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CAA de MARSEILLE, 9ème chambre - formation à 3, 13/07/2017, 15MA01757, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le département de l'Hérault à indemniser le préjudice qu'elle a subi et résultant du décès de son mari du fait de la faute commise par le département. Par un jugement n° 1301536 du 27 février 2015, rectifié pour erreur matérielle par ordonnance du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le département de l'Hérault à verser à Mme C... la somme de 124 673,68 euros assortie des intérêts au taux légal et a mis les frais de l'expertise judiciaire, d'un montant de 500 euros, à la charge du département. Procédure devant la Cour : Par une requête, enregistrée le 28 avril 2015 et par deux mémoires, enregistrés les 22 août 2016 et 26 septembre 2016, le département de l'Hérault, représenté par la Selarl d'avocats Phelip et associés, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du 25 février 2015 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a retenu sa responsabilité et qu'il a mis à sa charge la somme de 124 673,68 euros en réparation du préjudice subi par Mme C... et les frais d'expertise ; 2°) à titre principal, de le mettre hors de cause, à titre subsidiaire, de rejeter la demande de Mme C..., à titre infiniment subsidiaire, de ramener l'indemnisation de la perte de revenus et du préjudice moral de la requérante à de plus justes proportions ; 3°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens. Il soutient que : - dès lors que la victime était liée par un contrat de travail à l'office national des forêts (ONF), établissement public industriel et commercial, seul le juge judiciaire est compétent pour connaître de la responsabilité de l'ONF du fait du décès, à raison de son exposition sans protection aux poussières de bois, d'un forestier-sapeur mis à sa disposition en application de la convention du 27 novembre 1985 renouvelée le 22 avril 1997 ; - en tout état de cause, la responsabilité du département ne peut être engagée ; - la reconnaissance comme maladie professionnelle du cancer de M. C... n'implique pas nécessairement que la maladie résulte d'un défaut de protection par l'employeur ; - la Cour écartera le rapport incomplet daté du 8 novembre 2011 de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ; - la victime était prioritairement affectée à la défense contre les feux de forêts ; - les fonctions de débroussaillage exercées accessoirement à l'extérieur et accomplies sur un tracteur équipé d'une cabine ne l'exposaient pas à la poussière de bois ; - le département respecte les normes d'exposition des travailleurs aux poussières de bois ; - en tant qu'employeur, il met à la disposition de ses agents les équipements de protection nécessaires en application de l'article L. 4121-1 du code du travail ; - un contrôle médical renforcé n'était pas justifié en l'espèce ; - le tabagisme chronique de M. C... est de nature à exonérer le département de sa responsabilité ; - l'indemnisation du préjudice économique sera ramené à la somme totale de 32 112,36 euros ; - la réparation du préjudice moral de la requérante sera ramené à une somme comprise entre 12 500 euros et 20 000 euros. Par deux mémoires, enregistrés les 27 juillet 2016 et 19 septembre 2016, Mme C... conclut au rejet de la requête, et, par la voie de l'appel incident, à ce que les frais de transport restés à sa charge soient indemnisés par l'allocation de la somme de 2 054,40 euros, à ce que son préjudice lié à la douleur d'avoir vu son mari se dégrader soit réparé par la somme de 30 000 euros, à ce que son préjudice moral d'accompagnement soit réparé par la somme de 36 300 euros, à ce que son préjudice lié à la perte d'un être cher soit réparé par la somme de 50 000 euros et à ce que ses troubles dans les conditions d'existence soient réparés par celle de 30 000 euros, assortis des intérêts capitalisés, et en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge du département de l'Hérault la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens. Elle soutient que : - la requête du département est irrecevable dès lors que le président du conseil départemental ne produit pas la délibération l'autorisant à relever appel dans la présente instance ; - elle n'est pas motivée en méconnaissance des articles R. 411-1 et R. 811-13 du code de justice administrative ; - les conclusions du département présentées pour la première fois en appel tendant à sa mise hors de cause sont irrecevables ; - en tout état de cause, les conventions de 1985 mentionnent que le département reste l'employeur du sapeur-forestier, agent départemental territorial départemental et tiers à ces conventions ; - le département n'a pas appelé en garantie l'ONF ; - les fonctions de la victime l'exposaient à la poussière de bois ; - sa maladie a été reconnue en maladie professionnelle ; - le département ne peut pas soulever pour la première fois en appel l'irrégularité des opérations d'expertise ; - les conditions de travail du défunt sont en lien direct et certain avec son décès ; - les équipements mis à disposition étaient en nombre insuffisant et n'assuraient pas une protection suffisante ; - l'employeur n'a informé qu'en 2009 ses agents du risque d'exposition aux poussières de bois ; - son mari n'a pas bénéficié d'un suivi médical spécifique ; - le département a commis une faute du fait de sa carence dans la prévention des risques pour la santé de ses agents de nature à engager sa responsabilité ; - sa responsabilité sans faute est aussi engagée ; - la consommation tabagique n'est pas de nature à favoriser le cancer des sinus dont était atteint la victime ; - elle établit la réalité des frais de déplacement restés à sa charge ; - elle a subi un préjudice d'accompagnement et des troubles dans les conditions d'existence indiscutables. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la directive 1999/38/CE du Conseil du 29 avril 1999 ; - la directive 2004/37/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ; - la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ; - le décret n° 2003-1254 du 23 décembre 2003 ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Carassic, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public ; - et les observations de Me B... représentant Mme C.... 1. Considérant que M. C... a été recruté en 1979 en tant qu'agent contractuel par le département de l'Hérault en qualité de forestier-sapeur et a été titularisé, par arrêté du 3 novembre 1986, en tant qu'adjoint technique principal par le département ; qu'après plusieurs arrêts de travail à partir de fin mars 2008, une biopsie a révélé un adénocarcinome ethmoïdal (cancer rhino-sinusien) pour lequel l'intéressé a été opéré en novembre 2008 ; que, par arrêté du 29 mai 2009 du président du conseil général de l'Hérault, sa maladie a été reconnue en maladie professionnelle eu égard à son exposition aux poussières de bois inhalées par le nez pendant l'exercice de son activité professionnelle à compter du 18 octobre 2008, conformément à l'avis de la commission de réforme du 15 mai 2009 ; qu'après avis de la commission de réforme du 22 janvier 2010 favorable à l'attribution d'un congé longue durée (CLD) imputable au service pour trois ans à renouveler jusqu'à sa mise en retraite pour invalidité, le président du conseil général de l'Hérault, par décision du 15 février 2010, a décidé de suivre cet avis et de prendre en charge les arrêts de travail ainsi que les frais médicaux au titre de la législation relative aux accidents de service ; qu'estimant que la responsabilité du département était engagée pour carence dans la prévention des risques liés à l'exposition de poussières de bois, M. C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'ordonner une expertise à fins de déterminer les préjudices subis en lien avec sa maladie professionnelle ; que l'expert, désigné par ordonnance du 29 mars 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, a remis son pré- rapport le 1er août 2011, et son rapport le 2 novembre 2011 sans pouvoir mener à terme sa mission eu égard au décès de M. C..., survenu le 1er août 2011, des suites de son cancer ; que Mme veuve C...a formé une demande préalable indemnitaire notifiée le 14 août 2012 au département, restée sans réponse ; qu'elle a demandé au tribunal administratif de Montpellier réparation des préjudices résultant de la maladie et du décès de son époux ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné le département de l'Hérault à verser à Mme C... la somme de 124 673,68 euros assortie des intérêts en réparation de ses préjudices, a mis les frais d'expertise d'un montant de 500 euros à la charge du département et a rejeté le surplus des conclusions de Mme C... ; que le département de l'Hérault relève appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé ces condamnations à son encontre ; que Mme C... demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation de ce jugement en tant qu'il a limité son indemnisation à la somme de 124 673,68 euros ; Sur les fins de non recevoir opposées par Mme C... à la requête d'appel du département : 2. Considérant, en premier lieu, que le représentant d'une personne morale partie à une instance devant le juge administratif doit, à peine d'irrecevabilité, justifier de sa qualité pour agir ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 3221-10-1 du code général des collectivités territoriales, le président du conseil départemental intente des actions en justice au nom du département en vertu d'une délibération du conseil départemental ou d'une délégation générale de celui-ci dans les cas qu'il définit ; que le département de l'Hérault, en réponse à une invitation à régulariser de la Cour, a produit la délibération AD/170415/H/2 du 17 avril 2015 par laquelle le conseil départemental de l'Hérault a donné délégation au président du conseil départemental pour notamment intenter au nom du conseil départemental les actions en justice devant les juridictions administratives ; que, par suite, le président du conseil départemental justifie de sa qualité pour agir, au nom du département de l'Hérault, à l'encontre du jugement attaqué du 27 février 2015 ; 3. Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme C..., la requête d'appel du département de l'Hérault comporte, notamment, une contestation du jugement quant à l'engagement de sa responsabilité ; que, par suite, elle est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative qui dispose que " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours " ; 4. Considérant, en troisième lieu, que la détermination de la personne publique responsable d'un dommage relève du champ d'application de la loi et peut être invoquée à tout moment de l'instance contentieuse ; que, par suite, les conclusions du département de l'Hérault tendant pour la première fois en appel à sa mise hors de cause au motif que seule la responsabilité de l'office national des forêts serait susceptible d'être engagée ne sont pas irrecevables, contrairement à ce que soutient Mme C... ; 5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non recevoir opposées à la requête par Mme C... doivent être écartées ; Sur la fin de non recevoir opposée par le département à la demande de première instance et sur l'exception d'incompétence du juge administratif : 6. Considérant, d'une part, que dès lors que la demande de Mme C... est dirigée contre le département de l'Hérault en sa qualité d'employeur public de M. C..., le juge administratif est seul compétent pour connaître de cette action contentieuse ; que, par suite, l'exception d'incompétence soulevée par le département doit être écartée ; 7. Considérant, d'autre part, que le département soutient que cette demande est mal dirigée au motif que seule la responsabilité de l'ONF, établissement public et commercial, peut être recherchée dans le présent litige à l'exclusion de celle du département et que la juridiction administrative n'est ainsi pas compétente pour connaître du présent litige ; que la circonstance que les forestiers sapeurs, agents de la fonction publique territoriale, ont été mis à la disposition de l'ONF par la convention du 27 novembre 1985, signée entre l'Etat, l'O.N.F. et le département de l'Hérault et renouvelée le 22 avril 1997, relative à l'emploi des forestiers sapeurs dans ce département n'a pu avoir pour conséquence, contrairement à ce que soutient le département, de soumettre les forestiers sapeurs à l'ONF par le biais d'un contrat de travail ; que M. C... est tiers à cette convention qui ne lui est, par suite, pas opposable ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. C..., recruté par contrat du 20 décembre 1984 par le département de l'Hérault a été titularisé par arrêté du 3 novembre 1986 dans son grade de forestier-sapeur assimilé à ouvrier professionnel de 1ère catégorie ; que le département de l'Hérault, qui rémunérait et exerçait son pouvoir disciplinaire sur cet agent, était son employeur, chargé en cette qualité d'assurer la sécurité et la protection de la santé des travailleurs placés sous son autorité ; que, par suite, le département de l'Hérault n'est pas fondé à demander sa mise hors de cause et la présente requête de Mme C... tendant à la réparation pour faute d'un dommage corporel subi par un fonctionnaire territorial relève du juge administratif ; Sur la responsabilité pour faute du département : 8. Considérant qu'en vertu des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les fonctionnaires civils de l'Etat qui se trouvent dans l'incapacité permanente de continuer leurs fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service peuvent être radiés des cadres par anticipation et ont droit au versement d'une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services ; que les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales prévoient, conformément aux prescriptions du II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, des règles comparables au profit des agents tributaires de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ; 9. Considérant que ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'elles ne font cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci ; En ce qui concerne la faute du département : 10. Considérant que les premiers juges ont retenu la faute du département au motif que les conditions de travail de M. C... l'ont exposé sans protection aux poussières de bois et que l'administration n'a pas mis en place un suivi médical particulier pour cet agent malgré cette exposition qui a donné lieu après 25 ans de service à l'apparition d'un adénocarcinome de l'ethmoïde dont l'époux de la requérante est décédé ; 11. Considérant que la pathologie de l'adénocarcinome ethmoïdal ou cancer rhino-sinusien figure au tableau 36 du régime agricole des maladies professionnelles depuis un décret du 15 janvier 1976 ; que, pour établir avoir pris les mesures nécessaires pour préserver ses agents des conséquences sur leur santé de l'exposition aux poussières de bois, le département soutient qu'il leur a fourni des casques de protection intégrale individuel avec écran facial et lunettes-masque, dont il ne conteste pas qu'ils protègent les forestiers-sapeurs contre les projections de débris mais nullement contre les poussières de bois, des masques de protection jetables dont il n'est pas établi que, même commandés en nombre suffisant, ils aient été effectivement mis à disposition de M. C... ; que si le département fait valoir qu'il a créé depuis 1995 un poste de coordinateur en matière de sécurité et de protection, qui a mené de nombreuses actions de sensibilisation sur la nécessité du port de protection individuelle en matière de sécurité contre l'incendie, il ressort des pièces du dossier que ce n'est qu'en novembre 2009 qu'une information a été portée à la connaissance des forestiers-sapeurs sur la nécessité de porter un masque anti-poussière de bois et sur la nocivité de ces poussières, alors que les normes d'exposition des travailleurs aux poussières de bois ont été fixées dès la directive 1999/38/CE du Conseil du 29 avril 1999 codifiée par la directive 2004/37/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 et que le décret n° 2003-1254 du 23 décembre 2003 a fixé à partir du 1er juillet 2005 la valeur limite d'exposition à 1mg/m3 de poussières de bois durs et tendres ; qu'en outre, M. C... n'a pas fait l'objet, en dehors d'un suivi médical annuel " classique " d'un suivi médical particulier complémentaire, qui aurait permis de diagnostiquer plus tôt ce cancer rhino-sinusien qui est insidieux ; que, dans ces conditions, le département de l'Hérault n'établit pas qu'il a rempli son obligation générale d'employeur d'assurer la sécurité et la protection de la santé des travailleurs placés sous son autorité et a commis une négligence fautive de nature à engager sa responsabilité ; En ce qui concerne le lien de causalité : 12. Considérant, d'une part, qu'il résulte de la littérature médicale produite par Mme C... et notamment une thèse pour le diplôme d'Etat de docteur en médecine en oto-rhino-laryngologie de l'année 2002 que l'adénocarcinome de l'ethmoïde touche essentiellement des hommes travaillant le bois, d'une moyenne d'âge de 62,8 ans, qui ont connu une exposition aux poussières de bois pendant 31,5 ans en moyenne ; que le pré-rapport du 1er août 2011 de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif, qui peut être pris en compte par la Cour à titre d'élément d'information malgré le décès de M. C... survenu avant le dépôt du rapport définitif, mentionne un certificat médical établi le 18 octobre 2008 du médecin traitant de M. C... pour adénocarcinome de l'ethmoïde "en rapport avec un contact repéré avec de la sciure de bois", ainsi qu'un certificat médical daté du 16 octobre 2008 du Pr Crampette, ORL de l'hôpital Gui de Chaulliac dépendant du centre hospitalier universitaire de Montpellier, qui affirme qu'il ne peut être exclu que l'exposition de M. C..., qui est amené de par ses fonctions de sapeur-forestier à travailler dans la poussière de bois depuis une trentaine d'années, soit à l'origine de sa maladie et un certificat médical daté du 6 janvier 2009 du médecin du centre Val d'Aurelle qui indique que le cancer de ce patient, garde-forestier, pourrait "s'intégrer dans le cadre des maladies professionnelles" ; que l'expert conclut d'ailleurs à la reconnaissance en maladie professionnelle régime agricole tableau n° 36 C, ce que le département a d'ailleurs accepté par arrêté du 29 mai 2009 ; que le courrier du 20 octobre 2015 du professeur Crampette affirme que 100 % des adénocarcinomes de l'ethmoïde ont pour cause l'exposition à la poussière de bois et que donc "le caractère fortuit de ce carcinome est médicalement infondé" ; que le département, qui ne produit aucune littérature médicale en ce sens, n'est ainsi pas fondé à soutenir que ce type de pathologie ne résulterait pas nécessairement d'une exposition aux poussières de bois et pourrait résulter d'un " cas fortuit " ; 13. Considérant que, d'autre part, il résulte de l'instruction, et notamment de la fiche de poste de M. C... actualisée au 9 juillet 2008, que ce forestier-sapeur avait comme activité, pendant les 9 mois de l'année où il ne participait pas à la défense des forêts contre l'incendie, dans le cadre de sa mission de préservation et d'entretien du patrimoine forestier, d'effectuer des travaux de débroussaillage des bords des pistes de défense contre l'incendie et de créer et d'entretenir des ouvrages coupe feu à l'aide soit d'engins mécaniques dénommés " épareuse " soit manuellement avec une tronçonneuse ; que M. C... avait aussi pour tâche de broyer des débris de bois et de broussailles, ce qui génère une poussière de bois très importante ; qu'à supposer même que cet agent ait utilisé la plupart du temps une épareuse pour débroussailler les pistes de défense contre l'incendie, le département n'établit pas que la cabine de cet engin, qui n'était pas équipée d'un système d'aspiration, était bien isolée et qu'une forte densité de poussière de bois ne s'y concentrait pas, ce qui peut aboutir aux mêmes conditions d'exposition qu'un travail en atelier, alors même que M. C... travaillait en extérieur ; que, par suite, le département n'est pas fondé à soutenir que M. C... n'était pas exposé à la poussière de bois pendant son travail ; 14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C... est décédé des seules suites de ce cancer ; que le professeur Crampette, dans son courrier du 20 octobre 2015, affirme qu'un tel type d'adénocarcinome est toujours en relation avec la poussière de bois " qu'il y ait ou non tabagisme associé" ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le tabagisme de M. C... aurait joué un rôle dans la survenance et la progression de ce cancer et que la responsabilité du département pourrait être exonérée pour ce motif ; que le lien de causalité entre la faute du département et le préjudice subi est ainsi établi ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la responsabilité sans faute de l'administration, le département n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que sa responsabilité pour faute était engagée du fait des conséquences dommageables du décès de M. C... ; Sur le préjudice : En ce qui concerne la perte de revenus : 15. Considérant qu'en se bornant à soutenir que Mme C... serait susceptible de reprendre un emploi et de percevoir l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), le département n'établit pas que les premiers juges n'auraient pas pris en compte, comme ils le devaient, les revenus réellement perçus par la victime indirecte pour estimer sa perte de revenus ; que les conclusions du département tendant à ce que la réparation de ce chef de préjudice soit minorée à la somme de 32 123,36 euros doivent, par suite, être rejetées ; En ce qui concerne les frais de transport : 16. Considérant qu'en se bornant à soutenir, par la voie de l'appel incident, que l'ensemble des frais de transport qu'elle a dû engager pour conduire son époux à ses rendez- vous médicaux, pour la période du 16 avril 2010 au 23 mai 2011, n'auraient pas été remboursés par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, sans apporter d'autres précisions, Mme C... n'établit pas que les premiers juges auraient à tort rejeté la réparation de ce chef de préjudice ; En ce qui concerne le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence : 17. Considérant que les premiers juges n'ont fait une estimation ni excessive ni insuffisante de ce chef de préjudice en allouant à Mme C... la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, y compris au titre du préjudice d'affection ; 18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le département de l'Hérault n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont fait une évaluation excessive des préjudices subis par Mme C... en lui allouant la somme totale de 124 673,68 euros assortie des intérêts au taux légal ; que Mme C... n'est pas fondée, par la voie de l'appel incident, à demander une augmentation du montant de la réparation qui lui a été allouée ; Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts 19. Considérant que les premiers juges ont assorti la somme de 124 673,68 euros des intérêts au taux légal à compter du 14 août 2012 date de la réception par le département de l'Hérault de la réclamation préalable indemnitaire de Mme C... ; que Mme C... a demandé la capitalisation de ces intérêts dans son mémoire enregistré le 27 juillet 2016 au greffe de la Cour ; qu'à cette date, au moins une année d'intérêts était due ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 27 juillet 2016, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; Sur les dépens : 20. Considérant qu'il n'y a pas lieu de revenir sur la charge des frais d'expertise telle que dévolue par les premiers juges ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 21. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdant pour l'essentiel dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais engagés par le département de l'Hérault et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département la somme de 2 000 euros à verser à Mme C... au titre des dispositions de cet article ; D É C I D E : Article 1er : Les intérêts de la somme de 124 673,68 euros que le département de l'Hérault a été condamné à payer à Mme C... par l'article 1er du jugement du 27 février 2015 du tribunal administratif de Montpellier, échus à la date du 27 juillet 2016, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts. Article 2 : Le jugement du 27 février 2015 du tribunal administratif de Montpellier est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt. Article 3 : La requête du département de l'Hérault est rejetée. Article 4 : Les conclusions incidentes de Mme C... sont rejetées. Article 5 : Le département de l'Hérault versera la somme de 2 000 euros à Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au département de l'Hérault, à Mme A... C...et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault. Délibéré après l'audience du 3 juillet 2017, où siégeaient : - Mme Buccafurri, présidente, - M. Portail, président-assesseur, - Mme Carassic, première conseillère. Lu en audience publique, le 13 juillet 2017. 10 N° 15MA01757
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de BORDEAUX, , 20/07/2017, 17BX01260, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. C...E...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Etat à lui verser une provision de 65 473 euros à valoir sur la réparation du préjudice subi du fait des fautes commises par le préfet de la Haute-Garonne dans l'examen de sa demande de titre de séjour du 14 janvier 2014 et de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Par une ordonnance n° 1700896 du 31 mars 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à M. E...une provision de 1 500 euros et à MeA..., son avocat, une somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 19 avril 2017, M.E..., représenté par MeA..., demande à la cour : 1°) de réformer l'ordonnance du 31 mars 2017 ; 2°) de condamner l'Etat à lui verser une provision de 30 473 euros en réparation de son préjudice financier, une provision de 15 000 euros en réparation du trouble subi dans ses conditions d'existence et une provision de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ou au titre du seul article L. 761-1 du code de justice administrative s'il n'était pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Il soutient que : - l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 16 février 2015 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français a été annulé par le tribunal administratif pour erreur manifeste d'appréciation ; cette décision est fautive et engage donc la responsabilité de l'Etat ; l'administration l'a illégalement maintenu dans une situation de grande précarité jusqu'au 29 juillet 2016, date de délivrance d'un titre de séjour ; compte tenu du retard pris par l'administration, il a été obligé de solliciter peu après un nouveau rendez-vous pour obtenir le renouvellement de ce titre de séjour ; l'administration n'a pas respecté le délai fixé par le tribunal pour la délivrance du titre et l'a maintenu pendant plus d'un an sous autorisation provisoire de séjour de très courte durée sans autorisation de travail ; la chose jugée a donc été méconnue ; - c'est à tort que le premier juge a limité sa période d'indemnisation à la période du 16 février 2015 au 29 juillet 2016 ; peu importe à cet égard que le jugement d'annulation n'ait pas sanctionné une durée anormale d'instruction de la demande ; il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir contesté une décision implicite de refus de remise d'un récépissé de demande de carte de séjour ; ayant demandé une admission exceptionnelle au séjour, il n'était pas éligible à la délivrance d'un récépissé ; même dans le cas contraire, le juge aurait dû lui reconnaître un droit à indemnisation du fait de la faute de l'administration à ne pas lui avoir délivré un récépissé ; est également indifférente pour son droit à indemnisation la circonstance qu'il ne se trouvait pas dans un cas de délivrance de plein droit d'un titre de séjour ; c'est à compter du 14 janvier 2014, date de sa demande, qu'il doit être regardé comme ayant été illégalement privé de son droit au séjour ; - c'est son séjour irrégulier qui l'a privé du droit à bénéficier d'une indemnisation au titre du chômage dès lors que sa situation administrative faisait obstacle à ce qu'il s'inscrive à Pôle emploi ; il a d'ailleurs fait une demande en vue de son inscription mais Pôle emploi lui a opposé un refus ; si Pôle emploi a rejeté sa demande le 10 août 2016 c'est parce qu'il ne se trouvait plus en situation de perte d'emploi, la fin de son engagement dans l'armée française remontant à près de trois années ; en tenant compte des salaires perçus et des méthodes de calcul des conventions d'assurance chômage, ses droits à indemnisation au titre du chômage s'établissent à 23 068 euros pour deux années ; - dès lors qu'il était en situation irrégulière, il était exclu de l'accès aux propositions d'embauche ; il ne peut donc lui être fait grief de ne pas justifier de telles propositions ; quelques mois après l'obtention de son titre de séjour, il a signé un contrat à durée indéterminée ; depuis le 16 janvier 2017, il est coursier au sein de l'entreprise Alternmobil ; il a été pour le moins privé d'une chance réelle et sérieuse d'occuper un emploi, du fait des fautes de l'administration ; il peut à ce titre prétendre au moins à une somme correspondant au Smic entre le 14 janvier et le 29 juillet 2016, soit 7 405 euros ; - il a été placé, du fait des fautes de l'administration, dans une situation précaire et anxiogène et justifie donc avoir subi des troubles dans ses conditions d'existence ; il a dû vivre chez sa grand-mère sans pouvoir l'aider financièrement ni participer aux charges quotidiennes pendant trente mois ; ce préjudice justifie une indemnisation à hauteur de 15 000 euros ; il a également subi un préjudice moral lié à cette précarité et à l'absence de reconnaissance de son engagement pour la France, ce qui justifie une indemnisation à hauteur de 20 000 euros. Par un mémoire enregistré le 19 mai 2017, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - concernant la période indemnisable, le requérant n'apporte aucun élément valable à l'appui de ses dires ; - le requérant ne démontre pas avoir perdu des droits à indemnisation au titre du chômage dès lors qu'il n'établit pas avoir présenté une demande d'indemnisation chômage ni avoir perçu antérieurement une indemnisation à ce titre ; le rejet qui a été opposé à sa demande du 30 juillet 2016 n'a pas de lien avec un éventuel défaut de possession de titre de séjour ; il ne conteste pas n'avoir jamais déposé l'attestation employeur qui lui avait été remise le 10 décembre 2013 par le ministère de la défense ; il est attesté par Pôle emploi que l'intéressé ne s'est pas inscrit en tant que demandeur d'emploi et n'a pas demandé l'aide au retour à l'emploi avant 2016 ; le requérant n'apporte aucun élément infirmant les observations de Pôle emploi ; - au vu des motifs développés en appel et des motifs développés en première instance, la requête de M. E...doit être rejetée. Par décision du 14 juin 2017, M. E...n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - le code du travail ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative. Le président de la cour a désigné Mme D...B...en qualité de juge des référés et de tout recours présenté sur le fondement des dispositions du livre V du code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". 2. Il résulte des dispositions précitées que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir 1'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui paraît revêtir un caractère de certitude suffisant. 3. M.E..., né le 26 janvier 1988, de nationalité russe, est entré en France le 4 juillet 2009 sous couvert d'un visa de court séjour et a signé, le 9 juillet suivant, un contrat d'engagement dans la Légion étrangère pour une durée de cinq ans. Il a toutefois été réformé pour raisons médicales avant le terme normal de ce contrat, le 15 décembre 2013. Il a présenté, le 14 janvier 2014, une demande de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale qui a été rejetée par un arrêté du préfet de la Haute-Garonne en date du 16 février 2015, annulé par jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 juillet 2015, au motif que cet arrêté était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard de son engagement militaire et de ses attaches familiales en France où vit sa grand-mère qui l'a en partie élevé. Par ce jugement, le tribunal a également enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois suivant sa notification. Un titre de séjour lui a été délivré le 29 juillet 2016. Estimant avoir subi un préjudice du fait du retard dans l'instruction de sa demande de titre de séjour, de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé et du retard dans l'exécution du jugement du 7 juillet 2015, M. E...a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une provision de 65 473 euros à valoir sur la réparation du préjudice subi du fait des fautes commises par le préfet de la Haute-Garonne dans l'examen de sa demande de titre de séjour du 14 janvier 2014. Il fait appel de l'ordonnance du 31 mars 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à lui verser une provision limitée à 1 500 euros. 4. Le premier juge a admis que M. E...justifiait de façon suffisamment certaine d'un lien entre ses préjudices et les fautes commises par les services de l'Etat du fait de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour du 16 février 2015 et du fait du retard du préfet à exécuter le jugement du 7 juillet 2015. Il a, en revanche, estimé que le requérant ne pouvait pas prétendre à une indemnisation pour la période antérieure au 16 février 2015 dès lors qu'il ne pouvait prétendre à un titre de séjour de plein droit, qu'il n'avait pas été mis en possession d'un récépissé de demande de titre de séjour à la suite du dépôt de sa demande le 14 janvier 2014, qu'il n'avait d'ailleurs pas contesté le refus implicite de titre de séjour qui lui avait été opposé ni l'absence de délivrance d'un récépissé et que le jugement du 7 juillet 2015 ne sanctionnait pas une durée anormale d'instruction de sa demande. Comme le soutient le requérant, ces circonstances ne font pas, par elles-mêmes, obstacle à ce qu'un retard anormal d'instruction ou une illégalité du refus implicite de titre de séjour soient constatés et donnent lieu à indemnisation des préjudices nés, le cas échéant, de ce retard ou de cette illégalité. S'agissant du retard dans l'instruction de la demande de M.E..., il ne résulte d'aucun élément de l'instruction qu'il présenterait un caractère anormal jusqu'au 15 mai 2014, date à laquelle un refus implicite est né en application de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable. Après cette date, en l'absence de contestation du requérant de ce refus implicite, il ne peut être estimé que l'administration a commis une faute en tardant à reprendre d'instruction du dossier de M.E.... Le requérant fait en revanche valoir sans être contredit que dès la date de sa demande, il remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour au regard de sa situation telle qu'elle a été constatée par le tribunal administratif dans le jugement du 7 juillet 2015. En l'absence de tout élément permettant de douter sérieusement des dires du requérant sur ce point, la décision implicite de rejet opposée le 15 mai 2014 à sa demande doit être regardée comme entachée de la même illégalité que le refus qui lui a été explicitement opposé le 16 février 2015. Cette illégalité fautive est de nature à engager la responsabilité de l'Etat. La période au titre de laquelle M. E... peut prétendre avec une certitude suffisante à une indemnisation de ses préjudices en lien direct avec les fautes commises par les services de l'Etat court donc du 15 mai 2014 au 29 juillet 2016, date à laquelle lui a été effectivement remis un titre de séjour valable du 24 septembre 2014 et 23 septembre 2016. Il peut, en outre, comme il le soutient, prétendre à l'indemnisation du préjudice lié à l'obligation dans laquelle il s'est trouvé, du fait du retard de l'administration à exécuter le jugement du 7 juillet 2015, de devoir engager des démarches de renouvellement de son titre de séjour aussitôt après sa délivrance. 5. M. E...soutient qu'il a été privé, du fait des fautes commises par les services de l'Etat, du droit à deux années d'indemnisation au titre du chômage puis, à l'issue de cette période de deux ans, d'une chance sérieuse d'occuper un emploi rémunéré. Toutefois, il ne produit aucun élément permettant d'admettre avec un caractère de certitude suffisant que la fin de son engagement auprès de l'armée française pour raisons de santé, qui lui a ouvert un droit à pension militaire d'invalidité à compter du 15 décembre 2013, aurait pu donner lieu à indemnisation au titre du chômage s'il avait été mis en possession d'un titre de séjour en temps utile. Il ne justifie d'ailleurs pas avoir engagé des démarches en vue d'obtenir une telle indemnisation. Par ailleurs, s'il a conclu un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de coursier dès le 16 janvier 2017, soit six mois après avoir été mis en possession d'un titre de séjour l'autorisant à travailler, cette seule circonstance ne suffit pas à attester de façon suffisamment certaine qu'il aurait eu une chance sérieuse d'occuper un emploi rémunéré dès le 14 janvier 2016 comme il le soutient, si un titre de séjour lui avait été délivré plus tôt. Il n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a rejeté ses conclusions sur ces points. 6. Ainsi que l'a constaté le juge des référés du tribunal administratif, M. E...est toujours hébergé chez sa grand-mère alors qu'il a obtenu la délivrance d'un titre de séjour. La circonstance qu'il a dû recourir à un hébergement chez sa grand-mère durant la période pendant laquelle il a été illégalement privé d'un titre de séjour ne peut, dans ces conditions, être regardée comme la conséquence directe des fautes commises par l'Etat. En l'absence de certitude suffisante sur les droits et chances sérieuses qu'aurait perdus le requérant, du fait des fautes commises par les services de l'Etat, d'obtenir une indemnisation au titre du chômage et un emploi rémunéré, il ne peut invoquer un préjudice lié à l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de participer financièrement aux charges du foyer. Le requérant ne justifie donc pas d'une obligation non sérieusement contestable de l'Etat relative à l'indemnisation de troubles dans ses conditions d'existence à ce titre. Il peut, en revanche, prétendre à une indemnisation du fait des troubles dans ses conditions d'existence résultant de l'obligation dans laquelle il s'est trouvé, du fait du retard de l'administration à exécuter le jugement du 7 juillet 2015, de devoir engager des démarches en vue du renouvellement de son titre de séjour, expirant le 23 septembre 2016, aussitôt après sa délivrance, le 29 juillet 2016. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en mettant à la charge de l'Etat une provision de 100 euros. 7. M. E...peut être regardé comme ayant subi, du fait de l'illégalité fautive des refus de titre de séjour qui lui ont été opposés, un préjudice moral lié à la précarité de sa situation et, comme l'a admis le premier juge, à son ressenti quant à l'absence de reconnaissance par l'Etat français des sacrifices consentis au cours de son engagement sous les drapeaux durant lequel il a risqué sa vie et a été décoré. Dans ces circonstances, et compte tenu de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus quant à la période durant laquelle la situation précaire de M. E...peut être, sans contestation sérieuse, être regardée comme directement liée aux illégalités commises, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi en portant à 4 000 euros la provision qui devra lui être versée par l'Etat à ce titre. 8. Il résulte de ce qui précède que M. E...est fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser une provision d'un montant de 4 100 euros et la réformation dans cette mesure de l'ordonnance du 31 mars 2017. Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 9. M. E...n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Son avocat ne peut, par suite, demander l'application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, comme le demande subsidiairement le requérant, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. E...d'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens. Sur l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : 10. Le requérant ne justifie pas avoir supporté la charge de dépens au titre de la présente instance. Ses conclusions sur ce point ne peuvent, par suite, qu'être rejetées. ORDONNE : Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. E...une provision de 4 100 euros. Article 2 : L'ordonnance du 31 mars 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est réformée en ce qu'elle a de contraire à la présente ordonnance. Article 3 : L'Etat versera à M. E...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. E...est rejeté. Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C...E...et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne. Fait à Bordeaux, le 20 juillet 2017. Le juge des référés, Elisabeth B... La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance. Pour expédition certifiée conforme. Le greffier, Vanessa Beuzelin 2 No 17BX01260
Cours administrative d'appel
Bordeaux
CAA de MARSEILLE, 9ème chambre - formation à 3, 26/09/2017, 16MA01383, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. A... E...D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier : - d'annuler la décision du 7 avril 2014 par laquelle la directrice des ressources humaines de la direction opérationnelle de la paye et du personnel de La Poste a rejeté sa demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle ; - d'enjoindre à La Poste, d'une part, de requalifier les congés pour maladie dont il avait bénéficié en régularisant les traitements, primes et frais engagés en raison de cette maladie et, d'autre part, de déterminer le montant de l'allocation temporaire d'invalidité due. Par un jugement n° 1402770 du 5 février 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, respectivement enregistrés le 7 avril 2016 et le 12 mai 2017, M. D..., représenté par la SELARL Cabinet Antoine Solans, demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 février 2016 ; 2°) d'annuler la décision du 7 avril 2014 portant refus de reconnaissance d'une maladie professionnelle ; 3°) d'enjoindre à La Poste de le faire bénéficier de son plein traitement et du remboursement des frais et honoraires médicaux directement liés à sa pathologie ; 4°) de condamner La Poste à la réparation forfaitaire des dommages corporels subis et la réparation du préjudice moral ; 5°) de condamner La Poste à réparer le non-respect par cet établissement de ses obligations en matière de protection et sécurité de ses employés, en désignant un expert afin de fixer les préjudices subis notamment au titre de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ; 6°) de lui accorder une provision de 5 000 euros à valoir sur le montant à lui accorder en réparation des préjudices subis. Il soutient que : - sa requête est recevable ; - la signataire de la décision en litige n'était pas régulièrement habilitée ; - le médecin agréé n'a pu émettre un avis pertinent dès lors qu'il n'avait en sa possession aucune description des activités qu'il exerçait ; - l'avis rendu par le médecin du travail est contestable dès lors que ce médecin n'a jamais procédé à une analyse des risques professionnels encourus dans le service où il travaillait ; - l'avis de la commission de réforme n'a pas été communiqué en même temps que la décision en litige ; - cet avis est nul dès lors que Mme B... n'avait aucun mandat pour représenter La Poste ; - il est irrégulier dès lors qu'un médecin spécialiste a pris part à la délibération en méconnaissance de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 ; - l'absence d'un médecin, spécialiste de son affection, l'a privé d'une garantie ; - le courrier qui lui a été adressé ne l'informait pas qu'il pouvait se faire entendre par la commission de réforme et ce vice l'a privé d'une garantie ; - la décision du 7 avril 2014 est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, qui n'a pas respecté, en outre, l'instruction de La Poste du 23 septembre 1999 ; - comme il remplit les critères exigés par le tableau 57 des maladies professionnelles, sa maladie est présumée d'origine professionnelle ; - le principe du contradictoire n'a pas été respecté, La Poste ne l'ayant pas informé qu'il devait prouver le lien de causalité entre son affection et l'exercice de ses fonctions ; - il est victime d'une inversion de la charge de la preuve ; - La Poste a manqué à l'obligation de prévention et de sécurité qui lui incombe en tant qu'employeur. Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2016, La Poste, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelant la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. A titre principal, elle fait valoir que : - la requête est irrecevable, dès lors qu'elle ne présente aucun moyen contre le jugement et se borne à réitérer les arguments présentés en première instance ; - les conclusions indemnitaires n'ont été précédées d'aucune demande préalable susceptible d'avoir lié le contentieux. A titre subsidiaire, elle fait valoir que : - il appartient à l'agent de démontrer le lien de causalité certaine entre l'affection dont il souffre et l'exercice de ses fonctions ; - aucune disposition légale ou réglementaire n'impose la transmission préalable de pièces au médecin expert sollicité pour examiner l'agent ; - l'illégalité de la présence de Mme B... à la commission de réforme n'est pas caractérisée, de même que la garantie dont le requérant aurait été privé par l'absence d'un médecin spécialiste ; - le courrier du 31 janvier 2014 respecte les obligations visées dans l'article 19 du décret n° 86-442 ; - le requérant ne contredit pas plus en appel qu'en première instance les avis médicaux qui ont justifié le rejet de sa demande ; - il ne remplit pas les conditions figurant dans le tableau n° 57. A titre infiniment subsidiaire, les conclusions indemnitaires, non chiffrées, ne peuvent qu'être rejetées tout comme la demande d'expertise. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; - le décret n° 86- 442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réformes, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ; - l'arrêté du 9 janvier 1992 portant création d'un comité médical et d'une commission de réforme auprès de La Poste et de France Télécom ; - le code de la sécurité sociale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Busidan, - les conclusions de M. Roux, rapporteur public, - et les observations de Me C..., représentant La Poste. Une note en délibéré, présentée pour La Poste, a été enregistrée le 19 septembre 2017. 1. Considérant M. D..., fonctionnaire titulaire du grade d'agent technique et de gestion supérieur de La Poste, a été mis en congé pour maladie ordinaire du 16 septembre 2013 au 2 février 2014 en raison d'une pathologie à l'épaule droite, dont il a demandé l'imputabilité au service ; qu'il relève appel du jugement rendu le 5 février 2016 par le tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 2014 par laquelle la directrice des ressources humaines de la direction opérationnelle de la paye et du personnel de La Poste a refusé de reconnaître cette imputabilité au service ; Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par La Poste : 2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicable à l'introduction de l'instance devant le juge d'appel en vertu de l'article R. 811-13 du même code : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge.//(...) " ; 3. Considérant que la requête dont M. D... a saisi la Cour procède à une critique du jugement dont l'appelant sollicite l'annulation, par une motivation suffisamment précise répondant aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée à ce titre par La Poste doit être écartée ; Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires présentées par M. D..., les conclusions à fin de nomination d'un expert et les conclusions à fin de provision : 4. Considérant que, devant les premiers juges, M. D... s'était borné à demander, d'une part, l'annulation de la décision du 7 avril 2014 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à La Poste de déterminer le montant d'une allocation temporaire d'invalidité ; que, par conséquent, les conclusions indemnitaires présentées par l'intéressé dans la présente instance, tendant, d'une part, à une réparation forfaitaire des dommages corporels subis et d'un préjudice moral résultant de souffrances endurées et, d'autre part, à l'allocation d'une indemnité à raison d'une faute prétendument commise par La Poste pour non-respect de ses obligations en matière de sécurité et de protection de ses employés, sont nouvelles en appel et, par suite, irrecevables, comme le soutient La Poste ; que, dès lors, il n'y a pas lieu d'ordonner la nomination d'un expert afin d'évaluer les chefs de préjudice allégués par l'appelant ; que l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires fait obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande de provision présentée par M. D... ; que, par suite, les conclusions susvisées doivent être rejetées ; Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 7 avril 2014 : 5. Considérant qu'aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986, applicable à la commission de réforme créée auprès de La Poste par l'arrêté du 9 janvier 1992 : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité absolue des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération.//Les avis sont émis à la majorité des membres présents.// Lorsqu'un médecin spécialiste participe à la délibération conjointement avec les deux praticiens de médecine générale, l'un de ces deux derniers s'abstient en cas de vote.// La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages rapports et constatations propres à éclairer son avis.// Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instruction, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires.// Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission de réforme, si elle le juge utile, peut faire comparaître le fonctionnaire intéressé. Celui-ci peut se faire accompagner d'une personne de son choix ou demander qu'une personne de son choix soit entendue par la commission de réforme. / L'avis formulé en application du premier alinéa de l'article L. 31 du code des pensions civiles et militaires de retraite doit être accompagné de ses motifs. / Le secrétariat de la commission de réforme informe le fonctionnaire : - de la date à laquelle la commission de réforme examinera son dossier ; - de ses droits concernant la communication de son dossier et la possibilité de se faire entendre par la commission de réforme, de même que de faire entendre le médecin et la personne de son choix. / L'avis de la commission de réforme est communiqué au fonctionnaire sur sa demande (...) " ; 6. Considérant que la lettre datée du 31 janvier 2014 par laquelle M. D... a été informé de la réunion, le 27 février suivant, de la commission de réforme appelée à émettre un avis sur sa demande, indiquait que, si sa présence n'était pas nécessaire, il avait la possibilité de prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire d'un représentant, de la partie administrative de son dossier et des conclusions des rapports établis par les médecins agréés, ainsi que celle de présenter des observations écrites et des certificats médicaux ; qu'elle mentionnait également que : " la Commission, si elle le juge utile, peut vous faire comparaître. Dans ce cas vous pourriez vous faire accompagner d'une personne de votre choix ou demander qu'une personne de votre choix soit entendue par cet organisme " ; qu'ainsi, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 19 du décret du 14 mars 1986, M. D... n'a pas été informé de la possibilité dont il disposait également en vertu de ce même article de se faire entendre par la commission de réforme, ou de faire entendre le médecin et la personne de son choix ; que, dans les circonstances de l'espèce, ce défaut d'information a été de nature à priver M. D... d'une garantie ; qu'il est par suite fondé à obtenir l'annulation de la décision en litige pour ce motif ; 7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 7 avril 2014 refusant l'imputabilité au service de la pathologie pour laquelle il a été mis en congé de maladie ordinaire du 16 septembre 2013 au 2 février 2014 ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement et la décision en litige ; Sur les conclusions à fin injonction : 8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; 9. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation qui le fonde, le présent arrêt n'implique pas nécessairement que La Poste procède aux rappels de traitement et au remboursement des frais et honoraires médicaux liés à la pathologie de l'appelant, mais seulement qu'après nouvelle séance de la commission de réforme dont M. D... sera informé dans les conditions fixées à l'article 19 du décret précité, elle réexamine la demande de M. D... tendant à ce que sa maladie soit reconnue imputable au service ; qu'il y a donc lieu pour la Cour, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à La Poste de prendre, après réexamen, une nouvelle décision sur la demande de M. D..., et ce, dans le délai de quatre mois suivant la notification du présent arrêt ; Sur les frais non compris dans les dépens : 10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que qu'il soit mis à la charge de l'appelant, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que La Poste demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ; D É C I D E : Article 1er : Le jugement du 5 février 2016 du tribunal administratif de Montpellier et la décision du 7 avril 2014 de la directrice des ressources humaines de la direction opérationnelle de la paye et du personnel de La Poste rejetant la demande de M. D... tendant à l'imputabilité au service de sa pathologie sont annulés. Article 2 : Il est enjoint à La Poste, après réexamen, de reprendre une nouvelle décision sur la demande de M. D... tendant à ce que sa maladie soit reconnue imputable au service, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 4 : Les conclusions présentées par La Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E...D...et à La Poste. Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017, où siégeaient : - Mme Buccafurri, présidente, - M. Portail président-assesseur, - Mme Busidan, première conseillère. Lu en audience publique, le 26 septembre 2017. 2 N° 16MA01383
Cours administrative d'appel
Marseille
CAA de PARIS, 2ème chambre, 20/09/2017, 16PA03000, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 9 décembre 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a fixé la date de consolidation de ses troubles dépressifs au 1er mai 2013 et a refusé de rattacher à l'accident de service du 16 novembre 2010 les arrêts de travail postérieurs au 1er mai 2013. a constaté la consolidation depuis le 1er mai 2013 de son accident de service survenu le 16 novembre 2010 et l'a placée en congé de maladie ordinaire du 1er mai 2013 au 19 décembre 2014. Par un jugement n° 1500023/5-1 du 12 juillet 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête enregistrée le 30 septembre 2016, Mme C...demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 1500023/5-1 du 12 juillet 2016 du Tribunal administratif de Paris ; 2°) d'annuler la décision du 9 décembre 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a fixé la date de consolidation de ses troubles dépressifs au 1er mai 2013 et a refusé de rattacher à l'accident de service du 16 novembre 2010 les arrêts de travail postérieurs au 1er mai 2013. a constaté la consolidation depuis le 1er mai 2013 de son accident de service survenu le 16 novembre 2010 et l'a placée en congé de maladie ordinaire du 1er mai 2013 au 19 décembre 2014. Elle soutient que : - si la procédure suivie devant la commission de réforme n'était pas irrégulière en la forme, elle l'était sur le fond, en raison du manque d'impartialité ; la commission de réforme aurait du faire procéder à une expertise complémentaire, même si elle n'était pas tenue de le faire ; - la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, la consolidation de son état ni sa guérison n'étant établies ; aucun certificat final de consolidation n'a été délivré ; le médecin sur le certificat duquel s'appuie la décision contestée n'avait pas pour mission de décider de la consolidation de son état et encore moins de fixer un taux d'incapacité temporaire de travail ; la consolidation ne met pas forcément fin à la situation d'accident de service d'après la jurisprudence ; aucun médecin n'a écrit qu'elle était guérie de sa première pathologie ; la cervicalgie, qui était temporaire, n'était qu'une affectation qui s'est ajoutée à sa pathologie initiale, à savoir un état dépressif, qui perdure ; - la décision contestée est entachée d'une violation du principe de non rétroactivité. Une mise en demeure a été adressée le 18 avril 2017 au ministre de l'intérieur. Par ordonnance du 8 juin 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juin 2017. Un mémoire en défense, présenté par le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, a été enregistré le 6 juillet 2017 après clôture de l'instruction. Un mémoire, présenté par MmeC..., a été enregistré le 4 septembre 2017 après clôture de l'instruction. . Vu : - les autres pièces du dossier ; Vu : - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ; - le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Jimenez, - et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public. 1. Considérant que MmeC..., adjointe administrative principale de 2ème classe, affectée à la préfecture de la région Ile-de-France depuis le 1er février 2006, a été victime d'une agression physique et verbale par son supérieur hiérarchique, le 16 novembre 2010 dont l'imputabilité au service a été reconnue par l'administration ; qu'elle a été placée en congé maladie du 6 juillet au 18 août 2011 puis à compter du 22 septembre 2011 ; que, par un avis du 20 novembre 2014, la commission de réforme a conclu à la consolidation au 1er mai 2013 de sa dépression en lien avec l'accident de service du 16 novembre 2010 avec un taux d'incapacité permanente partielle de 10 % et a relevé que la seconde pathologie dont faisait état Mme C...relevait d'une cause étrangère ; que, par une décision du 9 décembre 2014, le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a en conséquence décidé de ne pas rattacher les certificats médicaux présentés par Mme C...depuis le 1er mai 2013 à l'accident de service du 16 novembre 2010, a estimé qu'il n'y avait toutefois pas lieu de lui demander le remboursement du traitement trop perçu à compter du 1er août 2013 et a invité l'intéressée à prendre attache avec ses services pour examiner sa situation et prévoir soit une reprise de fonctions, soit un placement en disponibilité à compter du 5 janvier 2015 ; que, Mme C...relève appel du jugement n° 1500023/5-1 du 12 juillet 2016 du Tribunal administratif de Paris rejetant sa demande d'annulation de la décision du 9 décembre 2014 ; 2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : " (...)La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. / Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instruction, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires. Le fonctionnaire est invité à prendre connaissance, personnellement ou par l'intermédiaire de son représentant, de la partie administrative de son dossier. Un délai minimum de huit jours doit séparer la date à laquelle cette consultation est possible de la date de la réunion de la commission de réforme ; il peut présenter des observations écrites et fournir des certificats médicaux. / La commission de réforme, si elle le juge utile, peut faire comparaître le fonctionnaire intéressé. Celui-ci peut se faire accompagner d'une personne de son choix ou demander qu'une personne de son choix soit entendue par la commission de réforme. (...)" ; 3. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions que la commission de réforme, saisie pour avis sur l'imputabilité au service des arrêts maladie de MmeC..., n'était pas tenue de faire procéder à une expertise complémentaire alors que trois rapports d'expertise avaient déjà porté sur la situation de l'intéressée ; que la circonstance que la commission de réforme se soit fondée sur les conclusions de l'expertise du DrB..., qui différaient de celles des deux autres experts et de son médecin traitant n'est pas de nature à remettre en cause l'impartialité de cette instance ; 4. Considérant, d'autre part, que Mme C...soutient que plusieurs vices de procédure sont révélateurs de ce que la procédure était un " simulacre " et que la commission était partiale ; qu'ainsi, aucun " résumé de l'affaire " n'a été présenté devant les membres de la commission de réforme, lorsque son mari, auquel elle avait donné procuration pour la représenter, a comparu devant ladite commission le 20 novembre 2014 ; qu'elle fait également valoir que les membres de la commission de réforme n'ont pas répondu à des questions de son mari ; qu'il n'est toutefois pas contesté par l'intéressée que son mari a pu intervenir devant la commission de réforme et faire valoir des observations en son nom ; qu'en outre, il ne résulte d'aucune disposition du décret du 14 mars 1986, ni d'aucun principe, qu'un résumé de l'affaire doive être exposé devant ladite commission, avant que l'agent concerné ou son représentant ne présente ses observations ; qu'enfin, si la requérante soutient que le procès-verbal de la séance de la commission de réforme est " quasi-vide ", elle ne précise pas quelles seraient les mentions manquantes selon elle, ni en quoi de telles omissions auraient eu une incidence sur le sens de la décision prise ou l'auraient privée d'une garantie ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la procédure devant la commission de réforme aurait été entachée de partialité doit être écarté ; 5. Considérant, en troisième lieu, que Mme C...ne peut utilement se prévaloir des termes d'une circulaire du 25 novembre 2008 du ministre de l'agriculture et de la pêche qui mentionne l'obligation de fournir un certificat médical de consolidation, laquelle ne s'applique pas à sa situation et est, en tout état de cause, dépourvue de caractère réglementaire ; qu'en outre, le moyen tiré de la méconnaissance de circulaires du ministre de l'éducation nationale, qui n'est même pas son employeur, ainsi que de circulaires du ministre de l'intérieur ou de la DGAFP, lesquelles mentionneraient l'obligation de fournir un certificat médical de consolidation, n'est pas assorti des précisions nécessaires permettant au juge d'en apprécier le bien fondé ; 6. Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que le médecin expert, le DrB..., se soit également prononcé sur le taux d'invalidité permanente de Mme C...n'est pas de nature à invalider son rapport d'expertise ni à regarder la décision en litige comme entachée d'illégalité ; 7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) " ; 8. Considérant que la date de consolidation de l'état de santé correspond au moment où l'état de santé est stabilisé, ce qui permet d'évaluer l'incapacité permanente en résultant ; qu'elle est donc sans incidence sur la persistance de l'affection dont peut souffrir la victime et, partant, sans incidence sur l'imputabilité à un accident de service des troubles en résultant et qui ont persisté après cette date ; que le droit à la prise en charge au titre de l'accident de service des arrêts de travail et des frais de soins postérieurs à la consolidation demeure toutefois subordonné au caractère direct du lien entre l'affection et l'accident de service ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...a été soignée à partir du début de l'année 2013 pour une hernie discale et une névralgie cervico-brachiale qui lui est associée ; que, si Mme C...se prévaut des conclusions d'un rapport d'expertise du docteur Champay, en date du 25 septembre 2014, indiquant que l'" on peut considérer que les certificats de rechute sont bien en relation avec l'accident et que les arrêts de travail de la patiente sont actuellement justifiés ", il ressort toutefois de ce même rapport que le praticien a estimé qu'" il n'y a pas de corrélation formelle entre l'apparition de la névralgie cervico-brachiale d'origine mécanique et le traumatisme initial " ; qu'en outre, si un certificat médical établi le 13 mai 2013 par le docteur Lapras indique qu'il est " légitime de se poser la question d'une relation entre cet accident et la hernie discale " dont souffre l'intéressée, une deuxième expertise, établie par le docteur B...le 4 mars 2014, a conclu qu'" il n'est pas possible d'améliorer l'état de santé de MmeC... ", qu'il persistait à cette date une invalidité permanente partielle de 10 % et que les prolongations à compter du mois de mai 2013 étaient liées à sa pathologie neurochirurgicale ; que, si dans un premier rapport d'expertise, en date du 17 avril 2013, le docteur Yanisse, psychiatre, a indiqué que " les arrêts de travail sont toujours en lien avec cet accident ", une telle appréciation n'est pas de nature à faire obstacle à ce que les arrêts de travail postérieurs au 1er mai 2013 soient considérés comme ne pouvant être rattachés à l'accident de service initial ; que, par suite, les arrêts de travail et les soins prescrits par son psychiatre traitant dont Mme C...a demandé la prise en charge postérieurement au 1er mai 2013 ne sauraient être regardés comme étant en relation directe et certaine avec l'accident de service du 16 novembre 2010 survenu plus de deux ans auparavant ; que, dès lors, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, aurait commis une erreur d'appréciation en estimant que la pathologie cervico-brachiale pour laquelle elle a été soignée en 2013 n'était pas imputable à l'accident de service survenu le 16 novembre 2010, en constatant la consolidation depuis le 1er mai 2013 de son état de santé et en la plaçant en congé de maladie ordinaire du 1er mai 2013 au 19 décembre 2014 ; 9. Considérant, en dernier lieu, que les décisions administratives ne peuvent légalement disposer que pour l'avenir ; que s'agissant des décisions relatives à la carrière des fonctionnaires ou des militaires, l'administration peut, en dérogation à cette règle générale, leur conférer une portée rétroactive dans la mesure nécessaire pour assurer la continuité de la carrière de l'agent intéressé ou procéder à la régularisation de sa situation ; que l'administration était tenue, à l'issue de la procédure mise en oeuvre pour apprécier la situation médicale de MmeC..., de régulariser la situation de cette dernière ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision du 9 décembre 2014 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a constaté la consolidation depuis le 1er mai 2013 de son accident de service survenu le 16 novembre 2010 et l'a placée en congé de maladie ordinaire du 1er mai 2013 au 19 décembre 2014 serait entaché d'une rétroactivité illégale ; 10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée ; DECIDE : Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée. Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie sera adressée au préfet de la région de Paris et d'Ile-de-France. Délibéré après l'audience du 6 septembre 2017, à laquelle siégeaient : - Mme Brotons, président de chambre, - Mme Appèche, président assesseur, - Mme Jimenez, premier conseiller. Lu en audience publique le 20 septembre 2017. Le rapporteur, J. JIMENEZLe président, I. BROTONS Le greffier, S. DALL'AVA La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. 2 N° 16PA03000
Cours administrative d'appel
Paris
Conseil d'État, 7ème chambre, 19/07/2017, 402893, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler le nouveau titre de pension qui lui a été délivré le 18 mars 2013 en tant qu'il ne prend pas en compte rétroactivement la revalorisation de son indice, ensemble la décision du 24 juin 2013 du directeur du service des retraites de l'Etat rejetant son recours gracieux, et de condamner l'Etat à lui payer les arrérages de sa pension d'invalidité afférents à la période du 1er août 2008 au 17 mars 2013 ou, à défaut, du 1er janvier 2009 au 17 mars 2013, en prenant en compte l'indice nouveau majoré 589, soit l'indice brut 710. Par un jugement n° 1301338 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande. M. B...s'est pourvu en cassation contre ce jugement. Par une décision n° 387981 du 14 octobre 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé le jugement du 18 décembre 2014 et a renvoyé le jugement de l'affaire au tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Par un jugement n° 1301338 du 28 juin 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M.B.... Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 août et 29 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 28 juin 2016 ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le décret n° 2008-372 du 17 avril 2008 ; - l'arrêté du 17 avril 2008 fixant l'échelonnement indiciaire applicable au corps d'encadrement et d'application de la police nationale ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Jean Sirinelli, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M.B....1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un arrêté du 21 avril 2008, a été concédée à M.B..., à compter du 1er juillet 2008, une pension d'invalidité liquidée sur la base de l'indice nouveau majoré 587 ; qu'un nouveau titre de pension lui a été délivré par un arrêté en date du 18 mars 2013, substituant, pour l'avenir, l'indice net 589 à l'indice net 587, afin de tenir compte d'une revalorisation de la grille indiciaire des fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, résultant d'un décret du 17 avril 2008 et d'un arrêté du même jour ; que, le 2 avril 2013, M. B...a demandé à l'administration le bénéfice de cette majoration à compter du 1er août 2008, ou, à défaut, du 1er janvier 2009 ; que, s'étant heurté le 24 juin 2013 à un refus de l'administration, il a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, qui, par un jugement du 28 juin 2016, a rejeté sa demande ; que M. B...se pourvoit en cassation contre ce jugement ; 2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " (...) la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 53 du même code : " Lorsque, par suite du fait personnel du pensionné, la demande de liquidation ou de révision de la pension est déposée postérieurement à l'expiration de la quatrième année qui suit celle de l'entrée en jouissance normale de la pension, le titulaire ne peut prétendre qu'aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle la demande a été déposée et aux quatre années antérieures " ; 3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que lorsque l'autorité administrative révise une pension en application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à tout moment en cas d'erreur matérielle ou dans le délai d'un an en cas d'erreur de droit, dans un sens favorable aux intérêts du pensionné, celui-ci est en droit d'obtenir le versement, à titre rétroactif, des arrérages correspondants, dans la limite prévue à l'article L. 53 du même code, que la révision soit intervenue à l'initiative de l'administration ou sur la demande de l'intéressé ; 4. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, pour rejeter la demande de M.B..., a estimé que les dispositions précitées de l'article L. 53 faisaient obstacle à ce que le titulaire d'une pension révisée puisse prétendre aux arrérages afférents à l'année en cours et aux quatre années antérieures lorsque la révision de sa pension était intervenue à l'initiative de l'administration ; qu'il a ainsi entaché son jugement d'erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. B...est fondé à en demander l'annulation ; 5. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire " ; que, le Conseil d'Etat étant saisi, en l'espèce, d'un second pourvoi en cassation, il lui incombe de régler l'affaire au fond ; 6. Considérant que, lorsqu'a été pris l'arrêté initial du 21 avril 2008 liquidant la pension de M. B...à compter du 1er juillet 2008, le décret du 17 avril 2008 relatif à la fixation du classement indiciaire des grades et emplois des personnels actifs de la police nationale et l'arrêté du 17 avril 2008 fixant l'échelonnement indiciaire applicable au corps d'encadrement et d'application de la police nationale étaient entrés en vigueur ; qu'ainsi, en concédant un nouveau titre de pension à M. B...par un arrêté en date du 18 mars 2013, portant l'indice de liquidation de sa pension de 587 à 589, l'administration doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant révisé sa pension initiale en raison de l'erreur matérielle dont celle-ci était affectée ; qu'ainsi, M. B...est en droit d'obtenir le versement, à titre rétroactif, des arrérages correspondants, dans la limite prévue à l'article L. 53 précité ; 7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'arrêté du 18 mars 2013, en tant qu'il ne prend pas en compte les arrérages auxquels a droit M.B..., ainsi que la décision du 24 juin 2013 du directeur du service des retraites de l'Etat, doivent être annulés ; que l'administration doit procéder au versement des arrérages de la pension d'invalidité de M. B... afférents à la période du 1er janvier 2009 au 17 mars 2013 ; 8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B...d'une somme de 5 000 euros pour l'ensemble de la procédure au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 28 juin 2016 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé. Article 2 : L'arrêté du 18 mars 2013, en tant qu'il ne prévoit pas le versement des arrérages auquel a droit M.B..., ainsi que la décision du 24 juin 2013 du directeur du service des retraites de l'Etat, sont annulés. Article 3 : L'Etat versera à M. B...les arrérages de sa pension d'invalidité correspondant à la différence entre le montant qui lui a été versé et le montant calculé sur la base de l'indice nouveau majoré 589, pour la période allant du 1er janvier 2009 au 17 mars 2013. Article 4 : L'Etat versera à M. B...la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.ECLI:FR:CECHS:2017:402893.20170719
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème chambre, 19/07/2017, 399473, Inédit au recueil Lebon
M. Apollon A...a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler les décisions du 1er octobre 2009 et du 6 janvier 2010 par lesquelles le directeur des pensions de La Poste et de France Télécom a refusé de lui accorder une rente viagère d'invalidité sur le fondement de l'article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, de condamner La Poste à lui verser la somme de 32 400 euros pour les sommes dues depuis l'année 2001 au titre de cette rente, et de l'indemniser de son préjudice à hauteur de 86 364 euros au titre de la perte de salaires et de 150 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence. Par un jugement n° 1000470 du 21 décembre 2012, le tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé les décisions litigieuses, enjoint au président directeur général de La Poste d'allouer à M. A...dans un délai de trois mois une rente viagère d'invalidité à compter du 27 mars 2006, condamné La Poste à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice et rejeté le surplus de ses demandes. Par un arrêt n° 13BX00640 du 10 mars 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de La Poste, annulé l'article 2 du jugement en ce qu'il fixe la date d'effet de la rente viagère d'invalidité au 27 mars 2006 et enjoint à La Poste de soumettre à la décision du ministre des finances et des comptes publics l'octroi d'une rente viagère d'invalidité à M. A... dans un délai de trois mois. Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 mai 2016 et 10 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de M. A...en ce qui concerne les conclusions relatives à l'octroi d'une rente viagère d'invalidité. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le décret n° 2009-1053 du 26 août 2009 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Thomas Odinot, auditeur, - les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M.A..., et à Me Haas, avocat de la Poste.1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...A...a été victime, le 24 juillet 1966, alors qu'il effectuait son service national, d'un accident lui occasionnant un traumatisme crânien, au titre duquel il perçoit une pension militaire d'invalidité ; qu'après avoir été titularisé à La Poste, il a été victime d'un accident de service le 22 juin 1976 ; qu'il a été radié des cadres à compter du 1er janvier 2001 pour invalidité non imputable au service ; qu'il a demandé en 2009 au service des pensions de La Poste et de France Télécom que lui soit allouée une rente viagère d'invalidité ; que, par des décisions du 1er octobre 2009 et du 6 janvier 2010, le directeur des pensions de La Poste et de France Télécom a refusé de faire droit à sa demande ; que, par un jugement du 21 décembre 2012, le tribunal administratif de La Guadeloupe, saisi par M.A..., a annulé les décisions litigieuses, enjoint au président directeur général de La Poste d'allouer à M. A...dans un délai de trois mois une rente viagère d'invalidité à compter du 27 mars 2006, condamné La Poste à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice et rejeté le surplus de ses demandes ; que, par un arrêt du 10 mars 2016 contre lequel le ministre des finances et des comptes publics se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de La Poste, annulé l'article 2 du jugement en ce qu'il fixe la date d'effet de la rente viagère d'invalidité au 27 mars 2006 et enjoint à La Poste de soumettre à la décision du ministre des finances et des comptes publics l'octroi d'une rente viagère d'invalidité à M. A...dans un délai de trois mois ; Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A...: 2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 2009-1053 du 26 août 2009 portant organisation du service des retraites de l'Etat : " I. - Le département des retraites et de l'accueil est chargé (...) 4° D'assurer la défense de l'Etat devant les juridictions administratives dans les recours contentieux relatifs aux pensions de l'Etat (...). II. - (...) Le bureau des affaires juridiques apporte son expertise en matière d'élaboration et d'application de la réglementation et est chargé de traiter le contentieux administratif des pensions de l'Etat " ; que sur le fondement de ce décret, Mme D...C..., administratrice civile et chef du bureau des affaires juridiques au service des retraites de l'Etat a reçu, par arrêté du 4 février 2016, délégation aux fins de signer, au nom du ministre des finances et des comptes publics et dans la limite de ses attributions, tous actes, arrêtés, décisions ou conventions ; que, dès lors, elle avait compétence pour signer le recours au nom du ministre ; que, par suite, le défendeur n'est pas fondé à soutenir que le recours serait irrecevable faute pour son auteur de bénéficier d'une délégation de signature régulière ; Sur le pourvoi : 3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le ministre des finances et, s'il s'agit d'un litige relatif à l'existence ou à l'étendue d'un droit à pension ou à rente viagère d'invalidité, le ministre dont relevait le fonctionnaire ou le militaire doivent être appelés à produire à la juridiction administrative leurs observations sur les pourvois formés contre les décisions prises en application du présent code " ; que la cour administrative d'appel de Bordeaux, en n'appelant pas à l'instance le ministre des finances et des comptes publics, a méconnu les dispositions de l'article R* 66 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, son arrêt doit être annulé ; Sur les conclusions de M. A...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt du 10 mars 2016 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Article 3 : Les conclusions de M. A...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances, à M. B... A...et à La Poste.ECLI:FR:CECHS:2017:399473.20170719
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 7ème chambre, 19/07/2017, 404969, Inédit au recueil Lebon
Vu les procédures suivantes : M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler, d'une part, l'arrêté du 18 février 2014 qui a annulé le titre de pension qui lui avait été concédé le 3 juillet 2006 et a fixé le montant du trop-perçu et, d'autre part, l'arrêté du 17 février 2014 lui concédant une nouvelle pension à compter du 1er décembre 2013. Par un jugement n° 1401786 du 19 octobre 2016, le tribunal administratif a fait droit à cette demande. 1° Sous le n° 404969, par un pourvoi enregistré le 10 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie et des finances demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler ce jugement ; 2°) réglant l'affaire au fond, de fixer la date d'effet de la pension de M. B... au 19 avril 2009. 2° Sous le n° 405906, par une requête enregistrée le 13 décembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie et des finances demande au Conseil d'Etat de prononcer le sursis à exécution du jugement du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Bordeaux. .................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Thomas Odinot, auditeur, - les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public. La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Corlay, avocat de M.B.... 1. Considérant que le pourvoi et la requête à fin de sursis à exécution du ministre de l'économie et des finances sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ; 2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M.B..., fonctionnaire de la direction générale de la sécurité extérieure au ministère de la défense, a été radié des cadres successivement par trois arrêtés des 6 mars 2001, 22 octobre 2007 et 30 octobre 2013, respectivement annulés, par un arrêt du 18 septembre 2007 de la cour administrative d'appel de Paris, un arrêt du 2 juillet 2013 de la même cour en tant que l'arrêté rétroagissait au 1er février 2001, et un jugement du 6 novembre 2014 du tribunal administratif de Paris ; que, par un arrêté du 17 février 2014, le ministre de l'économie et des finances a concédé à M. B...un titre de pension à effet au 1er décembre 2013 ; que, par un arrêté du 18 février 2014, le ministre a annulé un titre de pension précédemment concédé à M. B...par un arrêté du 3 juillet 2006 à effet au 1er mars 2006 ; que le ministre se pourvoit en cassation contre le jugement du 19 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé les arrêtés des 17 et 18 février 2014 et demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ; Sur le pourvoi dirigé contre le jugement attaqué : 3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " (...) la pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : / A tout moment en cas d'erreur matérielle ; / Dans un délai d'un an à compter de la notification de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère, en cas d'erreur de droit / (...) " ; que ces dispositions ne sauraient faire obstacle à ce que l'administration, qui est tenue d'assurer l'exécution des décisions de justice, annule la pension initialement concédée à un agent lorsque celle-ci se trouve, par l'effet d'une décision du juge administratif, privée de base légale ; 4. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si l'arrêté du 22 octobre 2007 radiant des cadres M. B...a été annulé par un arrêt du 2 juillet 2013 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il rétroagissait au 1er février 2001, il est demeuré en vigueur en tant qu'il porte sur la période postérieure au 22 octobre 2007 dès lors que, par son jugement du 6 novembre 2014, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 30 octobre 2013 qui avait pour effet de l'abroger ; qu'il suit de là que l'administration était tenue d'assurer l'exécution de ces décisions de justice relatives à la radiation des cadres de M.B..., qui doit être regardée comme ayant pris effet au 22 octobre 2007, en annulant le titre de pension qui lui avait été concédé à effet du 1er mars 2006 par un arrêté du 3 juillet suivant ; que, par suite, le tribunal administratif de Bordeaux a commis une erreur de droit en jugeant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite interdisaient à l'administration de réviser la pension de M. B...concédée par l'arrêté du 3 juillet 2006 et, d'autre part, que l'administration ne pouvait pas légalement annuler cet arrêté et concéder à M. B...une nouvelle pension tenant compte de la date de radiation des cadres résultant des décisions de justice précitées ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, le ministre est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ; Sur la requête à fin de sursis à exécution : 5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que par la présente décision le Conseil d'Etat s'est prononcé sur le pourvoi formé par le ministre de l'économie et des finances contre le jugement du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Bordeaux ; que, par suite, les conclusions à fin de sursis de ce jugement sont devenues sans objet ; Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;D E C I D E : -------------- Article 1er : Le jugement du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Bordeaux. Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 405906 du ministre de l'économie et des finances. Article 4 : Les conclusions de M. B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics et à M. A...B....ECLI:FR:CECHS:2017:404969.20170719
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 8ème chambre, 10/08/2017, 398397, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : M.A..., Marcel C...a demandé au tribunal des pensions de Nanterre d'annuler la décision du 29 septembre 2011 par laquelle le ministre de la défense a refusé de réviser sa pension militaire d'invalidité pour aggravation de son infirmité. Par un jugement n° 11/00044 du 15 janvier 2015, le tribunal des pensions de Nanterre a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 15/01122 du 1er décembre 2015, la cour régionale des pensions de Versailles a rejeté l'appel formé par M. C...contre ce jugement. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 1er avril, 23 mai et 4 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler cet arrêt ; 2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. Vincent Uher, maître des requêtes en service extraordinaire, - les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Ricard, avocat de M. C...; Considérant ce qui suit : 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C... a subi une blessure par balle le 14 juin 1959 en Algérie, causant une fracture de l'extrémité proximale du fémur gauche. Par arrêté du 9 juin 1981, il a obtenu une pension militaire d'invalidité de 30 % pour séquelles de transfixion de la cuisse gauche au tiers supérieur, douleurs alléguées, exostose volumineuse, douloureuse à la palpation à la face postérieure du fémur gauche, visible radiologiquement. Par demande du 31 mars 2010, il a sollicité la révision de sa pension pour aggravation de son infirmité, sur le fondement des dispositions de l'article L. 29 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. Par décision du 29 septembre 2011, le ministre de la défense a rejeté cette demande. Le tribunal des pensions de Nanterre a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision. M. C...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er décembre 2015 par lequel la cour régionale des pensions de Versailles a confirmé ce jugement. 2. En estimant que rien dans l'expertise médicale établie par le docteur Reverberi à la demande du tribunal des pensions de Nanterre ne démontrait que l'augmentation de l'invalidité de M. C...à cette date était exclusivement due à sa blessure d'origine, alors que ce médecin y relevait que la coxarthrose développée par le requérant était secondaire à sa fracture de l'extrémité proximale du fémur gauche d'origine balistique et que l'évolution de cette blessure s'était faite par l'apparition d'une coxarthrose invalidante, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, M. C...est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. 3. M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, dès lors que Me B... Ricard, avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Me B... Ricard. D E C I D E : -------------- Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions de Versailles est annulé. Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour régionale des pensions de Paris. Article 3 : L'Etat versera à Me B...Ricard, avocat de M. A... C..., une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Ricard renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat. Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...C...et à la ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2017:398397.20170810
Conseil d'Etat
Conseil d'État, 2ème chambre, 12/07/2017, 397561, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 11 avril et 8 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Comité Harkis et Vérité demande au Conseil d'Etat : 1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015 relative à la partie législative du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, notamment les articles L. 612-1 à L. 612-5 du code annexés à cette ordonnance ; 2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du secrétaire d'Etat chargé des anciens combattants et de la mémoire en date du 13 janvier 2016 portant nomination au conseil d'administration de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la Constitution ; - le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ; - le code de justice administrative ; Après avoir entendu en séance publique : - le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat, - les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public, Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'ordonnance du 28 décembre 2015 relative à la partie législative du code des pensions militaires et d'invalidité et des victimes de guerre : 1. Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au pouvoir réglementaire de consulter, préalablement à l'édiction de l'ordonnance attaquée, les associations membres du groupe dit " G 12 harki " ; 2. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 13 et 19 de la Constitution, les ordonnances sont signées par le Président de la République et contresignées par le Premier ministre ainsi que, le cas échéant, par les ministres responsables ; que les ministres responsables sont ceux auxquels incombent, à titre principal, la préparation et l'application des ordonnances dont il s'agit ; que la circonstance que l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre bénéficie, pour l'exercice de ses missions, du concours de services placés sous l'autorité du ministre de l'intérieur n'est pas de nature à charger ce ministre, à titre principal, de la préparation et de l'application de l'ordonnance attaquée et de le faire ainsi regarder comme " responsable " au sens de ces dispositions ; que le moyen tiré du défaut de contreseing de ce ministre doit donc être écarté ; 3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Comité Harkis et Vérité n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque ; Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2016 portant nomination au conseil d'administration de l'Office national des anciens combattant et victimes de guerre : 4. Considérant que l'association Comité Harkis et Vérité ne justifie pas d'un intérêt direct et certain lui donnant qualité pour demander l'annulation de l'arrêté du 13 janvier 2016 portant nomination au conseil d'administration de l'Office national des anciens combattant et victimes de guerre ; que, dès lors, ses conclusions dirigées contre cet arrêté ne sont manifestement pas recevables et doivent être rejetées ;D E C I D E : -------------- Article 1er : La requête de l'association Comité Harkis et Vérité est rejetée. Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Comité Harkis et Vérité et à la ministre des armées.ECLI:FR:CECHS:2017:397561.20170712
Conseil d'Etat
CAA de BORDEAUX, , 29/06/2017, 15BX02705, Inédit au recueil Lebon
Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 23 octobre 2009 du recteur de l'académie de Poitiers rejetant sa demande d'admission à la jouissance immédiate de sa pension, d'enjoindre à cette autorité de réexaminer sa demande et de liquider sa pension de retraite majorée de la bonification pour enfants à compter de sa radiation des cadres, de condamner l'Etat ou le service de pension compétent à lui verser la somme provisionnelle de 20 000 euros, ou à titre subsidiaire et avant dire droit, la somme de 115 850 euros en raison des divers préjudices subis avec intérêt à taux légal et capitalisation à compter de la première demande et, à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle relative à la conformité des nouvelles dispositions de droit interne avec l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne et ses directives d'application relatives aux régimes professionnels de sécurité sociale et de renvoyer au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite tel que modifié par l'article 136 de la loi de finances rectificatives du 30 décembre 2004. Par une ordonnance n° 0902802, 1100641, 1202867 du 12 juin 2015, le vice-président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté ces demandes. Procédure devant la cour : Par une requête enregistrée le 31 juillet 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour : 1°) d'annuler cette ordonnance du vice-président du tribunal administratif de Poitiers du 12 juin 2015 ; 2°) d'annuler la décision du recteur de l'académie de Poitiers du 23 octobre 2009 ; 3°) de condamner " Orange, et ou le service de pension de La Poste ou la CNRACL " à lui verser une les sommes de 55 796 euros au titre des bonifications capitalisées à compter du 1er septembre 2008, et de 45 054 euros au titre du rappel sur pensions et/ou bonifications non-perçues à compter de sa première demande du 24 septembre 2009 augmentée des six mois réglementaires jusqu'au 1er avril 2015, somme à parfaire et à actualiser à raison de 214 euros par mois, ainsi qu' une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de cette décision et une indemnité de 10 000 euros au titre des frais de défense engagés en vain ; 4°) à titre subsidiaire d'ordonner au ministre des finances et/ou à la CNRACL la production des données statistiques exploitées et des méthodes utilisées pour affirmer que les écarts de pension entre hommes et femmes fonctionnaires varient de 9,8 % jusqu'à 23 % en fonction du nombre d'enfants, et de désigner un expert pour vérifier cette statistique ; 5°) de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la double question préjudicielle relative à l'impartialité de la formation contentieuse du Conseil d'Etat ayant statué dans la décision n° 372426 Quintanel du 27 mars 2015 au regard de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne et au point de savoir si cette décision a méconnu les principes de confiance légitime et de primauté du droit communautaire ; 6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme des entiers dépens, dont les frais d'expertise, et la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - la décision n° 372426 Quintanel du Conseil d'Etat 27 mars 2015 a été prise par une formation contentieuse dont la composition méconnaît le principe d'impartialité de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne et le droit au procès équitable protégé par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, certains membres de cette formation de jugement ayant pris part à des avis rendus antérieurement dans les sections administratives du Conseil sur les dispositions en litige ; - cette décision du Conseil d'Etat se fonde sur des données statistiques non vérifiables en méconnaissance du principe de l'égalité des armes ; ces données n'apparaissent dans aucune donnée publique accessible et leur utilisation constitue un procédé déloyal ; - la bonification pour enfant prévue par les dispositions de l'article 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite issues de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 et de l'article R. 37 de ce même code modifié par le décret n° 2005-449 du 10 mai 2005, accordée sous condition d'interruption d'activité n'est pas un critère étranger au sexe des travailleurs ; les juridictions civiles ont estimé que ce droit à jouissance immédiate à la retraite dans le cadre des régimes spéciaux, qui a pour effet d'accorder aux fonctionnaires féminins un avantage en fin de carrière, est indirectement discriminatoire ; la condition d'interruption d'activité est ouverte systématiquement aux femmes dans une proportion telle que les hommes ne peuvent de fait en bénéficier et qu'elle aggrave les inégalités ; - de nombreuses statistiques tendent, au contraire de ce qu'affirme le ministre, à démontrer que l'interruption d'activité a un faible impact sur le niveau de salaire et de pension dans la fonction publique ; c'est en revanche le caractère partiel ou complet qui a le plus fort impact sur le niveau de pension et ce temps partiel concerne les femmes à 80 % ; - les dispositions des articles L. 12 et R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite instituent une discrimination indirecte en violation du droit de l'Union européenne, et notamment des dispositions du paragraphe 4 de l'article 141/154 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt Léone C-173/13 du 17 juillet 2014 ; - ces dispositions ainsi que la décision du Conseil d'Etat citée plus haut méconnaissent le principe de confiance légitime et de primauté du droit communautaire ; la décision du Conseil d'Etat du 27 mars 2015 est contraire à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ; - la responsabilité de l'Etat est engagée du fait de la violation caractérisée par la juridiction administrative des traités européens et des principes des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par un mémoire enregistré le 14 octobre 2015 le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. A...n'est fondé. Par un mémoire enregistré le 19 octobre 2015, le ministre de la décentralisation et de la fonction publique a informé la cour qu'il n'entendait pas produire d'observations. Par ordonnance du 5 octobre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2016 à 12h00. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; - la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail (refonte) ; - le code des pensions civiles et militaires de retraite ; - la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ; - la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ; - la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ; - le décret n° 2010-1741 du 30 décembre 2010 ; - le code de justice administrative. Considérant ce qui suit : 1. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue de l'article 3 du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, les premiers vice-présidents des tribunaux et des cours, le vice-président du tribunal administratif de Paris, les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours et les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller désignés à cet effet par le président de leur juridiction peuvent, par ordonnance : (...)5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l'article L. 761-1 ou la charge des dépens. (...) Les présidents des cours administratives d'appel, les premiers vice-présidents des cours et les présidents des formations de jugement des cours peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel, les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 5° du présent article ainsi que, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. " Ces dernières dispositions sont applicables, en vertu de l'article 35 du décret n° 2016-1480, à compter du 1er janvier 2017, y compris pour les requêtes enregistrées avant cette date. 2. M.A..., né le 14 novembre 1951, ancien fonctionnaire du ministère de l'éducation nationale, a saisi, le 24 septembre 2009, son administration d'une demande de départ anticipé à la retraite avec jouissance immédiate du droit de pension après avoir accompli quinze années de services effectifs, sur le fondement des dispositions du 3° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que du bénéfice de la bonification pour enfants prévue par les dispositions de l'article L. 12 du même code. Cette demande a été rejetée par une décision du 23 octobre 2009 du recteur de l'académie de Poitiers au motif que l'intéressé ne remplissait pas les conditions posées par ces dispositions. M. A...relève appel de l'ordonnance du 12 juin 2015 par laquelle le vice-président tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ainsi que ses conclusions indemnitaires. 3. Pour rejeter, par l'ordonnance attaquée, les demandes de M.A..., le vice-président du tribunal administratif de Poitiers s'est fondé sur les motifs énoncés aux points suivants : En ce qui concerne la bonification pour enfant : 4. Aux termes de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction, applicable au litige, issue du I de l'article 48 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après : (...) b) Pour chacun de leurs enfants légitimes et de leurs enfants naturels nés antérieurement au 1er janvier 2004, pour chacun de leurs enfants dont l'adoption est antérieure au 1er janvier 2004 et, sous réserve qu'ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt-et-unième anniversaire, pour chacun des autres enfants énumérés au II de l'article L. 18 dont la prise en charge a débuté antérieurement au 1er janvier 2004, les fonctionnaires et militaires bénéficient d'une bonification fixée à un an, qui s'ajoute aux services effectifs, à condition qu'ils aient interrompu leur activité dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat (...) ". Ce même article, dans sa rédaction issue de l'article 52 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 dispose que : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après :(...)b) Pour chacun de leurs enfants légitimes et de leurs enfants naturels nés antérieurement au 1er janvier 2004, pour chacun de leurs enfants dont l'adoption est antérieure au 1er janvier 2004 et, sous réserve qu'ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt-et-unième anniversaire, pour chacun des autres enfants énumérés au II de l'article L. 18 dont la prise en charge a débuté antérieurement au 1er janvier 2004, les fonctionnaires et militaires bénéficient d'une bonification fixée à un an, qui s'ajoute aux services effectifs, à condition qu'ils aient interrompu ou réduit leur activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". En vertu des dispositions du 1° de l'article R. 13 du même code, dans sa version applicable au litige, le bénéfice des dispositions précitées du b de l'article L. 12 du même code est subordonné à une interruption d'activité d'une durée continue au moins égale à deux mois dans le cadre d'un congé pour maternité, d'un congé pour adoption, d'un congé parental, d'un congé de présence parentale, ou d'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans. 5. Aux termes de l'article 141 du traité instituant la Communauté européenne, devenu l'article 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Chaque État membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins pour un même travail ou un travail de même valeur. 2. Aux fins du présent article, on entend par rémunération, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier. L'égalité de rémunération, sans discrimination fondée sur le sexe, implique : a) que la rémunération accordée pour un même travail payé à la tâche soit établie sur la base d'une même unité de mesure ; b) que la rémunération accordée pour un travail payé au temps soit la même pour un même poste de travail (...). 4. Pour assurer concrètement une pleine égalité entre hommes et femmes dans la vie professionnelle, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un État membre de maintenir ou d'adopter des mesures prévoyant des avantages spécifiques destinés à faciliter l'exercice d'une activité professionnelle par le sexe sous-représenté ou à prévenir ou compenser des désavantages dans la carrière professionnelle ". Il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, que le principe d'égalité des rémunérations s'oppose non seulement à l'application de dispositions qui établissent des discriminations directement fondées sur le sexe mais également à l'application de dispositions qui maintiennent des différences de traitement entre travailleurs masculins et travailleurs féminins sur la base de critères non fondés sur le sexe dès lors que ces différences de traitement ne peuvent s'expliquer par des facteurs objectivement justifiés et étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe et qu'il y a discrimination indirecte en raison du sexe lorsque l'application d'une mesure nationale, bien que formulée de façon neutre, désavantage en fait un nombre beaucoup plus élevé de travailleurs d'un sexe par rapport à l'autre. Par un arrêt du 17 juillet 2014, la Cour de justice de l'Union européenne, statuant sur renvoi préjudiciel de la cour administrative d'appel de Lyon, a estimé que l'article 141 doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu'un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l'objectif invoqué et nécessaire à cet effet, un régime de bonification de pension tel que celui résultant des dispositions des articles L. 12 et R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, en tant qu'elles prévoient la prise en compte du congé de maternité dans les conditions ouvrant droit à l'octroi de la bonification en cause, introduirait une différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins contraire à cet article. Elle a cependant rappelé que, s'il lui revenait de donner des " indications " " de nature à permettre à la juridiction nationale de statuer ", il revient exclusivement au juge national, seul compétent pour apprécier les faits et pour interpréter la législation nationale, de déterminer si et dans quelle mesure les dispositions concernées sont justifiées par de tels facteurs objectifs. 6. Si, pendant son congé de maternité, la femme fonctionnaire ou militaire conserve légalement ses droits à avancement et à promotion et qu'ainsi la maternité est normalement neutre sur sa carrière, il ressort néanmoins de l'ensemble des pièces produites devant le juge du fond et des données disponibles qu'une femme ayant eu un ou plusieurs enfants connaît, de fait, une moindre progression de carrière que ses collègues masculins et perçoit en conséquence une pension plus faible en fin de carrière. Les arrêts de travail liés à la maternité contribuent à empêcher une femme de bénéficier des mêmes possibilités de carrière que les hommes. De plus, les mères de famille ont dans les faits plus systématiquement interrompu leur carrière que les hommes, ponctuellement ou non, en raison des contraintes résultant de la présence d'un ou plusieurs enfants au foyer. Ainsi, selon les données d'une étude statistique du service des retraites de l'Etat produite par le ministre des finances et des comptes publics, si une femme fonctionnaire sans enfant perçoit à la fin de sa carrière une pension moyenne supérieure de 2,6 % à celle des hommes également sans enfant, les femmes avec enfants perçoivent en moyenne des pensions inférieures à celles des hommes ayant le même nombre d'enfants. Ces écarts entre les pensions perçues par les femmes et les hommes s'accroissent avec le nombre d'enfants. Les pensions des femmes fonctionnaires, rapportées à celles des hommes, sont ainsi inférieures de 9,8 % pour un enfant, de 11,5 % pour deux enfants, de 13,3 % pour trois enfants et de 23 % pour quatre enfants. Si la bonification par enfant était supprimée, les écarts passeraient à 12,7 % pour un enfant, 17,3 % pour deux enfants, 19,3 % pour trois enfants et à près de 30 % pour quatre enfants. Le niveau de la pension ainsi constaté des femmes ayant eu des enfants résulte d'une situation passée, consécutive à leur déroulement de carrière, qui ne peut être modifiée au moment de la liquidation. Cette bonification n'a pas pour objet et ne pouvait avoir pour effet de prévenir les inégalités sociales dont ont été l'objet les femmes mais de leur apporter, dans une mesure jugée possible, par un avantage de retraite assimilé à une rémunération différée au sens de l'article 157 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, une compensation partielle et forfaitaire des retards et préjudices de carrière manifestes qui les ont pénalisées. 7. Par la loi du 21 août 2003, le législateur a modifié les dispositions sur le fondement desquelles ont été prises les dispositions litigieuses, en ne maintenant le bénéfice automatique de la bonification que pour les femmes fonctionnaires et militaires mères d'enfants nés avant le 1er janvier 2004. Ce faisant, le législateur a entendu maintenir à titre provisoire, en raison de l'intérêt général qui s'attache à la prise en compte de cette situation et à la prévention des conséquences qu'aurait la suppression des dispositions du b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite sur le niveau des pensions servies aux assurées dans les années à venir, ces dispositions destinées à compenser des inégalités normalement appelées à disparaître. 8. Dans ces conditions, la différence de traitement dont bénéficient indirectement les femmes mères d'enfants nés avant le 1er janvier 2004 par le bénéfice systématique de la bonification pour enfant tel qu'il découle de la prise en compte du congé maternité, en application des dispositions combinées du b de l'article L. 12 et de l'article R. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, est objectivement justifiée par un objectif légitime de politique sociale. Elle est propre à garantir cet objectif et nécessaire à cet effet ; que par suite, les dispositions en cause ne méconnaissent pas le principe d'égalité tel que défini à l'article 157 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de ce que lesdites dispositions auraient contrevenu à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 1er du premier protocole additionnel de cette convention, eu égard à l'intérêt général qui résulte de l'objectif légitime de politique sociale. En ce qui concerne le départ anticipé à la retraite : 9. Aux termes du 3° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue de l'article 136 de loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, applicable au litige, et aux termes des dispositions transitoires prévues à l'article 44 de la loi du 9 novembre 2010 : " I. - La liquidation de la pension intervient : (....) 3° Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / Sont assimilées à l'interruption d'activité mentionnée à l'alinéa précédent les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation obligatoire dans un régime de retraite de base, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Sont assimilés aux enfants mentionnés au premier alinéa les enfants énumérés au II de l'article L. 18 que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article. (...) ". En vertu des I et II de l'article R. 37 du même code, applicable au litige, le bénéfice des dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 24 est subordonné à une interruption d'activité d'une durée continue au moins égale à deux mois dans le cadre d'un congé pour maternité, d'un congé de paternité, d'un congé pour adoption, d'un congé parental, d'un congé de présence parentale, ou d'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans. Par l'arrêt déjà cité du 17 juillet 2014, la Cour de justice de l'Union européenne a estimé, conformément à sa jurisprudence, que l'article 141 doit être interprété en ce sens que, sauf à pouvoir être justifié par des facteurs objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur le sexe, tels qu'un objectif légitime de politique sociale, et à être propre à garantir l'objectif invoqué et nécessaire à cet effet, un régime de départ anticipé à la retraite tel que celui résultant des dispositions des articles L. 24 et R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite, en tant qu'elles prévoient la prise en compte du congé maternité dans les conditions ouvrant droit au bénéfice en cause introduirait également une différence de traitement entre les travailleurs féminins et les travailleurs masculins contraire à cet article. 10. Cependant, ainsi qu'il a été dit au point 10 de la présente décision, que la Cour de justice de l'Union européenne a rappelé que, s'il lui revenait de donner des " indications " " de nature à permettre à la juridiction nationale de statuer ", il revient exclusivement au juge national, qui est seul compétent pour apprécier les faits et pour interpréter la législation nationale, de déterminer si et dans quelle mesure les dispositions concernées sont justifiées par de tels facteurs objectifs. Par la loi du 9 novembre 2010, le législateur a modifié les dispositions sur le fondement desquelles a été prise la décision attaquée, en procédant à une extinction progressive de la mesure pour les parents de trois enfants. Ce faisant, le législateur a entendu non pas prévenir les inégalités de fait entre les hommes et les femmes fonctionnaires et militaires dans le déroulement de leur carrière et leurs incidences en matière de retraite telles qu'exposées au point 11 mais compenser à titre transitoire ces inégalités normalement appelées à disparaître. Dans ces conditions, la disposition litigieuse relative au choix d'un départ anticipé avec jouissance immédiate, prise, pour les mêmes motifs que la bonification pour enfant prévue par les dispositions combinées des articles L. 12 et R. 37, afin d'offrir, dans la mesure du possible, une compensation des conséquences de la naissance et de l'éducation d'enfants sur le déroulement de la carrière d'une femme, en l'état de la société française d'alors, est objectivement justifiée par un objectif légitime de politique sociale. Elle est propre à garantir cet objectif et nécessaire à cet effet. Par suite, les dispositions en cause ne méconnaissent pas le principe d'égalité des rémunérations tel que défini à l'article 157 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de ce que lesdites dispositions auraient contrevenu, d'une part, à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et, d'autre part, à l'article 1er du premier protocole additionnel de cette convention eu égard à l'intérêt général qui résulte de l'objectif légitime de politique sociale. En ce qui concerne la rétroactivité de la loi du 30 décembre 2004 et du décret du 10 mai 2005 : 11. En premier lieu, les droits du fonctionnaire relatifs au point de départ de la jouissance de sa pension de retraite doivent être légalement appréciés à la date à compter de laquelle le fonctionnaire demande à bénéficier de cette pension. Il en résulte que les droits à pension de M. A...doivent s'apprécier au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables à la date du 24 septembre 2009. Cette date est postérieure à celle de l'entrée en vigueur des dispositions du I, alinéa 3° de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite précitées issu de la loi du 30 décembre 2004, intervenue le 12 mai 2005, date d'entrée en vigueur du décret d'application du 10 mai 2005. Ainsi, alors qu'il n'est pas fait application à la demande de M. A...du II du même article 136 prévoyant que les dispositions du I sont applicables aux demandes présentées avant l'entrée en vigueur de cette loi, le requérant ne peut utilement soutenir que la décision attaquée serait fondée sur des dispositions législatives et réglementaires contraires, en raison d'un effet rétroactif, aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combinées à celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention. Pour les mêmes motifs, le requérant ne peut utilement soutenir que les dispositions litigieuses méconnaîtraient le principe de non-rétroactivité des lois. 12. En second lieu, l'incompatibilité de l'application rétroactive des dispositions de l'article 136 de la loi du 30 décembre 2004 et du décret du 10 mai 2005 avec les stipulations du §1 de l'article 6 et de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantissent le droit à un procès équitable et à un recours effectif ne peut être utilement invoquée que par les fonctionnaires qui, à la date d'entrée en vigueur des dispositions litigieuses, avaient, à la suite d'une décision leur refusant le bénéfice du régime antérieurement applicable, engagé une action contentieuse en vue de contester la légalité de cette décision. M. A...s'est vu refuser l'admission à la retraite anticipée le 23 octobre 2009. Ainsi, un tel moyen est inopérant. 13. Il y a lieu, par adoption des motifs précités de l'ordonnance attaquée, d'écarter les mêmes moyens exposés par M. A...dans sa requête. Sur les autres moyens : 14. Il résulte de ce qui précède que M.A..., pour contester le régime des pensions résultant des dispositions de la loi du 21 août 2003 et du décret du 26 décembre 2003, ne peut se prévaloir d'aucune méconnaissance, ni a fortiori d'aucune violation manifeste par le législateur ou même le pouvoir réglementaire des stipulations européennes qu'il a invoquées et notamment de celles interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne dans l'arrêt " Leone " du 17 juillet 2014. Par conséquent, M. A...n'est pas non plus fondé à soutenir que la responsabilité de l'Etat devrait être engagée du fait de l'application de ces dispositions par les juridictions administratives. 15. Il résulte encore des motifs exposés aux points 5 à 8 ci-dessus, et notamment au point 5 du présent arrêt qui se réfère aux points 56 et 89 de l'arrêt " Leone " de la Cour de justice, que l'office du juge national, seul compétent pour apprécier les faits et interpréter la législation nationale, ne nécessite pas, en l'espèce, le renvoi à la Cour de justice d'une nouvelle question préjudicielle, compte tenu de l'interprétation du droit européen fournie par cette dernière. 16. Enfin, le présent arrêt ne saurait être regardé comme étant pris pour l'application de la décision n° 372426 rendue par le Conseil d'Etat le 27 mars 2015. Le moyen selon lequel le Conseil d'Etat aurait alors statué au contentieux dans une formation de jugement irrégulièrement composée est en tout état de cause inopérant. 17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée ni de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de nouvelles questions préjudicielles, que la requête de M. A...est manifestement dépourvue de fondement et peut dès lors être rejetée selon la procédure prévue par les dispositions précitées du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice présentées par M. A... doivent également être rejetées. ORDONNE : Article 1er : La requête de M. A...est rejetée. Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B...A..., au ministre de l'éducation nationale, et au ministre de l'action et des comptes publics. Fait à Bordeaux, le 29 juin 2017. Le président de la 4ème chambre Philippe Pouzoulet 9 N° 15BX02705
Cours administrative d'appel
Bordeaux