre deux congés de maladie accordés au titre de la même cause n'a pas excédé 48 heures ; / 3° Au congé pour invalidité temporaire imputable au service, au congé du blessé prévu à l'article L. 4138-3-1 du code de la défense, aux congés pour accident de service ou accident du travail et maladie professionnelle, au congé de longue maladie, au congé de longue durée et au congé de grave maladie ; / 4° Aux congés de maladie accordés postérieurement à un premier congé de maladie au titre d'une même affection de longue durée, au sens de l'article L. 324-1 du code de la sécurité sociale, pour une période de trois ans à compter de ce premier congé de maladie ". 4. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu déroger à l'ensemble des dispositions législatives ou réglementaires qui prévoient que les agents publics civils et militaires placés en congé de maladie ordinaire perçoivent leur rémunération au titre du premier jour de ce congé. Faute d'être assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, le moyen tiré de ce que la circulaire du 15 février 2018 fixerait des règles nouvelles portant notamment sur les situations de congé de maladie auxquelles le délai de carence est applicable et sur les éléments de rémunération faisant l'objet d'un non-versement et serait, en conséquence, entachée d'incompétence ne peut qu'être écarté. 5. En troisième lieu, à la date d'édiction de la circulaire du 15 février 2018, aucune disposition législative particulière en vigueur dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ne régissait les conditions dans lesquelles les agents publics civils et militaires placés en congé de maladie percevaient leur rémunération. Par suite, le moyen tiré de ce que les auteurs de cette circulaire ont méconnu le particularisme du droit applicable aux agents publics civils et militaires en fonction dans ces trois départements et violé les dispositions de l'article 616 du code civil local est inopérant. 6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de la circulaire qu'elle attaque. Par voie de conséquence, doivent également être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A..., au ministre de l'action et des comptes publics et au secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'action et des comptes publics. ECLI:FR:CECHS:2019:420036.20191024
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème chambre, 08/11/2019, 421048, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Mme A... B... a demandé au tribunal des pensions de Bordeaux d'annuler la décision du 11 juin 2015 du ministre de la défense refusant de lui accorder la réversion de la pension militaire d'invalidité de M. D... à compter du 12 mai 2014, date de sa demande, et de la renvoyer devant le ministre de la défense pour la liquidation de cette pension. Par un jugement n° 15/00021 du 28 juin 2017, le tribunal des pensions a rejeté cette demande. Par un arrêt n° 17/02988 du 24 avril 2018, la cour régionale des pensions de Bordeaux a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mai 2018 et le 3 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Nervo, Poupet, son avocat, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. C... de la Taille Lolainville, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de Mme B... ; Considérant ce qui suit : 1. M. D..., né en 1914 au Maroc, engagé le 5 juin 1937 dans l'armée française et admis à la retraite le 2 juillet 1951, était titulaire d'une pension militaire d'invalidité au taux de 85 %. Il est décédé le 18 septembre 1994. Le 12 mai 2014, Mme B... a sollicité du ministre de la défense le bénéfice de la réversion de cette pension en qualité de conjoint survivant. Le ministre a rejeté cette demande par une décision du 11 juin 2015. Mme B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 24 avril 2018 par lequel la cour régionale des pensions de Bordeaux a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du 28 juin 2017 rejetant le recours qu'elle avait formé contre cette décision. 2. Au nombre des règles générales de procédure que les juridictions des pensions sont tenues de respecter figure celle selon laquelle leurs décisions doivent mentionner les textes dont elles font application. 3. Aux termes des cinquième et sixième alinéa de l'article L. 241 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2016 et relatifs notamment aux ayants cause des militaires non naturalisés originaires du Maroc : " La preuve du mariage (...) est faite par la production soit d'actes régulièrement inscrits suivant les prescriptions des textes régissant l'état civil des autochtones musulmans, soit, à défaut, au moyen d'un acte établi par le cadi. / La réalité des mariages contractés soit entre le 2 août 1914 et le 25 octobre 1919, soit entre le 2 septembre 1939 et le 1er juin 1946, peut exceptionnellement être établie par la preuve testimoniale. " Aux termes des cinquième et sixième alinéas de l'article L. 141-5 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à compter du 1er janvier 2017 : " La preuve du mariage (...) est faite par la production d'actes régulièrement inscrits suivant les prescriptions des textes régissant, à la date de l'acte, l'état civil du pays concerné. A défaut, cette preuve peut être produite au moyen d'un acte établi selon la coutume locale et ayant date certaine. / La réalité des mariages contractés entre le 2 septembre 1939 et le 1er juin 1946 peut exceptionnellement être établie par la preuve testimoniale. " 4. Si la cour régionale des pensions de Bordeaux s'est nécessairement fondée, pour juger que la preuve du mariage de Mme B... avec M. D... n'était pas rapportée, sur les dispositions précitées des cinquième et sixième alinéas de l'article L. 241 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en vigueur à la date du décès de M. D... et dont la teneur avait été reprise, à la date de son arrêt, aux cinquième et sixième alinéas de l'article L. 141-5 du nouveau code, ni cet arrêt, ni le jugement du 28 juin 2017 du tribunal des pensions de Bordeaux, que la cour a confirmé par adoption de ses motifs, ne font toutefois mention de ces textes. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir que l'arrêt qu'elle attaque est entaché d'irrégularité et, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens, à en demander l'annulation. 5. Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP de Nervo, Poupet, avocat de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cette société. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Bordeaux du 24 avril 2018 est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : L'Etat versera à la SCP de Nervo, Poupet une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 4 : La présente décision sera notifiée à Madame A... B... et à la ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2019:421048.20191108
Conseil d'Etat
CAA de NANCY, 3ème chambre, 22/10/2019, 18NC00885, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. F... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 6 mars 2017 par laquelle le président de l'université de Lorraine a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 20 avril 2016, ensemble la décision du 23 mai 2017 portant rejet de son recours gracieux formé le 24 mars 2017. Par un jugement n° 1701439 du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête, enregistrée le 23 mars 2018, et un mémoire complémentaire, enregistré le 27 septembre 2019, M. F... A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 janvier 2018 ; 2°) d'annuler la décision du président de l'université de Lorraine du 6 mars 2017 ; 3°) de condamner l'université de Lorraine aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision en litige est insuffisamment motivée ; - alors même que sa déclaration d'accident de service porte sur un choc émotionnel et une inflammation des articulations des membres inférieurs, il n'a pas été examiné par un médecin spécialisé dans cette seconde pathologie ; - les règles de composition de la commission de réforme n'ont pas été respectées en l'absence d'un médecin spécialisé pour l'examen, tant de sa pathologie psychiatrique, que de l'inflammation des articulations de ses membres inférieurs ; - la décision en litige est entachée d'une erreur d'appréciation, dès lors que son état de santé a été apprécié au regard du seul choc émotionnel, à l'exclusion de l'inflammation des articulations des membres inférieurs. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2018, l'université de Lorraine, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable en l'absence de critique du jugement de première instance et, subsidiairement, que les moyens invoqués par M. A... B... ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Meisse, premier conseiller - les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public, - et les observations de Me E..., pour M. A... B.... Considérant ce qui suit : 1. Recruté le 18 décembre 1996 par l'université de Lorraine, M. F... A... B... a été titularisé, le 1er janvier 1998, dans le corps des techniciens de recherche et de formation de l'éducation nationale. Affecté à la direction du numérique, il exerce les fonctions de technicien informatique de site à la sous-direction des services aux usagers du pôle lorrain de gestion. Présentant d'importantes séquelles d'une ostéoarthrite bilatérale de hanche et atteint d'une incapacité de travail à 80 %, il est titulaire, depuis le 1er avril 1996, d'une carte d'invalidité portant la mention " station débout pénible " et a été reconnu travailleur handicapé de catégorie B à compter du 13 mai 2002. Le 17 mai 2016, M. A... B... a transmis à son employeur une déclaration d'accident de service pour des faits survenus le 20 avril 2016. Il y indique qu'il aurait subi un " choc émotionnel ", accompagné d'une inflammation des articulations des membres inférieurs, en apprenant successivement le refus de sa hiérarchie de l'autoriser à changer de bureau et la mise au concours du poste de responsable du service qu'il souhaitait occuper. A la suite de l'avis défavorable de la commission de réforme du 14 février 2017, le président de l'université de Lorraine, par une décision du 6 mars 2017, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'" accident " du 20 avril 2016. Par un courrier du 24 mars 2017, reçu le 29 mars suivant, M. A... B... a formé, contre cette décision, un recours gracieux qui a été rejeté le 23 mai 2017. Par une requête, enregistrée le 30 mai 2017, M. A... B... doit être regardé comme ayant saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à l'annulation des décisions des 6 mars et 23 mai 2017. Il relève appel du jugement n° 1701439 du 23 janvier 2018, qui rejette sa demande. Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par l'université de Lorraine : 2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 12 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " Dans chaque département, il est institué une commission de réforme départementale compétente à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15. Cette commission, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, qui dirige les délibérations mais ne participe pas aux votes, est composée comme suit : 1. Le chef de service dont dépend l'intéressé ou son représentant ; 2. Le directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques ou son représentant ; 3. Deux représentants du personnel appartenant au même grade ou, à défaut, au même corps que l'intéressé (...) ; 4. Les membres du comité médical prévu à l'article 6 du présent décret. ". Aux termes de l'article 6 de ce même décret : " Dans chaque département, un comité médical départemental compétent à l'égard des personnels mentionnés à l'article 15 ci-après est constitué auprès du préfet. / La composition de ce comité est semblable à celle du comité médical ministériel prévu à l'article 5. (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 5 de ce même décret : " Ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice du congé de longue maladie ou de longue durée prévu à l'article 34 (3e et 4e) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. ". 3. Il résulte de la combinaison des dispositions en cause que la présence d'un médecin spécialiste dans la commission de réforme n'est requise que lorsque cette instance examine une demande de congé de longue maladie ou de longue durée, et non lorsqu'elle se prononce sur l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie déclaré par un agent public. 4. Il ressort des pièces du dossier que l'avis de la commission de réforme du 14 février 2017 a été signé par deux médecins, dont il n'est pas contesté qu'il s'agissait de praticiens de médecine générale. Toutefois, il est constant que la commission, qui avait à se prononcer sur l'imputabilité au service de l'accident du 20 avril 2016, n'était saisie d'aucune demande de congé de longue maladie ou de longue durée. Dans ces conditions, M. A... B... ne saurait utilement soutenir que, en l'absence de médecin spécialisé dans les pathologies occasionnées par les faits survenus le 20 avril 2016, la composition de la commission de réforme, lors de sa réunion du 14 février 2017, était irrégulière. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant. 5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ;(...) ". Aux termes de l'article 13 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, dans sa rédaction alors applicable : " La commission de réforme est consultée notamment sur : 1. L'application des dispositions du deuxième alinéa des 2° et 3° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ; (...) ". Aux termes de l'article 19-1 de ce même décret : " Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident au titre desquels est demandé un congé de maladie, de longue maladie ou de longue durée, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé ". 6. D'une part, il résulte de ces dernières dispositions que, lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, la consultation d'un médecin expert agréé constitue pour elle, non pas une obligation, mais une simple faculté. D'autre part, il est constant que, après une première expertise médicale diligentée par l'administration dans le cadre de l'instruction de la déclaration d'accident de service transmise par M. A... B..., le requérant a bénéficié, à sa demande, d'un nouvel examen effectué par un médecin psychiatre agréé, dont le rapport a été soumis à la commission de réforme qui a rendu son avis le 14 février 2017. Contrairement aux allégations de l'intéressé, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le second expert ne disposait pas des compétences nécessaires pour apprécier l'ensemble des affections psychologiques et physiologiques liées au choc émotionnel qu'il déclare avoir subi le 20 avril 2016, y compris l'inflammation des articulations des membres inférieurs. Par suite, le requérant n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que cette dernière pathologie n'aurait pas été examinée par un médecin spécialisé. 7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". Et aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". 8. Si les refus de reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie constituent des décisions administratives individuelles défavorables qui refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, il ressort des pièces du dossier que la décision du 6 mars 2017 vise le texte dont elle fait application, en l'occurrence le décret n° 86-442 du 14 mars 1986. Elle mentionne également l'avis défavorable de la commission de réforme du 14 février 2017. Elle précise enfin que les arrêtés de travail consécutifs à l'accident du 20 avril 2016 sont à prendre en charge au titre de la maladie ordinaire en l'absence de " lien direct, certain et exclusif avec le service ". Ainsi, contrairement aux allégations de M. A... B..., la décision en litige est suffisamment motivée en droit et en fait. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté. 9. En quatrième et dernier lieu, si le requérant fait valoir que son état de santé aurait été apprécié au regard du seul " choc émotionnel ", à l'exclusion de l'inflammation des articulations des membres inférieurs, de telles allégations ne sont pas étayées par les pièces du dossier et sont, au demeurant, fortement contestées par l'administration, qui fait valoir que la question de l'imputabilité au service de l'accident du 20 avril 2016 a été examinée, tant par l'expert agréé et les membres de la commission de réforme que par le président de l'université de Lorraine, au regard de l'ensemble des lésions mentionnées dans la déclaration d'accident de service du 17 mai 2016. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait ainsi entachée la décision en litige ne peut qu'être écarté. 10. Il résulte de tout ce qui précède que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... B... la somme réclamée par l'université de Lorraine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. 11. Enfin, la présente instance n'ayant pas donné lieu à des dépens, les conclusions du requérant tendant à ce que les dépens soient mis à la charge de l'université de Lorraine ne peuvent qu'être rejetées. D E C I D E : Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée. Article 2 : Les conclusions présentées par l'université de Lorraine en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... B... et à l'université de Lorraine. N° 18NC00885 2
Cours administrative d'appel
Nancy
CAA de PARIS, 6ème chambre, 22/10/2019, 18PA03401, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle le directeur général de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) a implicitement rejeté sa demande d'obtention de la carte du combattant en date du 13 janvier 2016, ainsi que la décision du 30 mars 2018 par laquelle la directrice générale de l'ONACVG a explicitement rejeté sa demande et d'enjoindre au directeur général de l'ONACVG de lui délivrer la carte du combattant. Par un jugement n° 1606207 du 4 octobre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et des mémoires enregistrés les 25 octobre 2018, 2 mai 2019 et 5 juillet 2019 M. E..., représentée par Me D..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 4 octobre 2018 ; 2°) d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de délivrance de la carte du combattant présentée le 13 janvier 2016 ; 3°) d'annuler la décision du 30 mars 2018 de la directrice générale de l'ONACVG refusant de lui délivrer de la carte du combattant ; 4°) d'enjoindre à l'ONACVG, à titre principal de lui délivrer la carte de combattant, ou à défaut de procéder au réexamen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; 5°) de mettre à la charge de l'ONACVG une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - le jugement comporte des erreurs de fait relatifs aux témoignages de ses camarades dès lors notamment que deux d'entre eux et non un seul est titulaire de la carte de combattant ; - sa demande de première instance n'était pas tardive dès lors d'une part, qu'après sa demande initiale de délivrance de la carte de combattant il avait formulé une nouvelle demande le 13 janvier 2016, qui a fait l'objet d'une décision implicite de rejet le 14 mars suivant, qu'il était recevable à contester par demande du 20 avril 2016 et d'autre part, que le silence gardé sur sa première demande n'avait pu faire naitre de décision en l'absence de tout accusé de réception indiquant les conditions de naissance d'une décision de rejet ; en tout état de cause une décision explicite est intervenue le 30 mars 2018 qui s'est substituée aux précédentes ; - le jugement est entaché d'erreur de droit et d'appréciation dès lors qu'en application de l'article R. 311-9 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, il suffisait qu'il ait appartenu pendant trois mois au moins à l'une des formations supplétives visées par ces articles pour se voir délivrer la carte de combattant, sans avoir à justifier du nombre et de la nature des actions auxquelles il aurait participé ; - le jugement est également entaché d'erreur d'appréciation en ce qu'il a retenu que les pièces du dossier ne permettaient pas d'établir la durée de ses services au sein des GMS et en ce qu'il s'est fondé sur l'absence d'archives le concernant ; - il satisfait aux conditions pour se voir délivrer la carte de combattant. Par des mémoires en défense enregistrés les 17 juin 2019 et 16 juillet 2019, l'ONACVG demande à la Cour de rejeter la requête. Il soutient que : - la requête de première instance est irrecevable car tardive, dès lors qu'il n'est pas établi que la lettre du 13 janvier 2016 contenant à nouveau une demande de délivrance de la carte de combattant serait parvenue à l'ONACVG ; - les moyens de la requête ne sont pas fondés. Par ordonnance du 5 juillet 2019, la clôture de l'instruction a été reportée du 8 juillet 2019 au 26 juillet 2019. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme F..., - et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. M. B... E..., né le 15 février 1944 en Algérie, a présenté le 15 octobre 2014 une demande de carte de combattant en faisant état de son appartenance aux groupes mobiles de sécurité (GMS) et d'une affectation sur le territoire de La Calle, département de Bône, de 1958 à mars 1962. Il indique avoir renouvelé cette demande auprès du directeur général de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) par une lettre du 13 janvier 2016, avant de saisir le Tribunal administratif de Paris, le 20 avril 2016, d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet opposée à sa demande. Par un jugement du 12 mars 2018, le tribunal a ordonné, avant dire droit, un supplément d'instruction en vue de la production de tous documents permettant de déterminer, d'une part, la durée des services de l'intéressé au sein des groupes mobiles de sécurité et, d'autre part, s'il avait pris part à des actions de feu ou de combat au cours des opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962. Puis en cours de procédure, la directrice générale de l'ONACVG a explicitement rejeté la demande de M. E... par une décision du 30 mars 2018, dont l'intéressé a également demandé l'annulation. Par jugement du 4 octobre 2018, et après avoir jugé que cette décision expresse de rejet s'était substituée à la décision implicite et que les conclusions de la demande devaient ainsi être regardées comme dirigées uniquement contre cette décision du 30 mars 2018, le tribunal a rejeté cette demande. 2. Aux termes de l'article L. 311-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre : " Ont vocation à la qualité de combattant les militaires des armées françaises qui ont participé (...) à la guerre d'Algérie (...), les membres des forces supplétives françaises, (...) / La reconnaissance de la qualité de combattant dans les conditions prévues par le présent chapitre donne lieu à l'attribution de la carte du combattant. ". L'article R. 311-9 de ce code dispose que " I. Sont considérés comme combattants (...) les membres des forces supplétives françaises mentionnés au II qui ont participé aux opérations effectuées en Afrique du Nord jusqu'au 2 juillet 1962 inclus : (...) 3° En Algérie, à compter du 31 octobre 1954. / II. Sont considérées comme combattants au sens du I les personnes : / 1° Qui ont appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, (...) à une des formations supplétives énumérées par décret et assimilées à une unité combattante ; 2° Qui ont appartenu à une unité ayant connu, pendant leur temps de présence, neuf actions de feu ou de combat ; 3° Qui ont pris part à cinq actions de feu ou de combat ; 4° Qui ont été évacuées pour blessure reçue ou maladie contractée en service, alors qu'elles appartenaient à une unité combattante ou à une formation assimilée sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; 5 ° Qui ont reçu une blessure assimilée à une blessure de guerre quelle que soit l'unité ou la formation à laquelle elles ont appartenu, sans condition de durée de séjour dans cette unité ou formation ; 6° Qui ont été détenues par l'adversaire et privées de la protection des conventions de Genève. ". L'article R. 311-13 du même code prévoit qu' " Une durée des services d'au moins quatre mois dans l'un ou l'autre des pays mentionnés au I de l'article R. 311-9 est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu ou de combat exigée au 2° du II du même article, y compris lorsque ces services se sont poursuivis au-delà du 2 juillet 1962 dès lors qu'ils n'ont connu aucune interruption. ". Aux termes de l'article D. 111-1 de ce même code : " Les formations supplétives françaises en Afrique du nord (...) sont les suivantes : (...) 4° Goums, groupes mobiles de sécurité y compris groupes mobiles de police rurale et compagnies nomades (...) ". 3. Si M. E... fait valoir en premier lieu que le tribunal aurait commis des erreurs de fait quant aux caractéristiques des auteurs des témoignages qu'il produit, notamment en retenant que seul l'un des trois avait la carte de combattant alors que deux d'entre eux en étaient titulaires, de telles erreurs n'ont pu avoir d'incidence sur l'appréciation à laquelle se sont livrés les premiers juges et sont également sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. 4. Par ailleurs, si le tribunal a retenu que les attestations fournies par M. E..., émanant de trois camarades de régiment, étaient insuffisamment probantes quant à la durée de sa présence au sein des GMS, et insuffisamment circonstanciées sur la nature et le nombre des actions auxquelles il aurait pris part, il n'en résulte pas que les premiers juges auraient à tort considéré que M. E... devait tout à la fois justifier de la durée de service prévue au 1° de l'article R. 311-9 cité ci-dessus du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, et de sa participation ou de celle du corps auquel il appartenait, à des actions de combat conformément aux 2° et 3° du même article, mais seulement qu'il n'établissait satisfaire à aucune de ces conditions alternatives. 5. Enfin, il ressort par ailleurs des pièces du dossier que les démarches entreprises par l'administration auprès du centre des archives du personnel militaire et du bureau central des rapatriés, tant initialement qu'après l'intervention du jugement avant-dire droit, n'ont pas permis de retrouver la trace du passage de M. E... dans les groupes mobiles de sécurité ni, par suite, d'en établir la durée ou les caractéristiques. Par ailleurs si, comme l'y invitait le jugement avant-dire droit, M. E... avait la possibilité d'établir, par tout document, la durée de ses services au sein des groupes mobiles de sécurité ainsi que son éventuelle participation à des actions de feu ou de combat, les témoignages produits sont insuffisamment probants pour établir le bien-fondé de ses allégations. Les premiers témoignages versés au dossier de première instance consistent en effet en trois documents identiques, stéréotypés, non datés, dactylographiés, établis par écrivain public et émanant de M. E... lui-même et de deux de ses camarades, Messieurs C... et Bougradja, et par lesquels chacun d'eux attestait avoir accompli avec les deux autres " le service militaire en qualité de GMS 2ème classe dans la région de la Calle, département de Bône Algérie au cours de la guerre d'Algérie entre 1957 et 1962 ", ou, dans l'une de ces attestations " entre 1958 et 1962 ". Les deux autres attestations ultérieurement produites, dont l'une émane encore de M. C... et l'autre d'un troisième camarade de M. E..., M. A..., portant toutes deux la date du 19 mars 2018, sont elles aussi identiques entre elles, dactylographiées et écrites par écrivain public. De plus si leurs auteurs attestent sur l'honneur que M. E..., quoique né seulement en 1944, a bien servi avec eux dans les rangs de l'armée française et " a pris part à des opérations de combat ", en donnant 1958 comme année d'engagement et mars 1962 comme date de fin de service, il est constant que le certificat administratif concernant M. C... n'établit de services de celui-ci que de 1961 à 1962, ce qui limite la force probante de son témoignage, et que par ailleurs M. A... a, quant à lui, obtenu sa carte de combattant du fait de services effectués au sein du 22ème régiment de tirailleurs algériens en qualité de militaire engagé, sans qu'il soit par conséquent établi, ni même sérieusement allégué, qu'il aurait pu servir avec M. E... dans un GMS et par suite avoir connaissance de la durée et des caractéristiques de ses services. Dans ces conditions, de tels documents ne permettent pas d'établir que M. E..., né en février 1944, s'il est titulaire d'une carte d'appartenance à un groupe mobile de sécurité, aurait appartenu pendant trois mois, consécutifs ou non, à celui-ci conformément au 1° de l'article R. 311-9. Par ailleurs, il n'établit pas davantage satisfaire aux conditions, certes, alternatives, des 2° et 3° du même article en ayant appartenu à une unité ayant connu, pendant son temps de présence, neuf actions de feu ou de combat, ou en ayant pris part à cinq actions de feu ou de combat. Le tribunal a pu par suite, sans erreur de droit ni erreur d'appréciation, juger que la décision attaquée n'était pas entachée d'illégalité. 6. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut dès lors qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fins d'injonctions sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa demande de première instance. DÉCIDE : Article 1er : La requête de M. E... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et à l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Délibéré après l'audience du 9 octobre 2019, à laquelle siégeaient : - Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre, - M. Niollet, président-assesseur, - Mme F..., premier conseiller. Lu en audience publique, le 22 octobre 2019. Le rapporteur, M-I. F...Le président, O. FUCHS TAUGOURDEAU Le greffier, T. ROBERT La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 5 N° 18PA03401
Cours administrative d'appel
Paris
Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 04/10/2019, 418521
Vu la procédure suivante : Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 février 2018, 5 mars 2018 et 13 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... et l'association Générations Harkis demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir les dispositions des points 2 et 3 de la circulaire n°5739/SG adressée le 23 septembre 2014 par le Premier ministre aux préfets, recteurs d'académie et inspecteurs d'académie ainsi que les actions n°s 7, 8 et 10 du " plan d'action en faveur des harkis " qui lui est joint ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et son protocole additionnel ; - la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 94-488 du 11 juin 1994 ; - la loi n°2008-492 du 26 mai 2008 ; - la loi n°2014-1554 du 22 décembre 2014 ; - le décret n°2015-772 du 29 juin 2015 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boulloche, avocat de M. A... et de l'association Générations Harkis ; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier que le Premier ministre a présenté le 25 septembre 2014 un plan d'action en faveur des anciens membres des forces supplétives et de leurs proches. Ce plan d'action a été mis en oeuvre, s'agissant de la création des comités régionaux de concertation, de l'accès au droit au logement des anciens supplétifs et de leur famille, de la promotion du dispositif existant des emplois réservés aux enfants de harkis et des actions éducatives visant à faire connaître l'histoire des harkis, par la circulaire adressée le 23 septembre 2014 par le Premier ministre aux préfets, recteurs d'académie et inspecteurs d'académie, à laquelle il est joint. 2. Par ailleurs, pris en application de l'article 79 de la loi du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015, le décret du 29 juin 2015 a fixé les conditions et modalités selon lesquelles les enfants de harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives et assimilés qui ont été maintenus, entre l'âge de 16 et de 21 ans, dans des camps de transit et d'hébergement à l'issue de la guerre d'Algérie, peuvent obtenir la validation de ces périodes pour le calcul de leurs droits à assurance vieillesse. Une circulaire a été prise le 11 août 2015 par le directeur général de la Caisse nationale d'assurance vieillesse qui détaille ce dispositif qui avait été annoncé dans le plan d'action présenté en 2014. Sur les conclusions tendant à l'annulation de la circulaire du Premier ministre : 3. Les conclusions de M. A... et de l'association Générations Harkis tendent à l'annulation pour excès de pouvoir des points 2 et 3 de la circulaire du 23 septembre 2014, ainsi que des actions n°s 7, 8 et 10 du plan d'action qui lui est joint. Le point 10 du plan d'action se bornant à indiquer que la mesure permettant aux enfants d'anciens harkis ayant été hébergés dans des camps de pouvoir racheter jusqu'à quatre trimestres de cotisations de retraire fera l'objet d'une mesure législative, il est dénué de caractère impératif et les conclusions tendant à son annulation ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables. 4. L'article 1er de la loi du 26 mai 2008 relative aux emplois réservés et portant dispositions diverses relatives à la défense, qui modifie l'article L. 396 du code des pensions militaires d'invalidité des victimes de la guerre, devenu l'article L. 241-4 du code des pensions militaires d'invalidité des victimes de guerre, a élargi le bénéfice des emplois réservés, sans condition de délai, sous réserve que les intéressés soient, au moment des faits, âgés de moins de vingt et un ans, aux orphelins de guerre et aux pupilles de la Nation, aux enfants des personnes mentionnées à l'article L. 394 du code, devenu l'article L. 241-2, dont le décès, la disparition ou l'incapacité de pourvoir à leurs obligations et à leurs charges de famille est imputable aux situations énumérées au même article, et aux enfants des militaires dont la pension relève de l'article L. 124, devenu l'article L. 221-1. En bénéficient également, mais sans condition d'âge, les enfants des personnes mentionnées aux articles 1er et 6 de la loi du 11 juin 1994 relative aux rapatriés anciens membres des formations supplétives et assimilés ou victimes de la captivité en Algérie. 5. A l'appui des conclusions de leur requête, les requérants soutiennent que la circulaire attaquée émane d'une autorité incompétente, l'article 34 de la Constitution réservant au législateur le soin de fixer les principes fondamentaux des obligations civiles. Dès lors que, dans la mesure où elle est contestée, la circulaire du 23 septembre 2014 se borne à décrire le dispositif issu de la loi du 26 mai 2008 et à prescrire aux préfets de le mettre en oeuvre, ce moyen ne peut qu'être écarté. 6. Aux termes de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ". Aux termes de l'article 14 de la convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ". Une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens de ces stipulations, si elle affecte la jouissance d'un droit ou d'une liberté sans être assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi. 7. En l'espèce, la différence de traitement critiquée réside dans l'absence, pour les seuls enfants de harkis, de condition d'âge pour bénéficier des emplois réservés. Il résulte de ce qui précède, en tout état de cause, qu'une telle mesure, qui est favorable à ceux qui en bénéficient, ne constitue pas, pour eux, une discrimination au sens des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du protocole additionnel à cette convention. Il s'ensuit que le moyen soulevé par M. A... et l'association Générations Harkis, tiré de la méconnaissance de ces stipulations, ne peut qu'être écarté. 8. Aux termes de l'article 2 de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, qui a pour objet d'établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle, en ce qui concerne l'emploi et le travail, en vue de mettre en oeuvre, dans les États membres, le principe de l'égalité de traitement : " (...) a) une discrimination directe se produit lorsqu'une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne le serait dans une situation comparable (...) ". Il résulte des termes de cet article que le moyen tiré de leur méconnaissance par l'article 1er de la loi du 26 mai 2008 relative aux emplois réservés rappelé par la circulaire contestée, au motif qu'il institue au bénéfice des enfants de harkis un traitement qui leur est favorable, ne peut qu'être écarté. 9. Le moyen, soulevé par les requérants, tiré de ce que serait contraire à la Constitution l'article 1er de la loi du 26 mai 2008 relative aux emplois réservés et portant dispositions diverses relatives à la défense est irrecevable, faute d'avoir été présenté dans un mémoire distinct et motivé ainsi que l'exige l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. 10. Les moyens tirés de ce que la circulaire attaquée serait entachée d'une violation de la loi et d'un défaut de base légale ne sont pas assortis des précisions qui permettent d'en apprécier le bien-fondé. 11. Quant au détournement de pouvoir allégué, il n'est pas établi. 12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées, que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des termes de la circulaire du Premier ministre du 23 septembre 2014 qu'ils attaquent. Sur les conclusions tendant à l'annulation du décret du 29 juin 2015 et de la circulaire du directeur général de la Caisse nationale d'assurance vieillesse : 13. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) ". 14. Il ressort des pièces du dossier que, par un mémoire enregistré le 3 mai 2019, M. A... et l'association Générations Harkis ont demandé l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 29 juin 2015, pris pour l'application de l'article 79 de la loi du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015, qui fixe les conditions et modalités selon lesquelles les enfants de harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives et assimilés qui ont été maintenus, entre l'âge de 16 et de 21 ans, dans des camps de transit et d'hébergement à l'issue de la guerre d'Algérie, peuvent obtenir la validation de ces périodes pour le calcul de leurs droits à assurance vieillesse, ainsi que de la circulaire du 11 août 2015 du directeur général de la Caisse nationale d'assurance vieillesse qui détaille le dispositif mis en place. 15. Le décret ainsi attaqué ayant été publié au Journal officiel de la République française le 30 juin 2015 et la circulaire du 11 août 2015 ayant été publiée sur un site internet de la Caisse nationale d'assurance vieillesse le 14 août 2015, les conclusions tendant à leur annulation, qui n'ont été présentées que le 3 mai 2019, sont tardives et par suite irrecevables. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de M. A... et de l'association Générations Harkis est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C... A..., à l'association Générations Harkis et à la ministre des armées. Copie en sera adressée au Premier ministre.ECLI:FR:CECHR:2019:418521.20191004
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 04/10/2019, 426799, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 janvier, 29 mars et 12 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. BP... BK... et l'association Générations Harkis demandent au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir le rapport du groupe de travail présidé par M. L..., intitulé " Aux harkis, la France reconnaissante ", remis le 17 juillet 2018 ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n°2018-1320 du 28 décembre 2018 instituant un dispositif d'aide à destination des enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés ; 3°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n°2019-01/0NACVG du 7 janvier 2019 relative au dispositif d'aide de solidarité à destination des enfants d'ex-membres des formations supplétives et assimilés ayant servi l'armée française pendant la guerre d'Algérie ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution, notamment son Préambule ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, notamment son article 223 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseiller d'Etat, - les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boulloche, avocat de M. BP... BK... et de l'association Générations Harkis ; Considérant ce qui suit : 1. M. BK... et l'association Générations Harkis demandent l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, du rapport intitulé " Aux harkis, la France reconnaissante ", élaboré par un groupe de travail et remis le 17 juillet 2018 à la secrétaire d'Etat auprès de la ministre des armées et, d'autre part, du décret du 28 décembre 2018 instituant un dispositif d'aide à destination des enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés ainsi que, par voie de conséquence, de l'instruction n°2019-01/ONACVG du 7 janvier 2019 relative au dispositif d'aide de solidarité à destination des enfants d'ex-membres des formations supplétives et assimilées ayant servi l'armée française pendant la guerre d'Algérie. Sur les interventions : 2. L'association Conseil des Harkis du Var justifie, eu égard à son objet statutaire, d'un intérêt suffisant à l'annulation du décret attaqué. Par suite, son intervention est recevable. 3. En leur qualité d'enfants d'anciens harkis, MM. AI..., BZ..., BY..., BI..., AS..., AZ..., CP..., AC..., CH..., AJ..., AN..., AQ..., Q... et H... CR..., AR..., C..., CS..., CL... et I... AV... et CA... et Mmes CI..., CM..., AO... CB..., AI..., N..., CM..., AY..., AU... et BH... E..., BV..., CQ..., CC..., BR..., CO..., T..., Z... et X... CT..., CN..., CA..., AP... et BU... AJ..., CK... et U... AM..., AP..., BA..., BE... et AF... AQ..., J..., BG... et AE... CR..., Y..., BF..., AR..., BK..., O... et BB... et d'autre part, en leurs qualités respectives de gendre de harki, d'épouse de harki et de petit-fils de harki, M. N..., Mme M... CB... et M. BT... justifient d'un intérêt suffisant à l'annulation du décret attaqué. Par suite, leurs interventions sont recevables. 4. En revanche, ne sont pas recevables les interventions de M. CMmes et Mmes AA... BX..., BQ..., CD... et BW... B..., qui se bornent à invoquer une qualité de " sympathisants " des harkis. Sur les conclusions dirigées contre le rapport remis le 17 juillet 2018 : 5. Le rapport mentionné au point 1 ne constitue pas un acte susceptible de recours pour excès de pouvoir. Il s'ensuit que la ministre des armées est fondée à soutenir que les conclusions tendant à son annulation sont irrecevables. Sur les conclusions dirigées contre le décret du 28 décembre 2018 : 6. Aux termes de l'article 1er du décret attaqué : " Les enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés, qui ont séjourné pendant au moins quatre-vingt-dix jours dans un camp ou un hameau de forestage à la suite du rapatriement de leur famille sur le territoire national, et qui résident en France de manière stable et effective, peuvent demander, jusqu'au 31 décembre 2022, une aide de solidarité lorsque leurs ressources ne leur permettent pas de s'acquitter de dépenses ayant un caractère essentiel dans les domaines de la santé, du logement, de la formation, ou de l'insertion professionnelle. / (...) Nul ne peut bénéficier plus d'une fois d'une aide. Le montant de l'aide, qui fait l'objet d'un seul versement, ne peut être révisé ". L'article 3 du même décret dispose que : " (...) Pour attribuer l'aide et en déterminer le montant, le directeur général de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre prend en compte, d'une part, la durée de séjour du demandeur dans le camp ou le hameau de forestage et les conditions de scolarisation qu'il y a connues, d'autre part, l'ensemble des éléments de sa situation personnelle en ce qui concerne la composition de son foyer, le niveau de ses revenus et de ses charges, ainsi que la nature et le montant des dépenses mentionnées au deuxième alinéa de l'article 1er demeurant à sa charge après prise en compte, le cas échéant, des dispositifs de droit commun existants susceptibles de les couvrir ". 7. En premier lieu, si le décret attaqué a entendu, pour accorder l'aide qu'il prévoit, se fonder sur les difficultés particulières rencontrées par les enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local et assimilés pouvant résulter de leurs conditions de vie lors de leur séjour prolongé dans des camps ou des hameaux de forestage à la suite du rapatriement de leur famille sur le territoire national, il ne modifie pas les conditions dans lesquelles les personnes qui s'y croient fondées peuvent engager des actions en responsabilité contre l'Etat. Ainsi, il n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article 34 de la Constitution selon lesquelles : " La loi détermine les principes fondamentaux:/ (...) des obligations civiles (...) ". Aucune autre disposition de l'article 34 de la Constitution ne réserve au législateur la mise à la charge de l'Etat d'une telle prestation financière et la fixation des conditions de son attribution. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que le décret attaqué serait entaché d'incompétence ne peut qu'être écarté. 8. En deuxième lieu, si l'aide financière dite de solidarité prévue par le décret attaqué est réservée aux enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local ayant séjourné de manière prolongée dans des camps ou des hameaux de forestage à la suite du rapatriement de leur famille sur le territoire national et dont les ressources ne leur permettent pas de s'acquitter de dépenses ayant un caractère essentiel dans les domaines de la santé, du logement, de la formation, ou de l'insertion professionnelle, ces conditions visent à réserver le bénéfice de l'aide aux personnes rencontrant actuellement des difficultés sociales ou économiques en tenant compte de la circonstance que ces difficultés sont susceptibles de résulter des conditions de vie qui leur ont été réservées dans ces camps ou hameaux de forestage. Ainsi, la différence de traitement qui en résulte au détriment d'autres enfants d'anciens harkis, moghaznis et personnels des diverses formations supplétives de statut civil de droit local ne remplissant pas ces conditions ainsi que, plus généralement, des autres citoyens exclus du bénéfice de cette mesure est en rapport direct avec l'objet de l'aide, au demeurant ponctuelle et subsidiaire, et n'est pas disproportionnée eu égard à leur différence de situation. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le décret attaqué méconnaîtrait le principe d'égalité. 9. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi. 10. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret qu'ils attaquent. Les conclusions dirigées contre l'instruction du 7 janvier 2019 de la directrice générale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, dont l'annulation n'est demandée qu'en conséquence de l'annulation du décret, ne peuvent par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre des armées, qu'être rejetées, de même que les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : Les interventions de l'association Conseil des Harkis du Var, ainsi que de MM. CE... AI..., S... BZ..., BP... BY..., BN... BI..., A... AS..., AH... AZ..., U... CP..., I... AC..., BC... CH..., I... AJ..., AB... AM..., CG... AQ..., Q... CR..., H... CR..., BP... AR..., A... C..., CS... AV..., I... AV..., CL... AV..., AX... CA..., K... N..., BD... BT... et CU... Mmes CW... CI..., AW... CM..., AO... CB..., M... CB..., V... AI..., G... N..., AW... CM..., BL... AY..., AU... E..., BH... E..., BS... BV..., AG... CQ..., BM... CC..., AL... BR..., D... CO..., T... CT..., Z... CT..., X... CT..., BO... CN..., T... CA..., AP... AJ..., BU... AJ..., CK... AM... , U... AM..., AP... AQ..., BA... AQ..., BE... AQ..., AF... AQ..., J... CR..., BG... CR..., AE... CR..., AD... Y..., R... BF..., CJ... AR..., U... BK..., AK... O... et AT... BB... sont admises. Article 2 : Les interventions de M. W... CF..., et de Mmes CV... AA... BX..., BJ... BQ..., CD... B... et BW... B... ne sont pas admises. Article 3 : La requête de M. BK... et de l'association Générations Harkis est rejetée. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. BK..., à l'association Générations Harkis, à la ministre des armées et à M. CE... AI..., premier intervenant dénommé. Copie en sera adressée au Premier ministre. Les intervenants n'étant pas représentés par le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pourront prendre connaissance de la présente décision sur le site internet du Conseil d'Etat. ECLI:FR:CECHR:2019:426799.20191004
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 17/10/2019, 17BX02247, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu et de contribution sociale auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2012. Par un jugement n° 1600568 du 11 mai 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 17 juillet 2017, et deux mémoires complémentaires enregistrés les 9 et 12 septembre 2019, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du11 mai 2017 ; 2°) de lui accorder la réduction d'imposition susmentionnée ; 3°) de mettre la somme de 2 500 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Elle soutient que : - les sommes qui lui ont été versées doivent s'analyser comme des rentes d'invalidité exonérées de l'impôt sur le revenu en vertu du 8° de l'article 81 du code général des impôts ; les sommes versées en 2012 par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), par VIVINTER PRÉVOYANCE et par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT), d'un montant total de 175.695 euros, ont eu pour seul objet de compenser les conséquences dommageables de l'accident de travail que celle-ci avait subi en vol ; or, l'administration lui a accordé le bénéfice de ces dispositions au titre des seules sommes versées par la CPAM ; - la somme de 65 257,03 euros versée par la société Air France constitue une indemnité de licenciement qui n'est pas imposable ; - à défaut, elle est en droit de bénéficier d'une exonération à hauteur de 50% des sommes versées par VIVINTER PRÉVOYANCE et par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) en application des dispositions du 8° de l'article 81 du code général des impôts dès lors que ces sommes ont été versées en raison des conséquences dommageables des accidents de travail dont elle a été victime ; l'administration lui a accordé le bénéfice de ces dispositions au titre des seules sommes versées par la CPAM ; - elle peut prétendre à la décharge totale des compléments en litige ; - elle peut bénéficier de la majoration d'une demi-part supplémentaire du quotient familial en application de l'article 195 du code général des impôts. Par des mémoires en défense enregistrés le 16 janvier 2018 et le 11 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés. Par ordonnance du 9 septembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au en dernier lieu au 13 septembre 2019 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code du travail ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. D... C..., - les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public, - et les observations de Me A..., représentant Mme B.... Considérant ce qui suit : 1. Mme B..., exerçait la profession d'hôtesse de l'air. Elle a été licenciée dans le courant de l'année 2012 pour inaptitude définitive imputable au service aérien. Au titre des revenus de l'année 2012, elle a déclaré une somme perçue de la société " Air France " de 43 764 euros, une somme de 197 126 euros correspondant à des prestations versées par la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et une somme de 50 605 euros versée de la Caisse de retraite des personnels navigants et de la Caisse d'assurance retraite et de santé au travail (CARSAT). L'administration a toutefois fait droit à la non-imposition des indemnités versées par la société Air France et de celles versées par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). En revanche, elle a maintenu l'imposition des sommes versées par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) et refusé à Mme B... le bénéfice d'une demi-part supplémentaire de quotient familial. Mme B... interjette appel du jugement en date du 11 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande en décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales procédant de l'imposition des indemnités de la CARSAT et consécutive au rejet de la demi-part supplémentaire de quotient familial. Sur l'étendue du litige : 2. Il résulte de ce qui précède que les indemnités versées par Air France, y compris le remboursement des charges sociales, et les prestations de la CPAM ne sont plus en litige. Sur le bien-fondé des impositions en litige : 3. En premier lieu, aux termes de l'article 81 du code général des impôts " Sont affranchis de l'impôt : / 8° Les indemnités temporaires, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les prestations et rentes viagères, servies aux victimes d'accidents du travail ou à leurs ayants droit ". Le champ d'application de cette disposition s'étend aux indemnités temporaires, prestations et rentes viagères qui ont pour seul objet la couverture des conséquences dommageables d'un accident du travail ou d'un accident de service, d'une maladie professionnelle ou d'une maladie contractée en service, et qui sont allouées en vertu d'obligations résultant de la loi ou de dispositions réglementaires prises pour l'application de la loi. 4. Il est constant que Mme B... a été admise à la retraite en raison de l'invalidité résultant d'accidents du travail. Toutefois, les prestations que lui a versées la CARSAT n'ont pas la nature d'une rente viagère servie aux victimes d'accidents du travail fixée en fonction d'un taux d'incapacité, mais d'une pension de retraite complémentaire servie au titre d'un régime complémentaire en fonction d'annuités de 8° de l'article 81 précité du code général des impôts. 5. En deuxième lieu, à supposer même qu'elle le soutienne, Mme B... ne peut pas non plus prétendre à la décharge totale des sommes en litige qui n'ont pas la nature d'indemnités de licenciement au sens de l'article 80 duodecies du code général des impôts. 6. Enfin, aux termes de l'article 195 du code général des impôts : " 1. Par dérogation aux dispositions qui précèdent, le revenu imposable des contribuables célibataires, divorcés ou veufs n'ayant pas d'enfant à leur charge, exclusive, principale ou réputée également partagée entre les parents, est divisé par 1,5 lorsque ces contribuables : / a. Vivent seuls et ont un ou plusieurs enfants majeurs ou faisant l'objet d'une imposition distincte dont ces contribuables ont supporté à titre exclusif ou principal la charge pendant au moins cinq années au cours desquelles ils vivaient seuls ; / (...) / c. Sont titulaires, soit pour une invalidité de 40 % ou au-dessus, soit à titre de veuve, d'une pension prévue par les dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre reproduisant celles des lois des 31 mars et 24 juin 1919 ; / d. Sont titulaires d'une pension d'invalidité pour accident du travail de 40 % ou au-dessus ; / d bis. Sont titulaires de la carte d'invalidité prévue à l'article L. 241-3 du code de l'action sociale et des familles ; (...). 7. Il résulte des termes même de l'article 195 précité du code général des impôts qu'il a seulement pour objet et pour effet de porter de 1 à 1,5 le quotient familial des contribuables concernés par l'une au moins des hypothèses qu'il envisage et ne prévoit nullement l'octroi de plusieurs demi-parts supplémentaires pour un contribuable répondant à plusieurs de ces hypothèses. Mme B... bénéficiait déjà de l'application d'un quotient familial de 1,5 en application des dispositions précitées au titre du a du 1 de l'article 195 du code général des impôts au cours de l'année d'imposition en litige, ne pouvait pas en bénéficier une nouvelle fois au titre des dispositions précitées du c ou du d du 1 du même article. 8. Enfin, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que les moyens relatifs aux indemnités versées par Air France, y compris le remboursement des charges sociales, et aux prestations de la CPAM sont inopérants. 9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 10. L'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions de Mme B... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. DECIDE : Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... et au ministre de l'action et des comptes publics. Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019 à laquelle siégeaient : M. Philippe Pouzoulet, président, M. Dominique Ferrari, président-assesseur, M. D... C..., premier conseiller, Lu en audience publique, le 17 octobre 2019. Le rapporteur, Stéphane C...Le président, Philippe PouzouletLe greffier, Sylvie Hayet La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. N° 17BX02247
Cours administrative d'appel
Bordeaux
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 09/10/2019, 428634
Vu la procédure suivante : Par une requête et un mémoire rectificatif, enregistrés les 5 mars et 9 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du Premier ministre rejetant la demande qu'il a présentée le 15 octobre 2018 tendant à l'abrogation du quatrième alinéa du II de l'article 3 du décret n° 2008-639 du 30 juin 2008 relatif au régime spécial de retraite du personnel de la SNCF, SNCF réseau et SNCF Mobilités ; 2°) d'enjoindre au Premier ministre d'abroger cette disposition dans un délai de trois mois ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 ; - le décret n° 2008-639 du 30 juin 2008 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, maître des requêtes, - les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de M. A... ;Considérant ce qui suit : 1. Le décret du 30 juin 2008 relatif au régime spécial de retraite du personnel de la SNCF, SNCF réseau et SNCF Mobilités définit dans son chapitre Ier les règles relatives au droit à pension. Aux termes du II de l'article 3 qui figure dans ce chapitre : " II. - Les agents ayant un enfant vivant âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 % et comptant au moins quinze années de services effectifs, qui cessent leurs fonctions volontairement, sont admis au bénéfice immédiat d'une pension proportionnelle à condition qu'ils aient, pour cet enfant, interrompu ou réduit leur activité dans les conditions définies ci-après. / Sont assimilés à l'enfant mentionné à l'alinéa précédent les enfants énumérés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° du I de l'article 16 que les intéressés ont élevés dans les conditions prévues au premier alinéa de cet article. / L'interruption d'activité prévue au premier alinéa du présent II doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois dans le cadre d'un congé pour maternité, d'un congé pour paternité, d'un congé d'adoption, d'un congé de présence parentale, d'un congé parental d'éducation, d'un congé de disponibilité pour éducation d'enfants ou, pour les personnes ayant exercé une activité salariée ou non salariée antérieurement à leur recrutement par la SNCF, SNCF Réseau ou SNCF Mobilités, dans le cadre d'une interruption de cette activité, pour un motif de même nature, autorisée ou indemnisée au titre d'une disposition législative ou réglementaire. La réduction d'activité prévue au même alinéa doit avoir une durée continue de service à temps partiel telle que la quotité effectivement non travaillée sur cette durée continue soit au moins égale à deux mois. Sont prises en compte les périodes correspondant à un service à temps partiel pour élever un enfant de moins de seize ans. Toutefois, en cas de naissances ou d'adoptions simultanées, la durée d'interruption ou de réduction d'activité prise en compte au titre de l'ensemble des enfants en cause est celle exigée pour un enfant. / Cette interruption ou cette réduction d'activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l'adoption et le dernier jour du trente-sixième mois suivant la naissance ou l'adoption. / Cependant, pour les enfants énumérés aux 2°, 3°, 4° et 5° du I de l'article 16 que l'intéressé a élevés pendant au moins neuf ans avant leur vingt et unième anniversaire, l'interruption ou la réduction d'activité doit intervenir avant cette date. / Aucune durée minimale d'interruption ou de réduction d'activité n'est exigée lorsque la naissance, l'adoption ou la prise en charge de l'enfant est intervenue alors que l'intéressé n'exerçait aucune activité professionnelle sous réserve que la période pendant laquelle il n'exerçait pas d'activité professionnelle n'ait pas donné lieu à cotisation de sa part dans un régime de retraite de base. (...) ". 2. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. 3. Il résulte des dispositions du quatrième alinéa du II de l'article 3 du décret du 30 juin 2008 cité ci-dessus que le bénéfice d'un départ anticipé à la retraite avec jouissance immédiate est subordonné à une interruption ou une réduction d'activité du parent durant les trois ans suivant la naissance de l'enfant handicapé. La différence de traitement qui résulte de ces dispositions réglementaires entre les parents d'un enfant handicapé qui ont réduit ou interrompu leur activité avant que leur enfant ait atteint l'âge de trois ans et ceux qui ont réduit ou interrompu leur activité après que leur enfant a atteint cet âge alors qu'il est encore à leur charge, ne se justifie ni par une différence de situation au regard des préjudices de carrière liées à la charge supplémentaire qu'impose l'éducation d'un enfant handicapé, que la mesure vise à compenser, ni par un motif d'intérêt général. 4. Pour les mêmes motifs, n'est pas davantage justifiée la différence de traitement qui résulte des dispositions du cinquième alinéa du II de l'article 3 du décret du 30 juin 2008 citées ci-dessus entre les parents d'un enfant handicapé qui ont réduit ou interrompu leur activité avant que leur enfant ait atteint l'âge de trois ans et les personnes qui, en qualité de conjoints de parent d'un enfant issu d'un mariage précédent, de titulaires d'une délégation de l'autorité parentale, de tuteurs ou ayant recueilli un enfant à leur foyer, ont élevé un enfant handicapé pendant au moins neuf ans avant son vingt et unième anniversaire. 5. Il suit de là que les dispositions réglementaires contestées méconnaissent le principe d'égalité en excluant du bénéfice du départ anticipé à la retraite avec jouissance immédiate les parents d'enfants handicapés ayant interrompu ou réduit leur activité après que leur enfant handicapé a atteint trois ans et alors qu'il est encore à leur charge. 6. Il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé d'abroger le quatrième alinéa du II de l'article 3 du décret du 30 juin 2008 relatif au régime spécial de retraite du personnel de la SNCF, SNCF réseau et SNCF Mobilités. Cette annulation implique nécessairement la modification des dispositions réglementaires dont l'illégalité a été constatée. Il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'ordonner cette mesure dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision. Dans les circonstances de l'espèce, il y a également lieu, en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, de prononcer contre l'Etat, à défaut pour lui de justifier de l'exécution de la présente décision dans ce délai, une astreinte de 100 euros par jour jusqu'à la date à laquelle cette décision aura reçu exécution. 7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.D E C I D E : -------------- Article 1er : La décision implicite née du silence gardé par le Premier ministre sur la demande présentée le 15 octobre 2018 par M. A... est annulée. Article 2 : Il est enjoint au Premier ministre de modifier le II de l'article 3 du décret n° 2008-639 du 30 juin 2008 afin de faire cesser les illégalités constatées dans les motifs de la présente décision dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision. Article 3 : Une astreinte de 100 euros par jour est prononcée à l'encontre de l'Etat s'il n'est pas justifié de l'exécution de la présente décision dans le délai mentionné à l'article 2 ci-dessus. Le Premier ministre communiquera à la section du rapport et des études du Conseil d'Etat copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter la présente décision. Article 4 : L'Etat versera la somme de 3 500 euros à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., au Premier ministre et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé, à la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société nationale des chemins de fer français et à la section du rapport et des études.ECLI:FR:CECHR:2019:428634.20191009
Conseil d'Etat